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2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde.
6 Je demande au Greffier [comme interprété] de citer l'affaire.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
8 Il s'agit de l'affaire IT-03-69-T, le Procureur contre Jovica Stanisic et
9 Franko Simatovic.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de commencer, j'ai quelques
11 questions préliminaires. Tout d'abord, il s'agit d'une déclaration
12 concernant les requêtes demandant le versement direct des pièces, c'est
13 quelque chose qui a déjà été communiqué aux parties, mais je vais en donner
14 lecture pour le compte rendu d'audience. Je vais commencer tout de suite.
15 Donc nous allons parler de l'admission directe à l'audience des pièces.
16 Le 21 novembre 2011, la Défense de M. Stanisic a informé de façon
17 informelle les Juges de leur intention de demander un versement direct des
18 pièces par une requête. On a discuté de cela en audience, y compris lors de
19 l'audience du 24 novembre et du 7 décembre 2011, au moment où la Défense de
20 M. Stanisic a dit clairement qu'elle avait l'intention de déposer trois
21 requêtes de versement direct des pièces, dont deux comprenaient 800
22 documents.
23 Le 7 décembre 2011, les Juges ont exprimé leur inquiétude quant à une
24 requête comportant un si grand nombre de documents déposés si tardivement
25 et a demandé aux parties d'essayer de se mettre d'accord par rapport à
26 certains sujets qui se trouvent dans ces documents.
27 Le 13 janvier 2012, les parties ont informé de façon informelle la Chambre
28 sur l'état de leurs discussions. Et les Juges vont faire part de leurs
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1 observations à ce sujet.
2 Comme il a déjà été indiqué, la Défense Stanisic a indiqué que ces requêtes
3 comprennent au moins 800 documents et qu'ils demandent à être versés. Les
4 Juges prennent note du fait que le nombre total des documents de la
5 Défense, comprenant les deux équipes, compte à peu près 650 documents. La
6 Chambre prend note du fait que la Défense de M. Stanisic est arrivée à sa
7 fin, ou pratiquement à la fin.
8 Et quand le Procureur, pendant sa présentation de ses moyens de preuve, a
9 présenté une requête de versement direct comprenant un grand nombre de
10 documents, les Juges ont exprimé leur inquiétude quant au fait d'être
11 inondés de centaines de documents sans recevoir au préalable des
12 informations précises quant à leur importance par rapport aux arguments du
13 Procureur. La Chambre note de plus qu'elle aurait préféré recevoir des
14 documents par le biais des témoins. C'est quelque chose qui peut se trouver
15 sur les pages 3 685 à 3 690. Et ceci s'applique aussi à la Défense.
16 Dans les affaires jugées par ce Tribunal, il se peut qu'un très grand
17 nombre de documents peuvent être considérés pertinents et ayant une valeur
18 probante; cependant, il appartient aux parties d'organiser la présentation
19 de leurs moyens de preuve de sorte que les Juges soient en mesure de les
20 prendre en compte de façon adéquate. Les parties doivent sélectionner les
21 documents les plus pertinents qui ont une valeur probante la plus élevée et
22 indiquer aussi aux Juges quelles sont les parties pertinentes de ces
23 documents par rapport à leurs arguments. Quand ils ne font pas ceci, ils
24 créent un problème d'organisation et d'ordre pratique pour les parties qui
25 doivent répondre mais aussi aux Juges. Ce qui est encore plus important, eh
26 bien, s'il faut faire cela, ils courent le risque que les Juges ne vont pas
27 prendre en considération la pièce en question.
28 Par exemple, nous pouvons citer l'exemple d'un document : un rapport
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1 émanant d'un gouvernement décrit toute une série des événements qui peut
2 être utilisé pour démontrer qu'une certaine institution gouvernementale
3 possédait des informations par rapport à certains événements. Cependant, le
4 même document peut être utilisé pour établir que la même institution avait
5 pris des mesures pour répondre à ces événements. De plus, ou de façon
6 alternative, ce rapport peut être utilisé pour démontrer que toute une
7 série d'événements s'est effectivement produite.
8 De l'autre côté, la partie qui demande le versement des documents
9 aurait pu tout simplement avoir l'intention d'utiliser ce document pour
10 prouver que l'auteur du rapport avait travaillé à un moment donné dans
11 cette institution gouvernementale.
12 La Chambre s'attend à ce que la partie qui demande le versement d'un
13 tel document indique précisément quelles sont les informations dans le
14 document qui sont importantes pour la partie en question. Quand un document
15 est versé par le biais d'un témoin, c'est au cours du questionnement que
16 ces informations se précisent. Et quand un document est versé directement,
17 eh bien, la partie doit l'expliquer aux Juges au moment du versement.
18 Les Juges notent que les parties ont fait un certain progrès quant
19 aux requêtes futures éventuelles de la Défense Stanisic. Dans les
20 paragraphes 5 et 7 de la communication informelle du 13 janvier 2012, les
21 parties ont indiqué qu'un certain nombre de documents ont fait l'objet d'un
22 accord. Les Juges sont contents de l'entendre.
23 Dans une communication informelle, les parties indiquent qu'il
24 pourrait y avoir des désaccords quant aux conclusions à tirer de certains
25 documents. Cependant, ceci ne devrait pas représenter un obstacle pour se
26 mettre d'accord sur le contenu du document, puisque les parties peuvent
27 parler de l'interprétation et des conclusions à tirer de certains documents
28 au moment de leur conclusion dans le cadre du réquisitoire ou de leur
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1 plaidoirie.
2 En ce qui concerne la taille des requêtes futures, requêtes portant
3 le versement direct des pièces, à ce stade de la procédure, la Chambre
4 s'attend à ce que les parties traitent de cette question en priorité. A
5 partir du moment où une requête a été déposée, les autres parties ont
6 besoin d'un certain temps pour répondre et les Juges ont besoin du temps
7 pour en tenir compte. Les Juges s'attendent à ce que les premières mesures
8 soient prises au plus tard le 17 février 2012, sous forme des faits qui ont
9 fait l'objet d'un accord ou bien sous forme d'une requête directe par
10 laquelle on demande le versement de ces documents et dans laquelle on
11 énumère les documents qui n'ont pas fait l'objet d'un accord. Les premières
12 mesures ne doivent pas concerner toute la documentation, et les Juges vont
13 décider d'autres délais plus tard.
14 En ce qui concerne les parties -- les documents dont on a déjà
15 discuté, les Juges s'attendent à ce que les réponses arrivent le 2 mars
16 2012 au plus tard.
17 Avec ceci, se conclut la déclaration des Juges.
18 M. JORDASH : [interprétation] Eh bien, je suis désolé du timing qui
19 n'est pas le mieux choisi, mais nous voulions aujourd'hui communiquer au
20 Procureur une nouvelle requête portant sur les documents à verser
21 directement. Cette fois-ci, il s'agit de 330 documents, et il s'agit d'une
22 requête très importante puisqu'elle contient des procès-verbaux des
23 sessions de travail du gouvernement et nous souhaitons nous appuyer sur ce
24 document. Je sais que c'est une demande qui n'est pas simple.
25 Et en ayant tenu compte de votre instruction, nous allons voir avec
26 le Procureur de quelle façon nous allons pouvoir éventuellement réduire le
27 nombre de documents. Mais c'est vrai que les problèmes se posent quand il
28 s'agit de réduire les procès-verbaux du gouvernement. Donc on va essayer de
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1 le faire et on va essayer de trouver un moyen de le faire.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous parlez de procès-verbaux,
3 tout d'abord il faudrait trouver la partie pertinente du document, parce
4 que souvent dans ces procès-verbaux on traite de différentes questions qui
5 ne sont pas toutes pertinentes.
6 Mais je vous laisse faire, et essayez de vous mettre d'accord. Donc
7 c'est un premier pas à prendre. Donc il est important de faire un choix --
8 de procéder à un choix rigoureux des informations des documents.
9 M. JORDASH : [aucune interprétation]
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est la partie qui demande le versement
11 qui doit le faire en premier lieu, et ceci va améliorer vos chances de
12 réussite.
13 M. JORDASH : [interprétation] Merci. Il me semble qu'il serait utile
14 d'avoir une brève audience à ce sujet parce que j'ai l'impression que l'on
15 va vers une impasse, parce que cela fait plusieurs mois que le problème se
16 profile. Parce que les procès-verbaux des sessions de travail d'un
17 gouvernement racontent souvent en détail les décisions prises, qui prend
18 les décisions, l'approvisionnement ou les filières d'approvisionnement
19 entre la RFY et les Serbes de Bosnie. Donc ces documents peuvent être
20 pertinents tout entiers, à moins que le Procureur n'indique très clairement
21 quels sont leurs arguments.
22 Parce que s'ils disent que ces accusés étaient responsables d'à peu près
23 tout, que c'étaient eux qui décidaient, qui donnaient des instructions, et
24 cetera, eh bien, il nous est très difficile vu que l'on possède les
25 documents qui montrent qu'il y avait de nombreuses personnes qui étaient
26 responsables aussi de réduire ces documents et d'enlever des parties
27 pertinentes de ces documents. Donc il conviendrait que le Procureur soit
28 plus précis, et donc, dans ce cas, on ne serait pas obligés de répondre à
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1 tous les points du Procureur et de répondre à toutes les allégations. Il
2 n'a vraiment pas besoin d'alléguer autant.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez proposé que l'on tienne une
4 audience brève à ce sujet. Je vois que vous avez déjà commencé avec
5 l'audience.
6 M. JORDASH : [aucune interprétation]
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons réfléchir à cela. Tout
8 d'abord, vous devez dire au Procureur quels sont les documents en question.
9 Et puis, ne préjugez de rien, s'il vous plaît. On va voir où vous en
10 arrivez.
11 Mme MARCUS : [interprétation] J'ai voulu ajouter quelque chose en ce qui
12 concerne cette possibilité d'avoir une audience brève à ce sujet. Je peux
13 dire que nous allons communiquer un document à la Défense de M. Stanisic
14 leur indiquant notre position et en posant des questions. Ensuite, nous
15 allons en informer la Chambre. Et nous espérons que cela vous aidera à
16 décider des mesures à prendre et de la façon à poursuivre par rapport à
17 cette question.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ensuite, le deuxième point à l'ordre du
19 jour concerne les documents qui n'ont pas encore été versés la semaine
20 dernière. Quand nous avons fini avec notre travail, nous n'avions pas
21 suffisamment de temps pour nous en occuper. Il s'agit surtout des vidéos.
22 Et je voudrais demander aux parties de nous indiquer quels sont les
23 documents qui ont été téléchargés dans le système de prétoire électronique
24 et qui doivent encore être versés au dossier.
25 M. WEBER : [interprétation] Le Procureur avait deux vidéos. 2D1001, c'est
26 une vidéo qui a été montrée au cours de l'interrogatoire de la Défense
27 Simatovic. Il s'agit d'un discours de cinq minutes d'Arkan, y compris les
28 textes concernant les "états unis de Serbie".
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1 La deuxième vidéo, 65 ter 6316, n'a pas été versée au dossier. C'est
2 une vidéo qui a été montrée qui comporte deux vidéos. Il s'agit des
3 funérailles de Radovan Stojicic, Badza. Le Procureur a aussi utilisé des
4 arrêts sur image de cette même vidéo, 65 ter 6316.1 --
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On va tout d'abord parler des vidéos.
6 Madame la Greffière, quelles sont les cotes à attribuer à ces vidéos. La
7 première…
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] P3073.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a des objections ? Il n'y
10 en a pas. Très bien.
11 Donc la pièce P3073 est versée au dossier.
12 La deuxième vidéo, 65 ter 6316…
13 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P3074.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas d'objection.
15 Dans ce cas-là, la pièce P3074 est versée au dossier.
16 Maintenant, l'arrêt sur image émanant de la vidéo 6316.1.
17 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P3075.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vu qu'il n'y a pas d'objection, je
19 demande qu'elle soit versée au dossier.
20 Ensuite, les trois documents marqués aux fins d'identification,
21 Monsieur Weber.
22 M. WEBER : [interprétation] Les trois documents, c'étaient les documents
23 dont il fallait encore décider -- donc, qui ont été donnés par le témoin à
24 la Défense de M. Simatovic, et le Procureur a posé des questions au témoin
25 à ce sujet. Il s'agit de la pièce P3070, il s'agit d'un document concernant
26 Zarka Radnov; ensuite, P3071, c'est un formulaire concernant Aleksandar
27 Manojlovic; et P3072, un certificat concernant un certain Velickovic.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a des objections
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1 concernant le versement de ces documents ? Apparemment non.
2 Dans ce cas, P3070, P3071 et P3072 sont versés au dossier.
3 Rien d'autre ?
4 M. WEBER : [interprétation] Rien pour le Procureur.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Défense ?
6 M. PETROVIC : [interprétation] Rien, Monsieur le Président.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc tout cela est couché au
8 compte rendu d'audience à présent.
9 Monsieur Jordash, au cours de l'audience du 26 janvier, le Procureur a
10 proposé que les enquêteurs du bureau de Belgrade se rendent dans la maison
11 du Témoin Pelevic pour prendre la photo d'un tableau contenant des
12 photographies à la maison du témoin, et la Défense de M. Stanisic a soulevé
13 une objection, et elle avait fait un lien entre l'objection et le fait que
14 le Procureur avait violé l'article 90(H)(ii) au cours du contre-
15 interrogatoire du témoin.
16 Après, il y a eu des questions que les Juges ont posées au témoin, et vous
17 vouliez poser des questions au témoin, et cette situation par la suite a
18 changé par rapport à la situation telle qu'elle était au moment où vous
19 avez fait ces observations. Donc la première question : est-ce que vous
20 demandez toujours que les Juges prennent la décision au sujet de cette
21 objection en vertu de l'article 90(H)(ii) suite aux questions qui ont été
22 posées par la suite ?
23 M. JORDASH : [interprétation] Nous ne demandons pas une décision de la
24 Chambre à ce moment-là, mais sans préjuger un éventuel versement, nous
25 pensons qu'il y a des questions qui auraient dû être posées au témoin. Donc
26 nous ne demandons pas qu'il y ait une décision des Juges de la Chambre
27 puisque le problème se pose encore parce que le Procureur n'avait pas
28 clairement indiqué quelle était leur position.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Jordash, je vais en discuter
2 avec mes collègues, mais à un certain moment il faudrait que l'on soit au
3 clair quant à ce qui figure parmi les pièces à conviction. Donc, est-ce
4 qu'il faut tout simplement rayer du compte rendu d'audience votre objection
5 quant à la violation de l'article 90(H)(ii) ?
6 M. JORDASH : [interprétation] Soit on la raye du compte rendu d'audience,
7 ou bien --
8 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
9 M. JORDASH : [interprétation] -- tout simplement, il faudrait peut-être
10 demander au Procureur qu'on ne lui permette pas de s'appuyer sur cet
11 élément de preuve. Par exemple, s'ils n'ont pas présenté l'argument A, il
12 faudrait lui interdire de s'appuyer sur la réponse donnée à l'argument A.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois ce que vous voulez dire.
14 Evidemment, vous pouvez en parler au moment de votre plaidoirie, mais c'est
15 vrai que ce serait un moment tardif pour en parler, parce qu'à ce moment-là
16 on ne saura pas si le Procureur a la possibilité de s'appuyer sur cette
17 information ou non, parce qu'il n'y aura pas de décision.
18 Donc vous n'insistez pas sur une décision. Eh bien, on va laisser la
19 question ouverte.
20 Et voici ce que je propose à ce moment : vu que vous n'insistez pas
21 sur une décision, je vous demande de discuter avec le Procureur pour voir
22 s'il existe des éléments qui restent non résolus, et essayez de voir si
23 vous êtes en mesure de vous mettre d'accord avec le Procureur. Si vous
24 n'arrivez pas à vous mettre d'accord, eh bien, il faudrait plus tard
25 essayer de voir comment réparer cela, quelle sera la réparation que vous
26 demandez aux Juges et par rapport à quelle portion de la déposition.
27 M. JORDASH : [interprétation] Nous n'avons rien contre la possibilité
28 que les enquêteurs du Procureur se rendent dans la maison du témoin et
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1 prennent des photos. Cela étant dit, nous ne savons pas ce que le Procureur
2 va dire au sujet de ces cinq individus qu'ils ont contre-interrogés.
3 Personne ici ne peut savoir ce qu'ils vont dire au sujet de ces cinq
4 individus puisqu'ils n'expliquent pas leur position. Tout ce qu'ils disent,
5 c'est qu'ils ont été payés par la DB. On ne sait rien de plus au sujet des
6 allégations précises concernant ces cinq personnes.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, tout d'abord, essayez de
8 vous entretenir avec le Procureur et de voir ce qu'ils veulent prouver au
9 sujet de ces cinq personnes pour commencer.
10 Ensuite, apparemment il n'y a pas d'objection en ce moment contre la
11 possibilité d'envoyer un enquêteur --
12 [La Chambre de première instance se concerte]
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Weber.
14 Oui, j'entends du B/C/S agréable sur mon canal anglais.
15 Il n'y a pas d'objection contre le fait d'envoyer un enquêteur. En
16 même temps, les Juges de la Chambre, à ce stade, n'estiment pas que cela
17 soit tellement important que l'on vous enjoigne à le faire. Mais bien
18 évidemment, il n'y a pas d'objection à cela. Et si vous souhaitez nous
19 montrer cette photographie un peu plus tard, nous en tiendrons compte. Mais
20 il est clair qu'à ce stade il ne s'agit pas d'une question qui soit
21 tellement importante aux yeux de la Chambre qu'il faille vous demander, ou
22 vous enjoindre, ou vous encourager à le faire. En tout cas, nous nous
23 remettons entièrement à vous pour ce qui est cette question-là.
24 M. WEBER : [interprétation] J'entends bien. Et par excès de prudence, si
25 l'Accusation fait cela, nous prévoyons de prendre les dispositions
26 nécessaires avec la Section chargée des Victimes et des Témoins.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. C'est ce qu'il y avait sur ma
28 liste et ce qui restait par rapport à la semaine dernière.
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1 Les parties souhaitent-elles dire quelque chose d'autre ?
2 M. JORDASH : [interprétation] Je souhaite évoquer la question de la santé
3 de M. Stanisic.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
5 M. JORDASH : [interprétation] Vous vous souviendrez du fait que la semaine
6 dernière j'ai indiqué que M. Stanisic devait se rendre à l'hôpital de
7 Bronovo pour un traitement qu'il attend depuis longtemps. C'est la deuxième
8 fois qu'il s'y rend.
9 Malheureusement, il semblerait qu'à Bronovo, ils n'ont plus de
10 solution à lui proposer. On dit à M. Stanisic qu'il ne peut pas recevoir ce
11 deuxième traitement parce que cela serait trop dangereux pour sa santé.
12 Cela représente un risque, et je crois qu'il y a des risques d'allergie ou
13 d'autres réactions.
14 Et on lui a dit que la dernière possibilité qui s'offre à lui
15 consiste à accepter une intervention chirurgicale, qui n'est pas possible
16 aux Pays-Bas mais, qui pourrait être faite aux Etats-Unis, à la clinique de
17 Cleveland. Il semblerait que cette clinique soit la clinique la plus
18 appropriée, la plus à même de traiter ce genre de maladie.
19 Le professeur de médecine van Geenen va rédiger un rapport suite à
20 une consultation téléphonique jeudi prochain, à 15 heures avec le Dr Bo
21 Shen à Cleveland et le Dr Tarabar, qui est le médecin du Dr Stanisic depuis
22 fort longtemps. Nous espérons que les choses seront beaucoup plus claires à
23 ce moment-là.
24 Nous souhaitons que les Juges de la Chambre demandent un rapport, et
25 ce, de façon urgente d'un spécialiste, un spécialiste qui serait à même de
26 pouvoir aborder ou de traiter de ces éléments récents que nous avons reçus
27 hier.
28 Nous avons reçu les réponses des médecins qui rédigent le rapport aux
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1 questions que nous avons posées, et nous sommes très reconnaissants de ces
2 réponses, Mesdames, Monsieur les Juges, parce que vous savez que nous
3 n'avons pas pu obtenir ces réponses par le biais du Greffe et des médecins
4 traitants --
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous parlez en fait de questions très
6 précises que la Chambre a posées au médecin ?
7 M. JORDASH : [interprétation] Oui, tout à fait. Et ces réponses se sont
8 avérées très utiles.
9 Alors, de façon idéale, nous aimerions faire la même chose en passant par
10 le Greffe et les médecins traitants pour ce qui est de cette dernière
11 question, pour comprendre exactement quelle est la situation et savoir s'il
12 est urgent que ce traitement soit prodigué. Et compte tenu de la position
13 du Greffe actuelle, nous n'allons pas obtenir de réponse à ces questions-
14 là. Nous n'allons pas pouvoir emprunter cette voie-là.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voulez parler maintenant des
16 questions qui portent sur la maladie qui nécessite ce nouveau médicament --
17 M. JORDASH : [interprétation] Oui. En résumé, je dirais que la meilleure
18 voie à suivre pour nous pour recevoir des réponses aux questions qui
19 portent sur le traitement de M. Stanisic, nous n'allons pas les poser
20 directement -- ou qui portent sur l'état de santé de l'accusé. Evidemment,
21 le biais normal serait de passer par ces médecins traitants. Mais le Greffe
22 n'a pas le même point de vue.
23 Donc nous aimerions une nouvelle fois que les Juges de la Chambre
24 interviennent à ce stade, et vous pourriez rendre une ordonnance et
25 demander à ce que le spécialiste rédige un rapport sur cette dernière
26 évolution de la maladie de M. Stanisic. Ceci répond à deux objectifs :
27 premièrement, M. Stanisic pourrait dans ce cas recevoir des éléments
28 détaillés; et ceci, deuxièmement, permettrait de rassurer les Juges de la
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1 Chambre quant à la capacité de M. Stanisic à assister à son procès et que
2 l'évolution de sa maladie n'a pas d'incidence là-dessus. Et comme nous ne
3 disposons pas des éléments nécessaires, ce n'est pas quelque chose que nous
4 pouvons déclarer. Mais compte tenu de la gravité de ce qui vient de se
5 passer, je crois que la prudence s'impose.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien évidemment, la différence qu'il y a
7 entre un rapport qui fournit des éléments sur lesquels vous avez du mal à
8 obtenir des informations et le fait de rédiger un rapport sur des problèmes
9 gastro-entérologiques, c'est que nous avons eu un rapport d'un expert
10 spécialiste, d'un médecin dans ce domaine, alors que nous n'avions pas de
11 spécialiste -- le Dr de Man, bien sûr, qui a rédigé un rapport sur les
12 questions psychologiques et psychanalytiques, mais il y a un conflit, en
13 fait, entre les médecins traitants.
14 Ne serait-il pas donc préférable de demander un rapport, et ce, de
15 façon urgente après qu'il y ait ce contact jeudi, tout de suite après, car
16 nous avons dans ce cas toutes les chances d'obtenir les informations
17 pertinentes. Et nous demanderons de façon précise à ce que le spécialiste
18 qui rédige le rapport glane toutes les informations nécessaires et
19 obtiennent ces informations des médecins traitants, y compris les contacts
20 que ces médecins ont avec les médecins à Cleveland, de façon à avoir un
21 aperçu général de son avis sur la question, à savoir s'il faut poursuivre
22 le traitement ou non à l'hôpital de Bronovo. Peut-être que l'hôpital de
23 Cleveland est le seul, ou le meilleur, hôpital pour traiter ce dont il
24 souffre, et dans ce cas nous pourrions formuler quelques questions. Si vous
25 avez des propositions à nous faire, très bien. Comme vous avez remarqué,
26 les Juges de la Chambre préfèrent toujours formuler les questions eux-
27 mêmes, parce que c'est nous qui recherchons les éléments d'information en
28 premier lieu. Bien sûr, nous sommes ouverts à toute proposition. Et vous
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1 avez peut-être remarqué que ce que vous recherchiez, les questions que vous
2 avez posées récemment à propos du traitement à propos duquel vous n'avez
3 pas pu obtenir des informations, et j'espère que les Juges de la Chambre
4 ont inclus dans leurs questions les questions que vous aviez vous-mêmes
5 lorsqu'elles se sont adressées au médecin.
6 M. JORDASH : [interprétation] Nous sommes tout à fait d'accord pour dire
7 que la voie à suivre serait d'attendre cette consultation, tout à fait. Et
8 la manière dont je pourrais répondre à la deuxième partie de ce que vous
9 avez dit, il y a des questions en souffrance, mais nous n'allons pas
10 préoccuper les Juges de la Chambre avec cela. Nous allons déposer la
11 requête aujourd'hui au Président eu égard à la position de l'OLAD, mais les
12 informations que vous avez fait figurer sur votre liste sont des
13 informations qui se sont avérées très utiles pour nous, et nous vous
14 remercions beaucoup d'être intervenus de la sorte.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, ce que vous souhaitez savoir est
16 sans doute un mélange de deux choses : ce que M. Stanisic souhaite savoir
17 en tant que patient et que ces éléments reçus soient communiqués aux Juges
18 de la Chambre et soient pertinents dans le cadre de cette procédure. Nous
19 essayons d'établir une différence, de marquer une distinction entre les
20 deux et, dans la mesure du possible, voir si ceci peut être utile à
21 l'équipe de la Défense, parce que ceci doit être pertinent aux yeux des
22 Juges de la Chambre. Ce qui est important, c'est de constater ce qui est
23 pertinent et ce qui ne l'est pas. Et nous nous en remettons à la Défense,
24 au Greffe ou au Président, quelle que soit la personne compétente pour
25 traiter de cette question.
26 M. JORDASH : [interprétation] J'espère aussi avoir clairement pu faire
27 cette différence, car j'ai vraiment essayé de marquer cette différence de
28 façon claire.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une fois, je ne sais pas si nous
2 recevrons des éléments d'information. Nous pouvons formuler ces questions
3 nous-mêmes de façon restreinte ou non, et quelle que soit la manière dont
4 vous souhaitez procéder, faites en sorte que vous communiquiez vos
5 desiderata aux Juges de la Chambre, parce qu'il y aura donc ce contact
6 mardi ou jeudi entre ici et l'hôpital de Cleveland. Nous aimerions recevoir
7 dès que possible après ce contact les éléments dont nous avons besoin.
8 M. JORDASH : [interprétation] Et nous allons envoyer nos questions que nous
9 vous communiquerons au plus tard demain à la fin de l'audience.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Marcus, en général, le bureau du
11 Procureur n'intervient pas beaucoup sur cette question-là, mais je vois que
12 vous êtes debout.
13 Mme MARCUS : [interprétation] Oui, pour dire simplement que nous sommes
14 tout à fait d'accord avec ce qui est en train de se passer. Et nous
15 aimerions également proposer quelques questions aux Juges de la Chambre
16 comme nous l'avons fait par le passé à de nombreuses reprises.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Dans ce cas, si vous voulez bien
18 respecter les mêmes délais que ceux qui ont été imposés à la Défense.
19 Mme MARCUS : [interprétation] Oui, tout à fait.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que ceci pourrait avoir une
21 incidence sur les débats. Je ne sais pas si vous souhaitez vous adresser
22 aux Juges de la Chambre, Maître Petrovic ?
23 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons un point
24 de vue sur la question, mais il est trop tôt pour nous de le faire valoir.
25 Dès que nous disposerons des éléments nécessaires, nous vous tiendrons
26 informés de notre position.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Petrovic.
28 Dans ce cas, s'il n'y a pas d'autres questions préliminaires…
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1 Concernant le témoin à venir --
2 M. FARR : [interprétation] Si, il y a une question : une requête en
3 instance concernant des mesures de protection émanant de Serbie, c'est
4 pourquoi l'Accusation --
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est précisément la raison pour
6 laquelle je souhaitais passer à huis clos partiel.
7 Je souhaite que nous passions à huis clos partiel.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,
9 Mesdames, Monsieur les Juges.
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18 [Audience publique]
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.
20 Je vais relire la décision qui est celle des Juges de la Chambre.
21 Le 23 janvier 2012, la Serbie a demandé des mesures de protection pour le
22 Témoin DFS-017. Premièrement, la Serbie demande à ce que l'identité du
23 témoin soit protégée. La demande est rejetée.
24 Le témoin est un ancien agent de la DB, et la Serbie n'a pas suffisamment
25 expliqué de quelle manière l'identité publique de son identité pourrait
26 menacer les intérêts au plan de la sécurité de la Serbie.
27 Deuxièmement, la Serbie a demandé à ce que le témoin puisse témoigner à
28 huis clos. La Serbie fait valoir que le témoin va témoigner, je cite,
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1 "concernant la nature, le type et l'intensité des contacts et de l'échange
2 avec les représentants officiels du MUP de la DB pour la période allant de
3 1992 à 1995."
4 Une autre citation :
5 "Les circonstances, les faits, les événements ainsi que les tâches
6 relatives à…," et je vais exclure un passage, "son emploi au sein de la DB
7 serbe."
8 Et le dernier passage de cette citation :
9 "Sa connaissance concernant sa coopération avec la DB serbe ainsi que les
10 échanges de renseignements et d'informations dans le cadre de cette
11 coopération…," et encore une fois j'omets un passage, "avec l'accusé
12 Simatovic."
13 Le témoin va être entendu en audience publique, et les parties et le témoin
14 reçoivent maintenant la consigne suivante : ils doivent demander de passer
15 à huis clos partiel de façon provisoire parce que les questions pourraient
16 éventuellement révéler l'identité de cet agent de la DB; ainsi que la
17 source; et, troisièmement, un endroit précis utilisé par la BIA.
18 Suite à la déposition du Témoin DFS-017, le Greffe fournira à la Serbie les
19 passages du compte rendu d'audience de sa déposition entendue
20 temporairement à huis clos partiel de façon à ce que les expurgations
21 nécessaires puissent être faites.
22 Madame la Greffière, je vous enjoins par la présente d'informer la
23 République de Serbie de cette décision.
24 Maître Petrovic, comme nous l'avons dit il y a quelques instants, le témoin
25 n'a pas demandé de mesures de protection pour lui-même. Est-ce que c'est
26 quelque chose que vous avez vérifié récemment ?
27 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je lui ai posé une
28 question sur ce point hier.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Effectivement, ceci est récent.
2 Je demande donc à ce que le témoin entre dans le prétoire, s'il vous plaît.
3 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à vous.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Draca.
7 Avant que vous ne déposiez dans ce prétoire, le Règlement de procédure et
8 de preuve exige que vous prononciez une déclaration solennelle, à savoir
9 que vous allez dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
10 L'huissier [comme interprété] vous remet le texte de cette déclaration.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
12 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
13 LE TÉMOIN : ACO DRACA [Assermenté]
14 [Le témoin répond par l'interprète]
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Draca.
16 Veuillez vous asseoir.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Draca, je souhaite vous
19 informer de la chose suivante : une décision a été rendue par les Juges de
20 la Chambre il y a quelques instants, une décision qui porte sur des mesures
21 de protection qui avaient été demandées par la République de Serbie.
22 La République de Serbie avait demandé à ce que vous déposiez à huis clos et
23 non pas sous votre propre nom, pour que votre identité ne soit pas
24 communiquée au public. Cette demande a été rejetée. Mais les Juges de la
25 Chambre ont décidé que vous alliez être entendu en audience publique. En
26 même temps, nous souhaitons attirer votre attention sur l'élément suivant :
27 lorsque les questions ou vos réponses sont susceptibles de révéler,
28 premièrement, l'identité d'une source de la BIA, ou, deuxièmement,
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1 l'identité d'un agent de la BIA, ou, troisièmement, un endroit utilisé par
2 la BIA, dans ce cas nous passerons à huis clos partiel. Les parties ont
3 reçu pour consigne d'avertir les Juges de la Chambre si cette occasion se
4 présente, et les instructions à votre intention sont les mêmes. Si une
5 quelconque réponse serait susceptible de révéler ce type d'information,
6 nous passerons à huis clos partiel pour que ces informations ne soient pas
7 communiquées au public et pour que ces passages expurgés puissent ensuite
8 être examinés par la République de Serbie pour savoir si, oui ou non, ces
9 passages doivent ne pas être communiqués au public.
10 Est-ce bien clair ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous allez tout d'abord être interrogé
13 par Me Petrovic. Me Petrovic, comme vous le savez, est le conseil qui
14 représente les intérêts de M. Simatovic.
15 Me Petrovic nous a dit qu'il n'y avait pas de raisons personnelles pour que
16 vous demandiez des mesures de protection compte tenu de vos circonstances
17 personnelles.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas, Maître Petrovic, je vous en
20 prie, c'est à vous.
21 M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
22 Interrogatoire principal par M. Petrovic :
23 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Draca.
24 R. Bonjour.
25 Q. Pourriez-vous tout d'abord nous donner vos nom et prénom, ainsi qui
26 votre lieu et date de naissance.
27 R. Aco Draca. Je suis né à Sinj, en Croatie, le 13 décembre 1958.
28 Q. Monsieur Draca, pourriez-vous nous dire quelles études vous avez
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1 faites.
2 R. Je suis allé au lycée de Benkovac, et ensuite j'ai obtenu un diplôme de
3 droit à l'Université de Zagreb.
4 Q. Pourriez-vous nous dire à quel endroit vous avez travaillé pour la
5 première fois.
6 R. En décembre 1981, j'ai travaillé pour les services de Sûreté de l'Etat
7 dans le centre qui se trouvait à Zagreb.
8 Q. Pourriez-vous nous dire en quelques mots quelles fonctions vous avez
9 remplies lorsque vous avez travaillé pour les services de Sûreté de l'Etat
10 à Zagreb.
11 R. Au début de ma carrière, tout d'abord je me suis occupé de surveillance
12 secrète et de documents secrets, et après cela j'ai travaillé en qualité
13 d'agent. Je ne sais pas si vous savez de quoi il s'agit.
14 Q. Si cela s'avère nécessaire, je vous poserai des questions précises là-
15 dessus.
16 Monsieur le Témoin, est-ce qu'à aucun moment vous avez été réinstallé
17 ailleurs et que vous n'étiez plus en Croatie ?
18 R. A ma propre demande, en 1986, j'ai été transféré à Split, et j'ai
19 travaillé, pour 1986, pour l'antenne de Zadar.
20 Q. Pouvez-vous me dire, vous voulez parler de l'antenne de Zadar,
21 quel était l'organigramme et combien de personnes travaillaient à cet
22 endroit ?
23 R. Eh bien, c'était le centre de Split, et c'était le centre
24 territorial le plus important en ex-Yougoslavie car cela recouvrait Rijeka
25 dans le nord et le Monténégro dans le sud. Il y avait Zadar, Sibenik et
26 Dubrovnik, les différentes antennes. Moi, je travaillais à Zadar. Il y
27 avait neuf agents au total, mais nous avions également des administrateurs,
28 des chauffeurs, et cetera.
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1 Q. Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous dire ce que vous avez fait
2 lorsque les partis politiques sont venus au pouvoir dans la République de
3 Croatie en 1989 et 1990 ?
4 R. En ce qui concerne mon engament professionnel, j'ai travaillé --
5 Q. Un instant, Monsieur Draca. M. le Président voudrait intervenir.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, en effet. Les interprètes demandent
7 de respecter une pause entre les réponses et les questions. Sans cela, on
8 n'arrive plus à suivre.
9 Je vous en prie, continuez.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] En ce qui concerne mes engagements
11 professionnels, je faisais du contre-espionnage par rapport aux services de
12 Renseignements d'Europe de l'Est.
13 M. PETROVIC : [interprétation]
14 Q. Monsieur Draca, à un moment donné, les partis politiques qui entraient
15 en scène en 1989 et 1990, est-ce qu'ils ont également fait l'objet d'un
16 attrait particulier à vos services à Zagreb ?
17 R. Oui. En 1999, le système multipartite fut mis en place en la République
18 socialiste de Croatie, tout comme les autres anciennes républiques de
19 l'URSS [phon], et puis suite aux tensions ethniques qui ont vu le jour dans
20 cette région, ce centre de Split a décidé que tous les agents allaient
21 couvrir les nouveaux partis en place, c'est-à-dire les partis
22 éventuellement extrémistes ou terroristes concernant tout acte de violence.
23 Donc un certain nombre de partis ont vu le jour. On ne savait pas encore
24 très bien quels étaient leurs objectifs. Et si vous permettez de m'exprimer
25 ainsi, il s'agissait d'une démocratie qui naissait, et les neufs agents qui
26 travaillaient là-bas ont ensuite mis de côté toutes leurs autres activités
27 et n'ont fait que couvrir les activités des partis.
28 Q. Monsieur Draca, au cours de cette période lorsque vous avez reçu cette
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1 instruction, est-ce que vous couvriez les partis politiques de toutes les
2 personnes qui vivaient sur le territoire couvert par votre antenne ?
3 R. Oui, en effet. Peut-être je ne me suis pas assez bien expliqué.
4 Nous ne couvrions pas les activités politiques des partis, mais uniquement
5 les activités des partis qui avaient un lien éventuel avec les luttes
6 ethniques et le terrorisme. Il n'y avait qu'un seul parti du peuple serbe,
7 c'est le parti du Dr. Tudjman.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous demande de bien vouloir
9 ralentir, s'il vous plaît. Respirez de temps en temps de sorte que
10 l'interprète puisse faire pareil.
11 M. PETROVIC : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.
12 Q. Monsieur Draca, à un moment donné, est-ce que cette instruction a été
13 modifiée concernant les activités dont vous étiez chargé de la surveillance
14 et les partis en cause ?
15 R. Oui. Je devrais expliquer encore quelque chose. Selon les lois en
16 vigueur en Yougoslavie à l'époque, il y avait des dispositions concernant
17 l'intolérance ethnique et l'intolérance raciale, et dans les premières
18 instructions, les instructions spécifiques étaient de recueillir des
19 renseignements, des films, des documents concernant les activités, qui
20 allaient ensuite être analysés conformément à ces articles du droit pénal.
21 Quelques jours plus tôt, dix ou 15 jours avant les premières élections
22 démocratiques en République socialiste de Croatie - c'était comme cela que
23 ça s'appelait à l'époque - une instruction est venue de Zagreb indiquant
24 très clairement que selon une ordonnance du comité central de la République
25 socialiste de Croatie, le SDB ne devait pas poser d'obstacle au processus
26 démocratique dans le pays. Nous devions donc à ce moment-là mettre un terme
27 à cette activité.
28 Q. Monsieur Draca, est-ce que les activités ont été
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1 suspendues ? En fait, est-ce que vous pourriez nous dire d'abord ce qui
2 s'est produit concernant toute cette documentation qui avait été rassemblée
3 alors que vous travailliez encore sur les partis politiques dans la période
4 antérieure ?
5 R. Nous avions reçu une instruction du centre de Split tendant à faire
6 détruire toute la documentation, ce que nous avons fait le même jour. Il y
7 avait beaucoup de documents, toutes sortes de pièces audio et vidéo
8 provenant de différentes réunions. Cet ordre a été très précis sur un point
9 particulier puisqu'il portait exclusivement aux partis politiques croates.
10 Il ne parlait pas non plus du Parti démocrate serbe. Nous avons donc
11 poursuivi nos activités dans ce sens sachant que l'extrémisme parmi le
12 peuple serbe pouvait également contribuer à accroître le conflit. Nous
13 devions donc nous attacher à nos travaux sur le SDS, de sorte qu'à un
14 moment donné, à Zadar, nous nous sommes trouvés dans un problème assez
15 particulier. Nous ne travaillions plus sur le nationalisme croate, mais
16 nous travaillions plutôt sur le nationalisme serbe. Nous avions à ce
17 moment-là 12 actions portant sur des gens qui faisaient partie du SDS. Et
18 la majorité de la population était croate dans la région.
19 Q. Donc, Monsieur, si nous pouvions très brièvement parler de la situation
20 à Zadar à l'époque des élections en 1990 : quelle était la situation, est-
21 ce qu'il y a eu des incidents, quelle était la position de vos services par
22 rapport à ces incidents ?
23 R. La situation sécuritaire était très mauvaise, surtout après les
24 élections qui ont été gagnées par le HDZ. Jusqu'à l'époque, on espérait que
25 le SDP, les anciens communistes sous la houlette de l'ancien président
26 Racan, allait emporter les élections. Ils étaient beaucoup plus modérés.
27 Toutefois, une fois que ça été le HDZ qui a gagné les élections, les
28 tensions interethniques se sont enflammées, et il y a eu même les premières
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1 gardes serbes qui ont été formées dans les villages serbes.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voulez-vous parler phrase par phrase et
3 ralentir un petit peut. Ça permettrait à tout le monde de vous suivre.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Au cours de cette période, les premières
5 gardes villageoises ont été créées pendant la nuit dans les villages serbes
6 exclusivement. La zone de Zadar couvrait trois municipalités autres que
7 Zadar : Beograd na Moru, Benkovac et Obrovac. Et Obrovac et Benkovac
8 avaient une majorité de Serbes dans leur population.
9 M. PETROVIC : [interprétation]
10 Q. [aucune interprétation]
11 R. Je voudrais ajouter également qu'au cours de cette même période, notre
12 service suivait tout ce qui se produisait sur le terrain et rendait compte
13 à Split et à Zagreb concernant ces gardes nocturnes. Et la JNA fonctionnait
14 également à l'époque, et il y avait des réunions conjointes des
15 représentants de l'armée populaire yougoslave, ou plutôt, de leurs services
16 de Sécurité. Donc ils allaient se rendre dans ces villages et ils disaient
17 que ces gardes n'étaient pas nécessaires puisqu'ils étaient toujours les
18 garants de la paix.
19 Q. Monsieur le Témoin, oui, nous allons revenir à ces différentes
20 questions. Je voudrais juste vous demander d'essayer de vous concentrer sur
21 les questions que je vous pose, de sorte que nous pourrions présenter à la
22 Chambre les différents éléments de façon efficace.
23 Ma question était : à l'époque, donc en 1990, est-ce qu'il y a eu des
24 incidents et est-ce que vos services ont dû réagir suite à ces incidents,
25 et quelles étaient les informations que vous avez
26 obtenues ?
27 R. Oui, il y a eu des incidents, surtout après que les élections
28 parlementaires remportées par le HDZ. Nos instructions claires étaient, et
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1 c'est d'ailleurs partiellement écrit, étaient de ne pas du tout nous
2 immiscer dans ces incidents, mais de les documenter, de faire rapport à
3 leur sujet. Ne pas interférer, cela voulait dire, nous ne devions pas
4 recueillir des éléments de preuve de sorte de pouvoir traiter de ces
5 informations plus tard à des fins pénales.
6 Q. Monsieur le Témoin, qu'est-ce qui s'est produit concernant ces
7 différents agents de la DB d'origine serbe ainsi que dans la police de
8 Split suite à ces élections ?
9 R. Juste après les élections, ou après que ces autorités aient pris le
10 pouvoir, les premières autorités multipartites de Croatie se sont mises en
11 place, et tout le personnel de la DB a reçu un document qu'ils devaient
12 signer aux fins d'attester de leur loyauté. Ce document ne précisait rien
13 de précis. C'était un contenu tout à fait similaire à des documents que
14 nous avions signés auparavant concernant notre engagement à la
15 confidentialité des secrets de l'Etat, et cetera. L'en-tête était
16 différent. Il s'agissait maintenant du damier.
17 Les insignes ont été modifiés. Donc la première décision, en effet, a été
18 de changer les symboles et les insignes sur les manches et les képis. Ce
19 n'était plus une étoile, mais un écusson en damier. Certains travailleurs
20 ont refusé de porter ces insignes et ont été licenciés. Dans des endroits
21 comme Knin et Benkovac, les équipes ont continué à travailler, mais en
22 portant les anciens insignes.
23 Q. En une phrase, pourriez-vous nous dire pourquoi les personnels serbes
24 ont refusé de porter ces nouveaux insignes sur leurs uniformes ?
25 R. Tout simplement parce que ces nouveaux insignes, donc ce dessin en
26 damier, étaient presque identiques à l'insigne du NDH de 1941, qui avait
27 causé la mort d'un million de Serbes en Croatie. Donc il y avait un lien
28 avec cette période, et la population serbe avait beaucoup souffert sous la
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1 présence de ces symboles et ces insignes.
2 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que de nouvelles unités ont été créées à
3 l'époque au sein de la police croate; et dans l'affirmative, qui rejoignait
4 les rangs de ces unités ?
5 R. Oui, en effet. Il y a eu de nouvelles unités qui ont été mises sur
6 pied. L'analyse de sécurité de la branche de Zadar à l'époque était que la
7 création de ces nouvelles unités contribuait aux tensions, puisque l'ancien
8 cadre des services de Sécurité selon les analyses de la direction croate ne
9 pouvait plus couvrir la totalité du territoire.
10 Le Président Tudjman a donc décidé de créer des forces de réserve spéciales
11 au sein de la police qui allaient être mobilisées exclusivement à partir
12 d'hommes d'origine ethnique serbe. Certains, d'ailleurs, de ces hommes
13 avaient un casier judiciaire. Et dans la zone de Zadar, pratiquement tout
14 le monde se connaissait. Ce n'était pas un -- tout le monde se connaissait.
15 On savait très bien qui étaient ces personnes. Et ceci a suscité pas mal de
16 positions, même de la part du public croate. Ils ont reçu des uniformes
17 sans être formés. Des camps ont été formés où ces gens étaient logés. Mais
18 personne ne savait à quoi ils allaient servir, et donc les villages serbes
19 avaient peur qu'ils débarquent un jour et reprennent en main les
20 commissariats de police qui se trouvaient dans des zones occupées par des
21 Serbes.
22 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous êtes au courant de la date du 17
23 août ? Est-ce qu'une réunion a été prévue à Benkovac ? Le 17 août 1990.
24 R. Oui, en effet. C'était dans la banlieue d'un village qui s'appelle
25 Bukovic, qui est près de Benkovac. Une réunion a été convoquée et a eu
26 lieu. Le Pr Jovan Raskovic, président du Parti démocratique, avait donc
27 convoqué cette réunion du Parti démocratique serbe.
28 Q. Est-ce que quelque chose s'est produit la veille de cette réunion du 17
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1 août 1990 ?
2 R. Oui. La veille de cette réunion, le 16 donc, juste après minuit, une
3 unité spéciale de Zadar est arrivée à Benkovac. Elle a occupé le
4 commissariat de police. Elle a cassé la porte d'un hangar qui était fermée
5 à clé et a fait main basse sur toutes les armes des forces de réserve, des
6 armes automatiques, et ils ont également saisi les armes des forces actives
7 qui étaient entreposées là en cas d'urgence.
8 A l'époque, ils ont arrêté les policiers de garde, qu'ils ont ramenés
9 ensuite le lendemain. Cette personne faisait partie de l'administration de
10 la police de Zadar, même s'il était à Benkovac.
11 Q. Monsieur, est-ce que vous étiez au courant de plans éventuels
12 d'effectuer des actes de ce type également dans d'autres zones habitées par
13 une population majoritaire serbe ?
14 R. Oui, en effet. Des actions similaires étaient censées se produire dans
15 de plus petits villages, comme Obrovac et Gracac, et Knin, qui est un
16 centre plus important, allait connaître son tour. Cette ville a été
17 entourée, et les commissariats de police ont, en effet, été envahis.
18 Q. Comment avez-vous été au courant de l'existence de ces plans ?
19 R. Parce qu'à l'époque je travaillais toujours, tout comme d'ailleurs mes
20 collègues. Personne n'était encore parti à l'époque. Donc je me rendais au
21 travail. De temps en temps, notre supérieur nous informait de certains
22 plans; mais je dois dire qu'à l'époque, la plupart des Serbes partaient en
23 congé de maladie et ne venaient pas au travail parce que nous recevions
24 tout le temps des ordres concernant le fait que nous devions couvrir des
25 territoires serbes. Donc nous faisions un rapport sur ce qui s'était
26 produit la semaine précédente à Benkovac ou à Obrovac, et ils - quand je
27 dis "ils", je pense à la direction de Split, à Zadar et à Zagreb - ils nous
28 disaient que nous minimisions les activités serbes. Et ils étaient
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1 sceptiques.
2 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vois l'heure.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Maître Petrovic. Donnez-moi un
4 instant, je vous prie.
5 [La Chambre de première instance se concerte]
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire la pause.
7 Monsieur Petrovic, nous avons entendu parler du contexte général. Je
8 ne sais pas s'il y a le moindre désaccord du côté de l'Accusation, mais je
9 ne pense pas que l'Accusation s'est opposée au fait qu'il n'y avait pas
10 effectivement une résurgence des tensions ethniques et que des mesures
11 administratives ont été prises qui auraient pu effectivement viser les
12 Serbes à l'époque.
13 Mais peut-être vous pourriez mettre à profit la pause pour vous renseigner.
14 Parce que je crois qu'il faut avancer le plus rapidement possible et
15 arriver vraiment au centre même de la déposition de ce témoin.
16 Nous reprendrons à 11 heures moins quart.
17 --- L'audience est suspendue à 10 heures 19.
18 --- L'audience est reprise à 10 heures 49.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Petrovic, poursuivez. Je vous
20 demanderais, à vous-même ainsi au témoin, de veiller à marquer les pauses
21 entre les questions et les réponses. Et je prie particulièrement le témoin
22 à bien vouloir ralentir son débit car nous risquons de perdre une partie de
23 votre message, et ce n'est pas ce que vous souhaitez.
24 Je vous en prie, allez-y.
25 M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
26 Q. Monsieur le Témoin, vous nous avez décrit les événements du 16 août à
27 Benkovac, 16 août 1990. Pourriez-vous nous dire comment la population a-t-
28 elle réagi à la situation dans les municipalités de la Dalmatie du Nord ?
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1 R. Oui. Ce sont des événements qui ont changé significativement la
2 situation sur le terrain et accru les tensions ethniques.
3 Le lendemain matin, le 17 août, lors de ce rassemblement qui avait
4 été prévu précédemment, un grand nombre de citoyens se sont rassemblés
5 parce qu'ils avaient entendu que le SUP de Benkovac avait vu son dépôt
6 d'armes saisi. Quelque 20 000 personnes étaient présentes lors de ce
7 rassemblement. Et donc, les nouvelles circulaient concernant les forces de
8 police croates qui avaient eu recours à leurs hélicoptères pour aller à
9 Lika pour aller saisir des armes de la municipalité serbe là-bas. Les
10 informations ont été confirmées par la JNA, et c'est la première fois que
11 la JNA est intervenue et que les avions de combat ont essayé de repousser
12 ces hélicoptères. C'est la première fois que la population, qui était donc
13 rassemblée à ce rassemblement, a lancé des appels pour qu'on leur donne des
14 armes pour se protéger.
15 Le président du SDS, le Pr Raskovic, a dit à ce rassemblement que les armes
16 n'étaient pas nécessaires, qu'il parlerait au président Tudjman pour
17 empêcher que le conflit ne monte en puissance. Malheureusement, ces paroles
18 rassurantes n'ont pas eu l'effet souhaité, et, le même soir, des barrages
19 routiers ont été mis en place et d'autres obstacles ont été mis en place
20 pour couper les routes dans la zone de Lika et du fleuve Cetina.
21 Q. Monsieur le Témoin, qui avait érigé ces barrages routiers et à qui
22 étaient les hommes qui s'y postaient ?
23 R. C'étaient les autochtones, les villageois. Il n'y avait pas de barrages
24 routiers à Benkovac; mais dans tous les villages environnants, il y en
25 avait, par contre. Ils ont utilisé des armes de chasse et certaines armes,
26 ou trophées en quelque sorte, que les hommes avaient encore gardées chez eu
27 remontant à la Deuxième Guerre mondiale.
28 Q. Je voudrais encore vous poser une question sur cette question. Pouvez-
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1 vous nous dire, Monsieur le Témoin, la nuit de cristal, qu'est-ce que cela
2 a représenté à Zadar ?
3 R. Oui, là, on avance à 1991. Je pense que ça s'est produit le 4 mai, où,
4 deux jours avant, deux policiers de la réserve croates ont été tués entre
5 Benkovac et Zadar. Les villageois de ce village d'où provenaient ce
6 policier ont organisé toute une manifestation de protestation à Zadar, et
7 plus de 10 000 personnes se sont livrées à des destructions de tout ce qui
8 était propriété serbe - des restaurants, des bars. Et même les échoppes du
9 marché de Zadar qui étaient propriété serbe ont été dérigées [phon]. Tous
10 les Serbes qu'ils ont rencontrés ont été lynchés. Des gens ont été blessés.
11 Des magasins, des bureaux ont été mis à feu, comme par exemple le bureau de
12 la compagnie aérienne yougoslave et d'autres bureaux propriété
13 d'entreprises de Belgrade qui avaient leurs filiales là-bas. Des incendies
14 ont été allumés à Zadar, et tous les gens étaient en rue.
15 Q. Monsieur le Témoin, qu'est-ce qui s'est produit pour ces habitants
16 serbes de Zadar le lendemain ?
17 R. Eh bien, cette nuit à Zadar a été très difficile pour les Serbes.
18 Personne n'a pu trouver de sommeil; les gens avaient peur que quelqu'un
19 débarque dans leurs maisons. Les gens enlevaient les étiquettes de leur nom
20 sur leur sonnette pour éviter qu'on les identifie comme Serbes. Des camions
21 venaient s'arrêter devant de nombreuses maisons, et beaucoup d'habitants
22 serbes de Zadar ont quitté la ville ce jour-là et se sont rendus dans des
23 zones où la majorité serbe résidait.
24 Enfin, pour vous décrire plus clairement la situation : à Zadar, il y avait
25 quelque 100 000 habitants, et parmi ceux-là 25 000 à 30 000 étaient des
26 Serbes. La colonne qui s'est dirigée vers Benkovac et à Knin, colonne de
27 Serbes qui se réfugiaient là-bas, était une file de personnes sans fin. Les
28 gens étaient effrayés, ils ont eu très très peur de cette nuit de cristal à
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1 Zadar, dont le nom, bien sûr, est dû au bruit d'éclat des fenêtres, des
2 vitrines. Et ils allaient peur de ce qui leur adviendrait. Ils avaient peur
3 de subir le même sort.
4 Q. Monsieur le Témoin, nous avons parlé du rôle de la JNA en 1990 et début
5 1991.
6 Pourriez-vous nous dire, dans cette première phase du conflit, quelles
7 furent les réactions de la JNA suite à ce conflit et à ces barrages
8 routiers ?
9 R. A l'époque, l'armée populaire yougoslave voulait imposer la paix. La
10 nuit, elle ne se rendait pas à ces barrages routiers parce qu'elle ne
11 voulait pas aiguiser les tensions, mais au cours de la journée elle se
12 rendait à Knin, à Obrovac, et les officiers de la JNA rendaient visite aux
13 personnalités importantes de ces communautés pour essayer de les convaincre
14 d'enlever ces barrages routiers, en leur disant qu'ils étaient là pour
15 garantir la paix en tant qu'armée.
16 Ils ont fait la même chose en rendant visite aux villages croates. Il y
17 avait beaucoup de villages dont la population était mixte : moitié serbe,
18 moitié croate. Et donc, vous aviez des soldats de la JNA en véhicules
19 blindés qui montaient la grade 24 heures sur 24 pour veiller à ce que
20 personne ne crée d'incident qui enflammerait la situation.
21 Q. Ces zones tampon entre les Croates et les Serbes dont vous avez parlé,
22 entre les villages croates et serbes, elles servaient à former une espèce
23 de ligne de séparation entre les zones habitées par les Serbes et les zones
24 habitées par les Croates, si je ne me trompe.
25 R. Je ne peux pas vraiment appeler ça une ligne de séparation. Il y avait
26 plusieurs véhicules blindés transporteurs de troupes, des soldats, de la
27 police militaire essentiellement, qui se rendaient de village en village.
28 Et dans certaines régions où les relations étaient bonnes, bon, ils ont
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1 peut-être connu davantage de réussites que dans d'autres. Ce n'était pas
2 vraiment une ligne de séparation. C'était un certain nombre de patrouilles
3 qui essayaient de veiller à ce que des incidents ne se produisent pas entre
4 les deux peuples.
5 Q. Monsieur le Témoin, pendant que la JNA joue le rôle que vous êtes en
6 train de décrire, est-il arrivé que des forces serbes occupent des villages
7 croates ou bien que des forces croates occupent des villages serbes ?
8 R. Non. Il n'y avait pas de prise de contrôle, de provocations ou bien
9 d'attaques d'aucun côté. Et d'ailleurs, les Serbes et les Croates ne
10 quittaient pas leurs villages encore à l'époque.
11 Q. Monsieur le Témoin, savez-vous si au cours de l'été 1991 s'il y a eu
12 des changements en ce qui concerne les ressources humaines au sein de la
13 JNA, des unités de la JNA et du commandement ?
14 R. Oui. Il y a eu des changements dans le sens où des officiers et des
15 soldats d'active de nationalité croate ont quitté la JNA pour passer dans
16 l'armée croate. Et puis, en préambule de tous ces événements, il y a eu la
17 création de la ZNG, la Garde nationale croate. Le président Tudjman avait
18 lancé un appel en demandant à tous les Croates de quitter la JNA et de
19 passer dans la ZNG. Et c'est devenu flagrant en été 1991, alors que tout
20 ceci avait commencé au printemps 1991.
21 Q. Au cours de l'été 1991, est-ce que les autorités croates ont changé de
22 position par rapport à la JNA ?
23 R. Oui, ceci a changé de façon flagrante. En juin et en août, suite à
24 l'appel de Tudjman et du gouvernement croate demandant à l'armée de quitter
25 les villes croates, ils ont posé un ultimatum, en réalité, que le
26 commandement de la JNA a refusé. Il voulait résoudre ce problème par le
27 biais de l'investigation politique.
28 Tous les mois, les présidents de toutes les ex-républiques yougoslaves se
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1 réunissaient pour négocier au sujet du futur pays et de son administration.
2 Q. Mais est-ce que dans le territoire où vous habitiez les autorités
3 croates ont changé de position par rapport à la JNA ?
4 R. Oui. Ceci a changé dans la mesure où les autorités croates ont ordonné
5 un blocus de caserne. La population croate a procédé au blocus des
6 casernes, toutes les casernes placées dans le territoire croate. Il n'y
7 avait pas que la ZNG; la population était d'accord avec eux. Et quand je
8 parle du "blocus", ça veut dire que ces casernes étaient encerclées, on
9 leur a coupé l'eau et l'électricité.
10 Q. Et il y avait combien de casernes de la JNA à Zadar, et quel a été leur
11 sort à ce moment-là ?
12 R. Il y avait trois grosses casernes à Zadar et plusieurs petites
13 casernes, et toutes ces casernes ont été bloquées.
14 Q. Monsieur, maintenant je voudrais que nous parlions de ce que vous avez
15 fait à l'époque.
16 Est-ce qu'à un moment donné vous êtes entré en contact avec le MUP de la
17 SAO Krajina ?
18 R. Oui.
19 Q. Précisez cela dans le temps, et puis quelle est la personne avec
20 laquelle vous êtes entré en contact ?
21 R. C'est quelque chose qui est arrivé vers la fin de l'automne ou début de
22 l'hiver 1990. Puisque j'avais compris qu'on n'avait pas le choix, qu'on
23 allait devoir tous quitter Zadar à un moment donné, j'ai contacté donc le
24 poste de police de Benkovac pour me renseigner sur les possibilités d'être
25 transféré chez eux.
26 Q. Est-ce qu'à un moment donné vous fait connaissance de Milan Martic ?
27 R. Oui. Peu de temps après la première réunion dans le SUP de Benkovac, le
28 commandant du SUP de Benkovac m'a présenté à Milan Martic.
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1 Q. Est-ce que Martic vous a fait part de ses décisions portant la création
2 des institutions sur le territoire de la Krajina ?
3 R. Oui. Cet entretien a été assez long, nous sommes restés ensemble
4 pendant une heure ou plus. Je savais que la Région serbe autonome de la
5 Krajina n'était pas un territoire sûr en ce qui concerne le travail du
6 service de Sûreté d'Etat puisqu'ils n'avaient pas de locaux, équipement,
7 ressources humaines parce que cette région, à l'époque yougoslave, était
8 couverte par des centres se trouvant dans de grandes villes. Martic m'a
9 confirmé cela. Il m'a dit qu'ils n'avaient pas de service de Sûreté et qu'à
10 partir du moment où ils allaient installer leurs institutions, ils allaient
11 aussi installer un service de Sûreté pour la Krajina vu qu'ils se voyaient
12 obligés d'opposer résistance au gouvernement de Zagreb.
13 Q. Dans la SAO Krajina, est-ce qu'il y avait des professionnels de la
14 sécurité, de la sûreté ?
15 R. Non. Je pourrais vous expliquer cela.
16 Kordun était couvert par Karlovac. Banija était couverte par Sisak. Knin
17 par Sibenik. Benkovac et Obrovac par Zadar. De sorte qu'il n'y avait pas
18 d'agents ou de locaux dans ces villes-là. Mais dans la ville de Knin, il y
19 avait deux opérationnels de Knin qui se rendaient sur le terrain de temps
20 en temps. Ils étaient hébergés, ils utilisaient le bureau du SUP de Knin,
21 de la police de Knin.
22 Q. Monsieur, est-ce qu'à un moment donné l'on a décidé de créer ce service
23 de la Sûreté d'Etat de la SAO Krajina; et le cas échéant, quand ?
24 R. Oui. Vu que les choses tournaient mal dans la région, la paix était
25 menacée. On a créé à Knin un Conseil national serbe, organe qui devait
26 négocier au nom de la population de la région. Ils ont décidé de créer
27 aussi la police de la SAO Krajina.
28 C'est à ce moment-là que j'ai à nouveau pris contact avec Martic. C'était
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1 juste avant la Saint-Sylvestre de 1990. Et donc, le 5 janvier, Martic a
2 pris la décision de créer la police de la Krajina. Il a dû avoir une
3 réunion avant le 5, et il m'a introduit à Dusan Orlovic, qui devait être
4 responsable pour la sûreté de la SAO Krajina.
5 Q. Est-ce que ce Dusan Orlovic avait une expérience dans les affaires
6 liées à la Sûreté de l'Etat ?
7 R. Non. Il n'a jamais travaillé dans la police ou même dans la Sûreté
8 d'Etat auparavant.
9 Q. Est-ce que ce Orlovic vous a confié certaines missions à un moment
10 donné ?
11 R. Non. Au début, il n'y avait pas de missions particulières, mis à part
12 la mission générale qui consistait à recueillir des informations dans toute
13 la région concernant les activités des unités spéciales du MUP de la
14 République de Croatie. Ces informations devaient nous aider à alerter les
15 populations des villages pour qu'ils se préparent aux attaques éventuelles.
16 A l'époque, la JNA existait encore. Et "notre" population, la population
17 serbe de la région, pensait que l'armée allait pouvoir restaurer la paix.
18 Cependant, on se tenait prêts pour intervenir dans le cas de l'échec de la
19 JNA. Et il fallait alerter les villageois parce qu'on ne disposait pas
20 suffisamment d'armes pour se défendre.
21 Q. Est-ce qu'à un moment donné vous avez créé une branche de la Sûreté
22 d'Etat à Benkovac ?
23 R. Oui, cela a été fait. Ce que je vous ai décrit tout à l'heure,
24 c'étaient les tâches qui étaient les nôtres au début. Mais vers le
25 printemps 1991, j'ai donné un ordre de créer une branche de la SDB à
26 Benkovac. J'avais carte blanche pour recruter le personnel, cinq, sept
27 opérationnels. Il m'a aussi informé de l'organigramme futur de
28 l'organisation. Il a dit que dans d'autres régions de la Krajina, on était
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1 en train d'organiser de telles branches et que nous étions tous liés au
2 centre de Knin. Nous étions tous placés sous leur direction.
3 Q. Et quelles étaient les conditions de travail à l'époque, en 1991, dans
4 la SDB de Krajina ?
5 R. Il s'agissait de la débrouille, rien d'autre. On n'avait même pas de
6 machines à écrire, on n'avait absolument rien. Cela ne ressemble pas à un
7 service digne de ce nom. Et puis, à l'époque, de toute façon, il s'agissait
8 avant tout de recueillir des informations concernant les menaces auxquelles
9 était soumise la population de la région.
10 Q. Est-ce que vous savez comment la SDB de la Krajina a été financée à
11 l'époque ?
12 R. Comme la sécurité publique, de la même façon. Le Conseil de la sécurité
13 nationale avait lancé un appel en demandant à tous ceux qui pouvaient aider
14 d'aider à financer ces organisations. Donc un fonds a été créé. Et tous les
15 policiers recevaient le même salaire, quel que soit leur niveau.
16 Q. Monsieur, qui a été le chef du service la Sûreté de l'Etat de la
17 Krajina en 1991 ?
18 R. Dusan Orlovic.
19 Q. Pourriez-vous nous dire si vous savez si ce service recevait des
20 instructions, une directive concernant son travail et son fonctionnement ?
21 Je vous parle de l'année 1991.
22 R. A en juger des réunions que j'avais assez fréquemment avec Orlovic à
23 Knin, vu qu'il n'y avait aucun service de transmission qui fonctionnait à
24 l'époque, tous les rapports étaient transmis par estafettes. Il n'y avait
25 rien d'autre qui marchait. Pourriez-vous répéter la question.
26 Q. Est-ce que votre service recevait des directives et des instructions
27 concernant le fonctionnement de son travail au cours de l'année 1991 ?
28 R. Orlovic m'a dit qu'il prenait ses instructions du Conseil national
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1 serbe, mais je savais que Martic avait son mot de dire. Il avait plus
2 d'influence là-dedans. Ce conseil a été rebaptisé par la suite pour devenir
3 le Conseil de la Défense nationale.
4 Q. Monsieur, en 1991, pouvez-vous nous dire comment Milan Martic évaluait
5 le travail et le fonctionnement de la SDB de la Krajina ?
6 R. Je pense qu'il était assez content au début, mais au fur et à mesure
7 que le temps passait, il était de moins en moins content. Au cours de
8 plusieurs réunions, il a montré son mécontentement quant à la qualité et la
9 quantité d'informations qu'on lui fournissait.
10 Q. Est-ce que, Monsieur, à un moment donné la SDB de la Krajina a cessé
11 d'exister ?
12 R. Oui. C'est Martic qui a pris cette décision. C'était vers la fin du
13 mois de novembre ou au début du mois de décembre 1991 qu'il a pris la
14 décision de démanteler ce service.
15 Q. Est-ce que cette décision a été mise en oeuvre ?
16 R. Oui.
17 Q. J'ai encore quelques questions qui concernent une période précédente,
18 mais il s'agit d'un autre thème aussi. Je vais vous poser quand même toutes
19 ces questions.
20 Savez-vous comment a-t-on reçu les premières armes à Benkovac ? Quand et
21 comment.
22 R. Les premières armes qui sont arrivées à Benkovac - je connais cela
23 personnellement, je suis au courant de cette action pour ainsi dire - parce
24 que les citoyens habitant les villages voisins des villages croates
25 faisaient pression. La JNA à l'époque refusait de distribuer des armes et
26 de mobiliser la population serbe. Vu que Benkovac disposait de la Défense
27 territoriale mais ne disposait pas de ses propres dépôts d'armes, lors de
28 plusieurs réunions qui se sont déroulées à Knin et plusieurs lettres
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1 envoyées au Conseil national serbe faisant état des menaces subies par la
2 population serbe dans la région, le conseil a décidé de faire parvenir un
3 camion plein d'armes, d'armes anciennes d'ailleurs, de fabrication russe
4 datant de la Deuxième Guerre mondiale à Knin.
5 Q. Vous avez mentionné le dépôt de la TO, c'est le dépôt de Golubic. De
6 quoi s'agit-il ? Pourriez-vous nous décrire ce dépôt de Golubic ? Qui
7 assure la sécurité de ce lieu, et où se trouve ce
8 dépôt ?
9 R. Ce dépôt se trouve à une quinzaine de kilomètres de Knin en direction
10 de Bosnie, à proximité du village de Golubic. Avant, on considérait que
11 c'était un des plus grands dépôts d'armes de la Dalmatie centrale. Placé
12 sous le contrôle de la JNA. Une toute petite partie de ce dépôt avait été
13 utilisée à l'époque dans les années 1960 -- la décision avait été prise
14 dans les années 1960, au moment où l'on a créé la Défense territoriale.
15 Donc, à cette époque-là déjà, on avait pris la décision qu'une partie de ce
16 dépôt allait être contrôlée par la TO. Donc c'est dans cette partie-là du
17 dépôt que se trouvaient les vieilles armes destinées à l'utilisation de la
18 TO.
19 Q. Monsieur, ce premier envoi d'armes arrivé à Benkovac, il a été
20 distribué à qui et comment ?
21 R. Les représentants des communes locales des différents villages qui
22 devaient recevoir les armes sont arrivés. Je peux vous énumérer ces
23 villages si cela est important. Vu qu'aucune institution ne voulait prendre
24 la responsabilité de la distribution de ces armes - puisque la guerre
25 n'était pas officielle, la JNA était encore sur le terrain, il n'y avait
26 pas de ligne de front, il n'y avait pas de ligne de démarcation - donc on a
27 distribué ces premières armes aux représentants des communes locales dans
28 une forêt de pins à proximité de Benkovac. L'on distribuait une dizaine de
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1 fusils par village. Et celui qui était à la tête de cette opération était
2 le représentant de la TO de Knin, en coopération avec le commandant du QG
3 de la TO de Benkovac.
4 Q. Vous avez parlé d'un représentant de la TO Knin [phon]. Est-ce que vous
5 connaissez son nom ?
6 R. Oui. Milan Dragisic.
7 Q. Monsieur, connaissez-vous Zdravko Zecevic ?
8 R. Oui.
9 Q. Pourriez-vous nous dire, en 1991, est-ce que Zecevic a eu une
10 quelconque fonction sur le territoire de la SAO Krajina ?
11 R. Zdravko Zecevic est originaire du même village que moi. Je le connais
12 depuis que je suis tout petit.
13 En 1990, il a rejoint le parti du SDS. Il était le premier président de la
14 municipalité de Benkovac, vu que son parti avait remporté les élections. Il
15 était aussi le vice-président du parti du SDS, le remplaçant de Jovan
16 Raskovic, et membre du Conseil national serbe.
17 Q. [aucune interprétation]
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Moi, je voudrais poser une question par
19 rapport à l'une des réponses données par le témoin.
20 Cette décision consistant à utiliser des armes de la TO du dépôt de
21 Golubic et de les distribuer, pourriez-vous nous donner une date
22 approximative de la prise de cette décision ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Au début du mois de mai 1991, après
24 la nuit de cristal qui a eu lieu à Zadar. C'était donc à peu près le 10 mai
25 1991.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
27 Vous pouvez poursuivre.
28 M. PETROVIC : [interprétation] Merci.
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1 Q. Donc, en 1991, Zecevic est, entre autres, le président de la
2 municipalité de Benkovac. Vous a-t-il convié à une réunion au mois de mai
3 1991 ?
4 R. Il me conviait souvent à des réunions, en général -- vu qu'il était
5 absolument ignorant par rapport aux questions de sécurité. Il me conviait
6 pour me poser des questions pour faire une évaluation au point de vue de
7 sécurité. Donc nous avons eu pas mal de réunions au mois d'avril et au mois
8 de mai.
9 Q. M. Zecevic vous a-t-il convié à une réunion pour vous présenter à des
10 gens arrivés dans la région de Krajina au mois d'avril et au mois de mai
11 1991 ? Des gens qui n'étaient pas originaires de la Krajina ou de Benkovac.
12 R. Ah, je vois. Je vois de quoi vous parlez. Donc c'est une réunion qui a
13 eu lieu au mois d'avril, pas au mois de mai. Il m'a convoqué et il m'a
14 demandé de participer à la réunion, qu'un homme particulier allait venir,
15 mais il n'avait aucune information à ce sujet. Il m'a demandé si j'avais
16 une quelconque information à ce sujet. Il s'agissait du capitaine Dragan.
17 Moi, à l'époque, je ne savais pas qui était cet homme. J'ai fait sa
18 connaissance la première fois en avril 1991, lors de cette réunion avec
19 Zecevic.
20 Q. Pourquoi Zecevic voulait-il que vous fassiez la connaissance du
21 capitaine Dragan ?
22 R. Il m'a dit lui-même qu'il n'était pas à l'aise dans ce domaine. Il ne
23 connaissait pas le capitaine Dragan. On lui avait dit que c'était un
24 officier haut gradé de l'armée australienne, ayant de très bons liens avec
25 différentes entreprises ou organes de sécurité en Irlande, aux Etats-Unis.
26 Et vu qu'il n'était pas à l'aise de faire sa connaissance et de faire une
27 réunion avec lui, il m'a convié à une réunion. Il est venu le voir sur
28 recommandation des gens de Belgrade et de la diaspora serbe originaire des
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1 Etats-Unis.
2 Il avait peur à l'époque qu'il s'agisse d'un escroc tout simplement,
3 puisqu'à l'époque vous avez des gens de toute espèce qui venaient dans la
4 Krajina.
5 Q. Mis à part cette réunion, cette première réunion que vous venez
6 de décrire, est-ce qu'il y en a eu d'autres auxquelles vous avez assisté en
7 présence de Zecevic et du capitaine Dragan ?
8 R. Oui. Il y en a eu une autre trois ou quatre semaines plus tard, au mois
9 de mai.
10 Q. Qui a participé à cette deuxième réunion ?
11 R. J'ai été convoqué de la même façon par Zecevic. Il m'a dit que le
12 capitaine Dragan allait participer à la réunion, cette fois-ci, accompagné
13 de Martic. Donc il voulait à nouveau que je participe à la réunion, chose
14 faite au mois de mai 1991.
15 Q. Est-ce que Martic a dit quoi que ce soit cette fois-ci au sujet du
16 capitaine Dragan ?
17 R. Oui. Il était enchanté d'avoir fait sa connaissance. Il disait beaucoup
18 de bien à son sujet. Il disait que c'est quelqu'un qui allait pouvoir
19 aider, parce qu'à l'époque tous les cadres croates avaient quitté la police
20 de la SAO Krajina. Il fallait les remplacer parce qu'on ne pouvait pas
21 fonctionner. Le capitaine Dragan a dit à Martic qu'il allait pouvoir former
22 les gens pour qu'ils deviennent vraiment efficaces, des policiers
23 extrêmement efficaces, et que ces gens allaient pouvoir être opérationnels
24 en cas de guerre. Donc Martic a confié à Dragan cet entraînement, ce cours
25 ou cette formation.
26 Q. Pourquoi Martic est-il allé voir Zecevic pour parler avec lui du
27 capitaine Dragan et de cette formation d'infanterie, la formation que vous
28 venez de mentionner ?
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1 R. Tout d'abord, Martic avait beaucoup de respect pour Zecevic, c'est un
2 intellectuel, un homme calme, un homme politique. Et aussi, le premier
3 contact avec Martic avait été élaboré par Zecevic. Et je ne sais pas qui
4 est venu en premier en contact avec le capitaine Dragan, mais en tout cas
5 Martic se sentait obligé d'informer Zecevic de tout cela. Et puis, de toute
6 façon, Zecevic avait pas mal de contacts dans la diaspora serbe et il
7 comptait sur son aide pour informer tous ces gens de ce qui se passe, de
8 l'aide dont ils avaient besoin, et cetera.
9 Q. Ici, on peut lire que Zecevic était le premier à être entré en contact
10 avec Martic.
11 R. J'ai voulu dire en réalité que c'est Zecevic qui a introduit le
12 capitaine Dragan à Martic.
13 Q. Merci.
14 Monsieur Draca, quelle impression vous a faite le capitaine Dragan, après
15 l'avoir rencontré à plusieurs reprises ?
16 R. Au début, il m'a fait une bonne impression. Il était plein d'énergie,
17 et puis ce n'était pas un extrémiste. Ce n'était pas un Chetnik non plus.
18 Et au fur et à mesure que le temps avançait, mon opinion a changé.
19 Q. Monsieur le Témoin, vous dites que vous avez changé d'avis. Pourquoi
20 avez-vous changé d'avis ?
21 R. Compte tenu de mon poste à ce moment-là, à savoir je rassemblais des
22 éléments d'information, donc je savais fort bien ce qui se passait dans les
23 armées qui se trouvaient dans le voisinage de Benkovac et Knin. J'avais
24 remarqué que le capitaine Dragan était venu de son propre chef, sans un
25 quelconque accord avec les autorités serbes, ou le Conseil national, ou
26 l'armée serbe. Il avait l'habitude de venir seul. Il organisait des
27 rassemblements politiques. Il a essayé d'organiser les rébellions contre
28 l'armée car il prétendait être le seul à pouvoir sauver la Krajina, et il
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1 ne pourrait sauver la Krajina que lorsque la JNA tomberait. Et il diffamait
2 les hommes politiques locaux, et il semait le trouble en quelque sorte.
3 Et pour les gens simples qui craignaient une éventuelle attaque croate,
4 ils ne le percevaient pas de cette manière. Il était accepté partout. Les
5 gens étaient euphoriques à son égard. Cependant, j'estimais que ceci
6 n'était pas bien dans le contexte général de l'unité des peuples dans le
7 secteur. Il passait de moins en moins de temps au camp.
8 A un moment donné, j'ai même demandé à Orlovic s'il savait ce qui se
9 passait et pourquoi, et étant donné qu'il devait entraîner les policiers au
10 camp, il n'a pas accompli sa mission. Et je dois dire qu'un citoyen
11 étranger, Mark Lynch, il a faire venir cet homme qui était Irlandais. Il
12 l'a laissé au camp et il se promenait dans les alentours du camp.
13 C'est quelque chose que j'ai également communiqué à Zecevic, qui m'a
14 dit qu'il serait préférable de ne pas être trop dur contre lui parce que
15 tous les hommes de la diaspora serbe voyaient en lui l'homme qui pouvait
16 les sauver, donc il ne fallait pas le critiquer en public, et je me suis
17 abstenu de le faire.
18 Q. Comment les structures politiques de la Krajina ont-elles réagi au
19 comportement du capitaine Dragan que vous venez de nous décrire ?
20 R. Au début, ils n'étaient peut-être pas au courant de ce dont je viens de
21 vous parler ou ne l'avaient pas remarqué. Mais il est allé un peu plus
22 loin. Il a assisté aux séances du Conseil national serbe, même s'il n'était
23 pas invité à le faire, et il présentait des propositions et des suggestions
24 que le président du Conseil national serbe, Milan Babic, n'a pas appréciées
25 à l'époque, et les tensions ont commencé à se faire sentir entre les deux
26 hommes.
27 Q. Vous avez dit qu'il a assisté à ces séances du Conseil national serbe.
28 Est-ce qu'il a, à aucun moment, fait mention de propositions, et quelles
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1 ont été les réactions à ces dernières ?
2 R. Eh bien, à cette époque-là, c'était un homme très populaire. S'il
3 proposait quelque chose, les membres du conseil ne souhaitaient pas
4 s'opposer à lui de façon ouverte, à l'exception de Babic et de Martic.
5 Essentiellement Babic. Martic par la suite également.
6 Et ses propositions étaient impossibles à traduire dans la réalité à
7 l'époque car c'était une région où les autorités avaient été improvisées.
8 Et tout était improvisé. Donc aucune de ses propositions n'a jamais vu le
9 jour.
10 Q. Est-ce qu'à aucun moment quelqu'un a-t-il empêché le capitaine Dragan à
11 assister aux séances du Conseil national serbe ?
12 R. Oui. Lorsqu'il a fait une proposition lors d'une des réunions où il
13 indiquait qu'il devait prendre le contrôle de tous les états-majors de la
14 Défense territoriale, et là il était allé trop loin. Babic a clairement
15 indiqué qu'il est très, très insatisfait. Il l'a dit de façon très dure.
16 Plus tard, sans que le capitaine Dragan ne soit au courant de cela, il lui
17 a interdit l'accès des locaux à l'endroit où se tenaient les réunions du
18 Conseil national serbe. Et le capitaine n'était pas au courant. Il est venu
19 assister à une des réunions et un des gardes chargés de la sécurité lui a
20 dit qu'il devait repartir, et il a été très déçu à l'époque par ce geste.
21 Q. Et qu'a fait le capitaine Dragan après cet incident ?
22 R. Eh bien, à différents endroits dans Knin, il avait organisé -- je ne
23 peux pas proprement parler de rassemblements politiques, mais ses
24 apparitions en public étaient connues de tous au poste de police où il a
25 clairement indiqué qu'il n'était pas content. Il a
26 dit : Je suis venu vous défendre et vous me chasser. Il était très déçu, et
27 il avait l'air très déçu.
28 A ce moment-là, j'étais avec Dule Orlovic au SUP de Knin par hasard et je
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1 l'ai vu, et à un moment donné il m'a parlé. Il m'a dit : Je vais quitter la
2 région, vous allez voir ce qui va arriver lorsque je ferai cela. Vous ne
3 pourrez rien mettre sur pied, vous ne pouvez rien faire avec les autorités
4 telles qu'elles existent. C'était pour l'essentiel ce qu'il a dit. J'ai vu
5 Orlovic, et, effectivement, il a quitté Knin quelques jours après. C'était
6 peut-être au début du mois d'août,
7 Q. En quelle année ?
8 R. 1991.
9 Q. Deux questions supplémentaires encore sur ce sujet.
10 Où le Conseil national serbe tenait-il ses réunions et ses séances, si vous
11 le savez ?
12 R. Je le sais. Les sessions se tenaient dans la citadelle qui dominait la
13 ville. C'est une citadelle médiévale ancienne qui surplombe Knin. Avant la
14 guerre et avant que tout ceci ne se soit passé, cela hébergeait un musée et
15 les institutions culturelles de la ville de Knin. Mais le Conseil national
16 serbe était autorisé à tenir ces séances. A ce moment-là, le bâtiment avait
17 été mis à sa disposition.
18 Q. Est-ce que vous savez si une quelconque unité de civils ou militaires a
19 jamais été cantonnée à l'intérieur de cette citadelle ?
20 R. Non. A moins que vous ne vouliez parler de la sécurité, qui était assez
21 bien organisée, et des rumeurs circulaient à ce moment-là indiquant qu'il
22 pouvait y avoir des attaques d'hélicoptères lancées par les forces croates
23 et qu'ils pouvaient arrêter ou tuer tous les membres du Conseil national.
24 Donc, à tout moment, il y avait entre 15 et 20 soldats ou policiers qui
25 montaient la garde devant le Conseil national serbe car ils en assuraient
26 la sécurité.
27 Q. Monsieur le Témoin, est-ce qu'à aucun moment en 1991 vous avez entendu
28 dire que quelques collègues de Serbie étaient arrivés ? C'étaient vos
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1 collègues ?
2 R. Oui. C'est quelque chose dont j'ai entendu parler pour la première fois
3 lors d'une déclaration faite en public. Et Orlovic a par la suite confirmé
4 cela.
5 Q. Avez-vous entendu dire -- ou pourriez-vous nous dire ce dont vous avez
6 entendu parler, et qu'est-ce que qu'Orlovic a confirmé par la suite ?
7 R. Eh bien, voyez-vous, la population était illettrée pour l'essentiel. Il
8 y avait des gens qui lisaient, il y a des types qui sont arrivés de la DB
9 serbe. On ne savait pas quel rôle ils jouaient ni pourquoi ils étaient là.
10 Tout ceci était entouré de mystère.
11 Et lorsque j'ai entendu cela, je me suis tourné vers Orlovic et je
12 lui demandé si c'était vrai. Il a confirmé que c'était vrai, parce qu'il le
13 savait par ses hommes qui étaient chargés du renseignement.
14 Q. Et alors, vous nous avez dit que : Ce sont des choses que l'on
15 entendait dire parmi la population. Il s'agit de quel environnement ?
16 Combien de personnes vivaient là ? Et comment les nouvelles se répandaient-
17 elles ?
18 R. Eh bien, c'est une région qui est très peu peuplée. Par exemple, Knin
19 est la ville la plus importante. Il n'y avait personne qui -- tout le monde
20 se connaissait dans cette région. Et donc, on apprenait très vite si
21 quelqu'un de l'extérieur arrivait. C'était quelque chose que l'on
22 remarquait très aisément.
23 Q. Et pourriez-vous nous dire si vous avez appris ou entendu dire ou si
24 vous avez entendu parler de noms ou d'informations particulières concernant
25 ces hommes qui étaient arrivés à Knin qui étaient venus de Serbie ?
26 R. Pas tout de suite. Je l'ai appris d'Orlovic par la suite. Il m'a
27 simplement dit que Frenki était arrivé et qu'il était là en qualité de
28 journaliste. Mais très rapidement, ceci a été -- je ne peux pas dire
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1 découvert, mais le contexte était tel qu'il était impossible de dire que
2 c'était un journaliste. Et au bout de dix ou 15 jours, on apprenait
3 rapidement qui il était véritablement.
4 Q. Est-ce que l'endroit où était hébergé Frenki a été évoqué ?
5 R. Ecoutez, pas au début. Mais j'ai entendu dire qu'il avait un
6 appartement qui faisait partie de ce complot.
7 Q. Alors, avez-vous rencontrez Frenki; et si oui, quand et comment ?
8 R. C'était à la mi-mai. Je m'étais rendu à une réunion avec Orlovic à
9 Knin. Je ne l'ai pas trouvé dans ses locaux officiels. Ils m'ont dit où il
10 se trouvait. Il se trouvait dans un lieu qui était un lieu où il y avait un
11 établissement chargé de restauration. Je m'y suis rendu. J'ai trouvé
12 Orlovic avec un autre homme. Il s'est avéré par la suite qu'il s'agissait
13 de M. Simatovic.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, Maître Petrovic, je sais ce que
15 veut dire appartement. Je sais ce qu'est un complot. Mais les deux
16 ensembles, je ne sais pas très bien.
17 Est-ce que le témoin peut expliquer, s'il vous plaît.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit un appartement.
19 Cet appartement est un appartement que quelqu'un loue, mais celui qui
20 loue cet appartement -- en tout cas, personne ne sait à quoi sert cet
21 appartement. C'est comme - comment dire ? - un lieu sûr. Je ne sais pas si
22 j'ai réussi à bien décrire ce dont je parle.
23 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
24 M. PETROVIC : [interprétation] Si vous me le permettez, Monsieur le
25 Président.
26 Q. Pourquoi de tels appartements sont-ils loués par vos services ? Quelle
27 est la raison pour laquelle de tels appartements sont loués ?
28 R. Un tel appartement ne serait loué que pour tenir des réunions secrètes
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1 et avoir des contacts secrets avec les sources et les agents pour pouvoir
2 fournir des renseignements secrets, si nous souhaitions que personne ne
3 puisse voir que nous rencontrions de telles personnes.
4 Q. Monsieur le Témoin, vous dites avoir rencontré Frenki au restaurant en
5 compagnie de Dusan Orlovic. Avez-vous appris à ce moment-là ou par la suite
6 les raisons pour lesquelles Frenki est resté à Knin et avez-vous appris
7 quelles fonctions il remplissait pour les services pour lesquels il
8 travaillait à ce moment-là ?
9 R. Oui. C'est tout à fait naturel, parce que j'étais un professionnel. Je
10 travaillais pour ces services-là. Cela m'intéressait. Et il m'a confirmé,
11 effectivement, que c'était un agent actif des services de Sûreté de la
12 Serbie. La conversation était assez longue. Nous avons parlé de beaucoup de
13 choses, y compris le nombre d'années où nous avions travaillé pour ces
14 services et quelles étaient nos fonctions. Il m'a dit qu'il travaillait
15 avec le groupe des Américains, comme nous l'appelions à ce moment-là.
16 L'INTERPRÈTE : Appartement de conspirateurs, traduit littéralement.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Et sans m'étendre trop sur le sujet, je dois
18 vous dire qu'il s'intéressait particulièrement à la situation au plan de la
19 sécurité dans la région, et également le fait est que certains membres
20 d'une organisation extrémiste Oustasha avaient fait surface. Et c'étaient
21 autrefois des immigrés qui étaient retournés et rentrés en Croatie.
22 La JNA a réagi, ses relations avec les deux groupes. Donc, tout ce qui
23 intéressait la République de Serbie à l'époque et qui aurait pu avoir une
24 incidence sur la situation au plan de la sécurité de la Serbie et de
25 différentes activités que devrait mener dans ce cas la Serbie pour
26 recueillir ces éléments d'information en temps utile.
27 C'est ainsi que j'avais compris tout cela.
28 Q. Et les renseignements, comme vous le dites, qui intéressaient Frenki à
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1 ce moment-là, est-ce qu'il vous a expliqué pourquoi il se trouvait là ?
2 Vous a-t-il expliqué quel -- portait son travail et pour quel type de
3 travail il était responsable lorsqu'il était envoyé par les services ?
4 R. Eh bien, en tant que collègues, nous savions comment les services
5 fonctionnaient et nous pouvions nous comprendre sans problème. Il s'agit en
6 fait de collecte de renseignements, et c'est quelque chose que nous
7 pouvions comprendre. Et il souhaitait recueillir des renseignements sur le
8 secteur de la Krajina de façon à ce que Belgrade puisse adopter la position
9 qui convenait, à savoir que les dirigeants de Serbie sachent de quoi il en
10 retournait, de façon à pouvoir prendre leur décision en temps utile.
11 Q. Et étiez-vous en mesure ou pouviez-vous recevoir des renseignements de
12 lui ?
13 R. Eh bien, c'était mon intention. Je lui avais demandé s'il pouvait nous
14 aider également. Et comme Orlovic n'avait pas travaillé pour le service de
15 Sûreté de l'Etat auparavant, il n'avait pas compris qu'il pouvait y avoir
16 un retour d'information. Et à cette occasion-là, je lui ai demandé de nous
17 remettre des éléments d'information en temps utile, le cas échéant, si les
18 dirigeants de Belgrade pouvaient recueillir ces renseignements. Ce qui les
19 intéressait principalement à l'époque, c'était une attaque éventuelle des
20 Croates contre la région dans laquelle nous nous trouvions.
21 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que les services pour lesquels vous
22 travailliez avaient l'habitude d'échanger des informations sur différents
23 sujets qui intéressent chacun de ces services ?
24 R. Oui. En principe, c'est exact. Mais cela dépend d'un cas à l'autre.
25 Lorsque je dis cela, ce qui me vient à l'esprit, ce sont les choses
26 suivantes. Lorsque nous nous mettons autour d'une table, nous n'échangeons
27 pas tout, mais nous réduisons le champ de ce qui intéressent l'une et
28 l'autre parties à un moment donné précis.
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1 Q. Est-ce que vous estimiez que le représentant des services de
2 Renseignements serbes était un service de renseignements ami ? En d'autres
3 termes, étiez-vous disposé à échanger des informations qui intéressaient
4 Frenki ?
5 R. Oui, tout à fait.
6 Q. Et savez-vous si, outre Frenki, il y avait d'autres personnes des
7 services de Sûreté de Serbie qui se trouvaient dans la région de Knin à
8 l'époque ?
9 R. Oui. Il y avait deux autres personnes.
10 Q. Et savez-vous qui étaient ces deux autres personnes ? Et pour quelles
11 raisons ces personnes étaient-elles venues dans ce secteur ?
12 R. A l'époque, je ne le savais pas. Au tout début, je ne le savais pas.
13 Mais par la suite, j'ai appris que ces personnes avaient les mêmes
14 responsabilités mais étaient responsables de différents secteurs.
15 Je ne sais pas si je peux donner leurs noms car il s'agit de membres des
16 services de Sûreté de la Serbie. Je ne sais pas si j'ai le droit de
17 mentionner ces noms en audience publique.
18 M. PETROVIC : [interprétation] Je demande à pouvoir passer pour quelques
19 instants à huis clos partiel, Mesdames, Monsieur les Juges, s'il vous
20 plaît.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Huis clos partiel.
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,
23 Mesdames, Monsieur les Juges.
24 [Audience à huis clos partiel]
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8 [Audience publique]
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.
10 M. PETROVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
11 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que Frenki ou une autre personne que vous
12 avez citée fournissait une aide sous la forme de matériel qui vous
13 permettait d'accomplir votre travail ?
14 R. Non. Non, pas d'aide, que ce soit sous forme matérielle ou sous forme
15 de matériel technique.
16 Il y a eu cette occasion où j'ai demandé à avoir ce genre de chose, et M.
17 Simatovic m'a dit que j'étais un officier chargé des renseignements et que
18 je n'étais pas un homme chargé de logistique. Nous plaisantions sur le
19 sujet.
20 Q. Frenki vous a-t-il jamais donné des instructions, des ordres ou des
21 orientations que vous auriez dû suivre en 1991 ?
22 R. A aucun moment je n'ai reçu d'instruction, voire même de conseil de sa
23 part, à l'exception de réunions informelles où nous échangions des éléments
24 d'information, et ceci n'était pas consigné. Il s'agissait simplement d'une
25 discussion libre entre collègues.
26 Q. Et Frenki a-t-il jamais essayé d'influencer la manière dont était
27 organisé le service ou sa méthode de travail ?
28 R. Non, absolument pas.
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1 Q. Et vos services étaient-ils toujours mal équipés, manquaient de
2 personnel ? Est-ce que cela continuait à fonctionner comme ça ?
3 R. Oui.
4 Q. Frenki ne vous a-t-il à aucun moment parlé du capitaine Dragan ?
5 R. Oui, tout à fait. Mais notre première réunion avait déjà duré une heure
6 parce que nous devions savoir qui nous étions l'un l'autre. Nous nous
7 jugions. A un moment donné, il m'a dit que je devais prêter une attention
8 toute particulière au capitaine Dragan et que je devais surveiller ses
9 activités. Il ne m'a pas dit pourquoi. J'étais soulagé de l'entendre dire
10 cela parce qu'il y avait finalement un homme qui avait le même avis que moi
11 sur le capitaine Dragan, et je savais que ce n'était pas l'homme qu'il
12 prétendait être. M. Simatovic a confirmé cela. Il m'a dit -- je ne me
13 souviens pas de ses termes exacts, mais il m'a dit que la SDB de Serbie
14 l'avait placé sous surveillance.
15 Q. Vous dites qu'il vous a dit de prêter particulièrement attention à cet
16 homme. Qu'est-ce qu'il entendait par là, et comment vous a-t-il dit cela ?
17 R. Comme je vous l'ai dit il y a quelques instants, il m'a demandé de
18 surveiller ses activités qui allaient au-delà de ce qui avait fait l'objet
19 d'un accord devant le Conseil national serbe, à savoir de diriger la TO et
20 d'être engagé sur le plan politique en Krajina et ses séjours fréquents. Il
21 venait nous voir souvent accompagné de personnes de Serbie, et nous ne
22 savions rien au sujet de ces hommes.
23 Q. Est-ce que Frenki a évoqué ces étrangers qui ont accompagné le
24 capitaine Dragan ?
25 R. Oui, tout à fait. Nous en avons parlé. Il s'agissait d'étrangers. Il
26 s'agissait de Mark Lynch, que j'ai cité, et d'un Robert d'Allemagne. Je ne
27 me souviens pas de son nom de famille.
28 Q. Et que souhaitait savoir Frenki à propos de ces étrangers et pourquoi ?
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1 R. A mon sens, il s'intéressait à ces personnes parce qu'il ne leur
2 faisait pas confiance. Il ne savait pas pourquoi ces hommes accompagnaient
3 le capitaine Dragan, où s'étaient-ils procuré leurs aptitudes au combat,
4 est-ce qu'ils faisaient partie d'un groupe terroriste. On soupçonnait Mark
5 d'être un membre de l'IRA, mais nous n'avions pas de preuve pour étayer
6 cela.
7 Donc nos discussions ont porté sur un échange d'informations. Je lui
8 parlais de mon appréciation de ces hommes, et nous parlions de la façon
9 dont nous pourrions vérifier les informations à un moment donné ou à un
10 autre.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je peux demander une question
12 supplémentaire pour mieux comprendre votre déposition.
13 Monsieur le Témoin, vous avez dit que vous deviez surveiller les activités
14 qu'il menait au-delà de ce qui avait fait l'objet d'un accord devant le
15 Conseil national serbe et Milan Martic.
16 Vous avez beaucoup parlé du fait que le capitaine Dragan l'appréciait
17 beaucoup et qu'il avait accès à telles et telles choses. Alors, qu'est-ce
18 qui a fait l'objet d'un accord entre le Conseil national serbe et Milan
19 Martic concernant les activités du capitaine Dragan ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors il s'agissait d'une des questions
21 évoquées par Martic lors de cette réunion avec Zecevic. Martic a dit qu'il
22 avait proposé au Conseil national serbe, qui était d'accord, que le
23 capitaine Dragan devait, concernant le centre de Golubic qui fonctionnait
24 déjà depuis le mois d'août 1991, élaborer une formation pour les hommes
25 d'infanterie. Et je crois que, à mon sens, c'étaient là ses activités, il
26 devait organiser l'entraînement ou la formation des policiers.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et c'est ce que vous avez remarqué, vous
28 avez remarqué qu'il faisait effectivement cela ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Personnellement, je ne me suis jamais
2 trouvé au camp de Golubic à l'époque.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et s'est-il occupé de la formation des
4 policiers dans le camp, d'après ce que vous saviez ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement. Mais lorsque j'ai dit que
6 cela allait au-delà de ce contexte-là, je voulais dire qu'il s'occupait de
7 moins en moins de la formation des policiers et qu'il était de plus en plus
8 engagé dans d'autres activités, à savoir il voyageait beaucoup dans la
9 région.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et quand l'entraînement du personnel
11 policier a-t-il commencé sous sa houlette, sous son autorité ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était au cours du printemps 1991. Je ne me
13 souviens pas de la date précise.
14 En fait, je n'ai pas participé à ça directement.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit auparavant que le centre
16 de Golubic avait travaillé depuis le début. Vous avez parlé de :
17 "… août 1991," le centre de Golubic, "pour organiser un véritable
18 cours pour les hommes de l'infanterie."
19 Vous disiez en fait que le capitaine Dragan a pris ses
20 responsabilités en août 1991 ou vouliez-vous dire que ce centre a
21 fonctionné à partir d'août 1991 ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit août 1990. J'ai peut-être fait un
23 lapsus.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Alors la correction fait acte.
25 Et comment est-ce que ces personnes ont été formées ? Qui les
26 envoyait ? Comment ça fonctionnait, qui lui envoyait le personnel à former
27 ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Suite à certaines tensions et aux incidents
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1 d'août 1990 dont je vous ai fait part, il se fait que les cadres des
2 commissariats de Lika, Kordun, Knin, et cetera, quittaient leurs postes, et
3 donc il y avait sous-effectif. Le Conseil national serbe, ou Martic, je ne
4 sais pas qui c'était, a décidé qu'il fallait une force de réserve pour la
5 police, qui devait être mise sur pied et qui devait donc être formée au
6 centre de Golubic pour remplacer ces personnels absents.
7 Toutefois, étant donné qu'un grand nombre de personnes étaient toujours sur
8 la liste de mobilisation de la JNA, les personnes qui ont été recrutées
9 étaient essentiellement des volontaires. Il y a eu beaucoup de cas
10 d'automutilation ou de blessures infligées à soi-même à cause du manque
11 d'expérience. Et Martic était content que le capitaine Dragan puisse former
12 ces gens. Mais ça ne s'est produit qu'à partir d'avril 1991. Mais jusqu'à
13 ce moment-là, en fait, ce camp avait fonctionné de façon indépendante avec
14 les personnes disponibles.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et enfin, qui sélectionnait les
16 personnes qui étaient envoyées aux fins de formation ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] La direction du SUP de Knin, sous la direction
18 de Martic. C'étaient eux seuls qui sélectionnaient les personnes qui
19 allaient être formées.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
21 Maître Petrovic, je me devais de poser ces questions, parce que tout à
22 l'heure, quand on parlait du capitaine Dragan, on se jaugeait les uns les
23 autres, mais on ne savait pas très bien quels étaient les éléments factuels
24 et le lien avec ce témoin.
25 Les choses sont plus claires maintenant.
26 Je pense que nous allons marquer la pause maintenant, et nous allons
27 reprendre à 12 heures 30.
28 --- L'audience est suspendue à 12 heures 03.
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1 --- L'audience est reprise à 12 heures 30.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Petrovic, êtes-vous prêt à
3 continuer ?
4 M. PETROVIC : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président.
5 Merci.
6 Q. Monsieur le Témoin, au cours de votre rencontre avec Frenki, est-ce que
7 vous avez pu observer qu'il portait une sorte de petit sac ?
8 R. Oui.
9 Q. Pouvez-vous nous dire ce que vous avez vu exactement ?
10 R. Oui. J'ai vu qu'il portait un sac du type qu'on utilisait au cours de
11 ma carrière au sein du SDB, qui cachait en fait une caméra, une espèce de
12 besace, comme ça, qui contenait un appareil photo. Et je l'ai vu
13 l'équipement prendre des photos de gens, de bâtiments. C'était une façon,
14 en fait, de faire de la surveillance et de documenter les environs.
15 Q. Comment se fait-il que vous ayez reconnu cela ? Est-ce que cela a
16 quelque chose de particulier ?
17 R. En fait, nous avions tous cette même besace aux mêmes fins, puisque les
18 services centraux de Belgrade avaient fait fabriquer ce type de besace pour
19 tous les services des républiques. Et j'ai bien reconnu que c'était cette
20 même besace. Et de la même couleur.
21 M. PETROVIC : [interprétation] Mesdames, Monsieur les Juges, j'aimerais que
22 vous apportiez 2D146, qui est le premier cliché d'une série de
23 photographies.
24 2D1046, excusez-moi, je m'étais trompé.
25 Q. Monsieur le Témoin, nous allons donc voir à l'écran cette photo que
26 vous avez apportée avec vous lorsque vous êtes arrivé à La Haye.
27 M. PETROVIC : [interprétation] Est-ce qu'on peut la faire tourner. Voilà.
28 Q. Pourriez-vous nous indiquer qui nous voyons à droite, comment cette
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1 photo fut prise et de quoi s'agit-il ? Qu'est-ce qu'on voit à l'épaule de
2 la personne à droite ?
3 R. Il s'agit de moi. Je porte un tee-shirt blanc. A côté de moi, vous avez
4 un de mes collègues. C'est une photo qui a été prise par le biais de cette
5 même besace que je porte à l'épaule. Et à l'exception de ce bâtiment, c'est
6 toute l'équipe avec laquelle je travaille qui a été photographiée de la
7 sorte. Ça fait partie du lot de photos.
8 M. PETROVIC : [interprétation] Peut-on voir le deuxième cliché, je vous
9 prie, de cette même pièce.
10 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire comment cette photo a été prise ?
11 R. La personne portant des lunettes est l'objet même de cette photo; mais
12 à côté de lui, vous avez un de mes collègues, et c'est ainsi que cette
13 photo a été retenue et mise de côté, pour des raisons de sécurité.
14 Vous voyez qu'il n'y a pas vraiment de format standard pour ces photos.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Petrovic, je voudrais demander un
16 éclaircissement concernant les réponses données par le témoin précédemment.
17 M. PETROVIC : [interprétation] Bien sûr, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Suite à la photo précédente, le témoin a
19 dit : "C'est moi-même. Je porte un tee-shirt blanc. Et à côté de moi, vous
20 avez un de mes collègues. Cette photo a été prise à partir de cette même
21 besace que je porte à l'épaule."
22 Alors j'imagine que c'est un sac similaire, et pas vraiment le même. Ça me
23 paraîtrait un peu bizarre; comment auriez-vous pu prendre une photo de
24 vous-même ?
25 Vous voulez dire, une besace du même modèle, en fait. C'est ça que vous
26 vouliez dire ?
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, en effet, c'est ça que je voulais
28 dire, une besace similaire. Peut-être que je me suis mal exprimé.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qui a pris cette photo et quel était le
2 but de ce premier cliché ? Je ne parle pas encore du second.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette photo et la précédente également ont été
4 prises au cours d'une même opération. Nous nous dirigions vers le lieu de
5 cette opération et nous prenions des photos. Si nos collègues figuraient
6 sur les photos, ces photos-là étaient détruites. C'est pourquoi j'avais
7 gardé celle-ci pour moi-même.
8 Il y avait donc plusieurs équipes d'agents qui prenaient des photos des
9 sujets de la surveillance.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais la photo précédente, quel était
11 l'objet de cette photo ?
12 Pourriez-vous nous remontrer cette photo.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ce type d'activité, il est assez normal
14 que l'on prenne des photos en poussant sur l'obturateur dans le sac, et
15 donc, de temps en temps, on ne voit pas le sujet même de la surveillance.
16 Et sur ce cliché justement, le sujet de la surveillance n'y figure pas. Il
17 n'est pas là.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Merci. Donc il aurait suffi
19 que vous disiez que le sujet de la surveillance n'était pas sur le cliché.
20 Je vous en prie, continuez.
21 M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
22 Q. Est-ce que le témoin peut recevoir un stylo qui lui permettrait de
23 marquer sur cette photo la besace qu'il porte à l'épaule en bandoulière.
24 R. [Le témoin s'exécute]
25 Q. Je vous remercie.
26 M. PETROVIC : [interprétation] Peut-on passer au cliché suivant -- on va
27 peut-être perdre cette annotation. Est-ce qu'on peut sauver la photo et la
28 verser en tant que pièce de la Défense.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous en prie.
2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le nombre sera D670.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et cette pièce est versée au dossier.
4 Et c'est la version annotée, bien sûr, de cette photo dont il est question.
5 M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
6 Est-ce que l'on peut maintenant se reporter au troisième cliché de ce jeu
7 de photographies.
8 Pouvez-vous nous montrer la troisième photo, je vous prie.
9 [La Chambre de première instance se concerte]
10 M. PETROVIC : [interprétation]
11 Q. Monsieur le Témoin, que voit-on -- qui voit-on sur cette photo, et que
12 voit-on porté en bandoulière ?
13 R. C'est moi-même. Lorsque nous avons reçu cette besace, nous avons fait
14 des essais. Nous l'avons testée pour voir si nous pouvions prendre des
15 photos, et on utilisait le même type de besace que vous avez vu aux photos
16 précédentes.
17 Q. Merci.
18 M. PETROVIC : [aucune interprétation]
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Petrovic, y a-t-il un problème
20 particulier concernant la façon dont on utilise une caméra cachée, que ce
21 soit dans un sac ou que ce soit porté à l'épaule droite ou gauche… enfin,
22 est-ce que ça a la moindre importance ? Peut-être qu'il y a des problèmes
23 qui se posent ailleurs, mais là, vraiment, est-ce que c'est un problème ?
24 Je voudrais demander à M. Farr la couleur du sac, après quoi est-ce qu'on
25 pouvait prendre dix photos par minute, ou 20, ou 30 ?
26 M. FARR : [interprétation] Mais il n'y a pas du tout de contestation là-
27 dessus.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Petrovic, concentrons-nous sur
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1 ce qui est important. Sinon, dites-nous où vous voulez en venir. Cette
2 besace qui abritait l'appareil photo -- bon, c'est peut-être l'appareil
3 photo qui est important plutôt que la besace, et il y a peut-être encore
4 des choses plus importantes que ça.
5 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le
6 permettez, permettez-moi de faire une observation.
7 Il y a un contentieux entre les deux parties concernant le type de besace
8 portée par M. Simatovic quand il était à Knin et ce que cette besace
9 contenait. Il ne me reste qu'une ou deux questions à ce sujet.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je suppose qu'il y a quelque chose
11 à propos de cette besace. Mais en supposant quelle peut être la position de
12 la Défense, c'est surtout les appareils photos qui comptent, plutôt que de
13 savoir si la bandoulière est sur l'épaule droite ou gauche. Tout ça m'a
14 l'air d'être sans aucune importance. Et même si une personne porte un
15 appareil photo dans une besace, ça ne répond pas à la question de savoir si
16 la besace utilisée par M. Simatovic, je comprends maintenant que c'est là
17 le problème, si celle-ci contenait un appareil photo ou non. Alors,
18 concentrons-nous sur le contenu de la besace.
19 Et allez, avançons.
20 M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 Q. Monsieur le Témoin, donc cette besace que vous avez vue chez M.
22 Simatovic est-elle la même que celle que nous venons de voir sur ces photos
23 ?
24 R. Oui, c'était le même type de besace.
25 Q. Lorsque cette besace contenait un appareil photo et le matériel
26 nécessaire, est-ce qu'on pouvait également y placer autre chose ?
27 R. Non. Car l'appareil photo se trouvait dans cette besace, puis il y
28 avait le mécanisme d'obturateur.
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1 M. PETROVIC : [interprétation] Est-ce que l'on peut verser ces photos. Puis
2 après, nous passerons à autre chose.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, est-ce qu'il s'agit
4 de fichiers différents ou est-ce que vous pouvez donner une seule cote.
5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Document 2D104 numéro 6 [comme
6 interprété] recevra la cote D671.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et cette pièce est versée au dossier.
8 M. PETROVIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.
9 Est-ce que l'on peut maintenant montrer au témoin le document 2D536.2.
10 Q. Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous dire brièvement de quoi il
11 s'agit ?
12 R. C'est l'un des rapports de ce qu'on appelait à l'époque les services de
13 la Sûreté de la SAO Krajina.
14 Q. Reportez-vous au document et dites-moi si en 1991 vous avez déjà vu ce
15 document ou des documents similaires et si vous saviez à qui ces documents
16 étaient envoyés ?
17 R. Selon le format du document, oui, je peux vous dire qu'il s'agit d'un
18 rapport du centre Knin. Dusan Orlovic ou un de ses associés à Knin
19 l'envoyait pour décrire les éléments d'actualité qui étaient envoyés au
20 Conseil national serbe et à Milan Martic.
21 Q. Savez-vous si ce document a été envoyé à qui que ce soit d'autre ?
22 R. Non.
23 M. PETROVIC : [interprétation] Est-ce que l'on peut verser cette pièce de
24 la Défense.
25 M. FARR : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez, j'essaie de comprendre.
27 Est-ce qu'on est censé juste voir le format ? C'est à cette fin que vous
28 présentez ce document, Maître Petrovic ?
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1 M. PETROVIC : [interprétation] Oui, le format et le contenu.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous n'avez posé aucune question --
3 Oui…
4 M. PETROVIC : [interprétation] Non, effectivement, Monsieur le Président.
5 Mais mes questions suivantes rendront les choses plus claires en ce qui
6 concerne ce document-ci et ceux qui vont suivre.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il s'agit de contenu, moi je n'ai pas
8 eu le temps de lire et on n'a posé aucune question. Je n'ai pas entendu
9 d'objection. Mais en même temps, nous allons voir un peu plus tard si les
10 choses sont un petit peu plus claires.
11 S'il faut s'attacher au contenu, autant le faire maintenant de sorte que,
12 pour les documents suivants et les questions suivantes, l'on sache au moins
13 ce qui était pertinent dans ce document.
14 Je vous donne la parole.
15 M. PETROVIC : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.
16 Q. Monsieur le Témoin, quel type d'information contient un document du
17 type que nous avons à l'écran ?
18 R. Ce document, comme le dit son titre, est une synthèse des informations
19 actuelles. Comme il s'agit d'un rapport dressé par les services de la
20 Sûreté de l'Etat, qui contient donc des informations recueillies des
21 différents collaborateurs de façon assez sensible, de sources qui peuvent
22 être politiques, l'on peut dire que c'est un document tout à fait
23 confidentiel qui ne pouvait être lu que par Milan Martic et le Conseil
24 national serbe.
25 M. PETROVIC : [interprétation] Est-ce que l'on peut maintenant voir la
26 pièce P2670.
27 Q. Monsieur le Témoin, c'est un document de deux pages. Dites-moi quand
28 vous aurez pu lire la première page et nous passerons ensuite à la seconde.
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1 M. PETROVIC : [interprétation] Je ne sais pas si Mmes et M. les Juges ont
2 eu le temps de lire le texte. On peut passer à la seconde page.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une seconde.
4 M. PETROVIC : [interprétation] Puis-je ?
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr.
6 M. PETROVIC : [interprétation]
7 Q. Monsieur le Témoin, pouvez-vous nous dire de quel type de document il
8 s'agit et qui l'a rédigé ?
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Farr.
10 M. FARR : [interprétation] Nous avons une objection concernant le fondement
11 de cette question. On ne sait pas s'il peut reconnaître ces questions. Il
12 est différent du précédent. Donc, à quel titre il est censé le reconnaître.
13 On a besoin de certains éléments de fond.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous répondre à l'objection de M.
15 Farr.
16 M. PETROVIC : [interprétation] Oui, oui, j'espère, en effet.
17 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous avez déjà vu ce genre de document
18 en 1991 en Krajina ?
19 R. Oui.
20 Q. Pouvez-vous nous dire de quel type de document il s'agit et qui les
21 rédigeait ?
22 R. Contrairement au document précédent, c'est un document qui vient de
23 l'état-major de la Défense territoriale qui était dressé en fonction de
24 différents rapports rassemblés par les états-majors de la TO de plus
25 petites villes. Et puis, ils rassemblaient l'état-major de Knin qui
26 synthétisait tout cela sous la forme d'un rapport quotidien.
27 J'ai pu prendre connaissance de ces rapports à l'époque puisque les
28 commandants locaux de l'état-major de la TO à Benkovac m'envoyaient
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1 justement ce type de rapport quotidiennement.
2 Nous considérions que ces rapports étaient des documents tout à fait
3 publics. Par exemple, ils étaient communiqués aux médias. C'était une
4 analyse, mais sans quoi que ce soit de secret.
5 Q. Ce document contenait quel type d'information ?
6 R. Je vois la seconde page à l'écran. Maintenant je ne vois plus la
7 première, mais je peux vous dire en tout cas que c'était la chronologie des
8 événements. On décrivait les incidents qui s'étaient produits sur le
9 terrain, et la TO de Knin enlevait parfois certains incidents qu'ils ne
10 considéraient pas importants. Donc c'était une synthèse, un aperçu général
11 des événements qui se produisaient sur le territoire.
12 Q. Vous avez dit que ce document reprenait les événements dans l'ordre
13 chronologique. Vous avez parlé des médias également. Est-ce que vous savez
14 qui au sein des médias recevait ces rapports dans la zone de Benkovac où
15 vous travailliez ?
16 R. Mais tous les journalistes voulaient l'obtenir, mais le journaliste du
17 "Politika Ekspres" de Belgrade était celui qui insistait le plus et qui
18 obtenait ces rapports très régulièrement. Quelquefois, ils lui étaient
19 adressés directement.
20 Q. Pouvez-vous nous dire comment s'appelait cette personne à Benkovac qui
21 recevait ces rapports ?
22 R. Oui. Il s'appelait Svetozar Borak.
23 Q. Monsieur le Témoin, la liste de ceux qui recevaient ce rapport
24 reprenait Frenki en numéro 5, cinquième destinataire. Savez-vous pourquoi
25 Frenki recevait ce rapport, parmi d'autres ?
26 R. Eh bien, de façon plus précise, je n'ai jamais vu ce rapport, lorsque
27 j'étais sur place, avec cette liste de destinataires. Je suppose que l'idée
28 c'était que Frenki soit informé puisque sa tâche à Knin était de recueillir
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1 des informations au quotidien. Et étant donné que c'était un parent proche
2 de Martic, je suppose que Martic a dit à Dragisic qu'il devait donc fournir
3 ces informations à Frenki.
4 Q. Monsieur le Témoin, je vais maintenant demander le document 2D559
5 d'être projeté à l'écran.
6 M. PETROVIC : [interprétation] 2D559.2, je vous prie.
7 Q. Monsieur le Témoin, je vous demande de bien vouloir examiner ce
8 rapport, d'examiner surtout les destinataires du rapport.
9 Parmi les destinataires, on ne voit pas Frenki. Il s'agit d'un rapport du
10 19 septembre.
11 Est-ce que vous savez pourquoi Frenki ne figure pas parmi les destinataires
12 ?
13 R. La raison est simple. Depuis un mois déjà, Frenki n'est pas dans la
14 région.
15 Q. Savez-vous à quel moment Franko Simatovic est parti de
16 Knin ? On parle de l'année 1991.
17 R. Je pense que c'était au début du mois d'août. Sûrement dans cette
18 période-là.
19 Q. Avez-vous, à Knin, Benkovac ou ailleurs, au cours de l'année 1991,
20 entendu dire que Franko Simatovic était celui qui dirigeait le camp de
21 Golubic ou bien des opérations militaires ou de police dans la SAO Krajina
22 au cours de l'année 1991 ?
23 R. Je sais que ce n'était pas le cas. Cependant, les gens disaient qu'il y
24 avait des gens venus de Serbie. La situation a été toute particulière. Le
25 peuple avait peur, il s'attendait à ce que quelqu'un d'important vienne les
26 protéger, un représentant de la JNA ou du gouvernement. Donc il y avait des
27 rumeurs. Et on ne disait pas que c'était M. Simatovic directement, mais on
28 disait que c'étaient les hommes venus de Serbie qui organisaient tout et
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1 décidaient tout. Mais nous, on savait que ce n'était pas vrai.
2 M. PETROVIC : [interprétation] Je vais demander que l'on verse au dossier
3 les documents 2D536.2 et 2D559.2.
4 M. FARR : [interprétation] Il n'y a pas d'objection.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quelles seront les cotes, Madame la
6 Greffière…
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le premier document recevra la cote
8 672. Et le deuxième, la cote 673.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les deux documents sont versés au
10 dossier.
11 M. PETROVIC : [interprétation]
12 Q. Monsieur, vous avez dit aujourd'hui qu'il y avait à Zadar un blocus de
13 casernes. Est-ce qu'à un moment donné il y a eu d'autres activités pour
14 débloquer ces casernes ?
15 R. Oui. Au début du mois d'octobre, l'armée yougoslave, après l'échec des
16 négociations, avait entrepris une opération très importante. Il s'agissait
17 de marcher sur Zadar et encercler Zadar. Mais les forces de Zadar ont
18 déclaré l'armistice, considérant que les forces de la JNA étaient plus
19 importantes que les leurs, et ils ont débloqué toutes les casernes.
20 M. PETROVIC : [interprétation] Je vais demander que l'on examine un ordre
21 venu du commandant du Corps de Knin ordonnant l'attaque sur Zadar. C'est un
22 document assez long.
23 Je vais demander que l'on examine d'abord la première page de ce document.
24 Il s'agit du document 2D192.2.
25 C'est la page 4 qui m'intéresse. En B/C/S, c'est à la page 2. Et en
26 anglais, cela commence à la page 2 et ensuite se poursuit jusqu'à la page
27 3.
28 Dans ce paragraphe, le quatrième, on peut lire :
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1 "J'ai décidé, en coopération avec les forces bloquées dans la garnison de
2 Zadar, de procéder à l'attaque dans l'axe Knin-Benkovac-Zadar…"
3 Monsieur, est-ce que cette attaque a eu lieu ? Est-ce que le corps a lancé
4 cette attaque sur cet axe ?
5 R. Oui, c'est exact. Cela est arrivé.
6 Q. Monsieur le Témoin, au moment de cette attaque sur Zadar, qui a eu lieu
7 au mois d'octobre 1991, est-il exact que l'on a pris le contrôle du village
8 de Skabrnja, qui se trouve le long de l'axe de communication mentionné ici
9 ?
10 R. Non.
11 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vais demander que
12 ce document soit versé au dossier en tant que pièce à conviction de la
13 Défense.
14 M. FARR : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection en principe;
15 cependant, nous n'avons pas de traduction en anglais. On voit le cachet du
16 9e Corps d'armée, ensuite le nom "Babic" écrit à la main. Mais nous
17 souhaitons que ceci soit corrigé avant de verser le document.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-il possible d'examiner exactement la
19 partie sur laquelle vous venez d'attirer notre attention --
20 M. FARR : [interprétation] Est-il possible de voir le haut de la page dans
21 les deux versions, dans les deux langues ?
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Petrovic, il semblerait que le
23 cachet n'a pas été traduit et que ce qui est écrit à la main --
24 M. PETROVIC : [interprétation] Je le vois. C'est vrai que ceci n'a pas été
25 traduit. Je vous présente mes excuses à ce sujet. Nous allons donc demander
26 qu'on apporte une correction à cette traduction, et ensuite nous allons
27 télécharger la traduction corrigée.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc je vais demander qu'une cote MFI
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1 soit attribuée à ce document.
2 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce document va recevoir la cote 674.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Marqué aux fins d'identification.
4 M. PETROVIC : [interprétation]
5 Q. Monsieur le Témoin, vous avez dit qu'au moment de l'attaque dont vous
6 avez parlé, l'attaque sur Zadar, l'on n'a pas pris le contrôle du village
7 de Skabrnja. Est-il exact qu'une route passe à côté du village, et est-ce
8 qu'il y a eu un problème avec cette route au moment de l'attaque sur Zadar
9 qui a eu lieu au début du mois d'octobre 1991 ?
10 R. Oui. A côté de Skabrnja passe la route principale qui relie Benkovac et
11 Zadar. C'était une route qui avait une importance stratégique pour l'armée
12 populaire yougoslave vu que cette route donne sur l'aéroport de Zemunik,
13 qui est un aéroport militaire mais aussi civil. Et il y avait des problèmes
14 en continu car il y a eu des provocations incessantes sur cette route-là au
15 niveau de Skabrnja. Ils attaquaient tous les véhicules qui passaient, qu'il
16 s'agisse de véhicules militaires ou civils.
17 A un moment donné après l'attaque, quand le blocus des casernes a été
18 levé, à un moment donné il y n'y avait plus de provocations, mais elles ont
19 repris. Je le sais parce que j'ai assisté à toute une série de réunions au
20 niveau du commandement de la garnison. Et je sais qu'on les a à maintes
21 reprises prévenus et mis en garde de ne pas continuer avec ces
22 provocations.
23 Q. Est-ce que vous savez quelle a été la position de la JNA et de ses
24 dirigeants en ce qui concerne la résolution du problème concernant Skabrnja
25 ?
26 R. Je le sais parce que la JNA n'a jamais agi sans qu'il y ait besoin
27 d'agir. Par exemple, cette opération a été effectuée pour procéder au
28 déblocage des casernes de Zadar. Skabrnja se trouvait sur la gauche de
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1 l'axe, donc il n'était pas besoin d'agir. La JNA considérait que Skabrnja
2 était un village très important, qu'il comptait 2 000 à 3 000 membres de la
3 ZNG et de la police, et on pensait qu'il y aurait un grand nombre de
4 victimes si jamais il y avait une attaque sur le village.
5 Q. Est-ce que vous avez assisté à une réunion au cours de laquelle on a
6 abordé le problème de Skabrnja et sa résolution ?
7 R. Oui.
8 Q. Pouvez-vous nous dire où cela s'est passé et qui a assisté à cette
9 réunion ?
10 R. C'était au niveau du commandement de la brigade. Mais moi je vais
11 demander que l'on passe à huis clos partiel parce qu'il y a un certain
12 nombre de gens qui habitent encore à Belgrade et qui n'ont pas beaucoup de
13 liens avec cela, et donc je demanderais que l'on passe à huis clos partiel
14 pour protéger leur identité.
15 M. PETROVIC : [interprétation] Est-il possible de passer à huis clos
16 partiel pour un bref moment.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez.
18 On va passer à huis clos partiel.
19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
20 [Audience à huis clos partiel]
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19 [Audience publique]
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.
21 Maître Petrovic.
22 M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
23 Q. Monsieur le Témoin, parmi les personnes qui ont assisté à cette
24 réunion, y avait-il des membres du commandement du Corps de Knin ? Je veux
25 parler d'officiers subalternes.
26 R. Oui. Il y avait le chef d'état-major du Corps de Knin qui a assisté à
27 la réunion, le colonel Mladic. Et nous n'avions pas été informés de cela au
28 préalable.
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1 Q. Monsieur le Témoin, pour ce qui est des officiers haut gradés de la
2 180e Brigade de Benkovac, y a-t-il des personnes qui ont assisté à la
3 réunion ?
4 R. Oui. Le chef de la sécurité de la brigade, le commandant, le chef
5 d'état-major.
6 Q. Monsieur le Témoin, vous souvenez-vous des propos du colonel Mladic
7 lors de cette réunion, en particulier concernant la situation à Skabrnja ?
8 R. Le colonel Mladic a dit qu'au plan stratégique, il était impossible que
9 la piste de l'aéroport de Benkovac soit prolongée le long de la route et il
10 n'est pas possible de la rendre praticable. L'armée devait réagir.
11 Ceci a duré longtemps, ces négociations. Ils ont tout fait aux postes de
12 contrôle dans le périmètre de Skabrnja parce que les tireurs d'élite ont
13 été déplacés, et le lendemain matin ils ont envoyé un contingent de troupes
14 comportant des armes d'infanterie et des chars pour créer un périmètre
15 autour de Skabrnja pour simplement faire une démonstration de leur force.
16 M. PETROVIC : [interprétation] Le témoin peut-il regarder le document 5596,
17 numéro 65 ter, page 349 en B/C/S et 348 en anglais. Il s'agit d'un extrait
18 des carnets de Mladic, alors la mission qui est mentionnée en regard de la
19 date du 17 novembre 1991.
20 349 en B/C/S et 348 en anglais.
21 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme la Greffière m'informe du fait qu'il
23 y a cinq documents qui correspondent à ce numéro, Maître Petrovic. Veuillez
24 nous éclairer sur ce point, s'il vous plaît.
25 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne pense pas que
26 la traduction anglaise soit contestée. Nous avons la version
27 dactylographiée en B/C/S. Mais cela ne semble pas s'avérer très utile.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A savoir si les traductions sont
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1 contestées, la Greffière a du mal à savoir quel est le document que vous
2 souhaitez afficher à l'écran.
3 Est-ce bien le bon qui est actuellement à l'écran ?
4 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il ne s'agit pas du
5 document en question. Le numéro ERN est le 0668-2799 dans la version
6 anglaise.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il semblerait, si je regarde le numéro
8 ERN, qu'il s'agisse du bon document, qui correspond avec ce que vous venez
9 de dire, n'est-ce pas ?
10 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de la
11 première ici, et j'ai besoin de la page 348 du document.
12 Voici la page en question, Mesdames, Monsieur les Juges.
13 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Et en B/C/S.
14 M. PETROVIC : [interprétation] 349 en B/C/S.
15 Numéro 65 ter 5596. 0668-2799, c'est la première page.
16 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit de 2799 ou
17 2799/B/C/S ?
18 M. PETROVIC : [interprétation] Oui, /B/C/S, c'est ça.
19 Merci, Monsieur le Président.
20 Est-ce que nous pouvons regarder le bas de la page à l'intention des Juges
21 de la Chambre. C'est la partie qui m'intéresse.
22 Q. Monsieur le Témoin, parmi les missions correspondant à la date du 17
23 novembre 1991 :
24 "La 180e Brigade doit déplacer le bataillon blindé un petit peu en
25 direction de Skabrnja et Nadin - pour supprimer cela."
26 Et une mission a-t-elle été formulée à l'intention du commandant de la 180e
27 Brigade dans les mêmes termes que nous pouvons lire dans les carnets de
28 Mladic tels qu'affichés à l'écran ?
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1 R. Devant nous, le colonel Mladic ne parlait pas des détails. Cependant,
2 il a utilisé ce même terme pour nous secouer, pour que le bataillon se
3 déplace. D'après moi, son intention était de les effrayer un petit peu.
4 M. PETROVIC : [interprétation] Pouvez-vous maintenant regarder la page 357
5 du même document, s'il vous plaît, la version B/C/S; et la page 356 de
6 l'anglais, s'il vous plaît. C'est une mention ici qui porte la même date,
7 et on peut lire ce qui suit :
8 "Rencontre avec le commandant. Ceci doit être complété au combat : Ratisser
9 comme il se doit les secteurs de Nadin et Skabrnja. (Et si cela s'avère
10 nécessaire, travailler pendant deux jours) Le chef d'état-major de la 180e
11 Brigade a organisé les préparatifs."
12 Et on peut lire :
13 "NB va envoyer la compagnie VP en BOV…"
14 Q. Monsieur le Témoin, pourriez-vous nous dire à quoi correspondent les
15 abréviations que nous voyons sur cette dernière phrase ?
16 R. NB correspond au chef du centre chargé de la sécurité d'Etat. VP
17 correspond à la police militaire. Et BOV correspond à un véhicule de combat
18 blindé.
19 Q. Monsieur le Témoin, si vous le savez, y a-t-il eu des combats après
20 cela dans le secteur de Skabrnja le lendemain ?
21 R. Oui. Aux premières heures du matin du 18.
22 Q. Savez-vous comment le conflit a éclaté autour de Skabrnja ?
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, Maître Petrovic, cela a semé la
24 confusion dans mon esprit un petit peu. Nous avons commencé par un document
25 daté du 4 octobre qui évoquait une réunion, au point 4, l'attaque avait été
26 annoncée. Et maintenant nous sommes à la fin du mois de novembre. Le témoin
27 parle de la façon dont il a compris les propos de M. Mladic. Ne devrions-
28 nous pas tout d'abord établir si, oui ou non, le témoin a assisté aux
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1 réunions qui se sont tenues six semaines après, parce qu'il interprète cela
2 en se fondant sur les propos de M. Mladic ? Et ceci doit être supprimé,
3 d'après lui, cela signifie qu'il faut combattre ces personnes.
4 Et sur quel fondement a-t-il assisté à cela ? Etait-il présent ou pas ? Et
5 qu'est-ce qui permet d'expliquer ?
6 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je peux vous donner
7 mon avis sur la question et vous dire comment je comprends la déposition du
8 témoin.
9 Le document 2D192.2, qui parle de l'attaque contre Zadar et la levée du
10 blocus --
11 M. FARR : [aucune interprétation]
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, c'est -- Me Petrovic n'a rien
13 dit de plus par rapport à ce qui figure à la page 73, dire qu'il a cité le
14 2D192.2 et qu'il parle de l'attaque lancée contre l'axe Knin-Benkovac-
15 Zadar. C'est tout ce qu'il a dit.
16 Me Petrovic ne va pas déposer, c'est ce qu'il a dit jusqu'à présent, et il
17 le sait. Alors je souhaite passer à d'autres réunions, et je souhaite
18 connaître les sources de la connaissance qu'a ce témoin-ci. S'il se met à
19 interpréter les carnets de Mladic, dans ce cas il faudrait savoir sur quoi
20 il se fonde pour faire cela - soit parce qu'il était présent ou qu'il a
21 étudié cela pendant de très nombreuses années et qu'il a procédé à une
22 comparaison au plan linguistique de ces carnets.
23 Donc je souhaite que vous posiez la question au témoin, si vous le
24 souhaitez, c'est pour que nous puissions mieux comprendre sa déposition. Et
25 si c'est une question que vous ne souhaitez pas poser, je souhaite
26 simplement vous dire que ce sont des questions qui nous traversent
27 l'esprit.
28 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je me fonde sur sa
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1 présence à cette réunion la veille de l'attaque contre Skabrnja, lorsque
2 ces personnes, que ce témoin souhaitait citer à huis clos partiel, étaient
3 présentes. A ma connaissance, la réunion s'est tenue la veille de
4 l'opération lancée contre Skabrnja où Mladic a donné son avis sur la
5 situation.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, je vais me pencher encore sur
7 ce document.
8 Vous pouvez poursuivre en attendant.
9 M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
10 Q. Monsieur le Témoin, vous avez dit que le lendemain il y a eu un conflit
11 à Skabrnja. Selon ce que vous en savez, comment est-ce que ce conflit a
12 éclaté ?
13 R. Pour m'expliquer, il faudrait que je remonte à la réunion de la veille,
14 le 17 novembre. Il n'y avait pas de représentants des services spéciaux.
15 Les représentants de l'état-major de guerre à Benkovac, puis il y a eu le
16 briefing de la 180e Brigade. Le chef de l'état-major de la TO, le président
17 de la municipalité, le président du bureau exécutif, c'est-à-dire le
18 gouvernement, et moi-même en tant que chef de la Sûreté de l'Etat.
19 Lorsque Mladic a dit que c'était inacceptable et qu'il fallait mettre de
20 l'ordre là-dedans, le président du gouvernement de Benkovac a dit qu'il ne
21 fallait pas choisir l'option du combat, mais plutôt manifester sa force en
22 montrant des chars, et cetera, et par des moyens pacifiques, essayer de
23 faire en sorte que les différents barrages routiers autour de Skabrnja
24 soient enlevés.
25 Et c'est d'ailleurs ce que je pense qui s'est produit le lendemain.
26 L'assistant qui a demandé à travailler au Corps de la Garde nationale ou au
27 MUP, je ne sais pas qui était de l'autre côté, lorsqu'il s'est approché du
28 premier barrage routier, il a été frappé à la tête par un tireur d'élite.
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1 Il s'appelait Stefanovic, je pense. Et le soldat qui l'accompagnait, qui
2 était une nouvelle recrue de 18 ans, un très jeune homme, il s'est approché
3 de l'officier pour voir comment il allait et il a, lui aussi, essuyé un
4 coup de feu de ce tireur d'élite. Donc ils sont morts à quelques secondes
5 d'écart. Je ne suis pas un expert militaire, je n'étais pas responsable de
6 cela, je ne sais pas si c'est la raison de tout cela, mais c'est en tout
7 cas comme ça que les événements à Skabrnja ont commencé.
8 Ce soldat s'appelait Lazic, je m'en souviens maintenant.
9 Q. Très bien.
10 Monsieur le Témoin, est-ce que vous savez si cette action à Skabrnja s'est
11 terminée le jour même, à savoir le 18 novembre, ou
12 pas ?
13 R. Non. L'armée a pris la plupart des villages, mais pas tous, à la fin de
14 cette journée.
15 M. PETROVIC : [interprétation] Je voudrais que l'on se reporte à la pièce
16 2D198.2. C'est un rapport du commandement de la 180e Brigade, 18 novembre
17 1991.
18 Q. Prenons le point 5, les conclusions, qui dit :
19 "Les activités se déroulent selon les plans. L'action a été bien
20 coordonnée. Nous avons repris Gorni et nous sommes arrivés en dehors de
21 Skabrnja." La gare de Skabrnja, je pense.
22 "Nous encerclons une partie du village de Skabrnja qui n'avait pas
23 déjà été reprise ainsi que le village de Nadin."
24 Alors la gare dont on parle ici qui fait partie de Skabrnja, est-ce
25 que vous savez si c'était la ligne à laquelle est arrivée la JNA le premier
26 jour de cette action à Skabrnja ?
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Farr.
28 M. FARR : [interprétation] Objection, il n'y a pas de fondement ici.
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1 J'aurais dû soulever cela peut-être au début. C'étaient des questions
2 générales sur l'éclatement du conflit, mais maintenant on lui demande de
3 façon très tactique des questions. Et je ne vois vraiment pas comment il
4 aurait pu connaître tout cela.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Petrovic.
6 M. PETROVIC : [interprétation]
7 Q. Monsieur le Témoin, est-ce que vous savez précisément quelle partie du
8 village avait été capturée par les unités le 18 novembre 1991 ? Est-ce que
9 vous savez quelle partie du village avait été capturée ?
10 R. Pour le moment, je ne me souviens pas précisément, mais je sais que
11 l'essentiel du village avait été capturé.
12 Q. Etant donné que vous connaissez bien le terrain, est-ce que vous
13 pourriez nous dire si les différents quartiers représentaient les deux
14 tiers ?
15 R. Razovljeva Glava, C'est une colline sur le village de
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Farr.
17 M. FARR : [interprétation] La question a été posée. M. le Témoin a dit
18 qu'il ne le savait pas. Puis, Me Petrovic l'a conduit à simplement accepter
19 ce qui figurait dans le document alors qu'il avait dit au départ qu'il
20 n'avait pas d'information.
21 M. PETROVIC : [aucune interprétation]
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Un instant, je vous prie.
23 Monsieur Farr, il a dit : Je ne me souviens pas de tous les toponymes, mais
24 je me souviens que l'essentiel du village avait été capturé. Donc il dit
25 qu'il connaît le fait que certaines parties du village avaient été prises,
26 sans connaître vraiment les noms précis. Et la question suivante l'aide à
27 se rafraîchir la mémoire.
28 M. FARR : [interprétation] Si c'est comme ça que la Chambre comprend les
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1 choses, je retire mon objection.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer, Maître Petrovic.
3 M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
4 Je ne sais pas si la réponse du témoin a été consignée. Je vais vérifier.
5 Je pense que oui, en effet, la réponse a été consignée à la page 85, ligne
6 17, et que je peux donc poursuivre.
7 Q. Monsieur le Témoin, pourriez-vous vous reporter au paragraphe --
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez mal compris l'intervention de
9 M. Farr. M. Farr ne voulait pas tellement demander si on avait répondu à la
10 question. Ce n'était pas l'objection de M. Farr.
11 Le témoin nous dit que les noms ou toponymiques, que tel nom
12 correspondait à une colline à Skabrnja. C'est ça que le témoin a donné
13 comme réponse.
14 Continuez, Monsieur Petrovic.
15 M. PETROVIC : [interprétation]
16 Q. Monsieur le Témoin, comment s'appelle cette colline près de Skabrnja ?
17 Est-ce que vous pouvez nous donner le nom ? Vous pouvez nous éclairer là-
18 dessus ? Est-ce que vous savez jusqu'à quelle ligne, plus ou moins, la JNA
19 a pu arriver ? Pouvez-vous nous donner des toponymes ?
20 R. Razovljeva Glava. C'est un point au-dessus de Skabrnja qui avait été
21 pris. Au sens militaire donc, la plupart des villages avaient été pris.
22 M. PETROVIC : [interprétation] Paragraphe 6 maintenant de ce document. A la
23 deuxième page du document.
24 Q. Mais avant de lire cela, Monsieur le Témoin, est-ce que vous pouvez
25 nous dire si les activités qui se sont déroulées à Skabrnja se sont
26 poursuivies le lendemain ? Est-ce que vous êtes au courant ?
27 R. Oui, ces actions sont poursuivies le lendemain.
28 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire, si vous en souvenez, quelles étaient
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1 les forces qui participaient à ces combats dans ce village de Skabrnja et
2 autour ?
3 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
4 M. FARR : [interprétation] Oui, fondement de cette question.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il ne faut pas qu'il connaisse
6 uniquement les noms, mais est-ce qu'il a pu observer ça lui-même, est-ce
7 qu'il a lu ça dans un rapport, est-ce qu'on lui a dit ? C'est ça que M.
8 Farr voudrait que vous établissiez avant que le témoin ne nous parle des
9 forces en présence.
10 M. PETROVIC : [interprétation]
11 Q. Monsieur le Témoin, en 1991, en novembre, est-ce que vous aviez eu
12 l'occasion de prendre connaissance directement des unités en présence à
13 Skabrnja et autour ?
14 R. Oui.
15 Q. Comment est-ce que vous avez eu connaissance de cela ?
16 R. [aucune interprétation]
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Attendez, attendez.
18 Est-ce que vous pourriez répéter votre dernière réponse. Est-ce que vous
19 avez dit autre chose quand Me Petrovic vous a demandé si vous étiez au
20 courant des unités en présence à Skabrnja et autour ? Vous avez dit : "Oui,
21 j'étais au courant."
22 Mais est-ce que vous avez ajouté quoi que ce soit après, ou bien est-ce que
23 c'était la réponse que vous avez donnée ? Il y a donc 30 secondes ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que je savais quelles étaient les
25 unités en présence.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous nous dire comment vous étiez
27 au courant.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Le chef de la Sûreté de l'Etat -- en qualité
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1 de chef de la Sûreté, j'ai participé à la plupart des réunions et au
2 commandement de la 180e Brigade de la TO, du SUP de la municipalité. C'est
3 une petite zone.
4 Donc cette réponse que je vous ai donnée vous sera fournie par la majorité
5 des soldats qui étaient mobilisés à l'époque, et même les citoyens de la
6 région pourraient vous donner la même réponse.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Petrovic, je regarde l'horloge.
8 Nous devons terminer à moins quart précisément. Donc je vous propose de
9 poursuivre demain.
10 Pourriez-vous nous dire de combien de temps vous aurez encore besoin demain
11 ?
12 M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis pratiquement
13 à la moitié de mon interrogatoire de ce témoin. J'imagine que je devrais
14 avoir terminé d'ici la seconde session de demain, si vous m'autorisez.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, si vous êtes à la moitié et vous
16 pensiez à quatre heures de durée au départ -- Madame la Greffière, combien
17 de temps avons-nous utilisé ?
18 Mais même dans cette hypothèse, oui, deux sessions, ça fait deux heures et
19 demie, donc vous serez là à quatre heures et demie, plutôt qu'à quatre
20 heures.
21 Et vous avez utilisé pour le moment… enfin, je vais vous le dire tout
22 de suite, mais je dois quand même dire au témoin.
23 Monsieur le Témoin, nous allons lever l'audience. Je vous donne pour
24 instruction de ne pas parler de votre déposition à qui que ce soit ou
25 communiquer ce que vous nous avez déjà dit ou ce que vous nous direz demain
26 à qui que ce soit. Et nous vous retrouverons demain à 9 heures dans ce même
27 prétoire.
28 M. JORDASH : [aucune interprétation]
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il faut encore que le témoin
2 soit présent…
3 M. JORDASH : [interprétation] Oui. Je voulais demander si nous présentons
4 certains documents au témoin afin qu'il en prenne connaissance cet après-
5 midi.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il n'y a pas de problème du côté de
7 l'Accusation, je n'ai pas de problème. Encore une fois, il faut vraiment
8 que je termine à moins le quart précis, c'est-à-dire maintenant.
9 M. JORDASH : [interprétation] Merci.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si les parties en sont d'accord et si --
11 le cas échéant, nous interviendrons cet après-midi, si du moins il n'y a
12 pas d'accord entre les parties.
13 D'accord ?
14 M. JORDASH : [interprétation] Bien.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, Maître Petrovic, vous avez
16 utilisé un tout petit peu plus que deux heures. Donc votre estimation de
17 départ était de quatre heures. Donc, tenez-vous-en à cela, si vous le
18 voulez bien, sauf évidemment si les choses prennent une autre tournure. Et
19 puis, vous avez accordé pas mal de temps sur le contexte pas toujours très
20 pertinent. Donc, essayez de boucler ça en deux heures demain.
21 Nous levons l'audience, qui sera reprise demain, mercredi 1er février 2012,
22 dans ce prétoire à 9 heures.
23 [Le témoin quitte la barre]
24 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le mercredi 1er
25 février 2012, à 9 heures 00.
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