Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 16 janvier 2004

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 07.

  5   M. LE JUGE PARKER : Bonjour. Madame la Greffière, pourriez-vous nous donner

  6   le numéro de l'affaire ?

  7   Mme LA GREFFIÈRE : L'affaire numéro IT-01-42-T, le Procureur contre Pavle

  8   Strugar.

  9   M. LE JUGE PARKER : Est-ce que le témoin est prêt d'entrer dans le

 10   prétoire ?

 11   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 12   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Madame Alajbeg. Je souhaite

 13   juste vous rappeler que vous êtes sous serment de la déclaration solennelle

 14   que vous avez faite hier.

 15   LE TÉMOIN: LJERKA ALAJBEG [Reprise]

 16   [Le témoin répond par l'interprète]

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Petrovic, le témoin est à

 18   vous.

 19   M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 20   Contre-interrogatoire par M. Petrovic : [suite]

 21   Q.  [interprétation] Bonjour, Madame Alajbeg. Je propose que l'on continue

 22   avec les questions que vous avez entamées hier, la question que l'on vous a

 23   posée hier, à savoir si la constitution de la RSFY contenait des motions de

 24   sécession, Vous avez dit qu'en préambule de la constitution que je cite --

 25   de la constitution fédérale, celle des républiques se sont associées sur la


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  1   base volontaire, sur la base de détermination y compris le droit à la

  2   sécession. Ai-je bien ce que vous avez dit hier ?

  3   R.  C'est exact. C'est exactement ce que j'ai dit hier.

  4   Q.  Aujourd'hui, j'aimerais donner lecture d'une partie du préambule de la

  5   constitution de la RSFY de 1974, on y lit donc : "Le peuple de

  6   l'Yougoslavie à partir sur la base du droit à la détermination y compris le

  7   droit à la sécession sur la base de leur volonté," et cetera, et cetera.

  8   Je vous prie de me dire s'il s'agit du droit des républiques à la

  9   détermination, ou bien, du droit des peuples à la détermination. C'est la

 10   première question.

 11   Ma deuxième question serait la suivante: faites-vous une distinction entre

 12   les deux, le peuple et la république ?

 13   R.  Hier je n'avais pas sous les yeux le texte de la constitution, donc je

 14   veux juste citer mémoire. Il faudrait voir également la constitution de la

 15   république. On peut y lire que le peuple de la République de Croatie peut

 16   et a droit à sécession.

 17   Donc il faudrait avoir les deux textes pour pouvoir s'exprimer là-dessus.

 18   M. PETROVIC : [interprétation] Je demande à présent que l'on montre au

 19   témoin et à l'autre partie aux Juges de cette Chambre le texte que j'ai

 20   ici. Je prie que l'on distribue un exemplaire à chacun.

 21   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas une copie de la constitution. 

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Petrovic, vous avez entendu

 23   que les interprètes ont besoin d'avoir ce texte afin d'être tout à fait

 24   juste envers les interprètes et, selon l'intérêt de cette procédure, il

 25   faudrait les donner une copie de ce document afin qu'ils puissent se


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  1   familiariser avec ce texte.

  2   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  3   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] A présent, nous allons poser ce texte

  4   sur le rétroprojecteur, mais je vous le dis, Monsieur Petrovic, pour que

  5   vous l'ayez à l'esprit à l'avenir.

  6   M. PETROVIC : [interprétation] J'aurais à l'esprit ce que vous venez de

  7   dire et, durant la pause suivante, je distribuerai tous les documents que

  8   je vais verser au dossier de ce témoin.

  9   Q.  Je vous prie, Madame Alajbeg, de voir la première partie du préambule

 10   et, comme je sais que vous parlez également en anglais, vous pouvez voir

 11   les deux textes. Vous pouvez lire en anglais également. Je souhaiterais

 12   également que vous nous donniez votre point de vue là-dessus.

 13   R.  Point 1, du préambule : "Les peuples de l'Yougoslavie sur une base du

 14   droit de chaque peuple détermination compris le droit à la sécession --"

 15   Q.  Dites-moi, voyez-vous les termes de république ? Où est-ce que l'on dit

 16   que la république ait le droit de faire sécession ?

 17   R.  Je voudrais également voir le texte de la constitution de la

 18   république. Il faudrait comparer ces deux textes pour pouvoir s'exprimer au

 19   sujet de ce droit à la sécession.

 20   Q.  C'est moi, qui suis chargé de ce contre-interrogatoire et le Juge de

 21   cette Chambre contrôle la procédure. C'est moi qui présente le document. Ce

 22   que je vous demande, c'est de mettre votre opinion sur ce document que je

 23   vous ai montré et, si c'est nécessaire, la partie adversaire et les Juges

 24   de cette Chambre pourraient faire autrement.

 25   A présent, ce que je vous demande, c'est de me dire si le droit de


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  1   république a fait sécession sur la base du texte de la constitution

  2   fédérale.

  3   R.  Il est question de droit de peuple, mais, dans la constitution de la

  4   République de Croatie, par exemple, on peut dire que la République de

  5   Croatie est une république, et je crois même qu'on dit que la Croatie était

  6   l'état, l'état du peuple croate et des autres peuples de la République de

  7   Croatie, ce qui peut faire sécession sur ce qui est le territoire, là ce

  8   sont les républiques. Avant la reconnaissance de la Croatie, les experts,

  9   en droit constitutionnel, disaient de ce texte que M. Badinter faisait

 10   partie de cette équipe et c'est eux qui ont donné cette interprétation de

 11   ce texte de ce droit des républiques à faire sécession.

 12   Q.  Madame Alajbeg, nous n'avancerons pas beaucoup si vous ne répondez pas

 13   à ma question. Ma question était la suivante et elle était pourtant simple.

 14   Je comprends que chacun ait une position politique. Je comprends que vous

 15   avez un certain devoir d'exposer votre point de vue politique, mais je vous

 16   prie de répondre à ma question. Pourquoi avez-vous dit hier que la

 17   constitution donnait droit aux républiques à faire sécession alors qu'il

 18   s'agit du peuple ?

 19   R.  Je pense que l'on ne peut pas parler de cette façon. Tout n'est pas

 20   noir et blanc. Il est clair que, d'après ce texte, on peut fournir une

 21   interprétation différente concernant la sécession. Ce n'est pas mon opinion

 22   que j'avais formulée, c'était l'interprétation des experts dont je vous ai

 23   fait part.

 24   Q.  Si j'ai bien compris, vous êtes experte en droit international et la

 25   question, qui nous préoccupe ici, est la sécession et la dissolution de


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  1   pays, est une question relevant du droit international.

  2   Je vais passer à une autre question. Fait-on une distinction entre le droit

  3   des peuples à l'autodétermination, et le droit des entités fédérales à

  4   l'autodétermination, et des républiques à l'autodétermination, ou bien,

  5   pensez-vous qu'il s'agit de la même chose ?

  6   R. L'autodétermination concerne le peuple, bien sûr. Le peuple a constitué

  7   une unité d'état, une entité. Ils ont les droits d'enligner cette entité

  8   sur leurs droits à leurs intérêts. Bien sûr, je fais la différence entre le

  9   peuple et l'état. S'agissant du droit à la sécession, les experts en droit

 10   constitutionnel le savent bien, lorsqu'il y a dissolution, la sécession et

 11   la fin d'un état font partie d'un même domaine, mais la constitution relève

 12   du droit interne et ce n'est pas le domaine de même expertise.

 13   Q.  Jusqu'en décembre 1990, quels étaient les peuples constituants

 14   conformément à la constitution de la République socialiste de Croatie à

 15   l'époque ?

 16   R.  D'après le texte de la constitution, que je n'ai pas sous les yeux, je

 17   ne peux pas citer le plus, la Croatie donc était le cas des Croates et du

 18   peuple serbe qui résidaient en Croatie ainsi que d'autres peuples qui y

 19   habitaient.

 20   Q.  Pourquoi, en décembre 1990, le peuple serbe a pu mentionner que le

 21   temps est l'élément et le peuple constituant le République de Croatie ?

 22   Comment cela s'est produit ?

 23   R.  Je ne suis pas tout à fait sûr que votre description soit la bonne,

 24   mais je dois dire que je ne suis pas experte en la matière. Je ne peux pas

 25   être tenue responsable pour la formulation de ce qui figure dans ces textes


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  1   à l'époque.

  2   Q.  D'après vos connaissances de juriste et compte tenu du fait que vous

  3   êtes expert en droit constitutionnel, mais vous êtes juriste quand même,

  4   quelle est votre opinion là-dessus ? Quelle est votre opinion sur le fait

  5   que le peuple serbe ne figurait plus en tant que peuple constituant ?

  6   R.  A mon avis, il ne s'agit pas de cela, ce n'est pas comme cela qu'il a

  7   été formulé. Il s'agissait du contexte d'autres groupes et ceux qui

  8   résidaient sur le territoire de la Croatie, à l'époque.

  9   Q.  D'après la constitution en vigueur en décembre 1990, le peuple serbe de

 10   Croatie, qui était traité comme une minorité, est unique en République de

 11   Croatie ?

 12   R.  Je ne pense pas que le peuple serbe ait été traité et considéré comme

 13   une minorité puisque tous les peuples, ayant une république, disposaient

 14   d'une république sur le territoire de l'ex-Yougoslavie et ne pouvaient pas

 15   être considéré comme une minorité. Par exemple, en Macédoine, la Croatie

 16   n'était pas considérée comme une minorité, mais, en revanche, les Hongrois,

 17   les Italiens étaient considérés comme faisant partie d'une minorité

 18   puisqu'il n'y avait pas de républiques au sein de l'ex-Yougoslavie.

 19   Q.  Suite aux changements et aux modifications de la constitution de

 20   décembre 1990, le peuple serbe n'a-t-il pas été assimilé aux minorités, les

 21   italiens, par exemple, et les autres dont les membres moins importants ?

 22   R.  Compte tenu du nombre peut-être que c'est le cas.

 23   Q.  De quoi parlez-vous ?

 24   R.  Du nombre de gens appartenant à ce groupe ethnique. Une grande partie

 25   de la majorité des habitants de Croatie, des Croates et tous les autres


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  1   sont considérés comme faisant partie des minorités, bien sûr, ils faisaient

  2   respecter leurs droits sur les membres qui étaient celles qui régnaient

  3   dans d'autres pays européens.

  4   Q.  Mais ce nombre a changé, si on a vu la période avant le mois de

  5   décembre 1990 et celle qui a suivi le mois de décembre. Y a-t-il eu un

  6   changement de venu dans ce groupe ?

  7   R.  Je n'ai pas mentionné de "changement".  Le changement n'a pas eu lien

  8   en 1990. S'il y a eu de changement, il s'est produit ultérieurement.

  9   Q.  Pourquoi alors que le peuple serbe -- le statut du peuple serbe a-t-il

 10   changé, d'abord il était l'élément constitutif pour devenir, par la suite,

 11   une minorité ?

 12   R.  Je ne pense pas être la bonne personne pour répondre à cette question.

 13   Je ne peux pas répondre car je ne le sais pas. Cela ne relève pas de mes

 14   responsabilités.

 15   Q.  Le fait que le peuple serbe est devenu une minorité sur le territoire

 16   de la République de Croatie, ce fait ne vous semble-t-il pas être une

 17   raison qui a déclenché le conflit en Croatie ? Le fait, que les Serbes

 18   soient devenus une minorité et qu'une série d'actes de répression s'était

 19   suivie, suite à la prise du pouvoir par le HDZ

 20   --

 21   R.  Je ne le pense pas. Je ne pense pas que qui que ce soit, qui a examiné

 22   ces documents, puisse penser une chose pareille. Là, avant, elle sait que -

 23   - là auparavant, elle sait que les Serbes sur le territoire formaient la

 24   majorité. Elle a déjà procédé en coopération avec le régime de Milosevic --

 25   ils s'organisaient des unités particulières et c'est bien avant que la


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  1   constitution ne soit passée que des actes de ce type ont commencé à se

  2   produire.

  3   Q.  Un an avant que la constitution soit votée ?

  4   R.  Je ne peux pas le dire avec précision.

  5   Q.  Le fait, que les Serbes n'étaient plus considérés comme peuple

  6   constitutif, était peut-être le résultat de cela -- était la réaction à ces

  7   éléments.

  8   R.  Je ne saurais vous le dire.

  9   Q.  Hier, je vous ai demandé quelle était la manière de résoudre la

 10   question des frontières dans la constitution. Vous avez dit que les

 11   dispositions concernaient uniquement les frontières internes. C'est bien ce

 12   que vous avez dit ?

 13   R.  Je n'ai pas dit que c'était exclusivement le cas. C'est ce dont j'ai

 14   gardé le souvenir.

 15   Q.  Est-ce que vous souhaitez que je vous rafraîchisse la mémoire, que je

 16   vous rappelle tout ce qui a été dit, tout ce qui figure dans la

 17   constitution à ce sujet ?

 18   R.  Peut-être que ceci serait utile pour la Défense.

 19   M. PETROVIC : [interprétation] Je prie l'huissier de distribuer les

 20   exemplaires que j'ai ici. Il s'agit de l'article pertinent de la

 21   constitution. Je vous prie de distribuer ces exemplaires aux Juges de cette

 22   Chambre et à l'Accusation.

 23   Q.  Madame Alajbeg, j'attire votre attention sur l'Article 5, la version en

 24   cyrillique, sur le dernier article, première page du document que vous avez

 25   sous les yeux. Je vous prie de lire le premier paragraphe, de cet article -


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  1   - de l'Article 5.

  2   R.  "Le territoire de la RSFY est composé des territoires des républiques

  3   socialistes."

  4   Q.  Je vous prie de me répondre à la question suivante. D'après la

  5   constitution, peut-il y avoir de doute quant au caractère unique des

  6   territoires ? Peut-on -- y a-t-il une ambiguïté quelconque ? Est-ce que

  7   cette unité pourrait être ébranlée, l'unité de cet état ?

  8   R.  Ces dispositions de l'Article 5 doivent être examinées dans le contexte

  9   des autres dispositions de cette constitution-là et des constitutions des

 10   républiques, y compris celles qui prévoient le droit à l'autodétermination

 11   et à la sécession. Il n'y a pas d'interdiction formulée dans cet article.

 12   Q.  Nous irons bien -- nous y reviendrons dans quelques instants. Pouvez-

 13   vous, s'il vous plaît, lire le paragraphe 3, de l'Article 5 ?

 14   R.  "Les frontières de la RSFY ne peuvent pas être modifiées sans l'accord

 15   de toutes les républiques et des provinces autonomes."

 16   Q.  Pourriez-vous nous donner votre opinion à propos de ce paragraphe dans

 17   l'Article 5, de la constitution de la RSFY.

 18   R.  Exactement ce que le texte dit : "Les républiques et les provinces

 19   doivent tomber d'accord" et les différentes tentatives faites à cette

 20   époque visaient cela justement.

 21   Q.  Est-ce que la République de Croatie avait reçu l'accord des autres

 22   républiques et des provinces autonomes qui se trouvaient en République de

 23   Serbie à l'époque, eu égard à cette sécession qu'ils souhaitaient obtenir ?

 24   R.  Vous parlez d'une seule tentative. Je pense que la Croatie, à ce

 25   moment-là, n'avait pas fait une demande de sécession. En Yougoslavie, à ce


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  1   moment-là, on ne parle pas de sécession des républiques, on parlait de

  2   dissolution. Le démantèlement, qui a été clairement établi par la

  3   commission Badinter, dans son opinion,  numéro un est qu'en 1991,

  4   l'Yougoslavie était en plein démantèlement. On ne peut pas, par conséquent,

  5   parler de sécession.

  6   Q.  Du point de vue constitutionnel -- écoutez attentivement à ma question,

  7   s'il vous plaît -- du point de vue constitutionnel de la RSFY, les

  8   tentatives de la Croatie étaient-elles anti-constitutionnelles ?

  9   R.  Non, parce que ceci a été négocié et les dirigeants, de l'époque, de la

 10   République de Croatie, ainsi que les dirigeants de toutes les autres

 11   républiques, y compris celle de Bosnie-Herzégovine, de Bosnie -- de Bosnie-

 12   Herzégovine, de Macédoine, de Slovénie et de Croatie, tentaient de trouver

 13   un accord. Ces différents pays avaient organisé des référendums et les

 14   habitants s'étaient exprimés là-dessus. Ils souhaitaient mettre en place

 15   des états indépendants, même s'ils souhaitaient, également, trouver un

 16   accord et une alliance entre les différentes républiques de lors. Par

 17   conséquent, on ne peut pas parler de sécession d'aucune de ces républiques,

 18   et surtout pas de la seule sécession de la Croatie.

 19   Q.  Les évènements qui se sont produits à la suite de cela sur le

 20   territoire de l'ex-Yougoslavie en 1991, les frontières de la RSFY ont été

 21   modifiées et ce -- ceci était contraire aux dispositions du paragraphe 3,

 22   de l'Article 5, de la Constitution.

 23   R.  La manière dont j'interprète les évènements est la

 24   suivante : ceci n'était pas contraire à la constitution parce que les

 25   évènements, qui se sont produits, n'ont rien à voir avec le paragraphe 3,


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  1   de l'Article 5.

  2   Q.  Les évènements qui se sont déroulés étaient conformes à ce qui était

  3   rédigé au paragraphe 3, à l'Article 5 ?

  4   R.  Seulement en partie parce que différentes tentatives pour parvenir à un

  5   accord avaient été faites entre les républiques et les provinces autonomes.

  6   En fait, les provinces autonomes n'existaient plus à l'époque, parce que le

  7   régime de Milosevic avait tout simplement aboli l'autonomie de ces

  8   provinces. C'était une des raisons pour lesquelles, le parlement de Croatie

  9   avait réagi et conclu ce que nous avons invoqué hier. L'Yougoslavie, par

 10   conséquent, était en plein démantèlement. C'était un état qui s'effondrait.

 11   Il n'y avait pas de sécession, personne n'a jamais parlé de sécession.

 12   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, à quel moment ce démantèlement a lieu,

 13   d'après les éléments de preuve qui ont été présentés hier. Je fais

 14   référence ici aux opinions citées dans la commission Badinter.

 15   R.  Badinter n'a jamais parlé de date. Il a simplement cité les dates de

 16   succession de chacune de ces républiques. Au mois de novembre, néanmoins,

 17   la commission a établi que l'Yougoslavie était un état en plein

 18   démantèlement. Ils n'ont pas dit combien de temps de démantèlement avait

 19   duré. Ceci n'a pas commencé le jour où l'opinion a été rédigé, personne ne

 20   sait combien de temps ceci a duré. C'est difficile à établir, mais, lorsque

 21   la première opinion de la commission Badinter a été rédigé, l'Yougoslavie

 22   était au plan constitutionnel dans une situation déjà fort difficile.

 23   Q.  Un moment, s'il vous plaît. Je souhaiterais regarder l'intercalaire

 24   numéro 9, s'il vous plaît, qui se trouve dans le premier classeur,

 25   intercalaire 9. Il s'agit ici de l'opinion numéro 9, de la commission


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  1   Badinter. Pardonnez-moi, il s'agit de l'opinion numéro 11.

  2   Je vous demanderais de bien vouloir regarder la première page, s'il vous

  3   plaît, au point numéro 2, où il est précisé que : "Les états précédents ont

  4   cessé d'exister et, parce qu'aucun accord n'a été trouvé entre les parties,

  5   mais un processus de désintégration a commencer et, d'après l'opinion de la

  6   commission à partir du 29 novembre 1991, lorsque la commission a rendu son

  7   opinion numéro 1, et s'est terminé le 4 juillet 1992, lorsque la commission

  8   a rendu son opinion numéro 8."

  9   R.  Un instant, s'il vous plaît. Je cherche le passage en question. Vous

 10   avez dit au point numéro 2.

 11   Q.  Oui. Dans la version en B/C/S, vous trouverez ceci à la première page,

 12   au paragraphe 2, en bas de la page. Le numéro ERN se termine par 539.

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Les trois lignes du paragraphe 2. Oui.

 15   R.  "Le démantèlement ou l'effondrement de la RSFY, contrairement aux

 16   autres états, qui ont récemment été dissous comme l'URSS et la

 17   Tchécoslovaquie, suite à un accord entre les parties, mais, dans ce cas-ci,

 18   le démantèlement a duré un certain temps, à commencer d'après la commission

 19   le 29 novembre 1991, lorsque la commission a produit."

 20   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, vous venez de dire, il y a un instant, que

 21   la commission n'a pas fixé de période, mais, en tout cas, n'a pas précisé

 22   lorsque ce processus de désintégration avait commencé. Etait-ce parce que

 23   vous connaissiez mal ce texte ? Ou était-ce une erreur ?

 24   R.  Conformément à cet opinion numéro 1, qui est daté du 29 novembre 1991,

 25   ceci n'a pas -- il a été établi, à cette date-là, que l'Yougoslavie était


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  1   en plein démantèlement, mais ce processus n'a pas démarré à cette date-là.

  2   Je pense qu'il s'agit d'une formulation quelque peu précise. Je pense que

  3   c'est la manière dont ceci a été formulé dans le document qui n'est pas

  4   très clair.

  5   Q.  Par conséquent, dans ces passages, à savoir, les opinions de la

  6   commission Badinter, qui sont tout à fait en faveur des points de vue

  7   proposés par la République de Croatie, il n'y a pas d'imprécision, mais

  8   ici, il y a une imprécision.

  9   R.  Oui, ceci est mon point de vue personnel. Je ne pense pas que la

 10   manière dont ceci a été formulé soit contraire aux intérêts de la

 11   République de Croatie. La Croatie était d'accord avec toutes les opinions

 12   proposées par la commission Badinter parce que nous estimons que ceci a été

 13   établi par un organe compétent. Mais, si vous me demandez d'interpréter

 14   ceci au plan juridique, je pense que c'est quelque peu imprécis si nous

 15   comparons ceci avec les opinions numéro 1 -- numéro 11.

 16   Q.  Merci beaucoup. Nous n'avons plus besoin de ce classeur.

 17   M. PETROVIC : [interprétation] Je souhaite maintenant retourner un petit

 18   peu en arrière et parler d'autres sujets car ceci m'amène à parler d'un

 19   autre sujet, nous y reviendrons par la suite.

 20   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, d'après vous, la constitution du mois de

 21   décembre 1991, était-elle conforme à la constitution de RSFY de 1994 ou

 22   non ?

 23   R.  Je pense que oui. Je pense que c'était conforme avec la constitution

 24   fédérale car, bien évidemment, toutes les constitutions de différentes

 25   républiques devaient être conformes à la constitution de l'Yougoslavie.


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  1   Mais je ne peux pas vous répondre ici car, de façon appropriée -- parce que

  2   je n'ai pas analysé les dispositions de cette constitution à la lumière de

  3   leur caractère constitutionnel.

  4   Q.  La constitution de la République de Croatie, est-ce qu'une

  5   constitution, qui exprime le désir -- comme vous nous l'avez dit, le désir

  6   de voir la Croatie devenir indépendante ?

  7   R.  La constitution n'exprime pas un souhaite, mais permet cette

  8   éventualité.

  9   Q.  Comment ceci a-t-il été régi dans la constitution du mois de décembre

 10   1990 ?

 11   R.  J'ai cité cette constitution de mémoire.

 12   Q.  Est-ce qu'une quelconque disposition de la constitution, qui verrait la

 13   Croatie en dehors de la RSFY, est conforme à la constitution de la RSFY ?

 14   R.  C'est difficile à dire. Lorsque la constitution de la république a été

 15   promulguée, nous n'envisagions pas la possibilité de voir la Croatie à

 16   l'extérieur de l'Yougoslavie. Nous voulions en premier lieu établir le fait

 17   que la Croatie à l'origine avait fait partie de l'Yougoslavie et,

 18   deuxièmement, nous voulions protéger les droits de peuple qui vivait dans

 19   cette république et, dans les différentes versions de la constitution, ceci

 20   a été précisé. Il s'agissait de protéger les peuples et plusieurs

 21   constitutions ont été rédigées depuis la guerre.

 22   Q.  Oui, parce que le peuple serbe a été exclu de la constitution et leurs

 23   droits ont été abolis par la constitution croate.

 24   R.  Non. Je crois qu'il s'agit d'une interprétation un peu poussée.

 25   Q.  Ne s'agit-il pas de votre propre interprétation.


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  1   R.  Nous avons déjà abordé cette question.

  2   Q.  Je vous prie de répondre à ma question. Je répète. La Chambre

  3   interviendra et nous pourrons poursuivre. Je vous pose maintenant une

  4   question à propos du droit du peuple Serbe à l'autodétermination dans la

  5   République de Croatie.

  6   R.  Voulez-vous répéter votre question, s'il vous plaît. Je veux m'assurer

  7   d'avoir bien compris.

  8   Q.  Pourquoi le droit du peuple Serbe à l'autodétermination dans la

  9   République de Croatie a-t-il été aboli ?

 10   R.  Ceci n'est pas exact. Le droit du peuple Serbe à l'autodétermination

 11   n'a pas été aboli.

 12   Q.  Est-ce que cela signifie que le peuple Serbe avait un droit à

 13   l'autodétermination au sein de la République de Croatie ?

 14   R.  Je ne le sais pas. Je sais simplement, que les droits des peuples à

 15   l'autodétermination, est un principe -- qui était un principe actif. Je ne

 16   sais pas à quels peuples ce texte fait référence, à quelles républiques non

 17   plus.

 18   Q.  Le peuple Croate avait-il un droit à l'autodétermination au sein de la

 19   République de Croatie ?

 20   R.  Bien évidemment. Le peuple Croate en a décidé de lui-même. Il y a eu un

 21   référendum lorsque le peuple a voté en faveur de l'indépendance. Il n'y

 22   avait pas que le peuple Croate qui ait voté, tout un chacun a voté lors de

 23   ces référendums. Les Serbes ont voté également. Les Serbes ont voté et

 24   certains Serbes ont voté en faveur de l'indépendance de la Croatie. Ce qui

 25   peut être corroboré par le nombre de votes, parce que 90 % des votes


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  1   étaient en faveur de l'indépendance. Parmi les électeurs, il y avait un

  2   nombre important de Serbes.

  3   Q.  Mme Alajbeg, ceci n'était pas la question que je vais -- vous ai posée.

  4   Les Serbes, non, le peuple Croate, au sein de la République de Croatie,

  5   avaient-ils un droit à l'autodétermination ? Oui ou non.

  6   R.  Les citoyens de Croatie avaient certainement ce droit.

  7   Q.  Dans vos réponses, vous avez répété à plusieurs reprises, que le peuple

  8   avait le droit à l'autodétermination. Maintenant vous dites que ce sont les

  9   citoyens qui ont le droit à l'autodétermination. Quel élément est exact et

 10   quelle thèse soutenez-vous ?

 11   R.  Je pense que dans une des opinions de la Commission Badinter,

 12   l'interprétation est la suivante : on faisait allusion, ici, aux personnes

 13   qui vivaient dans les différentes républiques d'alors.

 14   Q.  Est-ce que cela signifie que le peuple Serbe, en tant que peuple, qui

 15   vivait dans la République de Croatie, et d'après l'interprétation de la

 16   Commission Badinter, avait également le droit à l'autodétermination ?

 17   R.  Je pense que, Madame, la Commission Badinter, lorsque la République de

 18   Serbie a posé la question, a répondu de la manière que je viens

 19   d'expliquer.

 20   Q.  Comment cette question a-t-elle été traitée, eu égard à la Bosnie-

 21   Herzégovine ? Il y avait-il un droit à l'autodétermination dans ce pays?

 22   R.  Je parle seulement du fait que le peuple de Bosnie-Herzégovine a voté

 23   lors du -- lors du référendum, et une grande majorité a décidé en faveur de

 24   l'indépendance. Donc, il ne peut pas s'agir d'un groupe ou de deux groupes,

 25   il s'agit des peuples de différentes nations qui vivaient dans cette


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  1   région.

  2   Q.  Si nous parlons des droits des peuples à disposer d'eux-mêmes, quels

  3   peuples étaient constitutifs de la République de Bosnie-Herzégovine ? Et,

  4   ce droit à l'autodétermination -- combien de peuples vivaient en Bosnie-

  5   Herzégovine et avaient-ils, tous, le droit à l'autodétermination ?

  6   R.  En Bosnie-Herzégovine, nous n'avons jamais parlé d'autodétermination.

  7   Je connais mal la constitution républicaine de ce pays. Mais ce n'était pas

  8   une question qui a été posée lors du référendum. Le vote a porté simplement

  9   sur l'indépendance de la république en tant qu'entité souveraine.

 10   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, de quel droit émane le droit des

 11   républiques à l'indépendance ? Qui a le droit, d'où découle ce droit à

 12   l'indépendance, hormis du peuple lui-même ?

 13   R.  Cela émane certainement des peuples qui y vivent. Ils ont, tous,

 14   participé au référendum. Par conséquent, les peuples qui y vivaient ont

 15   pris cette décision et ont opté en faveur d'un état indépendant.

 16   Q.  Est-ce que cela signifie que les peuples qui vivaient en Bosnie-

 17   Herzégovine avaient le droit à l'autodétermination ?

 18   R.  Je ne peux pas parler de Bosnie-Herzégovine car je ne connais pas la

 19   constitution de ce pays. Je n'ai pas étudié leur constitution. Quoi qu'il

 20   en soit, en ex-Yougoslavie, différents référendums ont été tenus dans les

 21   quatre républiques. Cela n'était pas un référendum des peuples, c'était des

 22   référendums qui étaient soumis aux peuples qui habitaient dans cette région

 23   et dans la grande majorité, ils ont voté en faveur de l'indépendance.

 24   Q.  Madame Alajbeg, c'est exactement cela qui a provoqué le conflit et les

 25   conflits extrêmement graves qui ont surgi sur le territoire de l'ex-


Page 759

  1   Yougoslavie, surtout en République de Croatie.  Ces évènements ont démarré

  2   au printemps, mais nous y reviendrons.

  3   R.  J'ai le droit de répondre à ceci, parce que vous venez de faire une

  4   déclaration qui est incorrecte. Parce que la communauté internationale

  5   avait établi, il y a très longtemps, que le régime de Milosevic avait

  6   démarré, ou avait été à l'origine de ces problèmes en ex-Yougoslavie.

  7   Q.  Madame, vous allez, maintenant, nous dire quand ceci a été établi.

  8   R.  Il y a un certain nombre de documents qui l'attestent. De toute façon,

  9   les activités des unités paramilitaires de Serbie qui étaient sous

 10   l'autorité du régime de Milosevic, de la JNA, quelque chose qui a déjà été

 11   évoqué dans la déclaration de -- lors de la conférence sur l'ex-

 12   Yougoslavie. Il s'agit d'une décision qui a mis en place la Commission

 13   Badinter. Ils parlent très clairement des activités de ces unités

 14   paramilitaires, les unités de Milosevic. Ils n'évoquent pas Milosevic

 15   personnellement, mais parlent de personnes qui sont influencées par ce

 16   régime, d'une partie de la JNA qui s'est mise à la disposition du régime de

 17   Milosevic.

 18   Q.  Je n'ai pas entendu exactement quand ceci a été établi, ni dans quels

 19   documents.

 20   R.  Par exemple, des documents, je me souviens -- des documents que j'ai

 21   évoqués ici. Il s'agit de la Déclaration de Bruxelles. Je crois qu'il

 22   devait s'agir du mois d'août 1991.

 23   Q.  Nous y reviendrons un peu plus tard.

 24   Je vais maintenant revenir un petit peu en arrière et reparler de la

 25   question de la constitution de la République de Croatie. Vous nous avez dit


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  1   que la constitution de la République de Croatie, -- clarifions un point,

  2   s'il vous plaît, est-ce que la constitution de la Croatie évoque le désir

  3   d'indépendance de la République de Croatie ? Vous nous avez dit, il y a

  4   quelques instants, que non. Je souhaite éclaircir ce point. Vous nous avez

  5   dit que la constitution  ne peut pas exprimer pas un désir.

  6   R.  La constitution n'est pas un ensemble de désirs.

  7   Q.  Est-ce qu'elle contient une disposition à propos de l'indépendance ?

  8   R.  Non, il n'y a pas de disposition qui parle de l'indépendance. Cette

  9   constitution contient un certain nombre de dispositions, en vertu de quoi,

 10   la Croatie est une entité constitutive de la fédération. Mais d'une

 11   certaine façon, c'est une

 12   -- un état républicain en tant que tel, comme nous l'avons déjà évoqué.

 13   Q.  Avez-vous signé une déclaration qui vous a été soumise par les

 14   représentants du bureau du Procureur ? Avez-vous fait une déclaration au

 15   bureau du Procureur ?

 16   R.  A quoi faites-vous allusion?

 17   Q.  Avez-vous fait une déclaration de témoin aux enquêteurs du bureau du

 18   Procureur ? Avez-vous signé, oui ou non, cette déclaration ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Je souhaite vous rappeler ce que vous avez dit dans votre déclaration,

 21   au paragraphe 11 de votre déclaration ? Vous avez dit ce qui suit : "La

 22   constitution de la République de Croatie, datée du 22 décembre 1990, est

 23   une illustration du désir d'indépendance de la Croatie et peut être

 24   considéré comme l'expression de la souveraineté croate."

 25   Il s'agit du paragraphe 11 de votre déclaration.


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  1   R.  Pardonnez-moi, mais j'ai l'impression que vous parliez de l'ancienne

  2   constitution de la République de Croatie. Oui. Ce que vous venez de dire

  3   est tout à fait exact et fait allusion à la nouvelle constitution de la

  4   République de Croatie. Avant cela, nous parlions des constitutions de la

  5   RSFY et de l'ancienne République de Croatie, c'est pour cela qu'il y a eu

  6   un malentendu.

  7   Q.  Pardonnez-moi. Je ne retrouve pas ce point; cependant, en décembre

  8   1990, la Croatie avait déjà exprimé ce souhait ?

  9   R.  Oui, bien entendu.

 10   Q.  Maintenant, vous dites quelque chose un petit peu différemment et je ne

 11   veux pas y consacrer trop de temps. Je ne vais pas essayer de reprendre ce

 12   que vous venez de dire, il y a quelques instants; néanmoins, j'aimerais

 13   aborder ce point, à nouveau. Ce souhait était-il conforme à la constitution

 14   de la RSFY en décembre 1990 ?

 15   R.  Je pense qu'il est très difficile de répondre à cette question. Je ne

 16   suis pas une experte en matière de droit constitutionnel, mais je pense que

 17   ceci était tout à fait conforme.

 18   Q.  Si j'entends ce que vous dites, vous dites que ce désir d'indépendance

 19   est conforme au préambule ainsi qu'aux autres dispositions de la

 20   constitution. Ici je fais, en particulier, référence aux dispositions de la

 21   constitution, évoquant l'unité des territoires. Par conséquent, vous

 22   estimez que ces deux éléments s'excluent mutuellement et qu'ils étaient

 23   conformes.

 24   R.  Je pense que ce document est un document émis par la République de

 25   Croatie, la constitution était conforme à la législation d'alors. De toute


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  1   façon, cette constitution régissait, de façon beaucoup plus précise, la

  2   question de la souveraineté de la République de Croatie, qui existait déjà

  3   au sein de l'ex-Yougoslavie.

  4   Q.  Est-ce que vous dites que le principe de l'unité du territoire, visée à

  5   l'Article 5 de la constitution, et le désir d'indépendance, évoqué dans la

  6   constitution de Croatie de 1992, que ces deux éléments sont tout à fait

  7   compatibles ?

  8   R.  La constitution a clairement exprimé le désir de souveraineté et

  9   d'indépendance; néanmoins, la constitution n'a pas écartée l'idée que la

 10   Croatie puisse rester au sein de l'Yougoslavie.

 11   Q.  L'unité du territoire et l'indépendance, ces deux éléments sont-ils

 12   compatibles ?

 13   R.  Oui, tout à fait, parce que, même avant cette date, l'ex- République de

 14   Croatie avait sa propre intégrité territorial, certains éléments de

 15   souveraineté en Yougoslavie. La Croatie pouvait continuer à exister ainsi

 16   et c'était son intention pour autant qu'il y ait un accord. La seule

 17   exception près que ceci aurait été organisé au sein d'une confédération.

 18   Q.  Etait-ce alors l'intention de la République de Croatie de rester au

 19   sein de l'Yougoslavie à partir du moment où le HDZ a pris le pouvoir ?

 20   R.  A ma connaissance il y a eu de très importantes négociations entre la

 21   Slovanie et la Croatie qui avaient proposé un projet de confédération, un

 22   accord portant sur une confédération.

 23   Q.  Madame Alajbeg, je souhaite revenir un petit peu en arrière et parler

 24   de catégorie juridique, est-ce que la Croatie devait maintenir son statut

 25   d'état ? Une confédération n'est pas un état. Est-ce que la Croatie devait


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  1   maintenir son statut, d'après votre interprétation, oui ou non ?

  2   R.  On peut parler de la théorie de la confédération. En tant qu'état, il

  3   s'agit d'une entité étatique et, en tant que tel ces entités, qui

  4   existaient au sein des anciennes républiques, auraient une souveraineté

  5   plus importante. La Croatie aurait trouvé sa place et ne souhaitait pas se

  6   maintenir au sein d'une telle confédération.

  7   Q.  La Croatie souhaitait-elle la reconnaissance internationale en décembre

  8   1990 ?

  9   R.  Non. Pas en décembre 1990. La Croatie recherchait la reconnaissance

 10   internationale au cours de l'année 1991.

 11   Q.  Est-il possible de voir l'indépendance et la souveraineté être deux

 12   éléments qui se retrouvent au sein du même état en vertu des principes

 13   d'une confédération ?

 14   R.  Oui, c'est tout à fait possible d'avoir la souveraineté et la

 15   confédération et ses principes en même temps.

 16   Q.  Est-ce que vous pourriez établir un parallèle en matière de droit

 17   comparé, eu égard à la déclaration que vous venez de faire ?

 18   R.  A ce moment-ci, il y a certains débats qui portent sur l'idée de

 19   confédérations dans le monde. Je crois qu'on évoque souvent l'exemple de la

 20   Suisse lorsqu'on parle de confédération. La Suisse n'est pas une

 21   confédération. Peut-être que nous pourrions citer d'autres exemples

 22   historiques plutôt que de proposer des exemples contemporains.

 23   Q.  Est-ce que cela signifie que la République de Croatie a proposé quelque

 24   chose qui n'existe nulle part ailleurs dans le monde ?

 25   R.  Non, ceci n'est pas vrai. J'ai simplement précisé qu'en matière


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  1   historique, nous savons qu'une telle structure n'existe pas, elle

  2   n'existera pas à l'avenir, elle n'a pas existé.

  3   Q.  Pour l'instant, lorsque la Croatie a rédigé ces différentes

  4   propositions, avait-elle une assise juridique ? Avait-elle un exemple sous

  5   les yeux pour faire une telle proposition ou, subsidiairement, cette

  6   proposition a-t-elle été rédigée de telle sorte à ce qu'elle ne puisse pas

  7   être acceptée par ces participants à la négociation ?

  8   R.  Tant est que je n'ai pas participé personnellement dans la rédaction de

  9   cela, je ne sais pas si on s'est servi d'exemple. Je crois que oui. On a dû

 10   se servir d'exemples, bien sûr. On a dû comparer les rapports et les

 11   relations qui existaient à l'époque entre les républiques et qui, dans

 12   l'avenir, devait exister et représenter une base pour la formation ou pour

 13   la formulation de ces propositions. Mais je vous demanderais de ne pas

 14   parler du fait que ce n'est que la Croatie qui avait fait cette

 15   proposition. Ce sont la Slovénie et la Croatie qui avaient fait cette

 16   proposition et plus tard d'autres républiques ont suivi cet exemple, mais

 17   les deux républiques avaient proposé ce concept.

 18   Q.  Hier, dans le cadre de votre déposition, vous avez répondu à certaines

 19   de mes questions et vous avez dit qu'au printemps, vous ne pouvez pas me

 20   dire quand, exactement c'était. En 1991, au printemps, vous avez participé

 21   à une réunion avec le président Tudjman et le président Tudjman vous a

 22   instruit, vous a informé et vous a donné, comme tâche, d'appliquer certains

 23   principes et de prendre une direction particulière lorsqu'il s'agit

 24   d'institutions fédérales pour ce qui est de la République socialiste

 25   fédérative de Yougoslavie à l'époque ?


Page 765

  1   R.  Plus ou moins, oui, c'était au printemps. Je ne me souviens plus

  2   exactement de la date. Nous avons été convoqués et il nous a dit de rester

  3   là où nous sommes, c'est-à-dire que c'est à lui à faire notre travail, mais

  4   de juste. Mais, avant cette date, nous travaillons à des postes, nous

  5   représentions la Croatie et il nous a dit de continuer de faire notre

  6   travail comme nous le faisions jusqu'à présent, mais le seul fait que nous

  7   travaillons dans des -- à un niveau fédéral. On estimait que la Croatie

  8   allait peut-être parvenir à certains accords et pourrait peut-être devenir

  9   une confédération, faire partie d'une confédération, à trouver des

 10   solutions confédératives.

 11   Q.  Jusqu'au 15 décembre, conformément à cette instruction, vous êtes resté

 12   à votre poste, au sein du secrétariat pour les Affaires extérieures de

 13   Belgrade, jusqu'à la mi-décembre.

 14   R.  Oui. Certains collègues sont partis à cause de certaines circonstances.

 15   Q.  Jusqu'à la mi-décembre, vous vous êtes restée à Belgrade, alors que le

 16   président vous instruit et vous a demandé certaines choses au mois d'avril.

 17   Vous êtes restée à Belgrade et vous représentiez les intérêts, comme une

 18   personne le fait au sein d'un ministre des Affaires extérieures.

 19   R.  Oui, ce n'était pas compatible de travailler dans le ministère de la

 20   RSFY et d'être un cadre au niveau de la république. J'avais -- j'occupais

 21   un poste technique et je leur dis que si vous voulez non pas un poste

 22   politique --

 23   Q.  Et vous êtes restée à ce poste même après la première décision qui

 24   avait été prise concernant l'abolition de tous les liens juridiques avec la

 25   RSFY. Vous êtes restée à ce même poste jusqu'au 15 décembre en plein milieu


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  1   de Belgrade, au sein du ministère des Affaires extérieures, n'est-ce pas ?

  2   R.  Je vous avais dit que déjà, actuellement, j'étais partie plus tôt,

  3   mais, de façon formelle, on peut dire que je suis restée jusqu'au 15

  4   décembre, au sein du ministère, parce qu'en fait, dans cette date-là, mon

  5   travail s'est terminé de façon officielle.

  6   Q.  Y avait-il d'autres collègues qui étaient restés avec vous ?

  7   R.  Oui. Certains étaient restés un peu plus longtemps. D'autres étaient

  8   partis à l'étranger, d'autres se sont trouvés à Belgrade. Puisque le

  9   processus de démantèlement a duré assez certains nombres de mois, ce même

 10   processus, enfin, nous avons suivi l'exemple de ce même processus. Nous

 11   avons -- cela nous a pris quelques temps également. Il était tout à fait

 12   clair qu'il ne s'agissait plus de représenter tous les peuples, au sein des

 13   corps fédéraux, puisqu'à l'automne, tous les Slovènes devaient retourner --

 14   ou étaient retourner en Slovénie. Il n'y avait plus de représentants

 15   slovènes. Nos collègues étaient tous repartis. Nous ne pouvons plus parler

 16   d'un fonctionnement normal des organes fédéraux, plus particulièrement, à

 17   cette époque, mais il y a un document qui fait état de la chose. Je ne me

 18   souviens plus du nom de ce document, mais les choses ne fonctionnaient plus

 19   comme avant, ni la présidence, ni le conseil fédéral, ni les autres

 20   organes.

 21   Q.  Est-ce que le ministre est resté à son poste au ministère fédéral des

 22   Affaires extérieurs jusqu'à la fin de l'année 1991 ?

 23   R.  Il y est resté de façon formelle, mais je dois dire qu'il s'agissait

 24   d'une personne qu'on appelait plus aux réunions -- on se disait la chose

 25   entre nous -- et cette personne n'avait plus aucune influence.


Page 767

  1   Q.  Dites-nous, je vous prie, le ministre, qui était le ministre des

  2   Affaires extérieures de la RSFY, qui est resté jusqu'à la fin de l'année

  3   1991 à son poste, en tant que ministre des Affaires extérieures de

  4   Belgrade, qui est-il ?

  5   R.  Si je me souviens bien, c'était M. Budimir Loncar, qui, depuis la fin

  6   de la Deuxième guerre, se trouvait à Belgrade dans le service diplomatique.

  7   Il avait une famille à Belgrade, il vivait à Belgrade, mais il était

  8   originaire de Croatie.

  9   Q.  Ce M. Budimir Loncar, était-il représentant ? Etait-ce un candidat de

 10   la République Croate pour occuper le poste du ministre des Affaires

 11   étrangères dans le dernier gouvernement de la RSFY ?

 12   R.  Oui, il était considéré comme étant un fonctionnaire croate.

 13   Q.  Il est resté jusqu'à la fin de l'année 1991.

 14   R.  Oui. Il ne s'est pas mis à la disposition de la République croate et,

 15   par la suite, il a perdu toute possibilité de travailler à Belgrade. 

 16   Effectivement, on ne voulait plus de lui à Belgrade non plus car, même

 17   après, vous savez, toutes les personnes, qui --

 18   Q.  Je vous interromps puisque ce n'est pas vraiment pertinent. Merci.

 19   Dites-nous si le président du gouvernement fédéral était resté à son poste

 20   jusqu'à la fin de l'année 1991 à Belgrade ?

 21   R.  Je ne dirais pas qu'il est resté jusqu'à la fin de l'année. Je sais

 22   qu'une décision avait été prise de la part du parlement de la République

 23   croate, demandant que le président du gouvernement de l'époque ne soit plus

 24   considéré comme étant quelque chose de pertinent pour la République croate.

 25   Q.  Ante Markovic, après la première -- après le pouvoir -- après le


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  1   gouvernement de RSFY, avait été proposé comme étant un fonctionnaire à ce

  2   poste. Etait-il d'ailleurs un fonctionnaire croate ?

  3   R.  Oui. Il était un fonctionnaire croate.

  4   Q.  Est-ce qu'il a exercé sa fonction du président de l'état fédéral

  5   jusqu'à la fin de l'année 1991 ?

  6   R.  Je crois que nous puisque cela ne lui était plus permis. Il n'avait

  7   plus aucune influence.

  8   Q.  Jusqu'à quand, à Belgrade, faisait-il son travail de président du

  9   gouvernement fédéral ?

 10   R.  Je ne peux pas vous répondre ceci avec précision. Je ne me souviens

 11   plus, en réalité, mais je sais que déjà, au cours de l'année 1991, M.

 12   Markovic était empêché de faire son travail, en tant que président du

 13   conseil exécutif du gouvernement fédéral de l'époque.

 14   Q.  Etes-vous d'accord avec moi pour dire qu'il était resté à Belgrade

 15   jusqu'à la fin de l'année 1991, ou est-ce que vous ne le savez peut-être

 16   pas ?

 17   R.  Je crois qu'il est parti un peu plus tôt. Je crois qu'il n'est pas

 18   resté jusqu'à la fin de cette année-là.

 19   Q.  A quel moment est-ce que la République de Croatie s'est distancé des

 20   activités de son propre fonctionnaire, qui est resté en tant que premier

 21   ministre au sein du gouvernement fédéral ? Je parle d'Ante Markovic et de

 22   Belgrade.

 23   R.  Je ne me souviens pas exactement, mais je crois que c'était vers la fin

 24   de l'année 1991.

 25   Q.  Nous allons y venir sous peu. Je vous rappellerais de la date exacte


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  1   plus tard, mais, pour l'instant, je souhaiterais revenir à un sujet que

  2   j'ai entamé, il y a quelques instants. Je souhaiterais parler des

  3   instructions que vous avez reçues de la part du président Tudjman au

  4   printemps 1991.

  5   M. PETROVIC : [interprétation] Je demanderais à l'huissier. Je crois qu'il

  6   n'est pas dans le prétoire présentement. Nous allons attendre qu'il

  7   revienne. Je vais donner lecture du passage que je souhaitais évoquer et,

  8   un peu plus tard, je vais demander à l'huissier de distribuer les

  9   exemplaires.

 10   Q.  Je vais vous lire l'Article 362 de la constitution de RSFY.

 11   M. PETROVIC : [interprétation] Il y a une version en B/C/S et une version

 12   en langue anglaise, mais ces documents ne sont pas tamponnés. Il y a six

 13   exemplaires que je vous demanderais de distribuer, Monsieur l'Huissier.

 14   Q.  Jetez un coup d'œil à l'Article 362 et je vous demanderais de prendre

 15   connaissance de l'article d'en donner lecture.  

 16   R.  Les membres du comité exécutif et les fonctionnaires, qui se trouvent

 17   aux organes fédéraux et dans les organisations fédérales, sont obligés --

 18   ou sont responsables de mettre en pratique la législation ou la loi, des

 19   organes de la fédération, doivent exécuter leur travail -- faire leur

 20   travail. Ils ne peuvent pas recevoir de lignes directrices ou

 21   d'instructions provenant de d'autres organes, de d'autres institutions

 22   sociales ou politiques. Ils doivent s'en tenir aux instructions reçues.

 23   Q.  Je vais, maintenant, vous poser une question. L'instruction, que vous

 24   avez reçue à l'époque, était-elle contraire à la constitution ?

 25   R.  Nous n'étions pas fonctionnaires. Nous n'étions pas membres du service


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  1   diplomatique, nous n'étions pas membres du conseil exécutif fédéral, nous

  2   n'étions pas des fonctionnaires. Je vous le répète : je n'étais pas en

  3   position de le faire, ni mes autres collègues.

  4   Q.  Et les autres personnes, qui avaient été choisies -- qui avaient été

  5   choisies de la part de la république, est-ce que ces personnes, selon cette

  6   disposition, devaient se rapporter à la république, qui les avait envoyées,

  7   ou bien, se rapportaient-elles au gouvernement fédéral ?

  8   R.  Les fonctionnaires devaient se -- devaient répondre aux organes qui les

  9   avaient mis -- qui les avaient nommés à ces postes. Je parle, bien sûr, des

 10   ministres et je parle des personnes que l'assemblée de la RSFY avait

 11   nommées. Nous n'étions pas des personnes qui avaient été nommées de la part

 12   de ces organes.

 13   Q.  Y avait-il des personnes qui avaient été des personnes choisies ? Je ne

 14   parle pas de ministres, mais je parle de fonctionnaires, qui étaient des

 15   fonctionnaires qui occupaient des postes dans des organes fédéraux. Je

 16   parle de personnes qui s'occupaient, par exemple, des forces armées, des

 17   personnes de l'assemblée, je pense à eux.

 18   R.  Vous voulez dire : est-ce qu'ils ont participé à cette réunion ?

 19   Q.  Non. Mais je veux dire : est-ce qu'ils se rapportaient exclusivement

 20   aux organes du pouvoir fédéral ? Est-ce qu'ils n'allaient pas agir, de

 21   façon anti-constitutionnelle, s'ils se pliaient aux intérêts des autres

 22   parties, et non pas aux intérêts -- aux instructions des organes qui les

 23   avaient nommés aux postes en question ?

 24   R.  Si vous parlez des fonctionnaires de bas niveau, comme nous l'étions,

 25   et non pas de fonctionnaires -- de hauts fonctionnaires, comme ils étaient,


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  1   comme on fait état dans cette disposition, je dois dire que, même avant le

  2   démantèlement de notre république, c'était toléré. Nous étions envoyés par

  3   notre république pour représenter les intérêts de notre république, mais

  4   cela n'était pas incompatible avec la protection des intérêts de

  5   l'Yougoslavie, en tant qu'entité, en tant qu'ensemble.

  6   Q.  Est-ce que cela veut donc dire qu'au cours de l'année 1991, vous

  7   défendiez parallèlement les intérêts de l'Yougoslavie en tant qu'ensemble

  8   et vous protégiez également les intérêts de la Croatie ?

  9   R.  En 1991, j'avais des fonctions qui vous sont connues. J'occupais des

 10   postes, c'est-à-dire, que j'occupais le poste de chef du service chargé des

 11   contrats internationaux. A l'époque, il n'y avait aucun dilemme. Les

 12   intérêts de l'Yougoslavie et de la république étaient compatibles, ou que

 13   je devais défendre les intérêts de la Croatie et seulement de la Croatie.

 14   Je faisais mon travail comme je le faisais avant cette date.

 15   Q.  Est-ce que vous représentiez les intérêts, est-ce que vous protégiez

 16   les intérêts, est-ce que vous travailliez dans l'intérêt du pays, de l'état

 17   duquel vous étiez employée ou non ? C'est-à-dire, est-ce que vous défendiez

 18   ou représentiez les intérêts de l'état qui -- votre salaire, qui vous

 19   rémunérait ?

 20   R.  J'agissais, je me pliais, aux intérêts de mon employeur, bien sûr.

 21   C'était le secrétaire fédéral des Affaires étrangères et je protégeais les

 22   intérêts de la République de Croatie, qui m'avait envoyée -- qui m'avait

 23   nommée à ce poste.

 24   Q.  Jusqu'au 1er décembre, vous agissiez dans les meilleurs intérêts de

 25   votre employeur. Vous travailliez pour votre employeur, l'état fédéral. Si


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  1   je vous ai bien compris, il s'agissait des intérêts de la Croatie.

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Je suis étonné et je dois vous demander comment cela est-il possible.

  4   R.  Oui, tout à fait, c'est possible car je ne me trouvais pas à un poste

  5   tel où ces intérêts seraient incompatibles.

  6   Q.  Vos collègues croates avaient-ils la même façon d'agir, le même

  7   comportement que vous ? Avaient-ils les mêmes opinions que

  8   vous ?

  9   R.  Je crois que oui.

 10   Q.  Et ils le faisaient pendant toute la période pendant laquelle ils se

 11   sont trouvés à Belgrade, aux postes qu'ils occupaient ?

 12   R.  Je ne parlerai d'autres -- pour d'autres personnes. Je ne peux pas vous

 13   parler au nom de collègues venant d'autres républiques car, en réalité,

 14   nous avions tous un comportement semblable. Nous étions dans un état qui

 15   était en plein démantèlement.

 16   M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je viens de terminer

 17   un sujet particulier. Si vous le permettez, je proposerai que l'on prenne

 18   notre pause matinale, à ce moment-ci, et j'entamerai un autre sujet après

 19   la pause.

 20   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Maître Petrovic. Je

 21   suis tout à fait certain que, pour ce qui est des interprètes, ils

 22   apprécieront une pause à ce moment-ci. Nous allons prendre donc une pause

 23   de vingt minutes et reprendre après la pause.

 24   --- L'audience est suspendue à 10 heures 23.

 25   --- L'audience est reprise à 10 heures 50.


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  1   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Petrovic. Je vous écoute.

  2   M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  3   Q.  Je souhaiterais présenter certains documents si vous le permettez. Nous

  4   avons déjà distribué des documents dans les cabines et je demanderais à

  5   l'huissier de les distribuer dans la salle.

  6   Madame Alajbeg, peut-on poursuivre ? Madame Alajbeg, je vous demanderais de

  7   lire l'Article 207. Pourriez-vous faire lecture du 1er paragraphe, de cet

  8   article ?

  9   R.  "Toutes les dispositions et les autres lois des agences fédérales

 10   doivent être conformes au statut fédéral."

 11   Q.  Pourriez-vous lire, je vous prie, le paragraphe 2, de ce même article ?

 12   R.  "Les statuts de la république et les statuts provinciaux et d'autres

 13   dispositions prévoient que les agences, qui ont promulgué une loi, ont

 14   droit à l'autodétermination et les lois sur l'autodétermination ne doivent

 15   pas être contraire au statut fédéral."

 16   Q.  Et qu'en est-il du paragraphe 3 ?

 17   R.  Le paragraphe 3 dit : "Si le statut fédéral [comme interprété] et le

 18   statut provincial sont contraires au statut fédéral, il sera appliqué, de

 19   façon temporaire, en attendant une décision de la Cour constitutionnelle et

 20   des agences fédérales. A ce moment-là, les agences fédérales sont

 21   responsables pour la mise en place de ces lois. Le statut fédéral qui

 22   existe doit être appliqué dans ce cas-là."

 23   Q.  Est-ce que cet article parle de la loi fédérale ? Est-ce que cet

 24   article dit que la loi fédérale prévaut dans ces cas-là ?

 25   R.  Oui, justement.


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  1   Q.  Est-ce que vous lisez le cyrillique ou les caractères latins ? Voulez-

  2   vous lire en langue anglaise ?

  3   R.  J'étais en train de lire le cyrillique.

  4   Q.  Parlez-nous de la suprématie de la législation fédérale.

  5   R.  Oui, même si au paragraphe 3, on dit que : "Si le statut fédéral -- le

  6   statut au niveau de loi fédérale [comme interprété] et la loi provinciale

  7   est contraire à la loi fédérale, et qui étant appliqué temporairement en

  8   attendant une décision de la Cour constitutionnelle, c'est la loi au niveau

  9   de la république." On ne parle pas d'une suprématie de la loi fédérale.

 10   Q.  Justement, j'allais vous demander, concernant les lois fédérales

 11   concernant la défense, les lois commerciales, les lois régissant les

 12   affaires extérieures et les douanes, est-ce qu'il s'agit de lois qui ont

 13   trait à l'économie, est-ce que c'étaient des lois fédérales ?

 14   R.  Oui. C'est les lois fédérales, à ce moment-là, qui sont appliquées.

 15   Hier, nous avons parlé de la défense nationale. Il s'agissait d'une loi au

 16   niveau de la république, cette loi qui régissait en partie la défense du

 17   pays.

 18   Q.  Est-ce que cela veut dire que lorsqu'on parle de la défense, la loi

 19   fédérale a suprématie sur la loi provinciale ? Est-ce que cela veut dire

 20   que cette loi doit être en conformité avec la loi provinciale ? Est-ce que

 21   les deux doivent être conformes l'une à l'autre ?

 22   R.  Ces deux lois ne régissaient le même domaine si vous voulez. Les lois

 23   régissaient d'autres -- deux domaines bien distincts, mais je crois que ces

 24   deux lois devaient être, bien sûr, en accord l'une avec l'autre.

 25   Q.  Est-ce que cela veut dire que les lois, qui régissaient la défense du


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  1   pays et les forces armées, étaient les lois qui régissaient tout ce qui se

  2   passait sur le territoire de l'ex-Yougoslavie ?

  3   R.  Je présume que oui. Par contre, je n'ai pas toutes les connaissances

  4   des questions de la défense du pays.

  5   Q.  Vous avez témoigné hier de façon très détaillée concernant la pièce 13

  6   qui se trouve dans le classeur numéro 2. Si je ne m'abuse, il parlait de

  7   façon bien détaillée. Sur la défense, pourquoi ne lui avez-vous -- pourquoi

  8   n'avez-vous pas répondu à une des questions posées par ma consoeur,

  9   concernant la Défense ? Pourquoi ne lui avez-vous pas dit que vous n'avez

 10   pas tout à fait connaissance ? Ce n'est pas votre domaine.

 11   R. Et bien, j'ai parlé de la législation en République de Croatie lorsque

 12   j'ai parlé de toute une série de lois. Je n'ai pas participé à la rédaction

 13   de ces lois. Je ne suis pas non plus un expert dans tous les domaines pour

 14   lesquels ces lois ont été adoptées, mais c'étaient des exemples.

 15   Q.  Si la loi fédérale prescrit une structure pure, les forces armées et

 16   l'état, à ce moment-là, cela veut dire que la loi de la république est

 17   absolument contradictoire à la loi fédérale.

 18   R.  A ce moment-là, il n'avait pas de commandant suprême. La loi

 19   provinciale, à ce moment-là, s'est vu en péril et c'est à ce moment-là

 20   qu'il n'y avait pas d'ordre constitutionnel tant que tel.

 21   Q.  Madame Alajbeg, je vous parle -- nous parlons de quelle année ?

 22   R.  C'était en 1991. Nous savons tous que, déjà à cette époque-là, les

 23   activités militaires, sur le territoire de la République de Croatie,

 24   étaient en plein -- battaient son plein, et c'est à ce moment-là qu'il y a

 25   eu ces déclarations sur l'indépendance et l'abolissement des contacts


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  1   internationaux. C'est, à ce moment-là, qu'au cours de ces trois mois, les

  2   activités militaires se sont développés beaucoup plus et qu'on a plus -- on

  3   ne sait plus plier aux accords. J'ai parlé de Bruxelles -- j'ai parlé d'un

  4   document -- d'une déclaration de Bruxelles, de documents qui étaient

  5   rédigés vers la fin du mois d'août 1991.

  6   Q.  Madame Alajbeg, ma question était la suivante : en parlant de la loi de

  7   la république, qui parle de l'armée croate et les lois qui prescrivent ceux

  8   qui régissent les forces armées de l'ex-Yougoslavie. Je parle de certaines

  9   lois. Vous étiez témoin. Vous êtes un témoin de fait, vous êtes en train de

 10   témoigner sur le document.

 11   R.  On parlait de la loi constitutionnelle de l'Yougoslavie qui à l'époque

 12   n'était pas appliquée puisque la Cour constitutionnelle n'existe plus à

 13   l'époque.

 14   Q.  Madame, je vous demanderais de vous en tenir aux questions que je vous

 15   pose. Je vous parlais de lois qui étaient prévues par les lois fédérales.

 16   Nous avons parlé de la loi qui régissait des forces armées et il s'agit,

 17   bien sûr, de la dernière phrase, de l'Article 207, du paragraphe 3. Est-ce

 18   que cela veut dire, que les organes fédéraux, qui sont responsables pour la

 19   mise en place de lois, que c'étaient des lois de la république ? Est-ce que

 20   vous le savez ?

 21   R.  Non, la question n'est pas bonne, mais on ne peut pas parler de

 22   conformité avec la constitution. On peut juste poser la question de savoir

 23   si la conformité -- et non avec la loi fédérale.

 24   Q.  D'accord. La loi fédérale, est-ce que c'est la loi fédérale qui prévoit

 25   l'existence de l'armée croate ou des unités paramilitaires ?


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  1   R.  A ma connaissance, non.

  2   Q.  Toutes les décisions -- toutes les lois, qui ont été votées au sein de

  3   la République de Croatie et qui introduisent des unités militaires, font

  4   contraire à la loi fédérale.

  5   R.  Non, puisque la République de Croatie avait sa constitution propre, et

  6   cette disposition, que vous venez de lire, qui figure à l'Article 207, ne

  7   recrute pas de la même conformité de lois républicaines et la constitution

  8   fédérale. Il n'est pas question de constitution ici. Tout ce qu'on peut

  9   lire concerne les lois et les règlements des textes juridiques. C'est donc

 10   en conformité avec la constitution de la République de Croatie qui était en

 11   vigueur à l'époque en République de Croatie.

 12   Q.  Est-ce que vous êtes en train de nier le fait que la loi sur la

 13   défense, au niveau de la république, devait être en conformité avec la loi

 14   fédérale, et celle-ci devait être en conformité à son tour avec la

 15   constitution ?

 16   R.  A l'époque, ceci n'était plus valable sur le territoire de la

 17   République de Croatie. Celle-ci avait sa constitution et la loi sur la

 18   défense était en conformité avec cette constitution-là.

 19   Q.  La République de Croatie avait-elle une constitution en 1946, 1953,

 20   1974 ? Il ne s'agit pas là d'une situation inédite, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, mais la constitution était une nouvelle constitution et ce texte

 22   est en conformité avec cette constitution-là.

 23   Q.  La constitution de la République de Croatie, elle n'était donc pas

 24   conforme à la constitution fédérale et la loi fédérale sur la défense.

 25   R.  Peut-être qu'il y a eu des éléments qui n'étaient pas conforme, mais je


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  1   le répète : la disposition de l'Article 207 ne fait pas état d'une

  2   conformité ou de l'absence de conformité avec la constitution.

  3   M. PETROVIC : [interprétation] Je prie l'huissier de distribuer ce document

  4   aux parties.

  5   Q.  Je vous prie de voir l'Article 375. A droite, je vous prie de lire

  6   quelques pages.

  7   R.  "La constitution d'Yougoslavie décide de la conformité de la loi avec

  8   la constitution de RSFY; décide si les lois républiques régionales sont

  9   contraires à la loi fédérale; décide de la conformité des règlements et

 10   d'autres actes de caractère générale, émanant des organes fédéraux avec la

 11   constitution de la RSFY et la loi fédéral."

 12   Q.  Je vous remercie. Je ne veux pas m'attarder sur le fonctionnement ou

 13   l'absence de fonctionnement de la Cour constitutionnelle à l'époque. Ma

 14   question est de nature -- concerne la législation. D'après la législation,

 15   est-ce que la Cour constitutionnelle était autorisée -- a décidé de la

 16   conformité de la constitution des lois des autres textes juridiques avec la

 17   constitution fédérale et les lois fédérales.

 18   R.  D'après ce que j'ai lu, d'après ces trois paragraphes, la Cour

 19   constitutionnelle n'était pas autorisée à décider si les constitutions des

 20   républiques étaient conformes aux constitutions fédérales.

 21   Q.  Etait-elle habilité à décider des lois ?

 22   R.  Oui, des lois. Oui, mais elle n'avait pas à intervenir pour ce qui est

 23   de la constitution de la République de Croatie puisqu'il s'agissait là d'un

 24   des attributs de la souveraineté de la république.

 25   Q.  Passons au document suivant, je vous prie.


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  1   Je vous prie de donner lecture devant les Juges de cette Chambre des

  2   paragraphes 242 -- de l'Article 241.

  3   R.  "Les forces armées de la République fédérative de Yougoslavie protège

  4   la souveraineté et l'indépendance ainsi que l'intégrité territoriale, ainsi

  5   que l'ordre constitutionnel de la RSFY."

  6   Q.  Et le paragraphe 2 ?

  7   R.  "Les forces armées de la RSFY sont unifiées et comprennent l'armée

  8   populaire yougoslave et les forces armées de tous les peuples et de toutes

  9   les nationalités, de tous les peuples travailleurs et les citoyens ainsi

 10   que la Défense territoriale en tant que forme élargie de la résistance

 11   armée organisée."

 12   Q.  Est-il question d'armée républicaine ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Je vous remercie. A présent, je souhaiterais que l'on voie le document

 15   suivant.

 16   Madame Alajbeg, je vous prie de donner lecture de l'Article 281, paragraphe

 17   1.

 18   R.  "La fédération, par le biais des organes fédéraux, assure

 19   l'indépendance et l'intégrité territoriale de la RSFY, défend sa

 20   souveraineté dans le cadre des relations internationales, décide de la

 21   guerre et de la paix."

 22   Q.  Je vous remercie. Je vous prie de regarder le document suivant et de

 23   donner lecture de l'Article 327, en haut à droite.

 24   R.  Oui, quel paragraphe ?

 25   Q.  Les deux premiers paragraphes.


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  1   R.  "La présidence de la RSFY élit son président et le vice-président parmi

  2   ses membres dont le mandat dure pendant un an selon l'ordre prévu par le

  3   règlement. Deux, la présidence publie les décisions concernant l'élection

  4   du président et du vice-président et convient et confirme cette élection."

  5   Q.  Merci. Je vous prie d'être brève et de nous faire part de votre point

  6   de vue. Qu'est-ce qui nous indique ? Ce que vous avez défini, comme étant

  7   des éléments qui montraient que la République de Croatie avait commencé à

  8   exister de fait, quels sont ces éléments et qui nous indique que la

  9   République de Croatie était, de fait, un état indépendant ?

 10   R.  De quelle période voulez-vous que je vous parle ?

 11   Q.  1991.

 12   R.  Avant tout, on peut évoquer la déclaration et la décision

 13   constitutionnelle sur la proclamation de l'indépendance. Il s'agit d'une

 14   décision qui avait une force au niveau de la constitution -- le plus élevé,

 15   juridiquement parlant. C'est un document qui exprime les désirs d'un peuple

 16   après un référendum. Il s'agit donc d'une décision constitutionnelle. Ce

 17   sont des éléments forts qui indiquent l'indépendance.

 18   Ensuite, on a d'autres documents, notamment, cette décision du 8 octobre

 19   concernant la rupture des liens étatiques et juridiques avec l'ancien pays

 20   et d'autres décisions concernant les droits et les obligations qui

 21   revenaient à la République de Croatie au niveau international.

 22   Q.  Et quand la République de Croatie, d'après vous, acquiert-elle les

 23   attributs d'une telle indépendance ? Quelle est la date que l'on évoque ?

 24   R.  Dans le texte juridique, nous invoquons la date du 8 octobre 1991.

 25   Q.  Quand les conditions factuelles ont-elles été remplies pour que l'état


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  1   devienne indépendant ?

  2   R.  Vous me demandez de vous dire une date.

  3   Q.  Ouis, s'il vous plaît.

  4   R.  Il n'est pas question de date. Il est question d'exigence et des

  5   conditions qu'il fallait remplir --

  6   Q.  A quelle date, toutes les conditions nécessaires ont été  réunies --

  7   remplies ? On remplissait les conditions une par une. Pouvez-vous nous dire

  8   quand elles ont été toutes réunies ?

  9   R.  On estime que toutes les conditions étaient remplies le 8 octobre, lors

 10   de l'expiration de délai qu'on a invoqué, mais, également, on peut parler

 11   du mois de juin lorsque l'indépendance a été déclarée.

 12   Q.  Je vais répéter ma question. Pendant une certaine période de temps, des

 13   conditions sont remplies, une par une vous avez mentionné deux dates. Ceci

 14   est impossible, à quel moment précis, la dernière condition a-t-elle été

 15   remplie, la dernière condition qui permettait d'estimer la Croatie comme

 16   étant un état indépendant ?

 17   R.  J'ai dit puisqu'il s'agissait de la même chose. Il s'agit juste d'un

 18   rapport de date. Si vous me demandez mon avis, alors, je vous dirais qu'au

 19   mois de juin, le 25 juin 1991, toutes les conditions ont été remplies.

 20   Q.  L'une des conditions n'était-elle pas la fin de l'état précédent ?

 21   R.  Pas nécessairement.

 22   Q.  Sur un même territoire, on peut constater que deux états parallèles

 23   existaient.

 24   R.  Il y a un processus de dissolution. Les unités faisaient succession,

 25   une par une, et c'est exactement ces unités qui ne faisaient plus partie de


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  1   l'ancien état.

  2   Q.  Est-ce que cela veut dire que l'état précédent se réduisait -- sa

  3   superficie se réduisait, mais qu'elle continuait -- qu'il continuait à

  4   exister ?

  5   R.  Cet état n'existait plus comme avant. Sa superficie n'était pas celle

  6   de toutes les républiques. Il ne s'agissait plus du même état.

  7   Q.  Tout à l'heure, vous avez dit que ce n'était pas nécessaire -- qu'il

  8   n'était pas nécessaire que l'état précédent cesse d'exister.

  9   R.  Théoriquement, oui.

 10   Q.  Mais ma question est, effectivement, théorique. Peut-on conclure que la

 11   RSFY existait toujours ?

 12   R.  La RSFY n'existait plus, en tant que RSFY.

 13   Q.  Mais, qu'est ce qui existait alors ? Expliquez-le-nous.

 14   R.  Il y avait ce qu'il restait de la RSFY. C'étaient les états de la

 15   Serbie et du Monténégro, après la succession des autres républiques. Après

 16   l'indépendance de la Slovénie et de la Croatie, le nom restait le même, la

 17   RSFY, mais ce n'était plus le même état en question.

 18   Q.  Pendant toute cette période que nous évoquons, toute cette période de

 19   l'année 1991, la RSFY a continué à exister en droit international ?

 20   R.  Le débat est en cours. Il n'y a pas une opinion prévalente.

 21   Q.  Quelle est votre point de vue là-dessus ?

 22   R.  Il y avait un organisme étatique, qui était responsable en droit et en

 23   obligations, mais il ne s'agissait plus du même état qui comprenait les

 24   mêmes républiques et les mêmes régions.

 25   Q.  En droit international, la RSFY existait en 1991 ?


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  1   R.  Pas dans son intégralité. Le nom est resté le même, mais la réalité de

  2   l'état était autre. Si elle était -- si elle avait été la même, elle aurait

  3   eu, dans son cadre, les mêmes républiques et les mêmes provinces autonomes.

  4   C'était donc un état qui portait le même nom, mais, du point de vue

  5   constitutionnel et juridique, cela ne reflétait pas la même réalité.

  6   Q.  Vous avez porté une attention particulière sur l'état, le sujet des

  7   états en droit international, la reconnaissance d'états. Vous étiez

  8   conseiller des ministres dans votre état, donc vous avez une grande

  9   expérience dans ce domaine. Le droit international, en décembre 1991,

 10   reconnaît-il la RSFY en tant qu'état, un état avec beaucoup de problèmes,

 11   certes, un état qui existe et qui a une vie au niveau du droit

 12   international ?

 13   R.  Le problème de la continuité que le reste de la RSFY -- appelons-la

 14   comme cela -- essayait d'assurer, en tentant de présenter cet état comme

 15   étant le même qu'avant. Les autres républiques contestaient cela, au niveau

 16   international. Enfin, ce fait a été reconnu lorsque le reste de ce pays, la

 17   Serbie et le Monténégro, a été admis au sein des Nations Unies.

 18   Q.  Du point de vue international, en décembre 1991 -- du point de vue des

 19   organisations internationales de communication, de l'Union européenne, des

 20   Etats-Unis d'Amérique, de la Russie, des Nations Unies, et cetera, y avait-

 21   il une adresse qui appartenait à la RSFY ?

 22   R.  Oui, mais il ne s'agissait plus du même état.

 23   Q.  Existait-il un président -- le président de la présidence de cet état,

 24   en décembre 1991 ?

 25   R.  A l'époque, il n'y avait plus de présidence, puisque les membres


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  1   avaient quitté cette présidence, les membres venant des états qui avaient

  2   quitté la fédération. En décembre 1991, la présidence yougoslave n'existait

  3   plus.

  4   Q.  Pouvez-vous me dire si le gouvernement 0existait, le gouvernement de la

  5   RSFY, en décembre 1991 ?

  6   R.  Il n'existait pas de gouvernement composé de représentants de -- de

  7   représentants de toutes les républiques et des provinces autonomes. Il n'y

  8   avait, probablement, que les membres représentants des états qui sont

  9   restés au sein de la RSFY, la Serbie et le Monténégro.

 10   Q.  Vous êtes en train de me dire qu'il y avait un premier ministre qui

 11   était de Croatie, qu'il y avait un ministre des Affaires étrangères qui

 12   était de Croatie, mais qu'il n'y avait pas de gouvernement de la RSFY ?

 13   R.  Physiquement, ils existaient, mais ils ne pouvaient plus agir et ils

 14   n'étaient reconnus d'aucune manière. Ils n'étaient pas reconnus du tout.

 15   Q.  En 1991, la communauté internationale a établi des contacts avec le

 16   président -- le premier ministre de ce gouvernement, Ante Markovic, qui

 17   était croate. Est-ce que c'est pour cela que le parlement croate s'est

 18   dissocié d'Ante Markovic, le premier ministre, qui a été nommé par la

 19   Croatie, qui était un fonctionnaire croate ?

 20   R.  Oui, le gouvernement croate s'est distancié de lui.

 21   Q.  Mais pourquoi ? Puisqu'il n'était pas actif ? Qu'il n'agissait pas ?

 22   R.  D'abord, il ne pouvait pas agir et, deuxièmement, il tentait de

 23   négocier de nouveaux arrangements avec la communauté internationale, mais

 24   il n'avait plus de compétence, à l'époque.

 25   Q.  L'assemblée s'est distanciée d'Ante Markovic, puisqu'il n'avait plus de


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  1   compétence ? Ou bien, parce qu'il n'agissait pas en conformité avec ce qui

  2   a été la politique d'état de la Croatie à l'époque ?

  3   R.  J'estime que les deux correspondent à la réalité.

  4   Q.  Comment pouvez-vous dire que les deux sont exacts, alors qu'il s'agit

  5   de deux affirmations qui sont contraires l'une à l'autre --

  6   contradictoires ? D'une part, il ne pouvait pas agir et les choses

  7   faisaient qu'il réalisait et était contraint aux intérêts de la Croatie.

  8   Comment pouvez-vous concilier les deux ?

  9   R.  Il ne pouvait pas agir. Il rencontrait des obstructions sur son chemin.

 10   Il ne pouvait absolument pas, en tant que premier ministre, agir sur

 11   l'agression contre la Croatie. Il ne pouvait arrêter les activités

 12   militaires. Je pense que c'est pour cela que la Croatie a pris des

 13   distances par rapport à lui. Il ne pouvait pas préserver l'ordre existant

 14   et empêcher l'agression contre la Croatie.

 15   Q.  Dites-moi, alors, autre chose. Si vous ne pouvez pas faire et s'il ne

 16   pouvait pas agir, à ce moment-là, il s'agit de non action et l'assemblée

 17   prend ses distances, à cause de ce qu'il fait, et non pas de ce qu'il ne

 18   fait pas.

 19   R.  Il était dans l'impossibilité de faire quoi que ce soit, et c'est ce

 20   qu'il a dit lui-même en public. Il a dit qu'il n'avait pas la possibilité

 21   d'arrêter les agissements de la JNA, à l'époque. M. Markovic avait peut-

 22   être à l'esprit d'autres concepts en tête dont la Croatie voulait se

 23   distancier.

 24   Q.  Alors, la Croatie voulait-elle prendre des distances parce qu'il

 25   agissait d'une certaine manière ou parce qu'il ne pouvait pas agir d'une


Page 786

  1   certaine manière ?

  2   R.  Je souhaiterais voir le texte de la conclusion pour être sure de ce qui

  3   est écrit.

  4   Q.  Je vais essayer de retrouver le texte en question. Accordez-moi

  5   quelques instants, je vous prie.

  6   M. PETROVIC : [interprétation] Peut-être Me Lamb pourrait m'aider. Il

  7   s'agit de la conclusion qui concerne Ante Markovic et les autres. La

  8   conclusion, dont où il est question, désavoué Ante Markovic et d'autres

  9   personnes. Attendez une seconde, je vous prie, je viens de retrouver ce

 10   document.

 11   Il s'agit ici d'un document qui se trouve dans le premier classeur.

 12   Intercalaire numéro 8, le document qui porte le numéro 677. Le numéro ERN

 13   se termine par 362, dans la version B/C/S.

 14   Q.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, regarder le document 16177, daté du 5

 15   décembre 1991, je vous prie, et je vous demande de bien vouloir lire à voix

 16   haute le paragraphe 8.

 17   R.  "Conformément à une décision prise par l'assemblée croate le 8 octobre

 18   1991, en vertu de quoi la légitimité et la légalité de tous les organes de

 19   l'ex-République socialiste fédérale d'Yougoslavie ont été ré évoqués,

 20   l'assemblée croate ne reconnaît pas, et rejette toutes les activités d'Ante

 21   Markovic, premier ministre de l'ancien gouvernement fédéral, ainsi que M.

 22   Budimir Loncar, qui pourrait porter à conséquence d'une manière ou d'une

 23   autre pour la République de Croatie."

 24   Q.  Merci beaucoup. Est-ce que cela semble plus clair maintenant ? Est-ce

 25   que vous pouvez nous dire de quoi il s'agit ?


Page 787

  1   R.  Oui. Tout à fait. C'est tout à fait clair. Cela me fait penser à une

  2   mesure conservatoire. L'assemblée prend ses distances par rapport aux

  3   activités de ces deux fonctionnaires, de ces deux personnes, qui pourraient

  4   porter à conséquence pour la République de Croatie, prenant pas la distance

  5   par rapport à toutes leurs activités, mais quel que soit les activités

  6   qu'ils ont exercées et qui pourraient avoir des conséquences pour la

  7   République de Croatie.

  8   Q.  Je vous prie de lire le texte, s'il vous plaît. Il s'agit

  9   -- pourrait porter à conséquence où -- peut avoir des conséquences.

 10   R.  Oui. Il s'agit de conséquences qui s'appliqueraient à la République de

 11   Croatie.

 12   Q.  Pourriez-vous préciser, s'il vous plaît, pourquoi le parlement rejette-

 13   t-il ce que fait le premier ministre, ainsi que le ministre des Affaires

 14   étrangères fait dans ce gouvernement ? Et au plan politique, qu'en était-il

 15   à l'époque ? Quelle était l'attitude de la communauté internationale à

 16   l'époque, eu égard au premier ministre et au ministre des Affaires

 17   étrangères de ce gouvernement ainsi que de la légitimité ?

 18   R.  Et bien, nous savons qu'à partir du 8 octobre, lorsque tous les liens

 19   officiels ont été dissous, il n'y avait plus de représentant de la Croatie

 20   et au sein de la présidence. Ces deux personnes, qui sont restées à leur

 21   poste, ont été considérées comme étant des personnes qui n'avaient pas pris

 22   suffisamment des mesures pour protéger la République de Croatie à l'époque,

 23   et la République de Croatie était attaquée et souffrait d'occupation

 24   partielle, à l'époque.

 25   Q.  La Croatie se dissocie-t-elle de leurs activités car ces personnes


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  1   avaient appliqué les lois ainsi que la constitution de la RSFY, qui était

  2   en vigueur à l'époque ?

  3   R.  Non, pas du tout. Cela n'est pas ce que le texte dit.

  4   Q.  En Croatie, comment se fait-il qu'Ante Markovic soit resté à son poste

  5   de ministre du gouvernement fédéral ? Comment ceci était-il perçu en

  6   Croatie ?

  7   R.  Et bien, en Croatie, tout le monde savait que M. Markovic, le premier

  8   ministre, n'avait quasiment plus aucune autorité, et on le percevait comme

  9   quelqu'un qui n'avait plus de pouvoir, quelqu'un, par conséquent, qui ne

 10   pouvait rien entreprendre. C'est comme ça qu'il était perçu, et il

 11   consultait ses collègues. Je me souviens, au mois d'octobre, qu'il est venu

 12   car il souhaitait avoir notre avis lorsque le palais présidentiel a été

 13   bombardé. Lorsque lui et le président Tudjman et M. Mesic -- alors, membres

 14   de la présidence -- se sont réunis, par conséquent, c'était quelqu'un qui

 15   n'était pas bien perçu à Belgrade et, malheureusement, il n'a pas pu

 16   davantage défendre les intérêts de la Croatie.

 17   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, pourquoi le parlement croate a-t-il

 18   seulement rejeté ces deux personnes-là, le premier ministre et le ministre

 19   des Affaires étrangères ? Pourquoi n'ont-ils pas rejeté les autres

 20   ministres ? Comment savait-il qu'il ne s'agissait que de ces deux

 21   personnes-là -- des activités de ces deux personnes en question ? Qui

 22   n'approuvaient pas ?

 23   R.  Bien évidemment, il ne souhaitait pas intervenir dans les affaires

 24   courantes, les autres républiques. Par conséquent, les fonctionnaires des

 25   autres républiques n'étaient pas en cause. Ces deux personnes en question


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  1   étaient des personnes qui venaient de Croatie.

  2   Q.  Qui sont restés à leur poste jusqu'à la fin du mois de décembre 1991 ?

  3   R.  Oui, officiellement,

  4   Q.  Je ne suis pas d'accord qu'ils soient restés à leur poste

  5   officiellement parce que, si ceci avait été fait de façon officielle, il

  6   n'y avait aucune raison pour que le parlement ne rejette ou ne désavoue

  7   leurs activités.

  8   R.  Je ne peux pas vous parler du caractère officiel de ceci, mais, en

  9   grande partie, c'était officiel. Ces personnes n'exerçaient aucun pouvoir

 10   et, dans le ministère dans lequel je travaillais moi-même, M. Loncar a été

 11   complètement marginalisé.

 12   Q.  Mais ces activités -- ces agissements étaient-ils que la République de

 13   Croatie souhaite pour avoir ces distances par rapport à lui quel que soit

 14   les activités qu'il exerçait ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Merci beaucoup.

 17   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Petrovic, avant de mettre ce

 18   document de côté, intercalaire numéro 8, en langue anglaise, dans la

 19   traduction 3091154, la date ici que nous avons ces le 5 novembre 1991, dans

 20   le document 894362, il s'agit, dans la version B/C/S, je crois que l'on lit

 21   le 5 décembre. Est-ce exact ?

 22   M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, pardonnez-moi, je

 23   n'ai pas remarqué cette erreur. J'aurais dû le remarquer moi-même. Ceci

 24   doit être une erreur de traduction. Le journal officiel a été publié le 9

 25   décembre 1991 et, dans la version B/C/S, à la dernière ligne du texte en


Page 790

  1   B/C/S, on lit le 5 décembre 1991. Il y a, bien évidemment, une erreur ici

  2   de traduction. Comme vous venez de nous le faire remarquer, on devrait lire

  3   : "Zagreb,

  4   5 décembre 1991". Je vous remercie d'avoir porté ceci à mon attention.

  5   Q.  Nous parlions de la dissolution de la RSFY et, lorsque nous nous sommes

  6   arrêtés, nous avons parlé de votre propre point de vue là-dessus. Si je

  7   puis vous citer, vous avez dit que l'existence d'un état ne signifie pas

  8   pour autant qu'un autre état a cessé d'exister. Ai-je raison ?

  9   R.  Oui, en théorie.

 10   Q.  Quand la RSFY s'était-elle effondrée ? Quand la RSFY a-t-elle été

 11   dissolue ?

 12   R.  Il n'y a pas eu de date précise. Ceci n'était fondé sur aucun accord ou

 13   traité. Il s'agissait d'un processus, ceci a duré un certain temps. On peut

 14   parler, je crois, ici de dissolution.

 15   Q.  Que dit la commission Badinter à ce propos ?

 16   R.  L'opinion numéro 1, il est dit que l'Yougoslavie est en cours de

 17   dissolution et, d'après la commission, la dissolution avait déjà commencée.

 18   Q.  Quand l'Yougoslavie s'est-elle effondrée, d'après la commission

 19   Badinter, s'il vous plaît ? Je veux m'assurer que vous ayez bien compris ma

 20   question.

 21   R.  Badinter n'a pas dit lui-même que l'Yougoslavie s'était effondrée à une

 22   telle et telle date. Il a simplement précisé que certaines dates marquaient

 23   la succession de certains états, le processus suivant son cours, et

 24   différentes républiques ont accédé à l'indépendance et ont appliqué leurs

 25   droits à la souveraineté et à l'indépendance. Les dates de succession ont


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  1   été établies. C'étaient les dates auxquelles ces états sont devenus des

  2   états souverains et des états reconnus par la communauté internationale, en

  3   vertu du droit international. Ceci a duré jusqu'à ce que le dernier état

  4   soit reconnu par la communauté internationale et vous constaterez ceci à

  5   l'opinion numéro 11.

  6   Q.  Madame, connaissez-vous bien les opinions de la commission Badinter ?

  7   Les avez-vous lues récemment ?

  8   R.  Oui, tout à fait. J'ai lu ces opinions. Je ne peux pas vous les citer

  9   de mémoire, mais je les connais.

 10   Q.  Quand avez-vous lu ces opinions pour la dernière fois ?

 11   R.  Je les lis de temps en temps. Cela dépend du sujet que je traite à ce

 12   moment-là.

 13   Q.  Estimez-vous, vous-même, en tant que personne qui connaissez bien les

 14   opinions de la commission Badinter, que vous pouvez témoigner à propos de

 15   ces opinions devant cette Chambre de première instance ?

 16   R.  Je ne peux pas dire qu'il s'agisse ici du seul élément que je traitais.

 17   Il s'agit d'éléments annexes auxquels nous faisions référence dans notre

 18   travail quotidien.

 19   M. PETROVIC : [interprétation] Maintenant l'opinion numéro 8, pourriez-vous

 20   remettre le document au témoin.

 21   Q.  Il s'agit du premier classeur, intercalaire 9, opinion numéro 8, est-ce

 22   que vous avez cette opinion sous les yeux ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Pourriez-vous regarder, s'il vous plaît, les conclusions au paragraphe

 25   4, de l'opinion numéro 8 ? Pourriez-vous le lire le paragraphe, s'il vous


Page 792

  1   plaît. Vous l'avez en B/C/S également.

  2   R.  Il s'agit d'une opinion, qui est datée du 4 juillet 1992. Au paragraphe

  3   4, il est précisé que : "La commission d'arbitrage parle du processus de

  4   dissolution de la RSFY auquel il est fait mention à l'opinion numéro 1, le

  5   29 novembre 1991. Ce processus est maintenant terminé et la RSFY n'existe

  6   plus."

  7   Q.  Quelle est la date ici, s'il vous plaît ?

  8   R.  Pardonnez-moi mais l'opinion a été émise le 4 juillet 1992.

  9   Q.  Est-ce que vous prétendez toujours qu'il n'y a rien dans les opinions

 10   de la commission Badinter sur la date dissolution de la RSFY et ceci vous

 11   permet de vous rafraîchir la mémoire ?

 12   R.  Oui, effectivement, cela me permet de rafraîchir ma mémoire. Il est

 13   indiqué ici que le processus est maintenant terminé. La date n'a pas été

 14   évoquée ici l'opinion, qui a été donnée date du 4 juillet; cependant

 15   Badinter n'évoque pas la date à laquelle le processus est terminé. Il

 16   précise simplement que le processus est terminé et une date n'est pas

 17   donnée. On ne peut pas dire qu'à telle ou telle date l'Yougoslavie s'est

 18   finalement effondrée.

 19   Q.  Vous n'acceptez pas l'opinion qui a été émise le 4 juillet 1992, qui a

 20   été remise à Lord Carrington, le 18 mai 1992, et la question qui avait été

 21   posée, la réponse a été donnée, le processus est maintenant terminé.

 22   R.  Je suis tout à fait d'accord avec l'opinion qui a été proposée ici.

 23   J'accepte cette déclaration et je comprends fort bien que le processus

 24   était terminé parce qu'il apparaît, tout à fait, clairement que la

 25   succession des états, en Serbie et Monténégro, ont été fixée à la date du


Page 793

  1   27 avril 1992. Par conséquent, cette opinion précise simplement que le

  2   processus était terminé puisque une date de succession avait été fixée pour

  3   la dernière république.

  4   Q.  Pourquoi ne précise-t-on pas ici qu'il s'agit du 27 avril 1992, comme

  5   étant la date qui marque l'effondrement de l'ex-Yougoslavie ? Pourquoi est-

  6   il précisé -- c'est l'interprétation, je crois, que c'est le problème ici,

  7   qui me semble tout à fait clair : "On considère maintenant que le processus

  8   de dissolution est terminé et que l'Yougoslavie n'existe plus ?"

  9   R.  Oui, mais cette opinion ne signifie pas pour autant que cette phrase de

 10   Badinter signifie, pour autant que le processus était terminé à la date à

 11   laquelle cette opinion a été fournie. Il précise simplement que le

 12   processus est terminé. Cela n'a pas d'incidence au plan constitutionnel.

 13   Q.  Est-ce que cela signifie que la RSFY, en cours de dissolution, existait

 14   toujours dans la première moitié de 1992 ? Le processus de dissolution

 15   était en cours, mais l'état existait néanmoins ?

 16   R.  Oui, il y avait certaines parties qui existaient toujours pour autant

 17   que certaines républiques n'étaient pas encore indépendantes et certaines

 18   parties de l'ex-RSFY existaient toujours ainsi qu'une certaine partie

 19   constitutive de celle-ci.

 20   Q.  Dans votre déclaration, vous évoquez et vous interprétez le désir

 21   d'indépendance du peuple. Vous avancez ceci comme étant un des facteurs

 22   déterminant qui ont permis à certains états de l'ex-Yougoslavie d'accéder à

 23   l'indépendance.

 24   R.  Dans la traduction ici, on précise, dans la constitution de la

 25   République de Croatie, que la souveraineté et l'intégrité territoriale,


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  1   ainsi que l'indépendance, sont les expressions même du peuple croate. Il

  2   existe certains faits historiques qui sont cités dans ce même paragraphe,

  3   nous fournissant une explication sur l'émergence de ce nouvel état croate.

  4   Dans ce contexte, on parle également de la réaction du peuple croate.

  5   Q.  Quelle incidence ceci a-t-il sur l'ordre constitutionnel et

  6   l'indépendance ?

  7   R.  Il y avait qu'une -- ceci ne permet pas d'expliquer pourquoi la Croatie

  8   est devenue indépendante, mais c'est un élément qui doit être -- dont on

  9   doit tenir compte lorsqu'on tient compte des autres éléments.

 10   Q.  Arrive-t-il souvent que, lorsque certaines entités territoriales

 11   souhaitent accéder à l'indépendance et n'y accèdent pas au moment où elles

 12   le souhaitent ? Est-ce que c'est quelque chose qui se produit souvent dans

 13   le monde d'aujourd'hui ? Peut-être qu'il y avait des dizaines d'exemples

 14   que l'on peut proposer de la sorte ?

 15   R.  Je souhaite m'en tenir au simple territoire qui nous concerne. Il est

 16   vrai que les Croates estimaient -- avaient déjà, par le passé, souhaité

 17   avoir leur propre territoire, et souhaitaient avoir leur propre état. Il

 18   est vrai que, dans le cas qui nous concerne, l'indépendance avait été

 19   acquise après que la Croatie ait été attaquée. Une fois qu'il semblait tout

 20   à fait clair que les forces de l'ex-état étaient capables de lancer une

 21   agression contre notre pays et de commettre des crimes sur notre

 22   territoire, dans ce cas-là, le peuple croate et les peuples qui résidaient

 23   sur le territoire de la Croatie ne souhaitaient plus rester à l'intérieur

 24   d'un tel état.

 25   Q.   A plusieurs reprises, vous parlez d'agression. Hier et aujourd'hui,


Page 795

  1   vous me dites quel organisme international a clairement précisé qu'il

  2   s'agissait là d'une agression ? Y a-t-il un document émis par aucun

  3   organisme international qui atteste de ce fait, à commencer par les Nations

  4   Unies, qui pourrait décrire les évènements comme vous l'avez fait comme

  5   étant une agression ?

  6   R.  Pour autant que je me souvienne, il y avait une résolution qui avait

  7   été votée par les Nations Unies, qui parlait de zone occupée, ce qui

  8   indique, clairement, qu'il s'agissait de régions occupées dans la

  9   République de Croatie, et que ces régions avaient été occupées par une

 10   force -- des forces armées. Le terme "agression" n'est pas souvent utilisé

 11   par la communauté internationale. C'est la raison pour laquelle, il faut

 12   être prudent à cet égard.

 13   Q.  Pourquoi faut-il être prudent ? D'où viennent ces précautions très --

 14   cette précaution peut-être exagérée ? Est-ce que cela vient du fait que

 15   ceci n'a peut-être pas de fondement ou est-ce que c'est quelque chose qui a

 16   été construit de toute pièce ? Pourquoi cette thèse n'était-elle pas

 17   reconnue par la communauté internationale ?

 18   R.  Je n'ai pas dit que ceci ne pouvait pas être approuvé, qu'il n'y a pas

 19   eu de soutien à cet égard. Ce terme n'est pas beaucoup utilisé. C'est tout.

 20   J'en ai parlé -- j'ai évoqué un document. Je ne peux pas le citer parce que

 21   je ne le connais pas par cœur. Il s'agit de la résolution sur les

 22   territoires occupés dans la République de Croatie. Je pense que, s'il

 23   s'agissait à l'avenir d'arriver à une résolution pacifique de la situation

 24   plutôt qu'une -- que de quelque chose qui conduirait à la guerre, il

 25   s'agissait de trouver une solution pacifique, et c'est pour ça que certains


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  1   termes ont été évités.

  2   Q.  Est-ce que vous dites que la communauté internationale évitait

  3   d'utiliser d'appeler un chat, un chat ?

  4   R.  Oui, quelquefois.

  5   Q.  Ce que vous venez de dire, il semble que ceci ait toujours été le cas ?

  6   R.  Non. Vous parlez du terme "agression". Je pense que le terme

  7   "agression" est quelque chose qui n'est pas mentionné souvent.

  8   Q.  Vous dites également que, le 8 octobre, qui est la date de la

  9   reconnaissance, et qu'à partir de ce jour-là, les autres états se sont

 10   exprimés ainsi parce que la reconnaissance de la République de Croatie

 11   s'est produite environ à cette date-là. Dites-moi, s'il vous plaît, vous

 12   dites, au paragraphe 6, de votre déclaration, que vous avez fait au bureau

 13   du Procureur -- vous dites aux environs de cette date, qui a reconnu la

 14   Croatie avant cette date ?

 15   R.  Pardonnez-moi.

 16   Q.  Qui a reconnu la Croatie avant le 8 octobre ?

 17   R.  J'ai déjà parlé de la Slovénie. J'ai parlé de la Lituanie. A mon sens,

 18   il s'agissait de ces deux états et toute une série d'états.

 19   Q.  Je vous parle avant, de la date qui a précédé le 8 octobre. Quels

 20   étaient les états qui avaient reconnu la Croatie ?

 21   R.  J'en suis tout à fait certaine qu'il y avait ces deux états.

 22   Q.  Laissez-moi terminer, s'il vous plaît. Y avait-il d'autres états qui

 23   avaient reconnu la Croatie avant la date du 8 octobre ?

 24   R.  Je ne sais pas si ceci a été fait par écrit, mais quoi qu'il en soit,

 25   ils sont entrés en contact avec la Croatie et ont reconnu tacitement ce


Page 797

  1   statut parce que la Croatie était en contact avec un nombre assez important

  2   d'états.

  3   Q.  Vous dites que la reconnaissance était une reconnaissance au sein de la

  4   communauté internationale ou est-ce que vous parlez simplement de contact

  5   et de différentes actions qui avaient été entreprises ?

  6   R.  Lorsqu'un fait existe -- lorsqu'un fait a été établi, c'est un fait qui

  7   existe en tant que tel.

  8   Q.  Madame, s'il vous plaît, la question que je vous pose, c'est : qui a

  9   reconnu la Croatie avant la date du 8 octobre ?

 10   R.  Veuillez ralentir, s'il vous plaît.

 11   Q.  Qui a reconnu la Croatie avant la date du 8 octobre ? Vous avez répondu

 12   par écrit et --

 13   R.  Par écrit et de façon non formelle, un certain nombre d'états avaient

 14   reconnu la Croatie, en entrant en contact avec cette république. Ce n'est

 15   pas parce qu'il y a un document écrit que la reconnaissance existe. La

 16   reconnaissance ne se traduit pas forcément par un document écrit. Un

 17   certain nombre d'états ont simplement pris contact avec la Croatie et ont

 18   reconnu son indépendance.

 19   Q.  Est-ce que vous êtes en train de dire qu'un état peut être reconnu par

 20   un projet de loi qui est déterminant ? Est-ce que vous êtes en train de

 21   dire que lorsqu'il y a relation avec une autre entité -- laissez-moi

 22   terminer ma question -- lorsqu'il y a relation, que ce soit au plan

 23   politique et économique de toute nature, avec une autre entité, qu'il

 24   s'agit de quelque chose qui permet d'avaliser la reconnaissance ?

 25   R.  Oui. C'est tout à fait possible.


Page 798

  1   Q.  A ce moment-là, entre le mois de juin et le mois d'octobre, ou plus

  2   tard, la Croatie établit des contacts avec la RSFY, qu'il y aie eu un

  3   contrat ou non avec la RSFY. Cela signifie-t-il que seule la Croatie aurait

  4   été reconnue par la RSFY ?

  5   R.  Si on signe un traité international avec un autre état, cela équivaut à

  6   une reconnaissance de cet état.

  7   Q.  Par exemple, la République de Croatie et la RSFY ont signé un traité

  8   dans la période qui nous concerne. Est-ce que cela signifie qu'il y a une

  9   reconnaissance mutuelle ?

 10   R.  Si tel avait été le cas. Si les deux parties avaient signé un accord

 11   international -- ou un traité international, cela équivaudrait à une

 12   reconnaissance.

 13   Q.  La Croatie a-t-elle signé un tel traité avec la RSFY ?

 14   R.  Je ne me souviens pas qu'un tel traité ait été signé à ce moment-là.

 15   Q.  Et qu'en est-il, du mois de novembre, la Croatie et la RSFY avaient-

 16   elles signé un contrat à cette date, ce qui équivaudrait à une

 17   reconnaissance mutuelle ?

 18   R.  A moins qu'il y ait d'autres éléments qui découlent d'un tel traité.

 19   Q.  La signature d'un traité équivaut-elle à un acte ? Est-elle quelque

 20   chose de définitif ?

 21   R.  Oui, lorsqu'il s'agit d'un traité international. Je ne peux pas vous

 22   donner des exemples. Par exemple, dans 40 ans de guerre, si les états ne se

 23   reconnaissent pas mutuellement, ils peuvent, à ce moment-là, signer des

 24   accords, par exemple, l'échange de prisonniers ou portant sur ces éléments-

 25   là. Mais cela ne peut pas être considéré comme étant un traité


Page 799

  1   international qui tiendrait compte de la reconnaissance. Il s'agit de

  2   circonstances exceptionnelles, dans ces cas là; néanmoins, les traités

  3   internationaux, dans les activités normales d'un état, sont considérés

  4   comme étant des actes constitutifs ou équivalents à la reconnaissance.

  5   Q.  Qui a reconnu la République de Croatie de cette façon ?

  6   R.  Je ne peux pas vous donner une liste complète pour le moment, mais nous

  7   avions des échanges internationaux avec un certain nombre de pays, des

  8   personnes qui venaient visiter la Croatie, des représentants officiels du

  9   gouvernement croate qui se sont rendus à l'étranger, en particulier, le

 10   ministre des Affaires étrangères. Nous avions --

 11   Q.  Une ambassade a-t-elle été ouverte à Belgrade ? Des liens, des

 12   relations diplomatiques ont-elles été établies avec d'autres pays sur la

 13   base de ces éléments concluants que vous évoquez ?

 14   R.  Non. Il s'agit, en fait, de relations internationales à un plus haut

 15   niveau que la simple reconnaissance. Il y avait des bureaux du gouvernement

 16   croate qui ont été ouverts un petit peu partout. Ce n'étaient pas des

 17   ambassades, en tant que telles. Il s'agissait de bureaux à l'étranger, qui

 18   ont été ouverts avec la permission des autres états.

 19   Q.  Je n'ai pas entendu quels états ont reconnu la Croatie, de manière

 20   aussi concluante.

 21   R.  Je ne vous l'ai pas dit parce je n'ai pas la liste de ces pays devant

 22   moi. Ce que j'ai dit, c'est qu'il y avait différents contacts, et de

 23   nombreux contacts, qui ont été établis avec les autres pays. Nous avions

 24   des relations avec ces pays sans reconnaissance écrite, en tant que telle.

 25   Q.  Madame Alajbeg, s'il vous plaît, concentrez-vous sur la question que je


Page 800

  1   vous ai posée. Il y a eu des -- vous avez dit que la reconnaissance peut

  2   être formelle ou due à une certaine -- ou la conséquence d'une décision ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Lorsque vous avez dit que certains états ont reconnu la République de

  5   Croatie avant le 8 octobre, il s'agit de cette période-là. Je vais vous

  6   poser la question très simplement à propos des autres états.

  7   R.  Je ne peux pas vous le dire parce que je vous ai déjà dit quels étaient

  8   les pays. Le ministre des Affaires étrangères était en contact avec ses

  9   homologues dans ces autres pays. Je ne peux pas vous donner une liste

 10   complète de ces pays. A l'heure actuelle, j'aurais besoin d'avoir d'autres

 11   éléments d'information.

 12   Q.  Dites-moi simplement, soyez brève, je ne veux pas prendre trop de votre

 13   temps.

 14   R.  Il y avait un pays balte qui l'avait reconnue avant le 8 octobre.

 15   Q.  Lequel, s'il vous plaît ?

 16   R.  La Lituanie, la Lettonie, l'Estonie, je ne me souviens pas, en fait,

 17   des autres. Je crois que des contacts très nombreux ont été établis et

 18   différentes lettres ont été échangées avant la date en question.

 19   Q.  Vous ne savez pas quel pays a reconnu la Croatie avant cette date ?

 20   R.  Je ne me suis pas préparée pour ces questions. Je n'ai pas examiné les

 21   documents et je vous dis, de nouveau, qu'il y avait une activité

 22   internationale très -- il y avait beaucoup d'échanges entre la Croatie et

 23   les autres pays.

 24   Q.  C'était un pays qui se battait pour être reconnu. Est-ce que chaque

 25   reconnaissance était -- n'importe quelle reconnaissance est une date


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  1   importante, et vous ne savez même pas à quelle date votre pays a été

  2   reconnu par d'autres pays ?

  3   R.  Je sais quels étaient les états, qui nous ont reconnus de façon

  4   formelle, je sais qu'il y a eu beaucoup d'échanges, il y a beaucoup de

  5   lettres qui ont été envoyées de part et d'autre. Je peux vous en parler car

  6   tout cela est sur papier. Mais pour vous dire quels étaient les états qui

  7   entraient en contact avec la République de Croatie, par l'intermédiaire du

  8   ministre des Affaires étrangères, je ne peux pas les énumérer puisqu'il y

  9   en avait beaucoup. Il y avait certains pays, même des pays d'Asie et

 10   d'Afrique.

 11   Q.  Probablement que c'est la raison -- que la raison pour laquelle vous ne

 12   pouvez pas énumérer, c'est parce que vous travailliez à Belgrade, au

 13   ministère des Affaires étrangères, n'est-ce pas ?

 14   R.  Probablement que c'est la raison en question.

 15   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire : est-ce qu'un pays, qui n'est pas

 16   reconnu en tant que tel, peut reconnaître un autre état ou un autre pays ?

 17   R.  Oui, il peut le faire, certainement, mais cela n'a pas une valeur

 18   internationale, du point de vue du droit international.

 19   Q.  Dites nous, à ce moment-là, si la Lituanie était un état reconnu

 20   internationalement lorsqu'elle a reconnu la Croatie comme un état

 21   indépendant.

 22   R.  Je présume que oui, mais je ne peux pas le confirmer car je ne sais pas

 23   en quelle date cela s'est fait.

 24   Q.  Si elle n'était pas un état reconnu internationalement, cela n'a aucun

 25   effet.


Page 802

  1   R.  C'était un état comme la Croatie l'était et nous reconnaissions

  2   d'autres états également. Nous avons reconnu la Slovénie et la Slovénie

  3   nous a reconnu également.  Je peux dire que la Slovénie est le premier pays

  4   -- le premier état qui a reconnu la Croatie. Il s'agit de questions de

  5   fait. En fait, il ne s'agit pas tellement de questions juridiques. On ne

  6   peut pas parler de date exacte à laquelle un état a été reconnu, en tant

  7   qu'état indépendant de façon formelle. Il s'agit de questions de fait, en

  8   parlant de la date à laquelle un pays ou un état a été reconnu et la date à

  9   laquelle le pays a commencé à exister en tant que tel. Il ne s'agit pas

 10   seulement de choses que l'on peut retrouver dans des documents formels.

 11   Q.  Je ne vous parle pas de faits, je vous parle de reconnaissance

 12   simplement, c'est tout. Je vous prie de vous concentrer sur ma question.

 13   Vous avez dit qu'un pays, qui n'est pas reconnu, ne peut pas reconnaître

 14   qui que ce soit. C'est ce que vous avez dit il y a environ une minute ou

 15   deux.

 16   R.  Qu'est ce que vous voulez dire par un pays "qui n'est pas reconnu" ? Je

 17   ne comprends pas ce que vous voulez dire.

 18   Q.    C'est un état qui n'existe pas comme sujet du droit international. Un

 19   état, qui n'est pas un sujet du droit international, peut-il reconnaître

 20   quelqu'un, qui que ce soit ? Est-ce que la Lituanie, qui n'est pas -- qui,

 21   à ce moment-là, n'était pas un état au sens international du terme, est-ce

 22   que tel état peut reconnaître un autre état ? Elle a reconnu la Croatie.

 23   Est-ce que cela avait une valeur internationale ?

 24   R.  Oui, on peut le faire. Chaque état a le droit de le faire, même si elle

 25   est un sujet du droit international, au sens du terme. Elle peut le faire,


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  1   mais, maintenant, à savoir quelle est -- quel est le poids qu'on peut lui

  2   attribuer, c'est autre chose.

  3   Q.  Est-ce qu'on peut lui attribuer un poids important, à ce moment-là ?

  4   R.  Et bien, cela dépend de quel point de vue vous regardez la chose. Un

  5   état, qui désire être reconnu pour un tel état, chaque sujet international

  6   qui la reconnaît est quelque chose d'important. Du point de vue de notre

  7   état, ce serait peut-être autre chose, mais c'est bien difficile de dire

  8   quelle est l'importance. Je ne peux pas dire que l'importance d'une telle

  9   reconnaissance est nulle et non avenue. Elle existe et c'est tout ce que je

 10   peux vous dire.

 11   Q.  La Lituanie, qui a reconnu la République de Croatie, quelle est

 12   l'importance ? A quel point est-elle considérée -- est-ce que c'est

 13   considéré quelque chose de concret ?

 14   R.  Pour vous dire, la Lituanie, à l'époque, était un état qui faisait

 15   partie de l'URSS, qui s'est vue dissoudre à la fin du mois d'août 1991. Si

 16   l'on prend pour acquis que la Lituanie n'est pas un pays -- sujet

 17   international, du droit international, à ce moment-là. Peut-on dire que la

 18   reconnaissance de la Croatie est une chose qui a un effet quelconque ?

 19   R.  L'URSS n'est pas --

 20   Q.  Je dois vous interrompre car nous sommes en train de dépenser un temps

 21   précieux, le temps de cette honorable Chambre et notre temps à nous.

 22   Si la Lituanie n'est pas un sujet international et qu'elle a reconnu la

 23   Croatie, quel en est l'effet ? Vous avez dit que cela concerne ces deux

 24   membres. On peut bien se demander quel en est l'effet contraire ?

 25    R.  Je voudrais savoir si la Lituanie, à l'époque, était un état


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  1   indépendant, c'est d'abord ce que je souhaiterais savoir ?

  2   Q.  Si l'on ne prend pour acquis qu'à ce moment-là, elle n'était pas encore

  3   un pays indépendant ?

  4   R.  Et bien, c'est une supposition parce que je crois que les pays Baltes

  5   avaient acquis leur indépendance avant. A ce moment-là, je crois que cela

  6   ait une incidence importante pour la Croatie.

  7   Q.  Et bien, si l'on prend, par exemple, l'exemple de Chypre du nord et le

  8   fait qu'elle ait reconnu la Croatie, pourriez-vous nous en parler ?

  9   R.  Nous en parlerons même puisque ce n'est pas un pays qui existe, en tant

 10   que tel.

 11   Q.  Madame Alajbeg, hier vous nous avez dit que la République du Chypre du

 12   nord avait reconnu la Croatie. Je vous demande quels sont les effets de

 13   cette reconnaissance. C'est ce que vous nous avez dit hier.

 14   R.  Nous n'avions pas tenu compte de cet état-là puisque ce n'est pas un

 15   état qui est reconnu, du point de vue international, mais la Lituanie est

 16   un état qui, selon moi, si je ne m'abuse, était déjà un état reconnu par la

 17   communauté internationale.

 18   Q.  Les effets d'une reconnaissance d'un état, qui n'existe pas au sens du

 19   droit international, sont nuls, n'est-ce pas ? Enfin, cela n'a absolument

 20   aucune incidence sur la réalité des choses.

 21   R.  D'abord, il faudrait établir ce qu'est un "état", au sens du droit

 22   international. Lorsqu'un état commence à exister, il s'agit d'une question

 23   de faits. C'est cela que l'on peut voir dans les opinions de la commission

 24   Badinter.

 25   Q.  Parlons maintenant de ces points de fait. Hier vous nous avez parlé de


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  1   trois conditions et ces trois conditions se trouvent dans les opinions de

  2   la commission Badinter. Cela veut dire qu'il y a trois conditions qu'un

  3   état doit remplir pour qu'elle puisse devenir un état international, au

  4   sens du droit international. Vous nous avez parlé du territoire. Vous nous

  5   avez parlé des habitants et vous nous avez parlé du gouvernement du pays en

  6   question.

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Dites-nous, maintenant, Chypre, quels étaient les éléments, que vous

  9   avez énumérés, dont ne disposait pas Chypre pour être reconnu ?

 10   R.  Je ne crois pas -- je ne vois pas pourquoi nous parlons de Chypre du

 11   nord. Je ne veux surtout pas me lancer dans l'examen de la situation

 12   juridique et politique de Chypre du nord. Je ne vois pas pourquoi je

 13   devrais vous donner des réponses là-dessus.

 14   M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que vous

 15   devez certainement comprendre pourquoi je vous pose cette question puisque

 16   certains critères peuvent être remplis pour qu'un pays doive devenir un

 17   pays indépendant ou un état indépendant, même si cet état n'est pas

 18   nécessairement reconnu. Ici nous avons un exemple, le Chypre du nord, et

 19   c'est un état qui a rempli toutes les conditions et, malheureusement, cet

 20   état ne se verra jamais accorder son indépendance, même si c'est le

 21   ministre qui a proposé qu'il faille, oui ou non, reconnaître l'état du

 22   Chypre du nord.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Petrovic, je crois que vous

 24   avez établi ce que vous voulez dire. Vous pouvez, effectivement, parler de

 25   chaque exigence remplie. Vous pouvez poser des questions au témoin si l'une


Page 806

  1   ou l'autre de ces exigences avait été remplie. Ensuite, vous pouvez laisser

  2   la chose là ou vous pouvez vous arrêter ici. Nous avons tous compris ce que

  3   vous vouliez dire et d'ou vous vouliez en venir.

  4   M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Souhaiteriez-vous procéder à la

  6   pause ?

  7   M. PETROVIC : [interprétation] Oui, certainement, Monsieur le Président.

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien, je crois que le moment de la

  9   pause est venu et nous allons prendre un repos un peu et reprendrons les

 10   travaux dans 20 minutes.

 11   --- L'audience est suspendue à 12 heures 12.

 12   --- L'audience est reprise à 12 heures 40.

 13   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Petrovic, vous pouvez

 14   poursuivre.

 15   M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 16   Q.  Madame Alajbeg, je vous prierais de me dire, si lorsqu'on parle du

 17   droit international -- de la théorie du droit international, y a-t-il une

 18   différence entre la succession et la reconnaissance internationale ?

 19   R.  Oui, certainement. La succession est un concept tout à fait différent

 20   lorsqu'on parle du droit international.

 21   Q.  Pouvez-vous être un peu plus précise ?

 22   R.  La succession lorsqu'on parle de droit international est un terme qui

 23   veut que l'on se plie aux obligations des traités internationaux. Il y a

 24   des dispositions, on parle du traité international. Il s'agit d'une

 25   question qui est régie par les conventions des Nations Unies. Les deux


Page 807

  1   termes se trouvent dans la convention de Genève. Les deux termes peuvent

  2   être -- on peut établir un lien entre les deux si on parle des dates.

  3   Q.  Très bien. Il n'est plus nécessaire de l'élaborer. Je suis satisfait de

  4   votre réponse.

  5   Est-ce que vous pouvez me dire, lorsqu'on parle de la théorie du droit

  6   international, y a-t-il une différence entre la subjectivité

  7   internationale, au point de vue du droit international, et la succession ou

  8   plutôt y a-t-il une différence lorsqu'on parle d'un sujet international ou

  9   de la succession ?

 10   R.  Et bien, il faut établir qui est le sujet, au point de vue du droit

 11   international, pour pouvoir voir à partir de quel moment la succession a

 12   débuté. C'est une condition inéquivoque [phon] pour établir la question de

 13   la succession.

 14   Q.  Si l'entité prend les obligations régies par les relations

 15   internationales, est-ce que cela veut dire qu'elle obtient un caractère

 16   indépendant ? Est-ce qu'elle peut devenir un état indépendant ?

 17   R.  Nous avons vu quelles sont les conditions requises pour qu'un état

 18   devienne une telle entité. Il faudrait, à ce moment-là, qu'un état pareil

 19   devienne un sujet du droit international; cependant, si un état considère

 20   qu'il est devenu sujet international à une certaine date, il peut proclamer

 21   cette date. C'est à partir de cette date qu'il est considéré comme étant un

 22   sujet international.

 23   Q.  Est-ce que la subjectivité est acquise au moment où les droits

 24   responsabilités ont été repris, oui ou non ?

 25   R.  Je dirais : lorsqu'on parle de la subjectivité, c'est-à-dire, si un


Page 808

  1   état devient un sujet international est appliqué lorsque les conditions

  2   sont requises -- c'est-à-dire, que lorsqu'un état remplit toutes les

  3   conditions nécessaires pour devenir un état, c'est, à ce moment-là, qu'il

  4   peut devenir un sujet international et l'une des conditions de reprendre

  5   les droits et les obligations.

  6   Q.  Est-ce que cela veut dire que c'est, à ce moment-là, que les droits et

  7   les obligations sont repris ou est-ce que c'est à ce moment-là que l'on

  8   acquiert l'indépendance ?

  9   R.  Il est bien difficile de parler d'un moment précis -- du moment précis,

 10   s'agissant de la création d'un état, puisque rencontrer certaines

 11   conditions est également un processus. Par contre, si l'état est d'opinion

 12   et déclare que les conditions sont rencontrées et si un tel état est prêt à

 13   prendre sur soi tous ces droits et obligations, c'est, à ce moment-là,

 14   qu'un tel état devient un état indépendant, qu'il n'y a plus de doute.

 15   Q.  Est-ce qu'il s'agit d'une déclaration, s'agit-il d'un projet de loi

 16   constitutionnel ?

 17   R.  Pour qu'un état devienne un état, et bien, à ce moment-là, il s'agirait

 18   d'une déclaration. Par contre, il arrive souvent qu'un état -- même si un

 19   état peut rencontrer toutes les conditions et ne désire pas devenir un état

 20   indépendant. Si un tel état déclare sa façon de voir les choses, à ce

 21   moment-là, cet état ne deviendra pas un état, même s'il a rencontré toutes

 22   les conditions nécessaires. Mais il est bien important que l'état en

 23   question déclare son désir de devenir un état indépendant, c'est-à-dire, un

 24   état qui est créé pour la première fois.

 25   Q.  La déclaration de l'indépendance, c'est quelque chose qui existe en


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  1   théorie, bien sûr. Est-il possible qu'une personne ne fasse parvenir une

  2   déclaration, sans rencontrer toutes les exigences pour devenir un état

  3   indépendant. Je parle d'une façon théorique, je ne parle pas d'un état

  4   particulier, d'une situation particulière.

  5   R.  En théorie, cela est possible, bien sûr.

  6   Q.  Si nous disions que la République de Croatie n'avait pas rencontré

  7   toutes les conditions et a, néanmoins, déclaré son indépendance, est-ce que

  8   cela voudrait dire que, même si la Croatie s'est déclarée comme étant un

  9   état indépendant, elle n'était pas, effectivement, devenue un état

 10   indépendant.

 11   R.  Lorsque nous parlons de la Croatie, je crois qu'il ne s'agit pas d'un

 12   tel cas. Lorsque nous parlons d'une façon générale, il est possible qu'un

 13   état proclame son indépendance sans préalablement rencontrer toutes les

 14   conditions nécessaires.

 15   Q.  Dans le paragraphe 7, de votre déclaration, vous dites -- je vais

 16   retirer cette question, à laquelle je vais revenir sous peu. En tout cas,

 17   je suis vraiment désolée.

 18   Vous donnez beaucoup d'importance à l'indépendance, au referendum pour

 19   l'indépendance. Vous avez dit que c'est elle qui a  frayé le chemin de

 20   l'indépendance croate. Pourriez-vous me dire qui a participé ? Qui a pris

 21   part au referendum qui a eu lieu dans la République de Croatie, au mois de

 22   mai 1991, si je ne m'abuse pas ?

 23   R.  Je crois que c'était au mois d'avril, plutôt qu'au mois de mai. Les

 24   résultats ont été annoncés. Par contre, au mois de mai, les citoyens de la

 25   République de Croatie ont pris part à ce referendum et se sont exprimés à


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  1   plus de 80 % et la réponse positive a été donnée à plus de 80 % des -- plus

  2   de 90 % des citoyens, c'est-à-dire, que plus de 90 % des citoyens ont donné

  3   une réponse positive.

  4   Q.  Les Serbes, qui résidaient en Croatie, ont-ils pris part à ce

  5   referendum ? Ont-ils voté dans ce referendum ?

  6   R.  Pour la plupart d'eux, oui. C'est ce que nous pouvons lire dans nos

  7   rapports, effectivement.

  8   Q.  Etes-vous au courant du fait qu'il y a des municipalités en Croatie

  9   dans lesquelles les scrutins n'étaient même pas ouverts le jour où le

 10   referendum a eu lieu ?

 11   R.  Je n'ai pas entendu parler de telles municipalités.

 12   Q.  Est-ce que vous êtes au courant que le tiers du territoire de la

 13   République de Croatie, pour ce qui est donc le tiers du referendum, a été

 14   tenu de façon sporadique, dans certaines communautés habitées par des -- la

 15   population croate, par exemple ?

 16   R.  Je ne le sais pas. Il m'est bien difficile de vous donner une opinion

 17   là-dessus, ou de faire des commentaires là-dessus puisque le fait est que

 18   plus de 80 % de tous les citoyens croates ont voté lors de ce referendum.

 19   Ce chiffre démontre qu'il est tout à fait probable que les Serbes et les

 20   représentants d'autres ethnies ont participé à ce referendum et ont voté à

 21   ce referendum.

 22   Q.  Comment savez-vous qu'il y a eu d'autres ethnies qui ont voté à ce

 23   referendum ?

 24   R.  Je sais que des Serbes parlaient de cela et je sais qu'ils ont dit que

 25   bon nombre de Serbes ont participé, ont voté lors de ce referendum. Par


Page 811

  1   exemple, en Zagreb, il y a plus de 160 000 Serbes qui habitaient en Zagreb,

  2   à l'époque, et pour la plupart d'entre eux, ils ont pris part au

  3   referendum, ils ont voté.

  4   Q.  Avec tout le respect que je vous dois, comment savez-vous si les Serbes

  5   ont voté ou non ?

  6   R.  Je ne le sais pas, personnellement, mais c'est ce que j'ai entendu

  7   dire, ce que j'ai pu lire dans les rapports, ce que j'ai pu entendre dans

  8   les médias. Je ne fais que transmettre les messages qui ont été livrés par

  9   les représentants du peuple serbe et ils ont dit qu'en très grand nombre,

 10   des Serbes ont voté lors de ce referendum, plus particulièrement, dans les

 11   grandes villes.

 12   Q.  Les représentants serbes ont-ils invité les Serbes à ne pas voter lors

 13   du referendum ?

 14   R.  Je ne le sais pas, mais, même s'ils l'avaient fait, le fait est que

 15   grand nombre de personnes -- je ne sais pas combien -- c'est-à-dire, un

 16   certain nombre de personnes avaient décidé de ne pas voter lors du

 17   referendum. Ce referendum n'était pas conçu seulement pour une nation, pour

 18   une ethnie et n'était pas -- n'avait pas été tenu avec seule une nation en

 19   tête, pour le vote.

 20   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, eu égard à votre silence -- plutôt silence

 21   -- eu égard à la déclaration que vous avez émise hier, savez-vous quel est

 22   le pourcentage de Serbes qui résidaient en Croatie avant 1991 et quel est

 23   le pourcentage de Serbes qui y résident aujourd'hui ?

 24   R.  Dans les média, j'ai lu qu'il y avait 11 et quelque chose, presque 12 %

 25   de Serbes, qui résidaient dans la République de Croatie.


Page 812

  1   Q.  Combien il y a-t-il de Serbes aujourd'hui ?

  2   R.  Selon le dernier recensement, il y réside entre 5,5 et 6 %.

  3   Q.  Que s'est-il passé avec 50 % de la population serbe qui y résidait

  4   avant 19914 ?

  5   R.  Beaucoup de choses se sont passées. Il y avait plusieurs ethnies, y

  6   compris les Croates, un bon nombre de personnes -- il y a un bon nombre de

  7   résidants qui ont quitté, dans le territoire. Il y avait également des --

  8   la majorité de la population serbe avait quitté la Croatie, en réponse à

  9   l'appel lancé par le gouvernement serbe en 1995. Ils avaient abandonné les

 10   régions dans lesquelles ils vivaient auparavant.

 11   Q.  Vous faites référence à 300 000 Serbes qui ont été expulsés de la

 12   Croatie le 4 août, pendant l'Opération tempête ?

 13   R.  Je ne pourrais pas vous donner de chiffre exact. Deuxièmement, il est

 14   bien connu qu'ils avaient quitté ensemble avec leurs chefs de leur état

 15   paramilitaire, Martic, et les autres. Même les assurances faites par le

 16   gouvernement de la République de Croatie, ils disaient que, si une

 17   opération militaire qui avait été menée, qu'ils pouvaient rester sur le

 18   territoire sur lequel ils habitaient, ils ont décidé de ne pas prendre

 19   compte de ceci et de quitter simplement avec leurs chefs et d'aller se

 20   rétablir en Serbie.

 21   Q.  C'est ma dernière question concernant ce sujet. En fait, je n'aurais

 22   qu'une question concernant ce sujet. Combien y a-t-il de civils, de Serbes,

 23   qui ont été tués durant l'opération Tempête ? Combien d'actes d'accusation

 24   ont été rédigés par ce Tribunal pour les crimes commis au cours de cette

 25   opération ?


Page 813

  1   R.  Je ne pourrais pas vous donner de chiffre. Je ne suis pas au courant de

  2   cela.

  3   Mme LAMB : [interprétation] Monsieur le Président,

  4   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Lamb, je vous écoute.

  5   Mme LAMB : [interprétation] Si je puis, j'aimerais simplement soulever une

  6   objection pour le compte rendu d'audience. Je crois que ce n'est pas

  7   pertinent.

  8   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. C'est noté. Merci.

  9   M. PETROVIC : [interprétation] C'était ma dernière question sur ce sujet.

 10   Je voudrais y revenir.

 11   Q.  Sur la -- si l'indépendance de l'état était une question factuelle,

 12   comment est-ce qu'une question factuelle a-t-elle pu être reportée ? La

 13   chose existe ou non, cela ne peut pas être reporté.

 14   R.  Si on déclare un état comme étant un état indépendant, il n'est pas

 15   nécessaire de procéder à la constitution d'un tel état, en tant que tel.

 16   Q.  La Croatie avait abandonné le désir de devenir un état indépendant en

 17   juillet 1991 ?

 18   R.  Non. Avec la Slovénie, en accord avec la communauté internationale,

 19   plus particulièrement, avec la communauté européenne. Elle a accepté que

 20   cette décision soit déportée à trois mois plus tard.

 21   Q.  Et pourquoi donc l'exécution de cette décision a-t-elle été déportée ?

 22   R.  Parce que justement la communauté internationale estimait que c'était

 23   un laps de temps suffisant pour régler les problèmes qui de toute évidence

 24   existaient sur ce territoire. Voir, par la suite, ce qui allait se passer,

 25   comment les choses allaient se dérouler, mais, avant tout, l'objectif était


Page 814

  1   d'empêcher le conflit armé.

  2   M. PETROVIC : [interprétation] Je vous prie de montrer au témoin le

  3   document qui figure à l'intercalaire 5. Je prie de donner au témoin le

  4   premier classeur, intercalaire 5, document en anglais 557260 à 61, la

  5   déclaration commune sur l'Yougoslavie.

  6   Q.  Avez-vous le texte sous vos yeux ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Vous avez le texte en B/C/S également, la traduction. L'avez-vous

  9   trouvé ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Avez-vous déjà eu l'occasion de voir ce document ?

 12   R.  Oui. Nous avons évoqué la déclaration de Brioni.

 13   Q.  S'agit-il de ce même document ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Dites-moi, s'il vous plaît, à quel endroit il est question d'un

 16   moratoire qui durerait trois mois, s'agissant justement de l'indépendance

 17   de la République de Croatie.

 18   R.  Je dois revenir à l'original puisque, visuellement, c'est plus facile

 19   pour moi de me repérer. Cette période de temps a été fixée, j'en suis sûre,

 20   peut-être que cela figure dans ce texte ou bien dans un autre, mais cette

 21   période a été bien déterminée.

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Puis-je vous indiquer qu'un deuxième

 23   article, l'Article 2, le premier des paragraphes y figurant -- excusez --

 24   sous le titre du deuxième paragraphe, où il est question de la mission de

 25   surveillance, et qui dispose d'une période de trois mois.


Page 815

  1   M. PETROVIC : [interprétation] Ceci figure à l'annexe. Il s'agit de

  2   directives adressées à la mission de surveillance.

  3   LE TEMOIN : [interprétation] Oui, mais il s'agit d'une partie intégrante du

  4   texte.

  5   M. PETROVIC : [interprétation]

  6   Q.  Dans le corps du texte principal de la déclaration commune, où y est-il

  7   question d'une période de trois mois qui a été fixée ? Est-ce que ceci

  8   figure dans ce document-là ?

  9   R.  Outre la définition du mandat d'une mission d'observateur, et les trois

 10   mois qui sont mentionnés ici, je ne peux pas retrouver cela. Peut-être que

 11   ceci figure dans un autre texte, mais c'est un fait bien connu -- bien

 12   connu de tous les participants à l'entreprise, la solution de cette

 13   question. La communauté européenne elle-même a également soussigné cette

 14   période de trois mois.

 15   Q.  Dans la déclaration de Brioni, du 7 juillet 1991, je vous ai demandé

 16   s'il y avait une déclaration de moratoire. Si ce n'est pas le cas --

 17   R.  Je ne vois pas de période de report de "trois mois".

 18   Q.  Est-ce qu'il est question de suspension de l'indépendance ?

 19   R.  Il n'y a pas de telle chose. La suspension d'indépendance n'existait

 20   pas. En revanche, on peut y voir la définition de la mission des

 21   observateurs.

 22   Q.  Quel est le rapport entre la suspension et la durée de la mission ?

 23   R.  Bien sûr, que s'il y a un rapport, pendant cette période, de la

 24   suspension, les observateurs étaient censés observer notre situation et

 25   faire rapport là-dessus et informer des événements de l'évolution positive


Page 816

  1   sur ce même territoire.

  2   Q.  Est-ce que l'on peut être sûr lorsque l'on dit -- est-ce que l'on -- en

  3   fait, il ne s'agit pas plutôt d'une déduction lorsqu'on parle de moratoire

  4   de trois mois, ou bien, pouvez-vous nous indiquer le document qui évoquait

  5   -- ceci pourrait figurer ?

  6   R.  Je suis en train d'essayer de me rappeler les documents, mais je

  7   n'arrive pas à m'en souvenir.

  8   Q.  Le document clé n'est-il pas, Madame Alajbeg, le document clé sur

  9   lequel vous vous fondez pour affirmer qu'il y a eu un moratoire de trois

 10   mois. Sur ce fait-là, est-il possible que vous ne sachiez pas quel est le

 11   document qui vous a servi de base ?

 12   R.  Il s'agit d'un fait connu de tous. Je ne le retrouve pas. Je devrais

 13   peut-être consulter d'autres documents.

 14   Q.  Vous avez prêtée serment ici devant cette Chambre et vous êtes censée

 15   de ne pas contacter qui que ce soit au sujet de votre témoignage.

 16   R.  Je le sais.

 17   Q.  A ce sujet, si je vous ai bien compris, vous vouliez -- si j'ai bien

 18   compris, vous désirez consulter quelqu'un.

 19   R.  Je ne l'ai pas dit pendant mon témoignage.

 20   Q.  Ce qui m'intéresse, c'est la période de votre témoignage. Alors, savez-

 21   vous quel est le document qui définit cette suspension ?

 22   R.  Je ne sais pas donc quel document cette suspension est définie.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je souhaite vous interrompre, Maître

 24   Petrovic, sur deux choses. Tout d'abord le temps, le témoin doit terminer

 25   aujourd'hui, et vous devez penser aux questions supplémentaires de


Page 817

  1   l'Accusation. Vous avez couvert un grand -- vous devez conclure lors de

  2   votre contre-interrogatoire, mais ce qui me préoccupe c'est le temps.

  3   Ensuite, deuxièmement, le Juge Thelin m'a attiré mon attention sur

  4   l'annexe, de la première page, au quatrième point, il est question de

  5   "suspension de trois mois". Peut-être que ceci pourrait vous être utile.

  6   M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite dire deux

  7   choses. Pour ce qui est de la durée du contre-interrogatoire de ce témoin,

  8   lorsque je vois l'heure et tout ce qu'il me reste encore à faire, et qui

  9   est pertinent pour la décision que vous aurez à donner, je ne suis

 10   absolument pas en mesure de mettre fin à ce contre-interrogatoire. Il me

 11   reste encore beaucoup de questions très importantes. Si le rythme est lent,

 12   c'est parce que le témoin essaie d'éviter de répondre et le témoin est

 13   lent. Je dois répéter la question à plusieurs reprises, alors qu'il est

 14   tout à fait évident qu'on pourrait répondre plus brièvement.

 15   Je ne pourrais mettre fin à ce contre-interrogatoire aujourd'hui. Je vous

 16   demande de demander à Madame Alajbeg de venir, encore une fois,

 17   ultérieurement à votre convenance et à sa convenance. J'ai encore plusieurs

 18   centaines de pages que l'Accusation souhaite verser au dossier et je ne

 19   peux pas ne pas poser de questions là-dessus. Vous voyez les difficultés

 20   auxquelles nous nous heurtons lorsque nous abordons un document clé. Je

 21   vous prie de tenir compte de tout cela.

 22   Et pour ce qui est de votre deuxième remarque, je vous remercie, mais, de

 23   toute évidence, il ne s'agit pas là du document sur lequel s'est fondé le

 24   témoignage de ce témoin.

 25   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Somers.


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  1   Mme SOMERS : [interprétation] Conformément à l'Article 90(H), l'objet du

  2   contre-interrogatoire doit se limiter à l'interrogatoire principal. Le

  3   contre-interrogatoire, effectivement, a trait en grande partie aux

  4   questions qui ont été posées lors de l'interrogatoire principal, mais, dans

  5   un grand nombre de questions, ce n'est pas le cas. Ayant à l'esprit l'ordre

  6   des témoins, je pense que le conseil de la Défense devrait se limiter aux

  7   domaines qui sont les plus importants, ou bien, je dois conclure que le

  8   témoin est en train de mener, en fait, un interrogatoire principal et non

  9   pas un contre-interrogatoire.

 10   Mes collègues viennent de me rappeler que nous avons eu déjà à procéder à

 11   certaines modifications dans l'ordre des témoins, et c'est là peut-être les

 12   possibilités qui nous sont offertes par l'Article 90(H). Il faudrait peut-

 13   être que nous en reparlions pour pouvoir décider de ces questions concrètes

 14   à l'avenir. Nous avons, quant à Madame Alajbeg, essayé de nous en tenir

 15   l'essentiel et le conseil de la Défense devrait faire de même.

 16   M. LE JUGE PARKER : Merci, Madame Somers.

 17   M. Petrovic.

 18   M. PETROVIC : [interprétation] J'ai essayé de le faire. Ceci est clair et,

 19   si jamais je m'écarte des sujets véhiculés lors de l'interrogatoire

 20   principal, je suis sûr que vous me l'indiquerez à l'avenir. Je vais

 21   certainement limiter mon contre-interrogatoire, mais je ne peux pas faire

 22   plus que ce que j'ai fait jusqu'à présent. Vous savez, tout ce qu'on a

 23   comme matériel, vous aussi vous aurez besoin de beaucoup de temps pour

 24   étudier tous ces documents. Je ne peux pas ne pas prêter l'attention que

 25   méritent tous ces documents. Je vous prie de ne pas donc tenir compte des


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  1   commentaires de ma consoeur, Mme Somers, et je vous prie de m'autoriser à

  2   terminer le contre-interrogatoire de la manière qui est -- celle que je

  3   vous ai proposée tout à l'heure.

  4   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous comprenez tous. Je m'adresse, en

  5   particulier, au conseil de la Défense. Nous désirons offrir une possibilité

  6   raisonnable et adéquate à la Défense dans cette affaire et, en même temps,

  7   nous essayons de nous assurer que l'Accusation est en position de faire

  8   venir et de faire comparaître les témoins et de présenter ses arguments.

  9   Au début, nous avons dit qu'à l'époque, nous n'allions pas imposer des

 10   délais très stricts pour le contre-interrogatoire puisque nous étions tout

 11   à fait conscients que ceux-ci pourraient causer des difficultés pour la

 12   Défense, et il faudrait éviter cela. Je regrette de le dire, mais, depuis

 13   le début de cette procédure, nos anticipations n'ont jamais été adéquates.

 14   M. Radic et M. Petrovic, vous devez faire des efforts puisque le contre-

 15   interrogatoire jusqu'à présent devrait durer bien plus longtemps que prévu.

 16   Nous serions bien obligés, comme le font d'autres Chambres de première

 17   instance, même si nous n'aimerions pas le faire d'imposer certaines

 18   limites. Ceci pourrait s'avérer nécessaire, compte tenu du déroulement de

 19   la procédure.

 20   Ce témoin est très important pour l'Accusation et pour la Défense, mais

 21   nous l'avons dit bien clairement avant qu'elle n'arrive -- qu'elle doive

 22   quitter La Haye aujourd'hui. Vous aviez tout le temps qui vous était

 23   imparti. Vous avez eu suffisamment de temps, beaucoup plus de temps que

 24   l'Accusation, pour l'interrogatoire principal. A ce moment précis, vous

 25   avez passé déjà plus de trois heures et 40 minutes à contre-interroger ce


Page 820

  1   témoin. Nous allons avoir beaucoup de difficultés à gérer cette affaire si

  2   cela continue de cette manière. Nous ne pouvons pas faire perdre au témoin

  3   leur temps. Nous n'avons pas besoin de faire durer cette procédure plus

  4   d'un an. Ce serait trop à mes yeux et ceci, en tout cas, ne servirait pas

  5   les intérêts de votre client.

  6   En ce moment, il me semble qu'il y a des questions importantes qui

  7   devraient être évoquées lors d'un contre-interrogatoire de ce témoin, mais

  8   vous devez faire une sélection car le temps a passé. Je crois que nous

  9   devons inviter le témoin à venir, encore une fois ultérieurement, et pour

 10   poursuivre ce contre-interrogatoire, mais, cette fois-ci, je vous

 11   imposerais des limites et il faudrait vous vous en tenir à ces limites.

 12   A l'avenir, la Chambre a déjà commencé le faire -- elle a commencé en été -

 13   - le temps de l'interrogatoire et du contre-interrogatoire et, si vous

 14   prenez trop de temps lors de votre contre-interrogatoire, nous serions

 15   obligés de l'écouter. C'est comme cela que les choses se présenteront à

 16   l'avenir.

 17   J'espère toutefois, Madame Somers, que ceci ne perturbera pas l'ordre des

 18   témoins que nous nous attendons à voir à l'avenir.

 19   Mme Alajbeg ne finira certainement pas aujourd'hui, mais nous devons

 20   trouver une période où elle pourrait se présenter à nouveau. J'estime que

 21   ce témoin est trop important pour que l'on puisse se permettre d'écourter

 22   son témoignage aujourd'hui.

 23   Je suis désolé d'avoir pris autant de temps, mais nous sommes arrivés à un

 24   croisement de chemin et j'éprouvais le besoin de dire -- d'énoncer ce qui

 25   étaient les préoccupations, les inquiétudes de cette Chambre. Il faudrait


Page 821

  1   que vous soyez conscient du temps, Messieurs les avocats de la Défense.

  2   Madame Alajbeg, vous devez rentrer aujourd'hui. Si vous êtes en mesure de

  3   nous dire quelles sont vos disponibilités à l'avenir, mais nous laissons

  4   nous en faire part, mais, si ce n'est pas le cas, je vous prie de contacter

  5   l'ordre de l'équipe de l'Accusation pour que l'on puisse vous proclamer.

  6   Ce qui nous reste du temps de l'audience, aujourd'hui, vous appartient,

  7   Monsieur Petrovic.

  8   M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   Je souhaiterais juste brièvement faire quelques commentaires au sujet de ce

 10   que vous avez dit tout à l'heure. Il est tout à fait vrai que notre contre-

 11   interrogatoire a duré plus longtemps que prévu, mais il y aura des témoins

 12   à l'avenir, où nous aurons besoin de beaucoup moins de temps pour contre-

 13   interroger ce témoin. Je pense que vous n'aurez pas besoin de nous imposer

 14   des limites. En tout cas, c'est ce que je peux vous dire, s'agissant de

 15   témoins qui seront présents dans les semaines à venir.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Petrovic,

 17   mais nous allons tenir compte du temps à l'avenir.

 18   M. PETROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Q.  Après le 8 octobre 1991, affirmez-vous, Madame Alajbeg, que la

 20   présidence de la RSFY ne fonctionnait plus ?

 21   R.  Après la date du 8 octobre, et suite à la décision, conformément à

 22   laquelle le membre croate de la présidence a quitté la présidence, depuis

 23   cette date-là, il ne participait plus à ces travaux.

 24   Q.  Je vous prie, à présent, de voir le document qui se trouve dans le

 25   classeur 1, intercalaire 8. Avez-vous retrouvé ce passage ?


Page 822

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Il s'agit d'une conclusion concernant à laquelle Stjepan Mesic n'est

  3   plus membre de la présidence de la RSFY, à partir du 8 octobre. La

  4   conclusion a été adoptée le 5 décembre. Pouvez-vous nous dire ce qui s'est

  5   passé entre temps, ce qui s'est passé entre le 8 octobre et le 5 décembre ?

  6   R.  Je ne sais pas s'il était physiquement là, M. Mesic, je ne saurais vous

  7   le dire. Je ne sais pas si la présidence prenait des décisions. Je ne sais

  8   pas quelles sont les décisions qui ont été prises à l'époque. Il n'avait

  9   pas la possibilité de travailler normalement.

 10   Q.  La Chambre m'a adressé quelques remarques, mais la raison est dans

 11   votre manière de répondre qui est plutôt évasive. Dites-moi, si oui,

 12   répondez-moi par oui ou par non.

 13   R.  Je ne le sais pas.

 14   Q.  Est-ce qu'en tant que président de la présidence, il a signé des textes

 15   officiels ?

 16   R.  Je ne le sais pas.

 17   Q.  Est-ce que vous savez s'il a représenté l'état, en tant que président,

 18   de la présidence lors les négociations ?

 19   R.  Je l'ignore.

 20   Q.  Quel était le statut ? Quels étaient les effets de ses actions ? A-t-il

 21   écrit quoi que ce soit ? A-t-il agi ? A-t-il fait quelque chose ? En avait-

 22   il les compétences ?

 23   R.  D'après cette conclusion, ceci, effectivement, a été le cas.

 24   Q.  Comment peut-on alors annuler rétroactivement ce qui a existé pendant

 25   deux mois ?


Page 823

  1   R.  Oui. Il s'agit là d'une décision rétroactive, mais je ne sais pas ce

  2   qui s'est passé entre temps.

  3   Q.  Est-ce qu'une décision peut annuler les faits réels qui se sont

  4   produits entre temps ?

  5   R.  Je ne sais pas si de tels faits ou agissements ont été établis par le

  6   président Mesic, à ce moment-là.

  7   M. PETROVIC : [interprétation] Puis-je demander à M. l'Huissier de m'aider,

  8   s'il vous plaît ? Je vais maintenant remettre ce document dans différentes

  9   parties.

 10   Q.  Connaissez-vous ce document, Madame Alajbeg ?

 11   Mme SOMERS : [interprétation] Puis-je interrompre pendant quelques

 12   instants, s'il vous plaît ? Il n'y a pas de marquage aux fins

 13   d'identification. Aucune méthode très claire n'est suivie dans la

 14   présentation de ces documents. Est-ce qu'on pourrait essayer de comprendre

 15   de quoi il s'agit, s'il vous plaît ? Si la Défense veut bien nous donner --

 16   nous accorder quelques instants, cela ferait fort utile pour nous permettre

 17   de savoir quelle question est posée au témoin, que l'on puisse retrouver

 18   les documents tout en écoutant en même temps.

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pouvez-vous nous aider, Monsieur

 20   Petrovic ? De quel document s'agit-il ?

 21   M. PETROVIC : [interprétation] Bien sûr. Il s'agit d'une annexe au

 22   document, qui a été signée à La Haye le 18 octobre 1991. Il s'agit des

 23   conclusions qu'elles sont parvenues les membres de la présidence de la

 24   RSFY, qui s'est tenue à La Haye et qui porte sur les négociations en cours

 25   à La Haye, à ce moment-là. Cette annexe fait partie des conclusions de ces


Page 824

  1   négociations et constitue un document, qui établit que la présidence de la

  2   RSFY rend une décision sur le cessez-le-feu. Les signataires de tous les

  3   membres, qui représentaient la présidence, figurent en bas de ce document,

  4   et nous voyons ici la signature de M. Mesic, président à l'époque. Voici la

  5   source de ce document et ce qui est l'origine de ce document. Je serais à

  6   même de vous fournir l'ensemble des documents, mais pas aujourd'hui, mais à

  7   l'avenir. Si mes éminents confrères et consoeurs ne connaissent pas ce

  8   document, je peux le leur fournir dans son intégralité. Son authenticité ne

  9   fait aucun doute.

 10   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

 11   Le témoin, pourriez-vous répondre à la question, s'il vous plaît.

 12   M. PETROVIC : [interprétation]

 13   Q.  Pourriez-vous d'ailleurs répondre à la question, s'il vous plaît ?

 14   R.  Si vous demandez si je connais le document, je n'ai jamais vu le

 15   document dans son intégralité.

 16   Q.  Comment pourriez-vous interpréter ce document puisqu'il a été établi

 17   par l'ensemble de la présidence, dirigé par le président ? On parle de la

 18   réunion qui s'est tenue, le 18 octobre, la décision a été rendue, et la

 19   décision a été signée.

 20   R.  Mon interprétation est la suivante : la JNA devait se retirer de

 21   Croatie. Cela était devenu nécessaire et une décision a été prise à cet

 22   effet. C'est en cette qualité que le président Mesic a participé à la

 23   réunion de la présidence et qu'il a pris des décisions car il s'agissait

 24   des intérêts vitaux de la Croatie. Il était très important que la JNA

 25   retire ses troupes de la Croatie. Bien évidemment, ceci ne s'est pas


Page 825

  1   produit. La décision n'a pas été appliquée. Il semblerait qu'un bon nombre

  2   de décisions, qui ont été prises après le 8 octobre, ou tout autre décision

  3   de M. Mesic, ne semble plus avoir été pertinentes.

  4   Q.  Est-ce utile pour la République de Croatie ?

  5   R.  Oui, tout à fait, mais rien n'a abouti.

  6   Q.  Cette décision, qui a été rendue le 5 décembre, annule-t-elle également

  7   cette conclusion, cette décision ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  En tant qu'expert juridique, pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît,

 10   comment se fait-il que la promulgation d'une loi, qui a été votée par un

 11   organe légal, puisse être annulée de façon rétroactive et rendu nulle et

 12   non avenue par la suite ?

 13   Mme LAMB : [interprétation] Je souhaiterais prendre la parole. M. LE JUGE

 14   PARKER : [interprétation] Oui, Madame Lamb.

 15   Mme LAMB : [interprétation] Merci. A ce point, je souhaite que soit

 16   consigné au compte rendu d'audience qu'au début de la déposition du

 17   témoignage de Madame Alajbeg, la Défense a clairement insisté sur le fait

 18   que ce témoin ne pouvait pas être appelée, en tant que témoin expert. Il en

 19   résulte que nous avons été très prudent lorsque nous avons défini le champ

 20   de notre interrogatoire principal et des événements qui devaient être

 21   abordés ici devant la Chambre de première instance. Madame Alajbeg, elle-

 22   même, à différentes reprises au cours de son témoignage, a fait très

 23   attention de ne pas insister sur le fait qu'elle était experte en matière

 24   des droits constitutionnels. Il semble que ce soit un petit peu un penchant

 25   de mon confrère de la Défense, dans son contre-interrogatoire, que de


Page 826

  1   supposer que Madame Alajbeg est un témoin expert.

  2   M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président --

  3   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est tout, Madame Lamb ?

  4   Mme LAMB : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci beaucoup.

  6   Maître Petrovic.

  7   M. PETROVIC : [interprétation] Je vais donc retirer ma question et

  8   poursuivre.

  9   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

 10   M. PETROVIC : [interprétation]

 11   Q.  Quand la République Croate a-t-elle demandé à rejoindre les

 12   organisations internationales ?

 13   R.  Les dates varient. Cela dépend de l'organisation internationale en

 14   question.

 15   Q.  A quel moment la Croatie a-t-elle demandé à faire partie du conseil de

 16   l'Europe ?

 17   R.  Après avoir reçu les consignes du parlement, je ne me souviens pas de

 18   la date exacte. Hier nous avons parlé de cette décision -- de cette

 19   conclusion et peu de temps après cette conclusion la demande a été faite.

 20   Q.  Quand la République de Croatie a-t-elle été admise comme membre de

 21   cette organisation ?

 22   R.  Encore une fois, je dois essayer de me souvenir de la date exacte, je

 23   dois faire un effort. En avril, nous avons été reconnus par les Nations

 24   Unies en 1992. Je ne peux pas vous donner la date exacte aujourd'hui. Je

 25   n'ai pas la liste de dates sous les yeux.


Page 827

  1   Q.  Quand la Croatie a-t-elle exprimé son désir de faire partie des Nations

  2   Unies ?

  3   R.  En 1992.

  4   Q.  Quand la demande a-t-elle été déposée ?

  5   R.  Hier nous en avons parlé dans le document. Je crois que cela figurait

  6   dans une lettre également. On peut la regarder. De toute façon, la Croatie

  7   a été admise au mois d'avril.

  8   Q.  Et entre la déposition de la demande et l'acceptation, combien de temps

  9   s'est écoulé ?

 10   R.  Je pense qu'il devait s'agir d'un mois environ.

 11   M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous me le

 12   permettez, je vais interrompre mon contre-interrogatoire et ce pour deux

 13   raisons. La première, c'est que je souhaite verser au dossier les pièces

 14   présentées aujourd'hui et, deuxièmement, je souhaite m'adresser à la

 15   Chambre de première instance pendant cinq minutes et ce, en l'absence du

 16   témoin. Je souhaiterais avoir cinq minutes pour m'adresser à la Chambre. Je

 17   pense que je n'aurai pas besoin de temps supplémentaire. Je demande

 18   simplement à ce que le témoin quitte le prétoire.

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] L'Accusation, vous opposez-vous à

 20   ceci ?

 21   Mme LAMB : [interprétation] Non, je n'ai aucune objection à soulever.

 22   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Alajbeg, je crois que nous

 23   sommes parvenus à un moment de la procédure où vous pouvez maintenant

 24   quitter le prétoire, mais on va vous demander de revenir à un stade

 25   ultérieur. Je vous en ai déjà fait part. Nous souhaitons vous remercier


Page 828

  1   d'être venue aujourd'hui et d'avoir pu nous aider, comme vous l'avez faite

  2   ces deux derniers jours, et nous nous réjouissons de vous revoir à une

  3   autre date à votre convenance. Merci. Vous pouvez maintenant quitter le

  4   prétoire.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  6   [Le témoin se retire]

  7   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Petrovic, il y a un certain

  8   nombre de documents qui ont été présentés ce matin et qui ont été soumis au

  9   témoin. Il semblerait qu'aucun de ces témoins et qu'aucun de ces documents

 10   n'aient été enregistrés.

 11   M. PETROVIC : [interprétation] Je souhaite verser au dossier le D3. Il

 12   s'agit du préambule à la constitution de la RSFY, constitution 1974, avec

 13   une traduction en anglais.

 14   Mme SOMERS : [interprétation] Pardonnez-moi, Monsieur le Président, je

 15   souhaite faire une demande. Un certain nombre de documents ont été

 16   présentés en langue serbe et croate uniquement. Par conséquent, je demande

 17   à ce qu'une décision portant là-dessus soit reportée de façon à ce que nous

 18   puissions lire ces documents dans une autre langue.

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous avons reçu des documents dans les

 20   deux langues.

 21   Mme SOMERS: [interprétation] Pardonnez-moi, il faudrait que je vérifie. Je

 22   vais revoir la situation et vous en faire part.

 23   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pour l'instant, je crois que nous

 24   allons accepter les documents et le document versé au dossier portera la

 25   cote D3. 


Page 829

  1   M. PETROVIC : [interprétation] D4, Article 5, de la constitution de la

  2   RSFY, en 1974, en B/C/S, avec une version en anglais.

  3   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] D4 est admis.

  4   M. PETROVIC : [interprétation] Le suivant est le D5, Article 362, de la

  5   constitution de la RSFY de 1974, avec une traduction -- avec une version en

  6   anglais.

  7   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] D5 est admis.

  8   M. PETROVIC : [interprétation] Je dois également vous dire que je n'ai pas

  9   présenté l'ensemble du texte de la constitution. Il s'agit d'un document,

 10   qui est extrêmement long et qui, à mon sens, constitue un fardeau. C'est

 11   trop important, c'est trop lourd. J'ai simplement décidé d'en extraire

 12   certains articles qui me semblent importants pour pouvoir les verser au

 13   dossier. Le numéro de cote suivant -- ou la pièce suivante est le suivant -

 14   -

 15   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Petrovic, l'Accusation se

 16   réserve le droit de verser l'ensemble du document de la constitution au

 17   dossier si elle le juge nécessaire par la suite.

 18   M. PETROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, bien sûr, nous

 19   pouvons faire cela, si cela est jugé nécessaire. D6, Article 207, de la

 20   constitution de la RSFY.

 21   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] D6 est admis.

 22   M. PETROVIC : [interprétation] D7, Article 375, de cette même constitution

 23   de 1974.

 24   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le document D7 est admis.

 25   M. PETROVIC : [interprétation] Pièce D8, Article 240, de cette même


Page 830

  1   constitution de 1974.

  2   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] D8 est admis.

  3   M. PETROVIC : [interprétation] Pièce D9, Article 281, paragraphes 1 et 2.

  4   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] D9 est admis.

  5   M. PETROVIC : [interprétation] Pièce D10, Article 367, de la constitution -

  6   -

  7   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Puis-je signaler qu'il y a un problème

  8   ici. Le document que j'ai reçu ne comporte pas l'Article 327 en B/C/S. Le

  9   texte commence avec l'Article 327, mais, en anglais, ce même document

 10   commence par l'Article 334. Peut-être qu'il n'a pas été agrafé dans

 11   l'ordre.

 12   M. PETROVIC : [interprétation] Pardonnez-moi, c'est ma propre erreur. Nous

 13   allons corriger cette erreur le plus rapidement possible. Veuillez, s'il

 14   vous plaît, n'admettre que la version B/C/S' pour l'instant, et pardonnez-

 15   moi cette erreur.

 16   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois qu'il s'agissait de l'Article

 17   327, n'est-ce pas ?

 18   M. PETROVIC : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il s'agit donc du document portant la

 20   cote D10.

 21   M. PETROVIC : [interprétation] Pièce D11, décision de la présidence de la

 22   RSFY, datée du 18 octobre 1991. Le texte original est en anglais et il y a

 23   une traduction en B/C/S.

 24   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] D11 est admis. Je crois, Maître

 25   Petrovic, qu'il y a un autre point que vous souhaitiez aborder.


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  1   M. PETROVIC : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Monsieur le

  2   Président. Merci de m'avoir donné l'occasion de l'évoquer en premier lieu.

  3   Je souhaite demander s'il y aura -- la semaine prochaine, si nous allons

  4   pouvoir trouver le temps nécessaire pour prendre la parole à propos des

  5   écritures qui vous ont été soumises par le Bureau du Procureur le 24

  6   décembre. Il s'agit de la requête de l'Accusation et portant sur la remise

  7   du rapport d'expert. A mon sens, je crois qu'une décision n'a pas encore

  8   été rendue à l'égard de cette requête. Je demanderais à pouvoir prendre la

  9   parole pendant 10 à 15 minutes, s'il vous plaît. La Défense souhaite

 10   présenter ses arguments, eu égard à la requête qui a été déposée. Notre

 11   position à cet égard pourra -- s'averra peut-être différente à la lumière

 12   des échanges que nous avons eus avec nos éminents confrères du Bureau du

 13   Procureur. Cela est le premier point que je souhaitais aborder.

 14   La deuxième question que je souhaitais aborder est la suivante : il s'agit

 15   de l'état de santé de mon client. La décision, que vous avez rendue suite à

 16   notre audience au mois de décembre, la Défense tient compte des

 17   recommandations que vous avez émises -- faites lorsque vous avez rendu

 18   votre décision. La Défense demanderait au Greffe que notre client puisse

 19   être ausculté par un médecin, étant donné que son état de santé est très

 20   important, et pourrait avoir des conséquences sur la capacité de notre

 21   client à suivre l'ensemble de la procédure. Le secrétariat a accepté qu'un

 22   médecin soit nommé et nous souhaitons que notre client puisse être ausculté

 23   par ce médecin.  Nous avons déposé une demande aussitôt la décision rendue

 24   par le Greffe. Nous avons reçu cette décision il y a trois jours et nous

 25   souhaitons que ceci soit mis en œuvre le plus rapidement possible.


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  1   De quoi s'agit-il ici ? D'après notre analyse, eu égard à l'état de santé

  2   de notre client, nous estimons qu'il faut que notre client soit ausculté

  3   avec beaucoup de soin au quartier pénitentiaire. Evidemment, nous

  4   conformons aux pratiques médicales usitées dans ce Tribunal et nous

  5   estimons que, si notre client doit venir dans le prétoire deux journées, de

  6   façon consécutive, de cinq à sept heures tous les jours, notre expert

  7   médical doit arriver mardi ou mercredi. Je crois qu'il va arriver lundi et

  8   je crois que notre client va subir un certain nombre d'analyses, mardi ou

  9   mercredi, étant donné le temps nécessaire pour ces analyses et ces examens

 10   médicaux, puisque tout ceci doit être fait correctement et conformément aux

 11   pratiques médicales usitées ici. Le conseil de la Défense demande à ce que

 12   la Chambre de première instance retarde, à mardi ou mercredi, la tenue de

 13   l'audience, de façon à pouvoir tenir compte de l'avis des experts médicaux.

 14   Ce qui nous permettra d'obtenir le rapport médical qui sera -- nous

 15   espérons, par ce biais, obtenir un rapport médical objectif, qui ne tiendra

 16   pas compte, qui n'intégrera pas les éléments de fatigue et autres facteurs.

 17   Par conséquent, je demande à la Chambre de bien vouloir rendre une décision

 18   à cet égard et de retarder la tenue de l'audience à mardi ou mercredi.

 19   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous parlez de la semaine prochaine,

 20   je suppose.

 21   M. PETROVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Somers, vous souhaitez prendre la

 23   parole.

 24   Mme SOMERS : [interprétation] Ecoutez, c'est la première fois que nous

 25   sommes informés de cet élément-là. Je dois dire que je soulève une


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  1   objection, et ce, de façon tout à fait véhémente, car nous avons eu des

  2   échanges avec le conseil de la Défense et nous avons parlé, de façon

  3   transparente, de ceci sur la nature de la discussion, que cela devait

  4   provoquer au témoin, et nous souhaitons que le procès avance. J'ai

  5   rencontré M. Petrovic et M. Rodic, tous les jours de la semaine dernière et

  6   tout au cours de cette semaine, et, encore une fois, personne ne m'avait

  7   averti de cela. Je crois qu'il s'agit ici d'améliorer la communication

  8   entre la Défense et l'Accusation.

  9   Deuxièmement, une journée ne comporte que 24 heures. Mon personnel

 10   travaille 20 heures sur ces 24, et la Chambre ne peut pas tenir une

 11   audience pendant huit heures de suite. Si nous avons fait venir un expert,

 12   sans avoir auparavant consulter avec la Chambre de première instance, je

 13   crois qu'il s'agit de quelque chose qui a été organisée par la Défense et

 14   ceci ne doit avoir aucun incident sur le déroulement de cette procédure.

 15   Encore une fois, je crois que tout ceci peut-être débattu de façon

 16   transparente, mais je crois que je suis, tout à fait -- je dois vous dire

 17   que je suis, tout à fait, surprise et déçue de voir que ceci nous est

 18   présenté, de façon aussi soudaine et inattendue. Je crois que c'est même

 19   tout à fait -- cela pourrait influer sur l'équité de la procédure, et eu

 20   égard au client.

 21   Encore une fois, le conseil de la Défense a décidé d'agir seul, mais les

 22   choses ne peuvent pas être décidées, de façon unilatérale, et je demande à

 23   ce que l'heure soit suivie ici. Par voix de conséquence, je demande à ce

 24   qui n'y est pas de -- que l'on ne retarde pas l'ordre de cette procédure.

 25   Il y a également des week-ends et, en dehors des audiences, il existe


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  1   l'après-midi, et je crois que tout ceci peut être organisé. Je crois que

  2   les différentes parties doivent être notifiées à l'avance, de façon à ce

  3   que les intérêts de tout à chacun soient représentés.

  4   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Petrovic.

  5   M. PETROVIC : [interprétation] Permettez-moi, Monsieur le Président, de

  6   reprendre la parole. Je comprends fort bien ce que dit ma consoeur;

  7   néanmoins, nous avons appris ceci. Nous avons -- dès que nous avons eu

  8   connaissance de cela, nous en avons informé la Chambre de première

  9   instance. Nous n'étions pas en mesure de le savoir avant et, dès que nous

 10   avons obtenu l'information, nous vous l'avons communiquée. C'est

 11   aujourd'hui que cela s'est passé.

 12   Nous savons quelles sont les conditions dans le quartier pénitentiaire. Je

 13   dois vous rappeler que le week-end c'est chose impossible. A quelques

 14   exceptions près, en général, c'est impossible. Je crois que j'ai tout à

 15   fait le droit de le faire et de prendre la parole à ce sujet; si non, je

 16   demande à ce que le Greffe me le signale si je suis dans mon tort.

 17   Pour ce qui est du calendrier ou de l'ordre de comparution des témoins, je

 18   crois que c'est quelque chose que l'Accusation a évoqué aujourd'hui en

 19   parlant de quelque chose, qui ne peut pas être unilatérale, mais, quelques

 20   fois, des changements interviennent sur lesquels nous n'avons que très peu

 21   d'influence. La Chambre de première instance a même indiqué que de tels

 22   changements sont parfois tout à fait normaux dans une procédure comme

 23   celle-ci. Je comprends fort bien que cela puisse poser quelques

 24   difficultés, mais, croyez-moi, il y a les difficultés auxquelles doit faire

 25   face l'accusé sont très importantes. C'est même plus important que celui de


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  1   lors des comparutions des témoins et surtout quelques témoins sont parfois

  2   obligés de rester une journée de plus lorsqu'ils sont appelés à citer à la

  3   barre devant cette Chambre de première instance.

  4   [La Chambre de première instance se concerte]

  5   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous savons qu'il y a des cas, comme

  6   le cas de M. Brolund, qui ne peut pas être à La Haye la semaine prochaine.

  7   Nous ne souhaitons pas, par conséquent, intervenir dans l'ordre de

  8   comparution la semaine prochaine. Ce qui veut dire, Monsieur Petrovic, que

  9   votre client pourra être ausculter tous les matins entre lundi et jeudi de

 10   la semaine prochaine, et il n'y aura pas d'audience, à ce moment-là, et si,

 11   pour une raison particulière, il devait surgir, à savoir si une analyse au

 12   laboratoire ou l'auscultation du médecin devait durer un peu plus longtemps

 13   que prévu, à ce moment-là, nous pourrons retarder l'heure du début de

 14   l'audience cette journée-là. Mais je crois qu'il y a, eu égard aux examens

 15   médicaux que vous jugez nécessaire, l'équipe de la Défense, je pense que

 16   vous pourrez organiser ces examens médicaux, de façon à ce qu'il puisse

 17   avoir lieu le matin, une façon à ne pas perturber le calendrier de la

 18   semaine qui vient.

 19   Nous n'allons, par conséquent, rien changer et, si une difficulté

 20   particulière survient, à ce moment-là, mercredi ou jeudi, nous pourrons

 21   peut-être commencer un peu petit plus tard si cela est nécessaire. C'est à

 22   vous, à ce moment-là, de nous en faire part et c'est à vous de nous

 23   apporter tous les éléments nécessaires, et ce sera à vous de le justifier

 24   également. Nous savons qu'il y a un certain nombre d'heures dans la

 25   journée, et vous aurez donc la matinée, la semaine prochaine, pour


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  1   permettre à votre client d'être examiné par un médecin.

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'ai parlé de lundi à jeudi. On vient

  4   de me dire que nous pourrons également siéger vendredi, le matin, plutôt

  5   que de siéger l'après-midi. Par conséquent, nous proposons cela

  6   aujourd'hui, donc, de lundi à jeudi, vous pourrez faire ausculter votre

  7   client le matin, et nous espérons que vous pourrez faire le nécessaire dans

  8   ce laps de temps.

  9   Nous allons maintenant suspendre la séance être reprendre lundi.

 10   --- L'audience est levée à 13 heures 56 et reprendra le lundi 19 janvier

 11   2004, à 14 heures 15.       

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