Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-94-1-A

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

3 Lundi 19 avril 1999

4 le Procureur

5 c

6 Dusko Tadic

7 L'audience est ouverte à 14 heures 05.

8 M. le Président (interprétation). - Monsieur le Greffier, s'il

9 vous plaît, pourriez-vous nous indiquer l'affaire ?

10 M. Dubuisson. – Il s'agit de l'affaire IT-94-1-A, le Procureur

11 contre Dusko Tadic.

12 M. le Président (interprétation). – Monsieur Tadic, pouvez-vous

13 m'entendre ? Puis-je entendre les présentations des parties, s'il vous

14 plaît ? Commençons par le Conseil de M. Tadic.

15 (Les interprètes n'ont pas entendu le Conseil de la défense.)

16 M. le Président (interprétation). - L'accusation, s'il vous

17 plaît ?

18 M. Yapa (interprétation). - Bonjour, Messieurs les Juges, je

19 suis le Conseil principal de l'accusation. Brenda Hollis m'accompagne,

20 elle est substitut du Procureur ainsi que Michael Keagan, et notre

21 assistante est Ann Sutherland.

22 M. le Président (interprétation). - Il y a deux requêtes dont

23 est saisie cette Chambre. Nous avons reçu tout d'abord une requête aux

24 fins de report d'audience par le conseil de M. Tadic.

25 Monsieur Clegg, voulez-vous vous exprimer sur la question ?

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1 M. Clegg (interprétation). – Effectivement, en guise

2 d'introduction, je souhaiterais dire que nous ne souhaitons pas

3 véritablement obtenir un report. Nous voulons simplement nous assurer que

4 la position de l'appelant n'est pas compromise par le report la semaine

5 dernière de l'audience aux fins d'outrage et de détermination d'outrage.

6 La situation nous semble être la suivante : l'audience qui est

7 fixée maintenant pour la semaine prochaine pourrait éventuellement nous

8 faire entendre certains éléments de preuve qui pourraient être pertinents

9 dans le cadre de cet appel. Cela est-il probable ou non ? Je ne le sais

10 pas, il s'agit peut-être simplement de spéculations, mais personne ne peut

11 dire que ce type d'éléments de preuve ne pourrait pas apparaître au cours

12 de l'audience prévue la semaine prochaine.

13 Je souhaite donc qu'une situation existe dans laquelle

14 l'appelant ne soit pas lésé par l'ordre dans lequel ces audiences vont

15 avoir lieu. Nous proposons la chose suivante : nous invitons la Chambre à

16 considérer la possibilité suivante : entendre l'appel véritable contre la

17 condamnation cette semaine et l'appel incident de l'accusation.

18 Nous pensions que quoi qu'il en soit, le jugement serait réservé

19 à une date ultérieure, notamment jusqu'à ce que la décision soit prise

20 dans le cadre de l'audience consacrée à l'outrage. Ceci nous permettrait

21 d'évoquer tout moyen de preuve qui pourrait apparaître au cours de

22 l'audience consacrée à l'outrage ou tout élément de preuve pertinent vis-

23 à-vis de certains arguments présentés dans le cadre de l'appel déjà

24 formulé.

25 Ceci nous permettrait de présenter ces arguments devant la

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1 Chambre d'appel et d'utiliser de façon optimale le temps qui nous est

2 disponible cette semaine et ceci permettrait à l'appelant d'être protégé

3 en quelque sorte, même si ceci est improbable, si certains éléments de

4 preuve, certains nouveaux éléments pertinents devaient apparaître au cours

5 de l'audience de la semaine prochaine, pertinents vis-à-vis de l'appel

6 interjeté devant cette Chambre.

7 Par conséquent, ma demande est la suivante : nous inviterions

8 les Juges de cette Chambre à adopter cette proposition et, si

9 effectivement vous deviez faire droit à notre demande, je ne demanderais

10 pas que notre requête aux fins d'ajournement soit retenue. Si,

11 toutefois, vous pensez que cette proposition ne peut être suivie, je serai

12 réticent à le faire, mais je le ferai néanmoins, je demanderai un report

13 de cette audience d'appel jusqu'à la fin de l'audience relative à

14 l'outrage qui doit se tenir la semaine prochaine au cas où tout élément

15 pourrait apparaître au cours de cette audience qui aurait une quelconque

16 influence sur l'appel.

17 Bien entendu, ce n'est pas du tout la faute de l'appelant si ces

18 audiences ont dû être inversées. La Chambre d'appel, bien entendu, a

19 organisé l'audience relative à l'outrage de façon chronologique par

20 rapport à l'appel qui devait suivre. Il s'agit des hostilités

21 imprévisibles qui ont éclaté en Serbie, qui ont entraîné le report de

22 l'audience et des audiences, l'inversement des audiences et je voudrais

23 que l'accusé ne soit pas lésé.

24 Pour l'appel relatif à la peine en soi et pour des raisons tout

25 à fait différentes, nous demandons un report de l'audience consacrée à

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1 l'appel portant sur la peine à peu près pour la même période mais pour des

2 raisons tout à fait différentes. L'une des raisons que je me dois

3 d'exprimer devrait peut-être l'être en audience à huis clos, si toutefois

4 la Chambre est d'accord.

5 M. le Président (interprétation). - Vous voudriez donc

6 présenter cet aspect de votre argumentation dès maintenant ?

7 M. Clegg (interprétation). – Oui.

8 M. le Président (interprétation). - Y a-t-il des objections à

9 une audience à huis clos partiel.

10 M. Yapa (interprétation). - Aucune objection.

11 M. le Président (interprétation). - Eh bien, dans ce cas,

12 Monsieur le Greffier ?

13 (M. le Président se concerte avec le Greffier.)

14 M. le Président (interprétation). - Au sein de ce Tribunal, nous

15 avons deux possibilités : nous avons une audience à huis clos et une

16 solution intermédiaire qui est à huis clos partielle. Laquelle

17 voulez-vous ?

18 M. Clegg (interprétation). - Huis clos partiel.

19 M. le Président (interprétation). - C'est bien ce qui me

20 semblait. Passons donc à huis clos partiel.

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9 Avant de me répondre, je demanderai au Greffier, si toutefois

10 vous n'avez pas d'objection à le faire, à ce que nous repassions en

11 audience publique.

12 M. Clegg (interprétation). - Pas d'objection.

13 M. Yapa (interprétation). - Pas d'objection, non plus.

14 M. le Président (interprétation). - Diriez-vous, Monsieur Clegg,

15 que cet élément du Règlement envisage qu'avant le début de l'audience

16 portant sur l'appel, la partie requérante doit être à même de préciser

17 quels éléments de preuve elle souhaite voir verser au titre d'éléments de

18 preuve supplémentaires. Je suppose qu'actuellement, vous ne pouvez

19 véritablement répondre de façon certaine et que votre demande dépendra des

20 éléments qui apparaîtront peut-être dans l'audience consacrée à l'outrage

21 et qui doit avoir lieu à l'avenir.

22 M. Clegg (interprétation). - Oui, nous sommes d'avis que cette

23 disposition du Règlement devra être lue de la façon suivante, à savoir pas

24 moins de 15 jours avant la date de l'audience, lorsque donc les éléments

25 de preuve doivent être présentés, éléments de preuve supplémentaires. Par

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1 conséquent, une audience consacrée à un appel pourra être reportée à

2 plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Il n'y a pas de limitation

3 officielle en ce qui concerne l'appel.

4 Nous pensons également que rien n'est contraire à cela. Si en

5 théorie, par exemple, la semaine prochaine, certains éléments de preuve

6 devaient apparaître et que tout le monde reconnaît comme étant un motif

7 absolument incontournable d'appel, eh bien, à ce moment-là, ils pourraient

8 être mentionnés, l'existence de ces éléments de preuve pourrait être

9 mentionnée 15 jours avant l'audience de l'appel et c'est à ce moment-là

10 que les éléments de preuve seraient proposés en tant que pièces à

11 conviction.

12 Je ne sais pas si cette disposition devait s'appliquer 15 jours

13 avant le début de l'audience, mais je crois que ceci devait s'appliquer à

14 partir du moment où les témoins sont cités à la barre afin de comparaître

15 et de témoigner.

16 Bien entendu, l'objectif de cette disposition est de donner la

17 possibilité à l'autre partie d'examiner ces éléments de preuve et de

18 tester la véracité et précision de ces éléments de preuve, ce qui sera

19 fait bien entendu au cours de l'audience consacrée à l'outrage, dans la

20 mesure où un jugement sera rendu. Une évaluation de ces éléments de preuve

21 sera bien sûr faite

22 puisqu'ils seront acceptés ou rejetés par la Chambre d'appel.

23 Par conséquent, il n'y a aucune disposition qui va à l'encontre

24 de cette proposition et, si l'on y pense un instant, il serait tout à fait

25 absurde que les règles soit interprétées ainsi parce qu'il se pourrait

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1 alors que les éléments de preuve les plus puissants, les plus

2 incontournables ne pourraient pas être présentés par une Chambre d'appel

3 simplement à cause d'un problème technique qui ne serait absolument pas

4 fondé.

5 La semaine prochaine, M. Vujin pourrait dire qu'effectivement,

6 il a compromis de façon tout à fait délibérée le procès de l'accusé. C'est

7 tout à fait possible que ce soit le cas, même si nous ne le savons pas

8 encore. S'il devait dire cela, pourrait-on envisager que la Chambre

9 d'appel doive écarter des éléments de preuve de cette nature ? Par

10 conséquent, nous pensons que la réponse doit être non.

11 Comment appliquer des dispositions qui, bien sûr, ont été

12 rédigées dans un certain vide puisqu'elles l'ont été avant même que ce

13 Tribunal ne commence ses activités ? Elles doivent être interprétées de

14 façon tout à fait cohérente avec les intérêts de la justice aussi

15 longtemps que ceci ne vient pas violer les principes de la justice.

16 Je dirai également que, malgré la formulation du Règlement, même

17 les parties doivent pouvoir, avec l'assentiment du Tribunal, se limiter à

18 une période antérieure au délai fixé dans le Règlement. Bien entendu, il

19 faut également que les parties aient la possibilité de demander une

20 extension du délai au-delà des 15 jours prescrits.

21 Mais nous disons que rien dans le Règlement ne va à l'encontre

22 de cette démarche. Je sais qu'elle est inhabituelle, mais elle naît d'un

23 désir de s'assurer que la présentation des moyens de preuve de l'accusé

24 n'est pas compromise suite à l'audience ou à un renversement de l'ordre

25 des audiences prévues.

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1 M. le Président (interprétation). – C'est une interprétation

2 quelque peu inhabituelle et hardie du Règlement. Peut-être pourrait-on

3 entendre l'accusation, Monsieur le Procureur ?

4 M. Yapa (interprétation). - Avec tout le respect que je dois à

5 cette Chambre, je voudrais marquer mon désaccord avec l'interprétation de

6 mon collègue des dispositions du Règlement qui ont trait à la recevabilité

7 ou l'admission d'éléments de preuve supplémentaires.

8 La disposition qui nous intéresse est l'article 115 qui figure

9 au chapitre 7 du Règlement sous le titre "L'appel". Vous verrez que dans

10 l'article 115, un critère est fixé, à savoir que la requête visant à

11 l'admission de moyens de preuve supplémentaires doit être signifiée à

12 l'autre partie -en ce cas-ci à l'accusation- et déposée auprès du greffier

13 au moins 15 jours avant la date fixée pour l'audience. Cette audience dont

14 il est question est l'audience qui se tiendra devant vous, celle-ci, et

15 c'est bien donc ce délai qu'il faut respecter.

16 Vous vous souviendrez qu'au cours d'une audience antérieure

17 j'avais déclaré que les dispositions du Règlement doivent être appliquées

18 de la façon dont elles ont été formulées. Par conséquent, comme le

19 Président de cette Chambre d'appel l'a précisé, ce critère fixé à

20 l'article 115 aurait dû être respecté et ceci n'a a pas été le cas en

21 l'occurrence.

22 Merci.

23 M. le Président (interprétation). - Très bien.

24 La Chambre va lever l'audience pendant quelques minutes afin de

25 délibérer sur votre requête.

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1 (L'audience est suspendue à 14 heures 50.)

2 M. le Président (interprétation). - La Chambre d'appel a

3 délibéré de la question de la requête qui lui était soumise, et je

4 spécifie que nous ne traitons que l'une des deux requêtes déposées devant

5 nous, n'est-ce pas, Maître Clegg ?

6 M. Clegg (interprétation). - Oui.

7 M. le Président (interprétation). - Parfait. D'entrée de jeu, je

8 précise que la Chambre d'appel ne concorde pas avec votre interprétation,

9 interprétation selon laquelle la Chambre elle-même pensait qu'il y avait

10 une chronologie très précise de l'ordre d'arrivée des audiences. Ceci a

11 été organisé en fait sans aucune arrière-pensée, notamment sans avoir à

12 l'esprit que l'appel relatif à la détermination de l'outrage avait été

13 fixé avant l'audience relative à l'appel proprement dit.

14 Donc cette audience relative à la détermination d'outrage n'a

15 rien à voir avec la date de l'audience relative à l'appel proprement dit.

16 Donc la requête aux fins de report de l'audience est refusée, rejetée.

17 La Chambre n'accepte pas que l'arrêt rendu dans le cadre de

18 l'appel à proprement parler doit dépendre de la décision qui sera prise

19 dans l'audience relative à la détermination d’outrage. Ceci étant, si la

20 décision relative à ce dernier sujet est rendue avant que l'arrêt relatif

21 à l'appel proprement dit soit rendu à son tour et si dans le cadre de

22 l'audience relative à l'outrage, de nouveaux témoignages ou éléments de

23 preuve se font jour, dans ces circonstances, la Chambre serait prête à se

24 pencher sur toute requête émanant de l’appelant et visant à faire admettre

25 des éléments de preuve supplémentaires en tant que tels.

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1 Pour ce qui est maintenant des sujets abordés tout à l'heure

2 dans le cadre de l'audience à huis clos partiel, la position de la Chambre

3 d'appel est la suivante : nous demanderons à l'accusation de se prononcer

4 avant mercredi 10 heures sur le fait de savoir si les documents fournis

5 par la défense ont ou seraient susceptibles d'avoir une influence

6 quelconque sur la détermination de la peine qui nous revient.

7 Ce que nous précisons, c’est qu'aucun arrêt relatif à la

8 détermination de l'appel ne sera rendu avant que l'accusation ait eu

9 l'occasion d’examiner les documents et de faire rapport à la Chambre sur

10 le compte tenu desdits documents.

11 Ceci ayant été précisé, nous allons entendre vos arguments

12 relatifs à la deuxième

13 requête de la défense. Maître Clegg ?

14 M. Clegg (interprétation). – J’aimerais traiter de cette

15 deuxième requête. Cette requête effectivement était déposée au titre de

16 l'article 115. Elle n'a pas été déposée 15 jours avant la date de

17 l'audience d'appel malheureusement. En effet, c'est quelque chose dont je

18 me suis aperçu cet après-midi même, que je n’avais pas respecté le délai.

19 Nous déposons cette requête aux fins de voir rappeler un témoin

20 qui a déjà déposé au cours du procès, qui a reçu le pseudonyme de

21 témoin W. Ce témoin a fait une déclaration très récemment dans laquelle il

22 stipule que certains des éléments de preuve qu'il avait apportés à la

23 Chambre étaient incorrects et la déclaration qu'il vient de faire précise

24 qu'il a reconnu s'être trompé. L'appelant souhaite que ces corrections

25 soient apportées à la Chambre d'appel et nous faisons donc une requête au

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1 titre de l'article 115, nous demandons à ce que ces moyens de preuve

2 supplémentaires soient soumis à l'attention de la Chambre d'appel.

3 Le témoin souhaite revenir sur ce qu'il a dit devant la Chambre

4 de première instance. (expurgé)

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7 (expurgée)

8 (expurgée)

9 C'est bien sûr aux Juges de la Chambre d'appel de savoir et de

10 décider s'il souhaitent permettre à ce témoin de s’exprimer ou pas.

11 M. le Président (interprétation). - Maître Clegg, pourriez-vous

12 nous éclairer, s'il vous plaît ? Vous avez parlé de cela rapidement tout à

13 l'heure, vous n'avez pas pris le temps de vous expliquer. Je fais

14 référence à ce que vous avez dit à propos de ce délai de 15 jours. Est-ce

15 que d'après vous une telle requête devrait être faite au plus tard

16 15 jours avant l'audience ?

17 M. Clegg (interprétation). – La date qui apparaît sur la

18 déclaration du témoin, enfin la déclaration du témoin a été recueillie au

19 cours des 15 derniers jours. Il a donc été absolument

20 impossible de se conformer aux dispositions du règlement. Mais nous sommes

21 d'avis que l'article 89 (B) du Règlement donne effectivement le droit à la

22 Chambre d'appel de recevoir ces éléments de preuve dès lors que la Chambre

23 est convaincue qu'il est nécessaire d'admettre ces éléments de preuve afin

24 de pouvoir se prononcer en toute équité. L'article 89 (B) stipule que

25 "dans le cas où le Règlement est muet, la Chambre applique les règles

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1 d'administration de la preuve propre à parvenir dans l'esprit du Statut et

2 des principes généraux du droit à un règlement équitable de la cause" (fin

3 de citation).

4 L'article 89 (C) peut-être pertinent ; en l'occurrence, il

5 indique, je cite, que "la Chambre peut recevoir tous éléments de preuve

6 pertinents qu'elle estime avoir valeur probante" (fin de citation).

7 Nous sommes d'avis que lorsque des éléments de preuve surgissent

8 dans un délai inférieur à une période de 15 jours avant l'audience, il

9 doit bien y avoir une compétence intrinsèque du Tribunal qui lui permette

10 de décider de recevoir ces éléments de preuve. Il faut que la Chambre se

11 prononce sur le fond et non pas sur l'aspect purement technique de ce qui

12 est dit dans le Règlement de preuve.

13 M. le Président (interprétation). - Vous comprendrez bien,

14 Maître, que la Chambre d'appel a été saisie de cette requête quelques

15 minutes avant de se retrouver dans ce prétoire. Mes collègues ont reçu

16 cette requête à 13 heures 45 cet après-midi et je ne crois pas que

17 l'accusation se trouve dans une situation beaucoup plus satisfaisante. Il

18 y a des articles du Règlement qui permettent aux Juges une certaine marge

19 de manoeuvre dans le cadre du poids qui doit être accordé aux éléments de

20 preuve, mais si je ne m'abuse, ces articles du Règlement supposent que les

21 éléments de preuve ont été admis et reçus au dossier dans le cadre du

22 Règlement de Procédure et de Preuve. Si c'est bien le cas, alors, la

23 Chambre peut effectivement examiner ces éléments de preuve en faisant

24 preuve de la plus grande équité, de la plus grande objectivité, mais les

25 éléments de preuve dont vous parlez sont-ils d'un ordre tel qu'ils

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1 permettent aux Juges de passer outre ce qui est dit dans le Règlement ?

2 Est-ce qu'il y a une différence dans le fait de dire que les Juges peuvent

3 évaluer des éléments de preuve et le fait de dire que cela permet aux

4 Juges de ne pas tenir compte des articles du Règlement de preuves qui

5 régissent l'administration de la preuve et de la recevabilité des éléments

6 de preuve ?

7 M. Clegg (interprétation). – La seule chose que je puisse vous

8 dire, Monsieur le Président, et que je puisse dire à la Chambre d'appel

9 dans son ensemble, c'est que si des éléments de preuve surgissent à un

10 stade avancé de la procédure, alors il faut faire preuve d'un certain

11 degré de flexibilité dans l'interprétation du Règlement de Procédure et de

12 Preuve afin de pouvoir tenir compte de ce type d’éventualité. La règle qui

13 prévoit le délai de 15 jours est en fait un article du Règlement qui s'est

14 fixé de façon arbitraire. Il faut tâcher de respecter ce délai dès lors

15 que cela est possible, mais dans le cas contraire, nous sommes d'avis que

16 des dispositions d'ordre plus général doivent s'appliquer, qu’elles ont

17 préséance sur la lettre de l'article pertinent.

18 Je ne peux pas le présenter autrement.

19 M. le Président (interprétation). – C’est pourtant fort bien

20 présenté, Maître Clegg. Je vais me tourner vers l'accusation et lui

21 demander de nous faire part de ses arguments.

22 M. Yapa (interprétation). – Maître Hollis va répondre.

23 M. Hollis (interprétation). – Monsieur le Président,

24 l'accusation est d'avis que cette requête doit être rejetée. Ce pour deux

25 raisons : premièrement, cette requête est déposée de façon inopportune.

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1 D'autre part, si des motifs convaincants sont présentés qui permettent de

2 penser que la Cour peut outrepasser ce qui est dit dans le Règlement, fort

3 bien, mais ce n'est pas le cas ici. Mais je répète que cette requête a été

4 déposée beaucoup trop tard si vous regardez les dates qui apparaissent

5 dans la requête, il apparaît que la déclaration a été recueillie le

6 16 avril, pardon que la requête a été faxée le 17 avril.

7 Et on trouve en bas de la page 1 de la requête la date du

8 17 avril, ce qui semble un peu surprenant. (expurgé)

9 (expurgée)

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14 (expurgée)

15 Nous suggérons que les conseils de la défense savaient qu'il

16 existait de tels éléments de preuve en novembre dernier et qu’ils n’ont

17 pas présenté de motifs convaincants qui puissent nous expliquer pourquoi

18 ils ont attendu la toute dernière minute pour soulever ce problème. Cette

19 requête a été déposée de façon inopportune et c'est la raison pour

20 laquelle je demande que la requête soit rejetée.

21 D'autre part, elle doit l'être parce que si l'on regarde la

22 teneur de la requête de la défense, on s'aperçoit qu'elle ne varie en rien

23 par rapport à ce qui a été dit par le témoin concerné lors du procès.

24 (expurgée)

25 (expurgée)

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1 (expurgée)

2 (expurgée)

3 (expurgée)

4 (expurgée)

5 C'est donc là quelque chose qui n'est pas pertinent et c'est

6 donc une raison supplémentaire qui nous autorise à demander que cette

7 requête soit rejetée d'emblée.

8 M. le Président (interprétation). – Maître Clegg, nous vous

9 autorisons à répondre.

10 M. Clegg (interprétation). - Simplement pour dire,

11 Monsieur le Président, que sur le fax original, c'est le 15 avril qui

12 apparaît. J'ai l'original dans la main. Je voulais simplement éclaircir ce

13 sujet.

14 Par ailleurs, il n'y a rien que je veuille ajouter à titre de

15 réponse de la défense.

16 M. le Président (interprétation). – Maître Clegg, la Chambre

17 d'appel a examiné la requête. La décision est la suivante : la requête est

18 rejetée.

19 (Hors micro.)

20 Parfait. Nous en venons maintenant à l'appel proprement dit.

21 Dans une partie de l'affaire, on traite de trois appels distincts.

22 Monsieur Tadic fait appel à deux titres, appel relatif au jugement ou à la

23 condamnation et appel relatif à la peine. Pour ce qui est de l'accusation,

24 il y a appel relatif à certains aspects du jugement sur lequel l'accusé a

25 été acquitté.

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1 Nous nous sommes retrouvés pour la dernière fois, il me semble

2 le 25 janvier dernier et nous avons décidé que nous traiterions de ces

3 différents appels dans le courant de cette semaine.

4 Maître Clegg, vous avez eu l'obligeance de nous dire qu'il

5 serait peut-être possible de tout examiner en quatre jours et que nous

6 disposerions d'une journée supplémentaire pour tout débat qui s'avérerait

7 nécessaire.

8 Je vais me tourner vers le Greffier et lui demander de

9 distribuer aux parties un document dans lequel nous présentons la façon

10 dont nous souhaiterions traiter de ces différents aspects de l'appel.

11 Nous précisons notamment dans ce document quels sont les temps

12 de parole qui devront être respectés par les différentes parties à l'appel

13 et, puis, il y a un certain nombre de points pratiques qui sont soulevés

14 quant aux durées des audiences et quant aux horaires de ces audiences.

15 Pour ce qui est d'aujourd'hui, nous nous proposons de siéger de

16 14 heures à 17 heures, avec une pause qui interviendra d'ailleurs dans

17 quelques minutes. Ce sera une pause d'une demi-heure.

18 Les jours suivants, nous fonctionnerons de la façon suivante :

19 nous siégerons de 10 heures à 17 heures 30. Il y aura deux pauses d'une

20 demi-heure chacune, plus une pause pour

21 le déjeuner. Nous espérons ainsi pouvoir mener à bien nos débats jeudi

22 après-midi au plus tard.

23 Pour ce qui est maintenant des temps de paroles prévus pour

24 chacune des parties, vous les trouverez dans la première partie du

25 document.

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1 Je ne sais pas si vous avez des observations à faire, si ce

2 n'est pas le cas, la Chambre d'appel considère que vous acceptez ces

3 différentes propositions.

4 Bien entendu, nous ferons preuve de flexibilité et de souplesse

5 dès lors que cela s'avérera nécessaire.

6 Nous allons peut-être permettre à chacune des parties de

7 regarder de plus près les propositions qui lui sont faites et, ensuite,

8 nous nous retrouverons.

9 (Les parties consultent le document.)

10 J'ajoute que les membres de la Chambre d'appel ont lu avec

11 énormément d'attention les documents qui lui ont été fournis et nous

12 espérons donc que les Conseils des deux parties auront pour souci

13 d'économiser le temps de tous en ne revenant que sur les aspects qui leur

14 paraissent être les plus importants.

15 M. Clegg (interprétation). - J'ai jeté très rapidement un coup

16 d'œil sur les temps de parole qui étaient alloués aux parties. Le temps

17 prévu pour la réponse de l'appelant à l'appel de l'accusation me semble

18 assez court.

19 M. le Président (interprétation). - Quelle serait votre

20 suggestion ?

21 M. Clegg (interprétation). - Eh bien, il me semble que deux

22 heures seraient satisfaisantes.

23 M. le Président (interprétation). - Fort bien, deux heures donc.

24 M. Clegg (interprétation). - Je ne sais pas si la Chambre

25 d'appel souhaite entendre les arguments relatifs à l'appel sur la peine

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1 avant de rendre son arrêt, ou si la Chambre est ouverte à une suggestion

2 que j'ai faite relative au fait d'entendre l'appel relatif à la peine

3 après que l'arrêt soit rendu, lorsque l'on sait quels sont les actes pour

4 lesquels l'appelant sera considéré comme susceptible d'être passible d'une

5 peine ?

6 M. le Président (interprétation). - Après la décision, vous

7 voulez dire ?

8 M. Clegg (interprétation). - Oui.

9 M. le Président (interprétation). - Vous n'avez pas d'objection

10 à formuler quant au fait que l'appel relatif à la peine soit débattu ?

11 M. Clegg (interprétation). - J'aimerais d'abord traiter de la

12 peine, Monsieur le Président, et ce, après avoir pris connaissance de la

13 décision relative à la peine et à l'appel de l'accusation.

14 M. le Président (interprétation). - La situation est la

15 suivante. Si l'accusation obtient gain de cause dans l'appel qu'elle a

16 interjeté quant à l'acquittement de l'accusé pour certains chefs

17 d'accusation, alors il y aura une procédure de détermination de la peine

18 distincte, dans la mesure toujours où l'accusation a gain de cause. Si

19 elle n'a pas gain de cause, bien évidemment c'est la fin de l'affaire.

20 Vous êtes d'accord, Maître Clegg ?

21 M. Clegg (interprétation). - Bien sûr. Tout à fait d'accord et

22 ce que vous dites m'est très utile. Je crois que nous résolvons le

23 problème.

24 M. le Président (interprétation). – Maître Yapa.

25 M. Yapa (interprétation). - Monsieur le Président, vous avez

Page 298

1 parfaitement décrit la situation, car l'appel sur le jugement est en fait

2 l'appel interjeté relatif à la décision de la Chambre de première

3 instance.

4 M. le Président (interprétation). - Très bien.

5 Monsieur Clegg, nous traitons maintenant de l'appel de

6 l'appelant relatif au jugement.

7 Il est maintenant 15 heures 15, nous approchons de la pause.

8 Vous semblerait-il bon de ne commencer la présentation de vos arguments

9 qu'à partir de 15 heures 45 ?

10 M. Clegg (interprétation). - Cela me convient parfaitement.

11 M. le Président (interprétation). - Nous nous retrouvons donc

12 dans une demi-heure.

13 (L'audience, suspendue à 15 heures 15, est reprise à

14 15 heures 45.)

15 M. le Président (interprétation). – Maître Clegg, vous avez la

16 parole et vous pouvez la garder pendant deux heures et demie. Nous ne

17 disposons pas d'un système de signaux lumineux. Nous n'avons pas de petite

18 lumière rouge qui vous intimerait l'ordre de vous arrêter au milieu d'une

19 phrase dès l'apparition de cette petite lumière rouge, mais nous vous

20 prierons de bien vouloir respecter, si possible, le délai qui vous est

21 imparti et de nous dire quand vous en êtes arrivé aux termes de vos

22 arguments qui, j'espère, ne dépasseront pas les deux heures et demie qui

23 vous sont accordées.

24 M. Yapa (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

25 J'espère que mon collègue acceptera que je prenne la parole. J'interviens

Page 299

1 ici dans cet appel et je remplis un rôle ici qui est, si j'ose le dire, un

2 rôle formel. C’est Me Brenda Hollis qui présentera les arguments du

3 Procureur.

4 Quant à M. Williams Fenrick qui devait être présent à l'audience

5 aujourd'hui, il en a été empêché. J'espère qu'il viendra plus tard.

6 Je tiens à souligner d'emblée que les documents qu’il convenait

7 de présenter du côté du Procureur l'ont été. Nous sommes prêts à procéder.

8 M. le Président (interprétation). - Nous apprécions les

9 observations que vous venez de faire. Maître, nous comprenons tout à fait

10 la situation, nous l'avons comprise à la lecture du résumé des arguments.

11 Je rends à présent le micro à Me Clegg.

12 M. Clegg (interprétation). - Je commencerai par examiner le

13 premier des fondements amendés au titre de cet appel.

14 Dans le cadre de ce premier fondement, la question examinée

15 consiste à savoir si l'appelant a bénéficié d'un procès équitable et si

16 son droit au procès équitable a été compromis en raison des circonstances

17 dans lesquelles le procès s'est déroulé.

18 Nous examinerons également le concept secondaire de l'égalité

19 des armes entre le Procureur et la Défense.

20 Le point de départ de notre argumentation est l'article 21 du

21 Statut du Tribunal qui stipule au paragraphe 2 : "Toute personne contre

22 laquelle des accusations sont portées a droit à ce que sa cause soit

23 entendue équitablement et publiquement sous réserve des dispositions de

24 l'article 22 du Statut." et, au point 4 (B) de ce même article, pour

25 autant qu'il s'applique, l'article 21 dispose donc que "Toute personne

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1 contre laquelle une accusation est portée en vertu du présent Statut a

2 droit en pleine égalité au moins à disposer du temps et des facilités

3 nécessaires à la préparation de sa défense et à communiquer avec le

4 Conseil de son choix."

5 Les termes que l'on trouve dans cet article 21, notamment

6 l'expression "a droit à un procès équitable et public", sont des mots qui

7 ont été repris de l'article 6 de la Convention européenne des Droits de

8 l'Homme où l'on retrouve exactement les mêmes termes et, ce que nous

9 affirmons, c'est qu’en conséquence, il n'est pas seulement légitime, mais

10 tout à fait normal d'utiliser la jurisprudence de la Cour européenne de

11 façon à aider le Tribunal à déterminer ce qui constitue un procès

12 équitable et public.

13 Alors, si l'on examine brièvement l'évolution du droit pris en

14 considération par la

15 Cour européenne, on se rend compte que depuis le début de son

16 fonctionnement, les principes de procès équitable et d'égalité des armes

17 ont été inclus par la Cour européenne dans un certain nombre de décisions

18 qui font partie du dossier présenté par l’appelant.

19 Dès l'affaire Kaufman contre Kaufman qui fait partie du dossier

20 au titre du deuxième document, on trouve à la page 150 le point de vue

21 exprimé par la Commission -et je souligne qu'il s'agit de la Commission et

22 pas de la Cour européenne-, donc le point de vue exprimé par la Commission

23 qui est le suivant : "J'exprime l'opinion selon laquelle le droit à un

24 procès équitable englobe l'égalité des armes et cela est considéré comme

25 ne préjugeant pas de la régulation relative à l'échange de mémoires."

Page 301

1 Ce principe se trouve appliqué dans une série d'affaires qui

2 tiennent compte de l'égalité des armes, c'est-à-dire de la parité entre le

3 Procureur et la défense eu égard à l'accès au Tribunal.

4 Un Tribunal belge, notamment, a pris en compte les principes de

5 l'équité d'un procès en estimant que ce principe recouvrait la divulgation

6 des informations rendues accessibles à la défense par le Procureur et que

7 ce principe recouvrait également l'idée selon laquelle un temps suffisant

8 doit être accordé à la défense pour se préparer au procès.

9 Tous ces principes doivent être établis dans les documents qui

10 constituent le dossier de l’appelant.

11 A notre avis, ce sont ces éléments qui constituent le principe

12 de l'égalité des armes dans l'expérience des tribunaux qui, à l'heure

13 actuelle, cherchent à établir un équilibre entre la situation du procureur

14 et de la défense -dans un procès pénal- de façon à ce que les moyens les

15 plus importants, qui sont bien évidemment disponibles pour le Procureur,

16 n'œuvrent pas contre l’appelant.

17 Dans des tribunaux nationaux, les mêmes principes qui, parfois

18 répondent à des descriptifs différents, sont appliqués.

19 En vertu de la Common Law britannique, le concept est le

20 suivant : un juge a le pouvoir inhérent d'interrompre une mise en

21 accusation par le procureur lorsque celle-ci est synonyme d'abus de

22 pouvoir du tribunal.

23 Dans l'évolution de la Common Law britannique, s'il n'y a pas

24 égalité des armes, cela peut provoquer l'interruption d'une mise en

25 accusation, à savoir le juge peut exercer son pouvoir de mettre un terme à

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1 une procédure.

2 On trouve des illustrations de ce principe dans certains cas où

3 il y a eu des retards dans l'expression d'une mise en accusation du fait

4 du procureur qui n'est pas parvenu à procéder de façon suffisamment

5 rapide. Il y a eu également application de ce principe dans le cas de non

6 divulgation d'éléments matériels qui peut également entraîner l'exercice

7 du pouvoir des juges.

8 Bien entendu, compte tenu du fait que les procès se déroulent en

9 général dans un cadre national, la conception de l'égalité des armes a

10 évolué en tant qu'exercice d'équilibrage entre l'Etat accusateur et la

11 défense.

12 Dans des systèmes juridiques nationaux, lorsqu'un Etat a une

13 influence quelconque dans le déroulement d'un procès pénal, il s'agit de

14 cas un peu exceptionnels.

15 Donc nous assistons à l'évolution du droit eu égard au concept

16 de l'égalité des armes aussi bien sûr le plan des systèmes judiciaires

17 nationaux que des systèmes judiciaires internationaux comme une recherche

18 d'équilibre entre l'Etat et le procureur d'une part, et l'accusé d'autre

19 part.

20 Des questions telles que l'accès à un avocat, un temps

21 raisonnable pour se préparer, la divulgation des éléments matériels, tous

22 ces éléments ont constitué des facteurs qui, d'après les tribunaux,

23 devaient être équilibrés s'agissant de déterminer si le procès a été

24 équitable.

25 Dans l'affaire qui nous intéresse il y a une différence, à

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1 savoir que la plainte élémentaire de l'accusé ne consiste pas à dire que

2 c'est le Procureur qui a été responsable de l'absence d'égalité des armes,

3 mais que c'est l'absence d'un gouvernement indépendant, à savoir le

4 gouvernement de la Republika Srpska qui, selon nous, a été responsable du

5 fait que l'accusé dans cette affaire, et l’appelant d'aujourd'hui, s’est

6 vu privé d'un procès équitable en raison d'obstruction de la défense lors

7 des étapes préliminaires du procès et en raison d'une absence de

8 coopération avec la défense.

9 Bien entendu, ce phénomène sort largement du domaine que le

10 Procureur est capable de contrôler et, en fait, sort largement du champ du

11 procès.

12 En fait, la Chambre de première instance et le Procureur

13 souhaitaient que l'accusé bénéficie d'un procès équitable, tout cela au

14 plus grand bénéfice de l'administration de la justice, la justice ne

15 pouvant résulter que d'un procès équitable.

16 La difficulté à laquelle on se trouve confronté, lorsqu'on

17 examine le fondement du présent appel, réside dans la nécessité

18 d'apprécier l'absence d'égalité entre les deux parties qui est provoquée

19 par une institution tierce, une institution qui n'a rien à voir avec le

20 Tribunal, une institution qui n'a rien à voir avec le Procureur, à savoir

21 la Republika Srpska.

22 Et d'une certaine façon, on se trouve en présence d'une

23 extension du principe de l'égalité des armes, c'est une extension de ce

24 principe que nous invitons les Juges à examiner dans le cadre du présent

25 appel.

Page 304

1 La réponse du Procureur, aux fondements évoqués par la défense,

2 permet de déterminer avec précision quelle est la question à laquelle on

3 est confronté.

4 Le Procureur affirme qu'une question réglée par le droit ne peut

5 constituer un fondement d'appel au prétexte que l'égalité des armes n'a

6 pas été respectée, car le Procureur affirme, à juste titre, que les

7 autorités sont limitées par les circonstances lorsque le Tribunal a un

8 contrôle ou une compétence sur la partie dont nous affirmons qu'elle est

9 responsable de l'absence d'égalité de procès équitable.

10 Nous affirmons d'emblée que nous acceptons cette limitation et

11 les affaires citées à l'appui de cette limitation, à savoir l'affaire

12 Dombo Beheer contre les Pays-Bas qui est citée dans la réponse du

13 Procureur au paragraphe 316.

14 Nous ne disons pas que nous nous opposons à cet argument. Mais

15 ce que nous affirmons c'est qu'aucune autorité appelante, s'agissant du

16 principe d'étendre le principe de l'égalité des armes, ne peut traiter de

17 questions qui sortent du champ de contrôle du Tribunal ou du Procureur.

18 Toutefois, nous affirmons qu'il y a un facteur qui est un

19 facteur élémentaire dans les codes pénaux de tous les pays civilisés et

20 que ce facteur est celui selon lequel un accusé doit bénéficier d'un

21 procès équitable.

22 L'article 89 du Règlement de Procédure et de Preuve de ce

23 Tribunal introduit dans l'arène internationale ce concept de procès

24 équitable qui est applicable devant des tribunaux nationaux dans des

25 contextes différents.

Page 305

1 J'ai déjà renvoyé le Tribunal à ces articles du Règlement cette

2 après-midi qui, nous l'affirmons une nouvelle fois, ont un rôle vital à

3 jouer dans la détermination du présent appel.

4 L'article 89 (B) stipule, je cite : "Dans les cas où le

5 Règlement est muet, la Chambre applique les règles d'administration de la

6 preuve propres à parvenir, dans l'esprit du Statut et des principes

7 généraux du droit, à un règlement équitable de la cause", fin de citation.

8 Et l'article 89(D) stipule, je cite : "La Chambre peut exclure

9 tout élément de preuve dont la valeur probante est largement inférieure à

10 l'exigence d'un procès équitable", fin de citation.

11 Donc, nous affirmons qu'il apparaît tout à fait clairement que

12 les auteurs du Règlement ont prévu que la question de la nécessité de

13 garantir un procès équitable était un principe inhérent et un principe

14 capital dans les procès jugés selon la volonté du Conseil de Sécurité dans

15 l'affaire qui nous intéresse.

16 Dans un certain nombre de systèmes judiciaires nationaux, en

17 première instance les tribunaux se sont confrontés à la difficulté qui

18 consistait à juger des personnes au sujet desquelles il avait été affirmé

19 que des institutions tierces avaient compromis la possibilité d'un procès

20 équitable.

21 Ces dernières années les tribunaux britanniques se sont heurtés

22 au problème difficile de juger l'auteur de crimes de guerre commis en

23 Europe orientale au cours de la Deuxième Guerre Mondiale.

24 Et, dans le cadre de ce procès, des demandes ont été présentées,

25 demandes stipulant qu'un procès équitable était impossible en raison des

Page 306

1 actes des gouvernements russe et biélorusse et des institutions de ces

2 gouvernements, qui étaient parvenus à contrecarrer les tentatives de

3 l'accusé, d'obtenir des documents de ces deux gouvernements et des témoins

4 de ces deux gouvernements.

5 Dans toutes ces affaires, les tribunaux ont estimé que la

6 défense n'avait pas pu procéder comme cela eut été nécessaire, et les

7 tribunaux ont pris en considération la requête. Ce faisant, ils ont

8 accepté le principe que s'il était possible de démontrer qu'une

9 institution extérieure, à savoir le gouvernement de la Russie dans un cas,

10 de la Biélorussie dans un autre cas, avait contredit l'objectif des

11 tribunaux et que cela pouvait être prouvé, objectif consistant à mener un

12 procès équitable, eh bien, dans ce cas, les tribunaux pouvaient renoncer à

13 la mise en accusation, à savoir les Juges pouvaient intervenir pour

14 empêcher le déroulement du procès.

15 Si des actes de ce genre avaient été commis et qu'il était

16 prouvé qu'ils avaient nuit...

17 M. le Président (interprétation). - Maître Clegg, y a-t-il un

18 arrêt ?

19 M. Clegg (interprétation). - Il n'y a pas eu d'arrêt écrit dans

20 l'un ou l'autre de ces procès qui n'ont été entendus qu'en Première

21 instance et n'ont pas fait l'objet d'appel. S'agissant de la première

22 affaire de ce type, l'appelant a été considéré médicalement inapte à

23 supporter un appel. Il n'y a donc pas eu d'appel.

24 M. le Président (interprétation). - Dans l'affaire dont vous

25 parlez, la défense a-t-elle déclaré que les conditions du procès

Page 307

1 permettaient aux Juges d'interrompre la procédure pour cause d'absence de

2 coopération de la part d'un Etat ?

3 M. Clegg (interprétation). - Oui.

4 M. le Président (interprétation). - Y a-t-il eu une requête ?

5 M. Clegg (interprétation). - Oui, c'est moi qui l'ai présentée

6 personnellement.

7 M. le Président (interprétation). - En temps utile, vous nous

8 rappellerez cette requête.

9 M. Clegg (interprétation). - Oui.

10 S'agissant de cette affaire... En fait, nous parlons de deux

11 affaires distinctes, deux procès conduits en Angleterre, les deux seuls

12 procès liés à des allégations de crimes de guerre relatifs à la deuxième

13 Guerre Mondiale. Dans ces deux affaires, une requête a été présentée aux

14 Juges du procès avant le choix du jury, requête qui invitait les Juges à

15 intervenir pour interrompre la mise en accusation, ce qui eut permis

16 d'empêcher le Procureur de poursuivre et ce au motif que le gouvernement

17 de Russie et le gouvernement de Biélorussie avaient, par le truchement

18 d'un certain nombre d'instances et avant tout du KGB, soit refusé de

19 divulguer des documents à la défense dont il était estimé qu'ils étaient

20 utiles et pertinents, soit empêché la défense d'accéder à certains

21 témoins.

22 En vertu de la Common Law, la défense a la charge de convaincre

23 le Tribunal que la probabilité est suffisante que ce genre de choses a eu

24 lieu, et les Juges ont estimé que la défense ne s'était pas acquittée de

25 son obligation de fournir les éléments de preuve nécessaires, mais je vous

Page 308

1 cite, cette décision au titre d'illustration de la façon dont fonctionne

2 la Common Law eu égard à ce principe d'égalité des parties dont je dis que

3 dans ce cas, les Juges n'avaient pas un contrôle direct sur ce principe,

4 pas plus d'ailleurs que le Procureur, compte tenu d'un certain nombre

5 d'actes qui ont été orchestrés par une institution extérieure.

6 Les Juges ont estimé qu'il n'y avait pas d'éléments de preuve

7 montrant que cela avait nuit aux droits de la défense mais, en prenant en

8 compte la possibilité, les Juges ont en tout cas montré qu'ils estimaient

9 que le concept d'un procès équitable était suffisamment important pour les

10 autoriser à interrompre le déroulement d'un procès dans le cas où il

11 pouvait être prouvé qu'une instance extérieure telle que l'instance liée

12 aux gouvernements russe et biélorusse était effectivement intervenue pour

13 empêcher l'obtention d'éléments de preuve ou l'accès à des témoins dans

14 une mesure telle que selon les Juges, cela empêchait le déroulement d'un

15 procès équitable.

16 Donc c'est à ce titre que je cite ces affaires que je considère

17 comme des illustrations de la façon dont a évolué la Common Law et nous

18 affirmons en fait que l'appel incident du Procureur déposé le

19 12 janvier 1998 accepte au paragraphe 21 l'application de ce concept. Vous

20 me permettrez peut-être de donner lecture d'un passage du mémoire de

21 l'appel, incident de l'accusation, il s'agit du paragraphe 321.

22 Je cite : "Le Procureur ne nie pas que dans certaines

23 circonstances, il puisse s'agir d'une violation de l'équité la plus

24 fondamentale ou d'une injustice manifeste si un accusé est condamné

25 lorsqu'il n'a pas pu obtenir la participation au procès d'un certain

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1 nombre de témoins de la défense importants."

2 Un peu plus loin, nous lisons : "Dans le même temps, il est

3 manifeste qu'un Tribunal ne peut pas être empêché de juger et condamner

4 une personne simplement au motif que l'accusé prétend que des témoins

5 existent qui pourraient prouver son innocence mais qu'ils n'ont pas pu

6 être amenés à témoigner. Tout accusé invoquant ce facteur n'est pas

7 victime forcée d'une injustice et le procès se poursuit en présence des

8 témoins disponibles et en l'absence des témoins non disponibles." Des

9 autorités d'Europe et des Etats-Unis sont cités à l'appui de ces propos.

10 Le texte se poursuit comme suit, je cite : "Il est, par

11 conséquent, nécessaire dans chaque procès d'examiner les circonstances

12 exactes qui sont considérées comme ayant empêché la participation des

13 témoins pertinents." Dans les affaires où la défense a éprouvé des

14 difficultés à identifier ou obtenir la présence de témoin de la défense,

15 diverses mesures peuvent être ordonnées par la Chambre de Première

16 Instance pour lui apporter une aide. Ensuite au paragraphe 3-25, nous

17 lisons : "Si la défense est incapable d'obtenir la présence de certains

18 témoins, ceci peut être en raison de : premièrement, du fait que la

19 défense ne connaissait pas l'existence de ces témoins, ou qu'elle n'en

20 connaissait pas l'existence ou qu’en connaissant l'existence elle n'en a

21 pas informé la Chambre de première instance des difficultés existantes et

22 elle n'a pas demandé les mesures nécessaires pour corriger ces

23 difficultés.

24 Et puis, deuxièmement, c'est possible également en raison du

25 fait que la défense a demandé des mesures de ce genre mais que la Chambre

Page 310

1 de première instance a refusé de faire droit à cette demande.

2 Troisièmement, c'est possible en raison du fait que la Chambre

3 de première instance a ordonné des mesures de cette nature mais que les

4 témoins ont tout de même refusé de participer." (Fin de citation).

5 Compte tenu du principe que nous invoquons, nous disons qu'il

6 peut s'agir en l'espèce d'éléments liés au paragraphe 321 de l'appel

7 incident du Procureur. Je cite une nouvelle fois : "Le procureur ne nie

8 pas que dans certaine circonstance il peut s’agir d'une violation de

9 l'équité la plus fondamentale ou d'une injustice manifeste si un accusé

10 n'est pas capable d'obtenir la participation au procès de témoin de la

11 défense important." (Fin de citation)

12 Nous affirmons que le Procureur, en faisant cette déclaration,

13 concède que le droit s'est développé comme il l'a fait, et qu'un procès

14 équitable peut être rendu impossible par les actions d'une institution,

15 d'une instance externe qui n'est pas sous le contrôle de l’une ou l'autre

16 des parties au procès ou même de la Chambre de première instance. En

17 conséquence, à partir de ce point de départ, nous invitons les Juges de

18 cette Chambre d'appel à se demander si compte tenu des faites invoqués

19 dans ce procès, l’appelant peut éventuellement démontrer que jusqu'à

20 présent l'équité la plus fondamentale n'a pas été violée ou qu'il n'y a

21 pas eu injustice manifeste comme le dit le Procureur en raison de

22 l'impossibilité dans laquelle l’appelant s'est trouvé d'obtenir la

23 participation d'un certain nombre de témoins de la défense. A notre avis,

24 les Juges peuvent être persuadés que cela a bien été le cas.

25 Depuis le dépôt de la réponse de l'accusation du

Page 311

1 12 janvier 1998, un jugement a été rendu dans le cadre de l'article 115 et

2 de la demande formulée par l'appelant en vertu de cet article et ce le 15

3 octobre de cette même année.

4 A notre avis, cette décision a une importance fondamentale. Le

5 Tribunal a déclaré la chose suivante dans sa décision, à savoir que : "Les

6 témoins qui ont fait l'objet d'une demande pouvaient être placés dans

7 différentes catégories." L’une de ces catégories, la catégorie n°3, était

8 une catégorie de témoins et éléments de preuve existant au cours du

9 procès, mais dont la défense n'avait pas connaissance.

10 Eu égard à cette catégorie, la Chambre d'appel a statué comme

11 suit : "L'appelant a prouvé de façon suffisante que ces témoins étaient

12 inconnus et ces documents étaient inconnus de la défense malgré l'exercice

13 de leurs activités de façon tout à fait appropriée et qui n'était donc pas

14 nécessaire au moment du procès".

15 Ces éléments de preuve, à mon avis, reflètent les difficultés

16 auxquelles sont confrontés les conseils de la défense lorsqu'ils doivent

17 préparer et mener ce type de procès et ceci reflète également le manque de

18 coopération de la part du gouvernement de la Republika Srpska.

19 Une catégorie distincte a été également établie par la Chambre

20 d'appel, dans ce même arrêt. Il s'agissait de la catégorie 4 intitulée :

21 "Eléments que l'appelant n'a pu présenter au cours du procès".

22 Cette catégorie a inclus certains témoins que la défense

23 connaissait au moment du procès, mais qu'elle n'a pas pu faire

24 comparaître.

25 Dans cette catégorie, se trouvent un certain nombre de sous-

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1 catégories. Il s'agit notamment des témoins dont il était dit qu'ils

2 avaient été victimes de mesures d'intimidation.

3 Pour ce qui est de cette catégorie de témoins, on peut affirmer

4 -à juste titre- que la Chambre d'appel a été convaincue qu'une diligence

5 appropriée n'a pas été déployée, car aucune tentative n'a été faite de

6 demander certaines mesures de protection de la part de ce Tribunal.

7 Alors, je ne cherche pas du tout à essayer de déterminer ce qui

8 a pu motiver cette décision, mais si l'on réfléchit un instant sur ces

9 deux catégories que je viens de mentionner, l'une d'entre elles inclut les

10 témoins qui ont été effectivement intimidés. Il s'agit également des

11 témoins dont la défense ne connaissait pas l'existence.

12 Nous sommes d'avis qu'il n'est pas possible de tracer une ligne

13 très nette entre ces deux catégories de témoins. Nécessairement, ces deux

14 catégories se chevauchent. On peut facilement arriver à cette conclusion,

15 il s'agit d'ailleurs de la seule conclusion cohérente avec l'arrêt,

16 conclusion relative à la question de savoir pourquoi ces témoins n'ont pas

17 pu être découverts ou pourquoi il y a eu tant de témoins dont la défense

18 n'avait pas connaissance.

19 Eh bien, la réponse est celle-ci : parce qu'il y avait manque de

20 coopération de la part du gouvernement de la Republika Srpska qui a fait

21 tout ce qu'il était en son pouvoir pour entraver les efforts tout à fait

22 légitimes déployés par la défense visant à identifier et à citer devant

23 cette Chambre, ou devant la Chambre de première instance, certains témoins

24 qui auraient pu aider le Tribunal.

25 A notre avis, l'effet des actions de la Republika Srpska qui a

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1 tenté de saper le travail des personnes chargées de la défense de cet

2 appelant en l'occurrence, a été de priver l'accusé de son droit à citer

3 certains témoins devant la Chambre de première instance afin d'obtenir des

4 éléments de preuve qui soient pertinents et recevables. Et c'est là, selon

5 nous, que se trouve la violation de son droit à un procès équitable.

6 Les témoins relevant de la catégorie de témoins potentiels, dont la

7 défense ignorait l'existence, étaient des témoins que la Chambre d'appel a

8 acceptés, c'étaient des témoins qui auraient pu donner un témoignage

9 pertinent, un témoignage recevable, qui auraient pu fournir des éléments

10 de preuve ayant valeur probante vis-à-vis des charges retenues contre

11 l'accusé. Or, la Chambre de première instance n'a entendu aucun de ces

12 témoins.

13 Si les conseils de la défense de l'appelant qui étaient chargés

14 de sa défense au cours du procès de première instance avaient eu

15 connaissance de l'existence de ces témoins, eh bien, grâce au travail

16 qu'ils ont effectué au cours du procès de première instance, ils auraient

17 cité ces témoins puisqu'ils avaient tout à fait droit à ce que ces

18 témoignages soient présentés devant la Chambre de première instance.

19 Personne n'aurait pu les empêcher d'obtenir ce type d'informations qui

20 étaient pertinentes et recevables.

21 Par conséquent, suite à cette obstruction à laquelle a dû faire

22 face l'équipe de la défense et de la part de la Republika Srpska -et

23 d'ailleurs, on le voit dans l'arrêt de la Chambre d'appel qui a accepté

24 ces allégations d'intimidation eu égard à d'autres témoins-, par

25 conséquent, les actes d'entrave de la Republika Srpska ont été clairement

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1 identifiés, donc suite à cette obstruction, des éléments de preuve qui

2 auraient en soi été recevables ne l'étaient pas et, là, je citerai le

3 paragraphe 72 de l'arrêt de la Chambre d'appel. Pardon, non, il s'agit de

4 l'arrêt rendu au titre de l'article 115, mais cette Chambre, le

5 15 octobre 1998, a rendu un arrêt -excusez-moi, c'est le paragraphe 71- :

6 "La Chambre d'appel à ce stade doit appliquer une forme quelque peu plus

7 flexible de l'article 115 qui demande que la Chambre autorise la

8 présentation de tels éléments de preuve si ceci va dans le sens des

9 intérêts de la justice.

10 Dans le cadre de cette affaire, la Chambre considère que

11 l'intérêt de la justice demande ce type d'admission seulement si les

12 éléments de preuve sont pertinents vis-à-vis d'une question cruciale, si

13 les éléments de preuve sont crédibles et si les éléments de preuve sont

14 tels qu'ils montreraient probablement que la condamnation n'était pas un

15 verdict approprié."

16 Ce sont ces derniers mots qui montrent que le procès de l'appelant n'a pas

17 été équitable. Pourquoi ? Parce que la défense n'a pas eu accès à cette

18 catégorie de témoins.

19 L'arrêt de la Chambre d'appel montre clairement qu'il revient à

20 l'appelant de montrer que la condamnation n'était pas justifiée avant que

21 certains éléments de preuve ne soient admis.

22 Que se passe-t-il ? Ceci renverse la charge de la preuve au

23 stade de l'appel. Au stade du procès de première instance, l'appelant

24 avait un droit absolu de citer ses témoins à comparaître. Il n'avait pas à

25 s'acquitter d'une quelconque obligation de prouver que ses témoins

Page 315

1 montreraient probablement qu'il n'était pas coupable. Il n'y avait aucun

2 obstacle à ce qu'il cite ses témoins à comparaître. Il a perdu ce droit

3 après sa condamnation et, au stade de l'appel, il doit maintenant

4 s'acquitter de l'obligation qui lui revient avant que des éléments de

5 preuve ne puissent être admis, l'une des raisons étant bien entendu que

6 l'on respecte le principe de la finalité.

7 Je ne suis pas en train de suggérer que cette Chambre, la

8 Chambre d'appel a pris ou a utilisé le mauvais critère au moment où elle a

9 formulé son arrêt au mois d'octobre 1998. Ce que je dis ou ce que je fais,

10 c'est que je suis en train de dire que si ce critère est effectivement le

11 critère approprié -et je l'accepte-, la charge repose sur les épaules de

12 l'appelant, mais si l'appelant peut prouver que ses témoins ou certains de

13 ses témoins qui relèvent de cette catégorie auraient pu, au stade de la

14 première instance, être mis à sa disposition, eh bien, il a subi une

15 injustice parce qu'il a perdu sa possibilité et son droit de présenter des

16 témoins à la Chambre, ce qui est un droit absolu.

17 Par conséquent, la question qui se pose actuellement à cette

18 Chambre, à notre avis, est la suivante : la conclusion des événements qui

19 se sont produits au cours du procès, de ce qui s'est passé entre-temps

20 prouve-t-il effectivement qu'il y a eu une certaine obstruction à laquelle

21 a dû faire face la défense et, sans une telle obstruction, on peut

22 raisonnablement supposer que ces témoins, ou en tout cas que certains de

23 ces témoins, auraient pu être découverts en temps opportun, l'appelant

24 aurait pu les citer à comparaître dans le cadre de son procès.

25 Et nous disons également que si nous pouvons prouver que

Page 316

1 certains témoins n'ont pas été cités, ou qu'ils n'ont pas pu être

2 découverts suite à cette obstruction, et qu'ils étaient pertinents et

3 importants, eh bien effectivement l'appelant a perdu son droit à un procès

4 équitable, parce qu'il a perdu son droit à présenter ses arguments sous le

5 meilleur jour et qu'il n'a pas pu citer ses témoins en son nom, parce

6 qu'il n'a pas le droit de le faire en appel, il a simplement le pouvoir de

7 les citer s'il s'acquitte de l'obligation qui pèse maintenant sur lui, et

8 si la Chambre exerce son pouvoir discrétionnaire à son avantage.

9 Il n'a plus le droit de le faire sans cela et, s'il a perdu ce

10 droit, nous disons qu'il a perdu son droit à un procès équitable.

11 Revenons un instant au résumé des arguments que doit présenter

12 l'accusation. L'accusation ne nie pas que dans certaines circonstances

13 ceci peut constituer une violation de l'équité fondamentale ou une

14 injustice manifeste de condamner un accusé qui n'a pas pu obtenir la

15 participation au cours du procès de témoins de la défense importants.

16 Cette concession étant faite par l'accusation, nous pouvons

17 identifier certains témoins de la défense importants dont nous n'avons pas

18 pu assurer la participation au cours du procès.

19 Nous savons, pour une raison notamment, que la Chambre a accepté

20 que les avocats de l'accusé, au cours de son procès, ont fait tout ce qui

21 était en leur pouvoir pour essayer de découvrir ces témoins. Donc il ne

22 s'agit pas d'une faute commise par eux.

23 Nous savons également, et il y a des paroles très intéressantes

24 sur lesquelles nous pourrons réfléchir, dans la déclaration liminaire de

25 M. Wladimiroff, qui était à l'époque conseil principal de l'équipe de la

Page 317

1 défense de l'appelant au cours de son procès, il a déclaré à la page 9, je

2 crois que ceci a été placé en annexe 1 du mémoire modifiée de l'appelant :

3 "Le fait que ce procès commence aujourd'hui ne nous donne pas une réponse

4 définitive. Il faudra étudier le fait que les conditions nécessaires à un

5 procès équitable ne seront peut-être pas toutes remplies. Les raisons en

6 ont déjà été données. L'incertitude eu égard au fait de savoir, si à un

7 moment donné de la procédure, un stade sera atteint lorsqu'un procès

8 équitable ne sera plus possible, nous préoccupe grandement".

9 Un peu plus loin, à la page 11, il précise la chose suivante :

10 "Les personnes vivant dans cette région sont disséminées. Elles sont

11 menacées, elles ont peur et les autorités locales en sont responsables.

12 Dans de telles conditions, il est extrêmement difficile de pouvoir jouir

13 d'un procès équitable. S'il devait être prouvé que les circonstances

14 juridiques et factuelles empêchent le Tribunal de déterminer la vérité,

15 nous sommes d'opinion qu'il n'y a plus de procès équitable. L'intention de

16 mener un procès équitable n'est pas suffisante et j'affirme que toutes les

17 conditions nécessaires à un procès équitable devraient être remplies".

18 A la page 17, il est dit la chose suivante : "Les procédures

19 préalables au procès ont montré une inégalité des armes grave. Pourquoi ?

20 Parce que les témoins de l'accusation se trouvent à l'extérieur de la

21 Republika Srpska et que toutes les autorités, sauf celles de la

22 Republika Srpska, ont coopéré pleinement avec l'accusation dans cette

23 affaire".

24 Dans les semaines à venir, nous verrons comment ce manque

25 d'égalité des armes affectera le procès.

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1 Je passe maintenant à la page 28. Nous vous avons informés de

2 nos préoccupations sérieuses quant au procès en soi. Il y a de nombreux

3 problèmes qui n'ont pas été résolus et de nombreux signes montrent que ces

4 problèmes ne seront pas résolus.

5 Par conséquent, nous sommes très préoccupés par la qualité de ce

6 procès. Nous craignons qu'au bout du compte ce procès ne remplisse pas les

7 critères nécessaires de la justice. Il s'agit là de mots poignants.

8 M. le Président (interprétation). - A quel stade, M. Wladimiroff

9 a-t-il formulé cette déclaration ?

10 M. Clegg (interprétation). - Le tout premier jour du procès.

11 Il est tout à fait juste de dire que, lorsque les mois se sont

12 écoulés, la Chambre de première instance a fait tout ce qui était en son

13 pouvoir pour aider le travail de la défense. Il y a eu d'ailleurs une

14 pause de plusieurs semaines au cours de la présentation des moyens de

15 preuve de l'accusation, afin de permettre à la défense de déployer de

16 nouveaux efforts dans la zone en question visant à découvrir et à

17 localiser certains témoins.

18 Je tiens à être clair sur ce point, nous ne sommes pas du tout

19 en train de suggérer que la Chambre de première instance a fait tout autre

20 chose que tout ce qui était en son pouvoir afin de garantir la tenue d'un

21 procès équitable.

22 La Chambre a donné toute l'aide possible à M. Wladimiroff et à

23 son équipe.

24 Nous ne suggérons absolument pas que l'accusation, d'une façon

25 ou d'une autre, a tenté d'entraver la bonne marche d'un procès équitable.

Page 319

1 Cependant l'effet a été le suivant, malgré toute l'aide fournie,

2 malgré l'interruption d'audiences relativement importante accordée à la

3 défense, malgré la coopération, la protection de témoins, l'anonymat, les

4 vidéoconférence et toutes les autres mesures prises par la Chambre, malgré

5 tout cela, nous savons qu'il y a eu tout un ensemble d'éléments de preuve

6 pertinents et recevables qui n'ont pas été découverts malgré le travail

7 remarquable réalisé par M. Wladimiroff et son équipe.

8 Avant le début du procès, il a indiqué de façon on ne peut plus

9 claire que : "La défense et lui-même étaient préoccupés par l'équité de ce

10 procès". Nous vous invitons à accepter qu'il n'aurait pas utilisé ces mots

11 à la légère.

12 M. le Président (interprétation). - Par la suite, au cours du

13 procès, est-il revenu sur cette question en formulant une requête aux fins

14 d'interruption du procès parce qu'il était impossible matériellement

15 d'assurer l'égalité des armes ?

16 M. Clegg (interprétation). – Non. Je pense que la difficulté qui

17 se présentait était double.

18 La première était d'identifier ; d'ailleurs dans un autre

19 passage de sa déclaration liminaire il en fait état. J'espère pouvoir

20 résumer ses mots aussi bien qu'il les a prononcés?

21 Il a posé une question rhétorique à la Chambre : "Pourquoi -me

22 direz-vous- n’ai-je pas demandé une interruption si nous ne pouvons pas

23 disposer d'un procès équitable ?". Il a répondu à cette question en disant

24 que : "L'appelant, M. Tadic, était déjà en détention depuis deux ans, à

25 cette époque attendant d'être jugé. Il faut limiter la détention

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1 préventive d'une personne pendant la préparation de son procès".

2 Par conséquent, c'est un équilibre difficile à atteindre pour

3 des avocats de la défense, dans la situation qui se présentait à l'époque

4 pour M. Wladimiroff, soupeser différentes pressions : celle d'assurer un

5 procès suffisamment rapide -et utiliser le terme "rapide" après deux ans

6 est un peu de difficile, je suppose que vous comprenez ce que je veux

7 dire- et puis soupeser également le désavantage que présenterait un

8 nouveau retard, un retard sine die peut-être, en attendant une véritable

9 coopération.

10 L'autre difficulté tient à la nature même de l'obstruction à

11 laquelle a dû faire face M. Wladimiroff et son équipe. Ils ne savaient

12 même pas, ils ne connaissaient même pas, l'existence de témoins qui

13 auraient pu les aider. Par conséquent, pour ce qui est des témoins

14 relevant de cette catégorie dont j'ai parlé, témoins qui malgré tous les

15 efforts déployés par l'équipe n’ont pas pu être découverts et localisés,

16 sans avoir connaissance de leur existence il était tout à fait impossible

17 de formuler une requête censée, et de la présenter à la Chambre de

18 première instance, demandant un report d'audience.

19 L'un des problèmes inhérents à ce type d'entrave, d'obstruction

20 qu'il définit ici, et dont vous avez plusieurs exemples, est que les

21 conditions sur place étaient telles que les réponses données par les

22 autorités locales étaient telles que l'on ne savait pas si, en fait, il y

23 avait effectivement des témoins qui pourraient être d'un quelconque

24 secours.

25 Pour préparer l'affaire dans une situation dans laquelle une

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1 personne aurait pu mieux connaître peut-être le système national, il n'y

2 aurait pas eu de problème à localiser ou tenter de localiser certains

3 témoins en utilisant certaines des méthodes utilisées lorsque l'on

4 travaille dans le cadre de systèmes nationaux, en se fondant sur les

5 forces de police par exemple pour localiser certains témoins, etc. Nous

6 n'avions pas ce type d'option, ou l'équipe de la défense n'avait pas ce

7 type d'option. Les forces de police sur place n'auraient pas pu faire

8 preuve de plus d'obstruction.

9 Il aurait fallu pouvoir forcer la coopération des autorités

10 locales, il aurait fallu délivrer des ordonnances pour ce faire afin

11 d'essayer de limiter cette obstruction permanente des efforts de la

12 défense.

13 Nous invitons donc la Chambre d'appel non pas à considérer

14 l'échec de M. Wladimiroff dans sa tentative de formuler une requête aux

15 fins de report et de considérer que cet échec, ou son refus, reflète le

16 fait qu'il ait été convaincu que la préparation de la présentation de ces

17 moyens de preuve n'était pas du tout entravée. Peut-être qu'il ne

18 connaissait pas quel était le degré d'obstruction et d'ailleurs il

19 n'aurait pas pu le connaître. Il ne pouvait pas savoir que ces témoins

20 avaient été écartés de son chemin. C'est une façon assez polie de dire les

21 choses d'ailleurs.

22 Il n'avait pas pu avoir accès à des témoins vraisemblablement

23 importants au cours des différentes visites et de ses différents voyages

24 dans la région. Il n'a donc pas fait état de ce problème sous la forme

25 d'une requête officielle à ce stade.

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1 Mais cependant, à la fin de la présentation des éléments de

2 preuve de l'accusation, il a obtenu un certain nombre de reports ou plutôt

3 un report d'une longueur importante afin de résoudre ces différents

4 problèmes. Je crois que ceci a duré quelque quatre semaines, mais je

5 vérifierai, pour en être tout à fait sûr, ce soir.

6 Peut-être me sera-t-il possible de clore mes arguments cette

7 après-midi même, je le ferai en réunissant les différentes composantes de

8 notre demande et de notre notice d'appel.

9 Pour ce qui est du premier motif d'appel, j'ai très rapidement,

10 trop rapidement peut-être, mais très rapidement passé en revue quelle a

11 été l'évolution du principe de l'égalité des armes et du procès équitable.

12 J'ai passé en revue les différents points de vue adoptés par la Cour

13 européenne des droits de l'homme et un certain nombre de juridictions

14 internes européennes. Je me suis inspiré notamment d'un certain nombre de

15 systèmes de Common Law, dont celui de la Grande-Bretagne.

16 Ces principes, de toute façon, se retrouvent dans la plupart des

17 juridictions des pays du monde. D'après nous, les conséquences sur le

18 procès, du fait que la défense a été lésée dans ses droits, ont été que

19 les témoins -dont il a été décidé par les juges qu'ils étaient pertinents

20 et qu'ils étaient d'intérêt pour le procès- n'ont pas été cités à la

21 barre. Ils ont été identifiés, mais la Chambre ne les entendra jamais.

22 Ceci a empêché le procès d'être un procès équitable. D'ailleurs,

23 l'accusation le reconnaît elle-même dans le document qu'elle nous a fourni

24 et qui présente l'essentiel de ces arguments en réponse.

25 D'après nous, la première chose que la Chambre d'appel doit

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1 faire c'est de se poser la question de savoir si la Chambre peut être

2 convaincue du fait que, durant le procès, la défense s'est vue empêcher

3 l'accès à ces témoins par le gouvernement de la Republika Srpska qui

4 pratiquait une politique de non coopération.

5 D'après nous, l'effet du jugement qui a été rendu par la Chambre

6 de première instance est en fait de reconnaître qu'il y a eu effectivement

7 frustration des efforts de la défense et obstruction.

8 La deuxième question est donc de savoir si le déséquilibre ainsi

9 créé entre les deux parties était tel que le droit de l'accusé à un procès

10 équitable a été lésé. Il est évident que si un témoin n'avait pas pu être

11 cité à la barre, alors qu'il devait témoigner sur un élément périphérique

12 et non essentiel, bien sûr cette seule situation n'aurait pas pu permettre

13 de prouver qu'il y avait effectivement inégalité entre l'accusation et la

14 défense, en tout cas l'inégalité n'était pas telle que le procès pouvait

15 être considéré comme non équitable.

16 Mais, dans la situation où nous nous trouvons, il faut vraiment

17 penser à l'équilibre qui aurait dû prévaloir.

18 La quantité des éléments de preuve qui ont été soumis et le

19 volume d'éléments de preuve, dont la Chambre de première instance n'a pas

20 pu disposer, sont tels qu'il y a eu déséquilibre total entre la position

21 de l'accusation et la défense. Le déséquilibre a été tel que le droit de

22 l'accusé à un procès équitable a été violé.

23 Les emplois du temps précis et les horaires précis sont la

24 meilleure façon de pousser un avocat à venir rapidement au bout de son

25 argumentation et je ne crois pas qu'il y ait beaucoup d'autres éléments

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1 que je souhaite vous soumettre, notamment en ce qui concerne le premier

2 motif d'appel.

3 Je vois qu'il est 16 heures 50. Je crois que si cela vous

4 convient, je pourrais traiter du troisième motif d'appel demain matin dans

5 le cadre de la présentation de la suite de mes arguments. Cela vaut peut-

6 être mieux de procéder de la sorte plutôt que d'interrompre mon

7 argumentation.

8 J'en aurai largement terminé demain matin et, en tout cas, dans

9 le cadre des deux heures trente qui m'ont été imparties.

10 M. le Président (interprétation). – Monsieur Clegg, la Chambre

11 partage tout à fait ce que vous venez de dire. Effectivement, il sera bon

12 que vous attendiez demain pour traiter du troisième motif d'appel.

13 Je parle en notre nom à tous lorsque je précise que l'emploi du

14 temps que nous vous avons soumis a eu un effet tout à fait satisfaisant, à

15 savoir que, comme vous l'avez fait à l'instant, vous vous êtes concentré

16 sur les points essentiels de votre argumentation.

17 Demain, lorsque vous reviendrez dans ce prétoire, vous jugerez peut-être

18 utile d'aborder un point qui me semble intéressant, à savoir : est-il

19 envisageable que, dans une affaire particulière, l'accusation puisse se

20 retrouver dans la situation que vous venez de nous dépeindre ?

21 Dans une telle situation, si l'accusé était acquitté, est-ce que

22 l'accusation pourrait faire appel de l'acquittement sur le motif suivant :

23 il n'y avait pas eu d'égalité des armes au cours du procès.

24 Peut-être souhaiterez-vous y penser pendant la nuit et nous

25 faire part de vos réflexions demain matin.

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1 M. Clegg (interprétation). - Je n'y manquerai pas.

2 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie.

3 Des observations de la part de l'accusation ? Si ce n'est pas le

4 cas, l'audience est suspendue et reprendra demain matin à 10 heures.

5 Je vous remercie.

6 L'audience est levée à 17 heures.

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