Page 5647
1 Le mardi 21 septembre 2010
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 19.
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous allons réessayer.
6 Bonjour à tous.
7 S'il vous plaît, faites entrer le témoin.
8 Monsieur McCloskey.
9 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. Bonjour, Monsieur le Président,
10 Madame, Messieurs les Juges, bonjour à toutes et à tous.
11 Je tiens pour commencer à préciser que nous avons téléchargé quelques
12 traductions : P16C, P149, P665B, P667B, P851A, P851B, P661B, P845B.
13 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Nous allons les
14 recevoir au dossier avec les cotes qui leur ont été attribuées, et nous
15 remercions la section de traduction d'avoir fait ce travail.
16 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
17 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour, Monsieur.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
19 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bienvenue.
20 Veuillez lire votre déclaration solennelle vous engageant à dire la vérité.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
22 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
23 LE TÉMOIN : RICHARD WRIGHT [Assermenté]
24 [Le témoin répond par l'interprète]
25 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous
26 asseoir.
27 Dans un premier temps, c'est le Procureur, M. McCloskey, qui vous posera
28 des questions.
Page 5648
1 Vous avez la parole, Monsieur McCloskey.
2 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
3 Interrogatoire principal par M. McCloskey :
4 Q. [interprétation] Pour commencer, pourriez-vous décliner votre identité,
5 s'il vous plaît, et dites-nous quelle est votre profession.
6 R. Je suis Richard Vernon Stafford Wright, et je suis archéologue.
7 Q. Je donnerai une lecture rapide de votre déclaration, mais avant cela je
8 précise que vous êtes professeur émérite d'anthropologie à l'université.
9 Comment cela se fait-il que vous soyez archéologue, et qu'en fait vous
10 soyez professeur d'anthropologie ?
11 R. Oui. Dans de nombreuses universités, l'anthropologie englobe
12 l'archéologie et l'anthropologie physique. Dans le domaine médico-légal, on
13 fait une distinction entre l'anthropologie, qui devrait en fait être
14 appelée anthropologie physique, et archéologie. Quant à l'Université de
15 Sydney, je travaillais à la chaire d'anthropologie, donc j'avais une chaire
16 d'anthropologie, mais j'étais archéologue.
17 Q. Très bien. Je vous remercie. Est-ce que vous avez eu l'occasion de
18 relire votre déposition dans les affaires Popovic et Krstic ?
19 R. Oui.
20 Q. Et vous avez signalé une erreur qui s'est glissée dans votre déposition
21 dans l'affaire Popovic, me semble-t-il. Est-ce que vous voudriez préciser
22 cela ?
23 R. On m'a posé une question sur le nombre de fosses que j'ai exhumées en
24 1998, j'ai répondu deux fosses primaires et sept fosses secondaires. Et en
25 fait, il s'est agi d'une seule fosse primaire en 1998, et non pas deux.
26 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vous remercie.
27 A ce stade, je me propose de donner lecture d'un bref résumé au titre de
28 l'article 92 bis.
Page 5649
1 Le professeur Richard Wright est venu déposer, cité par le bureau du
2 Procureur devant ce Tribunal pendant le procès contre Radoslav Krstic en
3 mai de l'an 2000 et pendant le procès intenté à Vujadin Popovic et consorts
4 en février 2007.
5 Le professeur Wright est un professeur honoraire d'anthropologie à
6 l'Université de Sydney, en Australie. En 1998, 1999 et en l'an 2000, le
7 professeur a travaillé comme l'archéologue-chef pendant l'identification et
8 l'exhumation des fosses communes associées à la chute de Srebrenica. Le
9 professeur Wright a également travaillé comme archéologue en chef pour le
10 bureau du Procureur dans le cadre de l'exhumation de diverses autres fosses
11 communes relatives à d'autres affaires instruites par l'Accusation, y
12 compris les fosses de Brcko ainsi que les exhumations en Croatie d'une
13 fosse commune qui contenait des restes de civils serbes.
14 Le professeur Wright a supervisé l'exhumation de fosses communes de
15 Srebrenica, y compris l'enlèvement et l'identification des restes humains
16 et des objets de fosses communes, leur transport à la morgue, et leur
17 examen par des anthropologues et des médecins légistes.
18 Le professeur Wright a déposé sur les exhumations des fosses primaires de
19 Petkovci Dam, Kozluk, et Glogova 1, ainsi que de fosses communes
20 secondaires de Liplje, Hodzici, Cancari, et Zeleni Jadar. Il a rédigé trois
21 rapports ainsi qu'un rapport intérimaire qui reprennent un résumé
22 présentant ces exhumations.
23 Le professeur Wright avec son équipe a pu établir un lien entre les fosses
24 primaires et les fosses secondaires par le truchement de l'examen de la
25 terre transportée, des pierres et des objets.
26 Le professeur Wright a également mené à bien des examens d'objets
27 trouvés dans des fosses exhumées. Il a constaté que les personnes dont les
28 restes ont été trouvés étaient des Musulmans. Et il a expliqué comment il a
Page 5650
1 pu arriver à déterminer la période où le décès est survenu grâce à l'examen
2 des montres Seiko qui étaient portées par les victimes.
3 S'agissant de Kozluk, le professeur Wright a pu constater que de
4 nombreux de corps avaient les yeux bandés et des liens qui attachaient
5 leurs mains derrière leur dos. Il a également pu trouver des cartouches
6 dans le sol sous les corps. Ce qui lui a permis de constater que Kozluk
7 était un lieu d'exécution ainsi qu'une fosse commune.
8 Le professeur Wright a constaté sur la base des informations qu'il a
9 réunies grâce à ses propres enquêtes et grâce aux enquêtes menées par les
10 enquêteurs du bureau du Procureur que certains objets qui étaient
11 considérés comme provenant de l'entrepôt de Kravica ont été trouvés dans la
12 fosse de Glogova.
13 Le professeur Wright a supervisé l'examen préliminaire, ou le sondage de 21
14 fosses communes secondaires le long de la route de Cancari, le long de la
15 route de Hodzici, Liplje, Zeleni Jadar pendant 1998. Il a expliqué le
16 processus qui a été mené à bien afin d'identifier les sites et il a déposé
17 en affirmant que 2 571 corps en plus existeraient dans des fosses qui n'ont
18 pas encore été exhumées.
19 Je dispose d'une liste qui a été dressée de différentes pièces à
20 conviction, j'ai leurs cotes également, les pièces qui ont été versées au
21 dossier par votre truchement pendant le dernier procès, je souhaite à
22 présent que l'on affiche la pièce 65 ter 6555, qui est une pièce à part.
23 Il s'agit d'un document, Professeur Wright, que vous avez rédigé et qui
24 s'intitule "Rapport intérimaire sur les exhumations menées au site de
25 Glogova 1, Fosse L, menées en septembre 2000."
26 Q. J'aimerais que vous nous parliez de cette page de garde, et que vous
27 nous disiez s'il s'agit bien du rapport que vous avez fourni au bureau du
28 Procureur pour qu'il soit utilisé dans le cadre de ces procès.
Page 5651
1 R. Oui.
2 Q. Et pourriez-vous brièvement nous dire comment cela se fait que vous
3 ayez été appelé à rédiger ce rapport intérimaire ?
4 R. Une fois terminés les travaux à Glogova, nous avions constaté sur sept
5 sites, et Jean Ruez l'enquêteur m'a demandé de fournir un rapport sur cette
6 fosse, ce qui n'avait pas été fait précédemment pour Glogova.
7 M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai ici des numéros
8 qui correspondent à des pièces reprises dans le tableau. Ce sont les pièces
9 P869 à 891, ainsi que la pièce que nous voyons à présent, la pièce 6555 sur
10 la liste 65 ter, je demande que cela soit versé au dossier pour compléter
11 notre lot de documents en application de l'article 94 bis.
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey, j'ai un doute;
13 vous n'avez pas demandé au professeur Wright si aujourd'hui il apporterait
14 les mêmes réponses si on lui posait les mêmes questions que celles du
15 procès Popovic.
16 M. McCLOSKEY : [interprétation] Vous avez parfaitement raison, j'ai omis de
17 faire cela.
18 Q. Monsieur, Professeur Wright, si on vous posait les mêmes questions,
19 est-ce que vous apporteriez les mêmes réponses que celles que vous avez
20 apportées précédemment ?
21 R. Oui, j'apporterais les mêmes réponses.
22 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
23 Maintenant que les bases sont jetées, pouvons-nous, s'il vous plaît, verser
24 ces documents au dossier.
25 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
26 Alors le document qui constitue la pièce P869 correspond bien au compte
27 rendu d'audience de l'affaire Popovic, ce document sera versé au dossier
28 ainsi que les documents de la série P870 jusqu'à P891, mis à part la pièce
Page 5652
1 P881, qui n'a pas encore de traduction, donc en attendant que le document
2 soit traduit.
3 Et nous avons le rapport intérimaire à l'écran, il a été utilisé dans le
4 procès Popovic ?
5 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, il a été versé au dossier par le
6 truchement d'un autre témoin, M. Janc, me semble-t-il.
7 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien. Nous le verserons au
8 dossier.
9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] La pièce 65 ter 6555 constituera la
10 pièce P1014.
11 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
12 Monsieur McCloskey, veuillez continuer.
13 M. McCLOSKEY : [interprétation]
14 Q. Professeur Wright, vos rapports et votre déposition parlent d'eux-
15 mêmes, je voudrais simplement aborder brièvement quelques éléments-clés
16 pour replacer tout dans le contexte.
17 Est-ce que vous pourriez brièvement nous expliquer quelles sont les
18 différences entre votre profession d'archéologue, d'anthropologue et de
19 médecin légiste d'autre part. Les Juges de la Chambre ont entendu déjà à
20 plusieurs reprises ces termes, mais en tant qu'archéologue, est-ce que vous
21 pourriez brièvement nous expliquer en quoi consiste votre travail et
22 comment les autres s'inscrivent dans vos tâches, s'ils s'y inscrivent.
23 R. Oui. Les archéologues examinent le sol, c'est cela leur travail
24 principal, ainsi que ce que le sol contient, et ils prélèvent le matériel
25 qu'ils trouvent. Ils sont experts dans l'examen des fosses, ils
26 enregistrent tous les éléments d'information d'où proviennent les objets,
27 les corps, quand ils sont enlevés de l'endroit où ils se trouvaient et pour
28 qu'on puisse reconstruire l'ensemble d'une fosse donnée. Et puis nous nous
Page 5653
1 intéressons également à la conservation.
2 Les anthropologues ont des connaissances dans le domaine de l'archéologie,
3 et la raison pour laquelle ils interviennent c'est qu'ils sont capables
4 d'identifier les corps. Ils connaissent le squelette humain et ils sont
5 capables parfois de s'y retrouver dans des amoncellements d'ossements qui
6 ne sont pas très clairs.
7 Et puis à la morgue, l'anthropologue est capable de déterminer l'âge de la
8 personne, les raisons de son décès, son sexe, les traumatismes éventuels
9 sur le squelette, et puis le médecin légiste peut confirmer la cause et la
10 manière de la mort.
11 Donc vous avez les trois éléments qui s'emboîtent : le travail sur la
12 fosse, supervisé par les archéologues, avec les anthropologues qui
13 interviennent; et le travail à la morgue, où les anthropologues travaillent
14 sur les restes; et puis les médecins légistes.
15 Q. Très bien. Alors comme vous le dites dans votre déposition et comme
16 nous l'avons fait valoir dans votre résumé, il y a eu des exécutions de
17 personnes à Kozluk; vous y êtes arrivé en vous fondant sur les éléments
18 fournis par le médecin légiste pour arriver à connaître la cause du décès
19 ou non ?
20 R. Je pense que lorsque vous voyez que des gens ont été abattus c'est une
21 déduction plutôt raisonnable, je suis capable de reconnaître les orifices
22 d'entrées de balles, et j'ai vu qu'ils avaient les yeux bandés, donc je
23 suis arrivé à la conclusion qu'ils ont été exécutés.
24 Q. Est-ce que cela fait partie de vos tâches habituelles en tant
25 qu'archéologue ou quelqu'un pourrait estimer que vous sortez du cadre de
26 vos compétences en arrivant à ces conclusions ?
27 R. Pour ce qui est du corps qui a été trouvé dans une fosse et s'il n'y a
28 pas de traces de blessure par balle et s'il n'y a pas d'autres signes de
Page 5654
1 traumatisme, je ne me lancerai pas dans des spéculations sur la cause du
2 décès. Mais là sur les sites où j'ai travaillé en Bosnie, je pense que
3 c'était évident, même ça aurait été évident même à un profane, de toute
4 manière c'était évident pour moi.
5 Q. Est-ce que cela, est-ce que vous faites converger vos différentes
6 observations, c'est ce que fait un archéologue ?
7 R. Oui. Un archéologue doit faire attention à ne pas sortir du cadre de
8 son expertise, c'est évident, mais ces restes ont fait l'objet d'examens
9 par d'autres experts également, et je me suis permis néanmoins, et je me
10 suis cru fondé à le faire, de décrire le contexte dans lequel j'ai trouvé
11 ces corps. Autrement, ils sont envoyés à la morgue et il n'y a pas
12 d'information contextuelle. Parce que ce qui a servi à leur bander les yeux
13 peut tomber par exemple pendant le transport et puis également les liens
14 qui attachent leurs mains. Donc c'est également un risque compte tenu du
15 manque de sécurité dans la zone, mais je ne pense pas que je sois sorti du
16 cadre de mon expertise, et il y a beaucoup d'éléments qui étaient évidents.
17 Q. Nous n'allons pas entrer dans les détails, mais vous avez examiné des
18 documents ou plus, des milliers de documents, des photographies, des vidéos
19 qui étayent votre travail en Bosnie ?
20 R. Oui. En plus de mes rapports, il y a des registres que nous avons tenus
21 avec des listes dressées et reprenant chacun des corps avec des
22 caractéristiques des corps. Vous avez des formulaires qui étaient remplis
23 par ceux qui ont mené des excavations montrant dans quelle position était
24 couché le corps, des objets associés, tout un registre complet de
25 photographies officiellement enregistrées à l'exception des douilles.
26 Q. Donc la Chambre a entendu beaucoup d'éléments, des dépositions sur des
27 fosses primaires et secondaires. Nous savons de vos rapports que vous avez
28 travaillé sur la fosse de Petkovci, qui était une fosse qui était remuée.
Page 5655
1 Est-ce que vous pouvez nous dire, s'il vous plaît, en tant qu'archéologue
2 en chef, comment vous êtes arrivé à cette conclusion ?
3 R. Oui. Est-ce que je peux juste revenir un petit peu en arrière ?
4 Q. Oui.
5 R. Le premier terme que j'ai utilisé, c'est "un lieu d'exécution", c'est
6 un endroit où on a abattu des gens. Puis, on les a placés dans une fosse,
7 nous avons des exemples qui étayent cela à Kozluk et au barrage de
8 Petkovci. On les a mis dans une fosse. Puis à peu près trois mois plus
9 tard, les photos aériennes que nous avons nous permettent de savoir que
10 certains de ces corps ont été enlevés des fosses primaires et ils ont été
11 placés dans des fosses secondaires. Donc, vous avez un lieu d'exécution. Le
12 site primaire, généralement, correspond au lieu d'exécution, mais ce n'est
13 pas le cas dans le site de Kozluk parce qu'il se trouve éloigné. Puis, vous
14 avez les fosses primaires qui parfois restent intactes, mais parfois elles
15 ont été remuées pour enlever les corps et les placer dans des fosses
16 secondaires.
17 Q. Je vous remercie. Alors, parlez-nous de Petkovci.
18 R. Au barrage de Petkovci, d'après ce que les enquêteurs m'ont dit, il y
19 avait une fosse primaire, donc c'est le barrage qui a été le site
20 d'exécution. J'ai vu des photos aériennes de l'endroit et, en fait, cela
21 correspond au barrage lui-même. Il y a une espèce de plate-forme qui
22 supporte le mur du barrage, et on m'a dit que cet endroit n'a pas été
23 remué, que d'après les images aériennes, on peut arriver à cette
24 conclusion-là. Mais quand nous avons procédé à l'excavation, nous avons
25 constaté qu'il n'y avait pas de corps sur place. Je veux dire dans la fosse
26 primaire, normalement il devrait y avoir des corps. En fait, il n'y avait
27 que des morceaux de corps quand nous sommes descendus en sondant jusqu'à
28 deux mètres, à peu près, dans la roche. Il n'y avait que des morceaux de
Page 5656
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5657
1 corps et d'os, et il était tout à fait évident que ces corps ont été
2 déchiquetés par des machines, qu'on a enlevé des corps pour les sortir, et
3 il m'a semblé tout à fait clair que ce n'était absolument pas une fosse
4 primaire. Les archéologues utilisent le terme de "tombe pillée," donc je
5 l'utiliserai, mais dans le sens non péjoratif. Donc, c'est ce qui s'est
6 passé. C'est fin septembre ou en octobre que l'on a remué cette fosse.
7 Q. Donc, vous voulez dire ce n'était pas une fosse primaire non intacte,
8 ou ce n'était pas une fosse primaire ?
9 R. C'est une fosse primaire, mais elle a été remuée.
10 Q. Je vous remercie. Et vous avez également pu examiner des fosses
11 secondaires ?
12 R. Oui. En fait, la plupart du temps j'ai travaillé sur des fosses
13 secondaires.
14 Q. Vous venez de mentionner le barrage et la structure du barrage. Avez-
15 vous travaillé sur des exhumations de fosses secondaires où vous avez eu la
16 sensation qu'elles étaient liées à la fosse primaire du barrage ?
17 R. Oui. Le site de Liplje -- je ne sais pas si je me rappelle le numéro.
18 J'ai mon rapport ici, mon rapport sur les exhumations de 1998 --
19 Q. Oui, très bien.
20 R. Donc, vous m'interrogez en me demandant si j'ai vu un site pour lequel
21 j'aurais pu établir un lien avec le barrage de Petkovci, et il s'agit, en
22 effet, du site Liplje numéro 2. Et la raison pour laquelle j'ai pensé que
23 les corps provenaient du barrage et que c'était un lieu unique parmi
24 l'ensemble des fosses secondaires sur lesquelles je m'étais penché, il y
25 avait beaucoup de morceaux de roche qui étaient étrangers à ce site-là, et
26 les corps étaient écrabouillés. Je suis arrivé à la conclusion qu'ils
27 provenaient soit du barrage de Petkovci soit d'un endroit semblable.
28 Q. [aucune interprétation]
Page 5658
1 R. Le barrage de Petkovci se compose de morceaux de roche qui proviennent
2 de la carrière.
3 Q. Donc, vous voulez parler du fait que la roche soit coupée par la main
4 de l'homme. C'est cela que vous voulez dire ?
5 R. Oui. En fait, il s'agit de morceaux de roche qui n'ont pas été coupés,
6 mais qui ont, en raison d'explosions, ont repris une certaine forme qui
7 constitue des déchets qui stabilisent l'entrée du barrage.
8 Q. Et --
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey, Monsieur le
10 Professeur, je vous demande de bien vouloir marquer une pause entre les
11 questions et les réponses. Puisque nous utilisons la même langue, cela
12 éviterait des problèmes au niveau du compte rendu.
13 M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, c'est de ma faute.
14 Très bien.
15 Q. Pourriez-vous nous dire, pour ce qui est du site secondaire le long de
16 la route de Cancari, si vous étiez en mesure de faire le rapprochement avec
17 le site d'origine de Kozluk ?
18 R. Vous voulez parler de Cancari 3, en fait. C'est le nom que nous avons
19 donné à cette fosse. Ceci semblait être, à nos yeux, une fosse secondaire,
20 parce que c'est ce que nous avons pu constater d'après une vue aérienne qui
21 date du mois d'octobre 1995.
22 La première chose que l'on fait, c'est de racler la surface un petit
23 peu pour savoir si oui ou non il y a un site à cet endroit-là, et de
24 pouvoir en distinguer les contours. Alors que nous avons un petit peu
25 touché la surface, il n'y avait non pas des centaines mais des milliers
26 d'éclats de verre provenant de bouteilles vertes, y compris certaines qui
27 étaient cassées, et le goulot de la bouteille était cassé au-dessus. Nous
28 avons également trouvé une quantité d'étiquettes qui provenaient de l'usine
Page 5659
1 de fabrication de bouteilles de Kozluk. On ne trouvait pas du verre de ce
2 type dans la vallée. Je veux dire que ceci ne provenait pas d'une décharge.
3 On a trouvé cela -- le verre a été retrouvé par la suite près de la fosse,
4 donc j'ai estimé que les corps qui se trouvaient dans la fosse secondaire
5 avaient dû provenir de ce site où on avait retrouvé du verre cassé
6 provenant de bouteilles un petit peu partout. Etant donné que le nom de
7 "Kozluk" se trouvait sur les étiquettes, j'ai dit au bureau du Procureur --
8 j'ai dit aux enquêteurs que je pensais que c'était là qu'il y avait une
9 fosse primaire, en réalité, qui était inconnue à Kozluk à ce moment-là. Et
10 plus tard, à 30 ou 40 kilomètres, j'ai trouvé la fosse secondaire.
11 Et un an plus tard, après avoir fait un rapport sur cette fosse, je
12 suis allé rencontrer les enquêteurs de Kozluk, qui se trouvaient derrière
13 cette fabrique de bouteilles, j'ai trouvé l'endroit où il y avait des
14 restes humains qui se trouvaient à la surface. C'était en 1999, et moi-même
15 et mon équipe, nous nous sommes rendus à Kozluk et nous avons trouvé
16 l'origine des corps. Il en restait encore 300 environ dans la fosse
17 primaire et que personne n'avait touché. Nous les avons exhumés.
18 Q. Est-ce que vous avez revu des traces de verre vert dans cette zone que
19 vous avez exhumée près de cette fosse ?
20 R. Il y avait du verre vert absolument partout.
21 Q. Est-ce qu'il y avait une fabrique de bouteilles tout près ?
22 R. Il y avait une fabrique de bouteilles. Il me semble qu'il avait dû y
23 avoir un accident dans l'usine de bouteilles, parce que c'était un type de
24 bouteille qui était cassé. Il y avait un type de bouteille qui avait été
25 cassé en de multiples fragments. Donc, il s'agit ici d'un transfert
26 d'éléments de preuve d'une fosse primaire à une fosse secondaire.
27 Q. Je vous remercie de ces exemples. Je sais que nous pourrions parler des
28 jours durant sur ce thème, mais passons à autre chose.
Page 5660
1 Dans votre témoignage la dernière fois, vous avez dit que lorsque
2 vous travailliez pour le bureau du Procureur, vous n'aviez encore jamais
3 auparavant exhumé des fosses qui contenaient des pertes d'hommes morts au
4 combat; est-ce exact ?
5 R. Oui.
6 Q. Vous aviez exhumé une fosse en Ukraine qui datait de la Deuxième Guerre
7 mondiale; est-ce exact ?
8 R. Oui, ça correspondait au massacre de quelque 550 Juifs, par un
9 contingent en 1942.
10 Q. Et ça c'était --
11 R. On leur avait tiré dessus dans la tête. Ils n'étaient pas morts au
12 combat.
13 Q. Depuis votre dernier témoignage, vous avez acquis beaucoup d'expérience
14 au niveau de l'exhumation des fosses qui contenaient des corps de personnes
15 mortes au combat ?
16 R. Oui. L'année dernière, j'ai travaillé pour conseiller en matière
17 médico-légale travaillant pour une société d'archéologie qui s'appelait
18 Oxford. J'avais un contrat et je devais exhiber huit fosses à Frommel, qui
19 est de l'autre côté de la frontière belge, près de Lille. En 1916, il y a
20 un contingent australien qui a attaqué des postes de mitrailleuses
21 allemands. Il y avait mille Australiens qui ont été tués cette nuit-là.
22 Parce qu'ils se sont atterris dans des tranchées allemandes au cours de la
23 bataille, ils ont été tués sur-le-champ, devant les tranchées allemandes et
24 ensuite étaient enterrés par les Allemands. Ils ont, à ce moment-là, creusé
25 huit fosses, mais ils n'en ont utilisé que cinq. Et quelqu'un d'"Oxford
26 Archaeology" avait pour tâche d'enlever ces corps qui ont été ensuite
27 enterrés pendant la bataille, et maintenant ils ont été réensevelis dans le
28 cimetière de guerre à Frommel.
Page 5661
1 J'étais là au début de ce travail, et par la suite j'ai étudié la
2 disposition des corps dans ces fosses communes. Je ne faisais pas partie de
3 l'équipe qui devait exhumer les corps en tant que tels, mais j'ai
4 maintenant une certaine expérience eu égard aux fosses et aux cimetières
5 militaires.
6 Q. Nous savons d'après votre témoignage antérieur que vous avez vu un bon
7 nombre de fosses en Bosnie, les corps étaient tous mélangés ou déchirés et
8 c'est ce que vous avez vu, pour l'essentiel, lorsque vous avez mené vos
9 travaux d'exhumation. Qu'en est-il de cette fosse en Belgique ?
10 R. Nous savons, d'après le Régiment bavarois ou la Brigade -- je ne sais
11 pas très bien quels sont les termes militaires. Nous savons, d'après les
12 archives bavaroises, que les Allemands ont eu pour instruction d'enterrer
13 ces personnes avec le respect qui convient, et ce que nous avons trouvé
14 dans les cinq fosses c'était des corps qui avaient été posés côte à côte
15 sur deux étages et qui n'étaient pas disposés comme on le serait dans un
16 cercueil, à mon avis, en raison de la rigidité des corps parce qu'ils ont
17 été enterrés une semaine après avoir été tués. Donc, ils ont été organisés,
18 disposés dans la fosse avec un certain respect.
19 Q. Maintenant, vous vous souviendrez certainement au cours du dernier
20 procès il y a eu un contre-interrogatoire assez long qui a évoqué la
21 possibilité qu'il y ait des pertes en hommes au cours des combats. Quelle
22 est votre expérience à cet égard ? Est-ce que le fait d'avoir travaillé sur
23 cette fosse en Belgique a modifié la façon dont vous envisagez le reste de
24 votre travail ? Est-ce que vous avez changé d'avis par rapport à ce vous
25 avez fait en Bosnie ?
26 R. Non, je n'ai pas changé d'avis, mais je crois que je serais très
27 prudent -- je ne souhaite pas généraliser du tout. Frommel était un
28 cimetière militaire, en général. Cela ressemblait à ça parce qu'il
Page 5662
1 contenait des personnes qui s'étaient trouvées dans ces cimetières
2 militaires et cela ressemble à tout cimetière militaire. Mais il y a des
3 personnes en uniforme et des personnes avec des distinctions militaires, et
4 c'est ce que nous avons certainement vu à Frommel.
5 Q. Et est-ce que les Australiens ont tiré des conclusions à partir de ce
6 qui a été trouvé dans la fosse de Frommel ?
7 R. Oui. Il y avait des soldats britanniques également. Je pense qu'il y en
8 avait à peu près 250. Sur les 250, il y en avait 30 environ qui étaient
9 Britanniques. Le département australien de la Défense a mis en place un
10 programme de recherche d'ADN, demandant aux membres de la famille qui
11 connaissaient leurs ancêtres ou les membres de leur famille qui étaient à
12 Frommel, de donner des échantillons d'analyse d'ADN. Et le projet
13 consistait à les identifier -- après avoir fait cette demande d'ADN, nous
14 avons réussi à identifier 96 des 250 personnes qui ont été retrouvées. La
15 plupart ont été identifiées grâce à l'ADN.
16 Q. Avez-vous eu l'occasion de regarder ou de revoir ces études d'ADN qui
17 ont été faites assez récemment par l'organisation chargée des personnes
18 déplacées en ce qui concerne les sites que vous avez exhumés ?
19 R. Non, cela ne relève pas de mon champ de compétences, et je ne souhaite
20 par répondre à ce genre de questions. Je n'ai certainement pas revu cela.
21 Q. Très bien. Donc, la science de l'ADN est quelque chose qui permet
22 d'identifier les gens, par exemple, sur le site de Frommel, c'était quelque
23 chose que vous avez anticipé et que vous connaissiez fort bien entre 1998
24 et 1999 lorsque vous faisiez vos travaux ?
25 R. Non, je ne pense pas que cela s'appliquait de la même façon. On ne
26 procédait pas de la même façon. Je n'ai pas entendu parler d'un travail
27 important utilisant l'ADN sur cette échelle-là.
28 M. McCLOSKEY : [interprétation] Très bien. Merci, Professeur Wright.
Page 5663
1 Je crois que vous nous avez permis de jeter les bases pour un contre-
2 interrogatoire. Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le Président.
3 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur McCloskey.
4 Monsieur Tolimir, c'est à vous de contre-interroger maintenant.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
6 Je souhaite saluer toutes les personnes présentes dans le prétoire. Je
7 souhaite un bon après-midi à Monsieur Wright. Que la paix règne en cette
8 demeure et que la providence divine nous apporte la justice, non pas
9 conformément à mes désirs, mais selon la volonté de Dieu.
10 Est-ce que nous pouvons regarder le curriculum vitae de ce témoin, s'il
11 vous plaît. C'est la pièce P890. Nous allons regarder la page 1. Merci.
12 Contre-interrogatoire par M. Tolimir :
13 Q. [interprétation] On dit ici que vous êtes un collaborateur ou un
14 professeur travaillant pour le Centre d'études comparées sur le génocide.
15 Voici ma question : êtes-vous en mesure de parler brièvement du rôle de cet
16 institut, et quel est votre rôle dans cet institut ?
17 R. Oui. C'est quelque chose, en fait, qui est une inscription qui n'a plus
18 lieu d'être. Je crois que le Centre des études comparatives sur le génocide
19 à l'Université de Macquarie a fermé ses portes, en fait. J'ai beaucoup
20 travaillé avec eux, et l'Université de Macquarie se trouve en Australie.
21 J'ai beaucoup travaillé avec eux lorsque je travaillais sur les documents
22 que nous avons retrouvés après l'Holocauste. Ce qui les intéresse
23 essentiellement, c'est l'Holocauste juif, et j'ai travaillé avec eux à
24 l'Université de Macquarie, mais je n'ai aucun lien avec eux pour ce qui est
25 de mes travaux menés en Bosnie.
26 Q. Merci, Monsieur le Professeur. Je souhaite vous demander si vous étiez
27 un professeur associé travaillant dans ce centre avant d'avoir été engagé
28 dans vos travaux d'exhumation dans les fosses communes de Bosnie-
Page 5664
1 Herzégovine ou pas. Merci.
2 R. Il m'est difficile de m'en souvenir maintenant. Je crois que la réponse
3 est oui, en fait, j'étais un professeur associé et je travaillais dans ce
4 centre avant d'avoir été en contact avec le TPIY. Je crois que ces travaux
5 ont été menés en 1995, mais ma mémoire n'est pas très bonne sur ce point-
6 là.
7 Q. Merci, Monsieur le Professeur. Pouvez-vous nous dire ceci : étant donné
8 que vous faisiez partie d'un groupe de médecins défendant les droits de
9 l'homme, et basés à Boston, étiez-vous un membre de ce groupe et êtes-vous
10 intervenu au niveau de l'exhumation de masse des fosses communes en Bosnie-
11 Herzégovine précisément parce que vous étiez membre de ce groupe ?
12 R. Effectivement, je figurais sur la liste d'experts de ce groupe, mais
13 ils ne m'ont jamais demandé de travailler pour eux, et je n'ai jamais
14 travaillé pour eux. Donc ils ne m'ont pas demandé de travailler en Bosnie.
15 Q. Voici ma question suivante : avez-vous eu des problèmes au niveau
16 logistique; et si oui, quel genre de problèmes avez-vous eus ?
17 R. Eh bien, je dirais en guise de réponse initiale que toutes les fosses
18 communes donnent lieu à des problèmes d'ordre logistique qui doivent être
19 résolus, je ne pense pas à un problème en particulier. Est-ce que je peux
20 vous donner un exemple à titre d'illustration ? Pour ce qui est du barrage
21 de Petkovci, les engins de terrassement permettant de déplacer les rochers
22 étaient totalement inadaptés, et nous avons dû attendre et nous avons dû
23 louer une excavatrice à Tuzla et la faire venir jusque-là. Est-ce le genre
24 de question, Monsieur Tolimir, que vous me posez, question portant sur un
25 problème logistique ?
26 Q. Oui, tout à fait. C'est à cela que je pensais.
27 Et maintenant, pourriez-vous me dire si vous avez été soumis à une
28 quelconque pression au cours de vos travaux, à savoir que quelque chose
Page 5665
1 devait être terminé dans un laps de temps donné ou que vous deviez employer
2 une méthode particulière avec laquelle vous n'étiez pas d'accord lorsque
3 vous procédiez à ces exhumations ?
4 R. Pour ce qui est de la question des délais, oui, nous devions terminer
5 nos travaux dans un temps donné à cause de la sécurité qui était fournie
6 par la SFOR. Ceci n'a eu aucune incidence sur nos travaux. Nous avons
7 toujours terminé à temps, et j'en étais fort content.
8 Votre deuxième question -- pourriez-vous la répéter, s'il vous plaît ?
9 Q. Y a-t-il eu des cas où vous avez dû employer une méthode particulière,
10 méthode avec laquelle vous n'étiez pas d'accord, mais une méthode que vous
11 avait été imposée par d'autres personnes ?
12 R. Oui, je comprends votre question. Non, moi, j'estimais que j'avais un
13 contrat avec le TPIY et je devais faire le travail en fonction des critères
14 qui étaient les miens, que je considérais comme étant des critères
15 adéquats. J'ai évoqué avec les enquêteurs de temps en temps la façon dont
16 nos travaux évoluaient, et je n'ai subi de pression à aucun moment, hormis
17 le fait de me demander de travailler plus rapidement. Mais je n'ai pas
18 travaillé plus rapidement, et mon équipe non plus, donc, à mon sens, et je
19 vous donne un avis d'un professionnel, les travaux n'ont en rien été
20 touchés par une quelconque pression qu'on aurait pu exercer sur moi.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Professeur.
22 Est-ce que nous pouvons maintenant regarder la pièce 890 dans le
23 prétoire électronique. Est-ce que nous pouvons regarder la page 2 en
24 anglais ?
25 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Le Juge Mindua a une question à poser
26 au témoin.
27 M. LE JUGE MINDUA : Oui, Monsieur le Témoin -- excusez-moi, la Défense,
28 d'arrêter.
Page 5666
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5667
1 Parce que quand je regarde le CV du témoin, Monsieur le Témoin, vous
2 étiez dans la "Royal Air Force" de 1954 à 1956 ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.
4 M. LE JUGE MINDUA : Et pourquoi vous dites au transcript, page 15, ligne
5 15, que vous ne connaissez pas le terme militaire ? En l'occurrence, vous
6 ne savez pas distinguer le régiment d'une brigade, parlant de l'armée
7 allemande ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas si le groupe bavarois, en 1916,
9 était un régiment ou une brigade -- je ne sais pas comment cela
10 s'intitulait. Je n'ai pas étudié les aspects historiques de l'armée
11 allemande. Et au niveau de l'armée de l'air britannique, nous n'utilisions
12 pas ces termes de "régiment" et de "brigade", pour autant que je m'en
13 souvienne.
14 M. LE JUGE MINDUA : D'accord. Merci beaucoup.
15 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, poursuivez.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons regarder la pièce P890,
17 page 2 de l'anglais, s'il vous plaît. C'est ce document-là.
18 L'INTERPRÈTE : Veuillez remplacer "professeur associé" par "maître de
19 conférence". Merci.
20 M. TOLIMIR : [interprétation]
21 Q. Merci. Monsieur le Professeur, vous le voyez maintenant à l'écran.
22 Pourriez-vous, s'il vous plaît - merci - préciser pour nous quelque chose -
23 -
24 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que nous pouvons avoir la page
25 2 en B/C/S également, s'il vous plaît.
26 Pardonnez-moi. Veuillez poursuivre.
27 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
28 M. TOLIMIR : [interprétation]
Page 5668
1 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous préciser le rôle que vous avez
2 joué dans les exhumations qui ont été menées en Bosnie-Herzégovine ? On dit
3 ici que vous étiez directeur des excavations et des exhumations des fosses
4 communes à Serniki, en Ukraine, et que vous étiez archéologue au cours de
5 travaux que vous avez effectués au niveau des exhumations en ex-
6 Yougoslavie. Pourriez-vous nous expliquer la différence entre ces deux
7 fonctions ? Merci.
8 R. Je ne pense pas qu'il y ait de différence entre les deux fonctions. Le
9 terme de "directeur" et mon titre, qui était celui d'archéologue en chef,
10 ne sont pas contradictoires. Cela indique que j'étais responsable des
11 exhumations.
12 Q. Merci. Etiez-vous la personne qui était responsable en Ukraine et en
13 Bosnie-Herzégovine également ? Est-ce que nous pouvons déduire cela de
14 votre réponse ou non ?
15 R. Oui, j'avais le même rôle en Ukraine et en Bosnie-Herzégovine.
16 Q. Merci. Pourriez-vous me dire, Monsieur le Professeur, qui était votre
17 supérieur ? Qui était le chef de l'équipe lorsque vous avez effectué vos
18 travaux d'exhumation en Bosnie-Herzégovine ?
19 R. Moi, j'étais à la tête de cette équipe chargée des exhumations. J'étais
20 responsable des exhumations.
21 Q. Merci. Aviez-vous quelqu'un au-dessus de vous, hormis les représentants
22 du TPIY qui vous ont recruté pour faire ce travail ?
23 R. Je devais rendre des comptes au chef des opérations, qui était basé à
24 La Haye. Je crois que c'était son titre. Et la personne qui occupait ce
25 poste changeait de temps en temps. C'était la personne qui pouvait soit
26 m'embaucher soit me licencier.
27 Q. Merci, Monsieur le Professeur. Pourriez-vous nous dire si ce chef des
28 opérations, qui avait exercé ce rôle de supérieur hiérarchique, est-ce
Page 5669
1 qu'il pouvait vous donner des instructions contraignantes par rapport aux
2 travaux que vous effectuiez en Bosnie-Herzégovine et est-ce qu'il vous
3 donnait des directives ?
4 R. Au sens général du terme, simplement pour m'indiquer où je devais me
5 rendre, parce que je devais avoir l'appui nécessaire pour cela. Mais je ne
6 devais pas envoyer des rapports à cette personne, et je n'ai jamais reçu
7 des instructions sur la manière dont je devais effectuer mon travail. Le
8 chef des opérations venait nous rendre visite à intervalle régulier et il
9 venait me parler au sujet de mon travail, mais il ne venait pas me dire ce
10 que je devais faire.
11 Q. Merci. Etant donné que vous n'étiez pas obligé de remettre des rapports
12 ou de faire des rapports au chef des opérations, deviez-vous remettre des
13 rapports à quelqu'un d'autre ou accepter d'apporter des corrections à vos
14 travaux ?
15 R. Non, on ne m'a pas demandé de faire des corrections, de corriger mon
16 travail. J'estimais que j'étais un archéologue médico-légal sous contrat,
17 et si j'estimais que l'on s'immisçait dans mon travail, j'aurais donné ma
18 démission. J'avais pour ce faire cinq jours. Personne ne s'est immiscé dans
19 mon travail en Ukraine ni en Bosnie.
20 Q. Merci. Vous m'avez bien compris. Je souhaitais simplement recueillir
21 une réponse à ma question. Je souhaitais savoir s'il y avait une quelconque
22 immixtion dans la procédure, et vous avez répondu en disant : Non, personne
23 ne s'est immiscé dans les exhumations en tant que telles. Merci.
24 R. Est-ce que je peux simplement préciser un point ? Personne -- et nous
25 parlions de manière différente de faire les choses, mais mon opinion était
26 l'opinion prépondérante. J'ai expliqué ce que je faisais. Quelquefois on me
27 demandait de travailler plus rapidement, et on m'enjoignait à le faire.
28 Vous pouvez peut-être dire qu'il s'agit là d'immixtion, mais personne ne
Page 5670
1 m'a parlé de la façon dont je devais travailler. J'ai retrouvé les corps et
2 les éléments de preuve qui nous avaient été demandés au cours de nos
3 travaux à la vitesse à laquelle nous travaillions, et ceci a été accepté.
4 Q. Merci, Monsieur le Professeur, de votre explication.
5 Pourriez-vous nous dire qui était l'enquêteur en chef au cours de
6 cette période au Tribunal de La Haye, et quel rôle a-t-il joué dans ces
7 exhumations ? Merci.
8 R. Je crois qu'il faut un petit peu préciser les titres. L'enquêteur en
9 chef était, me semble-t-il, John Ralston à l'époque, mais les travaux sur
10 le terrain ne le concernaient pas. John Ralston était en charge des
11 enquêtes.
12 Mais si vous voulez parler de l'affaire sur laquelle je travaillais
13 lorsque je travaillais dans la fosse de Srebrenica, à ce moment-là c'était
14 M. Jean Ruez. C'était lui l'enquêteur sur place.
15 Q. Merci. Vous avez bien compris, je voulais parler de M. Jean-René Ruez.
16 C'est lui que j'avais à l'esprit, et je voulais vous demander quel rôle il
17 a joué au niveau de ces exhumations, s'il vous plaît. Si vous pouviez le
18 dire aux Juges de la Chambre.
19 R. M. Jean-René Ruez n'a jamais participé aux exhumations. Il venait
20 rendre visite aux personnes sur les sites, mais il n'a jamais fait partie
21 de l'équipe des personnes qui ont mené ces exhumations, qui était composée
22 de dix experts environ. Il ne prenait pas -- il ne participait pas aux
23 exhumations.
24 Q. Est-ce que cela signifie qu'il n'avait aucune influence quelle qu'elle
25 soit sur toute la procédure et tout le processus des exhumations ?
26 R. Non. Il me respectait comme un expert, mais il avait un rôle à jouer,
27 parce qu'il a dû décider, en partie, quels étaient les charniers qu'il
28 fallait excaver, et moi, je pouvais décider si l'exhumation était possible
Page 5671
1 ou pas. Mais si vous voulez, il fallait quand même prendre une décision.
2 Maintenant, sur la manière dont nous effectuions le travail, non, là il
3 n'intervenait pas. Il était un petit peu comme un visiteur sur le site.
4 Disons que je n'ai pas adapté mon travail en fonction de ce qu'il aurait pu
5 me dire, parce qu'il ne s'est pas mêlé de ça.
6 Q. Merci, Professeur. Est-ce que l'enquêteur en chef, M. Jean-René Ruez,
7 vous a donné des instructions contraignantes quelles qu'elles soient
8 concernant votre travail d'exhumation ?
9 R. Non, absolument pas, il ne m'a donné aucune instruction. De toute
10 façon, je n'aurais accepté aucune instruction de lui.
11 Q. Je vous remercie. Puisque vous aviez été contracté pour travailler à
12 plusieurs sites, qui vous remplaçait quand vous étiez sur un site plutôt
13 qu'un autre, que se passait-il sur les autres sites ? Que pouvez-vous nous
14 dire à ce sujet ?
15 R. Je n'ai jamais travaillé sur plus d'un site à la fois. J'avais une
16 équipe, et nous travaillions sur un seul site à la fois. En 2000, quand
17 j'ai pris un congé au moment du travail, c'est M. Fredy Peccerelli, du
18 Guatemala, qui m'a remplacé, mais nous ne travaillions que sur un charnier
19 à la fois.
20 Q. Merci. Est-ce que cela signifie que vous ne commenciez pas de travail
21 sur un charnier tant que vous n'aviez pas terminé le travail sur le
22 précédent -- enfin, terminé, à votre avis ?
23 R. Oui, nous n'avons pas commencé à travailler sur une nouvelle fosse
24 commune tant que nous n'avions pas exhumé tous les corps du charnier sur
25 lequel nous travaillions. La seule exception, et ce n'est pas vraiment une
26 exception, disons nous avons fait des sondages sur ces fosses secondaires
27 suspectes. Nous avons fait des tests pour voir s'il y avait des corps, mais
28 nous n'avons pas fait d'exhumations. Donc ça, c'était pendant que nous
Page 5672
1 faisions des exhumations sur un site donné, mais nous n'avons jamais fait
2 d'exhumations sur plusieurs sites à la fois.
3 Q. Merci. Donc si j'ai bien compris -- non, attendez, je vais poser la
4 question, et vous allez me répondre.
5 Vous étiez également responsable de la détection des charniers, de la
6 coordination des procédures d'exhumation, et comme vous l'avez dit, un seul
7 site à la fois. Mais est-ce que votre responsabilité couvrait également
8 l'analyse des objets retirés de ces charniers ?
9 R. Non, pas l'analyse des objets. Une observation -- observation du genre
10 d'objets qu'on avait trouvés avec enregistrement dans le registre, mais pas
11 d'analyse. Non. Nous avons fait des observations sur les corps, mais
12 seulement des observations, et sur les objets, seulement des observations,
13 parce qu'il nous fallait tenir un registre avec nos observations. Mais nous
14 n'avons pas passé de temps à étudier. Il y a une chose particulière que
15 nous avons faite qui, on pourrait dire, était "étudier", mais enfin bon,
16 quand nous avons trouvé des portefeuilles, nous les avons ouverts pour voir
17 des deux côtés, parce que souvent un portefeuille contenait des photos qui
18 étaient immédiatement visibles, photos de la personne -- disons
19 photographie d'une personne, pas nécessairement de la personne qui était
20 propriétaire du portefeuille, et si nous trouvions ça, nous prenions une
21 photo, parce qu'il y avait un risque qu'une fois que les photos aient été
22 exposées à l'air et à l'oxygène, qu'elles se détériorent. Et donc, si nous
23 avions tout laissé au personnel de la morgue, ils auraient pu récupérer des
24 objets ou des documents qui auraient été abîmés. Donc nous avons pris des
25 photos à ce moment-là, et pour ce qui est du registre des personnes
26 disparues de la Croix-Rouge - je ne sais pas quel est son titre exact - on
27 regardait également si ces personnes se trouvaient sur ce registre de la
28 Croix-Rouge. Et je faisais un rapport pour essayer de décrire le contexte
Page 5673
1 général du travail, puis pour voir si ces personnes appartenaient à la
2 liste des personnes disparues de la Croix-Rouge. Vous pourriez appeler ça
3 un examen, mais ce n'était pas vraiment cela. Nous n'avions pas beaucoup de
4 temps et nous n'avions de toute de façon pas les compétences pour procéder
5 à ces examens. Nous avons laissé cela aux enquêteurs.
6 Q. Merci, Professeur. Je ne voulais pas vous interrompre. Ma question ne
7 concernait pas la manière dont les analyses étaient faites, mais simplement
8 comment vous pouviez, disons, vous assurer que les exhumations, y compris
9 celles d'objets, étaient faites de manière sûre. Et pour les questions de
10 sécurité, est-ce qu'il y avait quelqu'un d'autre qui faisait cela pour vous
11 ?
12 R. Est-ce que vous parlez de la sécurité des objets et des corps pour être
13 sûr que personne ne pourrait interféré avec cela ou est-ce que vous parlez
14 de notre sécurité à nous en tant qu'archéologistes [phon] et travaillants
15 sur les sites ?
16 Q. Merci. Non, non, mon assistant me dit que je n'ai pas très correctement
17 traduit. Je parlais de la sécurité des corps et des objets trouvés, c'est-
18 à-dire pour s'assurer que les corps et les objets soient bien conservés
19 pour pouvoir être examinés correctement après.
20 R. Oui, c'est bien comme ça j'avais compris au départ.
21 Sur tous les sites, nous avons eu un officier de police qui était un
22 expert dans ce qu'on appelle la chaîne de conservation qui notait tous les
23 objets dans un registre, ensuite ils étaient placés dans une housse
24 scellée, qui ensuite était placée dans un camion fermé à clé, camion
25 réfrigéré d'ailleurs pour empêcher la détérioration à la fois des corps et
26 des objets. Donc il y avait bien un agent de la police scientifique qui
27 supervisait les travaux et qui s'assurait qu'ils étaient bien transportés
28 comme il fallait.
Page 5674
1 Q. Merci. Est-ce que vous étiez responsable de l'ensemble du processus
2 d'excavation et pour la synchronisation de toute cette procédure que vous
3 nous avez expliquée ?
4 R. Oui. Je prenais conseil auprès de l'agent de la police scientifique
5 pour savoir quelle était la séquence des événements appropriée, mais si je
6 voyais que la procédure n'était pas appliquée, j'aurais dû faire quelque
7 chose. Mais je ne serais certainement pas intervenu auprès des agents de la
8 police scientifique, qui, pour autant que je puisse en juger, faisaient
9 très correctement leur travail.
10 Q. Je vous remercie. Pouvez-vous expliquer ceci en nous donnant un
11 exemple, pour que ça soit bien clair pour nous ?
12 R. Bon. Supposons qu'on soit en train d'examiner un charnier et un
13 archéologue fait état de la découverte d'un portefeuille; pas auprès d'un
14 corps, mais juste comme ça, un portefeuille. La position de ce portefeuille
15 -- pour vous donner un exemple, la position de ce portefeuille était
16 enregistrée, l'agent de la police scientifique allait lui donner un numéro
17 de référence -- dans notre registre c'était "A" pour les objets, en anglais
18 "Artefact," donc la lettre A pour ces objets. Ensuite, l'agent de la police
19 scientifique prenait possession de l'objet, le mettait dans un sac spécial,
20 une housse, notait tous les détails dans le registre et mettait cette
21 housse dans le camion fermé à clé. Et ensuite, tous les corps et tous les
22 objets étaient envoyés à la morgue de Visoko dans ce camion scellé.
23 Donc c'était l'agent de la police scientifique qui donnait un numéro --
24 j'ai oublié le photographe. Parce que le photographe prenait une photo
25 avant que les objets ne soient déplacés. Donc l'archéologue notait où
26 l'objet avait été trouvé et le photographe prenait une photo de l'objet
27 avant qu'il soit déplacé. Ensuite, l'agent de police scientifique prenait
28 possession de l'objet, le notait dans le registre, le mettait, ensuite dans
Page 5675
1 un endroit sécurisé, et puis, à intervalle régulier, il y avait
2 transmission officielle de ce matériel à la morgue de Visoko.
3 Q. Merci, Professeur, de cet exemple.
4 Est-ce que vous pouvez nous donner un exemple de cas où vous vous êtes
5 rendu compte que quelque chose ne fonctionnait pas comme il fallait ? Vous
6 avez donné, par exemple, donné exemple de ce portefeuille dont vous ne
7 saviez pas à qui il appartenait. Est-ce qu'il y a un exemple de difficulté
8 que vous auriez rencontrée ou de procédure qui ne se serait pas passée de
9 la manière prévue ?
10 R. Général Tolimir, qu'est-ce que vous entendez par "quelque chose qui ne
11 se serait pas passé comme il fallait". Je ne comprends pas exactement ce
12 que vous voulez dire. Qu'est-ce qui aurait pu mal se passer ?
13 Q. Alors, je vais préciser ma pensée. Vous venez de nous donner un exemple
14 de la manière dont le travail était censé être fait. Or, dans votre
15 travail, vous êtes-vous trouvé dans des situations où les choses n'étaient
16 pas faites comme il fallait, et donc il fallait prendre des mesures
17 correctives pour que la procédure soit réalisée de manière correcte, et que
18 cela aurait eu une incidence sur votre travail ?
19 R. Non, je ne me souviens pas d'erreur qui porte à conséquence pour
20 l'intégrité des éléments de preuve. Il y a peut-être eu des petits
21 incidents, mais tout à fait secondaires par rapport au protocole. Mais de
22 toute façon, le protocole était indiqué à tous les travailleurs sur le
23 site. Je ne sais pas s'il y a eu des non-respects de ce protocole
24 systématiques ou des erreurs qui aient eu des conséquences -- je ne sais
25 pas.
26 Q. Je vous remercie, Professeur. Pouvez-vous me dire maintenant si vous
27 étiez responsable - ou si ce n'était pas vous, qui était responsable - de
28 la détermination des circonstances du décès pour les corps que vous avez
Page 5676
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5677
1 trouvés dans les charniers ?
2 R. La responsabilité de la détermination des circonstances du décès ne se
3 faisait pas sur le site, mais à la morgue, par les pathologistes. Alors, je
4 ne suis pas expert et -- bon, des fois, j'aurais pu voir de quelle manière
5 les gens semblaient avoir été tués, mais de toute façon, ce n'était pas ma
6 responsabilité. Ce n'était pas mon travail.
7 Q. Merci, Professeur. Je vous ai demandé cela compte tenu de l'exemple que
8 vous avez donné de votre examen où vous avez dit que des individus avaient
9 été assassinés parce qu'ils avaient les mains liées, ils avaient les yeux
10 bandés, et je voulais savoir si cela avait été déterminé sur le site ou à
11 la morgue. Mais vous avez répondu à ma question. Je vous remercie.
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, est-ce que c'était
13 une question ?
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Non, je suis satisfait de la réponse du
15 professeur. J'ai juste expliqué pourquoi j'avais posé la question, parce
16 que ça concernait ce qu'il avait dit dans l'interrogatoire principal. Et je
17 voulais savoir s'il a des commentaires à ce sujet. Sinon, ça va.
18 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pas besoin d'explication. Je voulais
19 simplement vous demander si cela était une question. Vous avez dit non,
20 donc je dis : Continuez.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
22 M. TOLIMIR : [interprétation]
23 Q. Pouvez-vous nous dire si vous rédigiez vos rapports et analyses au
24 cours des exhumations ou seulement les rapports que nous avons vus ici
25 comme éléments de preuve ?
26 R. Je n'écrivais pas de rapports pendant le travail. Nous remplissions le
27 registre pour tous les éléments, et ensuite nous les transmettions à la
28 morgue, mais je n'écrivais pas de rapports intérimaires, à l'exception du
Page 5678
1 cas de la fosse commune 1 à Glogova.
2 Q. Merci. Nous avons votre commentaire sur la question que je vais vous
3 poser. Les rapports qui ont été présentés ici et versés au dossier, sur
4 quelle base est-ce que vous les avez rédigés ? Est-ce que c'étaient des
5 notes, des analyses que vous avez faites à l'époque au moment des
6 exhumations, ou est-ce que vous avez d'autres bases de rapports ?
7 R. Je sais ce que vous voulez dire. Oui, bien sûr, pendant mon travail sur
8 le site, je gardais des notes personnelles, et ensuite j'étais aidé dans la
9 rédaction des rapports par les registres, les photographies. Ça me
10 permettait d'écrire mes rapports. Mes rapports étaient assez brefs, et
11 c'étaient plus des explications, si vous voulez, des photographies et des
12 registres. C'étaient des feuilles de données par corps -- dont j'ai donné
13 d'ailleurs un exemple. Je pense que dans la plupart des rapports qui
14 étaient remplis par mon équipe -- j'avais ces documents remplis par mon
15 équipe pour rédiger mes rapports. Je ne pense pas qu'il y ait eu autre
16 chose.
17 Q. Merci. Dans tous les rapports, il y a un protocole sur la procédure
18 d'exhumation. Dites-moi, s'il vous plaît, s'il y a un protocole qui
19 s'appliquait à toutes les exhumations ou des protocoles différents pour les
20 différentes exhumations ?
21 R. La réponse à votre question, c'est oui. Il y a eu différents
22 protocoles, parce qu'ils ont évolué en fonction des besoins que nous
23 déterminions, et donc ils variaient légèrement d'une année à l'autre. Et le
24 protocole final que j'ai rédigé et que l'équipe devait étudier, ce
25 protocole final est celui que nous avons utilisé à Glogova en l'an 2000. Il
26 y a des petites différences.
27 Si je peux expliquer. Au début du travail, nous étions trop ambitieux,
28 parce que nous voulions photographier, par exemple, toutes les douilles que
Page 5679
1 nous avions trouvées. Or, à la fin du travail, on ne les photographiait
2 pas. On les notait simplement, on les enregistrait. Voilà le genre de
3 différences. Ça nous a permis de continuer notre travail sans évidemment
4 remettre en cause la qualité des éléments de preuve.
5 Q. Je vous remercie, Professeur. La procédure d'exhumation était envisagée
6 à l'avance, n'est-ce pas, mais il y a eu des modifications au fur et à
7 mesure du déroulement des travaux; est-ce que vous pouvez nous donner des
8 exemples ? Merci.
9 Attendez, je vais dire les choses simplement : y a-t-il eu des cas où
10 vous avez dû vous éloigner du protocole ou de la procédure au cours de
11 l'exhumation, où vous avez dû modifier cette procédure ? Merci.
12 R. Nous avons fait des modifications à la procédure d'exhumation; qui est,
13 au sens strict, le retrait des corps, mais je ne suis pas sûr -- je ne me
14 souviens pas qu'il y ait eu des modifications du protocole. Si vous me le
15 permettez, je vais expliquer.
16 La procédure générale c'est d'enlever les corps qui ont des tissus mous et
17 de les enlever le plus tôt possible, parce qu'ils se décomposent, et donc
18 il y a une perte d'éléments de preuve dès qu'ils sont exposée à l'oxygène.
19 Par conséquent, on avait tendance à les extraire, les enlever un à la fois,
20 donc nous pouvions regarder le corps que nous exhumions de manière à voir
21 quelle était sa relation, sa position par rapport aux autres corps dans le
22 charnier.
23 A Kozluk, nous avons fait un changement à un endroit, parce que nous nous
24 sommes rendu compte que nous avions une seule couche de corps allongés à la
25 surface. Et il y avait une quinzaine de corps qui apparaissaient, et nous
26 avons pensé qu'il était nécessaire de les garder tous ensemble pour faire
27 une photographie pour montrer à quoi ça ressemblait avant qu'ils soient
28 recouverts de terre.
Page 5680
1 Alors, est-ce que c'était une violation du protocole ou un changement du
2 protocole, je ne pense pas que ça ait été une violation, mais ça a été le
3 seul changement par rapport à la règle générale qui veut que l'on enlève le
4 corps dès qu'on la trouvé et que l'on établit la relation entre les corps
5 dans l'étude en trois dimensions qu'on faisait. A Kozluk, à un endroit, on
6 a laissé les corps exposés et nous avons, si vous voulez, exhumé plus d'un
7 corps à la fois quand nous nous sommes rendu compte qu'il n'y avait qu'une
8 seule couche. Mais c'est le seul changement auquel je pense.
9 Q. Mon assistant juridique me dit qu'en page 31, vous avez dit 15 corps,
10 et la transcription parle de 50 corps, ligne 21. Donc --
11 R. Non, non. Non, ce n'est pas ça. Je parle de Kozluk, et vous n'avez pas
12 besoin de me renvoyer à mon rapport. Il s'agit de 15 corps. 1-5, et pas 5-
13 0. Alors où est-ce que c'est dans le compte rendu d'audience ?
14 Q. Merci. C'était donc un problème d'interprétation qui est maintenant
15 corrigé. Merci.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous maintenant afficher la pièce à
17 conviction P872 au prétoire électronique, c'est le rapport de M. Wright sur
18 les exhumations effectuées en Bosnie orientale en 1998, et daté du 12 mai
19 1999.
20 Vous le voyez ici au prétoire électronique.
21 M. TOLIMIR : [interprétation]
22 Q. Ma question concerne la page de couverture. Les exhumations ont été
23 faites en 1998 selon ce qu'affirme le titre, la date en bas de page c'est
24 le 12 mai 1999. Donc c'est la date à laquelle vous avez enregistré votre
25 rapport ?
26 R. C'est la date à laquelle j'ai soumis le rapport au TPIY. C'est la date
27 à laquelle je l'ai terminé.
28 Q. Merci. Y a-t-il un autre élément qui nous parlerait de la différence
Page 5681
1 entre le moment où les exhumations ont été effectuées et la période de cinq
2 mois qui nous sépare de la présentation du rapport ? Est-ce qu'il y a une
3 autre raison à cela, une autre raison que des raisons purement formelles,
4 donc le temps qu'il a fallu pour rédiger le rapport, et cetera ?
5 R. Je n'arrive plus à me rappeler de manière très précise quelle en est la
6 raison. Je suis venu au TPIY je pense en février 1999 pour étudier les
7 photographies, pour relire les registres, puis je suis revenu à Sydney où
8 j'ai finalisé mon rapport. Je ne me souviens pas si j'ai fait autre chose
9 pendant cette période-là. Je ne vois pas de raison particulière qui
10 expliquerait ce délai.
11 Q. Merci. Vous avez travaillé en Ukraine, alors pouvez-vous nous dire si
12 là-bas également il s'est présenté une situation spécifique, ou plutôt le
13 même type de situation spécifique, à savoir que vous rédigiez votre rapport
14 plusieurs mois ou plusieurs années plus tard ?
15 R. Non, Général Tolimir, je ne pense pas que j'aie jamais rédigé un
16 rapport plusieurs années plus tard. Mais s'il y a une raison qui me vient à
17 l'esprit maintenant, c'est que nous n'étions pas en mesure d'évaluer
18 exactement combien il y avait de corps dans chacune des fosses communes.
19 C'est un travail qui a été fait à la morgue, et une fois que j'avais
20 terminé mon travail. Vous verrez que je fais figurer dans mon rapport des
21 appréciations du nombre de corps que j'ai reçus de la part de la morgue.
22 Donc c'est peut-être la seule raison pour laquelle je n'ai pas pu terminer
23 mon rapport plus rapidement. Peut-être que je souhaitais avoir d'abord la
24 fin des travaux faits à la morgue. Sinon, je me souviens que le TPIY a
25 accepté que je rende mon travail en mai.
26 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, nous allons devoir
27 faire la première interruption maintenant. Nous devons prendre de nouvelles
28 bandes d'enregistrement. Donc pour des raisons techniques, nous allons
Page 5682
1 faire une pause, et nous reprendrons à 16 heures 15.
2 --- L'audience est suspendue à 15 heures 48.
3 --- L'audience est reprise à 16 heures 19.
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, vous avez la
5 parole.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 M. TOLIMIR : [interprétation]
8 Q. Ma question suivante, la voici. Les contenus des rapports rédigés par
9 vous sur l'Ukraine ont-ils été présentés sous un format différent que ce
10 que vous avez fait pour les charniers de Bosnie-Herzégovine, ou bien est-ce
11 une présentation identique ? Merci.
12 R. Dans le cas de l'Ukraine, j'ai rédigé un rapport très bref sous forme
13 de déclaration. Il ne correspond pas à la forme des rapports qui ont été
14 rédigés par moi pour le TPIY. Les rapports ukrainiens ne comportaient que
15 deux ou trois pages avec les observations les plus importantes que j'avais
16 à faire, donc il y a une différence.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Professeur.
18 A présent, je demanderais que l'on affiche la page 8 de ce document
19 en serbe. En anglais, ce sera la page 7, s'il vous plaît, de ce document
20 qui est déjà à l'écran. Merci. J'ai demandé la page 7 en anglais, s'il vous
21 plaît. Il faut tourner la page. Merci. En serbe, ce sera la page 6. La page
22 précédente. Tournez la page, s'il vous plaît, revenez en arrière. Merci.
23 Excusez-moi, c'est plutôt la page 8 qu'il nous faut. J'ai dû faire une
24 erreur. Donc la page qu'on voyait s'afficher avant.
25 M. TOLIMIR : [interprétation]
26 Q. Vous avez la page en anglais, c'est la bonne page. Est-ce que vous
27 pouvez nous expliquer ce que vous entendez par des "charniers sondés".
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous n'avons pas la bonne page. Nous
Page 5683
1 avons bien la page 8, mais elle ne correspond pas à la page qui s'affiche
2 en B/C/S. Il faudra nous donner la référence exacte. Autrement, le témoin
3 ne pourra pas commenter.
4 Maître Gajic.
5 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, comme M. Tolimir vient
6 de le dire au tout début, ce sera en serbe la page 8. C'est affiché au tout
7 début à l'écran. Voilà, parfait.
8 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Gajic.
9 Monsieur Tolimir.
10 M. TOLIMIR : [interprétation]
11 Q. Voilà, nous voyons l'endroit où vous parlez, ce chapitre CR01, d'une
12 fosse:
13 "…qui aurait été sondée le 16 juin 1998."
14 J'aimerais que vous nous expliquiez à quoi renvoie ce terme, qu'est-ce que
15 cela signifie, sonder un charnier ? Merci.
16 R. Je comprends votre question, Général Tolimir.
17 Tout d'abord, je souhaite vous dire que nous avons exhumé sept fosses. Mais
18 sur les images aériennes que nous avions en notre possession, nous avons vu
19 que le sol a été remué à plusieurs autres endroits, et sur 21 de ces sites,
20 nous avons pu, effectivement, détecter des bordures de charniers, et nous
21 avons enlevé la terre jusqu'à ce qu'on ait trouvé au moins des restes de
22 deux individus, et ils étaient généralement près de la surface. C'est ce
23 que nous avons qualifié de "sondage". Donc on n'introduit pas une sonde,
24 mais on se sert d'une excavatrice pour voir si, là où la terre a été
25 remuée, il y a des corps qui sont ensevelis, et quand je parle de corps, je
26 parle plus d'un corps, deux ou davantage. Mais on ne les a pas enlevés, ces
27 corps. Nous avons rempli de nouveau les fosses créées avec de la terre et,
28 bien sûr, ce sont des endroits qui sont enregistrés dans le rapport rédigé
Page 5684
1 par moi en 1999.
2 Je ne sais pas si ma réponse vous satisfait ?
3 Q. Votre réponse est claire. Mais j'aimerais savoir si au moment où on
4 sonde une fosse, l'on peut perturber, par exemple, les restes d'un corps,
5 un squelette ? Est-ce qu'il est possible que l'on interfère avec la
6 position d'un corps ? Peut-être que vous nous en parlerez plus en détail.
7 R. Tout d'abord je dois dire que j'étais toujours présent sur place, donc
8 je pouvais voir sur-le-champ si l'excavatrice était en train d'enlever des
9 parties ou de déranger des vêtements. Parce qu'en principe, tout d'abord,
10 vous trouvez des vêtements avant de détecter un corps. Donc il y a un
11 risque d'endommager des corps. On peut, par exemple, casser un os en
12 faisant cela. Mais celui qui était en train d'utiliser l'excavatrice était
13 quelqu'un qui avait une très grande expérience, donc il pouvait tout de
14 suite savoir si le godet touchait quelque chose de dur ou s'il touchait
15 juste la terre molle. Donc, généralement, je dois dire que nous n'avons pas
16 cassé ni brisé quoi que ce soit, pas de manière importante.
17 L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, peut-on afficher la page 17, s'il vous
18 plaît, en serbe de ce même document au prétoire électronique. En anglais,
19 la page correspondante sera la page 15, s'il vous plaît. Nous aimerions
20 maintenant nous pencher sur les définitions des "parties de corps".
21 M. TOLIMIR : [interprétation]
22 Q. En attendant que cela s'affiche, Professeur, pourriez-vous nous dire
23 qui avait la responsabilité de déterminer le nombre minimum de corps qui
24 étaient contenus dans telle ou telle fosse. Etait-ce une évaluation qui
25 était fait in situ ou est-ce que c'est une tâche qui était effectuée d'une
26 autre manière ? Merci.
27 R. Je voudrais vous parler de ce que j'ai fait en Ukraine pour répondre à
28 cette question.
Page 5685
1 Donc en Ukraine, nous étions en mesure de savoir exactement quel est
2 le nombre de corps qui se trouvaient sur place. Tous les os étaient en
3 position parce qu'on n'a pas remué les charniers.
4 Mais la situation que j'ai trouvée avec les charniers en Bosnie,
5 c'est qu'on trouvait des parties corporelles qui n'étaient pas rattachées
6 au corps, par exemple, des jambes qui n'étaient pas rattachés au corps, ou,
7 par exemple, des pieds chaussés. En particulier, c'est le cas de fosses
8 secondaires, nous avions des problèmes à évaluer le nombre d'individus, et
9 nous n'avons même pas essayé d'évaluer le nombre parce qu'il y avait le
10 risque de doublons, donc de compter par deux fois des individus dont les
11 corps avaient été disloqués. Donc ce processus d'évaluer le nombre
12 d'individus, il a été laissé aux personnes qui ont fait des examens à la
13 morgue. J'avais une idée en gros, mais pas une idée précise. Je me suis
14 fondé sur les évaluations de la morgue.
15 Q. Très bien. Mais puisque que toute partie corporelle - une jambe, un
16 bras - est qualifiée de "corps", est-ce que cela veut dire que c'est après
17 les examens menés à la morgue qu'on a pu établir définitivement ce que cela
18 signifiait ? Comment on a pu identifier exactement à quel corps
19 correspondaient les différentes parties corporelles, donc n'était-ce pas
20 quelque chose qui était fait en définitive à la morgue ? En fait,
21 j'aimerais savoir si les parties disloquées d'un corps étaient qualifiées
22 de corps dans votre rapport ?
23 R. Nous avons respecté un protocole, et il est précisé pour les différents
24 sites, donc nous avions trois catégories que nous enregistrions dans le
25 registre. La première catégorie est constituée par des corps, à savoir le
26 corps d'un individu est représenté suffisamment pour qu'on puisse savoir
27 qu'il s'agit d'un corps. Puis après, nous avons une deuxième catégorie qui
28 recouvre des "parties corporelles", à savoir la catégorie qui figure sous
Page 5686
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5687
1 les initiales "BP", et là il pouvait s'agir d'un avant-bras, d'une jambe,
2 mais là on ne comptait pas ces parties corporelles comme étant des corps.
3 Ils constituent une catégorie distincte.
4 En plus, il nous est arrivé de ne trouver qu'un os, par exemple,
5 faisant partie du pied, et ces os n'étaient pas rangés dans la catégorie
6 parties corporelles.
7 Ils étaient simplement placés dans un sac où nous regroupions des os
8 séparément, mais pas des parties corporelles. Donc vous avez une
9 distinction entre ces deux catégories dans notre registre.
10 Q. Si je vous pose la question, c'est parce que dans certains rapports qui
11 sont présentés devant ce Tribunal, il apparaît qu'un individu qui a été
12 identifié dans plusieurs charniers est enregistré plusieurs fois, et on
13 fait apparaître cela comme correspondant à deux individus au lieu d'une
14 seule personne. Alors, est-ce que vous pouvez nous expliquer comment est-ce
15 que cela a pu être évité ? Comment est-ce qu'on peut éviter cela pour ne
16 pas avoir des problèmes plus tard au moment de la rédaction du rapport ?
17 Merci.
18 R. Dans les rapports dont je suis auteur moi-même, à savoir mes rapports,
19 dans ce document que nous avons sous les yeux, par exemple, je ne
20 m'aventure pas dans l'évaluation du nombre de corps. C'est l'information
21 que j'ai reçue de la morgue. Nous avions la responsabilité de garder
22 séparément les parties corporelles qui ont été trouvées séparément; donc
23 c'était tout à fait clair, si on trouve un bras ou une jambe séparément, on
24 n'en déduisait pas que ces parties corporelles appartenaient au même
25 individu. On les appelait parties corporelles et on les envoyait comme
26 telles à la morgue.
27 C'est là que s'arrête ma responsabilité, je ne sais pas après comment on
28 procède à la morgue. J'y suis allé deux ou trois fois, mais je n'ai pas
Page 5688
1 travaillé à la morgue moi-même; donc j'y suis allé juste pour voir de loin
2 comment ils travaillaient.
3 Q. Merci.
4 R. Page 32, vous trouvez des chiffres mais qui ne viennent pas de moi. Ce
5 sont des évaluations qui ont été fournies par ceux qui ont travaillé à la
6 morgue.
7 Donc prenons la page 32 en anglais.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la page 32, s'il
9 vous plaît, pour que tout le monde puisse la voir pendant que le témoin est
10 en train de parler de cela.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait. C'est la page correspondante
12 en anglais. Est-ce que je peux continuer ?
13 Donc nous avons ici un tableau, mais qui ne reprend pas mes chiffres. Je
14 n'ai pas moi-même fait le décompte des individus. C'est ce que nous avons
15 obtenu de la morgue à partir du moment où ils ont examiné ce que nous leur
16 avions envoyé initialement.
17 M. TOLIMIR : [interprétation]
18 Q. Très bien. Je vous remercie. Est-ce que vous avez d'autres commentaires
19 à formuler au sujet de ce qui figure ici, puisque vous n'en êtes pas
20 l'auteur, quelque chose qui ne correspond pas à la manière dont vous auriez
21 vous-même présenté ce problème ? Merci.
22 R. Excusez-moi, je vais vous demander de bien vouloir me préciser cette
23 question. Je n'ai pas compris votre question telle qu'elle m'a été
24 traduite.
25 Q. Merci. Vous venez de nous dire que les données qui figurent dans ce
26 tableau ne viennent pas de vous, le tableau qui s'affiche sous nos yeux.
27 Donc est-ce que vous avez vous-même votre manière de faire, votre style ou
28 votre manière de travailler, qui aurait produit une présentation différente
Page 5689
1 ?
2 R. Je comprends ce que vous voulez que je vous dise maintenant.
3 Il s'agit de mon tableau. J'ai parlé avec M. Briber, et je lui ai dit :
4 Nous avons exhumé ces sept charniers secondaires, et nous avons envoyé des
5 restes à la morgue. Comment pouvez-vous évaluer le nombre d'individus ? Et
6 ensuite, j'ai fait figurer cela dans ce tableau. Je ne peux pas vous
7 formuler de commentaires sur la méthode puisque le travail à la morgue qui
8 permettait d'arriver à ces chiffres ne relevait pas de moi. Je ne me suis
9 pas occupé de cela. J'ai simplement présenté les chiffres que j'ai obtenus
10 d'eux.
11 Q. Merci. J'ai compris.
12 Mais avant de vous poser ma question suivante, j'aimerais savoir si
13 l'expression "parties corporelles" est une expression que vous avez fixée
14 avant de procéder aux exhumations, ou est-ce que c'est en cours de route
15 que vous avez décidé d'employer ce terme ?
16 R. Il m'est difficile maintenant de me souvenir de cela, mais je pense que
17 c'était probablement en 1997 lorsqu'on a mené des excavations à Brcko, ce
18 qui n'a rien à voir avec l'espèce, mais là, nous avons rencontré ce
19 problème de charniers remués, et nous avons trouvé des membres disloqués.
20 Et en 1997, je pense, nous avons dû décider de catégoriser les restes pour
21 opérer une distinction entre les corps et les parties corporelles. Je pense
22 que c'est cela que nous avons fait, de mémoire, en 1997, puis nous avons
23 continué en 1998 à appliquer cela.
24 Q. Je vous remercie. Lorsqu'on lit votre rapport, il y a des endroits qui
25 ne sont pas tout à fait clairs précisément lorsqu'il s'agit de ces
26 différences, à savoir à partir de quel moment un groupe de restes humains
27 est considéré comme constituant un corps et à partir de quel moment cela
28 rentrera dans la catégorie de parties corporelles ?
Page 5690
1 R. Je pense que j'en ai parlé dans mes protocoles. Je n'ai pas ici mon
2 exemplaire du rapport. Si je pouvais juste vérifier si j'ai annexé les
3 protocoles au rapport.
4 En anglais -- ce sera la page 13, je ne définis pas ce qui constitue
5 un corps entier -- en fait, je parle de ce qui constitue un corps entier et
6 je parle de parties corporelles. Un corps complet est celui qui comporte
7 suffisamment d'os pour être certain que l'on ne peut pas le confondre avec
8 une autre partie d'un corps. En d'autres termes, si nous avons plus de 50 %
9 d'os, là, nous sommes quasiment certains d'avoir un corps complet. Si nous
10 avons moins de la moitié des os, là, nous sommes exposés au risque de dire
11 qu'il s'agit d'un individu alors que nous avons deux individus. Donc, nous
12 devons être certains d'avoir plus que la moitié des os. Mais je suis
13 d'accord pour dire que je ne précise pas la nature des protocoles.
14 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Professeur, est-ce que vous pouvez,
15 s'il vous plaît, vous pencher sur la page qui est à l'écran. Est-ce que
16 c'est bien la page dont vous parlez ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la page 13 ? Non, ce n'est pas de cette
18 page-là que je parle. Oui. Si, je parle de la page 13 en anglais lorsque je
19 parle de corps qui est complet et comment il faut procéder avec.
20 Donc, il y a un formulaire qui est rempli pour préciser quelles sont
21 les parties du corps qui ont été identifiées. Vous trouverez un exemple.
22 Page 37 de la version anglaise.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Pour que l'on puisse plus aisément consulter
24 cette page, est-ce qu'on peut l'afficher, s'il vous plaît, et pour aider le
25 témoin.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas la bonne page. C'est la page
27 précédente.
28 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
Page 5691
1 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici, vous voyez la personne qui s'est occupée
2 à l'excavation de ce corps dans la fosse secondaire de Zeleni Jadar 5, et a
3 répondu à certaines questions, à savoir si le corps a été analysé, la
4 manière dont le corps gît, à savoir si le corps est allongé ou s'il est
5 replié ou mélangé, et différentes observations, et en bas vous voyez un
6 petit croquis qui vous donne une idée de la position du corps. Et on voit
7 ce qui s'y trouve et ce qui manque. Cela est plus visible -- je n'ai pas
8 d'exemples à vous citer de mon rapport, mais c'est plus visible au niveau
9 des photographies qui ont été prises de chaque corps. Ici, sans hésitation,
10 je vous dirais que la personne qui a dit qu'il y avait un corps à la page
11 37 a raison. S'il n'y avait eu qu'une jambe, un bras ou deux jambes, à ce
12 moment-là, il y aurait eu l'intitulé "partie de corps", et ces feuilles
13 d'information n'auraient pas été remplies.Donc, ces feuilles d'information
14 vous donnent une idée générale du nombre de corps, mais c'est l'analyse
15 finale, comme vous l'avez indiqué, qui est importante, et ceci devra être
16 fait après. Quelles parties de corps appartiennent à quel corps, c'est
17 quelque chose qu'il devra être effectué par la suite. Je suppose que la
18 question que vous m'avez demandée à propos des résultats d'ADN, c'était
19 dans le cas où un corps a été retrouvé de façon incomplète et déplacé d'une
20 fosse primaire. Nous avons trouvé des exemples à Kozluk, par exemple,
21 lorsque la jambe gauche d'une personne avait été enlevée lorsque la fosse a
22 été remuée, mais le reste du corps s'y trouvait encore. Il y a beaucoup
23 d'explications à fournir sur la présence, en fait, des parties de corps qui
24 sont liées entre elles, au vu des analyses d'ADN, mais proviennent de sites
25 différents.
26 Q. Etant donné que nous disposons de cette image qui se trouve sur la
27 droite, où nous avons les pieds et les mains qui ont été entourés d'un
28 cercle, si vous trouvez un corps sans mains et sans pieds, est-ce que vous
Page 5692
1 estimez que les restes humains représentent un corps complet ou des parties
2 de corps ?
3 R. Je comprends bien ce que vous voulez dire.
4 Si nous trouvons un corps qui est complet, hormis le fait qu'il n'y
5 avait pas de pieds ou de mains, nous aurions intitulé cela un corps. Non
6 pas un corps complet, mais un corps, pour pouvoir inscrire ceci dans le
7 registre, et une fiche d'information aurait été remplie. Si nous trouvons
8 une main toute seule, bien évidemment, on ne peut pas parler de corps. Je
9 ne me souviens pas d'exemple précis de corps qui a été retrouvé sans mains
10 et sans pieds, mais cela peut être le cas.
11 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Madame le Juge Nyambe a une question
12 à poser.
13 Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] A la page 44 du compte rendu
14 d'audience d'aujourd'hui, lignes 10 à 14, vous déclarez que :
15 "Lorsque la jambe gauche d'une personne a été enlevée lorsque la fosse a
16 été remuée, mais que le reste du corps s'y trouve, il y aurait un nombre
17 d'explications importantes qui permettent d'expliquer pourquoi les parties
18 du corps se trouvaient là, qu'elles étaient liées, au moyen des analyses
19 d'ADN, mais provenant de sites différents."
20 En vous concentrant sur ces exemples-ci, pourriez-vous m'expliquer comment
21 une jambe pouvait être retirée et que le reste du corps se trouve dans la
22 fosse ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Madame le Juge.
24 La fosse dont je parle est le site de Kozluk, où les corps gisaient à
25 la surface, et le contour ou le bord de l'endroit où se trouvaient les
26 corps avait été remué après le passage d'un bulldozer, et une jambe avait
27 été enlevée. Les corps qui étaient alignés ou qui -- les corps qui se
28 trouvaient dans le sillon du bulldozer avaient été enlevés, mais ceux qui
Page 5693
1 se trouvaient à gauche sont restés. C'est une raison, en fait, et je crois
2 que le général Tolimir a bien compris, les restes d'ADN donnent un exemple
3 de ce qu'il y a à retrouver dans cette fosse, et c'est un exemple de la
4 façon dont ceci aurait pu se produire.
5 Un autre exemple pourrait être que différents camions sont arrivés en
6 transportant les corps et ces corps ont été emmenés des fosses primaires et
7 emmenés dans différentes fosses secondaires. C'est la raison pour laquelle
8 j'ai dit qu'il y a différentes explications possibles, par exemple, aux
9 questions que vous m'avez demandées.
10 Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Merci.
11 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey.
12 M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, le numéro 65 ter 638
13 est très précis en réponse à la question posée par le Juge. A ce stade,
14 bien sûr, je peux évoquer cette question lors de mes questions
15 supplémentaires, mais j'espère que je n'aurai pas de questions
16 supplémentaires à poser.
17 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] A ce stade, je crois que la réponse
18 était assez suffisante. Merci beaucoup.
19 Veuillez poursuivre, Monsieur Tolimir.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 M. TOLIMIR : [interprétation]
22 Q. Pour comprendre comment vous traitiez les parties de corps et les corps
23 entiers, veuillez vous reporter au paragraphe 2, où on peut lire, entre
24 autres, qu'une excavatrice ramassait les corps. Ceci se trouve à la page 18
25 en serbe et à la page 15 en anglais. Merci.
26 Merci. Je vais faire attention et parler lentement.
27 R. Regardons la page 14 en anglais, et non pas la page 15.
28 Q. C'est exact. Nous avons souhaité voir la page 15 en anglais, page 17 en
Page 5694
1 serbe.
2 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Page 15 --
3 L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous l'avons déjà eue à l'écran.
4 Merci, nous l'avons maintenant.
5 M. TOLIMIR : [interprétation]
6 Q. Il s'agit du paragraphe intitulé : "Définition de parties de corps."
7 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous ne l'avons pas en anglais.
8 Maintenant c'est là. Nous avons la page 15.
9 L'ACCUSÉ : [interprétation] Regardons le deuxième paragraphe maintenant, où
10 vous déclarez :
11 "Une décision devait être prise sur la façon dont ces corps disloqués
12 devaient être enlevés, enregistrés au niveau de l'endroit où ils avaient
13 été trouvés et étiquetés. Pour aider aux travaux d'exhumation, les parties,
14 par conséquent, ont reçu le nom de 'partie de corps.' La définition d'une
15 partie de corps était quelque chose qui était effectué par la personne qui
16 faisait l'excavation."
17 M. TOLIMIR : [interprétation]
18 Q. Qu'est-ce que vous entendez par la levée d'une partie de corps ?
19 Qu'est-ce que vous entendez par cela ? Comment le définissez-vous ?
20 R. Je ne sous-entends rien du tout, et je ne dis rien à propos de la façon
21 dont le corps s'est trouvé dans cette condition-là, dans cet état-là. C'est
22 une analyse purement empirique, je trouve une jambe, un bras, et il n'y a
23 aucun os pelvien que je retrouve. Alors comment le corps s'est retrouvé
24 dans cet état-là, bien sûr cela nécessite une explication et une
25 définition. Une partie de corps, de façon empirique -- à titre
26 d'observation, je n'interprète pas la manière dont le corps s'est retrouvé
27 ainsi.
28 Quelquefois, nous avons pensé par la suite que le corps qui se
Page 5695
1 trouvait un peu plus loin à qui il manquait un jambe, que la jambe
2 appartenait sans doute à ce corps, mais nous avons décidé que c'était à la
3 morgue d'en décider. Et je remettais à la morgue des données de nos
4 analyses qui pourraient les aider, et c'étaient des analyses en trois
5 dimensions de la fosse elle-même qui permettaient de connaître la proximité
6 de cet os pelvien par rapport à cette jambe, et ce, dans une analyse
7 tridimensionnelle près de la fosse, ce qui permettait d'accélérer le
8 processus de reconstitution des corps complets. Mais de donner cette
9 appellation aux parties de corps ne permet pas d'expliquer comment le corps
10 s'est trouvé dans cet état-là. Il s'agit simplement d'une partie isolée du
11 corps qui a été trouvé.
12 Q. Monsieur le Professeur, il y a quelques instants, en réponse à la
13 question de Mme le Juge Nyambe, vous avez dit qu'il était possible où une
14 partie de corps comme une jambe pouvait disparaître, parce que cela était
15 disloqué parce qu'une excavatrice était passée dessus. Etant donné que ces
16 corps gisaient à la surface du sol pendant plusieurs mois -- M. Ruez lui-
17 même a dit dans son témoignage qu'il avait trouvé 600 corps gisant à même
18 le sol sans protection depuis plusieurs mois. Et si un animal, par exemple,
19 devait emmener une partie de corps, quelle définition donneriez-vous dans
20 ce cas-là à la morgue ? De quelle manière pourriez-vous conclure le
21 processus d'identification d'un corps ? Merci.
22 R. Bien --
23 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Avant que vous ne répondiez, Monsieur
24 McCloskey.
25 M. McCLOSKEY : [interprétation] Il s'agit là d'une description erronée de
26 son témoignage. Il n'y a rien au niveau du compte rendu à propos du
27 témoignage de M. Ruez concernant les corps dans les fosses qui seraient
28 associés ou liés à des travaux de cette nature, eu égard à des éléments qui
Page 5696
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5697
1 ont été retrouvés et qui gisaient là depuis aussi longtemps. De surcroît,
2 il ne connaît pas le témoignage de M. Ruez. Donc, je m'oppose à la
3 description erronée et la déformation de son témoignage, parce que ceci ne
4 nous fournit aucune réponse.
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie et je vais en
6 prendre compte l'objection de M. McCloskey. Est-ce que vous êtes en mesure
7 de répondre à l'essentiel de la question de M. Tolimir ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a un malentendu par rapport à ma
9 déclaration précédente. Les corps retrouvés à Kozluk ont été retrouvés à la
10 surface, mais la surface se trouvait recouverte ou ensevelie par de la
11 terre. Le plancher de ce prétoire est une surface, et il y a des choses qui
12 peuvent être étendues sur la surface. Mais dans le cas de Kozluk, tout
13 avait été recouvert par de la terre, et nous devions procéder à
14 l'excavation avant de pouvoir retrouver la surface. C'est cela que je
15 voulais dire. Ils n'avaient pas été exposés aux éléments.
16 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.
17 Monsieur Tolimir, veuillez poursuivre.
18 M. TOLIMIR : [interprétation]
19 Q. Monsieur le Professeur, je n'avais pas l'intention de poser des
20 questions provocantes ou mal intentionnées. Je souhaite savoir de vous
21 comment vous feriez pour identifier un corps en l'absence de parties du
22 corps qui n'auraient pas pu être retrouvées sur le lieu en question,
23 quelles que soient les raisons. Peut-être que ces parties de corps ont été
24 emmenées par des animaux. Je cite ici M. Ruez parce qu'il a dit avoir
25 trouvé 600 victimes à Kamenica qui n'étaient pas protégées. Comment ceci
26 aurait-il pu être enlevé, les parties de corps, soit par des animaux
27 domestiques ou soit par des animaux sauvages.
28 Donc comment l'identification d'une personne peut-elle être terminée,
Page 5698
1 comment peut-on parler de ceci dans un rapport après l'analyse que vous
2 avez faite et l'analyse qu'ont faite les différentes personnes à la morgue
3 ?
4 J'ai été tout à fait bien intentionné lorsque j'ai posé ma question,
5 et j'ai déjà rencontré de tels problèmes dans le prétoire.
6 R. Je comprends, Général Tolimir, et je crois qu'il y a un malentendu en
7 anglais, parce que nous utilisons l'article défini et indéfini. Ceci a été
8 retrouvé à la surface à Kozluk. Sur "une" surface et "la" surface, je sais
9 qu'il peut y avoir une confusion à cet égard. Je parle le russe, et je
10 pense que la confusion émane de là.
11 Je n'ai aucun mal à interpréter ce site de Kozluk, qui ne fait pas partie
12 de ce rapport, que le déplacement de la jambe était dû à de l'équipement
13 qui avait tranché les corps. Il ne s'agit pas de prédateurs qui se seraient
14 trouvés sur le site. Le seul site sur lequel des corps étaient très, très
15 proches de la surface, c'était à Ravnice, mais je n'étais pas en charge de
16 ces travaux-là. Les corps ont été retrouvés très, très près de la surface
17 du sol. Nous n'avons pas vu que les os aient été mâchés par quoi que ce
18 soit ou qui que ce soit, et compte tenu de la stratification sur le site,
19 nous avions des éléments de preuve tout à fait clairs indiquant que les
20 corps avaient été placés dans les fosses et qu'ils avaient été recouverts
21 de terre et qu'ils n'avaient pas été dérangés par des prédateurs par la
22 suite, à une exception près je crois, quelque chose avait été enfoui avec
23 les os et cela s'est trouvé dans une zone très petite à Cancari 3. Un os
24 s'est retrouvé à la surface, mais la terre recouvrait le reste des corps.
25 Q. Merci, Monsieur le Professeur. La question que je vous ai posée ne
26 faisait pas référence à votre rapport, je souhaitais simplement vous
27 présenter quelques exemples. Je ne souhaitais pas faire référence à votre
28 rapport, je souhaitais recueillir votre opinion d'expert et savoir comment
Page 5699
1 on procède lorsqu'on découvre un corps à la surface alors que des parties
2 du corps manquent. Je souhaitais simplement savoir si ceci est traité comme
3 un cas qui est pris en compte.
4 R. Est-ce une question, Général Tolimir, comment souhaitez-vous que je
5 traite ces corps à la surface ?
6 Q. Merci. Oui, c'est ma question, comment ceci serait-il abordé dans votre
7 rapport ou un rapport que nous lirions ici dans le prétoire ou est-ce que
8 ceci posait des problèmes au moment de l'identification finale, car dans
9 ces cas-là, les parties pertinentes de corps ne sont retrouvés que 15 ou 16
10 années après ?
11 R. Les corps qui sont restés à la surface posent des problèmes, c'est
12 exact, pour les enquêteurs médico-légaux, parce que les animaux comme des
13 renards ou des chats sauvages ou des oiseaux peuvent déplacer les corps, et
14 ces éléments peuvent être distribués et répartis sur une zone assez
15 importante, mais je n'ai jamais rencontré de corps à la surface. Au cours
16 de mes travaux, les corps étaient toujours ensevelis.
17 Q. Merci, Monsieur le Professeur. Veuillez nous dire, lorsqu'il s'agit des
18 fosses elles-mêmes, si la pression exercée par la terre qui forme un dépôt
19 naturel, comme peut-être un équipement qui roule sur la surface, dans
20 quelle mesure ceci aurait une quelconque incidence sur les dommages
21 infligés sur les corps ?
22 R. Eh bien, la pression exercée par le sol et la pression des véhicules
23 qui passent sur cet endroit peut endommager les corps, mais ne peut pas
24 provoquer une désarticulation, une dissociation. Les parties de corps ne
25 seraient pas remuées, mais il peut y avoir une compression au niveau de la
26 cage thoracique et les côtes pourraient être cassées. C'est le cas de la
27 compression du crâne par exemple, lorsque le crâne est disloqué et on
28 retrouve des parties du crâne ici et là, ce qui est différent du cas où les
Page 5700
1 os se retrouvaient à la surface et qu'un renard par exemple a disloqué les
2 os. A partir du moment où ils sont en place, la pression du sol, la
3 pression sur les autres corps provoque une compression, mais non pas une
4 dislocation.
5 Q. Merci. Vous avez déjà dit que les corps et les objets retrouvés dans
6 les fosses n'auraient pas pu être exposés à des dommages, des dommages
7 conséquents dus aux pelleteuses et au fait d'utiliser des sondes. Vous avez
8 dit que les dommages provoqués par ces activités étaient minimes. Y a-t-il
9 eu des dommages qui auraient pu avoir une incidence sur le processus
10 d'identification ?
11 R. Vous voulez parlez en fait de dommages provoqués par l'équipe elle-
12 même, les gens chargés de faire les exhumations ? Si vous parlez de ça, le
13 dommage en fait serait minime, ils travaillent avec des pelles et des
14 pinceaux pour pouvoir retrouver les ossements et le véritable problème qui
15 se pose au niveau de l'identification des corps, le vrai problème qui se
16 pose c'est dû au fait que les fosses secondaires contenaient des corps qui
17 avaient été amenés d'un autre endroit, et au cours de l'excavation de la
18 fosse primaire, ces éléments-là ont été transportés dans la fosse
19 secondaire et déposés dans la fosse secondaire. Donc il y a une dislocation
20 très importante de squelettes individuels, et l'analyse qui était faite à
21 ce moment-là était différente. L'analyse ne pouvait pas être aussi facile
22 et claire. Les corps, par exemple, sur lesquels j'ai travaillé en Ukraine,
23 n'avaient jamais été remués depuis 1942, ils gisaient là exactement à
24 l'endroit où ils sont tombés. Le médecin légiste n'avait même pas besoin
25 dans la plupart des cas de ces -- n'avait pas besoin pour ce qui est de ces
26 550 corps qui n'avaient pas été découverts, le médecin légiste a travaillé
27 sur ce site et tous les restes humains ont ensuite été réensevelis.
28 Donc au niveau des fosses primaires qui ne sont pas remués, on perd très
Page 5701
1 très peu d'éléments de preuve et d'associations entre les éléments. Bien
2 évidemment, lorsqu'il s'agit de fosses secondaires, il y aura différents
3 degrés de dislocation des corps même si les méthodes employées à la morgue
4 consistent à dénombrer le nombre d'individus retrouvés, la méthode étant de
5 minimiser le dénombrement par deux fois des mêmes individus, donc c'est une
6 technique qui est utilisée, on dénombre l'os qui réapparaît le plus souvent
7 et on dit qu'il s'agit d'un nombre minimum d'individus pour essayer de
8 minimiser le problème que posent les fosses secondaires qui contiennent des
9 corps et des parties de corps, mais je n'ai pas fait cela, c'est ce qu'ils
10 ont fait eux.
11 Q. Très bien. Donc si on indique dans les rapports, tels que ceux qui ont
12 été présentés comme preuves ici, si on indique qu'il y a tel et tel nombre
13 de victimes ou de dépouilles mortelles qui ont été retrouvés ou de restes
14 humains qui ont été retrouvés, donc si cela est établi dans ces rapports
15 qu'il y avait tel et tel nombre de restes humains, suite à votre analyse,
16 si on établit après avoir présenté ces éléments à la morgue que le nombre
17 d'individus en question diffère, comment ce problème est-il résolu et
18 arrive-t-on à établir pourquoi ces chiffres sont différents ? Est-ce que
19 vous me comprenez ?
20 R. Je crois pour l'essentiel, ce n'est pas moi qui connais le chiffre des
21 corps et je n'utilisais jamais les estimations que nous avions sur le
22 terrain. J'avais une idée du nombre de corps qui s'y trouvaient, mais ce
23 n'est pas quelque chose que j'ai inclus dans mon rapport et je ne
24 souhaitais jamais le faire officiellement. Le chiffre avancé dans mon
25 rapport par rapport aux fosses secondaires et par rapport aux fosses
26 primaires découle des estimations faites par la morgue, parce que ce
27 n'était qu'à Kozluk que je pouvais dire qu'il y avait environ 300 corps.
28 Nous pouvions les compter comme vous pouvez compter les cadavres qui se
Page 5702
1 trouvent à même le sol, parce que la fosse primaire, l'essentiel de cette
2 fosse-ci, avait été remuée. Mais je ne tente pas dans mon rapport de vous
3 donner l'estimation des chiffres, donc il ne peut pas y avoir de
4 discordance entre les chiffres, parce que je n'ai utilisé dans mes rapports
5 que les informations qui émanent de la morgue après l'analyse faite par
6 cette dernière. Je n'ai jamais fourni d'analyse sur les individus, hormis
7 les informations qui m'ont été fournies par la morgue, ce tableau que nous
8 avons vu un peu plus tôt.
9 Q. Merci, Monsieur le Professeur. Au cours de vos exhumations de tous les
10 objets que vous avez retrouvés, certains éléments ont-ils été rejetés
11 comme, par exemple, des morceaux de verre ou des vêtements, ou est-ce que
12 tout était envoyé pour être analysé ?
13 R. Dans le cas du site où se trouvait le barrage, où il n'y avait pas de
14 corps complets, il n'y avait que des parties disloquées de corps, il y
15 avait beaucoup de morceaux de vêtements qui étaient éparpillés par-ci, par-
16 là lorsque la fosse remuée avait été remplie à nouveau, et parce que nous
17 souhaitions conserver certains éléments qui permettaient l'identification
18 d'une personne. Il est vrai que nous avons jeté certains éléments. Mais
19 dans les sites eux-mêmes qui sont énumérés dans le tableau, nous gardions
20 les vêtements, et nous les avons envoyés.
21 Je me souviens d'un pull-over qui avait tricoté à la main et qui a
22 été retrouvé près d'un corps, peut-être qu'une mère ou qu'une femme
23 reconnaîtrait ce pull-over. Mais si celui-là se retrouvait simplement tout
24 seul, par exemple, dans le cas d'un blue jean qui était commercialisé, un
25 vêtement dans le commerce normal, je crois que dans le cas de Kozluk, à ce
26 moment-là, nous mettions tout ceci ensemble. Je ne me souviens pas si on
27 les a jetés ou pas. Certainement pour ce qui est des fosses dont nous
28 parlons, les sept fosses secondaires, par exemple, nous envoyions tout ceci
Page 5703
1 à la morgue, même si nous avions trouvé un morceau de vêtement qui n'avait
2 pas été porté par un corps ---
3 Q. Merci. Pour le compte rendu, veuillez nous dire ce que vous avez fait
4 avec les éléments que vous avez retrouvés, que vous empilés, par exemple,
5 et que vous n'avez pas envoyés pour être analysés. Qu'est-il arrivé à cela
6 ?
7 R. Cela ne s'appliquait qu'à Kozluk, et je ne me souviens pas de ce que
8 nous en avons fait. Il faudrait que je revoie mes notes ou que je pose la
9 question aux personnes qui étaient là. Mais je crois qu'il est exact de
10 dire que tous les éléments retrouvés de façon isolée n'ont pas tous été
11 conservés, mais nous avons vraiment fait cela avec les exhumations qui ont
12 été menées après, lorsqu'il s'agissait de corps à proprement parler. Donc
13 je ne peux pas répondre à votre question sans faire quelques recherches.
14 Pour répondre à la deuxième partie de votre question, qu'avons-nous
15 fait des autres objets, à part les vêtements, comme le verre, par exemple,
16 et j'ai bien dit dans mon rapport que nous ne conservions pas tous les
17 morceaux de verre de Cancari 3, parce qu'il y avait des milliers de
18 morceaux de verre mélangés aux corps, mais nous avons certainement gardé un
19 échantillon.
20 Q. Merci. Voilà ce qui m'intéresse : est-ce que vous avez pris des notes
21 particulières sur tout ce que vous avez trouvé dans les charniers ou est-ce
22 que vous n'aviez pris de notes qu'à propos de certaines choses qui
23 permettaient d'identifier les restes ?
24 R. Non, les registres -- je ne sais s'ils ont été versés au dossier. Mais
25 comme vous le verrez des registres, il y a un enregistrement de tout, à
26 l'exception des fragments de verre. Donc pour Cancari 3, tous les objets
27 auront été inscrits dans le registre, à l'exception des débris de verre, et
28 ils auront été envoyés à la morgue de Visoko.
Page 5704
1 Q. Merci. Est-ce que tous les membres de votre équipe avaient reçu des
2 instructions et avaient été formés à présenter tous les objets trouvés dans
3 les charniers à une inspection ou, disons, un examen ? Merci.
4 R. Les excavateurs étaient tous formés à des procédures médico-légales
5 générales. Leur devoir était de faire rapport à l'agent de police
6 scientifique quand ils trouvaient un objet. Cet agent de police
7 scientifique recueillait les objets et les notaient dans le registre avec
8 la position où ils avaient été trouvés. Donc la séquence des événements
9 était très simple, mais requérait que les responsables de l'excavation ne
10 fassent pas eux-mêmes l'inscription au registre, mais que ce soit l'agent
11 de la police scientifique.
12 Q. Je vous remercie. Pouvez-vous nous dire si ce spécialiste des lieux du
13 crime analysait les traces sur les objets trouvés dans les charniers, ou
14 bien, simplement, est-ce qu'il les enregistrait dans la liste des objets ?
15 R. La réponse est la première partie de votre question. L'agent de la
16 police scientifique ne faisait pas d'analyse des objets au-delà d'une
17 simple description pour dire -- par exemple, c'est un portefeuille, une
18 photographie, ou une pièce; donc une description très simple. L'analyse ne
19 portait qu'à un niveau très superficiel. L'analyse qui était faite
20 ultérieurement des objets, c'était à la morgue. Nous n'étions pas censés
21 faire une analyse détaillée. Nous n'en étions pas responsables. Nous
22 n'avions pas de laboratoire de terrain qui nous aurait permis de chercher
23 des traces d'autres matériaux sur les objets.
24 Q. Merci, Professeur. Pouvez-vous nous dire si certains objets ont été
25 laissés sur place ou jetés et n'ont pas été envoyés à la morgue ou pas
26 envoyés à des fins d'analyse ultérieure; comme par exemple, certains
27 morceaux de tissus ou de vêtements, voire quelques échantillons prélevés,
28 ou, disons, peut-être que des échantillons ont été prélevés et envoyés,
Page 5705
1 mais que les objets eux-mêmes sont restés sur place ? Merci.
2 R. Comme je l'ai expliqué précédemment, je ne me souviens pas des détails,
3 mais je pense qu'au site du barrage, certains éléments isolés de vêtements
4 ont été examinés et jetés. On savait où ils avaient été fabriqués et ils
5 n'étaient associés à aucun os remis dans le charnier. C'est le seul endroit
6 où des objets ont été rejetés. Tous les objets étaient envoyés -- j'allais
7 dire envoyés, mais d'abord enregistrés, et ensuite envoyés à la morgue, à
8 l'exception, comme je l'ai expliqué, de ces débris de verre à Cancari 3.
9 Donc personne ne pouvait distinguer ce qui était des objets utiles et
10 n'avait le droit d'en jeter s'il décidait que ce n'était pas utile. Tous
11 les objets étaient conservés, à l'exception de ceux que j'ai mentionnés.
12 Q. Merci, Professeur. Après la fin de toute cette procédure, de tout ce
13 travail, avez-vous remarqué qu'il y a eu peut-être certaines étapes qui
14 n'ont pas été effectuées ou que vous n'auriez pas répétées dans des
15 exhumations ultérieures, en fonction de votre expérience ?
16 R. Je ne pense pas que dans la procédure, au fur et à mesure que nous
17 l'avons élaborée, je ne pense pas qu'il y ait eu, disons, des étapes à
18 problème, comme vous les avez appelées, c'est-à-dire qu'il y ait eu des
19 problèmes systématiques dans la manière dont nous avons effectué notre
20 travail. Non, je ne pense pas. Et la base sur laquelle nous avons -- ou les
21 procédures que nous avons développées venaient d'un grand manuel sur les
22 charniers qui avait été rédigé par un certain nombre de personnes, mais
23 sous la direction d'une personne qui s'appelle Margaret Cox, qui est -- et
24 le livre s'appelle "Excavation scientifique de charniers". Beaucoup des
25 procédures que nous avons développées ont été rédigées pour ce livre-là par
26 différentes personnes, dont moi-même. Et je crois que les procédures que
27 nous avons développées sont la base du travail que nous avons fait à
28 Frommel, ça c'est pour des soldats australiens de la Première Guerre
Page 5706
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
15 versions anglaise et française
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 5707
1 mondiale. Deux des personnes qui ont travaillé pour moi en Bosnie avaient
2 été des superviseurs de ces charniers. Le photographe médico-légal que nous
3 avions, qui conservait un registre visuel essentiel, c'était le photographe
4 de Frommel. L'un des anthropologues avec lesquels j'ai travaillé était
5 responsable de l'analyse des squelettes.
6 Et on ne nous a pas indiqué d'erreurs dans nos procédures, d'erreurs
7 systématiques dans nos procédures. Au contraire, ces procédures ont été
8 adoptées par d'autres et ont fait l'objet de publications.
9 Q. Je vous remercie, Professeur. En fonction de ce que vous venez de dire,
10 ma question est la suivante : de ce point de vue, y a-t-il quoi que ce soit
11 qui a été fait pendant l'exhumation en Bosnie-Herzégovine que vous
12 changeriez pour perfectionner la procédure, au cas malheureux où vous
13 devriez répéter cette procédure ?
14 R. Non, très clairement, aucun changement aux procédures de base. Si je
15 peux reprendre ce que je considère comme les procédures de base. Il faut
16 que l'équipe qui fait le travail ait de l'expérience; qu'il y ait une
17 chaîne de conservation très claire pour les objets; qu'il y ait un
18 enregistrement en trois dimensions de la position des objets; qu'avant le
19 retrait du corps, que sa délimitation soit claire de manière à ce que l'on
20 n'extraie pas simplement des parties du corps ou qu'on n'en arrache pas des
21 parties; qu'il y ait un enregistrement photographique adéquat qui soit
22 conservé; et que les notes sur ce qui a été fait soient transmises aux
23 personnes qui sont à l'étape suivante de la procédure à la morgue de
24 manière à ce que ces personnes-là sachent ce qui s'est passé au niveau du
25 charnier. Donc ça, ce sont les procédures de base, c'est le système de
26 base, et ça, je ne le changerais pas.
27 Ceci dit, quand vous trouvez un nouveau charnier, certains détails de
28 la procédure doivent peut-être être adaptés; par exemple, si le charnier
Page 5708
1 est détrempé, s'il y a beaucoup d'eau. Aucun des charniers dans lesquels
2 nous avons fait des excavations en Bosnie, à l'exception de Brcko,
3 n'étaient dans ce cas-là. Donc il faut modifier la procédure si, par
4 exemple, vous essayez de contrôler la quantité d'eau et l'eau qui doit être
5 déplacée. Mais ce sont des changements tactiques sur un nouveau site, et je
6 ne vois pas le besoin de changements dans la stratégie générale que j'ai
7 soulignée dans mes notes et mon rapport. Enfin, toujours est-il que
8 personne n'a attiré mon attention sur des faiblesses dans la procédure
9 qu'il faudrait rectifier.
10 C'est peut-être de la fausse modestie de ma part, mais je crois que
11 le système que nous avons utilisé est la procédure médico-légale tout à
12 fait adéquate peut-être des charniers. Et beaucoup des gens qui ont
13 travaillé en Bosnie ont été contactés par d'autres enquêteurs et ils ont
14 accepté des responsabilités en Irak, au Guatemala, et c'était déjà des
15 experts de leur propre pays, par exemple, d'Argentine, où il y avait des
16 charniers. Donc j'ai eu la chance dans mon équipe d'avoir, et pourtant les
17 équipes ont changé au fil du temps, mais j'ai eu la chance d'avoir d'autres
18 experts pour me conseiller. Et une excavation, pour être faite
19 correctement, se fait avec beaucoup de discussion sur les procédures à
20 utiliser avec les autres experts qui font le travail. Je ne harcèle pas les
21 gens, je ne force pas les gens à être d'accord avec moi sur le site. Nous
22 avons eu des discussions parfois un petit peu animées sur la meilleure
23 manière de faire le travail, mais pas de dissension dans l'équipe sur les
24 procédures que nous utilisions, parce qu'eux-mêmes avaient contribué à la
25 manière d'effectuer le travail.
26 J'espère que cela répond à votre question. Non, il n'y a pas
27 d'élément dans la procédure que je souhaiterais faire autrement. Non.
28 Q. Je vous remercie. Vous avez dit qu'il y a un certain nombre d'experts
Page 5709
1 différents, de profils différents d'enquêteurs. Maintenant, je vais essayer
2 de me centrer sur l'agent de police scientifique. Est-ce que vous pensez
3 que ce serait une bonne idée d'avoir un laboratoire mobile sur le site ou à
4 proximité, qui permettrait peut-être d'examiner certaines parties ou
5 certains objets avant qu'ils soient rejetés; ils pourraient les examiner
6 pour chercher des traces avant de les jeter en pile ?
7 R. Comme je l'ai déjà expliqué, il n'y a pas eu de rejet systématique de
8 quoi que ce soit, à l'exception des deux cas que j'ai mentionnés, au
9 barrage et de ces milliers de morceaux de verre. Donc ce serait induire en
10 erreur que de dire que nous avons jeté des choses. J'ai dit que dans ces
11 deux cas-là les éléments n'ont pas été conservés, et c'était très
12 spécifique -- les propriétés étaient très spécifiques avant que nous
13 fassions ça.
14 Mais est-ce que ça aurait été une bonne idée, avez-vous demandé, d'avoir un
15 laboratoire sur le site ? Oui ça aurait été une bonne idée, j'aurais aimé
16 pouvoir tout avoir sur le site; datation au carbone, laboratoire le
17 permettant, laboratoire de conservation, mais nos objets étaient limités et
18 la logistique du travail en république serbe nous imposait des contraintes
19 sur ce que nous pouvions faire et nous avions le minimum de ce que je
20 considérais comme essentiel pour faire ce travail. Nous avions cela, nous
21 ne nous sommes pas lancés dans du travail qui aurait pu être fait, disons,
22 de meilleure manière et pour des périodes plus longues par les gens qui
23 étaient à la morgue. Je voulais simplement dire que nous n'avions pas de
24 programme pour jeter des choses sauf dans ces deux cas que j'ai mentionnés,
25 tout a été conservé.
26 Q. Merci, Professeur. J'ai encore une autre question.
27 Comment avez-vous obtenu des fonds, comment ont-ils été assurés pour
28 ces activités que vous avez effectuées sur le terrain pour identifier les
Page 5710
1 corps, y compris identification par ADN ?
2 R. Je crois savoir que ce sont les Nations Unies qui obtenaient des dons
3 des pays pour faire le travail sur le terrain en Bosnie. Puisque tout le
4 travail sur l'ADN s'est déroulé après, je ne sais pas comment il a été
5 financé, ça je ne peux pas répondre à cette question. Je ne sais pas. Donc
6 voilà tout ce que je peux dire sur les finances, je ne sais pas comment la
7 commission internationale des disparus se finance.
8 Q. Merci. Et est-ce que vous avez des informations sur le principal
9 bailleur de fonds, c'est-à-dire la Commission pour les disparus, est-ce
10 qu'ils ont été capables d'exercer la moindre influence sur l'ensemble du
11 processus d'exhumation ?
12 R. Certainement pas à mon époque non; ils n'avaient aucune influence. Nous
13 avions une règle claire, stricte, personne de Bosnie-Herzégovine ne pouvait
14 travailler sur le site, personne. Et cela était vrai, y compris au site du
15 barrage où nous avons dû louer une excavatrice pour enlever les pierres,
16 les rochers, nous avons dû fournir le conducteur parce que personne ne
17 pouvait avoir de préjugés ou de parti pris sur ce que nous trouvions et ne
18 devait pouvoir s'ingérer sur le site. Donc la commission ne s'est jamais
19 mêlée de mon travail.
20 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Professeur. Nous poserons les autres
21 questions à d'autres personnes qui ont participé au processus d'exhumation.
22 Je voudrais vous remercier très sincèrement d'avoir témoigné sur ces
23 questions, de nous les avoir présentées. J'aimerais vous souhaiter un bon
24 retour chez vous et vous remercier encore de votre aide.
25 Monsieur le Président, ce sont les seules questions que j'avais pour
26 ce témoin. J'ai terminé le contre-interrogatoire.
27 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
28 Monsieur McCloskey, avez-vous d'autres questions ?
Page 5711
1 M. McCLOSKEY : [interprétation] Très rapidement, est-ce qu'on pourrait voir
2 le 65 ter 638 au prétoire électronique, s'il vous plaît. C'est une
3 photographie, donc ça va peut-être prendre un petit peu plus de temps pour
4 apparaître à l'écran, et je vais demander si l'on peut tourner la
5 photographie vers la droite. Oui, c'est la photo, vous est-il possible de
6 l'agrandir ?
7 Nouvel interrogatoire par M. McCloskey :
8 Q. [interprétation] Professeur, est-ce que vous reconnaissez ce site ?
9 R. Oui. C'est la surface enterrée avec cette quinzaine de personnes à
10 Kozluk. Derrière les corps, vous voyez les "banks" qui n'ont pas été
11 excavées. Donc ça c'est la partie du terrain qui les couvrait.
12 Q. Nous avons une manière de marquer à l'écran. Vous devriez avoir une
13 aide. Il devrait y avoir un stylo spécial là.
14 Dans la mesure du possible, et je sais qu'il s'agit d'une photo en deux
15 dimensions --
16 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Avant que vous continuiez, avant que
17 vous continuiez et indiquiez vos marques, Monsieur Tolimir.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suis désolé. Le professeur avait commencé à
19 répondre, mais j'avais levé la main.
20 Je voudrais demander à l'Accusation d'expliquer les raisons de cet examen.
21 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey, est-ce que vous
22 pouvez nous dire à nous et à M. Tolimir quelle est la référence ?
23 M. McCLOSKEY : [interprétation] Page 32, lignes 14 à 25, ça concerne les
24 corps à Kozluk et ça concerne la question posée par le Juge Nyambe, c'est
25 pour dire que c'est la photographie que j'ai proposée pour aider à
26 expliquer ce que le professeur Wright expliquait quand il parlait de tout
27 ça et je vais lui demander de répondre lui, et pas moi.
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je pense que c'est suffisant. Nous
Page 5712
1 devrions continuer.
2 M. McCLOSKEY : [interprétation]
3 Q. Pour autant que vous le puissiez, est-ce que vous pouvez dessiner une
4 ligne sur le niveau de terre que vous avez retirée pour découvrir les corps
5 ? Ça devrait montrer une ligne à l'écran. Ce genre de ligne.
6 R. [Le témoin s'exécute]
7 Q. O.K. Vous voyez cette ligne rouge horizontale. Donc en dessous de la
8 ligne, qu'est-ce que c'était ?
9 R. Il y avait du sol qui avait été mis au-dessus des corps.
10 Q. Et vous pouvez nous dire comment vous avez pu enlever la terre des
11 corps à ce point-là et laisser la scène de manière à ce qu'elle donne
12 l'impression de ne pas avoir été modifiée ? Comment est-ce qu'on peut faire
13 cela ?
14 R. Nous sommes des archéologues. Ce que je veux dire, c'est qu'on peut
15 parfaitement enlever de la terre d'objets.
16 Q. O.K. Est-ce que vous voyez -- est-ce que vous voyez des marques qui
17 auraient été faites par des équipements lourds ?
18 R. Non, pas dans la zone des corps, mais vous voyez, est-ce que je peux
19 marquer ici ? Ça c'est le bord d'une tranchée profonde, et je pense qu'à
20 l'exception d'une jambe qui a dû être arrachée quand la tranchée a été
21 faite et qui a été creusée pour enlever les corps. Donc effectivement, on a
22 tranché un individu, mais la zone que je vous montre c'est la zone
23 principale des corps qui n'a pas été perturbée.
24 Q. D'accord. Nous comprenons que vous avez enlevé la terre et nous voyons
25 ce qui sont dans certains cas des squelettes. La tranchée, c'est ce que
26 vous avez indiqué là ?
27 R. Oui, mais elle avait été faite avant que nous arrivions au site et elle
28 avait remplie à nouveau.
Page 5713
1 Q. Et comment est-ce que vous, vous pouvez expliquer cela ?
2 R. Une tranchée avait été faite -- coupée, et nous en avons enlevé le sol
3 jusqu'à arriver au fond de la tranchée. Et au fond, nous avons trouvé des
4 marques, c'est-à-dire que les godets d'engins lourds avaient laissé des
5 marques. Et j'ai interprété cela comme étant la tranchée qui avait été
6 utilisée pour enlever les corps, et ça avait laissé, disons, une petite
7 partie qui montre la surface sur laquelle les corps sont maintenant --
8 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey, pour le procès-
9 verbal, il serait utile que vous demandiez au témoin d'identifier les
10 différentes lignes par des lettres, A, B, C, ou quelque chose comme ça.
11 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vous remercie.
12 Q. Est-ce que vous pourriez nous indiquer cela par des lignes, pour que ce
13 soit clair pour le procès-verbal ?
14 R. Je ne sais pas exactement comment le faire.
15 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mettez juste --
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais juste dessiner une ligne autour de la
17 tranchée profonde et appeler ça A [Le témoin s'exécute], et cette tranchée
18 qui était passée au travers des corps qu'on voit à la surface, ce que
19 j'appelle le B [Le témoin s'exécute], et ensuite qui avaient été couverts
20 par le sol, ce que je vais appeler le C [Le témoin s'exécute]. Est-ce que
21 ça va ?
22 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et peut-être la lettre D pour là ou
23 vous supposez que la jambe avait été arrachée.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] O.K. [Le témoin s'exécute]
25 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que c'est cet individu-là.
27 Dans mon rapport, j'ai inclus une carte de la répartition des corps
28 pour qu'il soit possible de voir lequel de ces individus avait été
Page 5714
1 endommagé. Mais sans mon rapport, je ne peux pas le faire, je ne peux pas
2 ajouter davantage à ce stade-ci.
3 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je ne pense pas que nous ayons besoin de
4 faire ça pour l'instant.
5 Donc je vous propose de mettre cette photographie au dossier.
6 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Elle sera enregistrée au dossier avec
7 les marques que vous avez indiquées.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Pièce P1015.
9 M. McCLOSKEY : [interprétation]
10 Q. Et juste pour clarifier les choses davantage : vous avez témoigné --
11 enfin, je ne suis pas sûr -- pouvez-vous nous dire de quel charnier il
12 s'agit encore ?
13 R. Kozluk.
14 Q. Bien --
15 R. Et ça, c'est en 1999.
16 Q. De ce que nous voyons ici, est-ce que vous avez pu déterminer lesquels
17 de ces individus avaient été abattus par balle, où ils se trouvent, in situ
18 ?
19 R. Nous voyons des blessures, des lésions, que moi, en tant que non-
20 expert, j'ai attribué à des tirs de balles. Mais c'est la morgue qui a fait
21 la détermination finale. Ce que nous avions remarqué avec des détecteurs de
22 métaux, c'est qu'il y avait des balles dans le sol en dessous des corps, à
23 une profondeur d'environ 10 centimètres.
24 M. McCLOSKEY : [interprétation] Si nous pouvons donc verser cette pièce au
25 dossier.
26 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Avant de faire ça, le Juge Nyambe a
27 une question.
28 Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez juste
Page 5715
1 préciser, pour ma gouverne --
2 M. LE JUGE FLUEGGE : [aucune interprétation]
3 Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Bon, je vais essayer sans les marques
4 qui ont été ajoutées.
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, il est possible de revoir les
6 marques. P1015.
7 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
8 Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] O.K.
9 Pouvez-vous nous expliquer comment cette tranchée, ou ce fossé, est
10 survenu ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Ça a été fait par des engins lourds. Il y
12 avait des marques de dents au fond. Cela avait été fait avant que le site
13 ne soit couvert. Nous n'avons rien vu en surface, à l'exception de la terre
14 qui avait rempli la tranchée et qui couvrait les corps.
15 Alors, je sais, d'une vue aérienne que j'ai vue, que ce travail avait
16 été fait -- disons, la tranchée faisait partie de travaux réalisés sur le
17 site en octobre 1995, et les autres corps avaient probablement été amenés à
18 des sites, comme Cancari 3, qui avait tous les éclats de verre. Mais ce que
19 je regarde là, c'est une tranchée qui est tout à fait logique par rapport
20 au retrait des corps, mais je n'ai pas de datation particulière pour cette
21 tranchée.
22 Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] A votre avis, d'où provient la terre
23 qui a été utilisée pour recouvrir la fosse ? Est-ce que cela a été jeté sur
24 les corps ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis certain que cela a été jeté sur les
26 corps, parce qu'aucun corps n'a trouvé de traces d'intervention de
27 prédateurs. Le sol a été jeté sur les corps --
28 En fait, je dois dire qu'il s'agit là d'une espèce de carrière de
Page 5716
1 sable. Il y a des crevasses qui se produisent naturellement, et je pense
2 que la population de la ville serait venue pour chercher du sable ici, et
3 puis il y avait aussi des débris qui recouvraient ces corps qui ne
4 s'étaient pas trouvés ici initialement. Donc ça a dû être apporté. Terre,
5 glaise, et il y a eu des débris du matériel de construction; donc ça a dû
6 venir d'ailleurs, d'une localité où ils ont prélevé cela pour recouvrir les
7 corps, et ils ont probablement simplement jeté cela avec l'excavatrice.
8 Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Merci.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey.
10 M. McCLOSKEY : [interprétation] Nous n'avons plus besoin de la
11 photographie.
12 Q. Vous souvenez-vous ou est-ce que la photographie vous permet de dire
13 s'il y avait des victimes qui portaient des liens, dont les mains avaient
14 été attachées derrière leur dos ?
15 R. Je vais vous parler de mémoire. Mais il faudrait se reporter plutôt aux
16 registres et aux notes officielles. Je souhaite consulter mon rapport.
17 Q. Je vous en prie.
18 R. Dans mon rapport sur Kozluk -- je ne sais plus quelle était la cote de
19 la pièce à conviction que c'est devenu. Je vois ici le cachet --
20 Q. C'est la pièce P871. Je précise cela pour le compte rendu d'audience.
21 R. J'écris dans mon rapport ce que nous voyons précisément sur cette image
22 a été identifié comme étant "KK2", et je dis que pour certains des corps de
23 victimes abattues, que ces corps n'ont pas été remués, qu'ils n'ont pas été
24 dérangés par ce qui les a recouverts par la suite. Les membres de ces
25 individus -- je me souviens qu'on est arrivés à la conclusion que ces
26 hommes ont été exécutés sur place et qu'ils n'ont pas été apportés
27 d'ailleurs, et c'était justement parce que les membres de leurs corps
28 n'étaient pas disloqués. Mais pour autant que je puisse voir, je ne
Page 5717
1 commente pas si ces individus avaient des liens ou s'ils avaient des
2 bandeaux sur les yeux, mais normalement, on trouverait ça dans les
3 registres. Je veux dire, pour les individus qu'on a pu identifier.
4 Q. Et pour ce qui est des victimes, est-ce que vous vous souvenez si leurs
5 yeux ont été bandés ?
6 R. A Kozluk, il y en avait beaucoup dans ce cas-là. Et ceci constitue
7 juste une partie en plus du site principal de Kozluk. J'ai des chiffres
8 dans mon rapport pour le nombre de corps qui comportaient des liens ou dont
9 les yeux ont été bandés, et je pense qu'il y en avait 42 % qui avaient des
10 liens, et 20 % pour les autres. C'est ma mémoire du chiffre approximatif.
11 M. McCLOSKEY : [interprétation] Est-ce qu'on peut agrandir, s'il vous
12 plaît.
13 M. LE JUGE FLUEGGE : [aucune interprétation]
14 M. McCLOSKEY : [interprétation] La partie supérieure suffit.
15 Q. Est-ce que vous pouvez nous décrire ce que nous voyons ici, parce que
16 l'on ne voit pas distinctement.
17 R. Nous voyons des corps complets, la plupart sont allongés sur leur dos
18 sur la surface qui contient des balles, qui se sont incrustées sous les
19 corps dans le sol.
20 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Professeur.
21 Je n'ai plus de questions.
22 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
23 Monsieur le Professeur, la Chambre vous remercie d'être venu témoigner et
24 de nous faire partager votre expertise. Vous pouvez vous retirer à présent,
25 et je vous remercie encore une fois.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
27 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey, avez-vous un
28 autre témoin que nous pourrions entendre aujourd'hui ?
Page 5718
1 M. McCLOSKEY : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je me félicite
2 que nous ayons pu terminer un peu plus tôt cette déposition de témoin. Nous
3 essayons encore de rattraper le temps suite à des dépositions plus longues
4 que prévues. Mais nous avons, d'après notre planning, la possibilité de
5 travailler demain et le surlendemain.
6 M. LE JUGE FLUEGGE : [aucune interprétation]
7 [Le témoin se retire]
8 M. McCLOSKEY : [interprétation] Nous avons une vidéo que nous voulions
9 visionner, nous en avons parlé avec Me Gajic, et nous avons aussi des
10 arrêts sur image qui ont été prélevés sur cette vidéo. Je pense que ce sera
11 utile à la Chambre pour analyser et examiner ces vidéos. Donc nous avons
12 deux enquêteurs qui viendraient demain. Dusan Janc, pour commencer. Il est
13 au milieu du contre-interrogatoire sur un autre sujet, mais après en avoir
14 parlé avec Me Gajic, nous avons constaté qu'on peut reporter de nouveau son
15 contre-interrogatoire sur cet autre sujet, parce qu'ils ont beaucoup de
16 documents qu'ils doivent encore finir d'examiner. Donc nous avons des
17 vidéos, une explication brève de ces vidéos, des authentifications de ces
18 extraits, et c'est ce que nous avons prévu de faire pendant les deux
19 journées à venir. Malheureusement, nous n'avons rien pour continuer sur-le-
20 champ.
21 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je dois vous dire que je ne vais pas
22 me plaindre de cette journée légèrement plus courte.
23 Mais est-ce que je vous ai bien compris, demain on continue avec le
24 contre-interrogatoire de M. Janc, ou vous allez d'abord faire
25 l'interrogatoire principal ?
26 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vais faire l'interrogatoire principal de
27 M. Janc sur ces vidéos. Il pourra replacer ces vidéos dans leur contexte
28 pour qu'elles puissent vous apporter plus d'information pour que vous
Page 5719
1 puissiez mieux comprendre de quoi il s'agit. Donc nous allons poser des
2 questions à M. Janc sur le contexte, et lui demander d'authentifier ces
3 vidéos. Nous ne sommes pas encore parvenu à un accord avec la Défense
4 exactement sur comment nous allons continuer et quand nous allons continuer
5 le contre-interrogatoire, mais nous allons en reparler.
6 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, Maître Gajic,
7 acceptez-vous cette proposition de M. McCloskey ?
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Tout à fait, nous acceptons, puisque nous ne
9 savons pas encore ce qu'il présentera.
10 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc, si je vous ai bien compris, ce
11 sera une autre portion de votre interrogatoire principal.
12 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc nous allons lever l'audience
14 pour aujourd'hui, et nous reprendrons demain dans ce même prétoire à 14
15 heures 15.
16 --- L'audience est levée à 17 heures 57 et reprendra le mercredi 22
17 septembre 2010, à 14 heures 15.
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28