Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 9612

  1   Le mercredi 9 février 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

  6   Maître Gajic, je vois que vous voulez déjà intervenir. Je vous en prie.

  7   M. GAJIC : [interprétation] Bonjour à tout le monde.

  8   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, la Défense souhaiterait

  9   vous présenter une demande. Hier, nous avons présenté au Témoin Acimovic

 10   les deux documents : le document 2063 de la liste 65 ter et le document

 11   2064 de la liste 65 ter. Ces documents avaient été utilisés dans d'autres

 12   affaires et faisaient partie de nos documents au titre de l'article 92 ter

 13   qui avaient été présentés par l'Accusation. Ces documents ont donc été

 14   présentés hier dans le prétoire au témoin et nous souhaiterions les verser

 15   au dossier.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Gajic, je ne dispose plus de

 17   ces documents. Nous reviendrons là-dessus un peu plus tard. Je pense que ce

 18   fut juste un oubli à la fin de l'audience d'hier.

 19   Mais je souhaiterais, pour le moment, aborder un autre sujet relatif aux

 20   pièces et au témoin que nous allons entendre aujourd'hui.

 21   La Chambre a été saisie de la requête supplémentaire de l'Accusation aux

 22   fins d'amendement de sa liste de documents 65 ter, et l'Accusation se

 23   propose d'ajouter deux documents supplémentaires déposés le 3 février.

 24   L'Accusation, par sa requête, demande d'ajouter à sa liste des documents 65

 25   ter deux rapports démographiques préparés par le témoin Dr Helge Brunborg

 26   en avril 2009.

 27   Lundi, Me Gajic, au nom de M. Tolimir, a répondu oralement à cette requête.

 28   Me Gajic a indiqué qu'il ne devait pas être fait droit à cette requête


Page 9613

  1   parce que cette requête de l'Accusation était déjà intégrée dans une

  2   notification confidentielle déposée le 26 novembre 2009 et que, de ce fait,

  3   la nouvelle requête est nulle et non advenue. De plus, Me Gajic a avancé

  4   qu'il attendait une décision à propos de cette notification et à propos de

  5   la notification de l'accusé déposée le 14 janvier 2010. Et en dernier lieu,

  6   il a indiqué que l'accusé n'accepte pas les rapports du Dr Brunborg et

  7   qu'il souhaitait lui poser des questions dans le cadre d'un contre-

  8   interrogatoire.

  9   A la suite de cette réponse fournie de façon orale, l'Accusation a répondu,

 10   et M. McCloskey a avancé que l'accusé avait été informé de l'existence de

 11   ces deux rapports du Dr Brunborg depuis très longtemps. La Chambre, dans un

 12   premier temps, remarque que d'après la notification supplémentaire de

 13   l'Accusation du 26 novembre, les deux rapports du Dr Brunborg correspondent

 14   à des mises à jour de ces rapports préparés pour l'affaire Karadzic le

 15   9 avril 2009, après qu'ils aient d'abord été déposés le 13 mars 2009.

 16   La Chambre de première instance est d'avis que ces rapports, qui sont des

 17   versions mises à jour de ses rapports précédents, sont de prime abord

 18   pertinents en l'espèce et ont une valeur probante.

 19   De surcroît, la Chambre de première instance avait rendu une décision

 20   le 3 novembre 2009, et il s'agissait, en fait, d'une décision qui visait le

 21   compte rendu d'audience de la déposition du Dr Brunborg. Il avait été

 22   décidé que cela serait versé au dossier de façon provisoire, conformément à

 23   l'article 92 ter, qui garantie à l'accusé le droit de contre-interroger le

 24   Dr Brunborg. C'est la raison pour laquelle M. Brunborg va témoigner

 25   aujourd'hui ici en fonction de l'article 92 ter.

 26   Je vous dirais que ces deux rapports sont très volumineux, le premier

 27   ayant 105 pages, le deuxième en ayant 239. Depuis le dépôt de cette

 28   notification que j'ai mentionnée, l'accusé a été informé du fait que


Page 9614

  1   l'Accusation souhaitait utiliser, par le truchement du Dr Brunborg, ces

  2   documents, bien qu'ils n'aient pas été ajoutés à la liste 65 ter avant

  3   aujourd'hui. A cet égard, la Chambre insiste sur l'objectif principal de la

  4   liste 65 ter qui est de donner à l'accusé des informations, et à l'équipe

  5   de la Défense, pour qu'elle puisse justement se préparer en connaissance de

  6   cause. Et donc, lorsque cela n'est pas communiqué, l'Accusation ne respecte

  7   pas ses obligations au titre de l'article 65 ter (E)(iii). La Chambre

  8   considère que l'Accusation devrait invoquer de bonnes raisons pour

  9   justifier l'ajout de ces rapports. Par conséquent, la Chambre est d'avis

 10   qu'il va dans l'intérêt de la justice d'ajouter ces deux rapports à la

 11   liste 65 ter.

 12   Il est donc ainsi fait droit à la requête.

 13   Si vous n'avez pas d'autres questions à soulever, je souhaiterais que

 14   l'on fasse entrer le témoin dans le prétoire.

 15   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Veuillez mettre

 17   vos écouteurs.

 18   Bienvenue au Tribunal à nouveau. J'aimerais vous demander de bien vouloir

 19   prononcer la déclaration solennelle dont le texte vous est donné

 20   maintenant.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Je déclare solennellement que je dirai

 22   la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 23   LE TÉMOIN : HELGE BRUNBORG [Assermenté]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez prendre

 26   place et installez-vous.

 27   M. McCloskey a des questions à vous poser dans le cadre de son

 28   interrogatoire principal.


Page 9615

  1   Monsieur McCloskey, je vous en prie.

  2   M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, et bonjour.

  3   Bonjour à tout le monde.

  4   Interrogatoire principal par M. McCloskey : 

  5   Q.  [interprétation] Et bonjour, Docteur Brunborg. J'aimerais dans un

  6   premier temps que vous nous indiquiez quel est votre nom complet ?

  7   R.  Mon prénom est Helge, H-e-l-g-e.

  8   Q.  Et quel est votre nom de famille ?

  9   R.  Brunborg. B-r-u-n-b-o-r-g.

 10   Q.  Bien. Et nous allons bientôt donner lecture de votre résumé, mais je

 11   dirais que vous avez témoigné à plusieurs reprises ici. Vous avez été

 12   témoin expert à charge, et vous êtes démographe; est-ce exact ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Avez-vous eu la possibilité de réexaminer votre déposition dans

 15   l'affaire Popovic et consorts ?

 16   R.  Oui, je l'ai regardée hier.

 17   Q.  Et hormis quelques données qui ont été mises à jour, est-ce que vous

 18   répondriez de la même façon si les mêmes questions venaient à vous être

 19   posées à nouveau ?

 20   R.  Oui, oui, absolument.

 21   Q.  Très bien.

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais vous

 23   indiquer qu'il y a un certain nombre de documents qui remontent à la

 24   déposition précédente, je souhaiterais les présenter. J'en ai parlé

 25   rapidement au greffier. Cela commence par le document 06660, document 65

 26   ter, qui est le compte rendu d'audience dans l'affaire Popovic.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous allons, dans un premier temps,

 28   nous intéresser à ce document.


Page 9616

  1   Il sera versé au dossier et retenu comme élément de preuve.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Des cotes seront attribuées et un

  3   mémorandum sera diffusé ultérieurement.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, mais pour ce qui est du compte

  5   rendu d'audience dans l'affaire Popovic, il faudrait qu'une cote lui soit

  6   attribuée maintenant.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce sera le

  8   document P1774.

  9   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

 10   M. McCLOSKEY : [interprétation] Nous avons un total de 29 pièces qui vont

 11   être traitées, comme l'a indiqué le greffier.

 12   Il y a les rapports de l'année 2009 à propos desquels vous venez de

 13   rendre une décision. Je vais en parler très rapidement avec le témoin, et

 14   nous aurons donc les cotes lorsque ces documents seront présentés, si vous

 15   êtes d'accord.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, cela nous convient.

 17   M. McCLOSKEY : [interprétation] Et nous avons un résumé relativement

 18   succinct pour ce témoin. Sa déposition sera peut-être un peu plus longue

 19   que les dépositions au titre de l'article 92 ter, du fait des sujets qu'il

 20   va aborder, des discussions que nous avons eues avec Me Gajic et de

 21   l'intérêt que cela suscite pour la Défense. Donc je pense qu'il est

 22   judicieux d'entre le témoin à ce sujet. Je vous encourage à m'interrompre

 23   si vous avez des questions à poser à propos de ce sujet, pour que tout soit

 24   le plus clair possible. Je vais véritablement essayer de mettre en exergue

 25   les points saillants, mais bon, je ne pourrais peut-être pas le faire à

 26   chaque fois. Il se peut que vous soyez intéressés par certains éléments.

 27   Et j'espère, en fait, que la durée de mon interrogatoire ne dépassera

 28   pas deux heures. Le Dr Brunborg et moi avons déjà travaillé comme cela


Page 9617

  1   précédemment, et je pense que -- j'espère en tout cas, que nous prendrons

  2   moins de temps que deux heures.

  3   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Nous

  4   apprécions ce geste de votre part.

  5   M. McCLOSKEY : [interprétation] Voilà le résumé du Dr Helge Brunborg, qui

  6   est économiste et démographe de formation, et est employé comme chercheur

  7   supérieur au sein du département des statistiques de l'Institut national

  8   norvégien pour les statistiques, qui est connu sous le nom de Statistiques

  9   Norvège. Il a essentiellement travaillé dans les cadres de projets pour

 10   Statistiques Norvège, mais il a également travaillé dans le cadre de

 11   projets démographiques en Palestine, au Mozambique, au Botswana, au

 12   Bangladesh, en Albanie, ainsi qu'en Afghanistan pour le fond des Nations

 13   Unies pour les activités de population, et il a également contribué à

 14   d'autres projets internationaux.

 15   Entre le mois de juin 1997 jusqu'à la fin de l'année 1998, le Dr Brunborg a

 16   travaillé pour le bureau du Procureur du TPIY. Dans un premier temps, sa

 17   mission a consisté à collecter et évaluer des données relatives aux

 18   modifications démographiques en Bosnie-Herzégovine pour la période 1992 à

 19   1995. Au début de l'année 1999 ou à la fin de l'année 1998, le bureau du

 20   Procureur a demandé au Dr Brunborg de compiler une liste des personnes

 21   portées disparues dans le cadre des événements de Srebrenica en juillet

 22   1995. Le Dr Brunborg a témoigné pour le bureau du Procureur à ce sujet dans

 23   les affaires du TPIY, dans les affaires suivantes : Krstic, Blagojevic,

 24   Milosevic, Perisic, Milutinovic, Popovic et, plus récemment, Djordjevic.

 25   Son premier rapport sur les personnes portées disparues à Srebrenica a été

 26   terminé en 2000, et il a mis à jour ce rapport en 2005 et a travaillé avec

 27   la démographe du bureau du Procureur Mme Ewa Tabeau pour mettre au point le

 28   tout dernier rapport en 2009, qui fera l'objet d'ailleurs de quelques


Page 9618

  1   questions complémentaires.

  2   Alors, pour dresser la liste des personnes portées disparues à Srebrenica,

  3   le Dr Brunborg a utilisé son analyse de la liste des personnes portées

  4   disparues de Bosnie-Herzégovine qui avait été mise au point par le comité

  5   international de la Croix-Rouge, ainsi que la liste des personnes portées

  6   disparues compilée par l'ONG physiciens pour les droits de l'homme, donc

  7   l'ONG PHR. Le Dr Brunborg a extrait les donnés de ces deux listes relatives

  8   aux personnes dont la disparition avait eu lieu au moment de la chute de

  9   Srebrenica. A savoir, il s'agissait de personnes dont la famille avait

 10   indiqué qu'elles étaient portées disparues le 11 juillet 1995 ou après le

 11   11 juillet 1995 dans des lieux autour de Srebrenica. Il a reçu ces

 12   consignes de l'équipe du bureau du procureur de Srebrenica.

 13   Pour déterminer et analyser l'exactitude des listes de personnes portées

 14   disparues du CICR et de PHR, le Dr Brunborg a utilisé différentes sources

 15   de données, notamment le recensement de l'année 1991 qui avait été organisé

 16   en ex-Yougoslavie, la liste d'inscription des électeurs obtenue par

 17   l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe en 1997. Et par

 18   la suite, il a également utilisé les dossiers militaires de l'armée de la

 19   BiH à propos des soldats tombés au champ d'honneur, les fichiers

 20   d'identification d'ADN de la commission internationale relative aux

 21   personnes disparues pour Srebrenica et d'autres fichiers, tel que cela est

 22   indiqué dans ses rapports.

 23   Dans le cadre de son travail, le Dr Brunborg a étudié et a analysé ce qui

 24   avait été avancé par différents groupes qui déclaraient que le nombre des

 25   personnes portées disparues à Srebrenica avait été exagéré sur les listes

 26   du CICR, certaines  de ces idées étant les suivantes : un grand nombre de

 27   personnes qui figuraient sur la liste des personnes portées disparues

 28   étaient, en fait, en vie et avaient été inscrites sur la liste des


Page 9619

  1   électeurs de 1996; deuxièmement, un grand nombre de personnes qui

  2   figuraient sur la liste des personnes portées disparues étaient mortes

  3   avant la chute de Srebrenica, et donc leur mort n'avait rien à voir avec la

  4   chute de Srebrenica; et troisièmement, un grand nombre de soldats de la BiH

  5   de Srebrenica étaient portées disparus ou étaient morts avant la chute de

  6   Srebrenica et, par conséquent, on ne pouvait pas établir la corrélation

  7   avec la chute de Srebrenica.

  8   Le Dr Brunborg n'a trouvé aucun fondement dans ces idées.

  9   Le Dr Brunborg n'a trouvé aucune indication dans les rapports de personnes

 10   portées disparues suivant laquelle les Musulmans auraient fait état de

 11   personnes fictives dont l'existence aurait été rapportée par des membres de

 12   leurs familles qui auraient indiqué qu'elles avaient été portées disparues

 13   au CICR et au PHR.

 14   Dans son rapport du 12 février 2000, le Dr Brunborg a conclu qu'au moins 7

 15   475 personnes avaient été portées disparues ou étaient mortes à Srebrenica.

 16   Dans son rapport le plus récent du 9 avril 2009, le Dr Brunborg a conclu

 17   qu'il y avait au moins 7 905 personnes portées disparues ou décédées.

 18   Le Dr Brunborg a témoigné dans l'affaire Popovic que pour déterminer le

 19   nombre total de personnes qui sont portées disparues ou mortes après la

 20   chute de Srebrenica, il faut savoir que cela s'inscrit dans le cadre d'un

 21   processus toujours en cours et que de nouvelles données à la suite

 22   d'exhumations et d'identification vont probablement augmenter le nombre de

 23   personnes portées disparues.

 24   Q.  Docteur Brunborg, je viens de faire état de votre expérience et des

 25   compétences qui sont les vôtres et qui ont été abordées lors de vos

 26   dépositions précédentes, donc je ne vais pas vous reposer de questions à ce

 27   sujet.

 28   Mais j'aimerais quand même vous demander de nous dire, à propos de


Page 9620

  1   votre travail, du travail que vous avez accompli au Tribunal, comment cela

  2   vous a permis de mettre au point un nouveau volet de la démographie que

  3   vous appelez la démographie des conflits. Est-ce que vous pourriez nous

  4   expliquer brièvement ce qu'est cette démographie des conflits et comment

  5   est-ce que vous pouvez établir le lien entre cette démographie des conflits

  6   et le travail précédent que vous avez effectué dans le domaine des

  7   statistiques et de la démographie.

  8   R.  Je vous dirais dans un premier temps que je ne suis pas le seul à avoir

  9   mis au point ce lien. Il y a de nombreuses personnes expertes en la matière

 10   qui ont apporté leur contribution, et les Américains ont travaillé dans ce

 11   domaine. Mais lorsqu'il s'agit de zones de conflit, il est évident que les

 12   problèmes relatifs aux données et aux méthodes sont particulièrement

 13   spéciaux et pointus, et il faut justement accorder une attention très

 14   particulière à cette question. C'est la raison pour laquelle nous avons

 15   organisé un colloque en 2003 sur la démographie des conflits, et cela a

 16   abouti à deux éditions spéciales dans le "Journal européen pour la

 17   population". Cela a également abouti à un livre écrit sur la démographie

 18   des conflits, livre qui a été rédigé par moi-même et par mon co-auteur, Ewa

 19   Tabeau, avec qui j'avais collaboré précédemment. Et c'est ainsi que je

 20   préside maintenant un groupe de travail qui s'intéresse à cette question.

 21   Lors de conférences de démographie, il y a plusieurs sessions organisées

 22   sur la démographie des conflits, et à ce titre, de nombreuses contributions

 23   ont été entendues. Vous savez qu'il y a malheureusement de nombreux

 24   conflits dans le monde, et parfois, il faut pouvoir estimer le nombre total

 25   des victimes, des blessés, des personnes décédées, des réfugiés, pour voir

 26   comment, par exemple, le taux de fertilité ainsi que le taux de mariage

 27   sont touchés par les conflits.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'aimerais vous demander une


Page 9621

  1   précision. Vous avez mentionné deux personnes avec qui vous avez rédigé ce

  2   journal. Vous avez évoqué le nom de Mme Ewa Tabeau, mais le nom de l'autre

  3   personne n'a pas été saisi au compte rendu d'audience.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] L'autre témoin est Henrik Urdal, qui a

  5   travaillé avec moi ici en 1999 et qui a rédigé avec moi le rapport

  6   mentionné par M. McCloskey, qui n'a pas été publié en 2000, mais qui a été

  7   terminé en 2000 et qui a été utilisé dans l'affaire Krstic.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 10   Q.  Comme nous le savons maintenant, une mission vous avait été confiée

 11   ici. Il s'agissait de prendre en considération les listes du CICR et du

 12   PHR, de les évaluer et de dresser une liste crédible pour les personnes qui

 13   ont été portées disparues à Srebrenica.

 14   Est-ce que vous pourriez nous dire très brièvement ce qui fait que vous

 15   avez été jugé compétent pour réviser et analyser de façon critique la liste

 16   des personnes portées disparues du CICR ? Juste donnez-nous les éléments

 17   principaux pour que la Chambre puisse comprendre pourquoi vous avez été

 18   convoqué pour cette tâche et pourquoi vous étiez compétent pour la faire.

 19   R.  Premièrement, je pense qu'il y a deux raisons. D'abord, ma formation

 20   générale et mon expérience dans le domaine de la démographie. Il est

 21   important de comprendre et de savoir quelles sont différentes tendances

 22   démographiques. Et deuxièmement, je réfère à mon expérience en Norvège

 23   ainsi que dans d'autres pays, ailleurs, où j'ai travaillé avec des données

 24   relatives à des personnes. Notamment en Norvège, parce que nous faisons

 25   beaucoup de travail démographique à partir de registres administratifs, ce

 26   qui fait que nous essayons d'établir cette corrélation à partir de

 27   différentes sources. Par exemple, nous pouvons établir une correspondance

 28   entre des fichiers de décès et d'autres fichiers, les fichiers, par


Page 9622

  1   exemple, utilisés par le corps enseignant pour voir quelles sont les

  2   corrélations entre l'éducation et la mortalité, ou plutôt le contraire, la

  3   mortalité et l'éducation. Donc j'ai pensé que cette expérience serait utile

  4   pour travailler des données relatives à des personnes, et c'est l'approche

  5   que nous avons retenue depuis le début, parce qu'il est extrêmement

  6   important de collecter et d'analyser des données relatives à des personnes.

  7   Parce qu'il est beaucoup plus difficile de mentir lorsqu'il s'agit de

  8   données relatives à des personnes.

  9   Pendant la guerre, les conflits en Bosnie, il y a eu un grand nombre de

 10   chiffres qui ont été avancés à propos du nombre de décès. Lorsque je suis

 11   arrivé, il y avait des chiffres qui étaient aussi faibles que 20 000 pour

 12   toute la Bosnie et toutes les appartenances ethniques, mais qui allaient

 13   jusqu'à, par exemple, plus de 300 000 dans certains cas, ce qui ne pouvait

 14   pas être vrai parce que nombreux parmi ces chiffres avaient été collectés

 15   en ajoutant des articles de presse et d'autres rapports. Il y avait donc le

 16   nombre de victimes qui avait été ajouté pour tel ou tel incident, par

 17   exemple. Donc tout cela avait été additionné et cela nous donnait des

 18   estimations qui étaient extrêmement divergentes. C'est pour cela que le

 19   Tribunal souhaitait avoir les services d'une personne qui avait une

 20   expérience du domaine de la statistique démographique.

 21   Q.  Dans le dernier procès où vous avez témoigné, il a été indiqué que vous

 22   avez surtout une expérience des statistiques norvégiennes. Je pense que

 23   vous aviez indiqué qu'en Norvège, dans le cadre d'un recensement, chaque

 24   personne se voit attribuer un numéro. La population est relativement

 25   limitée. C'est un monde qui est très différent de celui de l'ex-

 26   Yougoslavie.

 27   Donc, est-ce que vous avez pu utiliser votre expérience norvégienne

 28   acquise dans la société norvégienne pour l'utiliser dans une situation de


Page 9623

  1   guerre où vous aviez différents chiffres et différents articles de presse ?

  2   R.  Oui, tout à fait. Je dirais que j'avais également acquis d'autres

  3   expériences dans d'autres données, au Botswana, par exemple, lorsqu'il y a

  4   eu un recensement qui a été organisé. Il y a de nombreuses similitudes

  5   entre la Norvège et la Bosnie. La population atteint à peu près le même

  6   chiffre, entre 4 et 5 millions. Comme le reste de l'ex-Yougoslavie, la

  7   Bosnie avait organisé des recensements de bonne qualité. Il y avait un

  8   numéro d'identification personnel qui avait été introduit dans l'ex-

  9   Yougoslavie de l'année 1981, et nous avons pu utiliser cela comme base pour

 10   établir le lien entre les fichiers provenant de différentes sources.

 11   Q.  Je vais aborder le cœur du débat. Lorsqu'on vous a demandé de dresser

 12   cette liste de Srebrenica, j'aimerais savoir qui vous a fourni les grandes

 13   consignes, à savoir qu'il fallait qu'il s'agisse de personnes portées

 14   disparues à partir du 11 juillet et au-delà dans des zones autour de

 15   Srebrenica ? Qui vous a donné ces consignes ?

 16   R.  C'était l'équipe d'enquêteurs du bureau du Procureur.

 17   Q.  Bien. Et est-ce que j'étais le juriste de cette équipe ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Bien. Est-ce que vous pourriez rapidement indiquer à la Chambre de

 20   première instance comment est-ce que cette liste du CICR a été dressée et

 21   ce qu'elle représente pour qu'ils comprennent ce que vous étiez censé

 22   évaluer ?

 23   R.  Le CICR est une organisation humanitaire qui se trouve basée en Suisse.

 24   Il s'agit du comité international de la Croix-Rouge. Ils collectent ce type

 25   de listes dans des situations de conflit fondamentalement pour que les

 26   personnes puissent se retrouver à nouveau. Lorsque vous vous trouvez dans

 27   une situation de conflit de guerre, nombreuses sont les familles qui sont

 28   séparées, et il est très difficile de savoir ce qu'il en est. Certains sont


Page 9624

  1   arrêtés, d'autres meurent, d'autres fuient le conflit vers d'autres régions

  2   de leur pays, ou vers d'autres pays d'ailleurs. Avant l'internet et les

  3   téléphones cellulaires, il était très difficile de localiser les gens.

  4   C'est la raison fondamentale qui explique pourquoi le CICR a commencé à

  5   collecter ces données dans toutes les régions de l'ex-Yougoslavie,

  6   notamment en Bosnie, et plus particulièrement à Srebrenica après la chute

  7   de Srebrenica en juillet 1995.

  8   Q.  Est-ce que vous savez plus ou moins depuis combien de temps le CICR

  9   fait ce genre de travail dans des situations de conflit ?

 10   R.  Je ne sais pas. Bien avant -- je crois que CICR a été créé il y a plus

 11   d'une centaine d'années. Je ne sais pas à quel moment ils ont commencé à

 12   compiler ces listes.

 13   Q.  Pourriez-vous décrire la liste en tant que telle, comment cette liste a

 14   été créée et comment ils ont procédé ?

 15   R.  Pardonnez-moi.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous devriez, à ce stade, boire un

 17   verre d'eau. Je souhaite attirer votre attention sur la note du

 18   sténotypiste. Vous parlez la même langue et on vous demande de bien vouloir

 19   marquer une pause pendant les questions et les réponses. C'est très

 20   important pour le sténotypiste ainsi que pour les interprètes que tout ceci

 21   soit consigné et traduit dans différentes langues.

 22   Vous pouvez maintenant répondre à la question.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Veuillez répéter votre question, s'il vous

 24   plaît.

 25   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 26   Q.  Veuillez nous dire comment cette liste a été préparée.

 27   R.  Très peu de temps après la chute de Srebrenica, le CICR a créé quelque

 28   chose qui ressemblait à un bureau à Tuzla de façon à ce que les membres de


Page 9625

  1   la famille puissent venir et s'enregistrer, des membres de la famille qui

  2   avaient perdu les membres de leurs familles, des personnes portées

  3   disparues qu'ils n'avaient pas vues depuis la chute de Srebrenica. Ceci

  4   s'est poursuivi à Tuzla, à Sarajevo, ainsi que dans d'autres régions de

  5   Bosnie pendant plusieurs années. En réalité, cela se poursuit toujours; ils

  6   recueillent toujours des données sur les personnes portées disparues.

  7   Q.  Et ce rapport a-t-il été publié -- est-ce qu'il était public ?

  8   R.  Oui, plusieurs listes ont été publiées. Tout d'abord, sur papier à

  9   l'époque. Il n'y avait pas l'internet. Des ouvrages assez épais comportant

 10   les noms de près de 7 000 personnes. Pour la Bosnie, il s'agissait d'un

 11   nombre plus important de personnes portées disparues en Bosnie.

 12   Q.  Et quels étaient les éléments de base qu'ils recueillaient hormis,

 13   évidemment, les noms des membres de famille portés disparus ? Quels autres

 14   éléments d'information étaient recueillis ?

 15   R.  Eh bien, comme le Président de la Chambre l'a conseillé, je marque une

 16   petite pause.

 17   Le nom et le prénom, bien sûr, du membre de la famille porté disparu,

 18   ensuite le nom du père, la date à laquelle cette personne a été vue en vie

 19   pour la dernière fois -- ou que la personne a entendu dire que la personne

 20   est morte, si c'était le cas. L'endroit où il ou elle pensait que cette

 21   personne était portée disparue ou la dernière fois où cette personne a été

 22   vue, le lieu de naissance, ainsi que le domicile. Et, bien évidemment, le

 23   sexe, masculin ou féminin.

 24   Q.  Et pourriez-vous nous parler des difficultés que vous avez eues à

 25   établir l'exactitude des éléments que vous avez étudiés ?

 26   R.  La toute première chose que nous avons faite, nous avons essayé de voir

 27   s'il y avait des doublons pour voir si quelqu'un avait été enregistré à

 28   tort, deux fois par exemple, ou davantage. Effectivement, il y avait des


Page 9626

  1   doublons. Et dans une situation chaotique, cela n'est pas surprenant; par

  2   exemple, deux membres de familles différentes viennent, se présentent et

  3   font enregistrer le nom d'une personne portée disparue. Quelquefois,

  4   l'information est un petit peu différente; il y a une des deux personnes

  5   qui se souvient davantage de la date de naissance, et l'autre, d'autres

  6   choses. Il est très difficile parfois de mettre le doigt sur ces doublons,

  7   mais nous avons réussi à les identifier au moyen de différentes méthodes.

  8   Donc cela posait un problème.

  9   Et la date de naissance n'était pas toujours complète ou exacte, parce

 10   qu'encore une fois, dans une situation chaotique, les gens ne se

 11   souvenaient pas toujours des membres de leurs familles et de la date de

 12   naissance de ces derniers. En général, ils se souviennent de l'année de

 13   naissance - la plupart des gens se souviennent de cela - mais la date

 14   exacte, cela est plus difficile. Voilà les difficultés que nous avons

 15   rencontrées.

 16   Q.  Bien. Dans le résumé que j'ai lu, il y a une autre liste que vous dites

 17   avoir utilisée, la liste PHR, des médecins défendant les droits de l'homme.

 18   C'est une organisation non gouvernementale qui mettait à disposition des

 19   médecins pour les exhumations. Savez-vous ce qu'a fait le PHR dans ce

 20   cadre-là, s'il vous plaît, en quelques mots ?

 21   R.  Oui. On vous a peut-être dit que leur objectif était assez différent.

 22   Leur objectif consistait à aider les familles à identifier les membres de

 23   la famille qui étaient perdus ou qui avaient été tués. C'était en quelque

 24   sorte une base de données ante mortem. Ils ont commencé à recueillir ces

 25   données en 1996 et ont recueilli des informations plus détaillées sur, par

 26   exemple, l'apparence physique des personnes portées disparues, en

 27   particulier des différentes caractéristiques liées aux dents et aux

 28   morceaux de vêtements pour aider à l'identification des corps qui avaient


Page 9627

  1   été exhumés.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Puis-je vous interrompre pendant

  3   quelques instants. Est-ce que vous êtes mal assis ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que j'ai l'air d'être inconfortable ?

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, tout à fait. J'ai l'impression

  6   que vous avez du mal avec la chaise. Mais peut-être que l'huissier peut

  7   vous venir en aide.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est vrai que c'est un petit peu trop penché

  9   en arrière.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, je me suis rendu compte que le

 11   problème venait de là.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Bon, là, voilà. Si je suis plus détendu --

 13   non, non.

 14   Oui. C'est mieux.

 15   Merci, Monsieur le Président, d'avoir tenu compte de ma position assise.

 16   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 17   Q.  Pendant combien de temps le PHR a-t-il vu les membres de la famille et

 18   recueilli les informations dont vous venez de parler ?

 19   R.  Pendant un ou deux ans. Je crois qu'ils ont terminé leurs travaux en

 20   1998 ou 1999. Peut-être que c'est dû à un problème de financement. Les

 21   données existent toujours et sont utilisées par d'autres organisations.

 22   Q.  Avez-vous eu un accès libre et entier à ces éléments dans les bases de

 23   données informatiques ?

 24   R.  Oui, tout à fait.

 25   Q.  Et pour finir, avez-vous pu accéder à la liste des personnes portées

 26   disparues, différentes listes du CICR et leurs mises à jour sous forme

 27   électronique ?

 28   R.  Tout à fait.


Page 9628

  1   Q.  Est-ce que le PHR a eu des difficultés semblables à celles que vous

  2   avez décrites lorsque vous avez parlé du CICR ?

  3   R.  Non, il n'y avait pas autant de doublons, si je me souviens bien. Je ne

  4   sais même pas s'il y en avait; nous avons vérifié. La date de naissance, en

  5   général, était plus complète, voire plus exacte dans certains cas, parce

  6   que ces données ont été recueillies dans une situation qui était moins

  7   tendue. Ce n'était pas tout de suite après la fuite de certaines femmes de

  8   Srebrenica. Donc les gens se sont présentés, sont venus nous voir, et

  9   avaient quelquefois des documents pour nous donner la date de naissance

 10   exacte, par exemple.

 11   Q.  Lors de vos travaux initiaux, qu'avez-vous fait avec ces deux rapports

 12   pour compiler une seule et même liste ?

 13   R.  Et bien, nous avions plusieurs versions des personnes portées disparues

 14   du CICR, donc il fallait faire une fusion de ces documents. Il y avait

 15   différents éléments qui se chevauchaient : il y avait des années

 16   différentes et, quelquefois, il y avait des noms complémentaires. Donc nous

 17   avons fusionné toutes les listes. Il y en avait deux du CICR et deux du

 18   PHR. Nous avons fusionné ces listes, nous avons supprimé tous les éléments

 19   qui se chevauchaient et nous avons comparé les éléments d'information.

 20   Q.  Et avez-vous fait un quelconque effort, comme vous nous l'avez décrit

 21   maintenant, de vous débarrasser de tous les doublons émanant de ces listes,

 22   celles du PHR et du CICR ?

 23   R.  Oui, tout à fait, mais cela n'était pas toujours très aisé. On ne

 24   savait pas très bien quel doublon il fallait supprimer, parce que les

 25   éléments d'information étaient différents, et c'était quelque chose sur

 26   lequel nous devions nous pencher également.

 27   Q.  Y avait-il une autre source de données qui vous a permis de résoudre ce

 28   problème-là, à savoir si ces personnes sur la liste correspondaient à de


Page 9629

  1   vraies personnes ?

  2   R.  Oui. Fort heureusement pour nous, il y a le recensement qui avait été

  3   fait en 1991, le 31 mars, juste avant l'éclatement de la guerre, et ce, sur

  4   tout le territoire de la Yougoslavie et en Bosnie. Et nous avons pu nous

  5   emparer de ces données -- de ces fichiers électroniques de ce recensement,

  6   avec les noms, les dates de naissance pour tout le monde, tout habitant de

  7   ce pays à la date du 31 mars 1991. Le recensement a également été fait dans

  8   une situation qui était plus calme, et nous pensons que bon nombre de ces

  9   données étaient de meilleure qualité au niveau de ce recensement, comme la

 10   date de naissance. Et ce recensement était complet, donc si, par exemple,

 11   nous étions inquiets à propos de certains doublons parce qu'il y avait deux

 12   fichiers qui correspondaient à la même personne -- cela avait l'air de

 13   correspondre à une même personne mais pourrait correspondre à deux

 14   personnes, avec le recensement, nous avons pu comparer les éléments

 15   d'information. Donc il y avait le même nom et le même nom du père, mais la

 16   date de naissance était quelque peu différente. Mais nous avons eu des

 17   difficultés avec le recensement aussi, et le plus difficile était que les

 18   noms étaient souvent mal orthographiés. La raison à cela c'est que nous

 19   avons scanné les documents. Ce qui était appelé les énumérateurs

 20   utilisaient des formulaires et inscrivaient les noms des membres de la

 21   famille, et lorsqu'on scannait les documents, l'équipement en question ne

 22   permettait pas toujours de lire ou de scanner ce qui avait été rédigé à la

 23   main. En vérifiant cela visuellement, nous pouvions corriger les erreurs,

 24   et petit à petit, nous avons employé des méthodes qui nous permettaient

 25   d'améliorer l'orthographe des noms.

 26   Q.  Bien. Est-ce que vous pourriez dire aux Juges de la Chambre -- je crois

 27   que c'est quelque chose à propos duquel vous avez déjà témoigné. Pourriez-

 28   vous donner une idée aux Juges de la Chambre -- aucun recensement n'est


Page 9630

  1   parfait, mais pourriez-vous nous parler dans les grandes lignes de

  2   l'exactitude du recensement effectué en ex-Yougoslavie correspondant à des

  3   millions de foyers ou de personnes qu'il fallait justifier par le

  4   recensement.

  5   R.  Je ne peux pas vous indiquer l'exactitude avec un chiffre ou un

  6   pourcentage. Il y a ce qu'on appelle, en fait, une enquête post-énumération

  7   où on prend un échantillon de foyers que l'on interviewe à nouveau, et à ce

  8   moment-là, on compare ces données avec un premier recensement. Ceci n'a pas

  9   été fait en Bosnie, en partie à cause du conflit qui a démarré en 1991. Et

 10   -- mais de façon générale, je dirais que la qualité est bonne. Certaines

 11   des difficultés portent sur des personnes absentes, qui vivaient à

 12   l'étranger et qui ont fait partie des recensements, qui étaient incluses.

 13   Et donc, il faut savoir si le recensement se fait sur une base de facto ou

 14   de jure.

 15   Q.  Pourriez-vous décrire, s'il vous plaît -- je crois que vos premiers

 16   travaux en l'an 2000 ont indiqué que vous n'avez pas utilisé le recensement

 17   pour toutes les personnes qui figuraient sur la liste. Mais au fil de vos

 18   travaux, vous avez utilisé le recensement de plus en plus.

 19   Pourriez-vous nous parlez de cela ? Donc, comment vous avez utilisé

 20   le recensement jusqu'en l'an 2000 [comme interprété] pour vérifier les

 21   éléments que vous aviez sur la liste ?

 22   R.  Comme je vous l'ai dit, en raison de toutes les erreurs

 23   d'orthographe, à cause des formulaires de recensement qui étaient scannés,

 24   nous ne pouvions pas utiliser un système de comparaison informatique des

 25   personnes portées disparues avec les éléments que nous avions pour l'an

 26   2000. Mais nous avons utilisé un système qui permettait de corriger

 27   l'orthographe. Par exemple, dans le cas d'un foyer, il y avait différentes

 28   personnes qui avaient le même nom de famille, et si le nom de faille était


Page 9631

  1   orthographié différemment et que nous savions qu'un des noms de famille

  2   était juste, à ce moment-là, nous corrigions les autres noms. Par exemple,

  3   je vais vous donner le cas de Ljubic, c'est un nom, et Lj était parfois mal

  4   interprété et on pensait que c'était un Q; à ce moment-là, on remettait Lj

  5   à la place du Q. Par exemple, Music était parfois orthographié avec M-v-s,

  6   donc nous ajoutions [comme interprété] le V et le U et la correspondance

  7   était beaucoup plus importante entre les noms des personnes portées

  8   disparues et les noms figurant dans les formulaires de recensement. Donc

  9   nous avons procédé comme ça plutôt que de simplement vérifier les noms des

 10   différentes personnes individuellement, comme nous l'avions fait en l'an

 11   2000.

 12   Q.  Bien. Et aviez-vous une autre source de donnés très importante émanant

 13   d'un groupe ou d'une organisation qui s'appelle l'ICMP, qui vous a aidé

 14   dans vos travaux ?

 15   R.  Oui. Mais je souhaite également indiquer qu'il y avait une autre

 16   organisation dont nous avons obtenu des données, c'est l'OSCE,

 17   l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe, qui nous a

 18   remis une liste d'électeurs enregistrés pour l'année 1997 et 1998. Ils nous

 19   ont fourni les noms également, ainsi qu'un numéro d'identification. La

 20   raison pour laquelle nous nous sommes interessés à cela, c'est que nous

 21   souhaitions voir si certaines des personnes disparues avaient survécu à la

 22   guerre et avaient été enregistrées par erreur, parce qu'évidemment, s'ils

 23   étaient sur la liste des électeurs, ils n'étaient bien évidemment pas

 24   morts.

 25   Donc nous avons comparé la liste des personnes disparues avec la liste des

 26   électeurs. Vous m'avez posé une question à propos de la commission

 27   internationale chargée des personnes portées disparues, ils ont commencé

 28   leurs travaux en procédant à des exhumations et à des analyses d'ADN et ont


Page 9632

  1   comparé les échantillons de sang des différents membres de la famille des

  2   personnes portées disparues.

  3   Q.  Très bien.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey, je souhaite poser

  5   une question.

  6   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vous en prie.

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Cette liste des électeurs en 1997 et

  8   1998, comment ceci a-t-il été compilé ? Quelle était la source fournie aux

  9   autorités nationales, et sur quoi se sont-ils fondés ? Est-ce qu'ils ont

 10   dénombré les personnes et est-ce qu'ils les ont ensuite enregistrées, ou

 11   est-ce que ce sont des données qu'ils ont recueillies à partir d'autres

 12   listes ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Les personnes devaient se présenter pour venir

 14   voter et être enregistrées. Mais ces personnes ont dû être dénombrées en

 15   1991, donc tous les lieux de vote disposaient du recensement de 1991, et

 16   les personnes prouvaient quelle était leur identité, je suis telle ou telle

 17   personne. Et si on retrouvait cette personne sur la liste de recensement de

 18   1991, à ce moment-là, on l'enlevait et on disait que c'est une personne qui

 19   avait été enregistrée comme électeur. Si le nom de la personne ne figurait

 20   pas sur la liste de recensement de 1991, ils devaient fournir une pièce

 21   d'identité et prouver qu'ils vivaient en Bosnie pour avoir le droit de

 22   voter.

 23   Donc les gens ont dû se présenter pour venir s'enregistrer.

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc ils ont dû se présenter

 25   personnellement, ce qui, évidemment, ces personnes étaient en vie à ce

 26   moment-là ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. S'il y avait des personnes portées

 28   disparues qui se présentaient, bien sûr.


Page 9633

  1   Mais quelquefois, certaines personnes souhaitaient bénéficier d'un avantage

  2   politique ou d'une influence politique en utilisant l'identité d'une

  3   personne portée disparue ou pour d'autres raisons. Lorsque quelqu'un se

  4   présentait au bureau, la personne procédant à l'enregistrement, à ce

  5   moment-là, supprimait la personne qui avait été consignée par erreur. Et

  6   nous allons aborder les données de ces comparaisons -- les conclusions de

  7   ces comparaisons par la suite.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 10   Q.  Lorsque la personne venait pour être enregistrée, que faisait un

 11   représentant officiel de l'OSCE ou un représentant du gouvernement ?

 12   R.  Je ne sais pas exactement. Je pense qu'évidemment, il y avait beaucoup

 13   de Bosniaques qui s'occupaient de l'enregistrement. L'OSCE, en fait, gérait

 14   ces centres d'enregistrement, je ne sais pas très bien. Je crois qu'en

 15   fait, l'OSCE supervisait l'ensemble du processus, c'est eux qui en étaient

 16   responsables.

 17   Q.  Bien. Et vous disposiez de la liste qui avait été compilée à partir des

 18   données du PHR et du CICR des personnes portées disparues à partir du 11

 19   juillet. Vous avez donc utilisé ces listes d'électeurs pour comparer les

 20   éléments avec votre liste - pour que ceci soit tout à fait clair - pour

 21   savoir ce qui correspondait à  quoi ?

 22   R.  Oui. Alors, nous avons établi une corrélation entre les personnes

 23   portées disparues et ces listes d'électeurs pour voir s'il y avait des

 24   survivants. Nous avons constaté qu'il y avait neuf personnes en 2000 qui

 25   étaient sur les deux listes. Donc, soit ces personnes n'étaient pas portées

 26   disparues, en tout cas ces personnes n'étaient pas mortes. Ou alors il y

 27   avait un enregistrement qui s'était fait de façon erronée. Donc nous avons

 28   supprimé ces neuf fichiers de personnes portées disparues.


Page 9634

  1   Par la suite, nous avons constaté qu'une personne a été retrouvée

  2   morte et identifiée comme tel par une analyse d'ADN. Sur les huit personnes

  3   restantes sur cette liste, ça reste une question non résolue.

  4   Q.  Parce que c'est une question non résolue, vous avez supprimé les noms

  5   de ces personnes sur la liste; elles ne figurent pas dans les derniers

  6   chiffres présentés ?

  7   R.  C'est exact. Plus tard, nous avons comparé ces noms et ces données avec

  8   les personnes déplacées, et nous avons retrouvé jusqu'à 26 personnes, un

  9   chiffre plus important. Lorsque nous avions un léger soupçon et que nous

 10   pensions que ces personnes étaient des survivants, étaient en vie, nous les

 11   enlevions de notre liste. Nous avons fait très attention de vérifier toutes

 12   les corrélations. Il y avait différentes caractéristiques différentes et

 13   différentes personnes, et nous n'avons pas mélangé cela.

 14   Q.  En particulier lorsqu'il s'agit de l'allégation indiquant qu'il y avait

 15   des personnes qui étaient en vie et qui votaient, qui figuraient sur votre

 16   liste, j'essaie que vous expliquiez comment vous procédiez à ces

 17   corrélations plus en détail.

 18   M. McCLOSKEY : [interprétation] 00543, numéro 65 ter.

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] A ce stade, je souhaite apporter une

 20   correction au compte rendu d'audience. Le compte rendu d'audience de

 21   l'affaire Popovic donné aujourd'hui à la page 5, lignes 5 et 6, comporte un

 22   numéro de cote qui est erroné. Le chiffre exact devrait être P1774 au lieu

 23   de 177 -- pardonnez-moi, je me suis mal exprimé. Il doit s'agit du 1775 au

 24   lieu de 1774. Je crois que ceci a été corrigé maintenant au compte rendu

 25   d'audience.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Pourriez-vous agrandir la version que j'ai à

 27   l'écran ou est-ce que je le fais moi-même…

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ce sera fait.


Page 9635

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Un instant. Si vous avez besoin --

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, tout va bien. Merci.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] D'accord.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Souhaitez-vous que je parcoure cette pièce ?

  6   M. McCLOSKEY : [interprétation]

  7   Q.  Tout d'abord, je vais vous demander cette question-ci : est-ce qu'il

  8   s'agit de quelque chose qui émane de votre rapport ou de votre dernière

  9   déposition ?

 10   R.  Cela émane du rapport de 2005.

 11   Q.  Bien. Donc il s'agit là d'un exemple d'une corrélation erronée. Est-ce

 12   que vous pourriez nous l'expliquer et -- est-ce que nous pouvons agrandir

 13   cela. C'est un document de base.

 14   R.  Merci.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je souhaite demander à M. Tolimir si

 16   cela suffit ou est-ce que il vous faut la version en B/C/S en même temps

 17   sur l'écran ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je souhaite

 19   accueillir toutes les personnes présentes dans le prétoire, et j'espère que

 20   l'aboutissement de ce procès correspondra à la volonté de Dieu, et non pas

 21   la mienne.

 22   Alors, si nous parlons en termes généraux, il faut comparer les documents

 23   pour voir s'il y a des différentes avec la version en B/C/S.

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je crois que la meilleure façon de

 25   procéder c'est de vous remettre une version en B/C/S, et à ce moment-là,

 26   vous pourrez procéder à la comparaison. Sinon, c'est écrit en tout petit et

 27   c'est illisible. Le représentant du greffe va vous remettre une copie

 28   papier.


Page 9636

  1   M. McCLOSKEY : [interprétation] Comme nous pouvons le constater, il s'agit

  2   surtout de noms bosniaques. Je crois que ceci se passe de commentaires,

  3   donc…

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] M. Tolimir reçoit maintenant une

  5   version en B/C/S de ce document.

  6   M. McCLOSKEY : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Brunborg, pourriez-vous nous expliquer ceci, s'il vous plaît.

  8   Il y a un Delic de la liste 65 ter [comme interprété] et de la liste des

  9   électeurs de 1997, et deux personnes qui ont le même nom qui proviennent du

 10   recensement. Veuillez nous dire pourquoi il y a une corrélation erronée et

 11   comment vous avez compris cela ?

 12   R.  A première vue, si vous regardez, il y a Abdulah Delic qui est né en

 13   1995, et également un Abdulah Delic qui est né en 1995 sur la liste des

 14   électeurs. Donc il semblerait que ce soit la même personne.

 15   Mais ensuite, nous avons remarqué que le nom du père, Husein, n'est

 16   pas donné sur la liste des électeurs, et nous avons recherché à ce moment-

 17   là au niveau du recensement et nous avons constaté, effectivement, qu'il y

 18   avait deux Abdulah Delic qui étaient nés en 1995 et qui ont été identifiés

 19   en 1991. Le premier Abdulah Delic a un père qui s'appelle Husein, et le

 20   second a un père qui s'appelait Kemal. Et ils avaient également des numéros

 21   d'identité -- des numéros d'identification différents : le 183920, et

 22   l'autre c'est le 183954.

 23   Donc nous en avons conclu qu'il s'agissait de personnes différentes

 24   et qu'Abdullah Delic dont le père s'appelle Husein ne figure pas sur la

 25   liste des électeurs et on ne peut pas penser qu'il est en vie en 1997.

 26   Q.  Est-il exact de dire que vous avez conservé Abdullah Delic sur

 27   votre liste et que vous avez estimé qu'il s'agissait d'une personne portée

 28   disparue lorsque vous avez établi les chiffres ?


Page 9637

  1   R.  C'est exact.

  2   Q.  Passons maintenant à une autre partie de votre rapport, 00542, que vous

  3   avez utilisée comme exemple d'une corrélation véritable.

  4   En attendant l'affichage de cela, vous avez évoqué, me semble-t-il, un

  5   chiffre qui était -- un chiffre particulier qui était attribué à ces

  6   personnes lors du recensement. Savez-vous quel est le terme en bosniaque ?

  7   R.  "Maticni broj", c'est un numéro d'identification unique. Ceci a

  8   été attribué à tout le monde en 1991 [comme interprété], et on a ensuite

  9   demandé aux personnes d'enregistrer leur numéro d'identification, "maticni

 10   broj", lorsque les énumérateurs sont venus recueillir les chiffres et

 11   dénombrer le nombre de personnes.

 12   Q.  La liste du CICR a-t-elle obtenu ce numéro ?

 13   R.  Non. Mais la liste électorale faisait figurer ce chiffre.

 14   Q.  Et qu'en est-il du PHR ?

 15   R.  Non. Les personnes en général ne connaissaient pas le numéro de leurs

 16   parents proches.

 17   Q.  Donc, encore une fois, nous constatons qu'il y a un certain Gabeljic,

 18   Avdo. Pourriez-vous nous expliquer comment vous êtes arrivés à cela ?

 19   R.  Tout d'abord, nous constatons qu'il y avait un certain Mensur Gabeljic

 20   sur la liste du CICR, et après avoir vérifié une erreur due au document

 21   scanné ou une erreur typographique, le LJ se transforme en Q. Il y a

 22   également un Mensur Gabeljic sur la liste électorale en 1997. Le nom du

 23   père est indiqué sur la liste du CICR mais pas sur la liste électorale. De

 24   surcroît, ils ne sont pas nés la même année, en 1970 et 1971. Donc il y a

 25   des différences, mais il y avait des similitudes également. Nous avons

 26   vérifié le recensement et nous avons constaté qu'il n'y a qu'une mention

 27   d'un Mensur Gabeljic né le 28-11-1971, et son père était Avoo, mais cela

 28   devrait être Avdo. En tout cas, c'est ce qui avait été porté sur le


Page 9638

  1   registre, et donc c'est une corrélation véritable. Il s'agit bel et bien de

  2   la même personne, et donc ce Mensur Gabeljic a été supprimé sur notre liste

  3   des personnes portées disparues. Il est resté sur la liste du CICR, me

  4   semble-t-il, mais enlevé de la liste du Procureur et exclu, mais peut-être

  5   s'est-on penché dessus par la suite.

  6   Q.  Bien. Nous avons déjà dit cela, mais dites-nous si vous avez pu

  7   retrouver beaucoup de personnes que vous avez pu comparer avec la liste

  8   d'électeurs et votre liste des personnes disparues ?

  9   R.  En 2000, nous avons retrouvé neuf personnes, et ensuite je pense qu'il

 10   y en avait 26 pour ce qui est des différentes listes. Il y a un tableau

 11   pour ce qui est du rapport de 2009. Certains de ces survivants potentiels,

 12   on a pu constater par la suite qu'ils étaient morts. Je crois qu'il y a eu

 13   des erreurs lorsque ces listes ont été établies, pas nécessairement pour de

 14   mauvaises raisons, mais il s'agissait d'erreurs. Nous n'avons pas retrouvé

 15   beaucoup d'exemples de vrais survivants.

 16   Q.  Retournant à votre liste, vous avez déjà dit que vous n'avez pas trouvé

 17   d'exemples, par exemple, de familles musulmanes qui ont donné des

 18   informations erronées pour ce qui est des personnes disparues. Comment vous

 19   avez pu faire cela ?

 20   R.  C'est vrai. Nous avons comparé la liste des personnes disparues avec la

 21   liste de recensement de la population et nous avons pu constater la chose

 22   suivante : pour ce qui est des personnes disparues de Srebrenica, nous

 23   avons pu  arriver au pourcentage de 87 % pour ce qui est du recensement de

 24   1991. Il s'agit donc des mêmes personnes qui ont été sur la liste de 1997.

 25   Et pour ce qui est du 13 % des personnes qui n'ont pas été retrouvées, il y

 26   a différentes raisons pour cela. Il y en avait peut-être qui n'étaient pas

 27   à Srebrenica en 1991 ou en Bosnie. Ils auraient pu vivre en Serbie ou

 28   ailleurs. Il y avait également des erreurs d'orthographe, les informations


Page 9639

  1   manquaient, et il était difficile de comparer les informations disponibles.

  2   Mais en tout cas, 87 % représentait un pourcentage assez élevé.

  3   Q.  Bien. Pour ce qui est de votre rapport de l'année 2000, lorsque vous

  4   avez dressé la liste et lorsque vous avez établi le niveau de qualité de

  5   cette liste en la comparant avec la liste d'électeurs, quels étaient les

  6   types de cas des morts confirmés que vous avez pu comparer avec la liste

  7   que vous aviez dans votre premier rapport ?

  8   R.  En 2000, il n'y avait que 730 [comme interprété] cas de morts

  9   confirmés. Soixante-six cas de morts se trouvaient sur notre liste des

 10   personnes portées disparues, qui ont été par la suite indiqués comme des

 11   cas de morts. Et ensuite, deux autres personnes ont été ajoutées à la liste

 12   des personnes portées disparues et des personnes mortes. Ces personnes ont

 13   été retrouvées dans des fosses communes. Ensuite, il y avait des personnes

 14   disparues à Srebrenica qui n'ont pas été incluses dans notre liste.

 15   Ensuite, pour ce qui est de 7 500 personnes disparues, 66 étaient

 16   mortes.

 17   Q.  Nous avons déjà dit comment la commission qui s'occupait des personnes

 18   disparues travaillait, comment ils ont enregistré les informations fournies

 19   par les membres de la famille des personnes disparues, comment ils ont pris

 20   des échantillons de sang pour les comparer avec les échantillons d'ADN

 21   retrouvés dans les fosses communes. Nous avons entendu tout cela.

 22   Est-ce que vous avez pu avoir les documents concernant les analyses

 23   d'ADN des personnes mortes et retrouvées dans les fosses communes de

 24   Srebrenica et est-ce que vous avez utilisé ces analyses dans votre travail

 25   ?

 26   R.  Nous avons commencé à recevoir des rapports de cette commission qui

 27   s'occupait des personnes disparues pour ce qui est des cadavres exhumés et

 28   dont les analyses d'ADN ont été comparées avec les échantillons de sang des


Page 9640

  1   membres de famille des personnes disparues. Et en fin de compte, nous avons

  2   reçu plus de 5 000 de tels rapports.

  3   Q.  Nous avons maintenant les analyses d'ADN, ce sont des données

  4   scientifiques, nous avons des rapports démographiques, nous avons également

  5   des identifications portées sur les analyses médicolégales. Comment cela

  6   vous aide pour ce qui est de la qualité de votre travail ?

  7   R.  D'abord, pour ce qui est des analyses médicolégales, cela prouve que

  8   les personnes en question sont mortes. Elles ne sont plus portées

  9   disparues. Leurs cadavres ont été retrouvés dans les charniers.

 10   Deuxièmement, on a procédé à la comparaison des échantillons de sang des

 11   membres de la famille avec les échantillons d'ADN. C'était après les

 12   événements de Srebrenica, dans des circonstances plus calmes, moins

 13   chaotiques. Parfois, plusieurs membres de famille se présentaient pour une

 14   personne portée disparue.

 15   Et la commission qui s'occupe des personnes disparues disposait

 16   également de sa liste des personnes disparues. Nous ne l'avons pas vue. Ils

 17   nous ont donné uniquement la liste des personnes dont la mort a été

 18   confirmée.

 19   Q.  Est-ce que vous avez comparé les noms de personnes figurant sur

 20   cette liste de cette commission pour les personnes portées disparues avec

 21   les noms figurant sur votre liste de personnes disparues ?

 22   R.  Oui, c'est ce qu'on a fait, exactement, et tous les noms se trouvaient

 23   sur nos listes.

 24   Q.  Bien. Vous avez voulu nous dire quelque chose ?

 25   R.  Il serait utile de montrer les pièces à conviction où il y a des

 26   parties des tableaux qui sont gris.

 27   M. McCLOSKEY : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher 07174 65 ter,

 28   s'il vous plaît.


Page 9641

  1   Je vais essayer de fournir une copie pour le général, copie en B/C/S.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce qu'on peut remettre à l'accusé

  3   une copie papier.

  4   M. McCLOSKEY : [interprétation] Nous allons procéder pas à pas. Il s'agit

  5   d'un tableau très simple, et nous allons faire cela pour le général.

  6   Le titre c'est : "L'identification des personnes disparues à Srebrenica sur

  7   la base d'analyses d'ADN et l'évolution de cette identification." Nous

  8   voyons d'abord la première colonne en gris, où l'on voit la date du rapport

  9   du bureau du Procureur, on voit la date et l'année. Ensuite, on voit la

 10   colonne où figure le nombre de personnes portées disparues à Srebrenica;

 11   ensuite, les personnes portées disparues identifiées par la commission des

 12   personnes portées disparues; ensuite, on a la colonne des doublons;

 13   ensuite, la colonne des personnes qui ont été exclues des listes; ensuite,

 14   la colonne des nouvelles victimes identifiées; ensuite, les survivants

 15   potentiels exclus; ensuite, le pourcentage des personnes identifiées; et la

 16   colonne suivante c'est le pourcentage de personnes identifiées, numéro 2.

 17   Q.  Docteur Brunborg, pouvez-vous nous expliquer ce que l'on voit dans ce

 18   tableau ? Nous voyons que les chiffres changent par rapport à divers

 19   rapports. Comment cela peut vous aider pour répondre à ma dernière question

 20   ?

 21   R.  D'abord, il s'agit du tableau numéro 12 dans mon plus récent rapport --

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey, pouvez-vous

 23   éteindre votre microphone. Merci.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] D'abord, nous voyons que le nombre de

 25   personnes portées disparues sur la liste du bureau du Procureur a augmenté

 26   de 7 475 à 7 692. Il a augmenté de plus de 200.

 27   Le nombre de personnes identifiées, et c'est ce qui est peut-être plus

 28   intéressant, a augmenté de 68 à 5 755 [comme interprété], sur la base


Page 9642

  1   d'analyses des échantillons d'ADN.

  2   Et si nous regardons maintenant la colonne 6, où figure le nombre de

  3   nouvelles victimes identifiées, nous voyons que dans le rapport de la

  4   commission, il y a 213 personnes qui ne figuraient pas sur la liste des

  5   personnes portées disparues. Nous avons exclu 12 survivants potentiels,

  6   donc le nombre de survivants potentiels a augmenté de 9 à 12 personnes. Et

  7   nous avons conclu avec le chiffre de 7 905 personnes portées disparues ou

  8   personnes mortes par rapport aux événements liés à la chute de Srebrenica.

  9   Cela veut dire que cela a augmenté de 400 par rapport au chiffre de 7 500

 10   en 2000.

 11   Aujourd'hui, on a presque 8 000 personnes, c'est le chiffre total. Et

 12   pour en finir avec ce tableau --

 13   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 14   Q.  [aucune interprétation] 

 15   R.  Dans la dernière colonne, on voit le pourcentage de personnes

 16   identifiées, les personnes mortes. En 2000, c'était 0,9 %, et aujourd'hui,

 17   c'est 66,7, ce qui fait deux tiers. 

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Qu'est-ce que vous voulez dire

 19   "maintenant" ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela veut dire en novembre 2008. Ce rapport a

 21   été rédigé en avril 2009 sur la base du rapport de la commission chargée

 22   des personnes portées disparues qui était du mois de novembre 2008. Depuis,

 23   il y a eu plusieurs rapports qui ont été reçus avec plusieurs centaines de

 24   personnes identifiées. Mais nous n'avons pas inclus cela à ce tableau

 25   puisque nous n'avons pas pu faire cela. Et de nouvelles informations ne

 26   cessent d'affluer.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 28   Monsieur McCloskey.


Page 9643

  1   M. McCLOSKEY : [interprétation]

  2   Q.  Comment pouvez-vous expliquer alors cette augmentation de plus de 400

  3   pour ce qui est du nombre de personnes portées disparues ou personnes

  4   mortes sur cette liste du plus récent rapport; 7 475 par rapport au rapport

  5   précédent où il y avait 7 905 personnes disparues. Nous savons que les

  6   médecins pour les droits de l'homme ont cessé de dresser les listes deux

  7   ans après. Le comité international de la Croix-Rouge, vous l'avez déjà dit,

  8   avait plus de 200 personnes et il y a eu ces autres 200 noms de plus pour

  9   ce qui est de cette liste mise à jour du comité international de la Croix-

 10   Rouge ?

 11   R.  D'abord, ce qui figure sur la "liste du bureau du Procureur pour ce qui

 12   est de Srebrenica" de 2008 à 2009, ou de 2005 à 2009 donc, on voit une

 13   augmentation de 29. Ensuite, les personnes portées disparues ont été

 14   ajoutées à cette liste de la liste du comité international.

 15   Comme je l'ai déjà dit, on voit la plus grande augmentation pour ce

 16   qui est du nombre de nouvelles victimes. Ce sont les personnes dont les

 17   cadavres ont été exhumés dans les charniers liés à des événements survenus

 18   à Srebrenica, et ce nombre a été ajouté au nombre total.

 19   Pourquoi ? C'est parce que toutes les familles ne se sont pas

 20   présentées pour que les personnes disparues de leurs familles soient

 21   enregistrées. Peut-être qu'il pouvait y avoir toutes les familles qui ont

 22   été disparues des listes, parce qu'il y avait des familles qui voulaient

 23   oublier tout cela ou qui vivaient à l'étranger ou qui ne voyaient aucun

 24   sens pour aller se présenter et dire que les membres de leurs familles

 25   avaient disparu. Des cadavres des personnes qui n'ont pas été portées

 26   disparues ont été retrouvés, parce que leurs familles n'ont pas fourni ces

 27   informations au comité international de la Croix-Rouge. Donc il n'y a pas

 28   non plus sur ces listes des noms qui pourraient correspondre à des cadavres


Page 9644

  1   retrouvés dans les charniers. Par exemple, il y a 294 cadavres qui ont des

  2   empreintes génétiques identiques, mais ils ne peuvent pas être comparés

  3   avec qui que ce soit sur cette liste, et c'est pour cela que leurs noms

  4   n'ont pas été inclus.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce qu'on peut revenir à la ligne

  6   19 de la page 30, vous avez dit, je cite :

  7   "Vous avez vu cela sur les listes de 2008 à 2009 -- ou 2009, et vous avez

  8   dit que le nombre a augmenté --"

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Hm-hm.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ils étaient 31, si je ne me trompe.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez raison. La différence par rapport à

 12   cette autre liste, il s'agissait seulement d'un nom qui a été exclu pour

 13   des raisons techniques. Un nom a été ajouté, donc cela devrait être le

 14   chiffre 31. Excusez-moi, j'ai utilisé ce chiffre, le chiffre 29.

 15   Mais je vais vérifier cela pendant la pause et je vais vous expliquer

 16   cela.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 18   Poursuivez, Monsieur McCloskey.

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 20   Q.  Bien. Vous avez dit qu'il y a quelques personnes pour ce qui est du

 21   chiffre définitif de 7 905 noms de personnes identifiées, qu'il y a

 22   plusieurs personnes qui ont été identifiées mais qui ne figurent pas sur

 23   votre liste des personnes portées disparues. Comment avez-vous pu mettre ça

 24   en corrélation avec les personnes de Srebrenica, si ces personnes n'ont pas

 25   été portées disparues comme étant les personnes disparues de Srebrenica ?

 26   R.  D'abord, ces noms ont été enregistrés sur la liste de la commission qui

 27   était en charge des personnes disparues. C'était la raison la plus

 28   importante. C'était après la chute de Srebrenica.


Page 9645

  1   On a vérifié les dates de leur disparition, ou au moins les dates

  2   auxquelles ils ont été vus la dernière fois en tant que vivants, et nous

  3   avons vérifié l'endroit où ces personnes ont été disparues.

  4   Et finalement, ils ont été retrouvés dans des charniers avec d'autres

  5   victimes de Srebrenica.

  6   Q.  Et vous dites que vous n'avez pas eu la liste des personnes disparues

  7   de la commission qui était chargée des personnes portées disparues. Comment

  8   vous saviez que ces personnes ont été enregistrées en tant que personnes

  9   portées disparues ?

 10   R.  C'est parce que cette commission a rassemblé les échantillons de sang

 11   des membres des familles des personnes disparues. Ils ont eu leurs critères

 12   pour s'occuper de cela. Donc tout cela a été déterminé par la commission en

 13   charge des personnes portées disparues.

 14   Q.  Voyons le dernier tableau. Nous avons demandé que ce tableau soit

 15   présenté. La traduction n'a pas été faite. Nous avons donc proposé une

 16   requête pour ce qui est de la traduction de ce tableau. Et le numéro du

 17   tableau est 07173.

 18   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 19   M. McCLOSKEY : [interprétation] Les deux tableaux proviennent du rapport et

 20   devraient être traduits. Je dispose de ces numéros dans le prétoire

 21   électronique, je peux vous les donner, si cela est nécessaire. Mais je

 22   pense qu'on n'a pas besoin de traduction pour ce qui est de ce tableau. Je

 23   vais lire le titre.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux ajouter qu'il s'agit du

 25   tableau numéro 5 dans le rapport. A la page 19 du rapport.

 26   M. McCLOSKEY : [interprétation] Il s'agit de la page 22 en B/C/S dans le

 27   prétoire électronique.

 28   Q.  Et en haut, on peut lire :


Page 9646

  1   "Les tranches d'âge des personnes portées disparues et des personnes mortes

  2   de Srebrenica, toutes les personnes portées disparues par rapport à des cas

  3   de morts confirmés (en pourcentage)."

  4   Lequel de ces tableaux vous avez voulu expliquer ?

  5   R.  Tous les tableaux.

  6   Q.  Bien.

  7   R.  Il y a deux parties dans les rapports.

  8   La première partie, on voit donc les tranches d'âge des personnes portées

  9   disparues, et cela n'a rien à voir avec le fait si ces cas ont été les cas

 10   de morts confirmés. Il ne s'agit que des tranches d'âge des personnes

 11   portées disparues. Donc c'est le tableau qui est en haut.

 12   Le tableau suivant montre les tranches d'âge des personnes qui ont été

 13   identifiées et qui sont mortes, les personnes mortes, et si vous regardez

 14   les deux tableaux, vous pouvez voir qu'il y a des points similaires. Par

 15   exemple, il y a les tranches d'âge de 55 à 59 qui sont les mêmes dans les

 16   deux tableaux. Ensuite, pour ce qui est des tranches d'âge de 25 à 29, le

 17   nombre de personnes est moindre par rapport au nombre qui précède.

 18   Si nous regardons ces deux colonnes ensemble, nous pourrons arriver au

 19   pourcentage qui est de 100 %.

 20   Ensuite, le tableau qui est en bas présente les données qui ont été

 21   comparées, et on voit des points similaires. On voit la colonne de tranche

 22   d'âge de 55 à 59, où le pourcentage est beaucoup plus élevé par rapport aux

 23   tranches d'âge qui précède et qui suit. Et il peut y avoir de bonnes

 24   raisons pour expliquer cela.

 25   Nous avons donc produit des tableaux similaires pour ce qui est de l'année

 26   2000 et 2005, des rapports de ces années, et donc on peut voir que les

 27   tranches d'âge sont similaires, ce qui veut dire qu'il s'agit de la même

 28   population, la population de personnes portées disparues. Et lors des


Page 9647

  1   exhumations, on a pu constater que les cadavres exhumés appartenaient à la

  2   même population. Si cela n'a pas été le cas, les tranches d'âge auraient

  3   été différentes.

  4   Donc ce qu'on peut voir dans les colonnes concernant les tranches d'âge

  5   pour ce qui est des personnes portées disparues et des personnes mortes

  6   nous pousse à la conclusion qu'il s'agit de la même population.

  7   Q.  Si j'ai bien compris, vous avez pu obtenir, des membres des familles,

  8   les informations concernant l'âge de leurs proches portés disparus, n'est-

  9   ce pas ?

 10   R.  Oui. Avant de procéder à des analyses des échantillons d'ADN, avant que

 11   des cadavres aient été identifiées, les médecins et les médecins légistes

 12   ont pu évaluer les tranches d'âge dans le cadre de groupes de personnes

 13   plus larges et avec un certain degré d'incertitude.

 14   Q.  Vous avez déjà déposé dans plusieurs affaires, et on peut voir

 15   également dans les comptes rendu de vos témoignages qu'au moins un expert

 16   s'est penché sur ces événements, un expert de la Défense --

 17   R.  M. Radovanovic [comme interprété].

 18   Q.  Radovanovic, oui, merci. Et ces informations qu'il a fournies ont été

 19   contestées dans certaines de ces affaires, ont été critiquées. Est-ce que

 20   vous avez pu arriver à la conclusion qu'il s'agissait d'inexactitudes dans

 21   votre travail et que ces critiques étaient justifiées, que les experts de

 22   la Défense ont pu donc se pencher là-dessus pendant ces années ?

 23   R.  Oui. Mme Radovanovic, elle est expert en démographie, et donc a eu

 24   accès à des informations qui se trouvent au Tribunal. Elle n'a pas pu les

 25   prendre hors du Tribunal, mais elle a pu retrouver à peu près dix doublons

 26   sur nos listes de personnes portées disparues. Donc elle n'a pas dit que

 27   nous avons triché, puisque utiliser ce verbe, cela ne serait pas un

 28   euphémisme pour ce qui est de nos méthodes.


Page 9648

  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, Monsieur Tolimir.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Il ne faut pas donner à un expert de vérifier ce qu'il a écrit, lui, et de

  5   nier ce que les autres ont dit sur son travail. Et j'aimerais qu'on ait la

  6   référence pour tout cela, puisque nous ne savons pas de quoi il s'agit.

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, Monsieur McCloskey.

  8   M. McCLOSKEY : [interprétation] Il y a le compte rendu de sa déposition.

  9   Cela a été consigné au compte rendu. Et pour ce qui est de ces rapports --

 10   enfin, une partie de ce compte rendu a été communiquée à la Défense. Et je

 11   ne lui ai demandé que d'indiquer les parties dans ce rapport où elle a eu

 12   raison et de nous expliquer cela.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux ajouter qu'il s'agissait de

 14   l'affaire Blagojevic.

 15   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 16   Q.  Merci.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Avant la pause, j'aimerais dire que

 18   les parties se mettent d'accord pour savoir si on a besoin de la traduction

 19   pour ce qui est des tableaux 7173 et 7174 65 ter que nous avons utilisés,

 20   et ces tableaux sont affichés à l'écran. Et si j'ai bien compris, ces

 21   tableaux n'ont toujours pas été traduits.

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] Le 7173 en B/C/S peut être retrouvé.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, c'est vrai. Le représentant du

 24   greffe m'a dit que la traduction a été faite pour ce tableau.

 25   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, pour les deux tableaux.

 26   Et c'est P32 pour ce qui est de 7174. Je pense qu'il y a une confusion.

 27   Dans le rapport, il y a des traductions, et nous allons faire de notre

 28   mieux pour que cela soit consigné au compte rendu.


Page 9649

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci. Je pense que nous avons besoin

  2   d'une clarification par rapport à d'autres pièces à conviction qui avaient

  3   été déjà versées au dossier lors d'autres affaires. Toutes les pièces à

  4   conviction ont été traduites en B/C/S, et si cela n'a pas été le cas, nous

  5   voudrions savoir lesquelles de ces pièces n'ont pas été traduites.

  6   Maintenant, nous allons faire la pause d'une demi-heure, nous

  7   continuons à 11 heures, et j'aimerais obtenir votre réponse après la pause.

  8   --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

  9   --- L'audience est reprise à 11 heures 04.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Avant que nous ne poursuivions,

 11   j'aimerais vous dire que Me Gajic a, au nom de la Défense, versé au dossier

 12   deux documents qu'il avait présentés au dernier témoin d'hier. Il s'agit

 13   des documents 02064 et 02063 de la liste 63 ter, à savoir les deux

 14   entretiens avec le bureau du Procureur et le témoin d'hier. Ces documents

 15   seront versés au dossier.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ces deux documents recevront les cotes

 17   suivantes : le document 02064 deviendra le document D157; et le deuxième

 18   document, le document 02063, sera le document D158.

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais la cote n'a pas été bien

 20   consignée.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, le premier document deviendra le

 22   document de la Défense D157.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci. Cela a été corrigé maintenant.

 24   Monsieur McCloskey, je vous en prie, poursuivez.

 25    M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Le témoin a

 26   parlé avec le greffier à propos d'une précision qu'il voulait apporter,

 27   donc -- nous le savions d'ailleurs. Donc peut-être que le témoin pourrait

 28   préciser cette question.


Page 9650

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, je vous en prie. J'en ai entendu

  2   parler, effectivement.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, vous m'aviez indiqué

  4   mon erreur de calcul, et je vous en remercie. C'était le tableau numéro 12,

  5   qui est une des pièces, et je vais vous expliquer la raison. Vous avez le

  6   chiffre que l'on a sur la liste du bureau du Procureur de l'année 2009, ce

  7   chiffre a été révisé et est passé de 7 661 à 7 663 après que la liste a été

  8   préparée. Parce qu'en fait, il ne s'agissait pas véritablement de doublons;

  9   il y avait une personne qui avait survécu et une autre personne qui n'a pas

 10   survécu et qui a été trouvée morte.

 11   Voilà ce qui explique la page 6, le deuxième paragraphe à partir du bas.

 12   Mais en fait, lorsque je pense à la différence entre ces deux listes de

 13   l'année 2005 et 2009, j'ai toujours l'habitude d'avoir en tête le chiffre

 14   29, alors que, bien entendu, cela devrait être 31.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie de cette précision.

 16   Monsieur McCloskey, je vous en prie.

 17   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 18   Q.  Oui, j'étais en train de vous demander si l'expert de la Défense, Mme

 19   Radovanovic, qui a témoigné dans l'affaire Blagojevic et dans l'affaire

 20   Popovic et qui était donc la démographe de la Défense, je vous ai demandé à

 21   son sujet si ses critiques étaient avérées, étaient justifiées, et est-ce

 22   que vous pourriez nous indiquer les critiques en question, si elles étaient

 23   exactes ?

 24   R.  Oui. Après avoir examiné la liste des personnes portées disparues, elle

 25   a identifié un petit nombre de doublons et nous a critiqués de ce fait.

 26   Donc nous avons étudié la question et nous sommes rendus compte qu'elle

 27   avait raison pour certains de ces cas. Et d'ailleurs, nous avions également

 28   établi qu'il y avait des doublons. Mai ce fut un oubli de notre part, nous


Page 9651

  1   avons oublié de supprimer ces doublons, en fait. Et nous avons également

  2   effectué une autre analyse au cours de laquelle nous avons identifié encore

  3   d'autres doublons et nous les avons supprimés parce qu'il s'agissait

  4   effectivement de doublons. Mais il faut savoir que Mme Radovanovic a trouvé

  5   des doublons qui n'étaient pas véritablement des doublons, parce qu'en

  6   fait, on avait l'impression que les données étaient identiques, comme cela

  7   avait été indiqué, mais elles n'étaient pas véritablement identiques. Il

  8   s'agissait, par exemple, de jumeaux, de frères, donc les données sont

  9   quasiment les mêmes, pour ne pas dire identiques, mais il s'agit de

 10   personnes différentes.

 11   Q.  Alors, vous ne connaissez peut-être pas le nombre exact, mais pouvez-

 12   vous nous dire dans quelle mesure elle a été correcte -- ça correspondait à

 13   combien de doublons ?

 14   R.  Je dirais que c'était entre cinq et dix.

 15   Q.  Je pense que vous avez dit qu'après avoir vérifié et après avoir

 16   confirmé justement qu'elle avait raison, vous avez fait une autre analyse,

 17   et vous-même, vous en avez trouvé des doublons, n'est-ce pas ? Combien ?

 18   R.  Il faudrait que je vérifie cela dans le rapport et dans les rapports

 19   complémentaires. Mais je le ferai ce soir.

 20   Q.  Très bien.

 21   R.  Mais j'aimerais également vous dire que pour certains des doublons

 22   qu'elle a trouvés, ils n'étaient pas exacts. Donc ils n'étaient pas tous

 23   exacts.

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'aimerais savoir si ces corrections

 25   ont été apportées à la dernière version de votre   rapport ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Ainsi qu'à la version de 2005.


Page 9652

  1   M. McCLOSKEY : [interprétation]

  2   Q.  Est-ce qu'il y a d'autres choses sur lesquelles elle aurait attiré

  3   votre attention et que vous avez dû corriger ?

  4   R.  Elle a mentionné que les liens que nous avions établis n'étaient pas

  5   scientifiques, que cela n'avait jamais été fait auparavant. Mais cela avait

  6   été fait auparavant, justement, et nous pouvons faire référence à toute la

  7   bibliographie. Il y a des liens qui sont établis en fonction des noms. Là,

  8   c'est une procédure plutôt complexe. Et puis, il y a un addendum au rapport

  9   qui explique cette méthodologie qui consiste à établir des correspondances

 10   entre les fichiers. Il s'agit de l'annexe 5. Donc il y a tout un jeu de

 11   documents scientifiques. Nous n'avons pas inventé cela comme cela à partir

 12   de rien.

 13   Q.  Oui. Mais je vous avais demandé si ce qu'elle avait dit était justifié.

 14   Je sais qu'il y a eu un long rapport avec des critiques, mais est-ce qu'en

 15   fait, à part celles que vous venez d'indiquer, est-ce que les autres

 16   critiques étaient justifiées ?

 17   R.  Non.

 18   Q.  Et puisque nous sommes en train de parler d'erreurs et de fautes,

 19   j'aimerais savoir si vous avez eu la possibilité au cours des derniers

 20   jours d'étudier méticuleusement votre rapport de l'année 2009, qui fait

 21   l'objet du document 01170 [comme interprété], et j'aimerais savoir si vous

 22   avez identifié des erreurs qui se seraient glissées là-dedans ?

 23   R.  Oui, il y en a quelques-unes. Bon, il y a quelques coquilles, il y a

 24   des erreurs grammaticales secondaires, mais il y a également des erreurs

 25   qui pourraient induire en erreur. Vous savez, le rapport est assez

 26   volumineux, donc vous avez ce genre de détails. Lorsque vous relisez le

 27   rapport deux ans après, vous le voyez avec de nouveaux yeux, en quelque

 28   sorte.


Page 9653

  1   A la page 22 du rapport, page 22 de la version anglaise, troisième

  2   paragraphe à partir du haut --

  3   Q.  Je vais vous interrompre. Page 22 pour la version anglaise, et cela

  4   correspond à la page 25 de la version B/C/S. 

  5   R.  La deuxième phrase de ce paragraphe est comme suit :

  6   "Les autres 29,5 % n'ont pas été identifiés pour le moment comme personnes

  7   décédées, mais la proportion augmente."

  8   Bien entendu, alors qu'il aurait fallu mettre "la proportion diminue."

  9   Q.  Pourquoi ?

 10   R.  Parce qu'au fur et à mesure que l'on identifie des personnes, il y a

 11   moins de personnes non identifiées. Je pense que c'est logique.

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous faites référence à quel

 13   paragraphe ? Vous faites référence au paragraphe qui se trouve juste au-

 14   dessus du chapitre 1.5.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] 2.5, Monsieur le Président.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ah oui, 2.5, pardon.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 18   M. McCLOSKEY : [interprétation]

 19   Q.  Vous avez également fait référence à une autre erreur que l'on trouve à

 20   la page 26 de la version anglaise, qui correspond à la page 30 de la

 21   version B/C/S, et je pense qu'il s'agit du deuxième paragraphe complet,

 22   donc le paragraphe qui se trouve juste en dessous du titre du chapitre 2.6.

 23   Vous le voyez cela ?

 24   R.  Oui, c'est exact. Cela se trouve juste en dessous du titre 2.6. Les

 25   cinq derniers mots de la dernière phrase devraient être supprimés. C'est le

 26   paragraphe qui se trouve juste au-dessus du titre, les mots "comparés aux

 27   cohortes précédents".

 28   Le fait est ce n'est pas très clair, on ne sait pas quels sont les âges


Page 9654

  1   précédents. Le fait est que pour la tranche d'âge comprise entre 15 et 19

  2   ans, les taux de mortalité ont été très, très élevés, ce que vous voyez

  3   dans le tableau numéro 11.

  4   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire quel était le problème de cette

  5   phrase, pourquoi vous voulez la supprimer maintenant ?

  6   R.  Parce que si vous pensez au "court" précédent, et si cela correspond au

  7   groupe de la tranche d'âge 20 à 24 ans, le risque de disparition est

  8   beaucoup moins élevé. En règle générale, dans l'absolu, il n'est pas plus

  9   élevé pour toutes les municipalités. Ce que nous voulions indiquer, c'est

 10   qu'il y avait un très gros risque d'être porté disparu.

 11   Q.  Est-ce qu'il y a d'autres erreurs sur lesquelles vous souhaiteriez

 12   attirer notre attention ?

 13   R.  Pas pour autant que je le sache.

 14   Q.  Comme je l'ai indiqué dans le résumé, il y a eu certaines plaintes qui

 15   ont été présentées suivant lesquelles les listes du CICR étaient exagérées.

 16   D'ailleurs, dans le mémoire de M. Tolimir, aux pages 114 et 115, il

 17   semblerait qu'il suggère que les listes électorales de l'année 1996

 18   incluent de nombreux noms que l'on trouve sur votre liste des personnes

 19   portées disparues, ce qui semblerait suggérer que votre liste de personnes

 20   portées disparues n'est pas valable, puisque si ces personnes sont sur les

 21   listes électorales, elles sont en vie.

 22   Est-ce que vous avez déjà entendu ce grief ?

 23   R.  Oui, oui, c'est une critique qui est souvent faite.

 24   Q.  Est-elle valable ?

 25   R.  Absolument pas.

 26   Q.  Vous pouvez nous dire pourquoi ?

 27   R.  Oui. Parce que les listes électorales de l'année 1996 ont utilisé les

 28   données du recensement de l'année 1991, et d'après l'accord de Dayton du


Page 9655

  1   mois de novembre 1995, le recensement de l'année 1991 devait être utilisé

  2   pour établir les listes électorales pour la première élection, parce qu'il

  3   n'était pas possible d'établir d'autres listes. Donc toute personne dont le

  4   nom figurait au recensement de l'année 1991 pouvait voter en 1996. Il n'est

  5   pas surprenant de retrouver un certain nombre de personnes qui, par

  6   ailleurs, étaient considérées comme portées disparues. Elles n'avaient pas

  7   à se présenter pour que leurs noms soient inclus sur les listes

  8   électorales, comme elles l'ont fait par la suite en 1997 et après.

  9   Q.  Ce processus, avec ces personnes qui viennent s'inscrire sur les listes

 10   électorales, il a repris en quelle année ?

 11   R.  En 1997.

 12   Q.  Bien. J'ai fait une erreur, je n'aurais pas dû parler de pages pour le

 13   mémoire de la Défense, j'aurais dû faire référence aux paragraphes 114 et

 14   115, c'est là que l'on trouve cette allégation. Et puis, il y a d'autres

 15   allégations que vous traitez d'ailleurs dans votre rapport de l'année 2009

 16   ?

 17   R.  Oui, pour certaines. Il faut savoir que c'est dans le rapport de

 18   l'année 2000 que nous traitons de la plupart de ces allégations.

 19   Q.  Ecoutez, je ne pense pas que nous devions entrer dans ces détails

 20   maintenant.

 21   M. McCLOSKEY : [interprétation] Mais je souhaiterais, Monsieur le

 22   Président, demander le versement au dossier du rapport de l'année 2009. Il

 23   s'agit du document 07170 et 07171, 07173, 07174 de la liste 65 ter.

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ces quatre documents seront versés au

 25   dossier en tant qu'éléments de preuve et des cotes leur seront attribuées.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Une petite précision, je vous prie.

 27   J'aimerais savoir si le document 07170A est également versé au dossier ?

 28   Merci.


Page 9656

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] D'après ce que j'ai compris, cela

  2   fait partie du document 07170 de la liste 65 ter. Mais M. McCloskey va nous

  3   préciser tout cela.

  4   M. McCLOSKEY : [interprétation] Est-ce que le document 07170A pourrait être

  5   affiché à l'écran. Je pense que c'est un document que le Dr Brunborg

  6   souhaiterait remplacer par le document -- excusez-moi, le document 07170 --

  7   non, attendez. Accordez-moi une petite seconde.

  8   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

  9   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. Non, je n'étais pas en train de

 10   suggérer de remplacer tout le rapport. Comme vous le voyez, il s'agit d'un

 11   tableau.

 12   Q.  Mais, Docteur Brunborg, vous préférez remplacer ce tableau par un

 13   tableau qui est assez semblable et qui se trouve dans le rapport d'origine,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui, oui. Ça, c'est une question purement rédactionnelle, en quelque

 16   sorte. Seule la première page a été incluse dans le premier rapport, ce qui

 17   fait que le reste des pages avait été omis. Il s'agissait d'une erreur

 18   rédactionnelle, comme je l'ai dit, ou une erreur technique.

 19   Q.  Cela nous donne un total de cinq pages pour cette pièce, alors; c'est

 20   cela ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Merci. 

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais est-ce que cela devra être

 24   considéré comme faisant partie du rapport 07170 de la liste 65 ter ?

 25   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, oui. C'est un tableau qui remplace le

 26   tableau que l'on trouve dans le rapport d'origine qui est à la page 97 pour

 27   le prétoire électronique.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, il faudrait quand même éviter


Page 9657

  1   d'avoir des cotes P différentes pour cette partie du document.

  2   M. McCLOSKEY : [interprétation] Et cela se trouve à la page 104 pour la

  3   version B/C/S.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience, est-

  5   ce que tout est clair pour vous maintenant ?

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense

  7   que j'ai compris que le document 07170A de la liste 65 ter ne va pas être

  8   versé au dossier.

  9   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, mais il doit faire partie du

 10   rapport, à savoir le document de la liste 65 ter 07170. Je pense que les

 11   deux doivent être fusionnés.

 12   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, c'est exact. Oui, nous pouvons le

 13   faire. Nous voulions que tout cela soit versé au dossier, et cela fera

 14   partie intégrante de ce rapport.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Maintenant j'ai compris.

 16   Voilà ce que nous allons faire. Le document 07170 se verra attribué la cote

 17   P1776. Le document 07171 de la liste 65 ter se verra attribué la cote

 18   P1777. Le document 07173 de la liste 65 ter deviendra le document P1778, et

 19   le document 07174 de la liste 65 ter deviendra le document P1779.

 20   Je vous remercie.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, Monsieur McCloskey.

 22   M. McCLOSKEY : [interprétation] Je n'ai plus de question. Il se peut qu'il

 23   faille modifier certaines des cotes. Mme Stewart va m'expliquer. Il se peut

 24   que j'aie créé un problème sans le vouloir. Nous allons régler le problème,

 25   mais je n'ai plus de question à poser au témoin, ceci étant dit.

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

 27   Monsieur Tolimir, vous pouvez commencer votre contre-interrogatoire.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'aimerais une


Page 9658

  1   fois de plus souhaiter la bienvenue à toutes les personnes présentes dans

  2   le prétoire. J'aimerais souhaiter la bienvenue au témoin, et j'espère que

  3   cette déposition se fera conformément à la volonté de Dieu et non pas à la

  4   mienne.

  5   Contre-interrogatoire par M. Tolimir : 

  6   Q.  [interprétation] Voilà les questions que je souhaiterais vous poser,

  7   Monsieur. Premièrement, pourriez-vous nous dire si lors de vos recherches,

  8   ou lorsque vous avez préparé et écrit votre article ou votre rapport, vous

  9   avez jamais essayé de découvrir combien de personnes ont été tuées de façon

 10   illicite et dans combien de cas les décès sont expliqués par des actes

 11   illégaux ou illicites ? Plus précisément, avez-vous réussi à découvrir qui

 12   était mort pendant les combats, et qui étaient morts après les combats ?

 13   R.  Merci. Vous semblez me poser plusieurs questions, et en plus ce sont

 14   des questions importantes.

 15   Premièrement, je vous dirais que l'on ne m'a pas demandé de me concentrer

 16   sur les actes illicites ou licites. Cela ne faisait pas partie de ma

 17   mission. Je suis démographe, je ne suis pas un juriste. Je ne sais pas ce

 18   qui constitue un acte illicite lorsque l'on tue quelqu'un. Ceci étant dit,

 19   bien entendu, je sais pertinemment que mourir au combat est, du point de

 20   vue juridique, tout à fait différent que lorsqu'on ne meurt pas en combat.

 21   Mais ceci étant dit, nous n'avons pas disposé de données nous permettant de

 22   faire la différence entre ceux qui étaient morts au combat et ceux qui ne

 23   l'étaient pas.

 24   Nous avions le nombre de personnes portées disparues et, par la suite avec

 25   les exhumations, il est devenu de plus en plus manifeste que la plupart des

 26   personnes qui avaient été identifiées comme mortes avaient été trouvées

 27   dans des charniers. Il y avait des personnes qui portaient encore des

 28   bandeaux, ou sur qui on avait tiré dans le dos à une distance rapprochée.


Page 9659

  1   Donc, pour ce qui est des actes licites ou illicites, nous n'avons pas

  2   absolument évoqué cette question, mais il semblerait que la plupart des

  3   personnes portées disparues ne soient pas tombées au champ d'honneur, elles

  4   n'ont pas été tuées pendant les combats.

  5   Q.  Merci. Excusez-moi, j'avais oublié de brancher mon microphone.

  6   Est-ce que vous pouvez nous dire, pour la majorité que vous mentionnez,

  7   quel pourcentage est-ce que cela représente ? Vous venez de dire qu'il y

  8   avait eu des personnes qui étaient mortes pendant les combats et qui,

  9   pourtant, figurent sur vos listes. Donc, de quel pourcentage s'agit-il ?

 10   R.  Non, je n'ai pas de pourcentage. Je n'ai pas dit combien de personnes

 11   étaient mortes pendant les combats. Je ne sais même pas s'il y en a qui

 12   sont morts pendant les combats. Je sais que lorsque les gens ont commencé à

 13   se diriger vers Tuzla en passant par la forêt, il se peut qu'il y ait eu

 14   des combats à ce moment-là, mais je n'en sais rien. Il se peut qu'il y en

 15   ait eu, il se peut qu'il n'y en ait pas eu. Je sais qu'il y avait une

 16   colonne de personnes qui traversaient la forêt sur qui on a tiré, mais pour

 17   autant que je sache, personne n'a été en mesure de déterminer combien de

 18   personnes sont mortes pendant les combats au mois de mars.

 19   Quelques chiffres supplémentaires. Nous avons analysé le nombre de soldats

 20   qui étaient intégrés à l'ABiH et nous avons examiné la liste des personnes

 21   portées disparues, et nous avons pu déterminer que 70 % des personnes

 22   portées disparues avaient leurs noms qui figuraient dans les archives de

 23   l'armée. Ces personnes étaient considérées soit comme décédées soit comme

 24   portées disparues, mais les listes de l'armée ne donnent pas le lieu du

 25   décès ou les circonstances du décès, ce qui fait que nous n'avons pas pu

 26   déterminer si ces personnes étaient mortes pendant les combats ou non. Et

 27   puis, il faut savoir également que sur les listes de l'armée, il y avait

 28   des civils, des personnes qui n'étaient pas des soldats d'active. Donc une


Page 9660

  1   fois de plus, il n'a pas été possible de déterminer d'après les documents

  2   de l'armée si des personnes qui étaient inscrites comme faisant partie de

  3   l'armée avaient été tuées pendant les combats ou non.

  4   Q.  Merci. Lorsque vous avez écrit vos rapports, est-ce que vous avez reçu

  5   des données du bureau du Procureur, je pense par exemple à des données

  6   relatives à des personnes tombées au champ d'honneur ? Est-ce que vous avez

  7   utilisé ces données, si vous les avez reçues pour votre analyse ?

  8   R.  J'ai écrit ce rapport avec deux collègues du bureau du Procureur, bien

  9   qu'à l'époque je n'aie pas été employé par le bureau du Procureur. Il

 10   s'agissait d'Ewa Tabeau et d'Arve Hetland. Ewa Tabeau travaille toujours

 11   pour le bureau du Procureur, mais nous n'avons pas reçu de données

 12   correspondantes au nombre de personnes qui étaient mortes pendant les

 13   combats. Et pour autant que je le sache, ce genre de données n'existe pas.

 14   Q.  Merci beaucoup. Est-ce que votre rapport tient compte des informations

 15   que vous aviez à votre disposition jusqu'en 1998, comme vous l'indiquiez

 16   dans votre rapport ? Merci.

 17   R.  Nous avons essayé d'inclure tous les éléments pertinents, pas seulement

 18   jusqu'en 1998 mais jusqu'en 2009, lorsque le rapport le plus récent a été

 19   rédigé. Mais bien évidemment, nous ne pouvions pas inclure tous les

 20   éléments d'information pertinents. Sinon, le rapport ne serait pas un

 21   rapport de 105 pages, mais un rapport de milliers de pages. Nous avons fait

 22   figurer tous les éléments que nous jugions pertinents en l'espèce.

 23   Q.  Merci. Je vais maintenant vous montrer le document D151.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons le voir dans le

 25   prétoire électronique, s'il vous plaît.

 26   M. TOLIMIR : [interprétation]

 27   Q.  Ce document a été créé le 20 juillet 1996. Avant que vous ne rédigiez

 28   votre propre rapport, le bureau du Procureur disposait d'éléments


Page 9661

  1   d'information des personnes qui avaient été tuées au combat.

  2   J'aimerais vous poser cette question-ci : en regardant le document,

  3   pourriez-vous nous dire si vous êtes au courant de cette information-là ou

  4   si c'est quelque chose qu'on aurait dû vous rapporter avant que vous ne

  5   fassiez votre analyse ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons regarder le D151, s'il

  7   vous plaît.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] On m'a indiqué que ce document est

  9   sous pli scellé. Dans ce cas, il ne doit pas être diffusé.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Soit. S'il est sous pli scellé, vous pouvez

 11   peut-être simplement afficher la page 2, le paragraphe 3, donc un élément

 12   d'information ne permettant d'identifier les personnes ne figure. Ceci est

 13   un extrait de la déposition d'un témoin protégé, et ce, pour information à

 14   l'intention du témoin d'aujourd'hui.

 15   Est-ce que nous pouvons regarder la page 2 de l'anglais également, le

 16   paragraphe 4, et je souhaite également afficher la page 2, paragraphe 3 de

 17   l'anglais. Je vais simplement dire ce que le témoin a confirmé avant de

 18   commencer son enquête. Il s'agit de la déposition d'un témoin qui a

 19   témoigné il y a cinq jours en tant que témoin à charge.

 20   Je vais vous lire ceci :

 21   "Alors que nous allions dans la direction qu'avait empruntée le premier

 22   groupe, nous avons croisé des panneaux nous avertissant que cet endroit

 23   était miné. Je supposais que les personnes qui étaient avec nous étaient

 24   passées plus tôt, avaient traversé ces régions et avaient laissé ces

 25   panneaux d'affichage. A partir de là, nous nous sommes dirigés en direction

 26   de Pobudjanska Kamenica, où nous avons rejoint le premier groupe, mais les

 27   Chetniks nous ont encerclés et ont commencé à nous tirer dessus, tuant près

 28   de 300 personnes et en blessant un nombre important. C'était la débandade


Page 9662

  1   de notre côté étant donné que les soldats et les civils ont fui de tous les

  2   côtés, alors que les blessés sont restés sur la route." 

  3   M. TOLIMIR : [interprétation]

  4   Q.  Voici ma question : est-ce que cet élément d'information était à la

  5   disposition du bureau du Procureur avant que vous ne commenciez à rédiger

  6   votre analyse, conformément aux tâches qui vous avaient été confiées par le

  7   bureau du Procureur ?

  8   J'ai besoin de préciser quelque chose. Cette déclaration 1D51 dont je

  9   vous ai lu un extrait, que vous n'avez pas pu voir puisque c'est une

 10   déposition recueillie d'un témoin protégé, cette déclaration a été

 11   recueillie le 20 juillet 1996, un an après le début de la guerre.

 12   Je vous pose cette question : est-ce que les instances chargées des

 13   enquêtes, est-ce que l'Accusation en Bosnie-Herzégovine ont recueilli ces

 14   données ? Ces informations étaient-elles disponibles au bureau du Procureur

 15   et est-ce que c'était quelque chose dont avait connaissance le Tribunal à

 16   partir de ce moment-là ? Puisque ceci a été utilisé dans un certain nombre

 17   d'autres affaires. En réalité, voici ma question : si vous aviez eu cette

 18   information à ce moment-là, est-ce que vous l'auriez utilisée dans votre

 19   rapport ?

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, il faut poser une

 21   question après l'autre et non pas amalgamer vos questions en une seule.

 22   M. Brunborg --

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais répondre de toute façon. Je ne peux

 24   pas répondre pour le compte du bureau du Procureur et de quel type

 25   d'informations et de documents ils disposaient. Je ne me souviens pas

 26   d'avoir vu ce document auparavant. A savoir si le bureau du Procureur en

 27   disposait ou pas, je ne le sais pas.

 28   Si je l'avais vu, cela ne donne pas une liste de noms, à l'exception de


Page 9663

  1   quelques-uns, donc -- ma tâche consistait à préparer une liste de noms de

  2   personnes portées disparues et de personnes décédées. Peut-être Mehmed

  3   Solic et Hazim Solic, peut-être. Mais à ma lecture du document, et c'est la

  4   première fois que je le vois, ce document, il n'est pas précisé que ces

  5   personnes ont été tuées au combat ou non. En outre, j'aimerais répéter

  6   qu'on ne m'a pas demandé d'établir une distinction entre les personnes

  7   mortes au combat et celles qui ne l'étaient pas. C'est une différence

  8   notable, mais ceci ne faisait pas partie des tâches qui m'ont été confiées.

  9   M. TOLIMIR : [interprétation]

 10   Q.  Merci. L'enquêteur du bureau du Procureur a dit que dans le secteur de

 11   Bare, ils ont retrouvé quelque 600 cadavres de personnes qui avaient été

 12   tuées au combat. Donc ces 600 et ces 300 et les blessés, tout ceci

 13   représente quelque 1 000 personnes. Est-ce quelque chose qui figure -- est-

 14   ce que ces chiffres-là sont répertoriés sur votre liste de personnes

 15   retrouvées dans les fosses communes, quelle que soit la manière dont ces

 16   personnes sont décédées, ont été tuées ? Merci.

 17   R.  Ces personnes qui ont été identifiées comme mortes et retrouvées dans

 18   des fosses communes figurent sur la liste des personnes retrouvées dans les

 19   fosses communes et, par conséquent, elles ont été identifiées sur nos

 20   listes de personnes portées disparues. Mais je ne pense pas qu'il y ait eu

 21   1 000 personnes retrouvées à la surface du sol qui ont été identifiées. Les

 22   chiffres que j'ai vus, ils ne sont pas aussi importants que cela. Mais il

 23   se peut que ce chiffre soit en augmentation.

 24   Donc, voici ma réponse : je pense que si ces personnes avaient été

 25   inscrites comme étant portées disparues à ce moment-là, ces personnes

 26   figurent sur la liste. Encore une fois, c'est une proportion qui n'est pas

 27   très importante. Encore une fois, s'il y en avait 1 000 ou moins, c'est un

 28   cinquième, disons 12 ou 13 % du nombre total des personnes portées


Page 9664

  1   disparues ou décédées.

  2   Q.  Si nous savons qu'il y a eu 300 personnes qui ont été tuées dans le

  3   secteur de Pobudjanska Kamenica, citées par le témoin, et qu'il y a 600

  4   personnes tuées qui sont citées par l'enquêteur Ruez dans le secteur de

  5   Bare, donc si ces personnes-là ont été enterrées dans des fosses et que des

  6   analyses ADN ont été effectuées sur les corps, est-ce que ces corps ont été

  7   inclus dans votre analyse ? Merci.

  8   R.  Oui, si ces corps ont été identifiés au moyen de noms et identifiés

  9   comme morts, leurs noms figuraient soit sur la liste de l'ICMP des

 10   personnes portées disparues liée à la chute de Srebrenica ou sur notre

 11   liste. Ces noms y figuraient.

 12   Q.  Merci. Et vous êtes-vous penché sur la question à savoir si les

 13   personnes qui avaient été tuées à cet endroit précis qui est cité par le

 14   témoin protégé, le village de Bare, et c'est quelque chose qui a également

 15   été mentionné par l'enquêteur lorsqu'il était sur le terrain, est-ce que

 16   ces cadavres ont été emmenés de ces endroits-là dans la Fédération, est-ce

 17   qu'ils ont été emmenés dans un autre endroit pour que l'analyse ADN puisse

 18   être effectuée sur site ou dans un autre endroit, ou est-ce que cette

 19   analyse d'ADN a été faite sur site, à savoir à l'endroit où était la fosse

 20   commune ?

 21   R.  La question que vous me posez va au-delà de mon domaine d'expertise. Je

 22   n'ai pas effectué d'étude sur les exhumations. Il y a d'autres témoins plus

 23   habilités à évoquer ce sujet que moi. Je n'ai pas étudié les exhumations ou

 24   les fosses communes. Il y a d'autres qui sont plus à même de le faire qui

 25   vont venir témoigner à ce sujet.

 26   Q.  Merci. C'est une question que je vous ai posée au début de façon à ce

 27   que nous puissions tester la validité de votre analyse eu égard aux

 28   événements qui se sont déroulés sur le terrain et évoqués par les témoins à


Page 9665

  1   charge et évoqués par les enquêteurs du bureau du Procureur.

  2   Voici ma question : cet élément d'information, à savoir les personnes

  3   retrouvées sur ces sites étaient enterrées dans ces fosses communes et que

  4   l'analyse ADN a été effectué là, est-ce que vous auriez utilisé cet élément

  5   d'information comme les informations relatives aux personnes tuées au

  6   combat ?

  7   R.  Merci. Comme je vous l'ai dit, on ne m'a pas chargé d'établir une liste

  8   de personnes qui sont décédées au combat ou non. Si on m'avait demandé de

  9   le faire, et si l'information au sujet de certains décès ou de certaines

 10   personnes étant portées disparues plus tard identifiées comme étant

 11   décédées, si j'avais eu des éléments d'information sur les circonstances de

 12   leur décès, si ces personnes avaient été tuées ou non, et si le bureau du

 13   Procureur m'avait demandé d'établir cette différence et d'établir une liste

 14   spéciale, je l'aurais fait, bien sûr. Je suis désolé, il y a des "si" que

 15   je cite beaucoup, mais ce n'est pas quelque chose que l'on m'a chargé de

 16   faire. Ce n'est pas quelque chose dont j'avais connaissance. Et le bureau

 17   du Procureur et personne d'autre non plus, du reste, ne sait exactement qui

 18   a été tué au combat et qui n'a pas été tué au combat.

 19   Q.  Merci. L'Accusation vous a-t-elle jamais dit qu'après les combats,

 20   certaines personnes ont été enterrées dans les mêmes fosses communes avec

 21   les personnes qui n'ont pas été tuées au combat, que les deux ont été

 22   enterrées ensemble ? Personne n'a été enterré ailleurs dans un autre

 23   endroit, personne n'a été ramené dans la Fédération et personne n'a été

 24   enterré dans un endroit particulier à Srebrenica ou aux alentours de

 25   Srebrenica. Quelqu'un vous a-t-il fourni cette information ou non ?

 26   R.  Pas vraiment. Bon, ce n'est que des choses indirectes que l'on m'a

 27   rapportées depuis 1995. Il y a beaucoup de corps qui ont été retrouvés à la

 28   surface du sol, donc ces corps n'étaient pas dans les fosses communes.


Page 9666

  1   Certaines personnes ont été tuées dans la forêt; ces personnes-là ont peut-

  2   être été enterrées ensemble, mais personnellement, je pense qu'il est peu

  3   probable que les personnes tuées dans la forêt aient été transportées à de

  4   grande distance pour être enterrées dans des fosses communes ou dans

  5   d'autres endroits. Donc beaucoup ont été retrouvés à la surface du sol dans

  6   les années qui ont suivi. Mais encore une fois, mes rapports ne se sont pas

  7   essentiellement concentrés là-dessus.

  8   Q.  Merci. Dans le cas où vous auriez eu ces informations au moment de

  9   rédiger votre rapport, est-ce que votre analyse serait encore plus valable

 10   ? Puisque votre analyse a été faite de façon très consciencieuse. Je ne

 11   suis pas en train de commenter sur la qualité de votre travail. Je vous

 12   pose simplement une question sur les informations dont vous disposiez. Est-

 13   ce que l'analyse aurait été encore plus exacte et de meilleure qualité si

 14   vous aviez disposé de cette information et si vous l'aviez incluse dans

 15   votre rapport ?

 16   R.  Je ne sais pas de quelle information vous voulez parler. Est-ce que

 17   vous voulez parler des 300 ou quelques corps tués dans la forêt, peut-être

 18   au combat, peut-être pas ?

 19   Je ne pense pas que cela aurait fait une différence, à moins que les

 20   données sur ces personnes en question étaient des données de très grande

 21   qualité, que l'on savait si ces personnes avaient été tuées au combat ou

 22   non. Et vous m'avez demandé si on m'a demandé d'établir cette différence

 23   entre personnes mortes au combat ou non, eh bien, je vous réponds que l'on

 24   ne m'a pas demandé de le faire.

 25   Q.  Merci. Alors, je vous ai soumis des éléments d'information à propos de

 26   survivants, des gens qui étaient là, d'enquêteurs qui étaient là dans le

 27   secteur de Bare. Donc je souhaite simplement en terminer sur ce point.

 28   Pourriez-vous nous dire ceci : disposiez-vous d'informations sur les


Page 9667

  1   circonstances du décès et le lieu du décès de ces personnes, est-ce que

  2   vous disposiez d'informations sur le lieu de leur enterrement dans les

  3   fosses communes où il a été procédé à des analyses ADN ? Est-ce que c'est

  4   quelque chose que vous auriez fait figurer quelque part dans votre rapport,

  5   que vous auriez mentionné quelque part ?

  6   R.  Dans notre rapport, pour chaque personne portée disparue et identifiée

  7   comme morte par le biais de l'analyse ADN, le site et la fosse commune dans

  8   laquelle ce corps a été retrouvé est cité. Il y a également une liste qui

  9   comporte la liste des corps retrouvés dans la fosse. La définition d'une

 10   fosse est une fosse dans laquelle ont été retrouvés cinq corps ou

 11   davantage. Donc il est clair, à partir des listes, d'où proviennent ces

 12   corps. Egalement, certains corps ont été retrouvés à la surface. Et des

 13   dépouilles ont été retrouvées à la surface.

 14   D'après ce que je sais, toutes ces informations ont été incluses.

 15   Q.  Pourriez-vous également nous dire quel passage dans vos rapports

 16   évoquent des personnes qui ont été retrouvées à l'extérieur des fosses

 17   communes ? Pourriez-vous nous donner le chiffre de ces personnes-là ?

 18   S'agit-il d'un chiffre négligeable, un chiffre assez élevé ?

 19   R.  Pardonnez-moi, il faut que je regarde mon rapport. Donc je le consulte

 20   pour retrouver l'endroit qui correspond.

 21   Monsieur, dans le tableau numéro 4, pages 8 et 9 dans le rapport en

 22   anglais, on cite ici le chiffre identifié correspondant à chaque fosse

 23   commune. Il est dit également que - pardonnez-moi - les sites restant à la

 24   surface, page 9, version anglaise, dernière ligne, "703".

 25   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il serait utile d'avoir cela à

 26   l'écran. Si je ne me trompe pas, c'est le P1776.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. A la page 9 de l'anglais, tableau

 28   numéro 4, on peut lire 30 -- 70 en bas du tableau, sites restants/surface,


Page 9668

  1   703 identifiés par l'ICMP au bas du tableau, 647 pour lesquels a été

  2   établie une correspondance avec la liste des personnes portées disparues de

  3   l'ICMP, avec un taux de corrélation de 92 %.

  4   Ensuite, tout en bas du tableau, il est écrit pourcentage restant ou

  5   à la surface : 12,7 %. Oui, 12,7 %. J'ai indiqué tout à l'heure 12 ou 13 %

  6   des exhumations au niveau de la surface du sol.

  7   M. TOLIMIR : [interprétation]

  8   Q.  Pouvez-vous dire, étant donné que nous venons de lire ce passage-là,

  9   qui est l'extrait d'une déposition d'un témoin protégé près de Pobudjanska

 10   Kamenica, s'il s'agissait du secteur de Bare, est-ce qu'il s'agit de

 11   personnes sur vos listes qui ont été retrouvées à ces endroits ou s'agit-il

 12   de personnes qui ont été retrouvées le long de la route empruntée par la

 13   colonne ?

 14   D'où émanent ces informations ? Merci.

 15   R.  Ces données émanent de l'ICMP, des chiffres correspondant aux

 16   exhumations et identifications, et également des exhumations faites par le

 17   bureau du Procureur, qui ont commencé en 1997, où il a été procédé au

 18   comptage des corps par fosse commune. Et les corps en surface également ont

 19   fait l'objet de ces enquêtes.

 20   Q.  Merci. Je comprends. Je souhaite vous demander si, sur la base de vos

 21   analyses, nous pouvons établir qui a été tué dans le secteur de Pobudjanska

 22   Kamenica, quel que soit leur chiffre, et combien de personnes ont perdu la

 23   vie dans le secteur de Bare. Pouvons-nous conclure quelque chose à partir

 24   de votre analyse, quelles que soient les circonstances de leur mort ? Les

 25   Juges de la Chambre en feront leur affaire après.

 26   R.  Monsieur, je crois que ce n'est pas quelque chose que nous pouvons

 27   vraiment déterminer. Comme vous le savez, il y a des personnes qui ont été

 28   enterrées dans des fosses communes et qui, ensuite, ont été déplacées dans


Page 9669

  1   d'autres fosses communes. Donc certains corps ont été déplacés une fois,

  2   d'autres corps ont été déplacés deux fois, voire trois fois, dans des

  3   fosses secondaires, voire tertiaires. Donc il est très difficile de savoir

  4   exactement où ces personnes ont été tuées et comment elles ont été tuées.

  5   Dans certains cas, des témoins ont rapporté avoir vu une exécution, avoir

  6   reconnu quelqu'un, et ces personnes ont été exhumées dans certaines fosses.

  7   C'est possible, dans ce cas, de le savoir, mais ce n'est pas le type

  8   d'analyse que j'ai faite. Pardonnez-moi -- il y a des personnes qui ont

  9   réussi à échapper aux exhumations. Peut-être qu'ils connaissaient le nom de

 10   certaines personnes qui ont été identifiées par la suite, retrouvées dans

 11   les fosses communes. A ce moment-là, il était possible d'établir un lien

 12   entre un lieu d'exécution ou un lieu où la personne est décédée et une

 13   fosse commune. Je ne sais pas si quelqu'un a procédé à cela, mais de toute

 14   façon, cela sort de mon domaine de compétence et d'expertise.

 15   Q.  Merci. Votre rapport indique-t-il quelque part que dans l'analyse des

 16   données que vous faites, toutes les victimes sont incluses, quelles que

 17   soient les circonstances de leur décès, à la fois dans le secteur de

 18   Srebrenica et dans le secteur que traversaient les Musulmans pour atteindre

 19   Tuzla depuis Srebrenica ? Merci.

 20   R.  Vous me demandez si j'ai fait une analyse -- je dois relire votre

 21   question. Une question à la fois.

 22   Q.  Merci. Est-ce que votre rapport indique quelque part que toutes les

 23   victimes de Srebrenica et des endroits dans lesquels les Musulmans ont

 24   tenté d'opérer une percée, les Musulmans qui opéraient une percée depuis

 25   Srebrenica en direction de Tuzla, et l'endroit où les exécutions ont été

 26   menées ?

 27   R.  Encore une fois, il s'agit de plusieurs questions à la fois. Comme je

 28   vous l'ai dit au début, on m'a remis une liste des endroits où les


Page 9670

  1   personnes avaient disparu et qui avaient trait à la chute de Srebrenica.

  2   Ensuite, certains d'entre eux sont partis, ont traversé la forêt de

  3   Srebrenica pour aller en direction de Tuzla. On savait qu'il y avait des

  4   fosses communes près de cet endroit-là ou plus éloignées des sites

  5   d'exécution. Les personnes qui ont été identifiées dans les rapports comme

  6   étant portées disparues près de ces endroits ou qui ont été retrouvées par

  7   la suite dans ces fosses communes sont incluses. Ceux qui ont été trouvés à

  8   l'extérieur ne sont pas inclus.

  9   Je vais vous donner un exemple. Dans le premier rapport de l'an 2000, nous

 10   n'avons pas inclus les corps qui ont été retrouvés sur le fleuve de la

 11   Drina parce que nous pensions que c'était trop éloigné et que la Drina

 12   était une rivière trop longue. Plus tard, des rapports plus récents ont

 13   constaté que des corps avaient été retrouvés près de la Drina, parce que le

 14   TPIY -- pardonnez-moi, le CICR avait inclus ces corps comme étant des corps

 15   liés à Srebrenica, en tenant compte des déclarations faites par les

 16   familles.

 17   Q.  Merci. Voici une question que j'aimerais vous poser maintenant : quand

 18   ces déclarations ont-elles été données ? Saviez-vous cela et avez-vous

 19   enquêté là-dessus au moment où vous faisiez votre analyse ? Est-ce que ceci

 20   est véridique ? Est-ce qu'il y a un rapport avec la période qui nous

 21   intéresse et qui faisait l'objet de votre enquête, à savoir entre la chute

 22   de l'enclave jusqu'à dix jours après la chute ? Merci.

 23   R.  Je vois sur le compte rendu d'audience qu'il y a trois points

 24   d'interrogation.

 25   Vous évoquez des déclarations. De quelles déclarations s'agit-il ?

 26   Q.  Merci. Je parle des déclarations données par les familles qui ont

 27   indiqué que les morts étaient portés disparus, étaient dans la Drina.

 28   R.  Il s'agissait là d'un élément d'information qui avait été recueilli par


Page 9671

  1   le CICR. Lorsqu'il a été demandé aux familles quand une personne avait-

  2   elle, pour la dernière fois, été vue en vie ou à quel moment cette personne

  3   avait été portée disparue, ils ont commencé à recueillir ces éléments

  4   d'information à partir du mois de juillet ou août 1995.

  5   A savoir exactement combien de membres de familles sont portés disparus

  6   dans la Drina, je ne le sais pas, mais je crois qu'on peut aisément

  7   enquêter là-dessus.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Quand avez-vous reçu ces rapports ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que nous avons reçu du CICR était une

 10   longue liste de noms de personnes et d'endroits où ces personnes avaient

 11   disparu. Nous n'avons pas vu les rapports individuels, ce qui correspond,

 12   en fait, à une feuille de papier par personne portée disparue. Le CICR a

 13   également demandé aux membres des différentes familles si la personne avait

 14   disparu et si sa disparition était liée d'une manière ou d'une autre à la

 15   chute de Srebrenica. Cette information ne nous a pas été fournie, parce que

 16   cela a été utilisé, je crois, par le CICR pour établir leur liste de

 17   victimes liée à Srebrenica au mois d'octobre 2008. C'est la première fois

 18   que nous avons reçu des informations du CICR sur le lien entre ces

 19   personnes et la chute de Srebrenica. Toutes les listes précédentes

 20   couvraient l'ensemble de la Bosnie, et il n'avait pas été établi de

 21   corrélation, de lien, précisément avec la chute de Srebrenica.

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 23   Monsieur Tolimir.

 24   Peut-être pouvez-vous poser des questions plus courtes. Votre deuxième

 25   question était de savoir si vous avez fait une enquête là-dessus pendant

 26   que vous procédiez à vos analyses ? C'était la deuxième question des trois

 27   questions qu'on vous a posées.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme nous savions -- oui, j'ai dit que


Page 9672

  1   lorsque nous avons rédigé le premier rapport, nous ne savions pas si ces

  2   événements étaient liés à la chute de Srebrenica et nous n'avions pas

  3   d'informations du comité international de la Croix-Rouge. Pour ce qui est

  4   des médecins pour les droits de l'homme, nous savions leurs informations,

  5   puisque ces informations étaient reliées aux événements de Srebrenica. Pour

  6   ce qui est de notre plus récent rapport, de 2009, nous pouvions nous

  7   appuyer sur les analyses des informations du comité international de la

  8   Croix-Rouge du mois d'octobre 2008, de leur rapport de cette année, puisque

  9   cela s'est appuyé sur les informations concernant les personnes portées

 10   disparues et liées à la chute de Srebrenica.

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et la troisième question était comme

 12   suit, je cite :

 13   "Dans quelle mesure ce sont des informations authentiques par rapport à la

 14   période pendant laquelle vous avez fait l'enquête, à savoir de la chute de

 15   l'enclave jusqu'à une période de dix jours après la chute ?"

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Nous nous sommes demandés également

 17   quelle était la qualité des déclarations faites par les membres de famille

 18   au comité international, mais nous n'avons pas pu dire si ces membres de

 19   famille ont menti, ont falsifié des documents, ont exagéré, et cetera.

 20   Parfois, les membres de famille n'avaient pas beaucoup d'informations pour

 21   ce qui est de la disparition de leurs proches puisqu'ils auraient pu peut-

 22   être voir une personne à Srebrenica ou dans les bois ou à Potocari, et que,

 23   plus tard, ils ne savaient plus quel destin avait été réservé à cette

 24   personne, si cette personne avait été transportée quelque part ou pas.

 25   C'est ce qu'on a pu conclure sur la base de nos connaissances les

 26   meilleures. Mais ils nous ont dit la vérité dans la mesure du possible,

 27   puisque les circonstances étaient difficiles et ils ne savaient pas ce qui

 28   s'était exactement passé pour ce qui est de leurs membres de famille.


Page 9673

  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

  2   Monsieur Tolimir, posez une question après l'autre, s'il vous plaît.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je vais essayer de

  4   procéder ainsi, mais j'ai voulu poser cette question pour avoir le

  5   contexte, pour pouvoir poser d'autres questions.

  6   J'aimerais maintenant qu'on affiche le document 7170 sur la liste 65 ter.

  7   Merci.

  8   M. TOLIMIR : [interprétation]

  9   Q.  C'est le rapport que vous avez rédigé, Docteur Brunborg. Et dans ce

 10   rapport, vous dites qu'il y avait --

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît,

 12   Monsieur Tolimir. Il s'agit de la pièce P1776 maintenant.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Nous voyons le rapport à l'écran.

 14   M. TOLIMIR : [interprétation]

 15   Q.  Et nous voyons les signatures de Mme Ewa Tabeau et de M. Arve Hetland.

 16   Ce sont les auteurs de ce rapport, et leurs signatures figurent à côté de

 17   votre signature.

 18   Pouvez-vous nous dire qui sont ces personnes, Mme Ewa Tabeau et M. Hetland

 19   ? Merci.

 20   R.  Merci. Je suis parti du Tribunal international de La Haye en décembre

 21   1998, et après cette date, le bureau du Procureur a décidé que ce type

 22   d'analyse démographique était de valeur et ils ont décidé d'embaucher

 23   quelqu'un en permanence. Parce que moi, je n'y ai travaillé que pendant une

 24   période déterminée de temps. Il y avait beaucoup de candidats pour ce

 25   poste. Mme Ewa Tabeau a été embauchée en tant qu'experte en démographie qui

 26   allait s'occuper de ce travail. Elle est polonaise, elle est citoyenne des

 27   Pays-Bas et elle a beaucoup d'expérience pour ce qui est des analyses en

 28   démographie. Elle a travaillé à l'Institut NIDI des Pays-Bas. NIDI, ça


Page 9674

  1   c'est l'Institut interdisciplinaire des Pays-Bas. A partir de ce moment-là,

  2   elle a travaillé pour le bureau du Procureur, à savoir à partir de l'année

  3   2000, la fin de l'année 2000.

  4   Arve Hetland est norvégien aussi. Il a travaillé avec moi avant à

  5   l'Institut pour les statistiques de Norvège. Il est expert en informatique.

  6   Je pense qu'a travaillé ici pendant six ou sept ans, et il est parti du

  7   Tribunal il y a un an. Il travaille à l'Institut pour les statistiques de

  8   Norvège.

  9   Q.  Merci. Pouvez-vous nous dire s'ils ont travaillé pour le bureau du

 10   Procureur ou pour le Tribunal ? Il faut que cela soit consigné au compte

 11   rendu.

 12   R.  Merci. Ils ont travaillé pour le bureau du Procureur au sein de

 13   l'équipe chargée des analyses démographiques, et ils étaient à la tête de

 14   cette équipe de recherche dans l'unité démographique, [inaudible], c'est la

 15   LRT.

 16   Q.  Est-ce que pendant cette période de huit ans, ils travaillaient au

 17   bureau du Procureur ? Aussi, au moment où vous avez procédé à ces analyses,

 18   est-ce qu'ils y ont travaillé à ce moment-là ?

 19   R.  Merci. J'ai travaillé pour le bureau du Procureur en 1997 et 1998, et à

 20   partir de ce moment-là, j'étais conseiller contractuel. En 1999 et 2000, je

 21   venais tous les deux mois pour y passer une semaine. Plus tard, ça s'est

 22   raréfié, puisque Mme Ewa Tabeau est devenue membre du personnel permanent

 23   de cette unité au bureau du Procureur. J'ai été au bureau du Procureur

 24   plusieurs fois pour coopérer avec Mme Tabeau et M. Hetland.

 25   Q.  Est-ce que l'une de ces personnes s'est rendue dans la région où ces

 26   événements se sont passés avant que vous n'ayez rédigé votre rapport ?

 27   R.  Je sais que Mme Tabeau s'est rendue en Bosnie à plusieurs occasions.

 28   Pour ce qui est de M. Hetland, je n'en suis pas certain, mais je pense que


Page 9675

  1   lui aussi il est allé en Bosnie.

  2   Q.  Merci. Pouvez-vous nous dire s'ils se sont rendus en Bosnie pendant la

  3   guerre ou après la guerre ?

  4   R.  Ils ne se sont pas rendus en Bosnie après la guerre -- pendant la

  5   guerre, plutôt.

  6   Ma première visite en Bosnie c'était en 1997, et je pense que Mme Tabeau

  7   s'est rendue en Bosnie la première fois en 2000 ou en 2001.

  8   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez nous dire quelles sont les parties dans

  9   votre rapport que vous avez rédigées et les parties de votre rapport

 10   rédigées par d'autres personnes, des co-auteurs, tels que Mme Tabeau et M.

 11   Hetland ? Pouvez-vous nous indiquer ces parties dans votre rapport ? Je

 12   pose cette question pour pouvoir vous poser d'autres questions.

 13   R.  Merci. C'est une tâche difficile puisque nous avons vraiment

 14   étroitement coopéré. Certaines parties ont été rédigées dans d'autres

 15   rapports précédents à la rédaction desquels j'ai contribué, donc c'est

 16   assez difficile de distinguer ces parties.

 17   Q.  Pour ce qui est des recherches démographiques, puisque vous vous êtes

 18   penché là-dessus, quelle est l'importance des connaissances concernant les

 19   faits liés à la guerre, la guerre qui s'est déroulée dans la région par

 20   rapport à laquelle vous avez fait vos analyses ?

 21   R.  Bien sûr, il est très utile de savoir ce qui s'est passé dans la

 22   région. Mais puisque nous nous occupons des chiffres, il n'est pas

 23   nécessaire pour nous d'avoir des connaissances exhaustives. Il ne faut pas

 24   que vous interprétiez de façon erronée ce que je viens de dire. Il est

 25   utile de savoir le plus possible, mais il est également difficile de savoir

 26   s'arrêter.

 27   D'un côté, nous avons les connaissances pour ce qui est des données

 28   démographiques et statistiques et de la population. Nous savons moins pour


Page 9676

  1   ce qui est du pays même et du conflit. Et quelqu'un d'autre, peut-être, a

  2   plus de connaissances pour ce qui est du pays et du conflit. Mais là, nous

  3   n'avions pas beaucoup de connaissances pour ce qui est du pays, et nous

  4   avons consulté les personnes qui en savaient plus. Et au bureau du

  5   Procureur, il y en avait, et nous avons consulté des ouvrages concernant

  6   ces sujets lorsque nous avions besoin de cela…

  7   Q.  Puisque dans votre analyse il s'agit de la démographie de la guerre

  8   dans une région donnée, telle que Srebrenica, ou même d'une région, est-ce

  9   qu'il aurait été mieux si quelqu'un qui avait participé à ces événements

 10   avait été membre de votre équipe qui s'est occupée de la rédaction de ce

 11   rapport, et cela, du point de vue démographique ?

 12   R.  C'est possible. Je me suis rendu à Srebrenica moi-même pour voir cette

 13   région, pour voir Srebrenica, voir les collines autour, pour voir Potocari,

 14   Bratunac, et cetera. J'ai parlé avec beaucoup de personnes qui y avaient

 15   survécu et qui avaient des membres de famille là-bas ou qui avaient vécu à

 16   Srebrenica avant le conflit, et j'ai parlé avec les représentants des

 17   organisations telles que Mères de Srebrenica, Femmes de Srebrenica, avec

 18   les auteurs de différents ouvrages et rapports, et cetera. Donc j'ai parlé

 19   avec beaucoup de personnes, en Bosnie et à La Haye, qui connaissaient ces

 20   événements.

 21   Q.  Merci. Pouvez-vous nous dire le nom de la personne ou de l'organisation

 22   qui vous fournissait les informations importantes pour votre analyse et

 23   couvrant la période allant du début de la guerre en 1991 jusqu'en 1995 ?

 24   C'est ce que je vois dans votre rapport, que vous avez fait référence au

 25   recensement de la population en 1991. Mais permettez-moi de résumer cela et

 26   de vous poser une seule question : qui vous fournissait les informations ?

 27   R.  Si vous regardez les listes que nous avons reçues, les listes

 28   électroniques comportant des noms, des informations, nous avons reçu la


Page 9677

  1   liste de l'OSCE -- du comité international de la Croix-Rouge à Sarajevo, je

  2   ne me souviens pas du nom de la personne qui nous a communiqué ces

  3   informations. Mais j'ai rencontré le personnel du comité international de

  4   la Croix-Rouge à Sarajevo.

  5   Ensuite, Michael Yard nous a donné la liste électorale, c'est quelqu'un de

  6   l'OSCE, je l'ai rencontré à plusieurs reprises à Sarajevo. Le directeur du

  7   bureau fédéral statistique de Sarajevo nous a également fourni les

  8   informations concernant le recensement, que j'ai rencontré à plusieurs

  9   reprises. Et je ne me souviens pas de son nom, mais on peut facilement le

 10   retrouver.

 11   C'était les sources les plus importantes d'informations que nous avons

 12   reçues.

 13   Je ne recevais d'instructions de personne, c'est ce que je veux souligner.

 14   Bien sûr, j'ai également vu d'autres personnes en essayant de voir si, eux,

 15   disposaient des informations que nous pouvions utiliser et qui auraient pu

 16   nous être utiles. Et j'ai rencontré les représentants de l'organisation

 17   MAG, cela veut dire Musulmans contre le génocide. Ensuite, M. Orasanin

 18   [comme interprété] du centre de documentation, M. Smajlic du centre de

 19   santé publique. C'était en 1997, 1998, 1999, donc beaucoup de temps s'est

 20   écoulé depuis, je ne me souviens pas de tous les noms. Mais j'ai écrit les

 21   rapports en se basant sur ces informations, j'ai rencontré les gens à

 22   Tuzla, à Mostar, pendant tout ce temps-là, et j'ai essayé de voir s'ils

 23   disposaient des listes de personnes où figuraient les dates de naissance de

 24   ces personnes, et cetera. Puisque nous avions besoin de ce type

 25   d'informations, de savoir d'abord ce qui s'était passé pendant la guerre

 26   par rapport aux personnes qui ont disparu ou qui sont mortes; ensuite, nous

 27   avions besoin des listes de la population, de recensement de la population

 28   avant la guerre, c'était une source excellent d'information; troisièmement,


Page 9678

  1   les listes de personnes qui ont survécu à la guerre, et également les

  2   listes électorales et les listes des réfugiés et les personnes déplacées.

  3   C'était nos trois majeures sources d'informations. Nous les avons

  4   collectées, ces informations, mais nous avons donc cherché d'autres

  5   informations, d'autres sources d'informations. Lorsque j'ai quitté le

  6   Tribunal, Mme Ewa Tabeau, par exemple, a obtenu les informations de l'armée

  7   de Bosnie. Je ne veux pas dire que je n'ai pas réussi à avoir ces

  8   informations, mais je n'ai pas eu suffisamment de temps pour m'occuper de

  9   cette source d'informations pendant que j'y travaillais.

 10   Q.  Merci. Je vous écoutais attentivement. Pouvez-vous me dire si vous avez

 11   contacté qui que ce soit de l'autre côté, de l'autre partie belligérante,

 12   ou est-ce que vous avez contacté uniquement l'autre côté, c'est-à-dire

 13   l'ABiH et le bureau du Procureur, ainsi que les organisations non

 14   gouvernementales ?

 15   R.  Oui. J'ai eu des contacts avec plusieurs personnes, Serbes et Croates.

 16   En fait, j'étais en route pour Banja Luka en décembre 1998 parce que j'ai

 17   voulu essayer de rassembler les informations. Mais avant de partir, dans

 18   l'après-midi, puisqu'il y a eu une tempête de neige, on m'a dit que le

 19   général Krstic avait été arrêté, et c'est pour cela que j'ai raté cette

 20   occasion d'aller à Banja Luka et de collecter les informations. Donc pour

 21   les raisons de sécurité.

 22   Mais d'autres personnes se sont occupés de ces informations provenant de

 23   Banja Luka et de la Republika Srpska, et nous nous sommes penchés également

 24   sur ces informations.

 25   Q.  Pouvez-vous nous dire si, dans votre rapport, vous avez inclus les

 26   informations que vous avez obtenues des personnes provenant de la Republika

 27   Srpska, puisque vous avez dit que vous ne pouviez pas y aller pour les

 28   raisons de sécurité ?


Page 9679

  1   R.  A l'annexe 3, 3.8, il est dit que : Les sources qui n'ont pas été

  2   utilisées sont RS et FIS, cela veut dire bases de données concernant les

  3   personnes mortes ainsi que les sources des informations pour ce qui est des

  4   personnes portées disparues, les sources de Bosnie. A la page 61 dans la

  5   version en anglais, il est question des bases de données pour ce qui est du

  6   taux de mortalité de la Republika Srpska, et cela a été compilé en juin

  7   1995, parce que nous avons demandé et reçu ces informations. Cela a été

  8   fait au bureau du Procureur, et le chef de ce projet a été le directeur du

  9   bureau pour les statistiques de la Republika Srpska, Slavka Sloboc [phon].

 10   Q.  Pouvez-vous expliquer à la Chambre pourquoi vous n'avez pas utilisé ces

 11   sources d'informations ? Merci.

 12   R.  Dans les rapports, on peut lire que les informations ont été croisées

 13   pour voir s'il y a eu d'autres morts ou d'autres cas de personnes portées

 14   disparues, mais nous n'avons pas retrouvé de telles informations à la forme

 15   qui aurait été utile pour notre base de données.

 16   Pour ce qui est de ces deux bases de données concernant le taux de

 17   mortalité, ou plutôt, le nombre de décès pendant la guerre, cela incluait

 18   tous les décès pendant la guerre, à savoir les décès de cause naturelle ou

 19   causés par la maladie, donc nous n'avons pas pu ajouter ces cas de décès à

 20   notre liste de personnes portées disparues puisqu'il s'agissait de

 21   personnes portées disparues par rapport aux événements à Srebrenica.

 22   Quelqu'un qui vivait à Srebrenica et qui est mort parce qu'il avait le

 23   cancer des poumons ou la tuberculose avant le 11 juillet ou après n'a pas

 24   été inclus à notre liste. Ces personnes n'ont pas disparu ou ne sont pas

 25   mortes par rapport à la chute de Srebrenica. Nous ne pouvions utiliser que

 26   les informations qui étaient précises par rapport à ces éléments. Et ces

 27   informations nous ont été fournies par le bureau pour les statistiques au

 28   niveau fédéral. Pour ce qui est de la Republika Srpska et du même bureau


Page 9680

  1   pour les statistiques, ils ne disposaient pas de telles informations.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mme le Juge Nyambe a une question

  3   pour le témoin.

  4   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Merci. J'aimerais que vous nous

  5   expliquiez quelque chose pour apporter une clarification à ce qui a été

  6   consigné.

  7   A la page 56 du compte rendu d'aujourd'hui, entre les lignes 17 et

  8   25, vous avez dit, je cite :

  9   "Dans le premier rapport de 2000, nous n'avons pas inclus les cadavres

 10   retrouvés dans la rivière Drina puisque nous pensions que cela se trouvait

 11   trop loin."

 12   Et ensuite, vous dites, je cite :

 13   "Mais le comité international de la Croix-Rouge a inclus ces corps en tant

 14   que corps par rapport aux événements de Srebrenica, et cela dépendait des

 15   déclarations de témoins."

 16   Comment avez-vous pu conclure quels cadavres, quels corps retrouvés avaient

 17   un lien avec les événements de Srebrenica ou pas, dans quelles

 18   circonstances ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela dépendait des déclarations des membres de

 20   famille par rapport à la personne portée disparue. Si un membre de famille

 21   a dit qu'il avait des cousins, ou le père ou le fils, ou qui que ce soit

 22   d'autre qui était à Srebrenica et qui a disparu, c'était la base sur

 23   laquelle nous nous appuyions pour déterminer l'endroit de la disparition de

 24   la personne et la date, ce qui étaient très important.

 25   Nous n'avons pas inclus la rivière Drina dans cette analyse puisque,

 26   comme je l'ai déjà dit, c'était trop loin par rapport à Srebrenica, mais

 27   lorsque quelqu'un a dit qu'une personne a disparu par rapport aux

 28   événements de Srebrenica, on acceptait cela. Il y avait peu de tels cas.


Page 9681

  1   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Merci.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'ai une question pour vous. A la

  3   page 19, ligne 25, je vous ai posé la question concernant la liste

  4   d'électeurs qui a été compilée pour les élections de 1997 et 1998. Vous

  5   avez dit, en répondant à ma question, la chose suivante, je cite :

  6   "Les gens devaient se présenter au bureau de vote pour être inscrits sur la

  7   liste pour pouvoir voter, mais ils devaient se trouver également sur les

  8   listes d'électeurs de 1991, donc tous les bureaux d'inscription d'électeurs

  9   disposaient des listes de recensement de la population."

 10   Il n'y a pas besoin que je continue à citer ce que vous avez dit.

 11   Et vous avez dit à la page 60 -- non, à la page 42, à la ligne 5, vous nous

 12   avez dit ceci, je cite :

 13   "C'est parce qu'en 1996, les listes d'électeurs pour ce qui est du -- s'est

 14   appuyé sur les listes sur recensement de 1991. D'après les accords de

 15   Dayton de novembre 1995, les listes du recensement de 1991 devaient être

 16   utilisées pour les premières élections pour compiler les listes

 17   d'électeurs."

 18   Cela ne n'est pas tout à fait clair. Est-ce que cela a été réellement

 19   utilisé pour compiler les listes d'électeurs pour les élections qui se sont

 20   passées plus tard, ou est-ce que ces personnes devaient se présenter en

 21   personne pour prouver qu'elles étaient vivantes ?

 22   Pouvez-vous nous clarifier ce point ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, pour ce qui est de cette

 24   question, pour savoir si les gens se sont présentés, donc il n'y a pas eu

 25   besoin pour qui que ce soit de déterminer si une personne était vivante ou

 26   pas.

 27   Mais je crois qu'en 1996, je crois que vous pouviez voter si votre nom

 28   figurait sur les listes du recensement. Sinon, les gens devaient se


Page 9682

  1   présenter avec des documents pertinents. En 1997, il n'était pas suffisant

  2   que vous vous montriez au bureau de vote pour voter; vous deviez figurer

  3   sur la liste.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] En 1991 ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, la liste de 1991 et également la liste de

  6   1997 pour pouvoir voter.

  7   Mais nous avons donc quatre liste : la liste municipale d'électeurs;

  8   ensuite, la liste municipale où les gens voulaient voter ou pour laquelle

  9   les gens voulaient voter; la liste municipale de la municipalité où ils

 10   vivaient en 1991; et il y avait encore une autre liste. Au moins, il y en

 11   avait trois.

 12   Donc, admettons qu'une personne déplacée de Srebrenica qui s'est

 13   éventuellement inscrite à Sarajevo et a dit qu'elle voulait voter pour

 14   Srebrenica, pour le conseil municipal de Srebrenica.

 15   C'était le cas de quelque 600 000 réfugiés partout dans le monde. Ils

 16   auraient pu s'inscrire en Norvège ou aux Pays-Bas et dire qu'ils voulaient

 17   voter pendant les élections en 1997, pour les élections au niveau national.

 18   Ensuite, ils pouvaient dire pour quelle municipalité ils voulaient voter,

 19   mais ils pouvaient voter également à l'étranger.

 20   Je ne sais pas si cela a aidé pour mieux comprendre ce que je viens

 21   de dire.

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui. Merci.

 23   Nous devons faire la deuxième pause et nous continuons à 13 heures.

 24   --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.

 25   --- L'audience est reprise à 13 heures 02.

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Avant que nous ne poursuivions le

 27   contre-interrogatoire, j'aimerais soulever rapidement quelques questions

 28   relatives à des documents.


Page 9683

  1   Récemment, l'un des membres de l'équipe de la Défense dans l'affaire

  2   Popovic s'est adressé à la Chambre -- en fait, il s'agit de l'arrêt

  3   Popovic, et il s'agissait de cette décision rendue par cette Chambre eu

  4   égard à la requête présentée par la Défense pour avoir accès à des

  5   documents confidentiels. Cela a été déposé le 2 juin 2010.

  6   L'équipe de Défense dans l'autre affaire avance qu'elle n'a pas encore

  7   communiqué de documents confidentiels en l'espèce, donc elle demande que la

  8   communication de ces documents soit effectuée une fois toutes les deux

  9   semaines. A cet égard, je remarque que la décision de notre Chambre -- je

 10   pense, par exemple, à l'aval en fonction de l'article 70 lorsque cela est

 11   applicable et à l'exception de documents relatifs aux informations

 12   personnelles concernant M. Tolimir et les membres de sa famille pourront

 13   être versés en tant que documents confidentiels dans l'affaire Tolimir, et

 14   les parties devront aider le greffe à identifier ces documents.

 15   Je me tourne vers les parties pour leur demander s'ils pourront nous

 16   donner, pendant l'audience de demain, l'état d'avancement des

 17   communications.

 18   Ce n'est pas la peine d'en parler maintenant, Maître Gajic. Nous le ferons

 19   demain. Je me contentais juste de vous en parler pour que vous puissiez

 20   vous préparer à aborder cette question pendant l'audience de demain.

 21   Monsieur Tolimir, je vous en prie. Vous pouvez reprendre votre contre-

 22   interrogatoire.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 24   Je souhaiterais que le document 1708 de liste 65 ter soit affiché à

 25   l'écran. Et lorsque ce document aura été affiché à l'écran, je vous dirais

 26   qu'il s'agit d'un article co-rédigé par M. Brunborg qui est intitulé :

 27   "Comment comptabiliser le génocide : combien de personnes ont été tuées à

 28   Srebrenica ?" Article rédigé en 2003. Une fois que ces articles auront été


Page 9684

  1   affichés, j'aimerais lui poser quelques questions. Merci.

  2   Vous voyez cette étude.

  3   M. TOLIMIR : [interprétation]

  4   Q.  Pouvez-vous nous dire, Monsieur, quel était l'objectif de ce document,

  5   et est-ce que ce document a été rédigé en utilisant des rapports qui

  6   avaient été rédigés pour les procès du TPIY ?

  7   R.  Je vous remercie. J'ai rédigé ce rapport après avoir quitté le TPIY,

  8   donc je n'étais plus employé du Tribunal, et mes co-auteurs ne

  9   travaillaient plus non plus pour le Tribunal à ce moment-là. Nous voulions

 10   écrire un document destiné à la communauté des universitaires à propos des

 11   personnes décédées et portées disparues à Srebrenica. Rédiger des rapports

 12   théoriques destinés aux gazettes et journaux internationaux fait partie de

 13   la tâche d'un chercheur. Cela correspond à la fois à un devoir et c'est

 14   également quelque chose que nous devons faire et pour laquelle nous sommes

 15   appréciés par le monde universitaire. Donc nous voulions en quelque sorte

 16   résumer nos conclusions et constations, évoquer la méthodologie que nous

 17   avions utilisée. Nous avions de meilleures données que dans la plupart des

 18   autres affaires de crimes de guerre, donc nous voulions que cela soit porté

 19   à la connaissance du monde entier. C'est la raison pour laquelle nous avons

 20   rédigé cet article, qui a été accepté, étudié, examiné. Et là, il s'agit du

 21   projet d'article qui a été présenté au "Journal européen de la population".

 22   L'article a été publié pendant l'année 2003 et a bien été apprécié. Je

 23   souhaite rester humble à ce sujet, mais l'un des experts de la question,

 24   qui travaillait auparavant pour le service des statistiques des Nations

 25   Unies, a déclaré qu'il s'agissait de l'aune par rapport à laquelle tous les

 26   autres seront comparés. Il a dit qu'il s'agissait, en fait, de la norme,

 27   cet article.

 28   Q.  Regardez la dernière phrase du résumé. Il est dit :


Page 9685

  1   "Nous concluons qu'au moins 7 475 personnes ont été tuées après la chute de

  2   Srebrenica. Nous donnons également des estimations de la probabilité à

  3   devenir une victime, à savoir plus de 33 % des hommes musulmans qui se

  4   trouvaient à Srebrenica en 1991."

  5   J'aimerais savoir, et c'est ma question, si les Musulmans de Srebrenica qui

  6   résidaient à Srebrenica en 1991 ont été les seules victimes ou est-ce que

  7   ce chiffre a été utilisé par rapport à l'ensemble de la population qui se

  8   trouvait dans l'enclave de Srebrenica à ce moment-là ? Merci.

  9   R.  Je vous remercie d'avoir posé cette question.

 10   Ce résultat auquel vous venez de faire référence se fonde plutôt sur

 11   une méthodologie supplémentaire retenue après notre rapport de l'année

 12   2000. En fait, ce que nous avons utilisé comme base, c'est les liens entre

 13   la liste des personnes portées disparues et le recensement de l'année 1991.

 14   Lorsque nous avons établi ces corrélations, nous avons établi le lien entre

 15   les personnes portées disparues, celles qui faisaient partie des listes à

 16   Srebrenica et ailleurs en 1991. Et lorsque nous opérions ces liens, ces

 17   corrélations, nous nous sommes rendus compte que nous en avions trouvé 87 %

 18   sur les listes des personnes portées disparues. Donc il se peut que pour

 19   d'autres, leurs noms y figuraient également en 1991.

 20   Il ne s'agit pas de la population de Srebrenica avant le 11 ou le 12

 21   juillet 1995. Il s'agit d'une référence à la population de Srebrenica en

 22   1991. Parce que nous, nous ne savions pas combien de personnes résidaient à

 23   Srebrenica en juillet 1995. Certains chiffres donnent une estimation de

 24   40 000, qui peut être tout à fait exacte, tout comme elle peut être tout à

 25   fait inexacte. Donc nous n'avons pas utilisé ce chiffre. Nous avons essayé,

 26   nous avons posé la question à différentes sources, différentes

 27   institutions, y compris les dirigeants politiques du conseil municipal de

 28   la ville. Nous leur avons demandé s'il existait des listes de personnes qui


Page 9686

  1   résidaient à Srebrenica en 1995, mais personne ne nous a présenté cette

  2   liste, que nous aurions d'ailleurs particulièrement aimé voir. Parce que

  3   cela aurait, en fait, été --

  4   Q.  Merci. J'aimerais maintenant que l'on montre au témoin le document

  5   D117.

  6   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, est-ce que vous

  7   allez demander le versement au dossier de cet article de M. Brunborg ? Vous

  8   souhaitez le verser au dossier ?

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui. Mais nous allons encore l'utiliser, à

 10   la suite de quoi il est évident que nous en demanderons le versement au

 11   dossier.

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bien. Je vous en prie.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 14   Est-ce que nous pourrions agrandir ce document pour que le témoin puisse

 15   mieux le voir.

 16   M. TOLIMIR : [interprétation]

 17   Q.  Vous voyez qu'il s'agit d'un document signé par les dirigeants de la

 18   municipalité de Srebrenica, et là, il est question du nombre de résidents.

 19   Vous avez le nombre total de la population, les foyers, la population

 20   locale, la population déplacée dans les municipalités de Srebrenica,

 21   Bratunac, Vlasenica, Zvornik, Han Pijesak, et cetera. Et si vous prenez

 22   ensuite la sixième colonne à partir du bas, il est indiqué qu'il n'y avait

 23   --

 24   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à l'accusé de répéter le dernier

 25   chiffre.

 26   M. TOLIMIR : [interprétation]

 27   Q.  Toujours est-il que compte tenu de ce chiffre, la population totale à

 28   Srebrenica s'élevait à 16 639. Avez-vous pris en considération ce chiffre


Page 9687

  1   lorsque vous avez utilisé les chiffres pour votre analyse ?

  2   R.  Excusez-moi, mais vous venez de faire référence au nombre de femmes. Si

  3   vous ajoutez à cela le nombre d'hommes, cela vous donne quasiment 36 000,

  4   voire 37 000 personnes.

  5   Q.  Merci. Vos calculs, que nous retrouvons dans ce document, j'aimerais

  6   savoir si vous avez utilisé le chiffre total de 36 051 personnes ou est-ce

  7   que, pour obtenir ce calcul, vous avez utilisé seulement le chiffre de 19

  8   566, qui était mentionné dans le recensement de 1991 ?

  9   R.  Nous n'avons utilisé ni l'un ni l'autre de ces chiffres. Nous avons

 10   utilisé le nombre de Musulmans dont les noms figuraient sur les listes à

 11   Srebrenica en 1991. Je ne sais plus quel est le chiffre de ces Musulmans,

 12   mais je sais que le total est donné quelque part dans le rapport. Je

 13   pourrais le retrouver très, très facilement d'ailleurs.

 14   Nous n'avons pas utilisé les chiffres que nous voyons maintenant sur

 15   nos écrans.

 16   Q.  Merci. Est-ce que nous pourrions maintenant revenir sur votre article,

 17   cet article que vous avez publié. Document 1708 de la liste 65 ter.

 18   Comme je l'ai dit un peu plus tôt, vous avez dit ici que vous en avez

 19   conclu qu'au moins 7 475 personnes ont été tuées après la chute de

 20   Srebrenica.

 21   Voici ma question : ces personnes, s'agissait-il d'habitants de

 22   Srebrenica ou d'habitants de différentes municipalités ? J'ai cité le nom

 23   de quelques-unes de ces municipalités qui figuraient dans ce document.

 24   R.  Il y avait des habitants de différentes municipalités à partir de 1991.

 25   A partir de 1995, nous ne le savons pas vraiment. La plupart d'entre eux

 26   vivaient certainement dans la ville de Srebrenica. A ce moment-là -- ils

 27   étaient, bien évidemment, dans la ville de Srebrenica en 1995, avant la

 28   chute. Mais un certain nombre d'entre eux étaient venus de Zvornik et


Page 9688

  1   d'autres municipalités, de Bratunac aussi, ils étaient venus à Srebrenica

  2   pendant la période de la guerre, voire même avant.

  3   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Madame le Juge Nyambe.

  4   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] J'ai une question à poser.

  5   Dans le cadre de votre rapport ici, est-ce que vous pouvez nous dire

  6   qui est décédé avant 1995 ou après la chute de Srebrenica ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Avant 1995 ?

  8   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Oui. Avant la chute de l'enclave.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Nous n'avons pas utilisé ces données.

 10   C'est la raison pour laquelle ce pourcentage qui est de 33 % est une

 11   estimation plutôt basse. Parce que ceux qui sont morts avant la chute de

 12   Srebrenica, morts de causes naturelles ou pour d'autres raisons, sont

 13   toujours inclus dans ce dénominateur mais n'ont pas été comptés. La

 14   population à risque, qui pouvait être portée disparue ou qui a été tuée en

 15   1995, ce groupe de personnes est devenu trop important, parce que nous

 16   n'avons pas soustrait tous ces gens-là et parce qu'il y avait de

 17   l'émigration avant juillet 1995. 

 18   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Merci.

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] M. le Juge Mindua a une question à

 20   poser.

 21   M. LE JUGE MINDUA : Oui, Monsieur le Témoin. Dans la foulée de la

 22   question de la Juge Nyambe s'agissant de cette pièce 65 ter 1708, le titre

 23   "Accounting for Genocide : How Many Were Killed in Srebrenica ?"

 24   Ce matin, pendant le contre-interrogatoire, l'accusé vous a demandé si vous

 25   aviez, dans vos calculs, tenu compte des personnes tuées illégalement et

 26   des personnes tuées au cours des combats ou d'une toute autre façon. Je me

 27   rappelle que vous aviez dit que non, vous n'aviez pas tenu compte de ces

 28   différences, parce que vous n'êtes pas juriste et que ça ne vous


Page 9689

  1   intéressait pas.

  2   Alors, j'ai un petit malaise quand je regarde le titre de votre

  3   papier, parce que vous parlez de personnes tuées à Srebrenica, et en même

  4   temps, vous évoquez le terme "génocide". Je n'ai pas encore eu la chance de

  5   lire en détail votre article, mais je voudrais à cet instant vous poser la

  6   question de savoir : quand vous parlez de personnes tuées à Srebrenica,

  7   avez-vous tenu compte, encore une fois, des personnes tuées au cours des

  8   combats ou de tous les cas de décès indistinctement ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie. Nous n'avons pas inclus ces

 10   personnes qui ont été tuées ou qui, d'après nous, avaient été tuées avant

 11   ou à la date du 11 juillet 1995. Nous n'avons tenu compte que des personnes

 12   portées disparues. Ceci est une différence notable. Donc, si nous savions

 13   que des personnes avaient été tuées au combat, dans ce cas, inutile que les

 14   personnes se présentent à nous et nous disent que ces personnes étaient

 15   portées disparues. Ces personnes n'ont jamais figuré sur les listes. Nous

 16   n'avons consigné sur les listes que les personnes qui étaient inscrites sur

 17   les listes comme étant portées disparues.

 18   Voilà ce que je voulais dire.

 19   M. LE JUGE MINDUA : Très bien. Très bien. Donc vous êtes parti de la liste

 20   de personnes disparues. Je comprends mieux.

 21   Mais alors, sachant que vous n'êtes pas juriste, je voudrais juste

 22   savoir : est-ce que c'est à dessein que vous avez placé le terme "génocide"

 23   dans votre article ou bien c'est par hasard ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Non, ceci n'a pas été utilisé par

 25   hasard. Cet article ne constitue pas un document juridique. Ceci a été

 26   rédigé après que le général Krstic ait été déclaré coupable de complicité

 27   dans le génocide. C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas utilisé le

 28   terme de génocide. Il s'agit d'un terme utilisé dans une phrase qui avait


Page 9690

  1   déjà été utilisée, et c'est la raison pour laquelle nous avons employé ce

  2   terme. Nous ne l'avons pas employé au sens juridique du terme. Parce que le

  3   terme de génocide est un terme qui est utilisé de différentes façons par

  4   les médias, par la population, au sens général du terme, et donc c'est un

  5   terme qui a différentes définitions. Je suis tout à fait conscient du sens

  6   juridique que peut avoir ce terme devant le Tribunal. Dans l'affaire du

  7   général Krstic, ce général avait été déclaré coupable de génocide, et je

  8   crois que dans ce cas-là, il n'y a pas eu d'erreur au niveau du titre que

  9   nous avons employé dans notre article.

 10   M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup, Monsieur le Témoin. Je comprends mieux.

 11   Je vois que votre article a été rédigé en 2003; c'est bien ça ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que ceci a été rédigé en 2002 et

 13   publié dans la "Revue européenne relative à la population" en 2003. Le 10

 14   juillet 2002, c'est ce qui est inscrit au-dessus. Bien sûr, nous avions

 15   rédigé beaucoup de projets de rapports de ce type avant le mois de juillet

 16   2002.

 17   M. LE JUGE MINDUA : Merci beaucoup, Monsieur.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je crois que Mme le Juge Nyambe a une

 19   autre question à poser.

 20   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Oui, j'ai une autre question. En

 21   fait, une précision.

 22   Compte tenu de votre témoignage antérieur où vous avez dit que vous

 23   n'aviez pas les compétences nécessaires pour savoir qui était mort au

 24   combat et qui n'était pas mort au combat, dans le cadre de ce rapport,

 25   comment avez-vous pu établir que des personnes sont mortes, de façon

 26   catégorique, dans le cadre d'un génocide ? Le génocide a un sens

 27   particulièrement juridique lié à la mort de quelqu'un.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit, nous n'avons pas employé ce


Page 9691

  1   terme de génocide dans un cadre juridique, mais notre analyse a constaté

  2   que quasiment tous, 99,1 % de ces personnes portées disparues, étaient des

  3   Musulmans. Et il y avait 0,9 % de personnes qui n'étaient pas des

  4   Musulmans.

  5   Je sais également -- je sais qu'au niveau juridique, il doit y

  6   exister l'intention de détruire en tout ou en partie la population en

  7   raison de son appartenance ethnique. Ici, le génocide est utilisé dans un

  8   sens plus général. Au sens général du terme, il s'agit du meurtre d'un

  9   groupe important de personnes en raison de leur appartenance ethnique, ou

 10   une autre raison.

 11   Mais ceci, de toute façon, n'est pas contradictoire par rapport aux

 12   constations faites par ce Tribunal, parce qu'effectivement, Krstic a été

 13   condamné -- déclaré coupable de génocide.

 14   [La Chambre de première instance se concerte]

 15   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Je vous remercie.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, veuillez

 17   poursuivre.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président. Je remercie les membres

 19   des Juges de la Chambre, Mme le Juge Nyambe et M. le Juge Mindua.

 20   M. TOLIMIR : [interprétation]

 21   Q.  Je souhaite poser au témoin la question suivante : dans la dernière

 22   phrase, nous constatons que vous évoquez ce chiffre de 33 %. Est-ce quelque

 23   chose que vous avez calculé sur la base de la population totale de

 24   Srebrenica correspondant au chiffre d'avant la guerre ou vous êtes-vous

 25   fondé sur le chiffre total des populations de Vlasenica, Bratunac, Han

 26   Pijesak, Rogatica, Srebrenica et de ceux qui avaient perdu la vie en 1995

 27   aux mains de l'ABiH ? Ce chiffre s'élève à 1 394.

 28   R.  Je vous remercie. Ceci se fonde sur le nombre de personnes qui vivaient


Page 9692

  1   dans chacune de ces municipalités avant la guerre. Veuillez vous reporter

  2   au tableau numéro 11 de mon rapport, à la page 24 de la version anglaise.

  3   Je ne sais pas si vous souhaitez voir ce tableau ou pas.

  4   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Le rapport est la pièce P1776.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Tout en haut, qui est le tableau 10B, vous

  6   verrez que le nombre de personnes portées disparues par rapport à la chute

  7   de Srebrenica est calculé par le nombre d'habitants en 1991. Et vous verrez

  8   que vous avez ici, sur ces sept mille et demi, 500 sont portés disparus,

  9   4 195 étaient des Musulmans vivant à Srebrenica en 1991. En même temps, il

 10   y avait un Croate, pas de Serbes, 44 autres inconnus parmi ceux qui

 11   vivaient à Srebrenica en 1991. Total de 4 240.

 12   Sur ceux qui sont portés disparus, 1 827 habitaient à Bratunac avant

 13   la guerre; 921 habitaient à Vlasenica; 409 à Zvornik; et 98 à Han Pijesak.

 14   Pour un total de 7 495 personnes. Donc ceci, les chiffres qui ont été

 15   réajustés.

 16   Donc, si vous comparez ces chiffres -- alors, veuillez faire défiler

 17   la page vers le bas, le tableau numéro 11, nous voyons le total. Nous avons

 18   ici inclus les chiffres qui ne portaient que sur les hommes et nous avons

 19   comparé les hommes musulmans comptés dans chaque municipalité en 1991. Nous

 20   avons vu qu'à Srebrenica, il y avait 34,2 % qui vivaient à Srebrenica en

 21   1991 qui sont portés disparus en 1995. Parmi ceux qui vivaient à Bratunac,

 22   cela correspondait à 19,4 %; ceux qui sont comptés à Vlasenica, 11,3 % sont

 23   portés disparus; Zvornik, 1,9 %; Han Pijesak, c'est 8,6 %. Le total de ces

 24   municipalités correspond à 14,2 %. Ce sont ceux qui ont été comptés en 1991

 25   et qui ont été inscrits ou enregistrés comme étant portés disparus en 1995;

 26   autrement dit, un septième de la population.

 27   Nous avons remarqué en particulier que la tranche d'âge allant de 45

 28   à 49 correspondait au chiffre le plus élevé, et 50-54 ans, car le


Page 9693

  1   pourcentage était de plus de 50 % à Srebrenica. Ceci correspondait aux

  2   hommes musulmans portés disparus ou morts, ce qui correspond à la moitié

  3   des chiffres pour 1991. Ceci ne comprend pas les personnes qui sont mortes

  4   de causes naturelles dans l'intervalle, autrement dit, entre 1991 et 1995.

  5   Donc le chiffre est très élevé.

  6   M. TOLIMIR : [interprétation]

  7   Q.  Merci. Est-ce que cela inclut le nombre de soldats de ces municipalités

  8   de Srebrenica qui se sont faits tuer pendant la guerre et dont les noms

  9   figurent dans le tableau qu'on a vu tout à l'heure sous la catégorie

 10   combattants tués qui font partie du nombre de 1 384 personnes, et où on

 11   peut les retrouver dans ce tableau ?

 12   R.  Comme je l'ai déjà dit, les soldats qui sont énumérés par rapport à

 13   Srebrenica et par rapport à d'autres municipalités en 1991 et qui ont été

 14   donc enregistrés comme personnes portées disparues après la chute de

 15   Srebrenica ont été inclus ici. Nous n'avons pas fait de distinction entre

 16   ceux qui étaient soldats et qui n'étaient pas soldats. En fait, 70 % des

 17   personnes portées disparues étaient membres de l'armée de Bosnie, mais cela

 18   ne veut pas nécessairement dire que ces soldats auraient été tués au

 19   combat.

 20   Q.  Merci. Mais comment la Chambre peut savoir quelles personnes ont été

 21   tuées pendant les combats et quelles personnes n'ont pas été tuées pendant

 22   les combats ?

 23   R.  Comme je l'ai déjà dit, et je souligne encore une fois que cela ne

 24   faisait pas partie de mes recherches, mais il faut que je vous rappelle

 25   certains faits. Trente pourcents de ceux qui ont été enregistrés comme

 26   personnes portées disparues ne faisaient pas partie de l'armée, et on peut

 27   donc déduire ce nombre du nombre total des personnes portées disparues. Un

 28   certain nombre de ceux qui étaient soldats de l'armée ont été retrouvés


Page 9694

  1   dans les fosses communes. Il y a également un certain nombre de ceux-ci qui

  2   avaient des yeux bandés, et habituellement, les personnes se trouvant dans

  3   les fosses communes ne sont pas mortes au combat. Les cadavres qui ont été

  4   retrouvés à la surface, peut-être, auraient plutôt été les soldats, mais il

  5   y a d'autres personnes qui ont étudié cela de plus près.

  6   Q.  Et par rapport à votre rapport, est-ce que vous avez inclus les

  7   personnes qui ont été retrouvées dans les fosses communes, indépendamment

  8   des circonstances de leur décès ? Merci.

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Merci. Est-ce que par rapport à l'article qu'on vient de lire et par

 11   rapport à votre rapport, vous avez décrit tous les cas de décès ? Est-ce

 12   que vous les avez inclus dans cet intitulé, le calcul du génocide ? Oui ou

 13   non ?

 14   R.  Oui. Mais permettez-moi de réitérer encore une fois que nous n'avons

 15   inclus que les cas du décès des personnes qui ont été portées disparues.

 16   Les personnes qui n'ont pas été portées disparues, ce sont celles dont les

 17   cadavres ont été retrouvés et qu'il n'était pas nécessaire d'inclure leurs

 18   noms à ces listes, seulement pour ce qui est des personnes dont le dessein

 19   était incertain. Ces personnes, leurs noms figurent sur notre liste, la

 20   première liste de 2000, où il y a 7 475 noms, dont 66 noms sont les noms de

 21   personnes qui ont été identifiées en tant que personnes mortes. Mais même

 22   pour ces 66 personnes qui ont été portées disparues, leurs familles ne

 23   savaient pas que ces personnes étaient mortes.

 24   Q.  Merci. Est-ce qu'on peut afficher à nouveau le document 65 ter 1708.

 25   Merci. Est-ce qu'on peut afficher le troisième paragraphe dans votre

 26   article. C'est donc le paragraphe numéro 3 dans votre article à la page 3.

 27   A cette page, vous dites -- nous allons bientôt voir le paragraphe 3

 28   à la page 3 en anglais et en serbe. Nous avons maintenant les deux versions


Page 9695

  1   affichées à l'écran.

  2   Est-ce que pendant votre travail pour le bureau du Procureur, puisque vous

  3   parlez du nombre de victimes qui ont été les victimes du génocide, et

  4   puisque vous en parlez, je vais poser la question suivante : est-ce que

  5   lors de votre travail pendant que vous travailliez au bureau du Procureur,

  6   est-ce que des enquêteurs du bureau du Procureur ou d'autres personnels du

  7   bureau du Procureur vous ont donné des interprétations selon lesquelles

  8   vous deviez déterminer un nombre de victimes pour pouvoir appeler cela le

  9   génocide ? Merci.

 10   R.  Non. Pour ce qui est de la conclusion concernant le génocide, cela

 11   était écrit dans l'article qui n'était pas un article de nature juridique,

 12   et c'était à l'époque où je n'ai pas travaillé pour le bureau du Procureur.

 13   Cet article était destiné au public académique. C'était après que le

 14   jugement ait été rendu dans l'affaire Krstic.

 15   Je pense que nous étions plus précis lorsqu'on a utilisé le terme

 16   "génocide" que ce n'était le cas dans les ouvrages portant sur les conflits

 17   armés, puisque le terme "génocide" est souvent utilisé d'une façon qui

 18   n'est pas très précise.

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mme le Juge Nyambe a une question

 20   pour vous.

 21   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Merci. J'ai besoin d'une

 22   clarification.

 23   A la page 80 du compte rendu, à la ligne 9, en répondant à la

 24   question qui vous a été posée, vous avez dit la chose suivante, je cite :

 25   "… il y en avait qui étaient membres de l'armée et dont les corps ont

 26   été retrouvés dans les fosses communes."

 27   "Donc ces personnes faisaient partie de l'armée, et leurs corps ont

 28   été retrouvés dans les fosses communes."


Page 9696

  1   A la ligne suivante, vous dites :

  2   "Habituellement, les corps des personnes se trouvant dans les fosses

  3   communes étaient les corps des personnes qui n'ont pas été tuées au

  4   combat."

  5   Qu'est-ce que vous avez pu conclure par rapport aux cadavres des

  6   personnes qui ont été retrouvées dans les fosses communes ? Est-ce qu'il

  7   s'agissait des personnes qui étaient membres de l'armée, et par rapport à

  8   la conclusion selon laquelle ces personnes ne se sont pas faites tuer au

  9   combat ?

 10   Pouvez-vous nous dire quelque chose de plus là-dessus.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai déjà dit, l'information

 12   concernant la cause du décès des personnes retrouvées dans les fosses

 13   communes, nous ne savions pas si c'était des civils ou soldats. D'abord,

 14   nous savions que ces cadavres ont été retrouvés dans les fosses communes;

 15   deuxièmement, beaucoup de ces personnes avaient des liens sur leurs mains

 16   et leurs yeux bandés, et ces personnes ont été tuées de dos. Cela n'exclut

 17   pas la possibilité que certains d'entre eux auraient peut-être été tués au

 18   combat.

 19   Nous n'avons pas les informations précises là-dessus.

 20   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Merci.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, vous pouvez

 22   poursuivre.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 24   M. TOLIMIR : [interprétation]

 25   Q.  Puisque vous avez présenté cela en tant que vos arguments, pouvez-vous

 26   dire à la Défense le nombre de cadavres sur lesquels on a trouvé les

 27   bandeaux sur leurs yeux ? Est-ce que, dans votre rapport, vous avez inclus

 28   les informations concernant cela ?


Page 9697

  1   R.  Non. Dans mon rapport, j'ai rait référence à la déposition des experts

  2   pour les exhumations. C'est Dean Manning et Dusan, mais je ne me souviens

  3   pas de son nom de famille. Je ne sais pas si on connaissait le nombre de

  4   personnes qui avaient les yeux bandés ou les mains ligotées. Les

  5   exhumations ont été faites dix ans après les exécutions, donc la plupart de

  6   ces liens auraient disparu, et donc il est difficile de voir cela. Et si

  7   les exhumations ont été effectuées avant, il était plus probable

  8   d'identifier quel tissu a été utilisé pour les bandeaux sur les yeux ou

  9   pour les liens sur les mains. Je pense que c'était le cas, mais je ne peux

 10   pas vous donner le nombre de tels cas.

 11   Q.  D'abord, répondez à cette question : est-ce que Dusan Janc et Dean

 12   Manning sont les témoins experts ou ont fait partie du personnel au bureau

 13   du Procureur ? Merci.

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] La Chambre est au courant de cela.

 15   Monsieur McCloskey.

 16   M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je veux

 17   rappeler à la Chambre que Dr Brunborg dit que cela ne fait pas partie de

 18   ses recherches. Il a dit ceci au début. Puisqu'il a des connaissances de

 19   base et par politesse, il essaie de répondre à de telles questions, et on

 20   lui pose donc des questions qui ne concernent pas son domaine de recherche.

 21   Donc on suggère que cela fait partie de son rapport, ce qui n'est pas le

 22   cas. Il n'y a pas de problème pour ce qui est de son rapport, mais

 23   maintenant on lui pose les questions pour ce qui est de Dean Manning et

 24   Dusan Janc, si c'est la personne dont nous parlons ici. Je pense que cela

 25   ne fait pas partie de son domaine d'expertise. Je pense qu'on s'est

 26   éloignés de son domaine d'expertise.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] D'abord, il faut apporter une

 28   correction à la ligne 20 à la page 83, parce qu'il a été consigné que j'ai


Page 9698

  1   dit : "Cela n'est pas connu à la Chambre." J'ai dit, en fait, que : "La

  2   Chambre est au courant de cela." C'est parce que nous les avons déjà eus

  3   ici dans le prétoire avant.

  4   Deuxièmement, je pense que nous devons lever l'audience. Nous continuons

  5   demain après-midi à partir de 14 heures 15.

  6   Monsieur Tolimir, vous devez donc être prêt à continuer votre contre-

  7   interrogatoire demain et peut-être à réfléchir à ce que M. McCloskey a dit.

  8   Je rappelle que pendant la pause, Monsieur le Témoin, vous ne devez

  9   contacter qui que ce soit pendant cette pause jusqu'à demain.

 10   Merci. L'audience est levée.

 11   --- L'audience est levée à 13 heures 46 et reprendra le jeudi 10 février

 12   2011, à 14 heures 15.

 13  

 14  

 15  

 16  

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28