Page 11351
1 Le mercredi 16 mars 2011
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour à tout le monde.
6 Avant que nous ne reprenions le fil des questions supplémentaires,
7 j'aimerais demander à la Défense si elle est à même de répondre à la
8 requête présentée par le Procureur aux fins de déposer un résumé modifié
9 pour la liste 65 ter, et ce, pour le Témoin Dusan Janc.
10 Monsieur Gajic.
11 M. GAJIC : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes présentes.
12 Oui, Monsieur le Président, nous sommes tout à fait à même de répondre à la
13 requête présentée par l'Accusation aux fins de déposer un résumé modifié
14 pour la liste 65 ter, et ce, pour le Témoin Dusan Janc.
15 Je vais essayer d'être bref, Monsieur le Président.
16 M. Janc a déjà déposé ici, à plusieurs reprises d'ailleurs. Nous nous
17 souvenons tous, par exemple, qu'il a témoigné à propos des cartes, des
18 analyses ADN, ce pourquoi il a compilé un rapport. Il y a d'ailleurs de
19 nombreux extraits vidéo qui ont été présentés par son truchement.
20 L'Accusation, maintenant, souhaiterait verser au dossier des extraits de
21 film supplémentaires, qu'ils énumèrent d'ailleurs dans leur requête. Ils
22 veulent également présenter par le truchement de ce témoin certaines
23 conversations interceptées qui, apparemment, auraient été interceptées par
24 des opérateurs croates. Dans un premier temps, je vais m'intéresser à la
25 première partie de mon intervention.
26 Je vais citer une phrase capitale du paragraphe 4 de la requête de
27 l'Accusation, qui indique, et je cite : "Son témoignage relatif aux
28 conversations interceptées sera important pour décider de leur fiabilité
Page 11352
1 par rapport au contexte d'autres éléments de preuve matériels et pertinents
2 en l'espèce."
3 J'aimerais vous rappeler, par exemple, que le Témoin PW-070 a
4 témoigné à ce sujet. Il a écouté ces conversations interceptées, il en a
5 pris connaissance. Nous avons sa déposition qui a été versée au dossier. La
6 Défense suggère que cette question soit traitée par écrit. S'ils souhaitent
7 verser au dossier ces documents, ce qui me semble être leur intention, je
8 pense qu'il faudrait au moins qu'ils présentent cela directement sans
9 passer pas un témoin, ce qui réglerait le problème. Il s'agit d'un
10 enquêteur du bureau du Procureur qui va aborder la question de la fiabilité
11 de ces documents, et nous ne pensons pas que les choses doivent se passer
12 ainsi. La procédure ne doit pas être celle-ci, car nous ne pouvons pas
13 véritablement, d'après ce que nous comprenons, présenter ce type de
14 document par le truchement d'un enquêteur. Si nous avons bien compris, M.
15 Dusan Janc est enquêteur, plutôt qu'expert. Si le bureau du Procureur
16 souhaite traiter de conversations interceptées dans le contexte des autres
17 documents, bien que nous ne sachions pas d'ailleurs de quels documents
18 exactement il s'agit, parce que nous ne savons pas quelle est leur
19 intention pour ce qui est de M. Dusan Janc et des autres documents qu'ils
20 ont, documents de la VRS, documents de l'armée de la BiH, et cetera.
21 Quoi qu'il en soit, nous souhaiterions pouvoir apprécier cette
22 requête ainsi que tous ses tenants et ses aboutissants par écrit. Nous
23 pensons qu'il appartient à la Chambre de se prononcer sur le poids à
24 accorder à la fiabilité de ces conversations interceptées et il appartient
25 à la Chambre de tirer des conclusions à propos des différents aspects des
26 conversations interceptées.
27 Par conséquent, la Défense estime qu'il ne doit pas être fait droit à
28 la requête de l'Accusation, à savoir plutôt pour ce qui est des
Page 11353
1 conversations interceptées croates.
2 Pour ce qui est des extraits de film, il y a un certain nombre de
3 documents : la visite des Serbes canadiens auprès du général Mladic;
4 ensuite, il y a la réunion du général Mladic avec le général Rupert Smith
5 le 25 juillet; et il y a la commémoration lors de la retraite prise par
6 l'un des généraux de la VRS. Il y a un certain nombre d'autres témoins de
7 la VRS qui vont comparaître ici, et de ce fait, je pense qu'il faudrait
8 peut-être se demander si ces documents ne devraient pas plutôt être
9 présentés par leur truchement, parce qu'ils ont une connaissance directe de
10 ces événements, par opposition à un enquêteur. La défense n'a pas de
11 position arrêtée sur la question. Nous ne savons pas, en fait, si cela doit
12 être fait par le truchement d'enquêteurs ou d'autres témoins. Donc il
13 appartient à la Chambre d'en décider. Voilà ce que nous souhaitions dire.
14 Bien entendu, la Chambre devra décider compte tenu de la pratique et du
15 Règlement.
16 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
17 Monsieur McCloskey, qu'en est-il ?
18 M. McCLOSKEY : [interprétation] Pour ce qui est de la dernière partie de
19 l'intervention, à savoir M. Janc et les vidéos, nous n'avons pas
20 l'intention de voir M. Janc remplacer le général Milovanovic ou d'autres
21 personnes que nous voyons sur ces extraits vidéo. Mais vous savez qu'il est
22 important que vous sachiez comment nous avons obtenu ces vidéos. Je pense à
23 l'authenticité de ces vidéos et du moment où nous les avons obtenus.
24 Souvenez-vous, par exemple, de cette vidéo si célèbre maintenant du 25
25 juillet du général Tolimir à Zepa. Alors, il faut que nous expliquions
26 pourquoi nous, nous pensons qu'il s'agit d'une vidéo du 25 juillet, au vu
27 de certains faits établis par M. Janc dans le cadre de son enquête.
28 Et c'est un peu comme il l'a fait lorsqu'il a témoigné à propos de la vidéo
Page 11354
1 des Skorpions. Nous pensons qu'il s'agit d'informations de base qui sont
2 importantes. Bon, ces vidéos, elles existent depuis un certain temps, il y
3 en a que vous avez vues, d'autres que vous n'avez pas vues. Mais je pense
4 que le moment est particulièrement opportun pour l'entendre et pour que
5 vous compreniez pourquoi nous pensons qu'il s'agit d'une vidéo du 25
6 juillet, comment nous l'avons obtenue et quand nous l'avons obtenue. Je
7 pense que le témoin pourra parler. Il y aura un contre-interrogatoire dans
8 ce prétoire. Nous pensons que c'est une procédure qui est beaucoup plus
9 idoine, à mon avis. De toute façon, vous avez déjà vu ce genre d'éléments
10 de preuve, et je ne pense pas que cela lèse la Défense. La Défense pourra
11 voir ces vidéos. Je pense que cela est important également, il s'agit donc
12 de la présence du général Tolimir à Zepa.
13 Pour ce qui est des conversations interceptées maintenant, alors là, il
14 faut se souvenir que c'est M. Elderkin qui a présenté la conversation
15 interceptée par l'opérateur croate, et M. Elderkin et son équipe ont choisi
16 de vous donner la possibilité d'avoir davantage d'éléments à propos de
17 l'authenticité de ces conversations interceptées.
18 Et maintenant, j'aimerais revenir à Stephanie Frease. Donc c'est un peu
19 plus loin dans nos souvenirs. Elle travaillait pour le bureau du Procureur.
20 Elle faisait partie de l'équipe de Srebrenica ainsi que de l'équipe de
21 recherche qui a mené à bien une recherche sur les dirigeants. Elle a
22 témoigné à propos de l'authenticité des conversations interceptées par la
23 Bosnie-Herzégovine. Elle a été en mesure de mettre en parallèle ces
24 conversations interceptées et certains éléments sur des extraits vidéo. Par
25 exemple, lorsqu'il était question de la conversation interceptée du drapeau
26 serbe qui flottait sur une église à Srebrenica, elle a pu retrouver la
27 partie de la vidéo où l'on voit justement le drapeau serbe qui flotte
28 effectivement sur l'église à Srebrenica. Voilà, c'est ce genre d'exemple.
Page 11355
1 Donc elle a, en fait, recomposé les différents éléments du puzzle dans le
2 cadre de son enquête. C'est un peu ce que fait M. Janc. En fait, ce sera
3 beaucoup plus simple. Pour autant que je m'en souvienne, il va vous montrer
4 certaines conversations interceptées par la Bosnie-Herzégovine pour
5 lesquelles il existe une correspondance avec les conversations interceptées
6 croates, ou il y a quelque chose qui est mentionné sur le terrain et qui
7 est mentionné également dans la conversation interceptée croate.
8 Donc c'est assez simple, et un contre-interrogatoire pourrait avoir lieu.
9 Bon, ce n'est pas quelque chose qu'il convient de faire dans le cadre de
10 l'article 92 ter ou 92 bis, car vous allez être littéralement submergés par
11 les documents. Les conversations interceptées sont extrêmement importantes,
12 car je pense que cela nous permettra de comprendre les derniers éléments de
13 cela, le dernier chapitre en quelque sorte de ces conversations
14 interceptées, dans le cadre des événements qui se sont déroulées à cette
15 époque-là.
16 Voilà. Et une fois de plus, cela ne lèse absolument pas la Défense,
17 et je pense que c'est quelque chose, d'ailleurs, que M. Elderkin a
18 mentionné il y a très longtemps.
19 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci. Nous avons maintenant la
20 position des deux parties.
21 Oui, Maître Gajic, vous souhaitiez intervenir. Vous avez la parole.
22 M. GAJIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. M. Peter McCloskey
23 vient de nous apporter quelques précisions à propos du témoignage potentiel
24 de M. Janc.
25 Premièrement, je dirais qu'il n'a pas été témoin oculaire de ces
26 événements, il n'a pas participé directement à ces événements, ce qui
27 devrait être le cas pour en parler comme témoin. Et puis, il faut savoir
28 qu'avant tout, il comparaît ici comme enquêteur du bureau du Procureur, à
Page 11356
1 savoir un enquêteur qui fournit au bureau du Procureur des documents qu'ils
2 utilisent après lors des audiences. Donc nous pensons que ces enquêteurs
3 présentent des arguments. Mais si un enquêteur compare un événement à une
4 conversation interceptée alléguée, fondamentalement, il s'agit de
5 conjectures, et pour ce faire, nous avons les plaidoiries, les
6 réquisitoires, les mémoires de clôture. Un témoin comparaît pour indiquer
7 ce qui s'est passé à un moment donné sur un lieu donné. Si M. McCloskey est
8 d'avis que certaines conversations interceptées sont authentiques, il peut
9 toujours poser des questions au témoin approprié afin de voir si cet
10 événement s'est bien déroulé et s'il y a bel et bien eu conversation
11 interceptée. Si cela se fait par l'intermédiaire d'un enquêteur, écoutez,
12 franchement, je m'excuse, mais je vous dirais qu'il est extrêmement
13 difficile de procéder au contre-interrogatoire d'un enquêteur du bureau du
14 Procureur, notamment si cet enquêteur est utilisé, comme cela a été le cas
15 pour Dusan Janc par le passé, pour présenter et verser au dossier des
16 déclarations supplémentaires de témoin. Nous ne pouvons pas nous attendre à
17 ce qu'il ait une connaissance directe des événements. Il s'est contenté de
18 lire tout simplement à propos des événements. Et, bien entendu, la Défense
19 est tout à fait en droit de remettre en question la véracité de ces propos,
20 parce qu'ils prêchent pour la paroisse, en quelque sorte, puisqu'ils
21 travaillent pour le bureau du Procureur.
22 Donc, pour ce qui est des conversations interceptées, nous pensons que la
23 meilleure procédure consiste à présenter cela par écrit. Nous avons le
24 Témoin PW-70, que j'ai déjà mentionné. Il a témoigné à propos des
25 conversations interceptées, il a témoigné à propos de la façon dont ils ont
26 procédé, et cetera. Il y a eu un contre-interrogatoire, des questions lui
27 ont été posées à ce sujet. Nous avons maintenant suffisamment d'éléments
28 pour tirer des conclusions à propos des conversations interceptées.
Page 11357
1 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Gajic, j'aimerais vous poser
2 une question. Nous avons entendu beaucoup d'enquêteurs du bureau du
3 Procureur qui ont comparu comme témoins. Certains noms ont été mentionnés
4 par M. McCloskey il y a quelques minutes. Il y a, par exemple, d'autres
5 personnes, tels que le témoin qui va comparaître aujourd'hui, qui est
6 enquêtrice. Alors, bien entendu, aucun des enquêteurs par définition n'ont
7 participé aux événements ou n'ont été témoins oculaires des événements de
8 1995. Mais ils ont témoigné à propos d'autres choses, à propos, par
9 exemple, des méthodes retenues pour l'enquête, à propos de la filière de
10 conservation de certains documents.
11 Donc, d'après vous, quelle est la différence entre le témoin Janc et
12 les autres témoins ? Parce que j'aimerais quand même bien comprendre votre
13 point de vue.
14 M. GAJIC : [interprétation] Quelle est la différence, me demandez-vous,
15 entre le témoignage de Dusan Janc et le témoignage d'autres témoins ?
16 Eh bien, pour moi, la différence, elle saute aux yeux. Il s'agit d'un
17 enquêteur du bureau du Procureur. Il n'a pas été témoin des événements. Une
18 chose c'est d'avoir un enquêteur qui nous parle de la méthode retenue --
19 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Excusez-moi, Maître Gajic, je n'étais
20 pas en train de comparer M. Janc à d'autres témoins, mais M. Janc à
21 d'autres enquêteurs que nous avons déjà entendus comme témoins.
22 Quelle est la différence ? Où réside-t-elle ?
23 M. GAJIC : [interprétation] Eh bien, fondamentalement, il n'y a aucune
24 différence. Il n'y a pas véritablement de grande différence si ce n'est
25 pour ce qui est des sujets à propos desquels ils ont témoigné. Il s'agit de
26 sujets différents qui ont été abordés par M. Janc, Mme Gallagher et M.
27 Blaszczyk. Ils nous indiquent comment des documents se sont retrouvés entre
28 les mains des enquêteurs, et peut-être que c'est le seul enquêteur qui
Page 11358
1 pourra nous dire ça, M. Janc. Je ne pense pas qu'il soit judicieux de
2 demander à un enquêteur de se pencher sur la question de l'authenticité des
3 documents pour comparer lesdits documents à d'autres documents qui ont déjà
4 été présentés en l'espèce. Voilà ce que j'essaie de vous dire.
5 Nous avons déjà eu l'occasion de voir comment des enquêteurs ont comparu
6 pour présenter un grand nombre d'éléments de preuve, notamment des
7 déclarations de témoins qui ne vont jamais comparaître dans ce prétoire. Et
8 nous pensons que cela, justement, crée certains problèmes. La Défense a un
9 point de vue sur la question, et d'ailleurs nous avons déjà indiqué quel
10 était notre point de vue à propos des éléments de preuve fournis par des
11 enquêteurs, car nous ne pensons pas que ces éléments de preuve puissent
12 être utilisés comme base pour arriver à prononcer un jugement.
13 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey.
14 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. J'aimerais, en fait, rappeler
15 Stephanie Frease, dont je vous ai déjà parlé, mais M. Janc lui a succédé.
16 Maintenant, elle vit carrément dans un autre monde. C'est devenu une
17 enquêtrice-chef. C'était une analyste, une experte. C'était véritablement
18 le nec plus ultra des enquêteurs. Je pense que personne ne s'opposera à ce
19 que je viens de dire. Il se peut que je sois dans l'erreur, mais c'était de
20 toute façon il y a très longtemps de cela. Ce que va faire M. Janc, en
21 fait, c'est fondamentalement ce que faisait Mme Frease. Je ne pense pas que
22 cela doit donner lieu à une certaine polémique, mais je pense qu'il serait
23 utile que la Chambre puisse prendre en considération ces conversations
24 interceptées, et c'est pour cela que l'Accusation veut faire cela. Bien
25 entendu, il ne faut pas prendre cela au pied de la lettre, mais je pense
26 que c'est là son importance, ce qu'il a à nous dire.
27 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous avons maintenant entendu les
28 points de vue des deux parties. Ils ont été consignés au compte rendu
Page 11359
1 d'audience. La Chambre va se pencher sur la question et vous tiendra
2 informés en temps voulu.
3 Pour ce qui est des traductions des documents de la Défense.
4 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais vous informer
5 de l'arrivée des traductions suivantes : D38, D94, D111, D123, D135 et
6 D136.
7 Ce sont les traductions qui ont maintenant été saisies dans le prétoire
8 électronique et qui sont maintenant à la disposition de tout un chacun.
9 Nous pensons que ces traductions doivent maintenant être versées au
10 dossier.
11 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey.
12 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. A propos de la
13 même question, d'ailleurs vous vous souviendrez peut-être qu'hier, la
14 Défense a versé au dossier les documents 183 et 184, pour lesquels il n'y
15 avait pas de traduction. J'ai maintenant le document 7256 de la liste 65
16 ter, qui correspond au 184, et le 7255, qui est identique au document 183,
17 et ces documents 65 ter ont une traduction. Il y a eu un oubli quelque
18 part, parce qu'en fait - l'oubli venant de nous d'ailleurs - il y avait
19 certains documents qui avaient deux numéros ERN. Et malheureusement, pour
20 certains numéros, il y avait une traduction et pas pour d'autres, et ceux
21 que nous avons remis à la Défense n'avaient pas de traduction. Mais le fait
22 est que les traductions existent maintenant pour ces documents 65 ter.
23 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Quel est votre point de vue à propos
24 du versement au dossier de ces documents ? Le premier, le document D183,
25 avait été enregistré aux fins d'identification en attendant la traduction,
26 mais l'autre a tout simplement été enregistré aux fins d'identification.
27 M. McCLOSKEY : [interprétation] Ça, c'est une question intéressante, parce
28 que vous aurez compris, d'après mes observations hier, que l'Accusation
Page 11360
1 s'intéresse de très près à l'authenticité de ces documents. Je dois dire
2 qu'ils sont des documents qui sont des documents, en fait, très proches de
3 l'état-major général. C'est pour cela que la Défense, hier, avait dit
4 qu'elle pouvait absolument faire confiance à l'authenticité, en quelque
5 sorte, de ces documents, ce qui, pour moi, est assez important dans le
6 contexte du document. Pour ce qui est de l'autre document, celui qui se
7 trouvait à l'écran, je pense qu'il faudrait peut-être le traiter de façon
8 différente, mais j'ai mentionné à Me Gajic que, comme je l'avais fait pour
9 les deux documents précédents, j'allais lui demander quel est son point de
10 vue à propos de ce document du 12 juillet, document dans l'affaire Popovic
11 qui a été enregistré aux fins d'identification sous la cote P2069. Il
12 s'agit du document que vous avez mentionné hier et à propos duquel vous
13 aviez dit que l'on ne pouvait pas établir le lien avec le témoin
14 conformément aux règlements.
15 Peut-être que nous pourrions en parler brièvement, parce que si nous
16 pouvions le faire, nous pourrions régler le sort de tous ces documents.
17 Donc j'ai une première question à poser à la Défense. Est-ce que ce
18 document pourrait maintenant être affiché à l'écran. Il s'agit du document
19 P --
20 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que vous allez le montrer à
21 nouveau au témoin lors que vous questions supplémentaires ?
22 M. McCLOSKEY : [interprétation] Non, je ne pense pas. Je pense que j'en
23 avais terminé avec l'examen de ce document. Je voulais tout simplement
24 demander à la Défense quel était son point de vue afin de décider de
25 demander son versement au dossier ou non, notamment au vu de vos
26 observations et de mes préoccupations. Mais ce qui est important, en fait,
27 ce qui est essentiel, c'est le point de vue de la Défense. Peut-être que la
28 Défense n'a pas à prendre position à ce sujet, mais c'est un document qui
Page 11361
1 est envoyé du Corps de la Drina et qui est envoyé à l'état-major principal,
2 au secteur chargé du renseignement. Cela a été également envoyé au
3 commandant de la sécurité du Corps de la Drina. C'est pour cela que le
4 point de vue de la Défense m'intéresse particulièrement.
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous pouvons, dans un premier temps,
6 indiquer que les documents de la Défense pour lesquels nous avons
7 maintenant une traduction, et pour lesquels Me Gajic nous a donné les
8 cotes, sont maintenant des documents qui sont versés au dossier. Ils ne
9 sont donc plus enregistrés aux fins d'identification.
10 Maître Gajic, quel est votre point de vue à propos de la pièce P2069, qui a
11 été enregistrée aux fins d'identification ?
12 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, premièrement, j'aimerais
13 vous parler des deux documents précédents, où nous avons le nom de M. Momir
14 Nikolic au niveau de l'encadré réservé à la signature.
15 A propos de ces documents, nous avions dit que nous n'avions aucune raison
16 de penser que les documents n'étaient pas authentiques. Donc nous formulons
17 notre point de vue de façon légèrement différente à la formule retenue par
18 M. McCloskey.
19 Pour ce qui est de ce document-ci, nous pensons qu'il serait beaucoup plus
20 utile de poser la question à M. Momir Nikolic. Posons-lui la question à
21 propos de l'authenticité de ce document lorsqu'il viendra comparaître.
22 D'ailleurs, cela est valable également pour les deux autres documents.
23 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey.
24 M. McCLOSKEY : [interprétation] Là, il y a eu un changement de point de vue
25 depuis hier, car je pensais qu'ils avançaient que le document était
26 authentique. Je ne pense pas que l'on puisse demander le versement au
27 dossier d'un document si vous ne pensez pas que le document est
28 authentique. Je pense que toute personne dans ce prétoire doit indiquer, je
Page 11362
1 pense, que le document est authentique. C'est ce qui a été dit hier, et
2 c'est pour cela que nous n'avons pas soulevé d'objection.
3 Je ne pense pas que le document puisse être versé au dossier si nous
4 n'avons pas d'élément de preuve, d'élément fiable indiquant que le document
5 est authentique et qu'il ne s'agit pas d'un document falsifié.
6 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Gajic.
7 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai réagi que très
8 brièvement lorsque j'ai entendu comment M. McCloskey interprétait les
9 choses, mais bien entendu, nous maintenons ce que nous avons dit hier.
10 Lorsque nous recevons un document de la part du Procureur, lorsque nous
11 estimons qu'il est authentique, nous nous en servirons. Maintenant, quant à
12 la manière dont on s'est procuré ce document, nous n'en savons rien. Il a
13 fait partie des communications du bureau du Procureur et nous l'avons reçu
14 d'une autre source, de laquelle le Procureur l'a reçu également. Rien ne
15 nous permet de penser qu'il y a un manque d'authenticité. Nous n'avons pas
16 de format, pas d'élément nous permettant de penser cela. Quant aux deux
17 documents que nous avons vus hier, nous pensons qu'ils sont authentiques.
18 Si en se fondant sur certains éléments, en pensant qu'un document
19 correspond ou non à un événement -- nous pourrions avancer une affirmation
20 qui ne serait pas soumise à une modification ultérieurement. Non, je ne
21 pense pas que tel soit le cas. Nous sommes toujours ouverts à modifier une
22 position s'il y a de nouveaux éléments qui se présentent.
23 Si M. McCloskey pense que le document doit être versé au dossier,
24 nous ne nous y opposerons pas.
25 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey.
26 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je pense que pour ce qui est des deux
27 premiers documents, M. Gajic est clair, il estime qu'ils sont authentiques.
28 Il ne vient pas de dire qu'il n'y a pas de preuve et qu'ils ne sont pas
Page 11363
1 authentiques. Maintenant, il nous dit qu'il ne s'opposera pas à ce que nous
2 versions au dossier le document du 12 juillet, que nous avons à l'écran,
3 mais il ne nous dit toujours pas qu'il estime que ce document soit
4 authentique. Je pense que ce serait utile qu'il nous précise sa position.
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je pense que la situation est claire.
6 Le document D183 a reçu une cote MFI en attendant la traduction. M.
7 McCloskey nous dit que la traduction est prête, et nous allons verser le
8 document au dossier sous une cote permanente.
9 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
10 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Le greffier précisera pour le compte
11 rendu d'audience comment il convient de procéder avec ce document.
12 M. LE GREFFIER : [interprétation] L'Accusation a déjà téléchargé l'original
13 et la traduction des deux pièces, D183 et 184. Ainsi, ces cotes seront
14 attribuées à des pièces 65 ter : 7255 pour la pièce D183 et 7256 pour la
15 pièce D184.
16 Merci.
17 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci. Maintenant, nous avons toutes
18 les cotes regroupées pour le document et pour sa traduction.
19 Maintenant, il nous reste deux documents. L'un proposé par
20 l'Accusation, l'autre par la Défense.
21 Monsieur Gajic, page 12, ligne 2, vous avez dit que vous n'alliez pas vous
22 opposer au versement. Si aucune des parties ne s'y oppose, la Chambre
23 acceptera ces documents.
24 Je ne vois pas d'objection du côté de l'autre partie, donc les deux
25 documents seront versés au dossier.
26 Une question pour vous, Monsieur McCloskey : la pièce P269 [comme
27 interprété], cette pièce, elle a aussi une traduction ? Elle est à l'écran.
28 Très bien. Donc nous pouvons enlever la cote MFI.
Page 11364
1 Monsieur McCloskey.
2 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, merci. Oui, c'est une manière simple
3 de résoudre une question complexe. Je pense que nous allons pouvoir vous
4 fournir davantage d'informations sur cette collection. Cela me semble
5 important. Il y a des documents qui ne se sont pas vus attribuer des
6 numéros 65 ter. Je ne voulais pas les aborder tant que les deux autres
7 documents n'étaient pas été versés au dossier. Donc nous allons présenter
8 une requête pour le reste des documents pour obtenir des cotes 65 ter. Vous
9 verrez quelle est la source des documents et quelques problèmes qui se
10 posent à leur sujet.
11 Pour le moment, nous avons terminé.
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien. Faites entrer le témoin,
13 s'il vous plaît.
14 Nous allons passer à huis clos pour que le témoin puisse entrer.
15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos.
16 [Audience à huis clos]
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 [Audience publique]
23 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Soyez le bienvenu
24 de nouveau dans ce prétoire.
25 Je vous rappelle la validité de la déclaration que vous aviez
26 prononcée avant de commencer votre déposition.
27 Monsieur McCloskey.
28 M. McCLOSKEY : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
Page 11365
1 LE TÉMOIN : PW-075 [Reprise]
2 [Le témoin répond par l'interprète]
3 Nouvel interrogatoire par M. McCloskey : [Suite]
4 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.
5 M. McCLOSKEY : [interprétation] S'il vous plaît, page 11 329; est-ce qu'on
6 peut l'afficher à l'écran.
7 Q. En attendant, Monsieur le Témoin, vous vous souviendrez qu'hier, le
8 général Tolimir vous a posé des questions sur votre entretien avec M.
9 Bursik du bureau du Procureur. Il vous a demandé si on vous a dit que vous
10 étiez un suspect. Je dois trouver la portion sur laquelle je souhaite vous
11 interroger.
12 C'est vers le haut. Je vais en donner lecture. La question commence
13 par :
14 "Merci. Donc, jusqu'à la fin de votre entretien, on vous a dit que
15 votre statut était celui d'un suspect, et c'est ce qui s'est passé ?"
16 Et en réponse :
17 "Oui, on me l'a dit uniquement à la fin. On ne me l'a pas dit au début,
18 lorsque j'avais posé la question."
19 Alors, prenons la pièce D182, c'est cet entretien. Et voyons la première
20 page dans les deux langues.
21 R. Là, je vois l'anglais.
22 Q. Oui, il faut attendre un petit peu pour que cela s'affiche dans les
23 deux langues. Nous allons voir ce que vous en pensez lorsque cela se sera
24 affiché.
25 Première page de l'entretien. Tournez la page, s'il vous plaît, dans les
26 deux langues.
27 Je vais donner lecture. La fin de la page dans les deux langues. Je
28 vais lire lentement.
Page 11366
1 Monsieur Bursik, deuxième page de l'entretien :
2 "Egalement, je ne voudrais pas que vous posiez des questions
3 directement à l'interprète; j'aimerais que vous adressiez à moi vos
4 questions. L'interprète vous interprètera, il m'interprètera la question
5 qui a reçue sa réponse.
6 "Sur la base des informations que possède le Tribunal, le Procureur du
7 Tribunal pense que vous pourriez être un suspect responsable d'avoir commis
8 des actes qui pourraient faire l'objet de poursuites conformément au Statut
9 du Tribunal. Et avant de vous poser des questions, je dois vous prévenir de
10 vos droits en tant que potentiel suspect. Est-ce que vous le comprenez ?"
11 Nous allons tourner la page pour voir là où ça se termine. C'est la
12 page 3.
13 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je pense qu'il ne faudrait pas
14 diffuser ce document à l'extérieur du prétoire. Le greffier confirme que
15 cela n'a pas été diffusé.
16 M. McCLOSKEY : [interprétation]
17 Q. Maintenant, le général Tolimir vous a dit :
18 "Donc c'est à la fin de l'entretien que l'on vous a dit que vous
19 étiez considéré comme étant un suspect," mais il avait tort, n'est-ce pas,
20 puisque c'est dès le départ qu'on vous l'a annoncé, dès le début de votre
21 entretien ?
22 R. Je n'ai pas compris si vous m'aviez adressé une question.
23 Q. Monsieur, est-ce que c'est au début de votre entretien avec M. Bursik
24 qu'on vous a dit que vous étiez considéré comme un suspect ?
25 R. Je ne me souviens pas qu'on me l'ait dit. Mais si c'est ce qu'on voit
26 ici, c'est clair.
27 Q. D'accord. Page 11 337, vous avez dit comme suit. J'en donnerai lecture
28 sans en demander l'affichage. Le général Tolimir vous a demandé si on
Page 11367
1 pouvait considérer que vous êtes responsable d'avoir transporté les
2 Musulmans.
3 Et vous avez répondu : "Eh bien, je dois vous dire qu'à l'époque j'ai
4 été assez fier qu'on ait pu déplacer ces gens de manière organisée, en
5 toute sécurité, sans qu'ils soient soumis à des mauvais traitements, et ils
6 ont pu traverser vers le territoire où ils voulaient se trouver. Ça m'a
7 semblé logique qu'ils s'y rendent, et c'est probablement à cause de cela
8 que je me suis senti fier d'une certaine manière."
9 Dans mon résumé également, l'on voit votre affirmation que vous êtes resté
10 juste quelques minutes devant cette école, et puis vous êtes parti contre
11 les instructions du colonel Popovic; est-ce exact ?
12 R. Oui. J'ai dit que Nikolic m'a donné l'ordre de revenir sur-le-champ.
13 Q. Donc vous n'étiez pas tellement fier de ce que vous étiez en train de
14 faire avec Popovic devant cette école, au point de suivre les ordres du
15 colonel du Corps de la Drina. En revanche, vous êtes revenu à Bratunac sur
16 les ordres du capitaine ?
17 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Bonjour à toutes et à tous. Paix en la
19 demeure. Que ce procès se termine selon la volonté de Dieu, et non pas
20 selon la mienne.
21 Le témoin a dit qu'il a suivi les instructions d'une personne qu'il a
22 considérée comme étant son supérieur hiérarchique --
23 L'INTERPRÈTE : Les voix se chevauchent.
24 M. McCLOSKEY : [aucune interprétation]
25 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey, n'interrompez
26 pas.
27 Monsieur le Témoin, enlevez votre casque, s'il vous plaît.
28 Monsieur Tolimir, vous ne pouvez pas déposer. Vous pouvez réagir, vous
Page 11368
1 pouvez soulever des objections face aux questions posées par M. McCloskey.
2 Vous avez la parole.
3 Est-ce que vous souhaitez parler ?
4 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai soulevé mon objection face à ces quelques
5 questions et réponses qu'on vient d'entendre. Le témoin a dit qu'il est
6 revenu parce que Nikolic lui a demandé de revenir. Tout ce que j'ai dit,
7 c'était qu'il fallait que le Procureur respecte les réponses données par le
8 témoin.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, Monsieur Tolimir. Page 17, ligne
10 5, c'est ce qui est consigné au compte rendu d'audience. Il a dit : "J'ai
11 dit que Nikolic m'a ordonné de revenir sur-le-champ."
12 Ceci est consigné au compte rendu d'audience. Maintenant,
13 M. McCloskey peut poser des questions supplémentaires.
14 Allez-y, Monsieur McCloskey.
15 Et le témoin peut remettre son casque.
16 M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de
17 questions. J'en ai terminé. J'ai obtenu la réponse que je voulais.
18 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
19 [La Chambre de première instance se concerte]
20 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je tiens à présenter nos excuses
21 d'avoir pris autant de retard à cause des questions techniques et de
22 procédure ce matin. Vous serez maintenant heureux d'apprendre que votre
23 témoignage est terminé. Vous pouvez revenir chez vous. Vous allez être
24 escorté par l'huissier. Et je vous remercie encore une fois d'être venu à
25 La Haye pour témoigner.
26 Nous allons revenir en audience à huis clos.
27 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos.
28 [Audience à huis clos]
Page 11369
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 [Audience publique]
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur McCloskey.
6 M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, je n'aime
7 véritablement pas faire ce que je viens de faire, mais j'ai vu des échanges
8 avec le témoin, avec ces déclarations, qui n'ont rien à voir avec une
9 objection en bonne et due forme, et donc c'est la raison pour laquelle j'ai
10 réagi. Normalement, par courtoisie, j'aurais dû laisser le témoin terminer.
11 Mais lorsqu'il y a ce type d'intervention, je ne sais pas quoi faire.
12 Je vais, bien entendu, essayer de me retenir. Mais lorsque cela se
13 produit alors qu'on aborde un point important -- je sais que vous
14 n'appréciez pas cela, et je vous présente mes excuses, mais je ne vois pas
15 comment réagir autrement. Je tenais simplement à vous dire cela.
16 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je souhaite que les deux parties
17 gardent cela à l'esprit. Pendant l'interrogatoire principal, pendant le
18 contre-interrogatoire et pendant les questions supplémentaires, l'autre
19 partie devrait faire très attention à ne pas influer sur le témoin. Les
20 deux parties, celle qui l'interroge et l'autre, bien sûr. Puisque nous, en
21 tant que Chambre, devons obtenir tous les éléments dans toute la mesure du
22 possible, et il nous faut écouter de manière très attentive le témoignage
23 pour savoir sur quoi nous allons pouvoir nous fonder à la fin du procès.
24 Est-ce que le témoin suivant est prêt ?
25 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est M.
26 Elderkin qui interrogera. Est-ce que je peux m'absenter pour dire au revoir
27 au témoin précédent ?
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, tout à fait.
Page 11370
1 Monsieur Elderkin, bonjour.
2 M. ELDERKIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,
3 Monsieur les Juges. Bonjour à toutes et à tous. Donc ce sera le contre-
4 interrogatoire de M. Blaszczyk.
5 Avant qu'il ne rentre, j'ai revu la déposition précédente. Le témoin
6 --
7 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Avant que le témoin ne rentre ?
8 M. ELDERKIN : [interprétation] Je peux le faire en sa présence.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous en prie.
10 [Le témoin vient à la barre]
11 M. ELDERKIN : [interprétation] J'ai revu la transcription du témoignage de
12 David Wood la semaine dernière. Page 11 106, ligne 3 --
13 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vais inviter le témoin à
14 s'installer.
15 Veuillez continuer.
16 M. ELDERKIN : [interprétation] -- j'ai fait une erreur par rapport à la
17 date de la vidéo. Je pense que j'ai dit que la date était celle du 26
18 juillet, mais lorsque j'ai vérifié, j'ai vu que c'était plutôt le 19
19 juillet, et je souhaite apporter cette correction au compte rendu
20 d'audience pour que ce soit clair.
21 C'est une des vidéos au sujet desquelles déposera M. Janc. Je pense
22 que, s'il y a lieu, il pourra préciser les choses.
23 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
24 Maître Gajic.
25 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi. Je suis la
26 traduction en langue serbe, je vois la transcription sous les yeux et
27 j'écoute également en anglais. Page 20, ligne 20, je vois qu'il est
28 question du 9 juillet. S'agit-il du 9 ou du 19 juillet ? Puisque j'ai
Page 11371
1 entendu 19, et là je vois qu'il est question du 9.
2 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Me Gajic a raison.
3 Maître Elderkin.
4 M. ELDERKIN : [interprétation] Oui, il me semble avoir dit 19, et je suis
5 d'accord pour que ce soit 19.
6 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc la correction a été apportée au
7 compte rendu d'audience. C'est toujours utile d'être vigilent et de réagir
8 face aux éventuelles erreurs qui peuvent se glisser au compte rendu
9 d'audience.
10 Bonjour, Monsieur Blaszczyk. Bienvenue de nouveau dans ce prétoire. Je vous
11 rappelle que la déclaration que vous aviez prononcée il y a des mois dans
12 ce prétoire vous engageant à dire la vérité s'applique toujours.
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends. Je vous remercie. Bonjour.
14 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Nous aurons maintenant la poursuite,
15 ou le début, du contre-interrogatoire par M. Tolimir.
16 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à toutes
17 les personnes présentes.
18 LE TÉMOIN : TOMASZ BLASZCZYK [Reprise]
19 [Le témoin répond par l'interprète]
20 Contre-interrogatoire par M. Tolimir : [Suite]
21 Q. [interprétation] Bonjour à M. Blaszczyk. Nous allons terminer notre
22 contre-interrogatoire aujourd'hui puisque nous n'avons pas pu le faire la
23 dernière fois.
24 J'aimerais savoir si : avant que les carnets que l'on verse au
25 dossier arrivent, est-ce que vous avez pu savoir qui les avait en sa
26 possession avant que le MUP de Serbie ne les confisque ? Merci.
27 R. Comme je l'ai déjà dit, ce sont les autorités de la République de
28 Serbie qui nous ont fourni ces informations et qui nous ont également dit à
Page 11372
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 11373
1 quel endroit ont été trouvés ces carnets. Si c'était ça votre question.
2 Mais avant cela, nous n'étions pas au courant de ces carnets.
3 Q. Oui, merci. Je sais que vous ne le saviez pas, mais avez-vous cherché à
4 enquêter sur l'endroit où ils se sont trouvés avant que le MUP de Serbie ne
5 les confisque ? Merci.
6 R. Non. Nous n'avions pas d'informations sur l'endroit où ces carnets se
7 sont trouvés avant la confiscation par le MUP de Serbie et avant qu'on ne
8 les ait.
9 Q. Merci, Monsieur Blaszczyk. Vous, en tant qu'enquêteur du bureau du
10 Procureur, quand vous avez examiné les carnets, est-ce que vous avez pu
11 constater s'il y a eu là des modifications, des choses qui auraient été
12 rayées ou des ajouts apportés dans les carnets ? Merci.
13 R. A l'examen que j'ai fait des carnets, je n'ai remarqué rien
14 d'inhabituel, qu'on ait enlevé ou ajouté des choses. Pour moi, à mes yeux,
15 ces carnets étaient authentiques.
16 Q. Merci. Avez-vous cherché à savoir où se sont trouvés ces carnets
17 pendant la guerre ? Merci.
18 R. C'est évident que ces carnets étaient entre les mains du général Mladic
19 pendant la guerre… Je ne comprends pas votre question.
20 Q. Je vous ai simplement demandé si vous avez enquêté là-dessus. Vous
21 pouvez me dire oui ou non.
22 R. C'était évident pour nous que c'est le général Mladic qui les
23 avait. On le voit dans les enregistrements vidéo de Potocari, de Bratunac,
24 de Zepa, de Boksanica, et en particulier pour ce qui est du carnet qui date
25 de juillet 1995.
26 Q. Merci. J'aimerais savoir si vous avez enquêté pour savoir pour quelle
27 raison on ne vous a pas remis ces carnets avant, et pourquoi vous n'avez
28 pas cherché à savoir s'il y a eu des perquisitions aux mêmes endroits
Page 11374
1 précédemment, donc aux endroits où on allait retrouver ces carnets par la
2 suite ?
3 R. Je pense que j'ai essayé d'expliquer la situation. Je me suis posé la
4 question pourquoi pendant la première perquisition menée par le MUP de
5 Serbie cela n'a pas été trouvé. L'explication que j'ai obtenue de leur part
6 est qu'ils ne les ont pas trouvés, mais qu'à ce moment-là, ils n'ont pas
7 cherché avant tout à obtenir des documents dans cet appartement. Ce qui les
8 intéressait plutôt, c'était de savoir où se trouvait le général Mladic à
9 l'époque, pour savoir s'il était sur place.
10 Et s'agissant des 17 carnets de 2010, à en juger d'après
11 l'information que nous avons reçue du MUP, ces carnets étaient cachés dans
12 cette maison et ils n'ont pas été confisqués pendant la première
13 perquisition, la perquisition à la recherche de documents qui a été menée
14 en décembre 2008.
15 Q. Merci bien. Merci de nous avoir dit qu'il s'agissait du mois de
16 décembre. J'aimerais savoir si vous avez enquêté sur le nombre de
17 perquisitions -- combien de perquisitions ont-elles eu lieu à la maison du
18 général Mladic avant que les carnets de notes ne soient trouvés ?
19 R. Je ne sais pas combien il y avait de perquisitions dans la maison même
20 du général Mladic, mais je sais qu'au moins à deux ou trois reprises avant
21 cela, le MUP s'est trouvé dans cette maison. Avant le mois de décembre
22 2008. Mais je ne me souviens pas maintenant à combien de reprises ils se
23 sont présentés dans la maison.
24 Q. Alors, dites-moi, s'il vous plaît, est-ce que vous pouvez nous dire où
25 se trouvent les originaux de ces carnets et si ces originaux seront
26 retournés au propriétaire après que l'Accusation ait photocopié le tout et
27 après que l'Accusation s'en soit servi conformément à la procédure
28 appliquée aux objets trouvés lors d'une saisie ?
Page 11375
1 R. Je ne sais pas. Ce n'est pas à moi de vous dire si ces carnets seront
2 remis au propriétaire des carnets à la fin des procédures devant le
3 Tribunal. Mais pour l'instant, je sais que nous avons les originaux ici au
4 Tribunal.
5 Q. Merci bien. Quelle est la procédure du Tribunal s'agissant de la
6 confiscation des biens ? Lorsque les biens sont saisis, sont-ils remis par
7 la suite au propriétaire ? Est-ce que vous avez cherché à savoir ce qu'il
8 arrive à ces objets confisqués ?
9 R. Ces notes sont des éléments de preuve du Tribunal, et comme tels, nous
10 les gardons dans notre unité chargée de la preuve à La Haye. S'agissant du
11 sort qui sera réservé aux archives de l'unité des preuves, je ne sais pas,
12 je ne suis pas au courant de ce que l'on fera de ces archives plus tard.
13 Q. Très bien. S'agissant des archives de la Serbie et de l'armée de la
14 Republika Srpska, est-ce que vous savez si on remettra ces carnets à ces
15 derniers ? Est-ce que vous savez quelle est la position du Procureur
16 concernant ces procédures ? Merci.
17 R. Je répondrais de la même façon que tout à l'heure. Je ne sais pas ce
18 qui se passera avec ces éléments de preuve après que le Tribunal soit
19 fermé. Je sais que pour l'instant, ces éléments sont des éléments de
20 preuve, et ces carnets sont gardés à l'unité des preuves.
21 Q. Monsieur, est-ce que vous savez si les enquêteurs qui ont procédé à la
22 saisie du matériel -- s'agit-il simplement d'un emprunt ou bien est-ce
23 qu'il s'agit d'une confiscation de documents ? Est-ce qu'on a simplement
24 emprunté ces documents au propriétaire et est-ce qu'on les restituera à
25 leur propriétaire plus tard ? Merci.
26 R. Si le bureau du Procureur saisit des documents où qu'ils soient,
27 l'enquêteur qui procède à la saisie des documents émet un certificat au
28 propriétaire du document ou des documents. Dans le cas des documents qui
Page 11376
1 ont été retrouvés à l'hôtel Fontana, nous avons procédé de cette façon-là,
2 donc les documents confisqués à l'hôtel Fontana ont fait l'objet d'une
3 telle procédure.
4 Q. Merci. Et dans ce cas-ci, a-t-on émis un certificat d'objets
5 temporairement saisis ou s'agit-il d'une vraie confiscation d'objets ?
6 Merci.
7 R. Du meilleur de mon souvenir, mon collègue enquêteur et moi-même, nous
8 avons donné un certificat, une confirmation de saisie ou de confiscation
9 permanente, et nous l'avons donné à la personne qui était responsable des
10 documents, qui gardait les documents de l'hôtel Fontana. Cette personne
11 s'occupait des documents qui se trouvaient à l'intérieur de l'hôtel
12 Fontana, et nous lui avons donné un certificat lui indiquant que nous avons
13 saisi ces documents de façon permanente.
14 Q. Très bien. Merci. Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre de
15 quels documents s'agit-il s'agissant de l'hôtel Fontana, et si ce sont des
16 documents qui ont trait à ce dont vous nous parlez aujourd'hui ? Merci.
17 R. Non, ces documents n'ont rien à voir avec les carnets dont nous parlons
18 aujourd'hui. Je me suis seulement servi d'un exemple pour vous expliquer la
19 façon dont nous procédons. J'ai fait référence à l'hôtel Fontana parce que
20 j'ai personnellement participé à la perquisition et à la saisie des
21 documents à l'hôtel Fontana, mais ces documents saisis à l'hôtel Fontana ne
22 font pas partie des documents de Mladic. Il ne s'agit que d'informations
23 sur le nombre de personnes ayant séjourné à l'hôtel Fontana, le nom des
24 personnes ayant séjourné à l'hôtel Fontana, et cetera. Mais cela n'a
25 absolument rien à voir avec les carnets de Mladic. Je me suis simplement
26 servi de cet exemple pour vous expliquer la façon dont nous procédons. Pour
27 ce qui est maintenant de ces documents, les autorités locales, soit la
28 Serbie ou la Bosnie-Herzégovine, lorsque les documents sont saisis de ces
Page 11377
1 derniers, nous ne leur émettons pas de certificat, ni au propriétaire de
2 ces documents. Ils sont faits exclusivement par les autorités qui ont
3 procédé à la saisie des documents.
4 Dans le cas des carnets de Mladic, là c'était le MUP de Serbie qui a
5 émis un certificat au propriétaire -- ou plutôt, pas au propriétaire, mais
6 bien à la famille de Ratko Mladic.
7 Q. Merci bien. Laissons maintenant de côté l'hôtel Fontana puisqu'il n'est
8 pas du tout en rapport avec notre procès en l'espèce.
9 J'aimerais savoir quelle différence voyez-vous entre des documents
10 qui sont confisqués par le MUP ou qui sont confisqués par le Tribunal ?
11 Etant donné que le Tribunal possède ces documents, le Tribunal n'a-t-il
12 jamais émis un document aux autorités sur le sort des documents qu'il a
13 saisis ?
14 R. Si vous faites référence aux carnets, ils ont été saisis par le MUP de
15 Serbie. Les autorités serbes, ce sont elles qui ont donné un certificat aux
16 personnes qui s'occupaient de la garde de ces documents à l'endroit où le
17 matériel a été saisi.
18 Dans ce cas-ci, c'était la femme du général Mladic et Darko Mladic, son
19 fils.
20 Q. Très bien.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais maintenant que l'on affiche le
22 document P1389 dans le prétoire électronique, s'il vous plaît. J'aimerais
23 savoir si ces documents ont été confisqués de façon permanente ou
24 simplement temporairement saisis sur place. Merci bien.
25 M. TOLIMIR : [interprétation]
26 Q. Alors, nous voyons à la page 1 dans les deux langues qu'il est écrit,
27 je cite : "Document du ministère de l'Intérieur de Serbie." Et :
28 "Certificat de documents temporairement saisis." Et nous voyons la même
Page 11378
1 chose en anglais.
2 Dites-moi, s'il vous plaît : étant donné que c'est une confirmation sur les
3 objets saisis de façon temporaire et qu'il ne s'agit pas d'une
4 confiscation, y a-t-il un délai avant lequel il faut remettre les documents
5 au propriétaire ?
6 R. Oui, effectivement. J'ai été informé par le bureau du Procureur que des
7 règles s'appliquaient, tel par exemple 90 jours après une saisie
8 temporaire, il est obligatoire de remettre les documents au propriétaire.
9 Mais le bureau du procureur de Serbie a clairement expliqué que ces
10 documents dont est en possession le Tribunal peuvent être gardés au
11 Tribunal jusqu'à la fin des procédures. Et, en fait, il n'y a pas très
12 longtemps, le bureau du procureur de Serbie m'a demandé de lui dire jusqu'à
13 quand nous avions l'intention de garder ces documents ici à La Haye.
14 Q. Oui, bien sûr, mais y a-t-il une décision du Tribunal selon laquelle on
15 ne remet pas des documents saisis temporairement au propriétaire dans un
16 délai de 90 jours ? Y a-t-il une décision du Tribunal à cet effet ?
17 R. S'agissant des carnets du général Mladic ? Est-ce que c'est bien à ceci
18 que vous faites référence ?
19 Q. Oui, justement, nous parlons de cela. Lorsque quelque chose est "saisi
20 de façon temporaire" et qu'il faut remettre ou restituer ces documents à
21 leur propriétaire. Y a-t-il une décision que le Tribunal a rendue selon
22 laquelle il faut remettre les documents dans un délai de 90 jours ?
23 R. Je devrais vous dire que la procédure est faite de telle façon que les
24 autorités serbes m'ont rappelé que je devrais leur envoyer des informations
25 supplémentaires, à savoir jusqu'à quand est-ce que nous avions l'intention
26 de garder ces documents en notre possession, car les documents n'allaient
27 pas être restitués à la propriétaire immédiatement, mais bien à la fin des
28 procédures devant le Tribunal, à la fermeture du Tribunal.
Page 11379
1 Q. Très bien. J'aimerais savoir : pourriez-vous nous dire, s'il vous
2 plaît, si, étant donné que les documents sont maintenant électroniques et
3 vous avez fait des copies que vous avez placées dans votre base de données
4 de ces carnets, on ne peut plus rien changer ?
5 R. Vous savez, il y a toujours une grande différence entre l'original et
6 les documents scannés. Les meilleurs éléments de preuve sont toujours les
7 originaux. Une deuxième copie, une copie scannée, n'est jamais la même
8 chose. Les meilleurs documents sont toujours les originaux.
9 Q. Dans ce cas, pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, si la personne
10 qui possède l'original peut procéder à faire des ajouts, des modifications,
11 ajouter quelque chose à l'original et par la suite dire que c'est
12 l'original qui fait foi ?
13 R. Si vous parlez des carnets, il est absolument impossible, et je ne
14 crois pas qu'aucune modification puisse être faite avec ces carnets alors
15 qu'ils sont au service de collecte des moyens de preuve du Tribunal. Ces
16 documents sont conservés par les personnes qui travaillent au sein de
17 l'unité de collecte des moyens de preuve.
18 Q. Merci bien. Est-ce que ce n'est pas la règle qu'une partie au procès
19 détienne le monopole sur les documents qui sont utilisés dans le cadre d'un
20 procès ?
21 R. Je ne comprends pas ce que vous voulez dire par "monopole". Les moyens
22 de preuve qui sont conservés au service de collecte des moyens de preuve
23 font partie du bureau du Procureur. Ces documents, ou les originaux, sont
24 accessibles aux Juges de la Chambre, aux enquêteurs du Tribunal. C'est le
25 bureau du Procureur qui les conserve, mais ils ne sont pas les gardiens
26 exclusifs de ces documents. Le service de collecte des moyens de preuve est
27 un service indépendant qui ne fait pas partie du bureau du Procureur
28 nécessairement.
Page 11380
1 Q. Dites-nous, s'il vous plaît, si ces documents sont disponibles à la
2 Défense ainsi qu'à l'Accusation en tant que parties impliquées dans ce
3 procès, et est-ce que les deux parties peuvent les consulter de façon égale
4 ?
5 R. Il n'y a pas beaucoup de différence. Effectivement, il nous est plus
6 facile d'accéder à ce matériel puisque le service de collecte des moyens de
7 preuve se situe dans ce bâtiment. C'est à l'étage où je me trouve
8 d'ailleurs. Donc, s'il me faut consulter les originaux, je ne fais
9 qu'émettre une requête à l'unité, ils signent le document et je peux
10 consulter les originaux.
11 -- je ne connais pas la procédure exactement. Il m'est arrivé à plusieurs
12 reprises de recevoir des requêtes parvenant de la Défense selon lesquelles
13 la Défense me demandait de consulter les originaux. Je pense qu'il est plus
14 facile de passer par nous, d'informer les enquêteurs à savoir que la
15 Défense voudrait consulter les documents, et nous, nous présentons une
16 requête par la suite à l'unité de collecte des moyens de preuve. Ces
17 derniers nous remettent les documents, et nous remettons les documents à la
18 personne qui souhaite les consulter.
19 Mais la Défense n'a pas un accès limité à ces documents. S'ils
20 souhaitent consulter les originaux, il n'y a jamais de problème, pourquoi
21 pas. C'est toujours facile. Et je ne me suis jamais trouvé dans une
22 situation où leur requête était rejetée ou n'a pas été acceptée. Cela n'est
23 jamais arrivé.
24 Q. Merci.
25 Dites-nous, le service de collecte des moyens de preuve est un organe
26 qui fait partie du bureau du Procureur, et donc il vous est plus facile
27 d'accéder à ce service, plus facile qu'à la Défense, puisque la Défense
28 doit passer par vous, n'est-ce pas ?
Page 11381
1 R. Pour être bien honnête, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
2 Juges, je ne suis pas tout à fait certain si le service de collecte des
3 moyens de preuve fait partie du bureau du Procureur. Peut-être qu'elle est
4 partie intégrante du greffe. Je ne sais pas, je pourrais me tromper. Par
5 exemple, la Section des Témoins et des Victimes fait partie du greffe. Je
6 ne le sais pas, je suis désolé. Mais nous travaillons de très près avec
7 l'unité des moyens de preuve, puisque le bureau du Procureur est l'entité
8 qui remet les moyens de preuve à l'unité chargée des moyens de preuve, de
9 sa conservation et de sa collecte.
10 Q. Merci bien, Monsieur Blaszczyk. Je n'ai pas eu l'intention de vous
11 poser des questions auxquelles vous ne pouvez pas répondre, ce n'était pas
12 du tout mon objectif. C'est aux Juges de vous poser ces questions, et c'est
13 au Tribunal de créer des conditions égales pour tous.
14 Mais j'aimerais vous poser ceci comme question : au sein du bureau du
15 Procureur, avez-vous jamais examiné les questions relatives à la réception
16 de documents et à la date à laquelle ces documents peuvent être restitués à
17 leur propriétaire ?
18 R. Je ne suis pas au courant d'aucune décision de ce type, mais il
19 est certain que nos supérieurs devront décider du sort des archives et du
20 service de collecte des moyens de preuve à la fermeture du Tribunal.
21 Quelqu'un devra décider du sort de tout ceci.Mais je pense que c'est en
22 cours de décision, mais ce n'est pas encore tout à fait -- on n'a pas
23 encore pris de décision sur ce que le Tribunal fera avec ces documents.
24 Q. Merci bien, puisqu'il s'agit de questions qui relèvent de la compétence
25 d'autrui dont nous n'avons pas connaissance.
26 J'aimerais savoir si vous faites une différence entre le concept de
27 registre et le concept de carnet ?
28 L'INTERPRÈTE : Donc registre, ou en B/C/S, "dnevnik", qui pourrait
Page 11382
1 également vouloir dire journal.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, vous savez, oui, effectivement, il y
3 a une distinction entre un journal personnel et des carnets. Un journal est
4 quelque chose qui porte également sur le comportement, sur une information
5 personnelle qu'une personne écrit de façon quotidienne, alors qu'un carnet
6 est plutôt quelque chose qui fait état des réunions et qui porte sur des
7 informations autres, plus officielles.
8 M. TOLIMIR : [interprétation]
9 Q. Très bien. Merci. S'agit-il de documents qui sont rédigés et qui
10 expriment l'opinion de la personne qui les rédige et ses sentiments
11 également, ou bien est-ce que ce type de document reflète des faits, des
12 faits plutôt que des sentiments ?
13 R. Cela pourrait être les deux. On pourrait dire que ces types de
14 documents contiennent les deux, les pensées ou les sentiments, mais
15 également des faits.
16 Q. Pourquoi alors n'employez-vous pas un terme pour parler de ces
17 documents ? Des fois, vous employez le terme de "journal"; d'autres fois,
18 vous les appelez "carnets". Mais c'est deux choses complètement
19 différentes. Un journal est un endroit où on consigne ses pensées
20 personnelles, n'est-ce pas, ses sentiments ?
21 R. Il ne s'agit pas seulement de savoir quel mot utiliser. Mais lorsque
22 vous regardez ce carnet-là, vous pouvez voir que dans ses carnets de notes,
23 Mladic note quand il a eu des réunions, il dit qui a participé aux
24 réunions, qui a dit quoi.
25 Nous nous trompons peut-être sur le terme utilisé, mais nous les
26 appelons carnets de notes de Mladic, dans lesquels nous trouvons des faits.
27 Q. Très bien. Dites-moi, en tant qu'enquêteur, avez-vous fait une
28 différence entre ce qui est entré comme information dans un journal et ce
Page 11383
1 qui est entré comme information dans un carnet ? Et y a-t-il une différence
2 entre les deux types d'informations ? Merci. Donc faites-vous une
3 différence entre les opinions et les faits ?
4 R. Je n'ai jamais réellement eu le temps de me pencher sur l'analyse de
5 l'ensemble du recueil de ces carnets. Je me suis plutôt concentré sur les
6 carnets de 1995. Ces carnets sont des carnets dans lesquels on retrouve des
7 faits inscrits par le général Mladic. Il y a des informations sur les
8 réunions, sur les personnes qui ont pris part aux réunions, ce qui a été
9 dit lors des réunions, et ainsi de suite.
10 Q. Merci. Dites-nous alors, je vous prie : on peut noter dans un carnet
11 quelque chose qui s'est passé, et n'êtes-vous pas d'avis que dans ce
12 journal, on peut décrire quelque chose qui s'est passé ? N'avez-vous pas
13 enquêté, ne vous êtes-vous pas penché sur ces faits-là concernant certaines
14 annotations qui ont été annotées dans les documents qui ont été
15 temporairement confisqués ?
16 R. Eh bien, je dirais que les carnets qui proviennent de la famille du
17 général Mladic -- je ne me suis jamais vraiment penché pour en savoir
18 exactement sur les distinctions. Pour moi, il s'agit plutôt de documents
19 qui contiennent des faits. Je ne me suis jamais penché sur la réflexion à
20 savoir s'il s'agissait d'un journal ou d'un carnet. Ce sont des faits qui
21 ont été inscrits par le général Mladic. Dans ce carnet-là -- c'est plutôt
22 des carnets, plutôt qu'un journal; vous avez raison.
23 Q. D'accord. Merci. Ce procès est suivi par des personnes qui consignent
24 tout ce que disent les Juges ou vous. Il y a donc des sténotypistes, alors
25 que les journalistes rapportent sur ce qui se passe, ils informent les
26 citoyens sur ce qui se passe ici. Alors, j'aimerais savoir qu'est-ce qui
27 est plus fiable : les documents qui sont faits par un sténotypiste du
28 Tribunal ou bien un journaliste qui parle des faits et qui informe le
Page 11384
1 public de cette façon-là ? Merci.
2 R. Il est mieux -- bien sûr, on peut se fonder plus facilement sur un PV.
3 Vous pouvez tirer vos propres conclusions sur ce qui se passe dans une
4 réunion après avoir lu un procès-verbal. Vous pouvez savoir sur quoi elle a
5 porté exactement, par exemple.
6 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir, il est l'heure de
7 notre première pause matinale.
8 Nous allons maintenant prendre notre pause et nous nous retrouverons ici de
9 nouveau à 11 heures.
10 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.
11 --- L'audience est reprise à 11 heures 02.
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, Monsieur Tolimir, poursuivez, je
13 vous prie.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 M. TOLIMIR : [interprétation]
16 Q. Monsieur Blaszczyk, nous nous sommes interrompus alors que j'étais sur
17 le point de vous demander si vous aviez recherché ou analysé la possibilité
18 suivante : est-ce que des notes personnelles auraient pu être placées dans
19 ces carnets ?
20 Alors, voilà la question que j'aimerais vous poser : si une personne
21 se contente de faire référence à des avis qui sont des avis déclarés par
22 d'autres personnes, est-ce que la possibilité de présenter le propre point
23 de vue de la personne est minimale ?
24 R. Bien entendu qu'il existe une possibilité. Mais cela dépend de ce que
25 la personne a compris de l'opinion exprimée par quelqu'un d'autre.
26 Q. Merci. Donc, à moins que quelqu'un ne soit sténotypiste, par exemple,
27 et souhaite consigner exactement tout ce qui est dit dans ce prétoire, donc
28 si vous faites abstraction de ce cas, est-ce que cette personne a la
Page 11385
1 possibilité de transcrire de façon absolument exacte chaque mot prononcé
2 par la personne qui parle sans pour autant faire référence à une pensée
3 subjective ?
4 R. Si vous faites référence aux carnets du général Mladic, je vous dirais
5 que, par définition, le général Mladic n'est pas sténotypiste de
6 profession, donc il a écrit des notes dans ses carnets et il est absolument
7 manifeste qu'il y a écrit ce qu'il avait compris de la part d'autres
8 personnes présentes pendant ces réunions, par exemple. Maintenant, pour ce
9 qui est de savoir comment il a compris cela, ça, c'est une autre chose.
10 Pour ce qui est de savoir s'il a véritablement consigné exactement ce que
11 la personne lui a dit lors d'une conversation, ça aussi, c'est une autre
12 chose.
13 Q. Merci. Si quelqu'un écrit un journal de bord, par opposition à
14 quelqu'un qui écrit des notes dans un carnet, est-ce qu'il est possible
15 pour cette personne de présenter son point de vue, ses conclusions, la
16 façon dont elle interprète les choses ? Est-ce que cette possibilité est
17 plus importante ?
18 R. Si quelqu'un rédige un journal de bord, il peut écrire ce qu'il veut.
19 Ce qu'on lui relate, des informations sur sa vie privée. Enfin, ce qu'il
20 veut, il peut l'écrire.
21 Q. Merci. Dites-nous, je vous prie, ce qui suit : lorsque le bureau du
22 Procureur a reçu ces carnets, est-ce que des limites lui ont été imposées
23 par le MUP de Serbie, je pense par exemple à l'utilisation confidentielle
24 de parties du document ou de l'intégralité, d'ailleurs, du document,
25 précisément pour les raisons que nous venons d'évoquer ?
26 R. Nous avons été en contact avec les autorités serbes et avec le MUP
27 serbe, et elles ont été informées que nous allions utiliser l'intégralité
28 de ces carnets pour les différentes affaires au Tribunal. Il n'y a
Page 11386
1 absolument aucune condition qui a été imposée par le MUP serbe, sur la
2 façon d'utiliser les carnets j'entends.
3 Q. Merci. Est-ce que des conditions ont été évoquées, par exemple,
4 certains éléments des carnets ne pourraient être utilisés qu'à huis clos
5 partiel ou en audience publique ? Vous savez qu'ici, nous fonctionnons sous
6 le régime parfois de huis clos partiel ou huis clos si, par exemple, des
7 mesures de protection ont été octroyées à un témoin.
8 Donc, est-ce que le MUP de Serbie vous a présenté ce genre de demande
9 ?
10 R. Pour autant que je le sache, non, le MUP serbe n'a absolument pas
11 demandé ce genre de chose.
12 Q. Merci. Cela signifie donc que toute demande que présenterait un Etat au
13 Tribunal serait portée à votre connaissance ? Enfin, à la connaissance du
14 bureau du Procureur.
15 R. Oui, oui, si ce genre de demande était présenté, il est évident que le
16 bureau du Procureur en serait informé. De toute façon, la requête serait
17 envoyée au Tribunal.
18 Q. Merci. Avez-vous examiné toute la correspondance entre le MUP serbe et
19 le comité chargé de la coopération avec le Tribunal et ce Tribunal pour
20 pouvoir disposer de tous les éléments d'information de ma question ?
21 R. Moi je pense avoir examiné tous les documents et toute la
22 correspondance justement entre le MUP serbe et le Tribunal à propos de ces
23 perquisitions.
24 Q. Merci. Est-ce que cela signifie que l'Etat de Serbie et ses organes
25 n'ont pas essayé de faire en sorte que soient protégées les données
26 utilisées par ce Tribunal, indépendamment du fait que ces données peuvent
27 avoir trait à des personnes ou à des institutions ?
28 R. Nous continuons toujours à parler de la teneur ou du contenu des
Page 11387
1 carnets de Ratko Mladic, ou vous êtes en train de faire référence de façon
2 générale aux documents ?
3 Q. Merci. Non, je vous pose ces questions à propos des documents qui sont
4 présentés par votre truchement, tels que par exemple les carnets.
5 R. Pour autant que je m'en souvienne, au début, certes, il y a eu des
6 discussions à propos de la confidentialité de ces documents au moment où
7 les carnets ont été saisis et remis au Tribunal. Puis, par la suite, il a
8 été indiqué de façon très claire à la partie serbe que ces documents
9 allaient être utilisés au Tribunal dans le cadre d'affaires, mais je ne
10 suis absolument pas informé de limites qui auraient été demandées par les
11 Serbes.
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 Est-ce que l'Etat serbe vous a présenté des conditions pour que vous
19 puissiez utiliser les documents qui sont présentés par votre truchement ?
20 Dites-moi juste oui ou non.
21 R. Moi je ne suis absolument pas informé de restrictions ou de limites qui
22 auraient été demandées.
23 Q. Merci. Est-ce que vous savez si dans d'autres affaires les audiences se
24 passent à huis clos, par exemple, lorsque des références sont faites à
25 propos de documents fournis par la Serbie, documents qui sont considérés
26 comme des secrets d'Etat, tels que par exemple des documents relatifs à des
27 réunions du conseil suprême de la Défense ?
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Elderkin.
Page 11388
1 M. ELDERKIN : [interprétation] Est-ce que nous pourrions passer à huis clos
2 partiel pour un petit moment, je vous prie.
3 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui. Huis clos partiel.
4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
5 le Président.
6 [Audience à huis clos partiel]
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 [Audience publique]
22 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.
23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Excusez-moi. J'adresse mes excuses au
24 greffier, et j'aimerais remercier M. Elderkin de son observation. J'avais
25 tout simplement utilisé cela à titre d'exemple général sans pour autant
26 fournir des données précises à propos des personnes qui avaient comparu.
27 M. TOLIMIR : [interprétation]
28 Q. Mais dites-nous, je vous prie - étant donné que vous avez été
Page 11389
1 interrompu alors que vous étiez en train de répondre - je vous ai demandé
2 si vous saviez si dans d'autres affaires devant ce Tribunal des données
3 fournies par la Serbie ont été protégées; par exemple, je pense aux
4 réunions des dirigeants de l'Etat serbe, réunions auxquelles a participé,
5 entre autres, le général Mladic.
6 R. Je n'ai pas suivi d'autres affaires, pour être très franc avec vous.
7 Donc je n'en sais rien.
8 Q. Merci. Etes-vous en mesure d'obtenir des réponses à toutes les
9 questions auxquelles nous avons fait référence pour que nous puissions
10 véritablement avoir une position très claire à propos des affaires et de
11 l'utilisation des documents, étant donné que nous, citoyens serbes, devons
12 absolument respecter les consignes ainsi que les demandes présentées par le
13 gouvernement serbe ?
14 R. Tout dépend du type de question auquel vous pensez.
15 Q. Merci pour toutes ces réponses que vous venez de fournir. Je m'excuse
16 d'avoir abordé certains éléments qui ne sont pas de votre compétence, mais
17 étant donné que ce sont des documents qui sont présentés par votre
18 truchement, je me devais de vous poser ces questions maintenant pour savoir
19 quels types de questions je peux poser à l'avenir et comment me comporter à
20 l'avenir.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais maintenant remercier toutes les
22 personnes qui nous ont aidés pendant ce contre-interrogatoire. En ce qui me
23 concerne, je pense que nous en avons terminé avec ce contre-interrogatoire.
24 J'aimerais remercier M. Blaszczyk au nom de la Défense. Je lui souhaite
25 beaucoup de chance dans son travail, et que Dieu le bénisse.
26 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur Tolimir. Et,
27 bien entendu, vous avez tout à fait le droit de poser ces questions au
28 témoin.
Page 11390
1 Monsieur Elderkin, vous souhaitez poser des questions supplémentaires ?
2 M. ELDERKIN : [interprétation] Ce sera très bref, mais oui, Monsieur le
3 Président.
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous en prie.
5 M. ELDERKIN : [interprétation] Est-ce que nous pourrions afficher le
6 document P1407. Page 242 pour la version B/C/S et 239 pour la version
7 anglaise.
8 J'ai l'original de cette pièce, et j'aimerais le présenter au témoin, mais
9 dans un premier temps le présenter à la Défense et aux Juges.
10 Cela, bien entendu, a trait aux questions qui ont été posées un peu
11 plus tôt par le général Tolimir à propos de la possession des originaux des
12 carnets dont nous avons parlé.
13 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, je vous en prie. Montrez d'abord
14 cela à l'accusé, à Me Gajic, puis ensuite aux Juges de la Chambre, et en
15 dernier lieu au témoin.
16 Nouvel interrogatoire par M. Elderkin :
17 Q. [interprétation] Monsieur Blaszczyk, est-ce que vous pourriez, je vous
18 prie, tourner la page - vous allez voir le petit autocollant jaune - et
19 confirmer dans un premier temps que cela correspond bien à ce qui est
20 maintenant affiché sur nos écrans ?
21 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Tolimir.
22 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
23 Lors du contre-interrogatoire, nous n'avons absolument pas évoqué le
24 contenu des carnets. Je ne m'oppose pas à ce que M. Elderkin présente ses
25 idées personnelles lors des questions supplémentaires, mais encore faut-il
26 qu'il se tienne au cadre du contre-interrogatoire, et encore faut-il qu'il
27 nous fournisse des références exactes.
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je pense que l'Accusation
Page 11391
1 connaît quand même assez bien le Règlement, et j'espère, Monsieur Elderkin,
2 que vous n'oublierez pas ce qui vient d'être dit.
3 Poursuivez, je vous en prie.
4 M. ELDERKIN : [interprétation] Oui, si je peux continuer.
5 Q. J'aimerais vous poser la question suivante. Lors du contre-
6 interrogatoire, des questions vous ont été posées à propos de la définition
7 des documents du général Mladic, on vous a demandé s'il s'agissait plutôt
8 de journaux de bord ou de carnets, et vous avez à ce moment-là répondu à
9 plusieurs questions qui vous avaient été posées pour savoir si ces
10 documents étaient des documents où l'on trouvait des références factuelles
11 ou des intentions ou des points de vue personnels. Je vous demande de ne
12 pas oublier cela, et en tenant compte de cela, est-ce que vous pouvez
13 regarder cette partie de la page où il est écrit : "27 juillet 1995,
14 montagne de Boksanica". Est-ce que vous pourriez nous dire ce qui est écrit
15 ? Ce qui m'intéresse, en fait, c'est la fin, le corps du document avec les
16 astérisques.
17 R. Il s'agit d'informations ou de mots du général Mladic : "Zepa est
18 libre, et Zepa ne sera plus jamais turque."
19 Q. Le 27 juillet 1995, est-ce qu'il s'agissait d'intentions,
20 d'observations personnelles ou de faits ?
21 R. "Zepa est libre", c'est ce qui est écrit. Oui. Zepa était entre les
22 mains de l'armée serbe. L'observation "Zepa ne sera jamais plus turque",
23 ça, c'est plutôt de l'ordre d'une observation personnelle du général
24 Mladic, et en dessous, nous voyons son paraphe.
25 Q. Et qu'est-ce que cela signifie, "Zepa ne sera plus jamais turque" ?
26 R. Son intention, c'est que Zepa ne sera plus jamais placée sous
27 l'autorité musulmane et ne sera plus jamais abandonnée aux forces
28 musulmanes.
Page 11392
1 Q. Bien. J'en ai terminé avec ce document.
2 J'aimerais rappeler aux Juges que lors de l'interrogatoire principal à ce
3 sujet, nous avions versé au dossier le document P1391. Il y a une
4 correction qu'il faut apporter à ce document pour que tout soit bien clair
5 dans le dossier. En fait, je vais demander l'affichage du document pour que
6 tout le monde comprenne de quoi je parle. Il s'agit du document pour lequel
7 nous avons pu établir des faits qui corroborent ce qui est indiqué dans
8 certaines parties des carnets.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je pense qu'il faudrait remettre le
10 carnet original à l'Accusation.
11 Je dois vous dire que, pour être très franc, je ne me souviens pas ce
12 que vous corrigez maintenant.
13 M. ELDERKIN : [interprétation] Nous voyons un tableau, Monsieur le
14 Président, sur nos écrans, il s'agit des différentes entrées sur chacune
15 des pages. Donc ça, c'est sur la partie droite, et puis vous avez de
16 l'autre côté de l'écran tous les éléments qui permettent de corroborer ce
17 qui est écrit dans le carnet. Mais regardez, si vous prenez la deuxième
18 page de la version anglaise, je pense que vous comprendrez tout de suite ce
19 dont il s'agit.
20 Je vais poser la question au témoin.
21 Q. Monsieur Blaszczyk, il y a un chiffre 65 ter, qui est une erreur
22 d'ailleurs; c'est quelque chose qui vient de l'affaire Karadzic.
23 R. Oui, oui, effectivement. J'avais corrigé cette page il y a un moment.
24 Q. Et il s'agit, en fait, du numéro que l'on trouve dans la deuxième
25 colonne, donc la colonne qui se trouve au centre de la page. Vous voyez le
26 numéro 04795 de la liste 65 ter ? Cela a été corrigé et remplacé par le
27 numéro 6801.
28 R. Oui, c'est exact. Cela a déjà été corrigé par le numéro 6801.
Page 11393
1 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
2 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Elderkin, le greffier vient
3 de m'informer que cette correction a déjà été faite en décembre.
4 M. ELDERKIN : [interprétation] Mais je pense que --
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ou en novembre.
6 M. ELDERKIN : [interprétation] Ecoutez, je ne sais pas quand est-ce que
7 cela s'est fait, mais c'est au moment de l'interrogatoire principal du
8 témoin. Ce que nous venons d'afficher sur cette page, en fait, la
9 correction n'y avait pas été apportée. Maintenant que je vous ai fourni une
10 explication à propos de la correction, nous avons une version corrigée en
11 B/C/S et en anglais, et je pense qu'il serait utile d'avoir une version
12 corrigée dans notre dossier, puisque c'est un document qui va être utilisé
13 à l'avenir. Donc il serait utile d'avoir les bonnes références et les bons
14 numéros.
15 Donc j'aimerais vous demander la possibilité de remplacer cette
16 version par une version corrigée pour ce qui est de ce numéro.
17 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il s'agissait tout simplement
18 d'une erreur de numéro, donc je pense que nous pouvons effectivement
19 remplacer ce document.
20 M. ELDERKIN : [interprétation] Oui, mais il faut savoir qu'étant
21 donné qu'il a été versé au dossier, il faut que nous vous présentions la
22 demande plutôt que de le faire nous-mêmes. Donc il faut que nous en
23 présentions la demande au greffe.
24 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui. Je pense que vous pourrez
25 donc prendre contact avec le greffier.
26 M. ELDERKIN : [interprétation] Et je n'ai plus de questions à poser.
27 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci beaucoup.
28 [La Chambre de première instance se concerte]
Page 11394
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 11395
1 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Blaszczyk, je pense que vous
2 serez heureux d'entendre que vous êtes arrivé au terme de votre déposition.
3 Je vous remercie d'être venu à nouveau, et vous pouvez tout à fait
4 reprendre votre activité professionnelle normale.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.
6 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.
7 [Le témoin se retire]
8 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Elderkin.
9 M. ELDERKIN : [interprétation] Le témoin suivant est Mme Tabeau, et c'est
10 mon collègue M. Vanderpuye qui va lui poser ses questions. J'aimerais avoir
11 la possibilité de pouvoir quitter le prétoire et rentrer dans mon bureau.
12 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, tout à fait. Très utile que vous
13 travailliez effectivement dans votre bureau.
14 M. ELDERKIN : [interprétation] Merci.
15 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Vanderpuye, et
16 bienvenue dans ce prétoire.
17 Je souhaiterais que l'on fasse entrer le témoin.
18 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
19 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour, Madame Tabeau. Soyez la
20 bienvenue. Je vous invite à donner lecture de la déclaration solennelle,
21 s'il vous plaît.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
23 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
24 LE TÉMOIN : EWA TABEAU [Assermentée]
25 [Le témoin répond par l'interprète]
26 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Veuillez vous installer, s'il vous
27 plaît. Je vous remercie.
28 C'est M. Vanderpuye qui vous posera des questions au nom du bureau du
Page 11396
1 Procureur.
2 Monsieur Vanderpuye.
3 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour.
4 Interrogatoire principal par M. Vanderpuye :
5 Q. [interprétation] Bonjour, Madame le Témoin.
6 R. Bonjour.
7 Q. Je vais tout de suite aller au vif du sujet. Vous avez déjà eu
8 l'occasion de déposer de nombreuses fois. Dans l'affaire contre Vujadin
9 Popovic le 5 février 2008; est-ce exact ?
10 R. Oui.
11 Q. Est-ce que vous avez eu l'occasion de revoir votre déposition avant de
12 venir aujourd'hui dans le prétoire ?
13 R. Oui.
14 Q. Vous avez donc relu votre témoignage. J'aimerais savoir si la
15 déposition reflète ce que vous diriez aujourd'hui si on vous posait les
16 mêmes questions ?
17 R. Oui, je confirme que j'apporterais aujourd'hui les mêmes réponses.
18 Q. Merci.
19 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le
20 versement au dossier de la déposition fournie par Mme Tabeau. Il s'agit de
21 la pièce 65 ter 6675, sous pli scellé, et 6676 correspond, je pense, à la
22 version publique.
23 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien. Les deux seront versées au
24 dossier, et l'une des deux sous pli scellé.
25 M. VANDERPUYE : [aucune interprétation]
26 M. LE JUGE FLUEGGE : [aucune interprétation]
27 M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce 6675 sera versée au dossier sous
28 la cote P2070, sous pli scellé. Le document 65 ter 6676 sera versé au
Page 11397
1 dossier sous la cote P2071. Merci.
2 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je vous remercie. Je demande aussi le
3 versement des documents associés.
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous faites référence aux neuf
5 documents qui constituent la liste qui a été dressée ? Je pense que le
6 mieux, pour gagner du temps, serait de faire cela par voie de
7 correspondance, de mémo interne, et le greffe attribuera les cotes à ces
8 documents.
9 M. VANDERPUYE : [interprétation] Oui, tout à fait, il s'agit des neuf
10 documents.
11 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Allez-y, je vous en prie.
12 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je souhaite donner lecture d'un résumé
13 bref.
14 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous en prie.
15 M. VANDERPUYE : [interprétation] Mme Tabeau est venue déposer dans
16 l'affaire le Procureur contre Vujadin Popovic le 5 février 2008.
17 Dr Tabeau a soutenu sa thèse de 3e cycle dans le domaine de la
18 démographique mathématique à l'Ecole d'Economie de Varsovie. Elle est
19 démographe. Elle a été employée par le TPIY au début de l'année 2000 et a
20 travaillé en tant que chef de projet pour le service démographique à partir
21 de ce moment-là, et elle s'est consacrée à l'étude des conséquences
22 démographiques du conflit dans l'ex-Yougoslavie, en particulier en Bosnie-
23 Herzégovine. Elle est l'auteur de nombre de rapports d'experts destinés à
24 être utilisés au cours des procès devant le Tribunal. Elle gère un système
25 d'informations sur les victimes du conflit, les personnes tuées, portées
26 disparues et déplacées.
27 En janvier 2008, le Dr Tabeau a rédigé un rapport intitulé : "Les personnes
28 portées disparues de Srebrenica : 2007, rapport de suivi sur
Page 11398
1 l'identification fondée sur l'ADN par l'ICMP", la Commission internationale
2 chargée des personnes portées disparues. Sur la base des données qui ont
3 été fournies par la commission montrant des correspondances établies par
4 l'ADN pour les victimes liées à Srebrenica, le rapport à été mis à jour le
5 16 novembre 2005 et une liste a été fournie sur les personnes mortes et
6 portées disparues de Srebrenica. En 2007, dans ce rapport, on a résumé les
7 statistiques pour les personnes identifiées et pour les correspondances
8 établies s'agissant des individus identifiés, liste fournie par la
9 commission internationale, comparée par rapport à la liste du bureau du
10 Procureur de novembre 2005. En plus, le rapport s'est penché sur la liste
11 unique de profils ADN fournie par la commission.
12 Pendant sa déposition, le Dr Tabeau a exposé la méthodologie utilisée pour
13 rédiger le rapport, telle qu'elle figure dans le rapport de novembre 2005,
14 et qui a toujours été appliquée par le service démographique. En
15 particulier, Dr Tabeau a expliqué la méthode qui était utilisée pour
16 évaluer la qualité de l'information sur laquelle se fonde le rapport et le
17 processus d'établissement de correspondance ou de couplage. Le processus
18 comprenait, entre autres, la vérification des noms, prénom et nom de
19 famille, nom du père, date de naissance, vérification des doublons.
20 Plusieurs autres critères également ont été utilisés pour les doublons dans
21 les données de la commission internationale, où on a pu constater certains
22 défauts au niveau des éléments d'information, en particulier pour ce qui
23 est des réassociations et des objets d'étude principaux, et par rapport aux
24 numéros de protocole. Ces discordances ont pu être clarifiées par la
25 commission, ce qui a pu produire des données fiables pour les besoins
26 d'analyse.
27 Sur la base de l'analyse des données de la commission internationale à
28 l'époque, le nombre d'objets principaux le 4 octobre 2007 était de 4 263,
Page 11399
1 qui représentaient des profils de l'ADN discrets. Il y avait 2 346 objets
2 réassociés, donc il y avait des correspondances secondaires de l'ADN,
3 correspondances par rapport à l'objet principal; 3 837 individus de la
4 liste du bureau du Procureur de novembre 2005 ont pu être mis en
5 correspondance avec la liste de la commission des individus identifiés par
6 la voie de l'ADN, ce qui correspond à peu près à 90 % des registres de la
7 commission internationale et 50 % de la liste du bureau du Procureur de
8 novembre 2005. Pour 10 % des entrées sur la liste de la commission, on a pu
9 constater que les correspondances n'étaient pas tout à fait certaines, soit
10 parce que les noms correspondaient à plusieurs noms, soit parce qu'il y
11 avait des problèmes au niveau des dates de naissance, soit dans les
12 registres du CICR ou des registres de la commission internationale. Enfin,
13 il y a eu des registres qui n'ont absolument pas pu trouver de
14 correspondance. Dr Tabeau a cependant constaté que même s'il n'y a jamais
15 eu une seule relation établie parmi les différentes listes de personnes
16 portées disparues, il y avait des chevauchements, des regroupements ou des
17 parties communes.
18 Elle a constaté que les critères qui ont été utilisés par Manning
19 n'ont pas pris en compte les fosses communes comportant des restes
20 mélangés, mais uniquement ceux qui étaient liés à Srebrenica. Ces sites
21 sont reconnus par le TPIY et reconnus comme tels. Cependant, la liste du
22 bureau du Procureur comprenait les restes des fosses mélangées et se fonde
23 sur les données de la commission internationale par rapport à la définition
24 des fosses additionnelles liées à Srebrenica.
25 Afin d'éliminer la possibilité de compter les survivants parmi les
26 personnes portées disparues et les morts, le rapport de novembre 2005
27 compare les données et les recoupe avec plusieurs listes, y compris le
28 recensement de la population, les registres d'électeurs de 1997, 1998,
Page 11400
1 2000, ainsi que le registre officiel des personnes déplacées sur le plan
2 interne et les réfugiés de 2000. Finalement, cela a été retenu dans le
3 rapport mis à jour en 2007. Les registres de l'ABiH n'ont pas été utilisés
4 pour le rapport de novembre 2005, et le rapport mis à jour 2007 comporte un
5 total de 7 661 personnes liées à Srebrenica étant considérées comme portées
6 disparues et mortes.
7 J'en ai terminé, Monsieur le Président.
8 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
9 M. VANDERPUYE : [interprétation] Est-ce que je peux avoir, s'il vous plaît,
10 maintenant la pièce 65 ter 7172; est-ce qu'on peut l'afficher dans le
11 prétoire électronique.
12 Q. Madame Tabeau, vous avez travaillé en tant que démographe mathématique.
13 Est-ce que vous pourriez nous préciser de quoi il s'agit plus précisément ?
14 Est-ce que vous vous servez de ces connaissances dans le cadre du travail
15 que vous faites aujourd'hui ?
16 R. Il s'agit d'une discipline de la démographie. Il faut savoir que la
17 démographie fait partie des sciences sociales. J'ai fait des études de
18 statistiques, j'ai un diplôme de 3e cycle en économie. Dans ma thèse de 3e
19 cycle, j'ai travaillé sur des modèles mathématiques dans l'étude des
20 questions démographiques, donc ma thèse de 3e cycle a été acceptée comme
21 faisant partie des études dans le domaine de la démographie mathématique.
22 Il s'agit d'un domaine quantitatif d'études démographiques.
23 Q. Très bien. Pouvez-vous, s'il vous plaît, nous préciser ce que nous
24 voyons à présent à l'écran ?
25 R. C'est la version abrégée de mon CV. Vous avez des informations sur mes
26 diplômes et mon expérience professionnelle. L'on voit que je suis
27 spécialiste dans le domaine des statistiques, dans des questions de
28 recensement de populations, l'étude des sources, dans des techniques de
Page 11401
1 modélisation et dans d'autres domaines des statistiques et de démographie.
2 Q. J'ai vu que vous avez travaillé pendant quelques temps pour l'Institut
3 interdisciplinaire néerlandais ?
4 R. Oui, pendant neuf ans à peu près. Jusqu'en 2000.
5 Q. Et que faisiez-vous pour cet institut ?
6 R. C'est l'Institut national démographique des Pays-Bas. J'y ai travaillé
7 comme chercheur pour étudier des problèmes de mortalité dans les pays de
8 l'Europe occidentale et de l'Europe centrale. Il s'agissait d'études
9 portant sur la prévisibilité des mortalités, et aussi d'espérance de vie.
10 Donc j'y ai travaillé pendant neuf ans avant de venir au Tribunal.
11 Q. Vous avez également travaillé pour le tribunal du Cambodge entre mai et
12 septembre de l'an 2009. Est-ce que vous pourriez nous en parler un peu plus
13 en détail ?
14 R. Oui. C'était un projet sur lequel j'ai travaillé pendant la deuxième
15 moitié de l'an 2009. J'ai été engagée par le juge d'instruction du tribunal
16 du Cambodge. J'ai fait un rapport qui devrait être utilisé dans le cadre
17 des affaires à venir devant ce tribunal.
18 Q. Nous voyons que vous êtes auteur de toute une série de publications,
19 nous le voyons dans votre CV.
20 R. La deuxième page fournit un certain nombre de titres de publications
21 dont je suis auteur. Il y en a bien plus dans la version exhaustive de mon
22 CV, mais vous avez ici les publications les plus récentes. Vous verrez,
23 page 3, plusieurs titres. Je suis auteur d'à peu près 40 rapports pour le
24 TPIY depuis dix ans. Bien sûr, je suis auteur de ce rapport pour le
25 tribunal du Cambodge. Je suis auteur aussi de publications qui ont été
26 publiées dans le "Journal de chercheurs en démographie européens".
27 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je me permets de vous interrompre une
28 seconde puisque la sténotypiste demande que vous ralentissiez, s'il vous
Page 11402
1 plaît. Vous employez parfois des termes qu'il est difficile de noter.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Excusez-moi. Donc je reprends.
3 Je suis auteur de plusieurs catégories de publications qui sont reprises
4 ici dans ce CV. Des rapports d'expert, les plus récents ont été faits pour
5 les affaires du TPIY. Ensuite, vous avez des monographies - c'est la
6 catégorie suivante - un livre qui a été publié par Springer sur la
7 démographie de la guerre, je suis éditrice de ce livre --
8 L'INTERPRÈTE : Avec deux autres auteurs.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] D'autres monographies, y compris un livre
10 récemment publié.
11 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ralentissez, s'il vous plaît. Vous
12 reprenez le même débit. Lorsque vous citez des noms propres et lorsque vous
13 citez des choses dans d'autres langues, il est difficile de les noter.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Donc c'est avec Helge Brunborg et Henrik
15 Urdal que j'ai publié ce livre édité par Springer. Le titre du livre est
16 "La démographie de la guerre".
17 Puis, j'ai publié un autre livre, un livre qui comporte une sélection
18 de rapports d'experts du TPIY. Ce livre a été publié par le comité Helsinki
19 de Serbie. Il a été publié à Belgrade, en serbe et en anglais. Puis, une
20 édition spéciale du "Journal des chercheurs en démographie européens", le
21 "Journal européen des populations", dont je suis co-auteur avec Helge
22 Brunborg, j'en suis l'éditrice. Puis, un rapport d'expert, un rapport
23 d'appréciation du "Livre bosnien des morts". Il s'agit de la plus grande
24 base de données sur les victimes de la guerre en Bosnie-Herzégovine
25 constituée par une ONG locale de Sarajevo. Mirsad Tokaca est à la tête de
26 cette ONG. Cette appréciation a été faite suite à une demande émanant de
27 l'ambassadeur de Norvège et M. Tokaca lui-même.
28 Puis, la dernière catégorie de cette sélection de mes publications
Page 11403
1 que l'on voit ici sont quelques articles, parfois quelques textes de
2 conférences que j'ai données. Comme tout cela est consigné au compte rendu
3 d'audience, je n'aurai pas besoin d'apporter plus de détail là-dessus.
4 M. VANDERPUYE : [interprétation]
5 Q. Je vous remercie. Je demande le versement de la pièce.
6 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Quel est le numéro de ce document à
7 présent ?
8 M. VANDERPUYE : [interprétation] 7172 de la liste 65 ter.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il sera versé au dossier.
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] 65 ter document 7172 deviendra la pièce
11 P2081.
12 M. VANDERPUYE : [interprétation] La traduction est en cours. Donc, pour
13 respecter les règles que nous appliquons généralement, il faudrait
14 attribuer une cote MFI à ce document en attendant la traduction.
15 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, très bien, nous allons attribuer
16 une cote MFI à cette pièce en attendant la traduction.
17 M. VANDERPUYE : [interprétation]
18 Q. Docteur Tabeau, vous avez rédigé toute une série de rapports d'expert
19 pour plusieurs procès devant ce Tribunal. Est-ce que vous êtes qualifiée en
20 tant qu'expert ici, est-ce que vous avez été acceptée en tant qu'expert
21 dans les différents procès ?
22 R. Oui. Et y compris dans le procès Popovic en 2008, mais dans d'autres
23 affaires, dans l'affaire contre Slobodan Milosevic, Vojislav Seselj. Dans
24 des affaires portant sur Sarajevo, les généraux Milosevic et Galic.
25 Récemment dans Stanisic et Simatovic, ainsi que dans l'affaire Stanisic et
26 Zupljanin. J'ai été expert dans une affaire consacrée à l'Herceg-Bosna,
27 Prlic et consorts. Donc, en tout, j'ai fourni 16 témoignages d'expert.
28 Q. Vous avez commencé à travailler pour le TPIY en l'an 2000, et vous êtes
Page 11404
1 devenue chef de projet du service démographique; est-ce exact ?
2 R. Oui.
3 Q. Est-ce que vous pouvez nous décrire vos responsabilités à ce poste.
4 R. Principalement, je devais fournir des rapports d'expert démographiques
5 pour les procès menés devant le TPIY. J'ai été citée en tant que témoin de
6 l'Accusation, donc je partais du point de vue de l'Accusation dans ces
7 rapports, mais plus généralement, on cherchait à représenter dans ces
8 rapports toutes les victimes, la cause des victimes. Je devais rassembler
9 les sources d'information, en particulier les sources statistiques
10 comportant les informations sur les conséquences des guerres dans l'ex-
11 Yougoslavie. Donc, en particulier les conséquences démographiques des
12 guerres. Et surtout en Bosnie-Herzégovine, ce qui a constitué notre
13 priorité numéro un. Donc il s'agissait de rassembler les sources, de mettre
14 sur pied un système d'informations qui serait mis à la disposition du
15 bureau du Procureur pour tous les besoins d'examens démographiques et pour
16 les autres besoins des procès.
17 Donc ce service a fonctionné comme un petit bureau des statistiques
18 au sein du bureau du Procureur, mais la mission principale était de fournir
19 des rapports démographiques, des rapports d'expert démographiques.
20 Q. Je voudrais que l'on situe dans son contexte le rapport du mois d'avril
21 2009.
22 M. VANDERPUYE : [interprétation] Il s'agit des pièces P1776 et P1777.
23 Q. Est-ce que l'on peut afficher tout d'abord la pièce P1776, s'il vous
24 plaît.
25 Je pense que vous savez de quoi il s'agit.
26 R. Oui.
27 Q. C'est le rapport de 2009 que je viens de mentionner ?
28 R. Oui, tout à fait.
Page 11405
1 Q. Est-ce que c'est le rapport le plus récent mis à jour au sujet de
2 Srebrenica portant sur les personnes portées disparues et mortes ?
3 R. Oui.
4 Q. Vous êtes un des auteurs de ce rapport; est-ce que vous pouvez
5 simplement, très brièvement, nous dire quel a été l'objectif de ce rapport
6 ? Je sais qu'il est difficile de résumer cela en quelques mots. Et puis, le
7 Dr Brunborg a déjà déposé à ce sujet.
8 R. Il s'agit des victimes de la chute de Srebrenica de juillet 1995. Le
9 rapport est conçu comme un rapport de contextualisation [phon] pour montrer
10 l'ampleur du nombre de victimes, premièrement par rapport aux personnes
11 portées disparues et liées à la chute de Srebrenica, et ensuite pour
12 montrer le nombre de victimes identifiées. C'est quelque chose qui est très
13 important dans ce rapport, parce que la liste est une liste de personnes
14 déplacées, et c'est tout. Mais la liste de personnes identifiées constitue
15 une autre catégorie. Il s'agit de la catégorie qui est liée à des
16 exhumations des restes humains des fosses communes et autres fosses sur le
17 territoire de Srebrenica et les municipalités voisines de Bosnie orientale.
18 S'agissant des personnes identifiées, nous avons disponibles les rapports
19 de couplage de l'ADN. Vous avez, en fait, les deux perspectives qui sont
20 réunies dans ce rapport; d'une part les personnes portées disparues et
21 d'autre part les personnes identifiées par la voie de l'ADN. Parce que nous
22 avons établi des correspondances entre ces deux catégories, donc une image
23 plus précise se dessine grâce à des chevauchements entre les deux, des
24 recoupements, et l'on voit comment les deux perspectives se corroborent
25 mutuellement.
26 Donc l'idée de ce rapport était de montrer la liste initiale de
27 personnes portées disparues élargie grâce aux derniers éléments
28 d'information que nous avons reçus par la voie de couplage sur la base de
Page 11406
1 l'ADN des victimes de Srebrenica.
2 Q. Très bien. Alors, je vais d'abord me focaliser sur la première partie
3 de l'étude, donc sur les personnes portées disparues, par opposition aux
4 personnes identifiées.
5 Une liste de personnes portées disparues a été dressée par le bureau
6 du Procureur. J'aimerais savoir sur quelles données de base s'est fondé le
7 bureau ?
8 R. Pour la liste de personnes portées disparues, nous nous sommes servi
9 des listes dressées par le CICR, le comité international de la Croix-Rouge,
10 dans ces différentes variantes. La dernière version utilisée dans le
11 rapport de 2009 est celle de 2008, si je me souviens bien, la liste de 2008
12 du CICR.
13 Ensuite, le deuxième type de listes, ce sont les listes dressées par
14 "Physician for Human Rights", une organisation américaine, mais le
15 pourcentage des données est relativement faible, le pourcentage de données
16 pris à cette organisation, puisqu'il s'agit surtout de la liste du CICR,
17 liste des personnes disparues de Bosnie-Herzégovine; ça a été une autre
18 source principale. Ça ne veut pas dire qu'on ne s'est pas servis d'autres
19 sources en complément. Je ne sais pas si vous voulez que j'élabore un petit
20 peu.
21 Q. Pendant qu'on en parle, je vais juste vous demander une chose.
22 Vous avez mentionné le fait que vous vous êtes servie de plusieurs
23 versions des listes du CICR, en particulier de la plus récente de 2008.
24 Alors, dites-nous pourquoi il s'agit de plusieurs éditions de ces listes ?
25 R. Le CICR ne s'est pas arrêté tout simplement à l'enregistrement des
26 personnes portées disparues. Tout de suite après la fin de la guerre, ils
27 ont poursuivi leur travail jusqu'à ce jour, donc les listes les plus
28 récentes que nous avons acquises du mois d'octobre 2008, ce sont les listes
Page 11407
1 les plus récentes et les meilleures listes que nous puissions avoir. C'est
2 la raison pour laquelle nous nous en sommes servis. De plus, ces listes de
3 2008, du mois d'octobre 2008, c'étaient des listes qui ont été dressées
4 strictement pour les victimes de Srebrenica, ce qui rend cette liste
5 différente des autres listes, s'agissant d'autres victimes sur l'ensemble
6 du territoire de Bosnie-Herzégovine.
7 Q. Vous vous êtes également basée sur le recensement pour dresser cette
8 liste, n'est-ce pas ?
9 R. Oui.
10 Q. Pourriez-vous nous dire quel était l'objectif, pourquoi vous êtes-vous
11 fondée sur le recensement ?
12 R. Vous savez, ce n'est pas une source pour nous aider à dresser la liste.
13 C'était simplement une source nous permettant de comparer les listes avec
14 les personnes qui sont portées disparues à Srebrenica, pour également
15 confirmer les registres, simplement pour confirmer qu'effectivement une
16 telle et telle personne avait vécu en Bosnie-Herzégovine lorsque le conflit
17 a éclaté, et simplement pour trouver des informations personnelles sur les
18 personnes. Le recensement est une riche source d'informations, ce qui nous
19 a permis de trouver l'appartenance ethnique des personnes. L'appartenance
20 ethnique d'une personne est importante dans ce cas-ci, mais
21 malheureusement, ceci n'était pas possible dans la liste des personnes
22 disparues du CICR; l'appartenance ethnique n'y était pas consignée.
23 Q. Très bien. Lorsque vous avez utilisé les registres de vote de 1997,
24 1998 et 2000, j'aimerais savoir si, premièrement, effectivement, vous vous
25 êtes également fondés sur ces listes-là ?
26 R. Oui, tout à fait. Nous nous sommes appuyés sur ces listes pour éliminer
27 les faux positifs dans les cas où, par exemple, on aurait un registre de
28 personnes portées disparues se retrouvant sur une liste de survivants.
Page 11408
1 Donc, lorsqu'il y a comparaison, ceci nous permettait de revoir l'inclusion
2 de certains cas de personnes portées disparues sur la liste des personnes
3 portées disparues de Srebrenica. Donc, en fait, le but était d'éliminer les
4 faux positifs.
5 Q. Pour ce qui est maintenant de la liste des enregistrements de vote,
6 est-ce que vous savez si ces listes étaient disponibles en 1997 [comme
7 interprété], immédiatement après la fin des hostilités ?
8 R. Je me souviens qu'il y a effectivement eu une élection en 1996, mais le
9 système statistique pour ces élections-là n'était pas exactement le même
10 que ce qui a été pour les élections plus tard en 1997, 1998 et 2000. Il y a
11 eu également certains problèmes qui découlaient des élections de 1996; des
12 cas de fraude ont très souvent été évoqués. Il n'y avait pas réellement
13 d'enregistrement de personnes étant allées aux urnes. Ceci a été fait de
14 façon tout à fait différente pour les élections ultérieures. Donc les
15 élections de 1996 n'auraient pas été une information fiable, et nous
16 n'avions pas non plus de listes pour 1996.
17 Q. Vous avez mentionné l'emploi d'une liste de personnes déplacées à
18 l'interne. Pourriez-vous nous dire, d'abord, de quoi il s'agit, de quelle
19 façon vous êtes-vous servie de cette liste ?
20 R. C'est encore une autre source de survivants de guerre, et cette liste
21 de personnes déplacées à l'interne, ainsi que de réfugiés, n'est rien
22 d'autre qu'un système d'enregistrement employé par le gouvernement de
23 Bosnie-Herzégovine et du HCR des Nations Unies. Il s'agit donc d'un système
24 qui était fonctionnel déjà pendant la guerre, mais après la guerre, le HCR
25 des Nations Unies a amélioré de façon importante l'enregistrement et il a
26 amélioré également son système électronique. Ceci a permis d'établir une
27 très vaste base de données de noms de réfugiés en Bosnie-Herzégovine et de
28 personnes déplacées à l'intérieur, et pour l'an 2000, cela nous était
Page 11409
1 maintenant disponible. Le nombre de cas enregistrés dans ce système était
2 presque de 600 000 personnes. Pour la plupart d'entre elles, il s'agissait
3 de personnes déplacées à l'interne, et nous étions en mesure de nous servir
4 de ces registres au sein du bureau du Procureur, mais également, nous nous
5 sommes fondés sur ces registres pour la rédaction du rapport de 2009
6 s'agissant des victimes de Srebrenica.
7 Q. Très bien. S'agissant maintenant de votre analyse de ce matériel, lors
8 de vos dépositions préalables, vous aviez mentionné, s'agissant du critère
9 de couplage, je me demandais si vous pouviez nous expliquer très brièvement
10 en quoi consiste ce processus. Commençons d'abord par les critères de
11 couplage, de combien de critères de couplage vous teniez compte pour vous
12 servir de ces données ?
13 R. Pour comprendre l'importance de la correspondance, il faut comprendre
14 que nous avons travaillé avec les registres individuels représentant des
15 personnes, donc un registre d'informations est un ensemble de données qui
16 décrivent une personne donnée.
17 Afin de pouvoir retracer le sort d'une personne en commençant par le
18 début de la guerre, tout au long de la guerre, et plus tard après la
19 guerre, il est absolument nécessaire de faire correspondre les sources les
20 unes avec les autres en employant les données individuelles qui ont été
21 enregistrées pour chacune des personnes individuelles.
22 Le couplage est également appelé lien de registre. Il y a également
23 un autre terme qui peut être utilisé, c'est la correspondance des sources.
24 Dans le cadre du travail de mon unité, chaque personne tuée, portée
25 disparue, chaque victime, personne détenue, personne déplacée; cette
26 personne est d'abord identifiée dans notre source de base, donc le
27 recensement de la population de 1991. A partir de là, nous pouvons vérifier
28 en nous servant du couplage pour voir comment et où la personne a été
Page 11410
1 enregistrée, dans quelle autre source.
2 Le couplage dans le domaine de la statistique est normalement fait,
3 si possible, en nous servant des caractéristiques numériques. Il s'agirait,
4 par exemple, de numéros d'enregistrement, de numéros d'identification
5 personnelle. Si on les retrouve dans les sources comparées et couplées, à
6 ce moment-là nous pouvons nous en servir pour les comparer avec le
7 recensement. Donc c'est la variante la plus simple de couplage, qui n'est
8 pas toujours disponible. Très souvent, dans plusieurs sources, et plus
9 particulièrement s'agissant des sources qui portent sur les victimes, de
10 tels numéros d'identification personnelle ne sont pas disponibles.
11 De sorte que le couplage doit être basé sur des critères différents,
12 principalement sur les critères descriptifs, tels, par exemple, les noms
13 des personnes, nom, prénom, nom du père; date de naissance; lieu de
14 naissance; lieu de résidence; et cetera, et cetera. Alors, le couplage
15 devient un processus complexe puisque les caractéristiques descriptives
16 sont des fois difficiles à comparer.
17 Si vous pensez aux problèmes qui peuvent être associés avec
18 l'enregistrement des personnes dans différentes sources, comme par exemple
19 la façon dont le nom est épelé, si les dates sont complètes, a-t-on bien
20 enregistré les noms de lieu; il s'agit de défis qu'il faut surmonter afin
21 de pouvoir procéder à un couplage efficace. Le couplage de caractéristiques
22 descriptives n'est pas inhabituel dans notre travail d'aujourd'hui.
23 S'agissant des bureaux statistiques comme le Bureau de recensement des
24 Etats-Unis d'Amérique, ce type de couplage est très régulier. Pourquoi ?
25 Parce que le numéro d'identification personnelle n'est souvent pas
26 enregistré dans différentes sources. Alors, le couplage doit être fait sur
27 la base de noms et d'autres caractéristiques personnelles.
28 Il existe plusieurs types de couplage; le couplage par machine, par
Page 11411
1 exemple, impliquant l'intelligence artificielle, mais il y a également
2 d'autres types de couplage. Une autre méthode pourrait être "the rule-based
3 method", à savoir que les décisions s'agissant de la déclaration d'un vrai
4 couplage doivent être faites par un être humain. C'est l'approche que nous
5 avons adoptée dans ce Tribunal. Nous ne nous fions pas au couplage
6 automatisé. Lorsqu'il est possible, nous nous appuyons sur le couplage
7 automatique pour d'autres cas, mais lorsque ceci n'est pas possible ou
8 lorsque les choses sont beaucoup trop risquées, nous employons l'approche
9 où un expert humain décide si une correspondance est vraie ou non vraie,
10 donc s'il s'agit d'une vraie correspondance ou d'une fausse correspondance.
11 Q. Madame, j'aimerais que l'on passe à la pièce 1776. Il nous faudra voir
12 la page 6 en anglais. J'espère qu'elle correspond au B/C/S.
13 Madame, j'aimerais savoir ce qui suit. Au point 2, au point 1, on
14 peut lire : "Les statistiques de base sur les personnes portées disparues
15 et sur l'identification de ces personnes", et que vous êtes arrivée au
16 chiffre de 7 663 personnes pour 2005, et pour "la liste du CICR de 2008",
17 un total de 7 692.
18 Alors pour ce qui est de la deuxième liste, 7 692 personnes, c'est le
19 total des personnes portées disparues qui figurent sur la liste du bureau
20 du Procureur; n'est-ce pas ?
21 R. Oui, c'est tout à fait juste. C'est notre première perspective, comme
22 je l'ai mentionné un peu plus tôt aujourd'hui. Le nombre de personnes
23 portées disparues portant sur la chute de Srebrenica, d'après les listes du
24 CICR de personnes portées disparues en Bosnie-Herzégovine.
25 Q. J'aimerais passer maintenant à la page 7, tableau 2 --
26 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Avant que vous ne passiez à un autre
27 document, le Juge Mindua souhaite poser une question.
28 M. LE JUGE MINDUA : Oui, Monsieur le Procureur, excusez-moi, avant d'aller
Page 11412
1 à la page suivante.
2 Madame Tabeau, sur cette page en anglais, je vois le tableau numéro 1
3 : "Nombre de personnes portées disparues ou manquantes à Srebrenica," et
4 les personnes identifiées à Srebrenica, de nouveau. Alors je vois qu'en
5 2005, selon la liste du bureau du Procureur, nous avons 7 663 personnes
6 portées disparues. Et en 2008, selon la liste du Comité international de la
7 Croix-Rouge; 29 personnes. C'est bien ça, j'ai bien compris ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge. Ce
9 tableau devrait être lu comme suit : ce deuxième chiffre de 29 personnes,
10 d'après la liste de 2008 du CICR, il ne s'agit que de personnes
11 supplémentaires qui n'ont pas été incluses dans la composante précédente.
12 Et la composante principale, dans ce tableau-ci, a été enregistrée sur la
13 liste du bureau du Procureur de 2005.
14 Alors ce tableau, en fait, porte non pas seulement sur le chiffre
15 total des personnes portées disparues, mais c'est également un rapport de
16 progrès. Donc en 2005, nous avions un chiffre de 7 663 personnes. Ceci est
17 basé sur notre travail précédent, donc nous étions arrivés à ce chiffre,
18 mais par la suite, nous avons analysé une nouvelle liste qui nous a été
19 fournie par la CICR. Il s'agit bien de la liste du mois d'octobre 2008, et
20 sur cette liste, nous avons identifié 29 personnes supplémentaires, mais
21 cette liste-là, la liste du mois d'octobre 2008, était beaucoup plus longue
22 pour Srebrenica que seulement les 29 personnes. Je crois que dans le
23 paragraphe qui suit le tableau, il y a, en fait, un texte qui dit que
24 s'agissant de la liste de 2008 du CICR, elle comporte au total 7 613 cas;
25 7 613 cas, c'est le rapport du CICR du mois d'octobre 2008, un rapport sur
26 les victimes de Srebrenica. Nous avons donc étudié et nous avons comparé
27 cette liste cas par cas, et nous l'avons comparée avec notre liste
28 précédente de 2005, et nous avons constaté, à la suite de cette analyse,
Page 11413
1 qu'il y avait 29 nouveaux cas. Nous ne les avions pas initialement.
2 Donc c'est ainsi qu'il faudrait lire ce tableau.
3 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Puis-je vous interrompre
4 quelques instants, juste avant que le Juge Mindua ne vous pose sa deuxième
5 question.
6 Vous avez dit, Madame, à la ligne 14 du compte rendu d'audience :
7 "Nous avons identifié 29 personnes supplémentaires, mais c'est la liste du
8 mois d'octobre 2008. C'est le numéro pour Srebrenica." Vous avez dit plus
9 que 28.
10 Vous avez dit 28, mais je pense que vous vouliez dire 29. Vous vous
11 êtes trompée, n'est-ce pas ?
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. Non, je me suis trompée. C'est 29
13 personnes.
14 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Très bien.
15 Le Juge Mindua souhaite poser une deuxième question.
16 M. LE JUGE MINDUA : Oui, maintenant je comprends mieux, Madame Tabeau,
17 parce que ça me paraissait quand même curieux qu'en 2005 dans la liste du
18 Procureur, il y ait plus de 7 000 personnes, et en 2008, même si c'est
19 trois ans plus tard, il y ait seulement 29 personnes sur la liste du Comité
20 international de la Croix-Rouge.
21 Mais maintenant je comprends mieux. Merci pour votre explication.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.
23 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye.
24 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
25 Q. Oui, justement, j'allais passer au tableau numéro 2, mais ce n'est
26 peut-être pas nécessaire, puisque maintenant vous nous avez expliqué de
27 quoi il s'agissait.
28 J'aimerais, toutefois, vous poser la question suivante. Vous aviez
Page 11414
1 dit qu'il y a une distinction importante à faire entre la liste du bureau
2 du Procureur et la liste des personnes portées disparues et les personnes
3 qui ont été identifiées par ADN. Donc j'aimerais savoir ceci : est-ce que
4 la liste du bureau du Procureur elle-même fait état des personnes qui ont
5 été identifiées par ADN ainsi que les personnes qui sont portées disparues
6 ?
7 R. Oui. En fait, oui. Justement, nous pouvons parler de plusieurs types de
8 listes du bureau du Procureur. La liste initiale est la liste du bureau du
9 Procureur sur les personnes portées disparues de Srebrenica, mais par la
10 suite nous avons également la liste de l'ICMP des personnes identifiées en
11 tant que source, et c'est la source dont nous nous sommes servi pour notre
12 liste du bureau du Procureur sur Srebrenica, la liste des personnes
13 identifiées.
14 Alors, la deuxième catégorie, c'est la liste du bureau du Procureur
15 portant sur les victimes de Srebrenica identifiées sur la base des listes
16 de l'ICMP.
17 Et par la suite, il y a un troisième type. C'est l'intégration des
18 deux éléments, donc la liste des personnes portées disparues de Srebrenica
19 du bureau du Procureur et la liste des personnes identifiées de Srebrenica.
20 Quand je parle de liste intégrée, je veux dire qu'il s'agit de deux listes
21 de personnes portées disparues et la liste des personnes identifiées qui
22 ont été recoupées cas par cas. Donc on a fait une correspondance entre les
23 deux, et après avoir comparé les deux une nouvelle liste a vu le jour, une
24 nouvelle liste contenant les informations des deux sources, le CICR est
25 l'ICMP. Donc c'est l'information des personnes portées disparues et les
26 personnes identifiées, et tout ceci, maintenant, est disponible dans un
27 seul document qui a été annexé au rapport de 2009.
28 Q. Très bien. Merci. Avant de parler de ceci, j'aimerais vous montrer le
Page 11415
1 tableau 4 dans votre rapport. Il se trouve à la page 8 en anglais. Très
2 bien. Nous l'avons à l'écran. Nous l'avons également en B/C/S.
3 En parlant du tableau numéro 4, il est intitulé : Personnes identifiées de
4 Srebrenica sur l'exhumation du site, novembre 2008, ICMP, mise à jour. On
5 voit une liste de sites d'enfouissement, et nous avons une colonne qui dit
6 identification ICMP et "correspondance OTP" dans l'autre colonne. Alors,
7 pourriez-vous nous expliquer très brièvement ce que ceci veut dire ?
8 Qu'est-ce que vous voulez dire par "correspondance du bureau du Procureur",
9 ou couplage ?
10 R. Dans ce tableau qui s'appelle "correspondance du bureau du Procureur",
11 ce sont des registres des personnes portées disparues sur la liste du
12 bureau du Procureur et ces personnes ont été confirmées comme étant des
13 personnes identifiées sur la liste de l'ICMP concernant les victimes
14 identifiées par ADN pour Srebrenica.
15 Donc la correspondance du bureau du Procureur est un chiffre qui porte sur
16 les personnes portées disparues, du chiffre dont nous avons parlé
17 aujourd'hui un peu plus tôt, ce que nous avons vu au tableau numéro 1 et
18 dans d'autres tableaux. Alors, ce chiffre est de 7 692 personnes. Parmi
19 eux, 5 061 personnes ont été confirmées comme ayant été identifiées sur la
20 base de l'ADN, et c'est sur la liste de l'ICMP.
21 Et tout ceci, bien sûr, a été obtenu à la suite des registres de l'ICMP.
22 Q. Lorsque vous dites que ces registres ont été confirmés par les données
23 de l'ICMP, cela a été fait quand ?
24 R. Ces données ont été obtenues par l'ICMP en novembre 2008. Cela fait
25 plusieurs années maintenant. La mise à jour la plus récente sur Srebrenica,
26 sur les personnes identifiées, a été faite en décembre 2010, et il y a
27 beaucoup plus d'identifications dans cette mise à jour. Nous pouvons en
28 retrouver 6 420, comparativement au chiffre de 5 557 [comme interprété]
Page 11416
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11 Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des
12 versions anglaise et française
13
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 11417
1 dans le tableau 4 de la liste du mois de novembre 2008.
2 Q. Permettez-moi maintenant de vous montrer la pièce P1777. Pourriez-vous
3 nous décrire ce que nous avons à l'écran, Madame Tabeau ?
4 R. Il s'agit ici de la page couverture de l'annexe annexée au rapport de
5 2009. Cette annexe représente la liste, la liste intégrée, des personnes
6 portées disparues de Srebrenica avec les personnes identifiées de
7 Srebrenica.
8 Q. Passons maintenant à la page 7 de ce rapport.
9 Bien. Alors, nous pouvons voir qu'il s'agit d'une liste des personnes
10 portées disparues de Srebrenica et les morts de Srebrenica, et donc c'est
11 une liste intégrée des deux catégories avec les identifications par ADN,
12 n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Analysons maintenant les colonnes. Nous avons donc les noms, nous avons
15 le sexe, la date de naissance, la date et l'endroit de la disparition --
16 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye, est-ce que vous
17 avez une objection à ce que cette liste soit diffusée au public ?
18 M. VANDERPUYE : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je ne pense
19 pas qu'elle soit confidentielle.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait certaine, puisque
21 les identifications de l'ICMP font partie de cette liste. Les noms de
22 personnes qui y figurent sont énumérés. Alors, pour être tout à fait
23 prudents, il vaudrait mieux ne pas la diffuser.
24 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, il est mieux de ne pas diffuser
25 cette liste avec ces noms.
26 M. VANDERPUYE : [aucune interprétation]
27 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
28 M. VANDERPUYE : [interprétation] Bien.
Page 11418
1 Q. Prenons la colonne de droite, à l'extrême droite. Nous pouvons voir que
2 c'est marqué date et lieu de disparition, statut, numéro d'enregistrement,
3 si je ne m'abuse, du CICR, protocole, ICMP entre parenthèses.
4 Sous la colonne statut, on peut voir que certaines personnes désignées sont
5 toujours portées disparues alors que d'autres ont été identifiées. Qu'est-
6 ce que ceci veut dire, s'il vous plaît, dans ce document ?
7 R. Je voudrais vous faire d'abord un commentaire. Les données sur cette
8 page nous proviennent partiellement d'abord de la liste de personnes
9 portées disparues du CICR et de la liste des identifications par ADN de
10 l'ICMP. Tous les points, y compris les noms et les numéros BAZ proviennent
11 des noms également de la liste du CICR des personnes portées disparues.
12 Et les deux dernières colonnes, protocole et site d'enfouissement,
13 proviennent de la liste de l'ICMP des identifications par l'ADN des
14 victimes de Srebrenica.
15 Nous donnons les résultats de l'intégration de ces deux sources en insérant
16 pour les cas confirmés dans les registres de l'ICMP l'information sur le
17 protocole et sur le nom du site.
18 Alors, le protocole et le nom du site d'enfouissement ne sont donnés que
19 pour les cas qui ont été confirmés sur la liste du CICR des personnes
20 portées disparues. C'est le couplage individuel, et voici à quoi ressemble
21 l'intégration.
22 Le statut est un point important. Je vous ai dit que ceci provient de la
23 liste des personnes portées disparues du CICR, en grande partie, mais pas
24 exclusivement. Pour les catégories se trouvant sous statut en tant que
25 "identified", donc "identifié", ces cas-là auront le statut d'identifié sur
26 la base de résultat fait à la suite de l'intégration. Toutes les autres
27 catégories, comme par exemple encore portées disparues, proviennent de la
28 liste du CICR. Ces personnes sont encore portées disparues. Vous verrez des
Page 11419
1 personnes qui sont appelées confirmées comme morts. Ce sont des cas fermés,
2 ce sont des cas confirmés, donc, de mort certaine. Et il y aura également
3 une autre catégorie, une catégorie de cas de personnes portées disparues
4 qui sont encore portées disparues, avec une information quant au lieu du
5 corps connu, et tout ceci nous provient du CICR.
6 Alors, pour chacun des cas que le CICR a enregistré comme étant des
7 personnes identifiées et confirmées dans les registres de l'ICMP, nous
8 prenons toujours le statut d'identification comme étant l'information la
9 plus essentielle que nous savons sur ces victimes.
10 L'identification par l'ADN est ce qui compte le plus -- c'est ce qui compte
11 le plus pour les personnes portées disparues.
12 Q. Je vous remercie.
13 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président, je suis juste sur
14 le point d'aborder un sujet tout à fait différent, et je pense que c'est le
15 moment de faire la pause de toute façon.
16 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] C'est tout à fait exact. Nous allons
17 faire notre pause et nous reprendrons à 13 heures.
18 --- L'audience est suspendue à 12 heures 33.
19 --- L'audience est reprise à 13 heures 03.
20 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Gajic, je vois que vous
21 souhaitez intervenir.
22 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai une question brève
23 à poser très rapidement. Je suppose que M. Smith va commencer sa déposition
24 lundi, et je dois dire que c'est l'un des témoins qui exigera de notre part
25 le plus d'attention, et je vous dirais qu'il y a encore un certain nombre
26 de documents qui n'ont pas été traduits en serbe, ce qui pour nous
27 correspond à une situation absolument cauchemardesque, parce que nous avons
28 des documents dont nous n'avons pas la traduction. Nous devons nous-même,
Page 11420
1 personnellement, traduire des passages de ce document.
2 J'aurais aimé savoir quand est-ce que ces documents seront mis à
3 notre disposition. Le bureau du Procureur nous a dit que dans deux ou trois
4 jours, ils allaient en mettre certains à notre disposition, mais j'aurais
5 aimé avoir une information peut-être un peu plus précise.
6 Alors, peut-être que les Juges de la Chambre pourraient intervenir
7 afin de faire en sorte que ces traductions soient faites beaucoup plus
8 rapidement. Je pense plus précisément à une douzaine de documents.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Vanderpuye, est-ce que vous
10 pourriez indiquer à la Chambre ce qu'il en est, je parle de la traduction
11 de ces documents ?
12 M. VANDERPUYE : [interprétation] J'avais cru comprendre que les demandes de
13 traduction avaient déjà été placées, et j'ai cru comprendre également qu'il
14 a été demandé que les traductions soient assurées le plus rapidement
15 possible. Dans la mesure du possible, est-ce que Me Gajic pourrait nous
16 dire quels sont les documents pour lesquels il préférerait recevoir de
17 façon prioritaire les traductions, nous pourrions donc nous enquérir et
18 demander quelle est la situation pour ces documents, ce qui pourrait peut-
19 être être utile. Mais sinon, je ne peux rien vous dire d'autre.
20 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Gajic, vous pourriez donner
21 une liste à la Chambre ainsi qu'au greffier, une liste de vos priorités.
22 Ainsi, vous nous direz quels sont d'après vous les documents les plus
23 urgents et nous essaierons de vous aider et d'aider les parties pour que
24 les traductions soient faites le plus rapidement possible.
25 M. GAJIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vais envoyer un
26 courriel à l'Accusation ainsi qu'aux Juges. Disons que je vous l'enverrai
27 un quart d'heure après la fin de l'audience d'aujourd'hui.
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
Page 11421
1 Monsieur Vanderpuye.
2 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
3 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Veuillez poursuivre.
4 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
5 J'étais sur le point d'aborder un autre sujet avec vous, Madame
6 Tabeau.
7 Vous avez indiqué dans votre rapport à l'annexe 3.8 -- un petit
8 moment, parce que je pense que nous allons pouvoir l'afficher. Il s'agit du
9 document P1776, page 61 pour la version anglaise.
10 En attendant que ce document ne soit affiché, vous avez identifié
11 dans le rapport un certain nombre de sources qui n'ont pas été utilisées,
12 et notamment, l'une de ces sources est, me semble-t-il, ce qui est appelé
13 la base de données pour la mortalité. Est-ce que vous pourriez nous dire le
14 plus succinctement possible pourquoi ces bases de données n'ont pas été
15 utilisées ? Je pense que c'est une information qui a son utilité.
16 R. Merci. Nous avons deux grandes bases de données, l'une qui a été
17 obtenue de la part des autorités statistiques de la Fédération de Bosnie-
18 Herzégovine, et la deuxième qui a été obtenue de la part des autorités
19 statistiques de la Republika Srpska. Ces deux bases de données sont très
20 volumineuses. Ces deux bases de données comprennent les dossiers relatifs à
21 140 000 personnes, et à chacune de ces personnes correspond un décès
22 pendant la guerre en Bosnie-Herzégovine, en 1991-1992 [comme interprété].
23 Ce sont des bases de données qui ont été compilées en fonction des
24 avis de décès fournis par la famille des décédés aux autorités
25 statistiques. En temps de paix, ce sont également ces données qui sont en
26 général compilées par les autorités statistiques. Il faut que les autorités
27 statistiques disposent d'un document, en règle générale il s'agit des
28 certificats de décès, et sur la base de ce document, le nom de la personne
Page 11422
1 décédée est inscrit dans le registre des personnes décédées.
2 Dans le cadre de notre projet, nous n'avions pas pour objectif de
3 dresser une liste absolument exhaustive des personnes qui étaient mortes
4 lors de la chute de Srebrenica en 1995. Nous nous sommes toujours
5 concentrés sur les personnes portées disparues, c'était cela, notre
6 objectif. Notre plan était par la suite d'établir le lien entre les
7 personnes portées disparues et les dossiers d'exhumation, et c'est une
8 approche que nous avons retenue parce que le bureau du Procureur et notre
9 équipe, nous sommes d'avis, en fait, que malheureusement et très
10 tristement, lorsqu'il y a une personne portée disparue, en règle générale,
11 le décès est confirmé par les fichiers d'exhumation.
12 Donc il s'agit d'un groupe spécial de victimes, et nous nous sommes
13 concentrés sur ce groupe dans le cadre de notre travail. Bien évidemment,
14 ce type de dossier relatif à des personnes portées disparues ne peut pas
15 être accepté par les autorités statistiques. Ils n'y ont pas accès pour
16 enregistrer les personnes dans leurs systèmes statistiques, parce que vous
17 avez le document qui confirme le décès, en général le certificat de décès,
18 qui n'est pas disponible, qui n'existe pas, lorsqu'il s'agit d'une personne
19 portée disparue. Ce genre de certificat n'existe pas. Le corps en général
20 n'est pas retrouvé, donc on ne peut pas enregistrer la personne dans ce
21 cas-là.
22 Il s'agit donc de sources très volumineuses que le bureau du
23 Procureur n'a pas utilisées, et puis il y a une autre source que nous
24 n'avons pas utilisée, c'est une source qui est également très volumineuse à
25 laquelle j'ai fait référence déjà aujourd'hui; c'est ce qu'on appelle le
26 "Livre bosnien des morts". Il s'agit de la liste la plus longue jamais
27 établie, liste que l'on a dans une base de données et qui porte sur les
28 victimes de la guerre en Bosnie-Herzégovine, dans tous les pays depuis le
Page 11423
1 mois d'avril 1992 jusqu'à la fin de l'année 1995. Nous appelons cette base
2 de données "BBD" pour reprendre les initiales en anglais. Pour le moment,
3 il contient quelque 100 000 cas, et nous pensons qu'il est quasiment
4 complet pour ce qui est des victimes de guerre.
5 Cette base de données a été compilée à Sarajevo par une ONG locale, une ONG
6 qui œuvre dans le domaine des droits de l'homme. On l'appelle, en fait, le
7 Centre de recherche et de documentation. C'est l'ONG qui est dirigée par
8 Mirsad Tokaca. La base de données, c'est tout simplement le résultat de
9 longues années de travail de cette ONG, qui a collecté les renseignements
10 relatifs aux décès, aux personnes portées disparues, et qui a établi, créé
11 et maintenu une base de données.
12 Ce n'est pas une base de données qui correspond aux normes et aux
13 critères statistiques, il s'agit tout simplement du travail effectué par
14 une ONG. Il y a un certain nombre de questions que l'on peut poser à propos
15 de ce travail, même, si en règle générale, la base de données est
16 considérée comme le résultat d'un travail extrêmement important et que
17 c'est un résultat extrêmement positif. L'une des grandes lacunes de cette
18 base de données, c'est que les fichiers sont constamment mis à jour
19 lorsqu'on ajoute de nouvelles entrées dans la base de données, mais lorsque
20 vous procédez à ce genre de travail, vous intégrez différentes sources dans
21 un seul fichier, ce qui fait que l'on ne peut plus retrouver la trace
22 originale, en quelque sorte, pour chaque élément. Ce que j'essaie de vous
23 dire, c'est que la base de données est devenue elle-même une source, et il
24 n'est pas toujours très facile et très simple d'établir le lien entre cette
25 base de données et les sources qui ont véritablement été utilisées.
26 Cela, à nos yeux, pose un problème, puisque lorsque nous présentons
27 une liste dans un tribunal, il faut toujours que nous définissions,
28 déterminions et justifiions nos sources, que nous les évaluions, que nous
Page 11424
1 éliminions toute partialité, il faut que l'on soit assuré qu'il y ait une
2 transparence absolument parfaite, une transparence à 100 % lorsque l'on
3 présente nos listes de victimes, et ce n'est pas véritablement possible
4 lorsqu'on travaille avec le BBD.
5 Q. Je vous remercie. Est-ce que l'on pourrait dire que les bases de
6 données sur la mortalité n'ont pas été utilisées parce que lorsque le décès
7 n'a pas été déterminé, on ne peut pas établir le lien avec le fait que la
8 personne a été ou non portée disparue ?
9 R. Je n'ai pas tout à fait compris votre question. Pourriez-vous me la
10 reposer sous une autre forme.
11 Q. Ce n'est pas grave. Nous allons passer à autre chose. S'agissant
12 maintenant de registres de l'ABiH, est-ce que vous avez utilisé leurs
13 données pour dresser votre liste, qui fait l'objet de votre rapport de 2009
14 ?
15 R. Les registres de l'armée ont été consultés pour dresser la liste de
16 2009, la liste de personnes portées disparues est identifiée. Mais lorsque
17 je dis que nous avons consulté cette source, cela ne veut pas dire que nous
18 avons puisé là-dedans, que cela était une source pour nous, que nous y
19 avons trouvé des données que nous avons reprises. Au fond, si nous l'avons
20 consultée, c'était plutôt pour y repérer des cas individuels que l'on
21 retrouve dans la liste du bureau du Procureur, pour savoir exactement si
22 telle ou telle personne figure dans la base de données de l'armée ou pas.
23 Q. 7252 de la liste 65 ter à présent, s'il vous plaît. 7252.
24 Est-ce que vous savez de quel document il s'agit ?
25 R. Oui. C'est un mémo interne que j'ai rédigé, je pense, à l'été 2008.
26 Q. De quoi il s'agit, brièvement, s'il vous plaît ?
27 R. Il s'agit de recoupement entre la liste de 2005 du bureau du Procureur,
28 donc du recoupement de cette liste avec la base de données de l'armée.
Page 11425
1 C'est dans le rapport de 2009 que je reprends cela. C'est une des
2 annexes, en fait, de ce rapport, c'est là que nous trouvons les résultats
3 de ce mémorandum. C'est à l'annexe 6.4, page 93. Au fond, vous y retrouvez
4 les mêmes résultats que dans ce mémorandum.
5 Q. Il s'agit de 220 dossiers de l'ABiH ?
6 R. Oui. Les 220 dossiers de l'ABiH qui concernent les personnes portées
7 disparues, avec la date de disparition ou la date du décès telle qu'elle
8 figure dans la base de données de l'armée.
9 C'est au 6.4.2 [comme interprété]. En fait, le début se situe page
10 97.
11 Q. Je pense qu'il y avait là une coquille et que nous avons dû remplacer
12 ce tableau.
13 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
14 M. VANDERPUYE : [interprétation]
15 Q. Je pense que c'est la pièce P1779.
16 R. Est-ce que je puis réagir ? Ce n'était pas une coquille. C'était que le
17 tableau n'était pas complet. Une seule page a été insérée dans le rapport
18 de 2009 et, en fait, le tableau est bien plus grand que cette seule page.
19 Q. Je pense que désormais il figure bien dans le rapport. Page 93, s'il
20 vous plaît, de la pièce P1776.
21 M. VANDERPUYE : [interprétation] Excusez-moi, il s'agit de la page 97.
22 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il ne faudrait pas diffuser le
23 document à l'extérieur.
24 M. VANDERPUYE : [interprétation] Très bien.
25 Q. Je pense qu'il s'affiche à l'écran. Est-ce que, dans le contexte du
26 mémorandum, vous pouvez nous expliquer ce tableau ? Donc le mémorandum
27 constituait la pièce 7252 sur la liste 65 ter.
28 R. [aucune interprétation]
Page 11426
1 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, Maître Gajic.
2 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avons pas la page
3 correspondante en serbe. Il faudrait que ce soit page 104 dans la version
4 serbe, si je ne me trompe pas.
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, tout à fait. Cela ne peut pas
6 être la bonne page.
7 La page s'affiche désormais.
8 Veuillez continuer.
9 Vous pouvez répondre, s'il vous plaît.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, merci.
11 Le mémorandum donne les résultats du recoupement avec la base de
12 données de l'armée. Donc il s'agit des soldats tombés et d'autres
13 personnels, militaires ou pas personnels [comme interprété], qui ont un
14 lien avec le ministère de la Défense de la Fédération de Bosnie-
15 Herzégovine. Donc il y a eu un regroupement de cette base de données de
16 l'armée avec la liste de 2005 du bureau du Procureur, la liste des
17 personnes portées disparues et identifiées.
18 Le résultat de ce recoupement a donné la chose suivante : un certain
19 nombre d'individus répertoriés par l'armée. A peu près 70 % ont été
20 retrouvés dans l'autre liste, donc 70 % des personnes portées disparues à
21 Srebrenica se retrouvent dans les dossiers de l'armée. Alors, ce tableau
22 que nous avons à l'écran à présent reprend un autre résultat de ce projet.
23 A savoir, nous avons comparé les dates de disparition du CICR qui
24 figuraient dans notre liste du bureau du Procureur à la date de disparition
25 ou la date de la mort que l'on retrouve dans la base de données de l'armée.
26 Et nous pouvons, par exemple, examiner le tableau. Là, on aura, par
27 exemple, entre parenthèses un certain nombre de noms. Ce sont des noms qui
28 proviennent du bureau du Procureur, donc tous ceux qui proviennent de la
Page 11427
1 liste des personnes portées disparues par le bureau du Procureur. En fait,
2 ce sont des données initialement obtenues du CICR.
3 Nous avons le nom de famille, le prénom, le nom du père, la date de
4 naissance, et avec indication bureau du Procureur entre parenthèses. Donc,
5 là, il s'agit de données qui viennent de la base de données du CICR.
6 Ensuite, nous avons les données de l'armée. Donc la date de
7 disparition ou du décès qui figure dans les registres militaires.
8 Les dates du CICR ne sont pas recopiées ici puisqu'elles
9 correspondent, bien sûr, à nos critères pour reprendre les dossiers. Donc,
10 chez les militaires, la présentation n'est pas toujours la même, moins
11 claire. Nous avons les trois derniers chiffres qui correspondent à la date
12 de naissance. Cela commence par 99, et puis nous avons 992, et donc 992,
13 cela signifiera 1992. Donc il manque un chiffre. C'est tout ce que je tiens
14 à dire.
15 Puis, pour le reste, c'est explicite. La première date est celle du
16 26 avril 1992. C'est la date de la disparition ou de la mort de l'individu
17 en question.
18 Puis, dans la suite du tableau, nous avons d'autres données. Nous
19 avons le résultat de nos efforts cherchant à préciser un manque de
20 correspondance ou de cohérence. Il faut savoir pour sûr s'il y a un
21 problème sur la date de disparition ou non, si nous pouvons garder la date
22 ou pas sur notre liste. Par exemple, prenons le premier registre, dans la
23 suite nous avons la correction des dates, premièrement le DOD est corrigé,
24 donc la date de la mort ou de la disparition est corrigée, puis ensuite
25 nous avons la correction de la date de naissance. Donc cela nous permet de
26 penser qu'il y a eu quelques corrections apportées aux dossiers militaires
27 initiaux, donc à la base de donnée initiale.
28 Nous avons vu qu'il y avait parfois des discordances et qu'il fallait
Page 11428
1 clarifier cela dans les documents reçus du ministère fédéral de la Défense.
2 Nous leur avons demandé de préciser des choses, et nous avons reçu une
3 réponse. Pour un certain nombre de cas, la date de la disparition et le
4 lieu de la disparition ont été corrigés. Et les corrections correspondaient
5 bien sûr aux éléments d'information communiqués par le CICR, ce qui
6 figurait dans notre liste de disparus. Nous avons le DOD, le POD de
7 corrigés. Donc c'est le résumé des corrections obtenues de la part des
8 autorités militaires de Bosnie-Herzégovine --
9 Q. Je veux vous poser une question par rapport à ce que vous venez de dire
10 au sujet de ce tableau 6.4.2, page 97 de la pièce P1776. Est-ce qu'on
11 retrouve cela expressément dans le mémorandum ? Donc votre mémorandum du 24
12 juillet 2008, pièce 7252 ?
13 R. Oui, tout à fait, c'est la même pièce.
14 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le
15 versement de ce document. Il s'agit de la pièce 65 ter 7252. Est-ce que
16 vous souhaitez qu'on le télécharge ?
17 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais nous l'avons déjà vu. Vous
18 demandez l'autorisation d'ajouter ce document sur votre liste 65 ter ?
19 M. VANDERPUYE : [aucune interprétation]
20 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je ne vois pas d'objection de la part
21 de la Défense.
22 M. GAJIC : [interprétation] Si je ne me trompes pas, il s'agit du CV de ce
23 témoin. Ah oui, je vois. Non, non, nous n'avons pas d'objection.
24 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je n'ai pas entendu l'interprétation.
25 Excusez-moi.
26 M. GAJIC : [interprétation] Nous n'allons pas soulever d'objection. Nous
27 acceptons le versement de ce document.
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
Page 11429
1 M. VANDERPUYE : [interprétation] Monsieur le Président --
2 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Donc nous vous accordons cela, et
3 nous allons verser le document.
4 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document 65 ter 7252 deviendra la
5 pièce P2082.
6 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je souhaite demander quelque chose au
7 témoin.
8 Nous avons maintenant à l'écran une liste que nous avions déjà eu
9 l'occasion de voir. Alors, est-ce que je peux vous demander votre opinion;
10 comment cela se fait que dans la colonne DOD du tableau militaire il y ait
11 des dates qui varient, à savoir 1992, 1993, 1994, qui ont été corrigées par
12 la suite ?
13 Pour quelle raison, d'après vous ? Vous avez eu l'occasion de manier
14 beaucoup de ces données. Pourquoi est-ce que les autorités militaires de
15 BiH modifieraient cette date de disparition ou de la mort avant 1995 ?
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Il faut noter que ce type de système est
17 dynamique. Donc il s'agit d'un système dynamique. Et la version que nous
18 avons de ces registres militaires a été faite à un certain moment donné,
19 mais il ne veut pas dire que tous les registres qui figurent dans cette
20 liste ont été mis à jour. Il est tout à fait possible qu'au cours de la
21 guerre certaines personnes ont été enregistrées comme étant des personnes
22 disparues en 1992, 1993, 1994, donc bien de temps avant la chute de
23 Srebrenica, n'est-ce pas. Et personne n'a jamais corrigé cette information.
24 Ceci arrive assez fréquemment d'ailleurs. Nous parlons de registres faits
25 en temps de guerre. Vous savez, c'est toujours des situations bien
26 particulières. Il y a plusieurs structures qui, en temps de paix,
27 fonctionnent tout à fait normalement, mais en temps de guerre, ne le font
28 pas.
Page 11430
1 Donc il ne s'agit pas réellement d'erreurs, je dirais, mais plutôt
2 d'omissions, de manquements de la mise à jour de l'information. Donc c'est
3 la raison pour laquelle nous pouvons voir de tels types d'incohérences.
4 Donc c'est la seule [comme interprété] source dans laquelle nous avons
5 rencontré ce type de problème. C'est peut-être l'explication la plus
6 directe de votre question.
7 Donc, en employant le statut de la date courante, les autorités donc
8 ont la possibilité de vérifier quelle est la date courante d'une personne
9 qui a été enregistrée comme étant portée disparue plus tôt, et donc il est
10 tout à fait possible qu'ils aient pu nous donner des corrections.
11 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
12 Monsieur Vanderpuye.
13 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le
14 Président. J'apprécie votre question. Maintenant, j'aimerais monter au
15 témoin la pièce 2770 de la pièce 65 ter.
16 Il n'y a pas de traduction, si je ne m'abuse.
17 Q. Mais pourriez-vous nous dire, Madame, afin que le général Tolimir
18 puisse comprendre de quoi il en est, qu'est-ce que c'est que ce document ?
19 R. C'est une demande d'aide qui provient de nous, qui a été envoyée en
20 juin 2004 au ministère de la Défense de la Fédération de Bosnie-
21 Herzégovine. Dans cette demande d'aide, nous leur demandons de nous donner
22 une information pour 142 personnes s'agissant de leurs causes de décès et
23 lieux de décès et de nous donner une confirmation supplémentaire pour ce
24 qui est de leur date de décès.
25 Je l'ai déjà mentionné un peu plus tôt aujourd'hui dans le contexte du
26 mémorandum dont nous avions parlé. Et nous l'avons maintenant à l'écran.
27 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je demanderais que cette pièce soit versée
28 au dossier, Monsieur le Président.
Page 11431
1 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, aux fins d'identification en
2 attendant la traduction du document.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Alors, il s'agit de la pièce 2770 du
4 document 65 ter. Cette pièce sera versée au dossier aux fins
5 d'identification en attendant la traduction et elle recevra la cote P2083.
6 M. VANDERPUYE : [interprétation] J'aimerais maintenant demander à
7 l'huissier de bien vouloir nous afficher la pièce 2771 de la liste 65 ter.
8 Q. Madame Tabeau, concernant cette demande d'assistance que vous avez
9 mentionnée il y a quelques instants, est-ce que vous savez si le bureau du
10 Procureur a pu envoyer au ministère de la Défense de Bosnie-Herzégovine de
11 changer ou de corriger les dates de disparition ou de décès ou de changer
12 le lieu de disparition ou de décès pour l'une quelconque de ces 141 [comme
13 interprété] personnes mentionnées dans la demande d'assistance ?
14 R. En réponse à la demande d'assistance, nous avons obtenu une correction
15 pour 127 personnes du chiffre demandé initialement de 141 [comme
16 interprété] personnes --
17 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'aimerais vous interrompre quelques
18 instants.
19 Y a-t-il une traduction en anglais ?
20 M. VANDERPUYE : [interprétation] Oui. La traduction se trouve à la page 2
21 du document.
22 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Alors, la traduction devrait
23 également être affichée à l'écran.
24 Je vous remercie.
25 Désolé de vous avoir interrompu. Veuillez poursuivre, je vous prie.
26 M. VANDERPUYE : [interprétation]
27 Q. Madame Tabeau, ma question était de savoir si une demande,
28 d'après vous, a été faite par le bureau du Procureur ou par quelqu'un
Page 11432
1 d'autre de demander aux autorités bosniennes ou au ministère de la Défense
2 bosnien pour changer ou corriger le lieu de naissance [comme interprété] ou
3 date de naissance [comme interprété] des 142 personnes qui figurent dans la
4 demande d'assistance ?
5 R. Nous n'avions pas demandé que ces derniers corrigent des
6 informations. Nous voulions simplement obtenir des informations concernant
7 certaines caractéristiques de cas que nous leur avons envoyés, des
8 caractéristiques comme par exemple le lieu de naissance [comme interprété]
9 et la date de naissance [comme interprété]. C'était donc là l'objectif de
10 notre demande. Pourquoi demanderions-nous de corriger des bases de données
11 ? Absolument pas.
12 Q. Est-ce que vous avez obtenu cette information à la suite de votre
13 demande d'assistance ?
14 R. Oui, nous avons reçu un certain nombre de registres ou de données, de
15 documents si vous voulez, mentionnant les dates de disparition correctes ou
16 les lieux de disparition corrects pour plusieurs cas. Ces informations nous
17 étaient donc utiles, et nous avons pu nous en servir pour soit réexaminer
18 les cas de personnes portées disparues de Srebrenica ou pas.
19 Q. Et à la suite de la réponse que vous avez obtenue, est-ce que vous avez
20 pu -- est-ce que cela vous a aidé ?
21 R. Oui, tout à fait. Justement c'était l'objectif. Et pour ce qui est de
22 127 cas, l'information obtenue du ministère fédéral de la Défense a pu
23 corroborer l'information que nous avions provenant du CICR concernant ces
24 personnes, ces cas.
25 Q. Fort bien.
26 M. VANDERPUYE : [interprétation] Je vous demanderais, Monsieur le
27 Président, que ce document soit également versé au dossier. Il s'agit de la
28 pièce 2771 de la liste 65 ter.
Page 11433
1 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, cette pièce sera versée au
2 dossier.
3 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur
4 les Juges, cette pièce portera la cote P2084.
5 M. VANDERPUYE : [interprétation]
6 Q. En dernier lieu, Madame Tabeau, j'aimerais vous poser une question --
7 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] M. Gajic s'est levé. Oui, Maître
8 Gajic.
9 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais vous
10 demander de me permettre de vous faire une petite mention. Ce même
11 document, la Défense s'en est servi lors du contre-interrogatoire du Témoin
12 M. Brunborg. Il s'agissait de la pièce 1D107 de la pièce 65 ter. Donc il
13 faudrait mentionner au compte rendu d'audience que ce document a déjà été
14 utilisé, on l'a déjà montré à un autre témoin dans cette affaire-ci, sauf
15 qu'il porte une autre cote.
16 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il est toujours fort utile d'avoir
17 toutes les cotes, effectivement, pour pouvoir établir les liens entre les
18 documents. Mais si je ne m'abuse, nous avions prorogé la décision quant au
19 versement au dossier de ce document, puisqu'on attendait une décision, en
20 fait.
21 Si je ne m'abuse, il a été simplement versé au dossier aux fins
22 d'identification, le document qui a été versé au dossier par le truchement
23 de M. Brunborg.
24 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avions pas
25 demandé à ce moment-là de faire verser le document au dossier puisque nous
26 voulions nous en servir par le truchement de ce témoin également. Ce
27 document a été utilisé de façon très limitée pour ce qui est de M.
28 Brunborg. Si vous vous souvenez, il s'agissait de certains documents liés à
Page 11434
1 certaines personnes, à savoir quel âge ces personnes avaient, si elles
2 étaient disparues sur leur chemin entre Srebrenica et Tuzla, dans la forêt,
3 et ainsi de suite.
4 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. C'est tout à fait
5 clair. Nous avons la pièce P2084 à l'écran. Bien.
6 Monsieur Vanderpuye, je vous écoute.
7 M. VANDERPUYE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
8 Q. Madame Tabeau, je voudrais vous demander de nous parler d'une
9 information qui vous a été fournie et qui provient d'un livre publié par
10 Milivoje Ivanisevic. Dans ce livre, on parle de 58 personnes -- il contient
11 58 noms de personnes qui ont été abordés par la Défense lors du témoignage
12 du Dr Brunborg. D'abord, savez-vous de quoi je parle ?
13 R. Oui.
14 Q. Et deuxièmement, avez-vous eu l'occasion d'examiner ces noms et de les
15 comparer avec la liste des personnes portées disparues du bureau du
16 Procureur ?
17 R. Oui, tout d'abord. Voici, ce sont mes observations préliminaires. Le
18 travail n'est pas tout à fait complété. Mais effectivement, j'ai recoupé
19 cette liste avec la liste du bureau du Procureur des personnes portées
20 disparues de Srebrenica de 2009, et la conclusion est donc la suivante : il
21 s'agit de registres qui correspondent tout à fait au registre des personnes
22 portées disparues. Il y a quelques incohérences. Je ne peux pas vous dire
23 que chaque donnée, chaque enregistrement peut correspondre à 100 %. Mais
24 j'ai également essayé de faire correspondre les 58 noms avec d'autres
25 sources, tel le recensement de 1991 par exemple. Mais ici, la situation est
26 plus complexe. Parce que pour les 58 noms, il y a beaucoup plus de
27 candidats dans le recensement que 58 noms. Cela ne veut pas dire que pour
28 chaque cas il n'y a qu'un cas dans le recensement. Donc il est possible
Page 11435
1 qu'une personne qui soit appelée, par exemple, Milivoje Ivanisevic, que
2 cette personne ne soit pas exactement la même personne que la personne qui
3 se trouve sur la liste des personnes portées disparues de Srebrenica.
4 Afin de pouvoir tirer des conclusions avec plus de certitude, il me faut
5 avoir plus d'informations supplémentaires pour ce qui est de l'individu,
6 par exemple, qui s'appelle Ivanisevic. Ensuite, je compare ceci avec le
7 recensement de la liste du CICR des personnes portées disparues, donc ceci
8 me donne un plus haut degré de certitude. Mais ce qui était intéressant,
9 c'est que lorsque j'ai essayé de faire correspondre les 58 noms avec les
10 deux bases de données de mortalité, la base de données RS et la base de
11 données FIS, base de mortalité - nous avons parlé de ces bases de données
12 un peu plus tôt aujourd'hui - donc en les comparant avec ces deux bases de
13 données et avec les déclarations des tribunaux qu'a employées Milivoje
14 Ivanisevic dans le livre, on s'est posés la question à savoir si ces
15 documents seraient acceptés en l'absence d'un certificat de décès par les
16 autorités statistiques. En fait, je pensais que j'allais pouvoir trouver
17 les 58 noms, plus particulièrement dans la base de données de la RS, de
18 mortalité, mais cela n'a pas été le cas. Je me suis donc posée la question
19 à savoir pourquoi pas et de quels types de déclarations de tribunaux
20 s'agit-il qu'a invoquées M. Ivanisevic.
21 Et d'autre part, il est très important également de noter que M. Ivanisevic
22 est une personne bien connue. C'est un militant connu qui travaille depuis
23 des années dans le domaine de la lutte pour prouver la souffrance du peuple
24 serbe au cours de la guerre en Bosnie-Herzégovine. C'est l'une des
25 personnes qui est associée à Radovan Karadzic et à sa Défense, mais je ne
26 pense pas qu'il s'agisse d'une source fiable à 100 % pour ce type de
27 travail. Il n'est pas statisticien. Il avait un emploi dans le domaine de
28 la planification culturelle, basé à Belgrade, en Serbie. Je ne crois donc
Page 11436
1 pas que sa source peut être fiable à 100 %.
2 Q. Docteur Tabeau, est-ce que vous étiez en mesure de découvrir si les 58
3 noms dont vous nous parlez, que vous avez examinés, est-ce que ces noms ont
4 été trouvés dans les fosses communes ou identifiés par les données par
5 l'ICMP ?
6 R. Oui, tout à fait, un très grand nombre de ces 58 personnes d'ailleurs.
7 Cinquante-deux de ces personnes ont été identifiées par l'ICMP, et pour les
8 52 cas, il y a également des correspondances par ADN, des rapports sont
9 également disponibles et des noms de sites sont également disponibles, et
10 ceci peut être communiqué à tout moment. Donc, effectivement, le chiffre
11 est assez important, 52 cas des 58.
12 Q. Je vous remercie.
13 M. VANDERPUYE : [interprétation] Cela met fin à mon interrogatoire
14 principal, Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Une petite précision.
16 Vous avez mentionné un nom, Ivanisevic, c'est ce que j'ai cru entendre
17 comme nom de famille. Ce nom a été enregistré de plusieurs façons
18 différentes : Ivanovic, Ivanisovic. Alors, pourriez-vous, je vous prie,
19 épeler son nom.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est Milivoje Ivanisevic. Alors, I-v-a-n-i-s-
21 e-v-i-c. Je répète, le prénom est Milivoje, M-i-l-i-v-o-j-e, et le nom de
22 famille est Ivanisevic. Je répète, I-v-a-n-i-s-e-v-i-c. "S" avec un accent
23 diacritique, e-v-i, "C" accent diacritique. Ivanisevic, c'est exact.
24 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Nous
25 devons maintenant lever l'audience -- oui, c'est cela, Ivanisevic.
26 Maintenant, cela apparaît à l'écran.
27 Maître Gajic.
28 M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, juste une dernière chose
Page 11437
1 à propos du sujet que j'ai mentionné au début.
2 J'aimerais vous donner la liste de quatre documents dont nous aimerions
3 bien avoir la traduction aussi rapidement que possible. Il s'agit des
4 numéros 65 ter suivants : 2152, 7225, 7227 et 7224.
5 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vérifiez le compte rendu d'audience
6 pour bien vous assurer que les cotes ont été bien consignées.
7 M. GAJIC : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président. Je
8 vérifiais pendant que je donnais ces cotes.
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je suis sûr que le greffier
10 transmettra votre demande au service de traduction.
11 Nous levons l'audience publique et nous reprendrons demain matin dans ce
12 même prétoire, demain matin à 9 heures.
13 --- L'audience est levée à 13 heures 50 et reprendra le jeudi 17 mars 2011,
14 à 9 heures 00.
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28