Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 4 avril 2011

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous dans ce

  6   prétoire. Bon retour. Pendant cette semaine nous entendrons le Témoin

  7   Nikolic, et je voudrais dire pour le compte rendu d'audience que son

  8   conseil est présente. Il s'agit de Me Virginia Lindsay. Bonjour et

  9   bienvenue au Tribunal.

 10   S'il n'y a pas de questions de procédure à aborder ? Je ne crois pas.

 11   Alors, faites entrer le témoin, s'il vous plaît.

 12   Monsieur Thayer, c'est à vous.

 13   M. THAYER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

 14   Monsieur les Juges. Je n'ai rien à dire. J'étais simplement debout.

 15   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Bienvenue dans le

 17   prétoire. Veuillez, je vous prie, donner lecture de la carte qui vous sera

 18   donnée sous peu.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour. Je déclare solennellement que je

 20   dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 21   LE TÉMOIN : MOMIR NIKOLIC [Assermenté]

 22   [Le témoin répond par l'interprète]

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bonjour. Veuillez vous asseoir et

 24   mettez-vous à l'aise.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Votre conseil, Mme Lindsay, est

 27   présente dans le prétoire, étant donné que vous êtes une personne en

 28   détention dans un autre pays et vous êtes maintenant transféré au Tribunal


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  1   pénal international. Je voudrais noter que nous allons maintenant commencer

  2   votre interrogatoire principal.

  3   Monsieur Thayer, c'est à vous.

  4   M. THAYER : [interprétation] Bonjour de nouveau à toutes et à tous.

  5   Bonjour, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges. Bonjour au

  6   conseil de la Défense et à la Défense.

  7   Interrogatoire principal par M. Thayer : 

  8   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

  9   R.  Bonjour.

 10   Q.  Pourriez-vous, je vous prie, décliner votre identité pour le compte

 11   rendu d'audience.

 12   R.  Je m'appelle Momir Nikolic.

 13   Q.  Monsieur, nous allons entrer dans les détails de votre carrière

 14   militaire sous peu, mais avant cela permettez-moi de vous demander si vous

 15   êtes d'accord pour dire que vous avez servi au sein de l'armée de la

 16   Republika Srpska en tant que chef du service du renseignement et de la

 17   sécurité dans la Brigade de Bratunac, et ce, à partir de la fin de 1992

 18   jusqu'à la fin de la guerre ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Pour accélérer les choses, en mai 2003 avez-vous plaidé coupable au

 21   chef numéro 5 de l'acte d'accusation pesant contre vous, à savoir

 22   persécution et crime contre l'humanité ?

 23   R.  Oui, j'ai déclaré ma culpabilité.

 24   Q.  Et dans cette affaire relative à Srebrenica, y a-t-il eu d'autres co-

 25   accusés nommés dans votre acte d'accusation, tels Vidoje Blagojevic,

 26   l'ancien commandant de la Brigade de Bratunac, Dragan Obrenovic, l'ancien

 27   chef de l'état-major commandant en second de la Brigade de Zvornik, ainsi

 28   que Dragan Jokic, l'ancien chef du génie de la Brigade de Zvornik ?


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  1   R.  Oui, tous les officiers de la Brigade de Bratunac et de Zvornik

  2   faisaient partie du groupe des personnes qui étaient sur le banc des

  3   accusés.

  4   Q.  Permettez-moi d'ajuster le rétroprojecteur, de l'abaisser puisqu'il me

  5   gêne.

  6   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] L'huissier va vous venir en aide.

  7   Très bien. Je vois que vous êtes doué techniquement. Parfait. Merci.

  8   M. THAYER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président.

  9   Q.  A la suite de votre plaidoirie de culpabilité, Monsieur, vous avez

 10   déposé pendant huit jours dans le procès Blagojevic en 2003, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, c'est tout à fait juste. J'ai déposé dans l'affaire Blagojevic.

 12   Q.  En 2009, vous avez témoigné pendant sept jours dans le cadre de

 13   l'affaire Popovic, et vous avez déposé pendant une journée dans l'affaire

 14   Perisic. Vous souvenez-vous de cela ?

 15   R.  Oui, je me souviens.

 16   Q.  Outre ces affaires devant ce Tribunal, vous souvenez-vous d'avoir

 17   également déposé pendant une journée dans chaque cas en l'espèce dans le

 18   procès dans ce qu'on a appelé le procès de Kravica, dans le procès de

 19   Milorad Trbic devant le tribunal de l'Etat de la Bosnie-Herzégovine ?

 20   R.  Oui. Devant le tribunal de Bosnie-Herzégovine, effectivement, j'ai

 21   déposé à deux reprises, et ce, dans deux procès distincts, les procès que

 22   vous avez mentionnés à l'instant.

 23   Q.  Très bien. Je ne vais pas révéler l'endroit où vous vous trouvez en ce

 24   moment, mais dans ces deux affaires-là vous avez déposé par le biais d'une

 25   visioconférence, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui, c'est tout à fait juste.

 27   Q.  Monsieur, actuellement vous purgez une peine de 20 ans

 28   d'emprisonnement, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Oui, tout à fait.

  2   Q.  Et en rapport avec votre plaidoyer de culpabilité, y a-t-il eu un

  3   accord sur le plaidoyer signé par vous ?

  4   R.  Oui, il y a eu un accord de plaidoyer, effectivement.

  5   Q.  Passons en revue rapidement l'accord de plaidoyer, et examinons

  6   certains passages. Mais nous n'allons pas passer en revue l'ensemble du

  7   document.

  8   M. THAYER : [interprétation] Je voudrais que l'on affiche pour ce faire la

  9   pièce 7291 de la liste 65 ter. Il serait utile de la montrer à deux

 10   reprises dans le prétoire électronique. Le document comporte également une

 11   traduction en B/C/S. Je vais présenter les deux pages à chaque fois.

 12   Q.  Nous aurons ces documents sous peu à l'écran.

 13   M. THAYER : [interprétation] Je voudrais que l'on puisse afficher la page

 14   40, s'il vous plaît, et 41. Voilà. Très bien.

 15   Q.  Monsieur, le document que nous avons sous les yeux en ce moment n'a pas

 16   été traduit, mais nous n'allons pas passer énormément de temps sur cette

 17   première partie. Ce que nous avons toutefois ici c'est la page de garde

 18   d'une requête conjointe pour un accord de plaidoyer modifié entre Momir

 19   Nikolic et le bureau du Procureur.

 20   M. THAYER : [interprétation] Passons à la page 42. Il nous faut passer à la

 21   page 49 en B/C/S.

 22   Q.  Je ne sais pas si vous pouvez lire ce qui est affiché à l'écran. Est-ce

 23   que vous voyez l'intitulé "annexe A", à la requête conjointe en vue

 24   d'examen d'un accord de plaidoyer entre Momir Nikolic et le bureau du

 25   Procureur ?

 26   R.  Oui, je vois. Ce n'est pas très clair, mais je vois ce qui y est écrit.

 27   Q.  Oui.

 28   M. THAYER : [aucune interprétation]


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  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pourriez-vous, je vous prie, élargir

  2   ou agrandir le passage.

  3   M. THAYER : [interprétation] Le deuxième paragraphe seulement, s'il vous

  4   plaît.

  5   Q.  De nouveau, nous pouvons voir que vous avez plaidé coupable au chef 5

  6   de la requête conjointe modifiée, à savoir persécutions.

  7   M. THAYER : [interprétation] Je voudrais que l'on passe à la page suivante,

  8   s'il vous plaît, pour chaque version. J'aimerais que l'on agrandisse le

  9   paragraphe 4, s'il vous plaît.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il faudrait également zoomer le

 11   B/C/S.

 12   M. THAYER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

 13   n'ai besoin que du quatrième paragraphe.

 14   Q.  Monsieur, voyez-vous au paragraphe 4 nous pouvons lire qu'il y a eu

 15   échange sur plaidoyer de culpabilité du chef numéro 5 et votre entière

 16   coopération avec le bureau du Procureur telle qu'énoncée aux paragraphes 9

 17   et 11, avec le bureau du Procureur au numéro 1, et on recommande que la

 18   Chambre de première instance impose une peine allant de 15 à 20 ans, et

 19   ensuite, au point 2, l'Accusation s'engage à éliminer les deux autres

 20   chefs. Est-ce que vous vous souvenez de ces deux dispositions, Monsieur ?

 21   R.  Oui, je vois.

 22   Q.  Très bien.

 23   M. THAYER : [interprétation] Peut-on passer maintenant à la page 45 dans le

 24   prétoire électronique. Il s'agira de la page 52 en B/C/S. Merci pour

 25   l'aide. Pourrait-on prendre le neuvième paragraphe, s'il vous plaît. Il

 26   faudrait montrer la partie du bas en B/C/S afin que le témoin puisse se

 27   concentrer sur cette partie-là.

 28   Q.  Sous l'intitulé "coopération de Momir Nikolic", pouvez-vous lire le


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  1   paragraphe numéro 9 ? Est-ce qu'il est suffisamment lisible ?

  2   R.  Oui, j'arrive à le lire, tout à fait.

  3   Q.  Vous souvenez-vous, Monsieur, que cette partie-ci de l'accord exige de

  4   vous de reconnaître les responsabilités pour vos actions et de donner une

  5   coopération véridique et complète s'agissant des procès devant ce Tribunal;

  6   vous souvenez-vous de cela ?

  7   R.  Oui, tout à fait.

  8   Q.  Et de nouveau, si nous prenons le paragraphe 11 --

  9   M. THAYER : [interprétation] Et il nous faudra passer à la page suivante,

 10   en B/C/S seulement.

 11   Q.  Voyez-vous au paragraphe 11 que d'après l'accord, il est indiqué que :

 12   "Il y a accord entre Momir Nikolic et l'Accusation, à savoir que

 13   toute l'information et tous les témoignages donnés par" vous "doivent être

 14   absolument véridiques. Ceci veut dire que Momir Nikolic ne peut ni

 15   minimiser ses propres agissements ni faire des déclarations inexactes

 16   concernant la participation d'autres personnes ou inventer l'implication

 17   d'autres personnes."

 18   Vous souvenez-vous de cela ?

 19   R.  Oui, tout à fait. Je vois ce texte et je me souviens très bien des

 20   parties extraites de cet accord qui portent sur ce point 11.

 21   M. THAYER : [interprétation] Le bureau du Procureur souhaite demander le

 22   versement au dossier de la pièce 7291 de la liste 65 ter.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Cette pièce sera versée au dossier.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, la pièce 7291 de

 25   la liste 65 ter sera versée au dossier sous la cote 2157. Je vous remercie.

 26   M. THAYER : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur, avant votre accord de plaidoyer et, en fait, avant de

 28   finaliser votre accort de plaidoyer avec le bureau du Procureur, est-ce que


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  1   vous avez dit avoir été présent sur le site d'exécution et d'avoir donné un

  2   ordre pour ceci ? Donc, en réalité, il s'agissait d'une déclaration fausse.

  3   Vous souvenez-vous d'avoir fait cette déclaration à l'Accusation dans le

  4   cadre des réunions qui ont eu lieu avec vous concernant votre décision de

  5   plaider coupable ou non coupable ?

  6   R.  Oui. Jusqu'à maintenant, j'ai confirmé à maintes reprises qu'à un

  7   certain moment donné, effectivement, j'ai dit une contrevérité concernant

  8   ma participation relative aux événements qui se sont déroulés à Kravica.

  9   Et, bien sûr, ce que j'ai dit à l'époque n'était pas vrai, c'était une

 10   contrevérité.

 11   Q.  Vous avez déposé à plusieurs reprises dans plusieurs procès, et

 12   j'imagine que vous avez parlé de cet incident devant d'autres tribunaux

 13   pour ce qui est de l'ensemble de votre déposition. Mais cette Chambre de

 14   première instance n'a pas encore entendu votre déposition, et vous êtes ici

 15   en tant que témoin viva voce. Donc j'aimerais vous demander de bien vouloir

 16   donner aux Juges de la Chambre un peu plus de détails, de leur donner une

 17   meilleure idée quant à ce qui s'est passé lorsque vous avez dit ce mensonge

 18   à l'Accusation pour lequel vous avez pris la responsabilité de cette

 19   exécution de masse dans laquelle vous n'avez pas pris part.

 20   R.  A chaque fois que j'ai déposé devant le bureau du Procureur et que j'ai

 21   déposé devant le Tribunal ici à La Haye, j'ai expliqué la situation

 22   concernant les événements qui se sont déroulés lorsque j'ai fait cette

 23   fausse déclaration concernant les événements qui se sont déroulés dans le

 24   cadre des événements de Kravica. Bien sûr, étant donné qu'il s'agit d'une

 25   nouvelle Chambre de première instance, je vais dire très brièvement ce qui

 26   s'est passé.

 27   Les négociations entre moi-même et le bureau du Procureur étaient

 28   dans une phase assez avancée. Et ce que j'avais à dire, lié à ma propre


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  1   participation ainsi qu'à la participation d'autrui ainsi que de ma propre

  2   unité, qui était de permanence à l'époque, j'ai dit à un moment donné que -

  3   - ou plutôt, le Procureur, à un moment donné, a insisté -- ou plutôt, on

  4   m'a demandé si j'ai pris part aux incidents de Kravica. J'ai eu peur. Pour

  5   être vraiment franc avec vous, j'ai eu peur. Je sais que je n'ai pas

  6   participé dans les événements relatifs à Kravica. Je sais que je n'ai même

  7   pas été sur place à ce moment-là.

  8   Mais dans toute cette confusion et étant donné que nos conversations

  9   étaient longues, à un certain moment donné, j'ai dit, un peu en guise de

 10   réaction ou révolte et un peu parce que je ne savais plus ce que je devais

 11   faire, j'ai dit ce que j'ai dit et j'ai pris les responsabilités. J'ai dit

 12   ce que j'ai dit, et immédiatement après avoir dit ce que j'ai dit, j'ai

 13   très bien compris ce que j'avais fait. Ensuite, je me suis entretenu avec

 14   mes conseils, mes avocats. Et dans le cadre de ces conversations, puisque

 15   mes avocats savaient très bien que je n'avais pas pris part du tout dans

 16   les événements en question, donc le lendemain, c'était une fête aux Pays-

 17   Bas - je crois que c'était le Jour de la Reine, si je ne m'abuse - et

 18   immédiatement après la fête, j'ai dit à mes avocats que je voulais

 19   présenter mes excuses au bureau du Procureur et que je voulais qu'ils leur

 20   disent -- que moi-même je leur dise que ce que j'ai dit était une

 21   contrevérité et que j'étais prêt à prendre toutes les responsabilités pour

 22   ce que j'ai dit parce que j'ai dit une contre-vérité.

 23   Il y a, bien sûr, d'autres détails, mais je ne voudrais pas prendre

 24   du temps de cette Chambre. Si vous voulez me poser des questions ou si vous

 25   voulez obtenir des précisions, je suis prêt à vous les donner, mais

 26   effectivement, il est vrai que j'ai dit une contrevérité concernant ma

 27   participation et concernant ce qui s'est passé à Kravica. Il est vrai

 28   également que j'ai présenté mes excuses au bureau du Procureur le


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  1   lendemain, et j'ai accepté comme conséquence de cette contrevérité, j'ai

  2   accepté une déclaration selon laquelle j'ai effectivement fait une fausse

  3   déclaration au moment où on m'a posé des questions, on m'a interrogé.

  4   Effectivement, c'est ce qui s'est passé.

  5   Q.  En réalité, Monsieur - il n'est pas nécessaire de placer le document

  6   dans le prétoire électronique - mais vous avez fait référence à une

  7   déclaration signée que vous avez faite concernant ce mensonge que vous avez

  8   dit. Est-ce que cela a été inclus dans votre accord de plaidoyer ? Est-ce

  9   que cela fait partie de la liasse des documents qui ont été versés aux

 10   Juges de la Chambre dans votre cas afin que les Juges puissent savoir

 11   exactement ce qui s'est passé ?

 12   R.  Oui. Cette déclaration que j'ai signée à ce moment-là est devenue

 13   partie intégrante de l'ensemble des documents destinés à la Chambre. Les

 14   Juges de la Chambre ont pu prendre connaissance exactement de ce qui

 15   s'était passé puisque cela figurait là par écrit.

 16   Q.  Vous comprenez, Monsieur, qu'il est d'importance cruciale pour que

 17   votre déclaration soit entièrement véridique, tout ce que vous aurez dit

 18   aux Juges de cette Chambre, donc ni de minimiser votre comportement ni

 19   d'exagérer le comportement de qui que ce soit  d'autre ? Vous comprenez

 20   toute l'importance de cela ?

 21   R.  Bien entendu que je comprends cela. Dans toutes mes déclarations

 22   précédentes, à chaque fois que j'ai témoigné, j'ai essayé d'être précis.

 23   Bien sûr, dans toute la mesure où mes capacités intellectuelles me le

 24   permettent et dans toute la mesure de ce que je sais. J'ai signé une

 25   déclaration et, par la suite, dans le cadre de tous mes contacts avec le

 26   bureau du Procureur dans le cadre de toutes mes dépositions devant les

 27   Chambres, j'ai toujours essayé de dire la vérité. D'ailleurs, je l'ai signé

 28   dans l'une des déclarations, à savoir qu'à aucun moment je ne souhaite


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  1   minimiser mes actes, ma participation aux crimes, mais que, de même, je ne

  2   souhaite pas non plus assumer la responsabilité pour d'autres et que je ne

  3   souhaite pas non plus assumer la partie de la responsabilité qui ne me

  4   revient pas compte tenu de mon grade et compte tenu du poste que j'occupais

  5   à ce moment-là. Bien entendu, dans la déposition qui est devant moi, je

  6   tâcherais de dire tout ce que je sais, tout ce que j'ai vu, tous les

  7   moments où j'ai pris part directement, mais aussi tout ce qui est relatif à

  8   mes collègues, tout ce qui concerne les officiers de mon unité ainsi que

  9   les officiers qui étaient membres d'autres commandements pour lesquels je

 10   sais où ils se sont trouvés et ce qu'ils ont fait.

 11   Q.  Monsieur, vous avez plaidé coupable; c'est exact ?

 12   R.  Oui, tout à fait.

 13   Q.  Vous avez accepté d'en assumer la responsabilité; est-ce exact ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Dans vos dépositions précédentes, avez-vous également fait part de

 16   votre remords de ce qui s'est passé à Srebrenica et de ce qui est arrivé à

 17   la population musulmane de Srebrenica ?

 18   R.  Oui. Lorsque j'ai témoigné devant les Juges de la Chambre, avant la

 19   déclaration de culpabilité, avant le prononcé de la peine, j'ai fait part

 20   de mes remords et je l'ai réitéré à chaque fois que j'ai eu l'occasion.

 21   Q.  Très bien, Monsieur, le moment s'y prête.

 22   R.  Très souvent, comme je viens de le dire, j'ai exprimé mes regrets suite

 23   aux événements de Srebrenica. Je ne peux pas dire que je le regrette. Je

 24   dois dire que c'est la souffrance qui est la mienne aujourd'hui. Après tout

 25   ce qui s'est produit, je présente encore une fois mes excuses à toutes les

 26   victimes. Et puisque j'étais enseignant à l'école, je saisis cette occasion

 27   encore une fois tout particulièrement pour présenter mes excuses à mes

 28   élèves, mes élèves qui ont péri dans ce crime.


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  1   Q.  Monsieur Nikolic, avant que vous ne plaidiez coupable, avant que vous

  2   n'acceptiez d'assumer la responsabilité de vos actes et avant que vous

  3   n'exprimiez votre remords, pour autant que vous le sachiez, y a-t-il un

  4   autre officier militaire serbe qui aurait fait cela avant vous ?

  5   R.  Non. Je pense que je suis le premier officier de l'armée de la

  6   Republika Srpska qui a tout simplement compris que ce crime atroce qui

  7   s'est produit à Srebrenica constitue un crime qui a eu lieu et auquel ont

  8   pris part les membres de mon armée. Lorsque je dis "de mon armée", je ne

  9   parle pas seulement de ma brigade. Et, bien entendu, je pense que lors de

 10   ce crime atroce, ce que j'ai fait moi-même, que ce faisant, j'ai contribué

 11   d'une certaine façon à ce que tout cela se produise, tout ce qui s'y est

 12   produit. Bien entendu, j'ai eu d'innombrables occasions de dire et de

 13   répéter que je n'ai pas joué un rôle-clé, que je n'ai absolument rien

 14   planifié, que je j'ai rien organisé et que je n'ai pas commandé d'unités,

 15   mais vu mon poste, j'ai exécuté des ordres qui ont contribué d'une manière

 16   assez considérable à l'issue que l'on connaît de cette opération.

 17   Je serais le plus heureux des hommes si cela n'avait jamais eu lieu

 18   et si je ne m'étais jamais trouvé là-bas, mais j'y ai été, j'y ai vu

 19   beaucoup de choses, et je suis parfaitement conscient du fait qu'un crime

 20   atroce s'est produit là-bas qui ne serait être justifié d'aucune manière.

 21   Et en ma qualité d'officier de l'armée de la Republika Srpska, j'ai décidé

 22   de plaider coupable, et c'est la vérité de mes sentiments, je me sens

 23   effectivement coupable et responsable de ce qui s'est produit là-bas.

 24   Q.  Monsieur, je voudrais que l'on se consacre pendant un petit moment

 25   maintenant un petit peu à votre parcours, donc vos diplômes, votre parcours

 26   militaire. Est-ce que vous pourriez en parler aux Juges de la Chambre ?

 27   Vous avez quel âge ?

 28   R.  Je suis né en 1955, donc j'ai 56 ans. Je vais sur la 57e. Je suis né


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  1   précisément en Bosnie orientale, à Bratunac. L'école élémentaire, l'école

  2   secondaire, je les ai faites à Bratunac. Puis j'ai fait l'école du génie

  3   civil à Bratunac, et je suis parti faire mon service militaire - du temps

  4   de l'ex-Yougoslavie, on faisait ce service militaire, tous - et je l'ai

  5   fait en Slovénie. A l'expiration de ce service, je me suis inscrit en

  6   sciences politiques pour faire des études de Défense populaire généralisée,

  7   et je suis sorti diplômé de cette faculté à Sarajevo.

  8   Ensuite, j'ai travaillé, je pense, pendant cinq années universitaires

  9   en tant qu'enseignant, puis en 1986-1987 j'ai commencé à travailler à

 10   l'état-major de la Défense territoriale, l'état-major municipal où je suis

 11   devenu l'adjoint du commandant de l'état-major municipal chargé du

 12   renseignement. Au début de la guerre, c'est le poste que j'occupais.

 13   Lorsque la guerre a éclaté, j'étais dans cet état-major de Défense

 14   territoriale. C'est vers la fin de l'année 1992 que la Brigade de Bratunac

 15   a vu le jour. Et après une interruption que j'ai eue à cause de l'attaque

 16   que j'ai subie par certaines unités paramilitaires de Bratunac, pendant

 17   cinq ou six mois je me suis trouvé en Serbie, pendant quelques temps

 18   hospitalisé. Par la suite, j'ai subi une convalescence et je suis revenu le

 19   19 novembre 1992 au sein de la Brigade de Bratunac. Je me suis présenté, et

 20   c'était peut-être dix jours plus tard que l'on m'a affecté au poste du chef

 21   de l'organe chargé de la sécurité et du renseignement au sein de la Brigade

 22   de Bratunac. Donc, c'est à partir de ce moment-là, en 1992, jusqu'à la fin

 23   de la guerre, que j'occupe ce poste au sein de la Brigade de Bratunac.

 24   C'était à un moment donné vers la fin de l'année 1996 que j'ai été affecté

 25   au Ministère chargé des personnes déplacées et des réfugiés, et j'y suis

 26   resté en tant que chef du service chargé des personnes déplacées. Par la

 27   suite, j'ai été chargé de coordination pour les différentes municipalités

 28   de la vallée de la Drina, donc en charge, de nouveau, des réfugiés et des


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  1   personnes déplacées. J'ai occupé ce poste pendant un an à peu près, et par

  2   la suite j'ai été nommé directeur d'une entreprise de commerce, et neuf

  3   mois plus tard, cette entreprise a été privatisée et à ce moment-là j'ai

  4   été nommé directeur d'une autre entreprise qui, elle aussi, a été

  5   privatisée à son tour, et après, je me suis retrouvé au chômage. Le 1er

  6   avril 2002, j'ai été arrêté et j'ai été transféré à La Haye le 2 avril

  7   2002.

  8   Q.  Est-ce que nous pourrions revoir juste quelques détails, s'il vous

  9   plaît. Vous avez été enseignant à Bratunac. Pouvez-vous préciser quelle est

 10   l'école où vous avez travaillé, et vous enseigniez quelle matière ?

 11   R.  Lorsque j'ai fait mes études, je les ai terminées, j'ai eu mon diplôme,

 12   je suis arrivé au centre d'enseignement secondaire qui s'appelle Djuro

 13   Pucar Stari, et c'est là que j'ai enseigné la défense et la protection

 14   civile. C'était une matière qui était obligatoire pour les élèves de la

 15   première et de la deuxième année du cycle secondaire. Donc, c'était une

 16   matière régulière à l'époque, et c'est ce que j'ai enseigné.

 17   Q.  Et au moment où vous avez été chef de la sécurité et du renseignement

 18   dans la Brigade de Bratunac, quel était votre grade, Monsieur ?

 19   R.  J'ai été capitaine pendant toute cette période où j'ai été affecté à la

 20   Brigade de Bratunac.

 21   Q.  Etiez-vous un officier d'active, je veux dire un militaire de carrière,

 22   ou étiez-vous un réserviste ?

 23   R.  J'étais un officier de réserve, un capitaine de réserve.

 24   Q.  Je voudrais que l'on s'intéresse maintenant de plus près à la Brigade

 25   de Bratunac. Je pense que vous l'avez mentionnée précédemment, mais

 26   j'aimerais savoir plus précisément quand on a mis sur pied la Brigade de

 27   Bratunac ?

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer, est-ce que vous


Page 12234

  1   pourriez éteindre le microphone de droite, parce qu'il se trouve trop près

  2   du clavier sur votre bureau. Merci.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Si mes souvenirs sont bons, en fait, j'ai déjà

  4   dit que cela s'est passé à la fin de l'année 1992. Je pense que la date

  5   exacte est celle du 14 novembre. C'est le jour de la création de la

  6   brigade. Je n'en suis pas à 100 % sûr, mais il me semble bien que c'est ça

  7   la date.

  8   M. THAYER : [interprétation]

  9   Q.  Et en juillet 1995, qui était le commandant de la Brigade de Bratunac ?

 10   R.  En juillet, son commandant était le colonel Vidoje Blagojevic.

 11   Q.  Et la brigade comportait combien de bataillons ?

 12   R.  Elle avait trois bataillons.

 13   Q.  Et au sein de la brigade, est-ce qu'il y a eu des bataillons

 14   indépendants en plus de ces trois ?

 15   R.  Je ne vois pas très précisément à quoi vous faites allusion, mais vous

 16   pensez peut-être à un bataillon qui faisait partie de la Brigade de

 17   Zvornik, alors ma réponse est oui. Mais si vous faites référence aux unités

 18   qui font partie de la brigade et qui sont d'autres unités, en fait, donc

 19   l'artillerie, les unités de logistique, de reconnaissance, la police, alors

 20   elles comportaient toutes les unités prévues par l'organigramme, donc cette

 21   brigade légère d'infanterie.

 22   Q.  Oui, tout à fait, c'est à cela que je pensais, Monsieur. Et vous avez

 23   mentionné un autre bataillon. Est-ce qu'il y a eu un autre bataillon qui

 24   avait un lien avec la Brigade de Bratunac en plus des trois bataillons que

 25   vous avez mentionnés ?

 26   R.  Dans la traduction, l'on me demande s'il y avait un lien, une attache

 27   avec un autre bataillon en plus. Pendant une période, on a en fait mobilisé

 28   un bataillon de plus. On pouvait dire que c'était un bataillon, le


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  1   bataillon appelé le bataillon de travail, et c'était sur ordre du

  2   commandant Blagojevic portant mobilisation qu'il a été mobilisé à un moment

  3   donné où il a été indispensable de mobiliser toutes les forces en présence

  4   pour l'opération de Srebrenica. Donc on l'a appelé le bataillon de travail.

  5   Il a été recomplété sur la base de tous les individus qui figuraient sur

  6   les listes de personnes que l'on pouvait affecter conformément aux

  7   principes d'obligation de travail. Mais si, en revanche, vous pensez au

  8   bataillon qui était à notre proximité, c'était le Bataillon indépendant de

  9   Skelani et qui, en fait, a été un prolongement du 3e Bataillon de Bratunac.

 10   Q.  Et qui a été le commandant de ce Bataillon de Skelani, Monsieur ?

 11   R.  Ecoutez, comme j'ai dit de par le passé dans toutes mes dépositions, je

 12   me souviens d'un commandant. Je pense que son nom de famille était

 13   Petrovic. Ce n'est pas le Petrovic de ma brigade, du 3e Bataillon. Il porte

 14   le même nom de famille, certes, mais la seule chose dont je me souviens

 15   bien, c'est qu'il était commandant. Il me semble qu'il a été le dernier

 16   commandant de ce bataillon, mais je n'en sais guère plus sur leur

 17   commandement, parce que très souvent il y a eu des changements, les hommes

 18   venaient, ils restaient très brièvement après avoir vu quelle est la

 19   situation sur place et repartaient très rapidement. Mais à ce moment-là, je

 20   pense que cela était le commandant Petrovic, que c'est lui qui a commandé

 21   le Bataillon de Skelani.

 22   Q.  Et le QG de la Brigade de Bratunac, où se trouvait-il ?

 23   R.  Le siège de la Brigade de Bratunac était situé à Bratunac même, peut-

 24   être à 500 mètres du centre-ville. C'était dans d'anciens locaux d'une

 25   entreprise appelée Kaolin Bratunac.

 26   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre quels sont les organes de

 27   l'état-major qui étaient présents dans ce QG ?

 28   R.  C'est un ensemble de bâtiments très importants. Donc dans les bureaux


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  1   et dans une partie des locaux, il y avait le commandant de la brigade puis

  2   le chef de l'état-major de la brigade; ensuite les assistants du

  3   commandant, donc l'assistant du commandant chargé de la logistique -- mais

  4   ce que je suis en train de vous dire maintenant, je dois dire que je ne

  5   suis pas certain si l'assistant du commandant chargé de la mobilisation

  6   était l'assistant du chef de l'état-major ou l'assistant du commandant,

  7   parce que je ne me souviens plus exactement de l'organigramme. L'assistant

  8   chargé du personnel, l'organisation, la mobilisation, l'assistant chargé du

  9   moral du culte et des questions juridiques, puis tous les services de

 10   logistique étaient aussi au commandement; le génie, la circulation, le

 11   service sanitaire, la logistique et le chef chargé de la sécurité et du

 12   renseignement. Donc mon bureau était là. Excusez-moi, il y avait aussi le

 13   commandement de l'état-major. En fait, c'est une petite unité qui, avec son

 14   chef, agit pour le besoin du commandement sur le plan du ravitaillement et

 15   se charge de tout ce qui est nécessaire.

 16   Mais à l'extérieur de ce bâtiment, il y avait des bâtiments préfabriqués

 17   mais qui faisaient partie de la même enceinte et cela appartenait également

 18   à l'entreprise Kaolin Bratunac. Il y avait là le siège de la police

 19   militaire avec son chef et tous les services attenants.

 20   Q.  D'accord. Nous allons avoir l'occasion de parler du peloton de la

 21   police militaire plus tard. Continuant maintenant de parler du QG, est-ce

 22   qu'il y avait un centre de transmission dans le QG de la brigade ?

 23   R.  Oui, bien entendu. C'est normal.

 24   Q.  Pouvez-vous décrire aux Juges de la Chambre, s'il vous plaît, de

 25   manière générale, comment fonctionnait ce centre de transmission ? Donc,

 26   comment passaient les contacts venus des commandements qui soient

 27   supérieurs ou subordonnés, comment est-ce que c'était reçu et traité par le

 28   centre de transmission ?


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  1   R.  Le centre de transmission était situé là où il y avait le siège de la

  2   brigade, tous les autres organes également, donc c'était les mêmes locaux

  3   de ce bâtiment. Le centre de transmission lui-même, il fonctionne de la

  4   manière suivante à peu près : tout ce qui sort, tout ce qui part du

  5   commandement de la brigade arrive au centre de transmission, où cela est

  6   chiffré, puis c'est relayé soit protégé soit pas protégé. Donc, tout ce qui

  7   concerne la situation dans la brigade, les informations et les activités

  8   qui se produisent au quotidien dans la brigade. Tout cela, en principe, est

  9   envoyé sous forme de rapport quotidien vers le commandement supérieur. Mon

 10   commandement supérieur -- ou plutôt, le commandement supérieur de la

 11   Brigade de Bratunac, c'était le commandant du Corps de la Drina. En

 12   principe, s'il y a du nouveau dans la brigade, et l'ensemble d'ailleurs des

 13   activités sont regroupés dans le rapport quotidien qui est envoyé tous les

 14   jours au commandement du corps. Alors, techniquement, comment est-ce que

 15   cela se passe ? Je pense, comme partout, vous avez des agents opérationnels

 16   dans le centre de transmission, quand vous leur apportez un texte ou une

 17   information que vous souhaitez qu'ils relayent, vous le leur remettez, ils

 18   le dactylographient, ils l'envoient, et généralement par la suite ils vous

 19   rendent par écrit le texte que vous aviez donné manuscrit initialement et

 20   ils vous donnent ce texte, une copie de ce qu'ils ont envoyé au

 21   commandement supérieur.

 22   Alors comment on procédait en pratique dans la Brigade de Bratunac.

 23   Le commandant de la Brigade de Bratunac, pour l'essentiel, faisait

 24   confiance à ses assistants, et à moins qu'il y ait un élément d'information

 25   exceptionnelle, il n'exigeait pas qu'à chaque fois avant d'envoyer un

 26   rapport, une information, qu'il en soit informé, c'est-à-dire qu'on lui

 27   présente pour information cela.

 28   Et je tiens à ajouter aussi que nous, en tant qu'assistants, une fois


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  1   que l'information a été envoyée, à chaque fois lorsque nous faisions

  2   rapport, nous informions notre commandant de nos activités dans le cadre de

  3   notre secteur et de ceux dont nous avions informé le commandement

  4   supérieur. Lorsque la communication se passe dans le sens inverse, c'est-à-

  5   dire lorsque nous recevons des ordres ou quelque document que ce soit qui

  6   nous est envoyé par le commandement supérieur, alors ceci arrive au centre

  7   de transmission. Tous les documents sont portés depuis le centre de

  8   transmission, donc tous les ordres et tous les documents qui arrivent. Ce

  9   n'est pas nécessairement par des moyens de communication orale; c'est par

 10   écrit, parfois par la poste.

 11   Donc tout ce qui arrive le jour même arrive sur le bureau du

 12   commandant de la brigade. En son absence, il est remplacé par le chef de

 13   l'état-major. Donc, que ce soit le commandant de la brigade ou le chef de

 14   l'état-major, il examine l'ensemble des ordres, l'ensemble des documents ou

 15   d'instructions arrivés, et relaye cela vers la personne concernée. Tous les

 16   assistants -- à titre d'exemple, moi, pendant un moment, j'avais pour code

 17   03; la logistique 04; l'organe opérationnel 06, et cetera. Le commandant

 18   examine tout ce qui est arrivé, tous les ordres, et il décide qui en est le

 19   destinataire. Il ramène cela dans le protocole, dans un bureau où travaille

 20   un individu qui enregistre tout cela dans un registre et qui distribue les

 21   documents en fonction du destinataire signifié par le commandant sur le

 22   document. Donc c'est, en principe, de cette manière-là que fonctionnait

 23   pendant que j'étais là le centre de transmission.

 24   Mais bien sûr, vous avez toujours des exceptions. Donc au centre de

 25   transmission aussi, il y a eu des situations exceptionnelles, mais dans la

 26   grande majorité des cas, dans la Brigade de Bratunac, c'est ainsi que cela

 27   a fonctionné, comme je viens de vous le décrire.

 28   Q.  Juste une question de suivi par rapport à ce que vous avez dit,


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  1   Monsieur. Vous avez parlé des transmissions qui quittaient la brigade.

  2   Certaines transmissions pouvaient être des transmissions ouvertes, d'autres

  3   pouvaient être des transmissions chiffrées, et c'est un agent qui

  4   travaillait au centre de transmission qui se chargeait de cela. Qu'en est-

  5   il des transmissions qui étaient reçues par le centre de transmission, par

  6   exemple au commandement supérieur, qui étaient chiffrées, que se passait-il

  7   dans ce cas-là ?

  8   R.  Tous les ordres qui parvenaient au centre de transmission étaient

  9   décodés et convertis en texte normal. Il y avait une personne en

 10   particulier qui s'occupait de cela. Moi je ne sais pas faire cela, je ne

 11   suis pas suffisamment polyvalent. Mais je sais que tout ordre émanant d'un

 12   commandement supérieur était converti en texte clair et lisible. Donc ce

 13   texte ne demeurait pas chiffré, ce qui permettait d'avoir une transmission

 14   très aisée. Je ne sais pas si c'est cela que vous aviez à l'esprit.

 15   Q.  Outre le centre de transmission, y avait-il une salle des opérations

 16   outre ce centre de transmission ou s'agissait-il d'une seule et même chose

 17   au sein de la brigade ?

 18   R.  Je crois que j'ai plus ou moins bien compris ce dont vous parlez. La

 19   brigade disposait de son centre de transmission, comme je viens de vous le

 20   dire. Par exemple, au sein de ma brigade, la Brigade de Bratunac, nous

 21   avions également un centre des opérations qui énumérait les opérations de

 22   chacun. Je parle maintenant uniquement de la Brigade de Bratunac. Dans

 23   notre centre des opérations, il n'y avait pas de système de transmission,

 24   pas de centre de transmission qui aurait permis à ceux qui envoyaient

 25   quelque chose depuis le commandement supérieur -- eh bien, ceci ne pouvait

 26   pas être envoyé au centre de transmission. Tout ce qui quittait le centre

 27   des opérations ne pouvait être fait qu'à partir d'un téléphone, car il y

 28   avait un téléphone brouillé et un téléphone qui n'était pas brouillé. Donc


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  1   cet élément d'information pouvait être transmis à partir du centre de

  2   transmission par téléphone, y compris des ordres qui auraient pu être

  3   transmis au centre par téléphone.

  4   Et pour ce qui est des ordres écrits, eh bien, ceux-ci étaient

  5   envoyés soit par la poste soit par le biais du système qui avait été conçu

  6   à cet effet.

  7   Q.  Je crois que nous allons entendre parler davantage du centre de

  8   transmission et du centre ou de la salle des opérations au cours de votre

  9   déposition. Vous avez évoqué des rapports quotidiens qui étaient remis par

 10   la brigade au Corps de la Drina. Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre

 11   si cela faisait partie des prérequis, quelque chose qui devait être fait

 12   chaque jour ?

 13   R.  Si vous voulez parler des rapports qui étaient envoyés par une brigade,

 14   dans ce cas vous avez raison. Ceci se faisait quotidiennement. Une brigade

 15   avait l'obligation, en vertu des ordres du corps, d'envoyer des rapports

 16   quotidiens au commandement. D'après ce que je sais, notre brigade s'est

 17   conformée à cela comme il se doit. Si vous me posez une question sur mon

 18   domaine, en vertu d'un accord qui existait entre moi et mes supérieurs

 19   hiérarchiques dans un cadre professionnel, nous nous étions engagés à

 20   transmettre les renseignements ou tout renseignement rassemblé par ma

 21   section une fois par jour, voire même davantage, car nous souhaitions

 22   informer le commandant du corps de toute modification éventuelle qui

 23   pouvait se produire et qui pouvait avoir une incidence sur l'état de

 24   préparation au combat de notre unité. Et si nous ne disposions pas de ces

 25   renseignements, bien évidemment, je n'avais pas l'obligation de rédiger un

 26   rapport quotidien. Je n'envoyais un tel rapport que si j'avais quelque

 27   chose de précis à dire et si ce renseignement était pertinent pour mon

 28   commandant supérieur.


Page 12241

  1   Comme je vous l'ai dit, nous envoyions quelquefois deux ou trois

  2   rapports d'information, et parfois nous n'envoyions rien du tout. Etant

  3   donné qu'il y a une mention en regard des questions de sécurité dans chaque

  4   rapport de combat, ce que je faisais habituellement, j'écrivais juste une

  5   phrase à cet effet et j'indiquais qu'eu égard au rapport précédent, il n'y

  6   avait pas eu de nouvelles évolutions. C'est ainsi que je remplissais mes

  7   obligations envers mon commandement supérieur.

  8   Q.  Et lorsque nous parlons des rapports de combat journaliers qui étaient

  9   envoyés au Corps de la Drina par le Brigade de Bratunac, qui signait ces

 10   rapports de combat quotidiens qui étaient envoyés au Corps de la Drina ?

 11   R.  Les rapports de combat réguliers devaient être signés par le commandant

 12   de la brigade. Cependant, le commandant de la brigade était quelquefois

 13   absent et, dans ce cas, c'est le chef d'état-major qui signait le rapport.

 14   Encore une fois, je parle de ma brigade et de la pratique qui était

 15   communément adoptée chez nous, à savoir l'officier de permanence ce jour-là

 16   devait -- évidemment, cela dépendait de la teneur des renseignements

 17   envoyés au commandement du corps, s'il s'agit de renseignements très

 18   importants, dans ce cas, nous faisions de notre mieux pour le transmettre

 19   au commandant ou au chef d'état-major. Cependant, s'il s'agissait de

 20   rapports de combat quotidiens qui ne contenaient aucun renseignement très

 21   important ou qui n'indiquaient aucun changement par rapport à la situation

 22   antérieure, dans ce cas, l'officier de permanence ajoutait simplement le

 23   terme "à l'attention de", signait le rapport au nom du commandant de la

 24   brigade et l'envoyait au centre de transmission pour que ce rapport soit

 25   tapé et pour qu'il soit ensuite transmis au commandement supérieur.

 26   Q.  Simplement pour que tout ceci soit clair; dans votre langue, c'est "za"

 27   pour dire "à l'attention de", dont nous avons tellement entendu parler dans

 28   ce procès ?


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  1   R.  Oui, vous avez raison.

  2   Q.  Vous avez parlé dans vos deux dernières réponses du fait que vous

  3   deviez faire les rapports qui devaient être transmis le long de la chaîne

  4   de commandement, donc vous envoyiez ces rapports à votre commandant de la

  5   Brigade de Bratunac et vous aviez l'obligation de faire des rapports à vos

  6   officiers supérieurs chargés de la sécurité et du renseignement. En juillet

  7   1995, est-ce que la Brigade de Bratunac était une brigade d'infanterie ou

  8   était-ce une brigade d'infanterie légère ?

  9   R.  En juillet 1995, c'était une brigade d'infanterie légère.

 10   Q.  Et ceci avait-il une quelconque incidence sur votre poste, par

 11   opposition à une brigade d'infanterie ?

 12   R.  Une brigade d'infanterie légère avait intégré les notions sécurité et

 13   renseignement en une seule et même fonction. J'ai le devoir de vous dire

 14   que je sais qu'au mois d'avril ou au mois de mai - je ne me souviens plus

 15   exactement - ces deux fonctions étaient devenues distinctes. Et à Bratunac,

 16   nous avions une situation un petit peu particulière. Celui qui devait être

 17   nommé chef était d'abord sur le terrain à Trnovo, et ensuite il a suivi une

 18   formation. Donc, au cours de cette année 1995, ces fonctions étaient des

 19   fonctions distinctes au sein de la Brigade de Bratunac. Nonobstant cela,

 20   rien n'a été modifié en 1995, parce que j'étais chef de la sécurité et du

 21   renseignement au sein de la Brigade de Bratunac. Par la suite, lorsqu'un

 22   autre officier est venu et a assumé ces fonctions, cette question n'était

 23   plus pertinente à mes yeux.

 24   Q.  Vous souvenez-vous environ à quel moment cet autre officier est venu et

 25   qu'il a pris ces fonctions ? Si vous pouvez me donner un mois et une année,

 26   ce serait parfait. Merci.

 27   R.  Oui, 1995, mais il était à Trnovo pendant l'opération à Srebrenica.

 28   Donc je ne peux pas vous donner davantage de détails. Je ne me souviens pas


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  1   de son nom non plus.

  2   Q.  Disons pour la période qui va du mois de juillet 1995 et les mois qui

  3   ont précédé le mois de juillet 1995, qui avait les fonctions et les

  4   obligations qui incombent à un chef du renseignement et de la sécurité au

  5   jour le jour ?

  6   R.  Avant le mois de juillet et après le mois de juillet, à savoir avant,

  7   pendant et après l'opération, et ce, jusqu'à mon départ de la brigade,

  8   c'est moi qui assumais les fonctions de chef chargé du renseignement et de

  9   la sécurité au sein de la Brigade de Bratunac.

 10   Q.  Pouvez-vous expliquer aux Juges de la Chambre quelles étaient vos

 11   responsabilités et vos obligations, votre mission, en tant que chef du

 12   renseignement au sein de la brigade ?

 13   R.  Je vais essayer de vous expliquer ceci en quelques phrases, parce que,

 14   pour l'essentiel, mes responsabilités sont définies dans les règles de

 15   service qui portent sur les questions relatives au renseignement et à la

 16   sécurité et aux travaux des organes chargés de cela. En général, ces règles

 17   décrivaient ou définissaient mes droits et mes obligations en assumant ces

 18   fonctions. Donc, en deux phrases, voire trois. Pour ce qui était de mes

 19   responsabilités, le renseignement, en tout cas c'est ainsi que je le

 20   comprenais, le renseignement était l'élément le plus important, et je

 21   devais m'occuper de cela en priorité. De 80 à 85 % de toutes les activités

 22   menées par la brigade avaient trait au renseignement, et le reste, à savoir

 23   le 15 %, portait sur des activités liées au commandement et au personnel ou

 24   état-major de ma brigade.

 25   Donc, moi je n'ai pas été impliqué dans la sécurité. Je n'étais pas

 26   habilité à le faire, je n'étais pas un officier chargé de la sécurité. Je

 27   n'avais pas de carte d'identité à cet effet et je n'avais pas les pouvoirs

 28   qui découlaient de cette fonction-là non plus. Je me concentrais


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  1   essentiellement sur le renseignement, ce qui signifiait que je devais

  2   rassembler les renseignements sur l'ennemi, sur leurs activités, leurs

  3   intentions, leurs mouvements, et tout autre élément qui pouvait avoir une

  4   incidence forte, non pas sur la préparation au combat, mais sur la sécurité

  5   de mon unité et des troupes qui faisaient partie de mon unité.

  6   Donc, pour ce qui est de la question de la sécurité, cette sécurité

  7   portait surtout sur la protection de sa propre unité, la protection des

  8   armes, la protection des troupes, et il fallait protéger les hommes et le

  9   matériel d'incursion des groupes de sabotage ou de terroristes et les

 10   protéger des incursions opérées à l'arrière du territoire contrôlé par ma

 11   brigade. C'est ce que je faisais pour l'essentiel. Pour ce qui est de mes

 12   autres tâches qui relevaient d'un organe chargé de la sécurité; par exemple

 13   quelqu'un qui travaillait dans une brigade d'infanterie, sont des tâches

 14   qui sont tout à fait différentes des tâches qui étaient les miennes. C'est

 15   peut-être la raison pour laquelle je me suis comporté de la sorte. Peut-

 16   être que je n'avais pas bien compris tout cela, mais personne ne s'y est

 17   opposé parce que c'est ainsi que je percevais cette fonction.

 18   Q.  Vous avez parlé du fait que vous n'étiez pas habilité à vous occuper

 19   des questions de sécurité, que vous n'étiez pas un officier chargé de la

 20   sécurité. Qu'entendiez-vous par là ?

 21   R.  Voici ce que je voulais dire, d'après ce que je sais, bien évidemment,

 22   un officier chargé de la sécurité avait une obligation au sein de la

 23   hiérarchie, et c'étaient les organes chargés de la sécurité qui

 24   l'autorisaient ou l'habilitaient à le faire. Cela s'accompagnait de papiers

 25   d'identité. C'est ainsi que cela s'appelle dans mon pays. Bien sûr, nous

 26   avons eu l'occasion de voir ces cartes d'identité qui définissaient le

 27   devoir d'un officier de la sécurité d'après les règles de service. Par

 28   exemple, il était habilité à procéder à des arrestations, à faire des


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  1   perquisitions. Et, comme je l'ai dit, moi je n'ai jamais accompli ce genre

  2   de choses parce que je n'étais pas habilité à le faire, parce que je ne

  3   disposais pas de cette carte d'identité officielle qui m'aurait autorisé à

  4   participer à des opérations sécuritaires de ce genre. Dans notre brigade,

  5   pour que nous puissions gérer ces types de problèmes, nous avions à notre

  6   disposition une autre solution, et cette solution consistait à engager un

  7   professionnel, un avocat qui, lui, abordait toutes les questions juridiques

  8   qui se posaient, par exemple les rapports au pénal et le dépôt de rapports

  9   au pénal, et c'est ce qu'il faisait.

 10   Q.  Et comment s'appelait-il, Monsieur ?

 11   R.  Il s'appelait Zlatan Celanovic et il travaillait pour l'organe chargé

 12   des questions de culte et d'orientation morale, mais c'était surtout par la

 13   forme, parce qu'en fait, il travaillait au sein du groupe de la police

 14   militaire, et son autorité découlait de l'autorité qui lui avait été

 15   transmise par le commandant de la brigade. Il n'a pas seulement sévi sous

 16   le régime de Blagojevic, mais il a continué à sévir par la suite, lorsque

 17   Slavko Ognjenovic est devenu commandant, voire même peut-être avant. De

 18   toute façon, il a participé à ce genre de choses jusqu'à sa démobilisation.

 19   Q.  Donc vous avez évoqué, si j'ai bien fait mes calculs, qu'environ 15 %

 20   de votre temps était consacré aux questions de sécurité, et vous avez parlé

 21   de la sécurité de votre unité. Qu'entendiez-vous par là ? Qu'est-ce que

 22   cela signifie en termes de vos devoirs et responsabilités en tant que chef

 23   de la sécurité ?

 24   R.  Il y a quelques instants je vous ai dit qu'il s'agissait de questions

 25   de sécurité liées au commandement et à l'état-major. Ce qui signifie qu'il

 26   fallait s'occuper de la sécurité du commandement de la brigade, fournir la

 27   sécurité, empêcher que des informations secrètes ne soient divulguées ou

 28   qu'il y ait des fuites au niveau du centre de transmission et autres


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  1   activités qui pouvaient avoir un effet sur le commandement et l'état-major

  2   de la brigade et la sécurité, en tout cas pour ce qui est de la brigade

  3   dans laquelle je me trouvais.

  4   Si vous me le permettez, je vais ajouter ce que j'ai dit dans mes

  5   dépositions antérieures, je ne suis pas du tout un expert en matière de

  6   sécurité. Je m'occupais surtout de la protection de la brigade et de ses

  7   unités. C'était ma tâche essentielle. J'ai pris des mesures qui pouvaient

  8   empêcher l'unité de se trouver dans une situation dangereuse et faire en

  9   sorte qu'il n'y ait pas de problèmes au niveau des armes et du matériel.

 10   Tout ceci avait trait évidemment à l'unité et le secteur dans lequel nous

 11   étions déployés. Ceci constituait l'essentiel de ma tâche.

 12   Q.  Et où le contre-renseignement trouvait-il sa place ?

 13   R.  Cela relevait de mon secteur, comme cela est le cas d'habitude.

 14   Certaines mesures devaient être prises, bien sûr, mais contrairement à moi,

 15   les personnes qui ont reçu une formation dans ce domaine sont mieux à même

 16   d'en parler que moi.

 17   Q.  Et d'après votre expérience, qu'est le contre-renseignement, et avez-

 18   vous jamais eu à traiter des incidents que vous qualifieriez de contre-

 19   renseignement ?

 20   R.  Je me souviens vraiment d'aucune action en particulier à laquelle

 21   j'aurais participé qui pourrait être qualifiée de contre-renseignement.

 22   Honnêtement, je ne sais pas. Je ne m'en souviens pas. Peut-être qu'il y a

 23   quelque chose qui me permettrait de me rafraîchir la mémoire, mais quoi

 24   qu'il en soit, je ne sais pas.

 25   Q.  Pourriez-vous me dire ce qu'est le contre-renseignement ? Est-ce que

 26   cela relève du renseignement ou est-ce que cela relève de la sécurité; cela

 27   relève de quelle casquette ?

 28   R.  A mon sens, cela relève des questions de sécurité. Il faut apprécier la


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  1   situation au plan de la sécurité. Dans certains cas apprécier les

  2   intentions éventuelles, le degré de risque auquel se trouve exposée l'unité

  3   dans un secteur, par exemple. Comme je vous l'ai dit, je ne suis pas un

  4   expert, donc j'hésite à vous fournir d'autres explications.

  5   J'ai pris toutes les mesures que j'ai jugées importantes pour empêcher

  6   qu'il y ait des surprises ou des incursions de la part de groupes de

  7   sabotage ou de terroristes, de contrebande d'armes à feu, de contacts

  8   illicites entre les soldats sur les lignes de front ou autres contrebandes,

  9   et cetera. Je ne sais pas si vous pouvez appeler cela du contre-

 10   renseignement.

 11   M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, je regarde l'heure.

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Bien sûr. Nous devons faire notre

 13   première pause maintenant. Nous allons reprendre à 16 heures moins quart.

 14   --- L'audience est suspendue à 15 heures 46.

 15   --- L'audience est reprise à 16 heures 19.

 16   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Veuillez poursuivre, Monsieur Thayer.

 17   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 18   Q.  Rebonjour, Monsieur.

 19   R.  Bonjour de nouveau.

 20   Q.  Vous avez parlé de vos obligations de rendre compte à vos supérieurs le

 21   long de la chaîne hiérarchique ou le long de la chaîne d'experts et

 22   professionnels, et j'aimerais savoir s'il y avait des membres des unités

 23   subordonnées de la Brigade de Bratunac qui étaient également chargés de

 24   s'occuper des questions ou qui avaient des tâches relatives à la sécurité

 25   et au renseignement ? Je fais référence aux bataillons, bien sûr. Parmi les

 26   bataillons, il y avait des membres de la Brigade de Bratunac qui étaient

 27   également affectés au renseignement et à la sécurité, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui. Les trois bataillons d'infanterie qui appartenaient à la Brigade


Page 12248

  1   de Bratunac avaient des commandants adjoints chargés du renseignement et de

  2   la sécurité au sein de ces bataillons.

  3   Q.  Et quelles étaient leurs tâches et responsabilités ?

  4   R.  Pour éviter de me répéter : tout ce que je faisais au niveau de la

  5   brigade. Les adjoints du commandant s'occupaient de toutes les questions au

  6   niveau de la brigade dans le cadre de la zone de responsabilité du

  7   bataillon.

  8   Q.  Faisaient-ils parvenir des rapports à votre endroit, soit de façon

  9   orale ou par écrit, ou rendaient-ils compte à quelqu'un d'autre pour ce qui

 10   est des questions relatives à la sécurité et au renseignement ?

 11   R.  La pratique dans ma brigade à moi -- en fait, ce n'est pas une

 12   pratique, mais c'était l'obligation. Les organes chargés du renseignement

 13   et de la sécurité du bataillon fonctionnaient d'après le même principe que

 14   ce que j'ai déjà expliqué concernant mon obligation envers le commandant du

 15   Corps de la Drina. Donc, ils fonctionnaient selon le même principe, ils

 16   faisaient parvenir par écrit des rapports quotidiens à la Brigade de

 17   Bratunac, destinés au secteur du renseignement et de la sécurité. Et encore

 18   une phrase. Selon le même principe, s'il existait des informations

 19   importantes qui étaient urgentes ou qui ne pouvaient pas attendre, ces

 20   derniers m'envoyaient toujours des rapports à moi, me renseignaient, et

 21   ceci comprend également le fait de rendre compte à leur propre commandant

 22   et commandement. Ce sont des tâches complètement régulières.

 23   Q.  Les Juges de la Chambre ont entendu des témoignages sur, d'une part, la

 24   chaîne de commandement dont nous avons parlé plus tôt lorsque nous avons

 25   parlé des commandants de la brigade comparativement aux lignes d'experts et

 26   professionnelles qui, dans votre cas, passaient par les organes de sécurité

 27   de l'intelligence le long de la chaîne de subordination et du commandement.

 28   Donc j'aimerais savoir, vous rendiez compte directement à qui ?


Page 12249

  1   R.  S'agissant de la chaîne du commandement et du contrôle, mon supérieur

  2   immédiat était le commandant Vidoje Blagojevic.

  3   Q.  Qui était votre officier supérieur immédiat lorsqu'il s'agissait des

  4   questions relatives à la sécurité et aux questions d'expertise

  5   professionnelle ?

  6   R.  Mon supérieur immédiat s'agissant de la ligne hiérarchique

  7   professionnelle était le chef de l'organe du renseignement et de la

  8   sécurité au sein du commandement du Corps de la Drina.

  9   Q.  Et qui était-ce en juillet 1995 ?

 10   R.  Le chef de la sécurité, si je ne m'abuse, et si j'ai raison, parce que

 11   je ne suis pas tout à fait certain, le chef chargé de la sécurité était

 12   Vujadin Popovic, et le chef du secteur du renseignement était le

 13   lieutenant-colonel Kosoric. Je pensais personnellement, et je le pense

 14   encore, que le chef de ce secteur était Vujadin Popovic.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que M. l'Huissier pourrait

 16   aider le témoin pour essayer de faire déplacer quelque peu les micros.

 17   Merci.

 18   J'espère que c'est mieux pour les interprètes.

 19   Veuillez poursuivre, je vous prie.

 20   M. THAYER : [interprétation]

 21   Q.  Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre quelles étaient les

 22   sources du renseignement s'agissant des informations relatives à la

 23   sécurité qui vous parvenaient, par exemple, qui vous parvenaient du niveau

 24   du bataillon ? Quelles étaient les sources ? Donnez-nous quelques exemples

 25   de sources de ces informations.

 26   R.  J'ai déjà dit que chaque bataillon d'infanterie était doté d'un adjoint

 27   chargé des questions relatives au renseignement et à la sécurité. Les

 28   informations que recueillaient les bataillons étaient principalement


Page 12250

  1   dirigées vers les informations et vers ce qui se passait devant la partie

  2   frontale de leur bataillon. S'agissant de chaque bataillon dans les unités

  3   subalternes, les compagnies et les sections, on avait organisé des points

  4   d'observation sur lesquels travaillaient des officiers affectés à ces

  5   postes-là de niveau subordonné qui appartenaient au bataillon. Maintenant,

  6   à savoir de ce qui se passait devant la partie frontale de leurs unités,

  7   ces informations étaient recueillies par le biais de l'observation.

  8   Dans la Brigade de Bratunac, il était habituel d'engager des unités

  9   de reconnaissance pour obtenir des informations sur l'ennemi. On envoyait

 10   ces unités de reconnaissance avec les tâches concrètes d'effecteur une

 11   reconnaissance en profondeur du terrain qui était contrôlé par l'ennemi et,

 12   dans ce cas-ci, par les forces musulmanes. Par la suite, les informations

 13   relatives au renseignement et des informations de tous types étaient

 14   recueillies également en questionnant en fait les prisonniers, à savoir de

 15   quelle façon ils ont fait -- ou il y avait également des sessions de

 16   questions pour interroger les personnes qui avaient changé de camp. Parce

 17   qu'il y en avait aussi. C'est donc en interrogeant ces personnes-là et les

 18   prisonniers.

 19   Mais il y a également des informations qui étaient importantes pour

 20   la sécurité des unités, mais il y avait également des renseignements ou des

 21   informations qui pouvaient donner une information sur la façon dont les

 22   forces musulmanes planifiaient de faire introduire leurs groupes, certains

 23   groupes d'incursion, et cetera. Et donc, s'agissant du commandant chargé

 24   des questions relatives au renseignement et à la sécurité, l'assistant du

 25   commandant au niveau du bataillon me faisait parvenir ces informations. Les

 26   effectifs du 3e Bataillon d'infanterie étaient tout près et c'est eux qui

 27   m'apportaient ces rapports écrits.

 28   Et maintenant, s'agissant de ces rapports écrits, ce sont des


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  1   renseignements qui m'étaient destinés. Il y avait également -- en fait, ces

  2   informations allaient le long de cette ligne professionnelle, et s'agissant

  3   de la teneur, ces mêmes informations étaient également envoyées le long de

  4   la ligne de commandement. Donc la personne chargée du niveau du bataillon

  5   sur le renseignement envoyait à son commandant, et le commandant le long de

  6   la ligne de commandement dans le cadre des rapports quotidiens informait le

  7   commandant de la brigade en lui donnant une information ou un rapport

  8   quotidien beaucoup plus complet qui comportait également des renseignements

  9   dont j'ai parlé.

 10   Q.  Y avait-il une priorité accordée à la personne à laquelle vous rendriez

 11   compte d'abord -- par exemple, si vous aviez une information importante

 12   relative au renseignement. Est-ce que vous informiez d'abord votre

 13   commandant ? Informiez-vous d'abord les officiers supérieurs de la ligne

 14   d'experts professionnels ? Ou bien ne pouvez-vous pas répondre à cette

 15   question ? Y avait-il une priorité ? Y avait-il un règlement que vous

 16   suiviez quant à la façon dont vous faisiez parvenir cette information ?

 17   R.  Je peux seulement répondre de la façon suivante : je peux vous dire de

 18   quelle façon je fonctionnais moi-même. Tous les renseignements que je

 19   recevais en tant que nouveaux renseignements, tout ce sur dont je voulais

 20   informer mes officiers supérieurs, et plus particulièrement s'ils avaient

 21   trait aux unités de ma brigade, et normalement c'était le cas, d'abord j'en

 22   faisais rapport à mon commandant et normalement de façon orale. Des fois,

 23   je ne faisais aucun rapport écrit à mon propre commandant. Et ensuite,

 24   immédiatement après cela, si c'était pertinent ou s'il y avait une

 25   information urgente, je m'assoyais derrière mon bureau et j'écrivais un

 26   rapport écrit à mon commandement supérieur. Et par cela je veux dire mon

 27   organe technique, c'est le secteur chargé du renseignement et de la

 28   sécurité au sein du corps d'armée.


Page 12252

  1   Q.  J'ai deux questions de suivi, Monsieur. C'est peut-être tout à fait

  2   clair pour vous et évident, mais j'aimerais savoir quel était l'objectif

  3   d'envoyer cette information, par exemple une information sur le

  4   renseignement, à votre commandant ?

  5   R.  Eh bien, mon commandant doit avoir toutes les informations de ce type,

  6   du type du renseignement, pour pouvoir agir et pour pouvoir tirer ses

  7   conclusions, afin qu'il puisse savoir ce qui se passe exactement ou ce qui

  8   est préparé, pour pouvoir anticiper les choses ou prendre les mesures

  9   nécessaires qui vont éliminer ou empêcher, prévenir les surprises ou des

 10   pertes au sein de ses propres rangs. Donc, à cause des décisions qu'il

 11   devait prendre, à savoir ce qu'il devait faire à la suite de ces

 12   informations, quels effectifs devait-il déployer, donc ces informations

 13   relatives au renseignement étaient absolument indispensables, plus

 14   particulièrement lorsqu'il s'agissait d'activités et des intentions du camp

 15   adverse.

 16   Q.  Et la deuxième question qui découle de votre réponse précédente est la

 17   suivante : quel est le but d'envoyer ce type d'information le long de votre

 18   ligne technique hiérarchique à M. Popovic ou à M. Kosoric ?

 19   R.  Voici comment je peux répondre à cette question. Le commandement du

 20   corps d'armée n'est pas doté de sa propre brigade, dans le sens qu'il ne

 21   s'agit pas seulement d'une brigade du commandement du corps d'armée. La

 22   zone de responsabilité du commandement du corps d'armée est beaucoup plus

 23   large et beaucoup plus vaste que la zone de responsabilité de la brigade

 24   même. Donc cette zone-là est composée par les zones de responsabilité des

 25   brigades qui font partie de ce corps d'armée, ou il s'agit d'unités qui

 26   font partie de ce corps d'armée. Afin que le commandant du corps d'armée

 27   puisse prendre des décisions au niveau du corps d'armée, donc à un niveau

 28   supérieur, il est absolument indispensable qu'au sein du commandement du


Page 12253

  1   corps d'armée, dans cette section-là, qu'on leur fasse parvenir toutes les

  2   informations de toutes les unités qui composent le corps d'armée. Donc ceci

  3   veut dire que si le secteur du renseignement reçoit une information de ma

  4   brigade à moi au cours de la journée, ou reçoit des informations de la

  5   Brigade de Zvornik ou de Visegrad, ainsi de suite, à ce moment-là, le

  6   commandant aura un fond d'information suffisamment large grâce auquel il

  7   pourra tirer les bonnes conclusions, prendre les bonnes décisions, à savoir

  8   ce qu'il doit faire, où faut-il engager le commandement du corps d'armée ou

  9   où faut-il les déployer si cela est nécessaire.

 10   Donc, grâce aux renseignements qui parviennent au commandant du corps

 11   d'armée, et, bien sûr, en passant par la section chargée du renseignement

 12   et de la sécurité du corps d'armée, ce dernier peut apporter des décisions

 13   qui lui permettent de savoir ce qu'il pourra faire dans la journée ou à

 14   l'avenir.

 15   Q.  Sur la base de votre travail dans la brigade et de votre expérience

 16   dans la guerre en tant que chef chargé des questions relatives au

 17   renseignement et à la sécurité, comment le "reporting" le long de la ligne

 18   technique se faisait depuis le niveau du corps en allant vers le haut ?

 19   Est-ce que ceci fonctionnait de la même façon que vous avez décrite, en

 20   allant de vos bataillons, en passant par vous et ensuite au corps d'armée,

 21   ou bien est-ce que l'on procédait d'une autre façon ?

 22   R.  Je peux seulement me livrer à des conjectures pour savoir de quelle

 23   façon les choses allaient plus loin. Je peux vous dire, toutefois, que

 24   d'après tout ce que je sais, ce système de réédition de comptes devrait

 25   aller jusqu'en haut, comme j'ai expliqué un peu plus tôt. Est-ce que les

 26   choses fonctionnaient réellement de cette façon-là ou pas, je ne le sais

 27   vraiment pas.

 28    Q.  Parlons maintenant des pelotons de la police militaire de la Brigade


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  1   de Bratunac. Vous nous avez dit qu'ils étaient cantonnés dans un bâtiment

  2   différent du QG du commandement de la brigade. En juillet 1995, qui était

  3   le commandant militaire du peloton de la police militaire ?

  4   R.  Le commandant du peloton de la police militaire en juillet 1995 était

  5   Mirko Jankovic.

  6   Q.  Qui était le supérieur immédiat de M. Jankovic ?

  7   R.  C'était le commandant de la Brigade de Bratunac, Vidoje Blagojevic.

  8   S'agissant de la ligne technique, le commandant supérieur immédiat au

  9   peloton de la police militaire, c'était moi-même au cours de l'année 1995.

 10   Q.  Si vous le pouvez, pourriez-vous décrire aux Juges de la Chambre les

 11   relations entre le commandant Blagojevic et le peloton de la police

 12   militaire et votre relation face au peloton de la police militaire. Vous

 13   avez décrit la ligne de commandement et vous l'avez comparée à la ligne

 14   technique hiérarchique. Pouvez-vous nous dire de quelle façon est-ce que

 15   ceci se traduisait sur le terrain, selon votre expérience ?

 16   R.  Ce que je souhaite dire ici, c'est que le peloton de la police

 17   militaire était dirigé directement par le chef de l'unité ou de

 18   l'institution dans laquelle le peloton de la police militaire se trouve.

 19   Pour parler concrètement de la Brigade de Bratunac, le peloton de la police

 20   militaire faisait partie de la composition de la Brigade de Bratunac, et le

 21   peloton de la police militaire était dirigé directement par le commandant

 22   de la brigade, M. Vidoje Blagojevic. C'était pour ce qui est du rapport de

 23   la chaîne hiérarchique, du rapport de commandement. Maintenant, le

 24   commandant dans ce cas-ci, M. Vidoje Blagojevic, était le chef qui prend

 25   toutes les décisions concernant l'utilisation du peloton de la police

 26   militaire.

 27   D'un point de vue technique, le chef qui dirige directement mais seulement

 28   d'un point de vue technique, donc il dirige le peloton de la police


Page 12255

  1   militaire, est le chef de l'organe du renseignement et de la sécurité de la

  2   Brigade de Bratunac, et au cours de l'année 1995, c'était moi. Donc mes

  3   tâches et responsabilités étaient de faire en sorte que le peloton de la

  4   police militaire soit toujours prêt à l'aptitude au combat, soit toujours

  5   formé et prêt à effectuer des activités de police et d'autres activités de

  6   combat. Pour ce qui est maintenant du déploiement ou de l'engagement du

  7   peloton de la police militaire et pour ce qui est des ordres donnés

  8   concernant l'emploi du peloton de la police militaire, ceci incombait

  9   complètement au commandant. Donc c'était le commandant. Le chef de l'organe

 10   du renseignement et de la sécurité est la personne qui propose au

 11   commandant l'emploi du peloton de la police militaire de la façon qu'il

 12   pense utile pour l'emploi du peloton.

 13   Le commandant n'a pas l'obligation d'accepter la proposition du chef

 14   de l'organe du renseignement et de la sécurité. Donc c'est une variante.

 15   Donc il n'a pas cette obligation et peut accepter tout ce qui lui a proposé

 16   le chef chargé du renseignement et de la sécurité. Ou il peut refuser tout

 17   ce que ce dernier lui a proposé et peut lui dire : J'ai décidé de procéder

 18   comme suit."

 19   Puis, lorsque le commandant dit j'ai pris la décision de faire ceci

 20   et lorsqu'il lui explique ce qu'il a décidé, toutes les propositions se

 21   terminent là. Donc ce que le commandant décide, indépendamment de la

 22   proposition qu'il a acceptée, qu'il s'agisse d'une partie de la proposition

 23   ou de l'ensemble de la proposition ou s'il a rejeté d'emblée la proposition

 24   au complet, toute cette discussion se termine là. Et moi, en tant que chef

 25   de l'organe chargé du renseignement de la sécurité, j'avais pour tâche de

 26   mettre en œuvre ce que le commandant a décidé. Donc, moi je devais faire

 27   attention que la police puisse exécuter l'ordre de la meilleure façon

 28   possible après la décision du commandant.


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  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'ai une question que je souhaite

  2   poser au témoin, et je vais la formuler de manière non militaire.

  3   Serait-il exact si je décrivais la situation de la manière suivante :

  4   le chef du renseignement et de la sécurité a la responsabilité de préparer

  5   la police militaire pour toute action à venir, donc il s'agit de prévoir

  6   l'équipement et de préparer l'effectif, et il formule des propositions à

  7   l'attention du commandant de la brigade; et le commandant, à son tour, a la

  8   responsabilité de prendre les décisions et d'émettre des ordres ? Est-ce

  9   que j'ai bien représenté la situation ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] De la manière dont je comprends votre question

 11   par rapport aux préparatifs qui sont conduits vis-à-vis de la police, il

 12   s'agit là d'une mission permanente de préparer et de former les membres de

 13   la police. Donc le chef de la sécurité et du renseignement a pour mission

 14   permanente, constante, de faire en sorte que la police militaire soit en

 15   état d'aptitude au combat maximal sans arrêt, donc que la police soit

 16   toujours en état de s'acquitter des missions de police militaire

 17   prioritairement et d'autres missions qui lui seraient ordonnées. Donc ça,

 18   c'est une mission permanente au niveau des préparatifs menés vis-à-vis de

 19   la police militaire.

 20   Le commandant, s'il décide ou s'il affirme qu'il souhaite employer la

 21   police militaire dans le cadre d'une action de combat, moi, en tant que

 22   chef chargé de la sécurité - et c'est de cette manière que j'ai agi -

 23   j'essaie de proposer à mon commandant -- ou plutôt, je lui propose, et

 24   c'est ce que j'ai fait, je lui proposais la meilleure façon d'employer la

 25   police militaire dans la conduite de telle ou telle action de combat

 26   concrète. Après avoir entendu ma proposition ou mon explication, le

 27   commandant peut tout accepter tout ce que je lui ai dit. Il peut dire :

 28   "Oui, tout à fait, la police militaire sera engagée de cette manière-là."


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  1   Ou bien le commandant peut me dire : "Monsieur Nikolic, j'ai écouté votre

  2   proposition, mais je ne suis pas d'accord avec vous. Je décide d'employer

  3   la police militaire de la manière qui suit."

  4   Donc, indépendamment de ma proposition, il peut décider autre chose,

  5   et à ce moment-là je suis obligé de m'y conformer. Dans la limite de mes

  6   possibilités, je dois faire en sorte que l'ordre du commandant soit exécuté

  7   de la manière dont il l'envisage et dont il l'a dit. C'est ça la mission du

  8   chef du secteur chargé de la sécurité et du renseignement dans la partie

  9   qui concerne la police militaire. Le long de la filière du commandement,

 10   toutes les décisions vont du commandant de la police militaire au

 11   commandant de la brigade. C'est le commandant de la brigade, lui, qui émet

 12   des ordres en dernière instance au chef de la police militaire. Donc la

 13   dernière instance, ce n'est pas le chef du secteur de la sécurité du

 14   renseignement.

 15   Donc le chef de la police militaire fait en sorte que la mission

 16   ordonnée par le commandant est menée à bien. Et c'est comme ça que cela a

 17   fonctionné dans mon unité. Je pense que tout cela est conforme au règlement

 18   portant l'emploi de la police militaire. Donc le commandement et la

 19   direction de la police militaire qui figure au point 12, et je pense que

 20   c'est le point suivant qui définit la filière technique.

 21   Donc les points 12 et 13 du règlement régissant le fonctionnement de

 22   la police militaire.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie. Il reste un point

 24   qui ne me semble pas clair à moi personnellement. Vous dites que vous, en

 25   votre qualité du chef de la sécurité du renseignement, vous formulez une

 26   proposition à l'intention du commandement de la brigade. Le commandant à

 27   son tour émet des ordres, non pas à vous, mais directement à la police

 28   militaire; ai-je raison ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit qu'il donnait ces ordres à

  2   l'attention du chef de la police militaire, pas à moi. Donc ça, c'est le

  3   système de commandement et de direction classique. La police militaire est

  4   directement commandée par le chef de la police militaire, mais dans la

  5   filière de commandement, la police militaire est directement commandée et

  6   dirigée par le commandant de l'unité dont elle fait partie. Donc cela est

  7   prévu par le règlement du service. Au point 12 du règlement de service de

  8   la police militaire, l'on voit précisément qui commande la police

  9   militaire.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

 11   Monsieur Thayer.

 12   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 13   Q.  Monsieur, vous venez de parler du commandement et de la direction

 14   directs de la police militaire qui revient au chef de la police militaire;

 15   qui est-ce ?

 16   R.  Je pense là à Mirko Jankovic, qui est le chef de la police militaire.

 17   Q.  Le commandant Blagojevic, avait-il le droit, le pouvoir d'accepter une

 18   de vos propositions et de rejeter les autres ?

 19   R.  Le commandant avait le pouvoir discrétionnaire d'accepter ou de rejeter

 20   quelque proposition que ce soit. Donc, si c'est ça que vous me demandez,

 21   oui, il avait le droit d'accepter ou de ne pas accepter.

 22   Q.  D'expérience, car vous avez travaillé avec le commandant Blagojevic,

 23   est-ce qu'il est arrivé que vous proposiez des choses dont il aurait par la

 24   suite accepté une partie et rejeté une autre ?

 25   R.  Rarement, mais c'est arrivé.

 26   M. THAYER : [interprétation] Pour que le compte rendu d'audience soit

 27   précis, page 36, ligne 25 et page 37, ligne 1, Monsieur le Président, une

 28   référence est faite. Le témoin, d'après le compte rendu d'audience, se


Page 12259

  1   présente en tant que chef de la police. La réponse est la suivante :

  2   "Moi, en tant que chef de la police - c'est effectivement ce que j'ai

  3   fait - j'ai proposé à mon commandant ce que je pensais comme la meilleure

  4   façon d'employer la police."

  5   Je ne sais pas s'il y a eu un lapsus ici ou juste un problème de

  6   traduction ou autre chose, mais je voudrais que ce soit bien précisé avec

  7   le témoin. Est-ce qu'il voulait se présenter en tant que chef de la police

  8   ou comme autre chose ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non. Si cela est consigné au compte rendu

 10   d'audience, j'ai dû faire un lapsus. Donc j'étais le chef de l'organe

 11   chargé de la sécurité et du renseignement, c'est ça que j'aurais dû dire.

 12   Et si je ne l'ai pas dit, j'ai fait une erreur. Je ne me suis pas exprimé

 13   en tant que chef de la police.

 14   M. THAYER : [interprétation]

 15   Q.  Alors, le peloton de la police militaire faisant partie de la brigade,

 16   est-ce qu'il comportait des unités plus petites ?

 17   R.  Vous avez dit "détachement". J'ai entendu le mot "odred",

 18   "détachement". Non, il ne s'agit pas d'un détachement. La Brigade de

 19   Bratunac avait un peloton de police militaire, et ce peloton de police

 20   militaire qui comptait 30 hommes était une unité d'organisation classique.

 21   Il y avait trois groupes qui constituaient un peloton.

 22   Q.  Donc il y avait trois escouades dans un peloton; quelles étaient les

 23   missions et obligations de ces hommes, Monsieur, que faisaient-ils ?

 24   R.  Pour l'essentiel, ils avaient des permanences, ils avaient des

 25   permanences au pont de la Drina. Ils étaient déployés au poste de contrôle

 26   de Zuti Most, ils étaient de permanence au sein de la police et, si mes

 27   souvenirs sont bons, ils avaient des permanences à l'entrée du commandement

 28   de la brigade. Et aussi, ils avaient des missions policières régulières de


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  1   police militaire, à savoir ils devaient amener les membres de l'armée qui

  2   avaient, de manière non autorisée, quitter leurs postes, et des tâches

  3   analogues. Donc c'était cela leurs missions régulières. Excusez-moi, et

  4   j'ai oublié de mentionner qu'ils étaient employés à sécuriser les officiers

  5   gradés, le commandant, le commandant de la brigade, et donc ils se

  6   rendaient à ce moment-là sur le terrain là où étaient déployés les hommes.

  7   Pour résumer, on pourrait dire qu'ils avaient les tâches régulières de la

  8   police militaire, les tâches habituelles qui étaient quasiment les mêmes de

  9   jour en jour.

 10   Q.  Et par rapport à des obligations qui ne se sont pas nécessairement

 11   présentées tous les jours ou de manière aussi fréquente que les tâches

 12   régulières, le peloton de police militaire, est-ce qu'il avait des

 13   obligations vis-à-vis des prisonniers de guerre ou des réfugiés ?

 14   R.  Oui. Je peux vous répondre de manière générale. Donc tous les

 15   prisonniers de guerre capturés par la Brigade de Bratunac et amenés dans

 16   les "prémisses" de la Brigade de Bratunac, ils étaient placés sous la

 17   compétence de la police militaire.

 18   Q.  Pour autant que vous le sachiez, est-ce qu'ils avaient des pouvoirs ou

 19   des obligations vis-à-vis des réfugiés qui relevaient de la compétence de

 20   votre service de sécurité et de renseignement ?

 21   R.  S'agissant des prisonniers de guerre, si j'ai bien compris votre

 22   question, l'obligation de l'organe du renseignement et de sécurité était de

 23   prendre en charge les prisonniers de guerre. La police militaire, en plus

 24   de ce que je viens d'énumérer, était employée également à escorter les

 25   prisonniers de guerre de Bratunac lorsque cela avait lieu.

 26   Q.  D'accord. Vous étiez à la tête de l'organe chargé de la sécurité et du

 27   renseignement, est-ce que vous avez appliqué des règles ou des instructions

 28   spécifiques ?


Page 12261

  1   R.  Vous voulez dire le règlement qui concernerait le renseignement et la

  2   sécurité, des documents de référence ? J'ai appliqué les instructions ou

  3   les règles, c'est-à-dire des textes, qui datent du temps de l'armée

  4   populaire yougoslave. Donc, pour l'essentiel, ce sont des documents qui

  5   concernent le renseignement au niveau de la sécurisation des activités de

  6   combat. Le livre dont je me souviens maintenant date de 1977. Puis j'ai

  7   utilisé le règlement de service de la police militaire et également le

  8   règlement de l'organe de sécurité. Je pense que c'est comme ça qu'il

  9   s'appelait. Donc l'ensemble des textes que j'ai appliqués sont ceux qui

 10   dataient de l'ex-JNA, et nous les avons empruntés par la VRS.

 11   Q.  Très bien. Alors, voyons brièvement quelques-uns de ces textes.

 12   M. THAYER : [interprétation] Je demande l'affichage de la pièce 65 ter 390.

 13   Je pense que cette pièce se présente également sous la cote D00203.

 14   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Gajic.

 15   M. GAJIC : [interprétation] Monsieur le Président, bonjour à toutes et à

 16   tous. Page 41, ligne 15, l'année qui se lit est celle de 1977, mais il me

 17   semble que le témoin a dit autre chose, une date qui se situe dix ans plus

 18   tard.

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer, est-ce que vous

 20   pouvez nous préciser cela, s'il vous plaît.

 21   M. THAYER : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur, ce document qui porte sur le renseignement pour sécuriser les

 23   actions de combat, il date de quand, ce livre ?

 24   R.  Il date de 1987.

 25   M. THAYER : [interprétation] Je remercie la Défense d'être intervenue.

 26   En anglais, pourriez-vous, s'il vous plaît, nous afficher le document.

 27   Q.  Monsieur, nous avons la page de garde d'un livre. Est-ce que vous

 28   reconnaissez ce document ?


Page 12262

  1   R.  Oui. C'est le règlement de service des organes de sécurité dans les

  2   forces armées. Justement, comme je viens de le dire, j'ai appliqué ce

  3   règlement, je m'en suis servi.

  4   Q.  Très bien. Alors, voyons un autre document. Il s'agit de la pièce

  5   P01297.

  6   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous demandez le versement de cette

  7   pièce ?

  8   M. THAYER : [interprétation] Mais ce document est déjà versé.

  9   C'est une pièce de la Défense.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, tout à fait. Merci.

 11   M. THAYER : [interprétation] Est-ce que nous pouvons voir quelques pages de

 12   plus dans l'original, s'il vous plaît. Tournez encore la page -- et en

 13   anglais également. Une page plus loin en anglais, s'il vous plaît. Encore.

 14   Page 2 en anglais, s'il vous plaît. Tournez, s'il vous plaît, la page en

 15   B/C/S. Merci.

 16   Q.  Monsieur, nous avons cette page de garde qui est agrandie à votre

 17   intention. Est-ce que vous reconnaissez ce document ?

 18   R.  Oui. C'est le règlement de service de la police militaire. Monsieur le

 19   Président, Madame, Monsieur les Juges, si je puis juste dire une chose par

 20   rapport à votre question. Ce règlement est celui que j'ai appliqué pendant

 21   la guerre, et ici, si mes souvenirs sont bons - parce que ça fait longtemps

 22   que je ne l'ai pas vu - se retrouve ce que je vous disais au sujet du

 23   commandement et de la direction de la police militaire, et également au

 24   sujet de la ligne de commandement technique s'agissant de l'organe de

 25   sécurité et de renseignement. Donc, ces dispositions figurent dans ce

 26   règlement que j'ai utilisé pendant la guerre et, bien entendu, pendant

 27   toutes mes années de service.

 28   M. THAYER : [interprétation] Page 10 en anglais, s'il vous plaît, les


Page 12263

  1   points 12 et 13. En B/C/S, page 9.

  2   Q.  Monsieur, vous venez d'appeler à l'attention des Juges de la Chambre

  3   ces instructions que nous sommes en train de regarder, les paragraphes 12

  4   et 13 du chapitre 2, qui s'intitule : "Direction et commandement de la

  5   police militaire". Au paragraphe 12, il est stipulé que la police militaire

  6   est commandée et dirigée par l'officier de l'unité militaire et de

  7   l'institution qui, dans son organigramme, comporte l'unité de la police

  8   militaire ou à laquelle elle a été rattachée.

  9   Donc, Monsieur, j'aimerais savoir de qui nous parlons ici, pour

 10   revenir à ce que vous nous disiez précédemment ?

 11   R.  C'est très concrètement, au paragraphe 12, que l'on fait référence au

 12   commandant Blagojevic et à la Brigade de Bratunac. Donc, le commandant

 13   Blagojevic est celui qui commande et dirige la police militaire, le peloton

 14   de la police militaire, parce que ce peloton fait partie de la Brigade de

 15   Bratunac.

 16   Q.  Si nous nous penchons maintenant sur le paragraphe 13, il se lit comme

 17   suit :

 18   "S'agissant de la ligne technique, la police militaire est dirigée par

 19   l'officier supérieur de l'organe de sécurité de la police militaire et de

 20   l'institution qui, dans son organigramme, comporte l'unité de police

 21   militaire ou lui est rattaché. Il propose à l'officier supérieur de l'unité

 22   militaire et de l'institution l'emploi des unités de police militaire et

 23   répond du niveau de préparation au combat de l'unité de la police militaire

 24   et de l'exécution de ses missions."

 25   Donc, dans cet alinéa du paragraphe 13, dans votre brigade, qui serait-ce ?

 26   R.  Le paragraphe 13, qui parle du commandement technique du peloton de la

 27   police militaire, se réfère à moi.

 28   Q.  Très bien.


Page 12264

  1   M. THAYER : [interprétation] Je voudrais que l'on affiche la page 15, s'il

  2   vous plaît, en anglais -- pardon, c'est une erreur, parce que j'ai besoin

  3   d'avoir l'intitulé de ce chapitre, page 12. Page 12 en anglais, page 11 en

  4   B/C/S. Excusez-moi.

  5   Q.  Monsieur, je souhaite vous demander de regarder l'intitulé de ce

  6   chapitre. Nous allons regarder un paragraphe en particulier, le paragraphe

  7   25 de ce chapitre. Aux fins du compte rendu d'audience, je souhaitais vous

  8   signaler l'intitulé de ce chapitre : "La compétence et les missions de la

  9   police militaire". Au point 2, si vous voyez le point 2 --

 10   M. THAYER : [interprétation] Il va falloir faire défiler le texte vers le

 11   bas et il faudra regarder l'autre page en B/C/S. C'est une page -- voilà.

 12   Passez à l'autre page en B/C/S. Très bien.

 13   Q.  Au point 2, on peut lire l'intitulé : "Les missions de la police

 14   militaire".

 15   R.  Oui, je le vois.

 16   Q.  Bien.

 17   M. THAYER : [interprétation] Est-ce que nous pourrions passer à la page 15

 18   de l'anglais et 13 du B/C/S. Et il nous faut regarder le paragraphe 25.

 19   Q.  Nous voyons que :

 20   "Outre les missions aux points 22 à 24 de ce règlement, en temps de

 21   guerre la police militaire doit également accomplir les missions

 22   suivantes…"

 23   Et on peut voir les lettres A à I. Est-ce que nous pourrions quelques

 24   instants regarder le paragraphe 25(f), s'il vous plaît. Voyez-vous l'alinéa

 25   (f) ?

 26   R.  Tout à fait.

 27   Q.  Pourriez-vous nous dire ce que ceci évoque et comment ceci relève de

 28   vos attributions en tant que chef du renseignement et des questions de


Page 12265

  1   sécurité ?

  2   R.  Eh bien, je ne suis pas très sûr. On dit prendre part et diriger le

  3   mouvement des réfugiés. Ceci fait partie, en principe, des missions qui

  4   reviennent à une section de la police militaire, alors que le chef du

  5   renseignement est la personne qui travaille pour l'organe chargé de la

  6   sécurité lorsque la personne prépare des équipements et propose des mesures

  7   au commandant, indique dans quels secteurs les réfugiés et autres personnes

  8   doivent être rassemblés. Ça, je le sais pour sûr, et je sais que c'est

  9   ainsi que cela se faisait, et ceci était conforme au règlement.

 10   Q.  Bien. Et alors, qu'en est-il de la deuxième partie de l'alinéa (f) :

 11   "…et déceler tous membres des unités ennemies qui se sont infiltrés parmi

 12   les réfugiés…"

 13   Comment cette mission d'ordre général qui incombe à la section de la

 14   police militaire relève-t-elle de votre responsabilité ? Quels rôles et

 15   responsabilités auriez-vous à l'égard de cela, autrement dit, "découvrir ou

 16   mettre la main sur des membres des unités ennemies qui se sont infiltrés

 17   parmi les réfugiés" ?

 18   R.  Ecoutez, je ne sais pas. Il me semble que le contexte dans lequel vous

 19   présentez cela est un contexte hypothétique. Si vous me posez une question

 20   et que vous me demandez des dates précises, dans ce cas nous pouvons en

 21   parler. Mais en l'état actuel des choses, je puis dire que c'est possible,

 22   et ce qui est déclaré ici constitue une des missions de la police militaire

 23   lorsqu'elle doit donner les consignes aux réfugiés. Pour ce qui est de la

 24   dernière partie de la déclaration, à savoir les formations ennemies qui

 25   s'infiltrent parmi les réfugiés, bien sûr, théoriquement, c'est possible.

 26   Mais je crois que l'infiltration par un personnel militaire au sein de

 27   groupes de réfugiés, je ne sais pas très bien comment cela se passe sur le

 28   terrain.


Page 12266

  1   Une personne qui est apte à faire son service militaire et qui est un

  2   soldat peut se trouver parmi les réfugiés, cela ne pose pas de problème.

  3   Mais un soldat qui porte un fusil -- eh bien, il ne m'apparaît pas

  4   clairement pourquoi une telle personne devrait se mêler à la population

  5   civile qui doit être escortée par la police militaire. Je ne sais pas ce

  6   qu'une telle personne serait censée faire. Donc, si vous voulez parler

  7   d'hommes valides qui se trouvent parmi les civils, ça, c'est quelque chose

  8   de tout à fait normal et c'est quelque chose que j'ai pu voir de mes

  9   propres yeux après la chute de Srebrenica.

 10   Q.  Bien. Nous allons parler de ce qui est advenu d'hommes valides que vous

 11   avez pu voir après la chute de Srebrenica. Concentrons-nous pendant

 12   quelques instants sur l'alinéa (h). Que pouvez-vous nous dire au sujet de

 13   cet alinéa pour ce qui est de la façon dont fonctionnait la section de la

 14   police militaire ?

 15   R.  La police militaire, bien évidemment, participe à la sécurisation des

 16   prisonniers de guerre et des camps de prisonniers de guerre ainsi que

 17   d'autres centres ou installations destinés à la détention provisoire de

 18   prisonniers. La police militaire ne constitue qu'une des sections ou

 19   structures qui, dans le cas précis, prendraient part à la sécurisation des

 20   prisonniers après l'opération Srebrenica ou de police militaire qui

 21   garantit la sécurité des prisonniers. Donc, le rôle et l'obligation du

 22   renseignement et des organes chargés de la sécurité est tout à fait clair.

 23   Lorsqu'il s'agit de sécurité physique, cela incombe à la police militaire,

 24   car cela a trait aux installations dans lesquelles ces personnes sont

 25   détenues.

 26   Q.  Alors, regardons un paragraphe supplémentaire qui figure dans ces

 27   instructions.

 28   M. THAYER : [interprétation] Page 21 de l'anglais et page 19 en B/C/S. Nous


Page 12267

  1   allons regarder plus particulièrement le paragraphe 54.

  2   Q.  Monsieur, voyez-vous la quatrième partie où on peut lire "Service

  3   d'escorte", paragraphe 54, voyez-vous cet intitulé ?

  4   R.  Oui, je le vois.

  5   Q.  Veuillez lire le paragraphe 54 [comme interprété] à voix basse, et

  6   ensuite nous tournerons les pages dans les deux versions.

  7   M. THAYER : [interprétation] Nous allons tourner la page et aller du

  8   paragraphe 54 [comme interprété] au paragraphe 57.

  9   Q.  [aucune interprétation]

 10   R.  [aucune interprétation]

 11   M. THAYER : [interprétation] Veuillez procéder de même dans la version

 12   B/C/S.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je l'ai lu.

 14   M. THAYER : [interprétation]

 15   Q.  Pourriez-vous nous dire de quoi il s'agit et comment ceci a trait aux

 16   actions de la section de la police militaire de la Brigade de Bratunac,

 17   d'après ce que vous savez.

 18   R.  Ces deux articles montrent clairement qui escorte qui et en vertu des

 19   ordres donnés par qui. Et donc, ceci permet d'illustrer les rapports entre

 20   les différentes entités. Dans ce cas-ci, si nous parlons de la police

 21   militaire, après l'opération de Srebrenica, les Musulmans capturés qui se

 22   sont rendus ont été escortés, et ces personnes ont été placées sous la

 23   juridiction de la police militaire. Ces personnes avaient également la

 24   possibilité de se faire escorter par des soldats, des membres de l'ABiH qui

 25   avaient été faits prisonniers par la Brigade de Bratunac, et dans les

 26   grandes lignes, telles étaient les actions qui avaient trait aux

 27   prisonniers. Si cela relève de cette catégorie-ci, ils avaient également la

 28   charge d'escorter et d'assurer la sécurité des convois qui allaient de


Page 12268

  1   Bratunac à Zvornik. Donc ceci est, me semble-t-il, le contexte le plus

  2   large dans lequel je puis situer ce qui est dit ici dans ce texte.

  3   Q.  Bien. Alors, veuillez regarder le paragraphe 57, où on peut lire :

  4   "La police militaire est en droit également, sur ordre spécial,

  5   d'escorter les prisonniers de guerre."

  6   Alors, si je reprends ce que vous avez dit il y a quelques instants

  7   en ce qui concerne les actions de la section de la police militaire de la

  8   Brigade de Bratunac au moment où Srebrenica est tombée, vous souvenez-vous

  9   qu'un ordre spécial ait été donné; et si oui, d'où émanait cet ordre ? Ou

 10   n'y a-t-il pas eu d'ordre spécial, d'après votre souvenir ?

 11   R.  Eh bien, je ne sais pas si je puis parler d'ordre spécial lorsqu'il

 12   s'agit d'escorter les prisonniers de guerre dans la période qui a suivi la

 13   chute de Srebrenica. A mon avis, il s'agissait d'une mission permanente, à

 14   savoir mission qui incombait à tout moment à la section de la police

 15   militaire. L'ordre aux fins d'escorter certains prisonniers musulmans,

 16   c'est un ordre qui était donné par l'unité qui appartenait à la police

 17   militaire. Et cet ordre serait exécuté plus particulièrement par le

 18   commandant de la section de la police militaire. En tout cas, je sais que

 19   les endroits où étaient emmenés les prisonniers étaient des endroits qui

 20   étaient fixés par le commandant du corps. Donc, après que la Brigade de

 21   Bratunac se soit renseignée sur l'endroit où les prisonniers devaient être

 22   emmenés, le commandant de la brigade recevait à ce moment-là des ordres

 23   venant du commandant du corps, et le commandant de le brigade à ce moment-

 24   là donnait un ordre à la police militaire et au commandant de la section

 25   qui exécutaient cet ordre. Si vous souhaitez connaître mon rôle dans tout

 26   ceci au sein de la brigade, eh bien, moi j'ai accueilli un certain nombre

 27   de prisonniers qui ont été emmenés au QG de la Brigade de Bratunac et je me

 28   suis occupé de toutes les questions juridiques dans le cadre de cette


Page 12269

  1   procédure -- je veux parler en fait des documents et de paperasserie. Donc

  2   la police militaire a participé à l'escorte des prisonniers de guerre à la

  3   manière dont je viens de décrire.

  4   Q.  Merci. Nous allons certainement parler bien davantage de ce qui est

  5   advenu des hommes qui ont été séparés à Potocari et des hommes qui ont été

  6   faits prisonniers le long de la route et qui ont été emmenés à Bratunac et

  7   ensuite emmenés à Zvornik. Donc nous aurons beaucoup de temps pour en

  8   parler, ainsi que du cas d'autres prisonniers de guerre qui ont été faits

  9   prisonniers après la chute de Srebrenica.

 10   M. THAYER : [interprétation] Je crois que ce document a déjà été verse au

 11   dossier, Monsieur le Président, et je vois que la cote de cette pièce à

 12   conviction est le P01297.

 13   Q.  Vous avez évoqué -- si je me souviens bien, vous avez dit que les

 14   bataillons de la Brigade de Bratunac disposaient de groupes de

 15   reconnaissance ?

 16   R.  Je ne sais pas s'ils disposaient de groupes de reconnaissance. J'ai

 17   peut-être parlé d'unités de reconnaissance. Les bataillons disposent

 18   d'escouades de reconnaissance d'après le règlement, et c'était la situation

 19   sur le terrain. Il n'y avait qu'un bataillon qui disposait d'un groupe de

 20   reconnaissance, et c'était le 2e Bataillon d'infanterie. Ce groupe

 21   fonctionnait à la fois comme une unité de la reconnaissance et une unité

 22   d'intervention, comme ils avaient l'habitude de l'appeler.

 23   Q.  Professionnellement parlant, pour ce qui est de la gestion avec

 24   beaucoup d'expertise, qui remplissait ce rôle-là par rapport à ces groupes

 25   de reconnaissance ? Qui permettait de gérer de manière experte ces groupes

 26   de reconnaissance ?

 27   R.  Si votre question porte sur la gestion au niveau du bataillon, je dois

 28   vous dire que c'est l'assistant du commandant qui s'en chargeait,


Page 12270

  1   l'assistant chargé des questions du renseignement et de la sécurité du

  2   bataillon. Et pardonnez-moi, mais je ne sais pas si vous me posez la

  3   question à propos du bataillon ou de la brigade. Je ne vous ai pas bien

  4   entendu.

  5   Q.  Je crois que vous avez fort bien compris la question, Monsieur Nikolic.

  6   R.  Fort bien.

  7   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre pourquoi les unités de

  8   reconnaissance étaient placées sous la gestion experte de l'assistant du

  9   commandant chargé des questions de renseignement et de sécurité du

 10   bataillon ?

 11   R.  Eh bien, tout simplement pour des raisons d'ordre pratique. L'assistant

 12   du commandant est le commandant en second tout de suite après le commandant

 13   du bataillon, l'officier le plus responsable lorsqu'il s'agit de rassembler

 14   les renseignements et d'autres informations qui ont trait à la zone de

 15   responsabilité du bataillon. J'ai dit dans ma déposition un peu plus tôt

 16   qu'une des manières qui permettaient d'assembler des informations ou des

 17   renseignements, c'était d'engager des unités de reconnaissance, que ce soit

 18   à l'avant des lignes ou derrière les lignes ennemies. Et ceci revêtait un

 19   très grand intérêt puisque le groupe de reconnaissance était relié

 20   directement à l'organe chargé du renseignement et de la sécurité. C'est

 21   ainsi que cela fonctionnait dans ma brigade.

 22   Si vous me le permettez, Madame, Messieurs les Juges, je souhaite ajouter

 23   quelque chose pour préciser quel rapport existait entre le groupe de

 24   reconnaissance et le reste. Dans des unités, le renseignement et la

 25   sécurité sont des fonctions distinctes. L'unité de reconnaissance est

 26   subordonnée directement au chef du renseignement, alors que la police

 27   militaire relève du chef de la sécurité et lui rend compte. Mais dans mon

 28   unité ces deux fonctions étaient associées, je veux parler de la


Page 12271

  1   reconnaissance et la police militaire qui étaient reliées directement au

  2   chef chargé de la sécurité et du renseignement, alors que dans le bataillon

  3   il était directement subordonné au commandant du bataillon chargé du

  4   renseignement et de la sécurité. Je crois que ceci permet de jeter

  5   davantage la lumière là-dessus.

  6   Q.  Alors, Monsieur Nikolic, nous allons aborder un sujet légèrement

  7   différent pendant une ou deux minutes. Je souhaite aborder le rôle ou les

  8   responsabilités qui étaient les vôtres dans la Brigade de Bratunac et qui

  9   avaient trait aux contacts que vous aviez avec la FORPRONU. Pourriez-vous

 10   décrire aux Juges de la Chambre quelles fonctions supplémentaires vous

 11   aviez eu égard aux soldats chargés du maintien de la paix, le Bataillon

 12   néerlandais de la FORPRONU.

 13   R.  Eh bien, écoutez, je vais faire de mon mieux. Donc, outre les fonctions

 14   et obligations normales qui faisaient partie de mes attributions en tant

 15   que chef du renseignement et des questions de sécurité, en vertu d'un ordre

 16   qui avait été donné par le Corps de la Drina, j'ai été désigné pour être

 17   officier de liaison entre la Brigade de Bratunac et des membres de la

 18   FORPRONU dans la plupart des cas, parce que cela ne signifiait pas

 19   seulement la FORPRONU, mais toutes les autres organisations internationales

 20   qui se trouvaient dans l'enclave. Je veux parler plus particulièrement des

 21   observateurs militaires des Nations Unies, de Médecins sans frontières et

 22   d'autres organisations. Bien évidemment, lorsqu'on parle de la FORPRONU,

 23   j'étais en contact avec le Bataillon néerlandais.

 24   Q.  Lorsque vous parlez des MO, je suppose que vous voulez parler des

 25   observateurs militaires des Nations Unies ?

 26   R.  Oui, oui, c'est cela dont je parle.

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer, je crois que vous

 28   n'avez besoin que d'un microphone.


Page 12272

  1   M. THAYER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

  2   vais garder cela à l'esprit.

  3   Q.  Monsieur, aviez-vous des homologues dans les unités voisines de la VRS

  4   et qui avaient les mêmes fonctions que vous, autrement dit, assurer la

  5   liaison entre la brigade et la FORPRONU ?

  6   R.  Oui. La brigade qui se trouvait à proximité était la Brigade de Milic,

  7   et l'officier -- le chef d'état-major de la Brigade de Milic, Sargic --

  8   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise n'a pas entendu le nom de

  9   famille.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] -- et une brigade qui était à proximité de la

 11   Brigade de Bratunac était la Brigade indépendante de Skelani, et dans le

 12   secteur de Pribicevac, où le commandement du 3e Bataillon, où se trouve le

 13   3e Bataillon d'infanterie de la Brigade de Bataillon [comme interprété],

 14   ainsi que le quartier général du Bataillon indépendant de Skelani, il y

 15   avait ce qui était communément appelé le poste de commandement avancé --

 16   pardonnez-moi, non, je me trompe. Je voulais dire le Groupe tactique de

 17   Pribicevac qui était composé, d'après les éléments dont je disposais, du

 18   colonel Vukota Vukovic et son chauffeur. Cela représentait le groupe

 19   tactique dans sa totalité. Le colonel Vukovic était un officier qui devait

 20   maintenir les contacts, d'après ce que je sais, encore une fois, avec la

 21   partie adverse, et ce, pour le compte du général Milovanovic. Mais ses

 22   contacts - je veux parler du colonel Vukovic - n'avaient que lieu avec le

 23   Bataillon de Skelani et le secteur de Pribicevac.

 24   Bien, dans ce groupe, il y avait le colonel Vukovic Vukota, le commandant

 25   Sargic, le capitaine Vukovic, en résumé, et nous étions responsables de la

 26   liaison entre ces entités parce que nous avions tous différents problèmes à

 27   régler dans nos secteurs respectifs.

 28   M. THAYER : [interprétation]


Page 12273

  1   Q.  Je remarque à la page 53, ligne 7, Monsieur, ce que nous avons ici sur

  2   nos écrans au niveau du compte rendu d'audience, eh bien, c'est ceci, vous

  3   dites que le colonel Vukovic était un officier qui était responsable du

  4   maintien du contact, encore une fois, d'après ce que je sais, avec la

  5   partie adverse, et ce, pour le compte du colonel Milovanovic.

  6   Je souhaite m'assurer que c'était bien cela que vous vouliez dire.

  7   R.  Je crois que j'ai dit le général Zivanovic.

  8   Q.  Je souhaitais simplement préciser aux fins du compte rendu d'audience.

  9   M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que nous

 10   sommes arrivés au moment de la pause.

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, nous devons maintenant avoir

 12   notre deuxième pause. Et nous reprendrons à 18 heures 15.

 13   --- L'audience est suspendue à 17 heures 45.

 14   --- L'audience est reprise à 18 heures 18.

 15   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Thayer, veuillez poursuivre.

 16   M. THAYER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame, Monsieur

 17   les Juges.

 18   Q.  Rebonjour, Monsieur. Juste avant la pause, nous avons parlé de votre

 19   rôle en tant qu'officier de liaison auprès du Bataillon néerlandais et

 20   d'autres organisations internationales, et j'aimerais maintenant parler

 21   quelques instants du Bataillon néerlandais. Pourriez-vous, je vous prie,

 22   donner aux Juges de la Chambre quels types de sujets ont-ils été abordés

 23   lors des réunions qui avaient lieu avec les représentants du Bataillon

 24   néerlandais en votre présence ?

 25   R.  Je peux seulement vous dire ce dont nous parlions, quels étaient les

 26   sujets qui étaient abordés, et je peux vous dire pourquoi nous les

 27   rencontrions. Le Bataillon néerlandais et les représentants du Bataillon

 28   néerlandais -- en fait, pour être plus précis, nous avions des contacts


Page 12274

  1   principalement pour discuter des questions -- enfin, dans la majeure partie

  2   des cas, des questions relatives aux problèmes qui se présentaient à

  3   l'intérieur de l'enclave et à l'extérieur de l'enclave, donc sur les lignes

  4   de séparation des parties belligérantes. Par la suite, nous parlions

  5   souvent de leurs demandes et des problèmes qu'ils avaient, mais nous

  6   parlions la plupart du temps des incidents -- en fait, nous essayions de

  7   résoudre les problèmes qui surgissaient entre les deux parties

  8   belligérantes. Pour vous donner un exemple, l'un des problèmes majeurs au

  9   cours de cette période, pendant que les Néerlandais étaient présents dans

 10   l'enclave, étaient des problèmes liés au maintien de la paix sur la ligne

 11   de séparation et la prévention d'incidents qui, principalement, portaient

 12   sur les embuscades, les sorties de l'enclave, des tirs vers l'enclave par

 13   des tireurs embusqués sur la population de l'enclave par ces derniers.

 14   Ensuite, il a été sujet de toutes sortes d'embuscades, d'infiltrations, de

 15   raids, donc tout ceci était abordé lorsqu'il a été question de la ligne de

 16   séparation et de la situation dans l'enclave et à l'extérieur de l'enclave.

 17   Donc, c'est en principe les questions qui étaient abordées. Mais si vous

 18   voulez que j'entre plus en détail, je peux le faire, certainement.

 19   Q.  Lorsque vous avez fait référence aux embuscades, les sorties de

 20   l'enclave et les raids, à quoi pensiez-vous ?

 21   R.  Je veux maintenant vous expliquer quelle était la situation sur la

 22   ligne de front. Je vais me limiter à l'endroit où mes brigades étaient

 23  engagées, donc le 1er et le 3e Bataillons d'infanterie, et, par la suite, un

 24   bataillon de la Brigade d'infanterie plus tard. Il s'agissait d'une ligne

 25   qui, pour vous donner une idée, comme ça, par cœur, cette ligne faisait

 26   environ 25 jusqu'à 30 kilomètres. Cette ligne était couverte par les

 27   bataillons de ma brigade et, également plus tard, par le bataillon de la

 28   Brigade de Zvornik. Donc, étant donné que la ligne était assez longue, très


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  1   souvent il arrivait que ce genre d'incidents survienne. Donc, on

  2   s'approchait depuis l'enclave, en fait, on se rapprochait des positions

  3   serbes, on ouvrait le feu, on tire sur les soldats ou on les tue par des

  4   fusils à lunette, et aussi, il y avait l'armée serbe qui se trouvait autour

  5   de l'enclave.

  6   Puisque je parle de la zone de responsabilité de ma brigade, il y

  7   avait donc des soldats serbes qui se trouvaient à l'extérieur qui étaient

  8   en contact avec certains lieux habités, y compris Potocari et d'autres

  9   villages, pour ne pas tous les énumérer. Depuis la position de mon unité ou

 10   de ma brigade, on effectuait également des tirs par tireurs embusqués, on

 11   tuait des personnes, on blessait les personnes. En majorité, la plus grande

 12   partie de ces tirs par fusils à lunette se faisait comme ça, sans vraiment

 13   objectif précis, en tirant sur les personnes qui devaient faire l'objet de

 14   tirs, les personnes qui portaient des fusils, mais très souvent, les cibles

 15   étaient des civils qui travaillaient dans leurs champs, qui soit couvraient

 16   leurs maisons ou qui travaillaient dans le champ, qui labouraient la terre,

 17   et ainsi de suite. Donc, s'agissant de toutes les situations,

 18   indépendamment des raisons, les représentants du Bataillon néerlandais et

 19   moi-même, nous nous rencontrions pour essayer de résoudre ces problèmes

 20   afin qu'ils ne se présentent plus, de minimiser ce type de problème.

 21   Q.  Vous souvenez-vous si les représentants du Bataillon néerlandais

 22   s'étaient plaints concernant des raids qui étaient plus grands qu'un soldat

 23   musulman, comme vous nous l'avez expliqué, se tenant derrière son fusil à

 24   lunette et tirant sur une personne ? Est-ce que le Bataillon néerlandais ne

 25   s'est jamais plaint -- je reprends ma question. Vous ne vous êtes jamais

 26   plaint au représentant du Bataillon néerlandais concernant des groupes de

 27   personnes de combattants musulmans, des groupes plus larges, quittant

 28   l'enclave pour cibler les cibles serbes à l'extérieur de l'enclave ? Vous


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  1   avez parlé d'un cas où il y avait un soldat musulman qui tirait près de la

  2   ligne avec un fusil à lunette. Est-ce que vous vous souvenez si vous vous

  3   êtes plaint au Bataillon néerlandais concernant des groupes plus larges de

  4   combattants se livrant aux raids et préparant des embuscades ?

  5   R.  Eh bien, je peux vous confirmer qu'à chaque fois que j'avais raison de

  6   me plaindre de quelque chose, je le faisais. Je ne peux pas vous énumérer

  7   de cas précis, mais je me souviens de certains, bien sûr, certains cas.

  8   Mais il est certain qu'à chaque fois que j'avais des raisons de porter

  9   plainte, de me plaindre, j'en parlais au représentant du Bataillon

 10   néerlandais pour voir ce que nous pouvions faire pour que ceci ne se

 11   reproduise plus, pour empêcher ce genre d'événements, et il y avait des cas

 12   comme ça, effectivement.

 13   Q.  Vous avez fait référence au Bataillon de Zvornik. Pourriez-vous, s'il

 14   vous plaît, nous préciser à quoi faisiez-vous référence exactement ?

 15   R.  Je pensais au bataillon qui pendant une certaine période était engagé

 16   autour de l'enclave. J'ignore la période exacte. Je ne sais pas à quel

 17   moment ils sont arrivés. Je présume, selon les ordres de qui, ils se sont

 18   trouvés là, mais je ne connais pas les détails exacts. Donc, ils étaient

 19   déployés sur une partie qui était particulièrement militairement non

 20   réglée. Il s'agit d'un espace entre la Brigade de Bratunac et de Milici.

 21   Dans cet espace de "no man's land" entre ces deux zones, il y avait un

 22   terrain qui n'était pas couvert. Et c'était avant l'opération de

 23   Srebrenica, c'est à ce moment-là que le Bataillon de Zvornik était engagé

 24   dans cette zone et il y est resté jusqu'à la chute de Srebrenica.

 25   Q.  Les soldats du Bataillon de Zvornik provenaient d'où; est-ce que vous

 26   le savez ?

 27   R.  J'ignore réellement d'où ils venaient. S'ils étaient membres de la

 28   Brigade de Zvornik ou si leurs unités étaient la Brigade de Zvornik, je


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  1   peux seulement présumer qu'il s'agissait des conscrits militaires de la

  2   municipalité de Zvornik.

  3   Q.  Et lorsqu'ils étaient déployés sur cet espace dont vous nous avez

  4   parlé, étaient-ils subordonnés à la Brigade de Bratunac ?

  5   R.  Oui, oui, dans le sens du commandement mais dans le sens de la

  6   logistique. Et je sais que j'ai participé aux réunions et ils offraient un

  7   soutien logistique qui provenait de la base de logistique de la Brigade de

  8   Bratunac.

  9   Q.  Très bien. Pendant les contacts que vous aviez avec les représentants

 10   du Bataillon néerlandais, est-ce que vous leur avez en effet dit quelles

 11   étaient votre position et votre fonction au sein de la Brigade de Bratunac,

 12   à savoir que vous étiez le chef chargé du renseignement et de la sécurité ?

 13   R.  Non, pas vraiment. Non, je ne les ai pas informés de mon titre, de

 14   quelles étaient mes responsabilités et mes tâches. Des fois, nous blaguions

 15   sur le sujet. Ils essayaient de devenir quelles étaient mes vraies tâches

 16   et responsabilités. En réalité, je ne leur ai jamais dit ce que je faisais

 17   exactement. Mais ils pensaient que j'étais le chef de l'état-major de la

 18   Brigade de Bratunac, chose que j'ai ni infirmée ni confirmée.

 19   Q.  Poursuivez, je vous prie.

 20   R.  Mais ils ne m'ont pas non plus dit exactement quelles étaient leurs

 21   tâches et responsabilités. Eux non plus, ils n'étaient pas honnêtes envers

 22   moi. C'est ce que j'ai su plus tard. Je n'ai pas non plus appris avec

 23   exactitude ce que chacun d'eux faisaient réellement.

 24   Q.  Qu'est-ce qui vous a amené à ne confirmer ni infirmer votre véritable

 25   poste au sein de la brigade ?

 26   R.  Je ne sais pas. A vrai dire, même aujourd'hui je ne serais pas capable

 27   de vous le dire. Je pensais qu'il n'y avait pas besoin et il n'y avait pas

 28   lieu que l'on rende compte les uns aux autres de nos activités dans nos


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  1   unités respectives. Pour être tout à fait sincère, je me suis dit qu'il

  2   allait m'être plus facile de fonctionner, de travailler, puis de garder

  3   cela comme un petit secret. C'était rien de particulièrement important.

  4   Même maintenant, je ne saurais pas vous expliciter au juste les raisons,

  5   mais quelque chose de cet ordre.

  6   Q.  Je vous invite maintenant à parler du commandement de la Brigade de

  7   Bratunac, de son attitude avant l'année 1995 et de leur attitude vis-à-vis

  8   de la population musulmane de Srebrenica.

  9   M. THAYER : [interprétation] Alors, avant d'aborder ce sujet, nous avons

 10   déjà évoqué dans le chapitre précédent, c'est une série de questions, et si

 11   vous avez des questions -- si les Juges de la Chambre ont des questions à

 12   ce stade --

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Non.

 14   M. THAYER : [interprétation] D'accord.

 15   Q.  Avant 1995, saviez-vous que le commandant de la Brigade de Bratunac ait

 16   fait des déclarations relatives à la population musulmane de l'enclave de

 17   Srebrenica, et au sujet des objectifs qui seraient ceux de la brigade vis-

 18   à-vis de cette population ? Je me réfère maintenant au commandant

 19   Ognjenovic.

 20   R.  Oui. Dans la traduction, on me demande si je suis au courant des

 21   déclarations, mais je vais vous répondre de la manière suivante. Vous avez

 22   parlé du commandant Ognjenovic. Il ne s'agit pas d'une déclaration. Il

 23   s'agit d'un mémo qui a été signé par le lieutenant-colonel Ognjenovic et

 24   qui porte sur les questions que vous énoncez dans votre question. Bien sûr

 25   que je suis au courant de ce mémo.

 26   Q.  Alors, est-ce que vous pourriez en parler aux Juges de la Chambre.

 27   R.  Il s'agit d'un mémo qui date de 1994, qui a été rédigé par mon

 28   commandant de l'époque, le lieutenant-colonel Ognjenovic. Dans ce mémo, si


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  1   mes souvenirs sont bons, tout simplement ce qu'il fait c'est de faire

  2   valoir son opinion sur la situation qui prévaut sur ce territoire et, entre

  3   autres, il évoque son opinion par rapport à cette enclave, ou la population

  4   de l'enclave. Il dit à un moment qu'il faut prendre toutes les mesures qui

  5   s'imposent vis-à-vis de cette enclave, tout ce qui rendrait la vie

  6   impossible dans l'enclave - je ne peux pas citer verbatim - donc tout ce

  7   qui rendrait la vie impossible, insupportable dans l'enclave pour que les

  8   Musulmans, vu cet état de choses, finissent par quitter le territoire de

  9   l'enclave.

 10   Je ne sais pas pour sûr qui a demandé que l'on rédige ce mémo. Je ne

 11   sais pas qui l'a commandité, mais ce que je sais, c'est que le commandant

 12   Ognjenovic l'a élaboré de concert avec des membres du commandement de la

 13   Brigade de Bratunac, y compris les chefs de bataillon présents à cette

 14   réunion. Toutes les personnes présentes à la réunion ont connu le contenu

 15   de ce mémo. Et puis le lieutenant-colonel Ognjenovic a émis un ordre, et

 16   cet ordre ordonnait à tous chefs de bataillon de porter à la connaissance

 17   de tous les officiers le contenu du document.

 18   Et par la suite, les chefs de compagnie devaient porter cela à la

 19   connaissance de tous les militaires, tous les soldats de toutes les unités

 20   déployées le long de la ligne de confrontation. Alors, d'après ce que je

 21   sais - pour sûr - tous les membres de la Brigade de Bratunac, donc tous les

 22   officiers ainsi que tous les soldats, ont connu la teneur de ce mémo qui a

 23   été élaboré et rédigé au commandement de la Brigade de Bratunac.

 24   Q.  Alors, voyons ce document.

 25   M. THAYER : [interprétation] Le 65 ter 2364. Le premier paragraphe dans les

 26   deux versions, s'il vous plaît.

 27   Q.  Voyez-vous le document qui s'affiche, Monsieur ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Le texte est-il lisible ?

  2   R.  Oui, oui.

  3   Q.  Alors, dites-nous, quel est ce document que nous voyons à l'écran ?

  4   R.  D'après ce que je vois, cela doit être le mémo dont je viens de parler.

  5   Donc c'est une information à l'attention des membres de la Brigade de

  6   Bratunac, et nous voyons le nom de la brigade dans l'en-tête. Et donc, ce

  7   document date de 1994.

  8   Q.  Nous voyons qu'il porte la date du 4 juillet 1994. Sur la droite, on

  9   lit "Jedinici" et il y a quelque chose qui a été écrit dans la suite. Est-

 10   ce que vous pouvez nous dire ce que c'est, Monsieur ?

 11   R.  Oui. C'est le 3e Bataillon d'infanterie. C'est l'abréviation qui

 12   signifie cela.

 13   Q.  Je vous invite à examiner le premier paragraphe. Ce paragraphe commence

 14   par les propos suivants :

 15   "Lors de sa récente visite rendue au commandement de notre corps, le

 16   commandant de l'état-major principal de la VRS a laissé entendre que

 17   rapidement il se rendrait auprès de différentes unités du corps…"

 18   Alors, lorsqu'on parle du commandement du corps, Monsieur, de quoi

 19   s'agit-il ?

 20   R.  Le commandement du corps, c'est le premier commandement supérieur

 21   direct, donc de la Brigade de Bratunac, c'est d'elle qu'il s'agit et de

 22   toutes les unités qui font partie du corps d'armée.

 23   Q.  En juillet 1994, vous rappelez-vous où était situé le commandement du

 24   Corps de la Drina ?

 25   R.  Pour autant que je sache, à Vlasenica.

 26   Q.  Et en juillet 1994, qui était le commandant de l'état-major principal

 27   de la VRS ?

 28   R.  Le général Ratko Mladic était le commandant de l'état-major principal.


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  1   Q.  Au premier paragraphe, je cite, il est dit :

  2    "Cet élément d'information est contraignant pour toutes les unités

  3   et tous les membres des brigades afin qu'ils mènent à bien tous les

  4   préparatifs dans les commandements et les unités relativement aux questions

  5   du niveau de préparation au combat, pour que cet état, ce niveau

  6   corresponde à notre réputation, à la réputation de notre brigade."

  7   Est-ce que vous pouvez nous expliquer cela ?

  8   R.  Je peux commenter ce qui est écrit ici. Donc c'est une réunion qui se

  9   tient, je suppose, au commandement du Corps de la Drina. Le commandant de

 10   l'état-major principal est présent. Je suppose que lors de cette réunion,

 11   si j'ai bien compris ce que vous avez lu, il doit se rendre, entre autres,

 12   auprès de la Brigade de Bratunac. Et tout simplement, on impose à toutes

 13   les unités de maintenir le niveau de préparation au combat de telle sorte

 14   qu'il soit exemplaire si le commandant venait à le vérifier.

 15   M. THAYER : [interprétation] Page 2, s'il vous plaît, dans les deux

 16   versions. Vous pouvez garder la page en B/C/S de la manière dont elle se

 17   présente maintenant et il faudra montrer le texte plus loin dans la version

 18   anglaise.

 19   Q.  Monsieur, voyez-vous dans l'original l'endroit où le colonel Ognjenovic

 20   écrit :

 21   "Nous avons remporté la guerre, mais nous n'avons pas achevé les

 22   Musulmans."

 23   M. THAYER : [interprétation] Il nous faut tourner la page.

 24   Q.  Donc : "Nous avons remporté la guerre dans Podrinje, mais nous n'avons

 25   pas achevé les Musulmans, ce que nous devons faire pendant la période qui

 26   est devant nous. Nous devons atteindre" --

 27   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] De nouveau --

 28   M. THAYER : [interprétation]


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  1   Q.  "Nous devons atteindre notre objectif final, à savoir que toute la

  2   région de Podrinje devienne serbe. Les enclaves de Srebrenica, Zepa et

  3   Gorazde doivent être battues militairement.

  4   "Nous devons continuer d'équiper, de former et de discipliner sans

  5   arrêt l'armée de la Republika Srpska et la préparer pour qu'elle mène à

  6   bien cette mission décisive, à savoir l'expulsion des Musulmans de

  7   l'enclave de Srebrenica."

  8   Je vais m'arrêter là, Monsieur, pendant quelques instants. Ce que je viens

  9   de vous lire et les termes employés décrivent ce qui ressemble à une action

 10   militaire. Comme vous étiez un officier de la VRS en 1994 et 1995, est-ce

 11   que le fait de vouloir vaincre les forces ennemies constituait quelque

 12   chose de contraire à ce qui devait être fait ?

 13   R.  En tant qu'officier de la VRS, je ne vois pas de mal à ce que l'on

 14   souhaite battre ou vaincre la partie adverse ou l'ennemi. Il s'agit d'un

 15   objectif militaire public et, en tant que soldat, je puis vous dire que

 16   ceci n'est pas contestable.

 17   Q.  Le colonel Ognjenovic poursuit dans ce document et dit - et cela se

 18   trouve à la même page dans l'original - au paragraphe suivant, il indique

 19   que :

 20   "Il n'y aura pas de retraite pour ce qui est de l'enclave de Srebrenica, il

 21   nous faut à tout prix avancer. La vie de l'ennemi doit être rendue

 22   insupportable et leur séjour provisoire dans l'enclave doit être rendu

 23   impossible de façon à ce qu'ils quittent l'enclave en masse le plus tôt

 24   possible, qu'ils se rendent compte qu'ils ne pourront pas survivre là."

 25   Veuillez dire aux Juges de la Chambre, Monsieur, quel message est transmis

 26   par le colonel Ognjenovic aux membres de la Brigade de Bratunac.

 27   R.  Vous savez, je pourrais commenter ce qui est écrit là pendant trois

 28   jours. Je pourrais commenter chaque mot, chaque phrase. D'un côté, je


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  1   serais d'accord, et d'un côté, je ne serais absolument pas d'accord avec ce

  2   qui est écrit ici si je ne savais pas ce qui est arrivé après dans

  3   l'enclave de Srebrenica. En revanche, étant donné que je sais quels

  4   problèmes j'ai eus en raison de ces informations, c'est la raison pour

  5   laquelle je puis dire en toute franchise que je ne suis pas du tout

  6   d'accord avec un seul mot utilisé pour décrire l'opération de Srebrenica et

  7   les actions qui doivent être menées.

  8   Pourquoi ne suis-je pas d'accord ? Eh bien, c'est simple. Au cours de

  9   cette période, on insistait sur la confiance et la coopération avec le

 10   Bataillon néerlandais et les forces néerlandaises qui étaient des forces

 11   qui devaient assurer la protection de l'enclave. Nous avions pour

 12   obligation - et je veux parler de l'obligation du côté serbe, obligation

 13   que nous avions reconnue comme étant la nôtre -- et je parlais toujours de

 14   cette obligation parce que j'assistais aux réunions - j'ai indiqué que les

 15   frontières de l'enclave ne devaient pas être modifiées, qu'il ne devait pas

 16   y avoir d'attaques, qu'il ne devait y avoir aucune action de combat, que ni

 17   la FORPRONU ni les Musulmans ne devaient être inquiétés, et j'ai toujours

 18   insisté là-dessus.

 19   En revanche, il y avait quelqu'un qui était mon supérieur

 20   hiérarchique, mon commandant, et lui rédige un document dans lequel il

 21   demande à ce que toutes les questions que j'avais réussi à résoudre avec le

 22   Bataillon néerlandais, eh bien, ce sont des choses qu'il minimise et c'est

 23   lui qui doit donner le feu vert par rapport à tout ce qui avait été

 24   interdit dans l'enclave. Et donc, le but avait été de rendre la vie des

 25   habitants de l'enclave insupportable de façon à ce que les personnes y

 26   vivant quittent l'enclave le plus rapidement possible.

 27   Moi j'aurais pu être d'accord avec le lieutenant-colonel Ognjenovic

 28   s'il avait dit qu'il rendait la vie des soldats ennemis insupportable, s'il


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  1   s'agissait d'un problème militaire ou d'une question militaire. En

  2   revanche, ce qui est écrit ici décrit, bien évidemment, toute le population

  3   de Srebrenica, ce qui signifie qu'il n'y a eu aucune distinction entre les

  4   civils et les autres personnes dans l'enclave, et tout ce qui est arrivé a

  5   eu des conséquences négatives pour les civils. Voilà pourquoi ce type

  6   d'information pose problème. Nous constatons que la violence était devenue

  7   licite, que les infractions aux violations de cessez-le-feu étaient

  8   devenues légales, et les raisons de la présence de la FORPRONU également.

  9   Et tout ce qui avait été abordé pendant ces réunions.

 10   Je souhaite le dire aux Juges de la Chambre pour que les Juges

 11   sachent, la personne qui a rédigé cela est un homme politique. Avant la

 12   guerre, c'est quelqu'un qui n'assurait aucun commandement, croyez-moi. A

 13   mon avis, il s'agit d'un pamphlet politique vulgaire et arrogant. Ceci a

 14   été envoyé à toutes les unités. Mais on ne peut pas justifier cela. A mes

 15   yeux, c'était mon commandant à l'époque et rien ne permet de justifier ces

 16   propos-là, tout simplement parce qu'il n'avait jamais assumé de

 17   commandement avant cette date-là.

 18   Q.  Regardons la page 6, et je vais vous poser encore un certain nombre de

 19   questions.

 20   M. THAYER : [interprétation] C'est à la page 3 en B/C/S. Page 6 de

 21   l'anglais. Est-ce que nous pouvons regarder le tout dernier paragraphe en

 22   B/C/S.

 23   Q.  Nous voyons au-dessus de la signature du colonel Ognjenovic et le

 24   tampon de la brigade : 

 25   "Veuillez disséminer ce rapport parmi tous les membres de la brigade

 26   et qu'ils signent. Examinez le rapport des compagnies. Les assistants

 27   chargés des questions de moral doivent le présenter aux bataillons. Et

 28   l'assistant chargé des questions morales, religieuses et juridiques a pour


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  1   responsabilité de présenter cela au commandement de la brigade et des

  2   unités de l'état-major, et en même temps, il sera tenu responsable de

  3   l'interprétation exacte de ce rapport au niveau de la brigade."

  4   Veuillez nous dire comment ces propos qui émanent du colonel

  5   Ognjenovic ont été perçus. Qu'a-t-il été fait suite à ces propos ?

  6   R.  Eh bien, si vous voulez parler du dernier paragraphe, tout ce qui est

  7   dit ici et tout ce qui est ordonné ici a été mis en œuvre. Le commandant

  8   Ognjenovic a écrit cela, ensuite ceci a été lu et a fait l'objet de débat

  9   lors de la réunion organisée par le commandant de la brigade en présence

 10   des commandants de brigade et des commandants de bataillon. Ceci était

 11   appliqué par l'assistant du commandant chargé des questions morales et

 12   religieuses. Il a préparé un exemplaire à l'attention de chaque commandant

 13   du bataillon. Donc les commandants de bataillon disposaient de ces

 14   informations et les ont analysées, examinées dans leurs compagnies

 15   respectives.

 16   Q.  Alors, la dissémination de ce rapport aux bataillons et aux unités

 17   subordonnées était-elle considérée comme facultative, Monsieur ?

 18   R.  Eh bien, je ne dirais pas cela. Chaque élément d'information ou chaque

 19   ordre qui vient d'un commandant ne peut pas être facultatif. En tout cas,

 20   c'est ainsi que je comprends les choses, et en lisant ce document, à mon

 21   sens, il s'agit d'un ordre qui est donné par le commandant à propos de ce

 22   qui doit être fait à propos de ces éléments d'information. D'après ce que

 23   je sais, il était obligatoire d'analyser ces éléments-là au niveau du

 24   commandement et au niveau de la brigade. Moi, je ne vous dis rien comme ça

 25   d'office. Je sais que ces éléments d'information sont parvenus aux

 26   bataillons et que les membres de ces bataillons se sont familiarisés avec

 27   la teneur de ce document. La conséquence de ces informations est qu'il y a

 28   eu un manque total de discipline le long de la ligne de séparation, il y a


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  1   une intensification des tirs isolés ainsi que d'autres incidents qui se

  2   sont produits suite à ces informations. Moi, je disais autrefois que ces

  3   informations constituaient un prétexte ou un alibi pour intensifier les

  4   tirs de tireurs embusqués et autres incidents qui se sont produits.

  5   M. THAYER : [interprétation] Monsieur le Président, je remarque que nous

  6   sommes à deux minutes de la fin de l'audience d'aujourd'hui. J'ai un

  7   nouveau thème que je souhaite aborder. Dans l'intervalle, je souhaite

  8   demander le versement au dossier de cette pièce, s'il vous plaît. C'est le

  9   2364, numéro 65 ter 2364.

 10   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je souhaite poser la question

 11   suivante au témoin.

 12   Ici, nous voyons le nom de Slavko Ognjenovic qui a signé ce document. Vous

 13   avez dit que c'était un homme politique, si je vous ai bien compris, mais

 14   nous voyons dans ce document qu'il était lieutenant-colonel. Etait-ce

 15   également un militaire, pourriez-vous m'aider à comprendre, s'il vous plaît

 16   ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Pardonnez-moi. J'ai peut-être semé la

 18   confusion. Le lieutenant-colonel Ognjenovic était bien sûr un militaire

 19   d'active. C'était un commandant de brigade. Cependant, avant de rejoindre

 20   la Brigade de Bratunac, il travaillait comme conférencier, je crois, dans

 21   le centre de Rajlovac. Et d'après ce que je sais, il enseignait les

 22   matières politiques telles que le Marxisme, et cetera. C'est la raison pour

 23   laquelle j'ai dit que c'était un homme politique plutôt qu'un commandant.

 24   Il faut établir une différence entre les personnes qui assuraient un

 25   commandement de bataillons en temps de paix, et de compagnies, et ceux qui

 26   étaient des soldats de carrière et qui n'occupaient aucun poste de

 27   commandement d'unité avant la guerre. C'est ce que j'ai voulu dire lorsque

 28   j'ai dit cela.


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  1   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] C'était fort utile. Je vous remercie.

  2   Vous souvenez-vous à quel moment M. Ognjenovic a été nommé commandant de la

  3   Brigade de Bratunac ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne le sais vraiment pas. Cela relevait des

  5   attributions des services du personnel. Il a été nommé commandant à deux

  6   reprises, donc je ne souhaite pas me livrer à un jeu de devinette. Je ne

  7   sais vraiment pas.

  8   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

  9   Ce document sera versé au dossier.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur

 11   les Juges, numéro 65 ter 02364 aura la cote P2158.

 12   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 13   Madame le Juge Nyambe a une question à poser au témoin.

 14   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Je vous remercie. Je vais peut-être

 15   tout simplement évoquer cet homme que vous décrivez comme étant un homme

 16   politique plutôt qu'un commandant. Savez-vous si c'est un soldat qui a reçu

 17   une formation, si c'est un militaire ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, cela va sans dire. Tout le personnel

 19   militaire d'active, y compris ce que je sais, je peux dire que le

 20   commandant Slavko Ognjenovic était un militaire qui était allé à l'académie

 21   militaire. Il avait reçu plusieurs formations. Je ne sais pas quel était

 22   son domaine de prédilection, je ne sais pas s'il y avait une matière qu'il

 23   avait étudiée plus particulièrement à l'académie militaire, je ne sais pas

 24   s'il a reçu son diplôme dans le domaine de l'infanterie ou de l'artillerie

 25   ou de systèmes de communications ou quelque chose de la sorte. Je ne sais

 26   vraiment pas.

 27   Mme LE JUGE NYAMBE : [interprétation] Je vous remercie de votre réponse.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Il nous faut lever l'audience pour


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  1   aujourd'hui et nous reprendrons demain matin dans ce même prétoire à 9

  2   heures.

  3   --- L'audience est levée à 19 heures 03 et reprendra le mardi 5 avril 2011,

  4   à 9 heures 00.

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