Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 23 février 2010

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

  6   Messieurs les Juges, bonjour à tout le monde dans le prétoire et autour du

  7   prétoire. C'est l'affaire numéro IT-08-91-T, le Procureur contre Mico

  8   Stanisic et Stojan Zupljanin.

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Madame la Greffière. Bonjour à

 10   tout le monde. Est-ce qu'on peut commencer d'abord par la présentation des

 11   parties, comme d'habitude.

 12   Mme KORNER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Joanna Korner

 13   pour l'Accusation, avec notre commis à l'affaire, Jasmina Bosnjakovic.

 14   M. CVIJETIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Pour M.

 15   Stanisic, Slobodan Cvijetic et Mlle Tatjana Savic.

 16   M. PANTELIC : [interprétation] Pour la Défense de Zupljanin, Igor Pantelic

 17   et Dragan Krgovic. Merci.

 18   M. LE JUGE HALL : [interprétation] S'il n'y a pas de questions

 19   préliminaires, est-ce qu'on peut faire entrer le témoin dans le prétoire.

 20   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, avant que le témoin

 21   n'entre, il faut que je dise pour ce qui est du Témoin 213, nous avons

 22   demandé des procédures de protection. Il va venir la semaine prochaine. Si

 23   j'ai bien compris dans notre entretien avec M. Krgovic, il n'y avait pas

 24   d'objection de la part de la Défense pour ce qui est des mesures de

 25   protection. Je ne sais pas s'il y a d'autres objections pour ce qui est de

 26   ces mesures de protection, donc j'aimerais bien que la décision soit prise

 27   pour ce qui est des mesures de protection pour ce témoin. Cela nous serait

 28   très utile.

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  1   M. KRGOVIC : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection par rapport à

  2   cela, Monsieur le Président.

  3   M. CVIJETIC : [interprétation] Nous non plus.

  4   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

  5   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  6   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Avant d'inviter Mme

  7   Korner à continuer, je vous rappelle que vous êtes toujours tenu par la

  8   déclaration solennelle que vous avez prononcée.

  9   LE TÉMOIN : DRAGO BOROVCANIN [Reprise]

 10   [Le témoin répond par l'interprète]

 11   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, Madame Korner.

 12   Mme KORNER : [interprétation] Merci.

 13   Interrogatoire principal par Mme Korner : [Suite]

 14   Q.  [interprétation] Monsieur Borovcanin, ce matin, avant de continuer à

 15   parler des documents et de présenter des documents dans cette affaire,

 16   j'aimerais parler de deux choses. D'abord, nous avons vu que Me Cvijetic

 17   était chef du CSB pendant la période en question. Est-ce qu'il est toujours

 18   en vie ?

 19   R.  Non. Il est mort en janvier 1993. Il a été tué en janvier 1993.

 20   Q.  Bien. Pour ce qui est de la deuxième question, c'est les transcriptions

 21   des conversations interceptées. On vous a demandé d'écouter un certain

 22   nombre de ces conversations interceptées.

 23   Mme KORNER : [interprétation] Cela a été mentionné dans les notes de séance

 24   de récolement.

 25   Q.  Pourriez-vous me dire si vous étiez en mesure de reconnaître la voix de

 26   Mico Stanisic -- ne vous occupez pas de ces chiffres que je vais lire.

 27   Après avoir écouté ces transcriptions, numéro 2695 et jusqu'à 1088 et 1090

 28   65 ter, vous avez été en mesure de reconnaître la voix de Miljenko

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  1   Borovcanin. C'était 1090 et 1054. Vous avez pu reconnaître la voix de Mico

  2   Stanisic ?

  3   Pouvez-vous d'abord dire qui est Milenko Borovcanin ? Est-ce que c'est

  4   votre cousin, peut-être ?

  5   R.  Milenko n'est pas mon cousin. Je n'ai aucun lien de parenté avec lui.

  6   Je ne sais pas si vous allez comprendre la chose suivante : Nous, les

  7   Orthodoxes, si on n'a pas les mêmes fêtes religieuses, nous n'appartenons

  8   pas à une même tribu, en quelque sorte. Nous ne faisons pas partie d'une

  9   même famille plus large. Nous portons seulement le même nom de famille.

 10   Q.  Savez-vous quelle était sa fonction en 1992 ?

 11   R.  Avant la guerre, juste la veille de la guerre, il travaillait au poste

 12   de police Novi Grad, et pendant la guerre je pense qu'il était adjoint du

 13   chef du poste de police à Rajlovac, qui était en cours d'être créé à

 14   l'époque.

 15   Q.  Je pense que vous avez également reconnu la voix de Karisik, qui était

 16   chef de la police spéciale, pour ce qui est de la conversation interceptée

 17   qui porte les numéros 1091 et 1095, n'est-ce pas ?

 18   R.  Je ne me souviens pas avec qu'il a parlé, mais je pense que j'ai

 19   reconnu sa voix.

 20   Q.  Merci. C'est tout ce que j'ai voulu vous poser comme questions

 21   concernant ces conversations interceptées. Mais j'ai encore une question à

 22   vous poser concernant un autre sujet.

 23   Etiez-vous au courant du fait -- ou plutôt, saviez-vous quelles

 24   étaient les régions autonomes serbes, en particulier Romanija-Birac, la

 25   région autonome serbe ?

 26   R.  Je n'étais pas au courant de cela. Seulement plus tard, lorsque cela

 27   était diffusé dans les médias, j'ai pu comprendre qu'il s'agissait de la

 28   région couverte par le centre qui a été ultérieurement formé, pour cette

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  1   région.

  2   Q.  Bien. Donc vous n'avez jamais entendu parler du président de la région

  3   autonome serbe ou de l'assemblée de cette réunion qui aurait eu lieu à

  4   l'époque ?

  5   R.  Certainement pas.

  6   Q.  Bien. Est-ce qu'on peut maintenant revenir à des documents que vous

  7   avez déjà vus. Pas tous, vous serez certainement content de l'entendre. Il

  8   s'agit de documents qui concernent la réunion du 11 juillet qui a eu lieu à

  9   Belgrade, et nous avons déjà vu ces documents hier.

 10   Est-ce qu'on peut maintenant afficher la pièce à conviction P610, qui

 11   va être affichée sur l'écran sous peu. Ça marche lentement, mais ça va être

 12   affiché dans quelques instants sur votre écran.

 13   Il s'agit du rapport concernant la mise en œuvre de conclusions établies à

 14   la réunion des cadres du MUP qui a eu lieu le 11 juillet, et dans ce compte

 15   rendu on peut lire que cela a été rédigé à "Sarajevo, en août 1992," le

 16   rapport pour ce qui est de la mise en œuvre des conclusions établies à la

 17   réunion des cadres du MUP.

 18   Avez-vous vu le document à l'époque ?

 19   R.  Si je me souviens bien, hier on a vu ce document. Lors de cette réunion

 20   à laquelle j'ai assisté, j'ai vu ce document. Ça c'est logique.

 21   Q.  Bien. Pourriez-vous maintenant vous reporter à la deuxième page en

 22   anglais, et je pense que dans la version en B/C/S, c'est également à la

 23   page 2.

 24   D'après ce qu'on lit ici, il semble que le ministère a envoyé une dépêche

 25   le 17 août pour obtenir des explications concernant certains points. C'est

 26   le document qui émane de votre CSB. En fait, c'est votre réponse à ces

 27   questions. Au point 6 -- nous n'avons pas les documents où les questions

 28   sont posées, mais il s'agissait des enquêtes des crimes de guerre, et au

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  1   point 6, on peut lire que :

  2   "On a commencé à regarder des cassettes vidéo concernant les crimes

  3   de guerre qui ont été analysés ou enquêtés."

  4   De quels types de crimes de guerre s'agissait-il, et les enquêtes ont

  5   été menées contre qui ?

  6   R.  A l'époque déjà, il y avait des crimes de guerre commis contre la

  7   population civile dans une partie de la région de Birac, plus précisément

  8   dans la partie qui dépendait du poste de police de Bratunac et du poste de

  9   police de sécurité publique de Milici. Je me souviens qu'une équipe du

 10   centre de sécurité est partie pour mener une enquête sur les lieux, donc

 11   les policiers de la police judiciaire. Il y a des cassettes vidéo pour ce

 12   qui est de ces enquêtes. Ils ont fait des efforts pour mener ces enquêtes

 13   de façon professionnelle, vu le nombre d'inspecteurs qui étaient à leur

 14   disposition à l'époque. Je suis certain qu'il s'agissait des crimes de

 15   guerre commis contre la population civile dans une partie de la Podrinje,

 16   en particulier à Kravica, à Bratunac, et à d'autres villages. J'ai oublié

 17   les noms de ces villages, mais il s'agissait de cette partie de la

 18   Podrinje.

 19   Bien sûr, il faut que j'ajoute encore que s'il y avait eu des crimes

 20   qui auraient été commis par les Serbes, et si on avait appris que ces

 21   crimes auraient été commis, les mêmes enquêtes auraient été menées pour ce

 22   qui est de ces crimes, comme c'était le cas pour les crimes commis contre

 23   la population civile.

 24   Q.  Vous avez anticipé ma question suivante. Pour autant que vous sachiez,

 25   est-ce qu'il y avait des enquêtes menées pour ce qui est des crimes de

 26   guerre commis contre les personnes qui n'étaient pas Serbes ?

 27   R.  J'ai dit tout à l'heure qu'il y avait des enquêtes sur les lieux. Mais

 28   vous pensez aux crimes de guerre commis contre les non-Serbes ? Moi, je

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  1   m'occupais d'autres choses, et je ne peux pas répondre à votre question

  2   parce que je ne dispose pas d'informations nécessaires. Les inspecteurs de

  3   la police judiciaire pourraient vous donner la réponse à cette question,

  4   parce qu'ils se sont occupés de cela tous les jours. Je vous dis encore une

  5   fois je m'occupais des activités opérationnelles, des policiers en

  6   uniforme, et je passais beaucoup de temps sur le terrain m'occupant

  7   d'autres choses. Il ne serait pas honnête de ma part ni professionnel de ma

  8   part de répondre à votre question, parce que je ne dispose pas

  9   d'information nécessaire pour pouvoir répondre à votre question.

 10   Q.  Oui, mais vous avez été en mesure de nous donner des informations

 11   détaillées pour ce qui est des enquêtes menées à propos des crimes commis

 12   contre les Serbes. Vous dites que vous ne savez pas s'il y avait des

 13   enquêtes menées pour ce qui est des crimes de guerre commis contre les

 14   Musulmans ou contre les non-Serbes ?

 15   R.  Plus tard, j'ai appris qu'il y avait quelques enquêtes dans ce sens-là,

 16   et je pense qu'il y a même des documents pour corroborer cela, mais je ne

 17   peux pas vous répondre à cette question, parce que je n'ai pas participé à

 18   ces enquêtes, et je ne dispose pas de documents nécessaires pour pouvoir

 19   répondre à votre question.

 20   Q.  Pendant la période de 1992, étiez-vous au courant des enquêtes menées à

 21   propos des événements qui ont eu lieu, par exemple, à Hrasnica, au camp de

 22   Susica, par exemple ?

 23   R.  J'ai déjà répondu à cette question hier en partie, parce que j'ai dit

 24   que lorsque nous avons appris l'existence du camp de Susica, beaucoup de

 25   temps s'était écoulé. J'ai appris l'existence de ce camp dans les médias,

 26   plutôt que -- enfin, je n'ai pas reçu d'information officielle là-dessus.

 27   J'ai travaillé sur le terrain. Il m'a été difficile d'analyser toutes les

 28   informations et d'obtenir toutes les informations, de suivre tous les

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  1   événements. C'est tout ce que je savais à l'époque pour ce qui est de ces

  2   événements en question.

  3   Q.  Merci.

  4   Mme KORNER : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher le document

  5   suivant --

  6   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Monsieur le Témoin, j'ai une question

  7   à vous poser, parce que je n'ai pas tout à fait compris votre témoignage

  8   concernant votre implication aux enquêtes pour ce qui est des crimes de

  9   guerre.

 10   Vous avez dit que vous étiez au courant du fait que le service qui était

 11   chargé de la prévention des crimes de guerre s'occupait des crimes de

 12   guerre en menant des enquêtes sur le territoire couvert par les trois

 13   postes de police où les crimes de guerre auraient été commis contre la

 14   population serbe. Vous nous avez dit qu'il y avait des vidéos qui ont été

 15   filmées, et qu'il y avait des enquêtes menées sur les lieux, des enquêtes

 16   préliminaires, et après que Mme Korner vous a posé la question concernant

 17   des crimes similaires commis contre les non-Serbes, vous avez dit que vous

 18   n'avez pas participé à ces enquêtes et que vous n'avez pas disposé

 19   d'informations concernant ces crimes.

 20   Pourquoi il y avait une différence pour ce qui est de votre implication à

 21   des enquêtes concernant les crimes de guerre contre les Serbes et

 22   concernant votre implication à des enquêtes menées pour ce qui est des

 23   crimes de guerre commis contre les non-Serbes ? Ou peut-être que j'ai mal

 24   compris votre témoignage ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que vous ne m'avez pas bien compris.

 26   J'ai dit que les représentants de la police judiciaire, ensemble avec les

 27   chefs de ce service, ont mené les enquêtes concernant les crimes de guerre

 28   commis contre la population serbe. Et j'ai déjà dit qu'il y a des documents

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  1   qui corroborent cela. J'ai ajouté plus tard en disant que j'étais certain

  2   qu'il y avait des informations concernant les crimes de guerre commis

  3   contre les non-Serbes, et en connaissant mes collègues, s'ils avaient

  4   appris que de tels crimes avaient été commis, ils auraient procédé de la

  5   même façon. Je n'ai pas participé à ces enquêtes, mais j'ai vu les vidéos

  6   où, par exemple, dans un village, plus de 100 personnes ont été tuées. J'ai

  7   participé à une enquête près de Zvornik où j'ai vu sur les lieux les

  8   cadavres dans un village, le village de Pantici qui se trouve sur la région

  9   de Zvornik. Donc pour ce qui est de cette enquête, j'étais au sein de

 10   l'équipe qui a mené cette enquête sur le terrain.

 11   Pour ce qui est d'autres enquêtes menées pour ce qui est des crimes

 12   de guerre commis sur la population non-serbe, je n'ai pas participé à ces

 13   enquêtes. Mais, encore une fois, je réitère que les professionnels de la

 14   police judiciaire auraient procédé de la même façon s'ils avaient appris

 15   que de tels crimes avaient été commis.

 16   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Pour que tout soit clair, pour que

 17   nous soyons tout à fait certains concernant ces choses-là, quand plus tard

 18   vous avez appris que les crimes de guerre ont été commis contre les non-

 19   Serbes, est-ce qu'à ce moment-là vous avez appris que les enquêtes ont été

 20   menées sur les lieux concernant ces crimes, donc vous voulez dire que vous

 21   n'êtes pas certains pour dire que ces enquêtes ont été menées ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'il y a un document qui parle de

 23   cela, mais je ne peux pas confirmer cela, il y a un document où on parle

 24   des enquêtes concernant les crimes de guerre commis contre la population

 25   non-serbe.

 26   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci.

 27   Madame Korner, poursuivez.

 28   Mme KORNER : [interprétation]

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  1   Q.  Je vais continuer à vous poser des questions concernant le même sujet.

  2   L'une de vos tâches était d'envoyer les inspecteurs de divers centres de

  3   sécurité publique, vous nous avez dit cela hier, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Les tâches de ces inspecteurs que vous envoyiez à ces postes de

  6   sécurité publique étaient de vérifier tous ces éléments, à savoir de

  7   vérifier quels crimes ou infractions pénales ont été enregistrés, et de

  8   vérifier s'il y avait des enquêtes menées là-dessus ?

  9   R.  Bien sûr. On a enregistré tous les crimes, toutes les infractions

 10   pénales commises dans des registres appropriés conformément à la

 11   législation en vigueur.

 12   Q.  Leurs rapports auraient dû contenir des références concernant, par

 13   exemple, des meurtres en masse, c'est ce que je suppose, et cela aurait dû

 14   se passer également lors des enquêtes ?

 15   R.  Bien sûr. Tous les crimes graves, et surtout les crimes de meurtres,

 16   avaient la priorité pour ce qui est des enquêtes par rapport à d'autres

 17   infractions pénales telles que vols et cambriolages. Mais je ne sais pas en

 18   quoi consiste votre question. Tout ce cela était enregistré et analysé. Il

 19   y avait des enquêtes menées là-dessus.

 20   Q.  Mais d'après ce que vous avez dit, vous ne vous souvenez pas que les

 21   inspecteurs dans leurs rapports ont parlé des crimes de guerre commis

 22   contre la population non-serbe à des endroits particuliers, n'est-ce pas ?

 23   R.  Ecoutez, on va essayer de séparer deux choses. Si l'inspecteur de la

 24   police vient dans un poste de police sur le terrain pour inspecter le

 25   travail de ce poste de police, cet inspecteur veut d'abord vérifier le

 26   fonctionnement interne du poste de police, les registres du poste de

 27   police, les plans opérationnels, l'engagement de la police pour ce qui est

 28   de la sécurité, et cetera. Donc l'inspecteur ne vérifie que les activités

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  1   des policiers en uniforme.

  2   Mes collègues qui travaillaient dans la police judiciaire s'occupaient

  3   davantage de ces autres éléments dont on parle ici. Ces questions, vous

  4   devriez les poser à des gens qui s'occupaient de cela à l'époque.

  5   Q.  Pour en finir avec ce sujet, la ville de Vlasenica était couverte par

  6   votre centre de sécurité publique, dans le centre où vous travailliez,

  7   n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, du point de vue de l'organisation, oui.

  9   Q.  Bien, voulez-vous ajouter quelque chose pour ce qui est de Vlasenica ?

 10   En d'autres termes, vous avez dit "du point de vue de l'organisation du

 11   poste." Est-ce que cela veut dire que c'était quand même le cas ou pas en

 12   pratique ?

 13   R.  Lorsqu'il s'agit de l'organisation du centre du service de sécurité

 14   publique, c'est ce qu'on a vu hier sur l'écran, où on a pu voir le chef du

 15   centre et toutes les unités organisationnelles, donc j'ai pensé à cela.

 16   C'est-à-dire du point de vue de l'organisation du centre de service de

 17   sécurité publique. Ces postes de sécurité publique donc relevaient de notre

 18   juridiction.

 19   Q.  Je pense que cela suffit.

 20   Mme KORNER : [interprétation] J'aimerais dire que le document du 17 août

 21   1992 que nous avons mentionné se trouve sur notre liste de pièces 65 ter.

 22   Il s'agit du numéro 217, et je dis ça pour que l'information soit complète

 23   concernant ce document.

 24   Est-ce qu'on peut maintenant afficher le document suivant, s'il vous plaît,

 25   c'est le document 2879.

 26   Q.  C'est un document qui provient de la police judiciaire du CSB envoyé au

 27   poste de sécurité publique de Vlasenica, envoyé au chef du poste, signé par

 28   une personne qui s'appelle Simo Tusevljak.

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  1   J'ai des difficultés pour ce qui est de la prononciation de certains noms.

  2   Connaissez-vous ce monsieur ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Il s'agit d'une demande pour transférer les informations concernant la

  5   période allant du 1er avril au 30 juillet pour ce qui est des crimes commis,

  6   et est-ce que vous étiez au courant de l'existence de ce document à

  7   l'époque ?

  8   R.  Bien sûr. Etant donné qu'au centre régional des services de sécurité

  9   nous avions régulièrement des réunions de collège, et chaque responsable de

 10   département faisait alors un briefing et parlait des tâches prioritaires.

 11   Mon collègue M. Tusevljak, suivant une demande et une instruction données à

 12   la réunion, le faisait parce que le ministère donnait des ordonnances

 13   disant que ces informations devaient être mises à disposition, les

 14   informations donc qui se trouvaient dans ce document. Il s'agissait d'une

 15   approche professionnelle de ce poste de responsabilité à une période de

 16   chaos.

 17   Q.  Oui, merci beaucoup. C'est tout ce que je voulais poser comme question

 18   à propos de ce document.

 19   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 20   est-ce qu'on peut, s'il vous plaît, verser cette pièce au dossier.

 21   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien. Cette pièce a été versée au

 22   dossier et a été enregistrée.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] C'est la pièce P991, Monsieur le

 24   Président, Messieurs les Juges.

 25   Mme KORNER : [interprétation] Pouvons-nous maintenant voir la pièce P730.

 26   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Désolée. C'est la pièce P992.

 27   Mme KORNER : [interprétation] Très bien. Merci. Est-ce que nous pouvons

 28   maintenant avoir la pièce P730 et la montrer à l'écran, s'il vous plaît.

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  1   Q.  Alors, il s'agit d'un rapport présenté au ministère, qui est daté du 3

  2   août -- en fait, c'est un document qui est adressé au ministre lui-même,

  3   sur la réalisation d'une ordonnance qui est datée du 27 juillet 1992, le

  4   document lui-même ne semble pas être signé. Je crois que c'est parce qu'il

  5   y a une page du document qui manque, en fait. Mais si nous regardons le

  6   premier paragraphe dudit document, on nous dit :

  7   "En vertu de votre ordonnance et en accord avec le CSB, je me suis

  8   rendu dans la majorité des postes de sécurité publique de la région sauf

  9   Skelani et Bratunac, qui ont été inspectés, comme prévu, par le chef du

 10   département de la police au CSB, Drago Borovcanin."

 11   Alors quand vous voyez ce document, est-ce que vous pouvez savoir qui

 12   semble avoir écrit ce document ?

 13   R.  A la lecture de ce document avec les enquêteurs, j'ai été confronté à

 14   un dilemme. Je vois que le document est assez bien écrit, qu'il comporte

 15   pas mal d'informations remontant du terrain, et si mon nom n'était pas

 16   mentionné ici, on dit que je suis allé seulement à Skelani et Bratunac,

 17   j'aurais pu penser que j'étais moi-même l'auteur de ce document. Un

 18   collègue l'a très bien rédigé. Mais je ne suis pas sûr de son identité, je

 19   ne sais pas qui a rédigé ce document. Je ne peux qu'imaginer que c'était

 20   quelqu'un du MUP, de l'administration de la police.

 21   Q.  Très bien. Est-ce que nous pouvons nous pencher sur quelques parties de

 22   ce document, et nous reviendrons ensuite au rapport que vous avez rédigé.

 23   Mme KORNER : [interprétation] Tout d'abord, à la page 2 en anglais, c'est

 24   je crois toujours la page 1 dans la version B/C/S.

 25   Q.  On nous dit :

 26   "La majorité des postes de sécurité dans le territoire du centre ont

 27   établi de bonnes coopérations avec les unités de l'armée de la République

 28   serbe, surtout en ce qui concerne le plan de la défense intégrale, où les

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  1   membres de la police se sont positionnés sur les zones de crise avec la

  2   ligne de défense, ont travaillé avec la police militaire, et cetera."

  3   Nous allons faire maintenant une pause, et j'aimerais vous poser une

  4   question à propos de cette coopération entre l'armée et la police.

  5   A votre connaissance, les unités de la police étaient-elles envoyées pour

  6   aider l'armée ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Qui assurait le commandement de ces unités de police dépêchées pour

  9   aider l'armée ?

 10   R.  Voilà comment les choses étaient en pratique à l'époque : si on

 11   recevait une demande de la part de l'armée disant qu'il fallait assurer un

 12   personnel pour la ligne de démarcation, à ce moment-là avec l'approbation

 13   du ministère et le chef du centre, on préparait un document avec les

 14   informations suivantes : par exemple, nous avons besoin d'une compagnie

 15   d'une centaine d'hommes. Ensuite on écrivait à tous les SJB leur demandant

 16   de mettre à disposition quelques policiers en fonction, bien entendu, de

 17   leur personnel pour qu'ils ne manquent pas de personnel, et l'unité qui

 18   serait formée de cette façon serait ensuite commandée par un chef de

 19   compagnie locale, un responsable qui ait de l'expérience, et qui pourrait

 20   emmener cette unité vers la ligne de démarcation. Ceci fait, il fallait

 21   ensuite qu'il fasse rapport auprès du commandement militaire dans la zone

 22   de combat en question. Ensuite de cela, ils étaient placés de nouveau sous

 23   la responsabilité de l'armée de la Republika Srpska, et les policiers

 24   menaient alors leurs actions conjointement avec l'armée pendant toute la

 25   durée de leur service.

 26   J'aimerais ajouter pourquoi c'était nous qui étions chargés de nommer les

 27   responsables de la compagnie. Nous voulions rester en contact avec eux, et

 28   c'était leur responsabilité que de rédiger un compte rendu relatant les

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  1   faits, ils devaient également vérifier qu'il y avait discipline sur les

  2   lignes de front, ils devaient également faire état d'éventuels blessés, et

  3   cetera. C'était leur responsabilité, mais ils étaient ensuite placés sous

  4   la responsabilité de l'armée de la Republika Srpska conformément à la

  5   législation qui était alors en vigueur.

  6   Q.  Vous nous avez dit qu'il y avait un commandant local de cette

  7   compagnie. Quel était en pratique le rang de ce responsable ou de ce

  8   commandant de compagnie ?

  9   R.  Vous voyez, le ministre a beaucoup pensé, il a beaucoup réfléchi à

 10   cette question, et nous devions nous doter de structures quasiment

 11   militaires pour que nous sachions exactement qui pouvait être nommé chef de

 12   compagnie, il y avait des personnes qui avaient de l'expérience. Il fallait

 13   également se pencher sur les spécialités militaires des uns et des autres à

 14   la JNA. Essayer de voir si certaines personnes avaient une spécialité

 15   militaire, et à ce moment-là ce serait pris en compte. Si quelqu'un avait

 16   été officier de réserve, par exemple, à Bileca, c'était pris en compte

 17   également, c'était en fait une caserne qui était très estimée, on pensait

 18   que la formation reçue était de très bonne qualité, et on avait confiance

 19   en ces gens-là. Justement, c'est ce genre de gens qui seraient donc nommés

 20   comme chefs de compagnie.

 21   Q.  Mais c'étaient quand même toujours des officiers de police, ils

 22   faisaient toujours partie du MUP, ils ne faisaient pas partie de l'armée en

 23   tant que telle, de la structure militaire ?

 24   R.  Bien sûr, mais pendant qu'ils se trouvaient sur la ligne de

 25   démarcation, nous n'avions pas de contact avec eux. Si quelque chose de

 26   déshonorant d'une certaine façon arrivait sur la ligne de démarcation,

 27   c'est l'armée qui devait s'en occuper. Si par exemple un crime avait été

 28   commis ou un acte atroce avait été commis, nous les suspendions de leurs

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  1   fonctions avant même qu'ils ne reviennent à la base. Bien entendu, des

  2   sanctions disciplinaires seraient alors imposées. Pour ce qui est des

  3   poursuites judiciaires, c'est évidemment le tribunal qui aurait cette

  4   responsabilité. Donc ces poursuites pouvaient se faire en parallèle.

  5   Q.  Donc voilà la situation que vous nous avez décrite lorsqu'il y avait

  6   une demande d'assistance de la police sur la ligne de démarcation. Alors

  7   imaginons que dans une zone l'armée est présente et, bien entendu, la

  8   police est là également pour s'acquitter de ses responsabilités, alors la

  9   police présente sur les lieux tomberait-elle sous la coupe de l'armée, ou

 10   assurerait-elle la responsabilité de ses propres actes, c'est-à-dire est-ce

 11   qu'elle tomberait dans la chaîne de commandement du MUP ?

 12   R.  Je vais essayer de vous donner un exemple pour illustrer mon propos.

 13   Imaginez une ligne de démarcation traversant le territoire de un ou

 14   plusieurs SJB, services de la sécurité publique. C'était le cas autour de

 15   la ville de Sarajevo où il n'y avait pas un seul poste qui ne se trouve pas

 16   dans une zone de combat. Si l'armée était active sur le territoire d'un

 17   service de la sécurité publique, nous n'avions rien à voir avec cela. Ils

 18   faisaient leur travail, et nous faisions notre travail également, sauf

 19   s'ils demandaient qu'une escouade ou une compagnie vienne les aider, auquel

 20   cas nous mettions cette compagnie à leur disposition.

 21   Q.  Merci beaucoup.

 22   Alors je vous demande maintenant de revenir un instant au document.

 23   Dans ce document -- 

 24   Mme KORNER : [interprétation] Au paragraphe 3 de la page en anglais. Je

 25   crois que pour la version B/C/S il faut passer à la page suivante.

 26   Q.  Là, votre inspecteur s'occupe du problème de la formation

 27   paramilitaire. Il a dit :

 28   "Comme j'en étais informé, ils aidaient les unités de l'armée serbe de la

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  1   police, mais ils devaient avoir leurs propres motifs de guerre, et ils ne

  2   voulaient pas se mettre sous le commandement de l'armée," et cetera.

  3   "Alors dans certaines zones, par exemple, à Ilidza et à Pale, ils résident

  4   dans des bâtiments séparés et ils se déplacent souvent dans différentes

  5   zones. Dans la route Sarajevo-Zvornik et bien sûr lorsqu'ils quittent le

  6   terrain, ils quittent en groupe, et ils ont créé des problèmes apparemment

  7   pour certains postes de sécurité publique locaux, il y a même eu des

  8   attaques de policiers lors des postes de contrôle. Ça a été le cas dans une

  9   zone qui s'appelle 'Carlijevci' à Vlasenica."

 10   Alors première question, tout d'abord, est-ce que vous connaissiez les

 11   problèmes des paramilitaires avant d'avoir pris connaissance de ce rapport,

 12   vous étiez au courant de ces problèmes ?

 13   R.  Bien sûr. J'aurais préféré qu'ils ne nous aident pas. Dès que la guerre

 14   a éclaté, il y a pas mal de ces groupes qui sont arrivés sur le terrain.

 15   C'étaient des groupes auto-organisés. Il y avait toutes sortes de groupes.

 16   Pour que vous compreniez bien la situation, il faut dire qu'au tout début

 17   il y avait des groupes qui étaient très bien équipés, ils portaient de

 18   nouveaux uniformes, ils étaient très propres sur eux, on avait l'impression

 19   qu'ils avaient même fait l'objet d'un entraînement, mais très vite on a

 20   compris que leur motivation était autre, que leur motivation n'était

 21   certainement pas d'aider et d'être actifs sur les lignes de front. Il y

 22   avait là un mélange de criminels, de pilleurs également, toutes sortes de

 23   gens qui ont commis des dépravations. Ils nous ont fait beaucoup de tort,

 24   j'aurais préféré qu'ils ne soient pas là et qu'ils ne viennent pas nous

 25   aider. Ils étaient partout, surtout dans la zone de Podrinje, parce que la

 26   Serbie était toute proche et ils considéraient que c'était une sorte de

 27   mine d'or. Ils se sont rendus sur cette zone tous les jours. Je peux vous

 28   donner davantage de détails si vous le souhaitez.

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  1   Q.  Non, non. Simplement, j'ai encore une question à vous poser sur ce

  2   sujet. Est-ce que vous avez entendu parler d'une demande qui aurait été

  3   formulée par votre responsable auprès du ministre, demande pour assistance,

  4   peut-être la police ou l'armée aurait-elle pu vous aider à vous débarrasser

  5   de ces paramilitaires, y a-t-il eu une demande en ce sens ?

  6   R.  A l'époque, nous ne connaissions pas la composition des commandements

  7   militaires. Il y avait pas mal de ces commandements renégats, disons, qui

  8   s'auto déclaraient unités, mais au début nous ne savions pas vraiment ce

  9   qui se passait. Nous pensions qu'ils faisaient partie de l'armée. Pour être

 10   tout à fait honnête, au tout début nous étions même contents lorsque des

 11   renforts sont arrivés. Mais lorsque nous avons compris quelles étaient

 12   leurs motivations réelles et ce que serait leur contribution, il faut

 13   savoir qu'il y en a eu très, très peu qui sont morts, et ceux qui sont

 14   morts ne sont pas morts au combat, ils sont morts pendant les pillages.

 15   Je me suis déplacé dans des zones comme Bratunac, Skelani, Ilidza, ou

 16   Sarajevo, et vous m'avez demandé si nous avions des informations que nous

 17   avions diffusées. A la réunion du collège, nous avons poursuivi nos

 18   discussions sur les sujets. Nous savions que ces groupes existaient, et il

 19   était dangereux d'entreprendre une action à leur encontre. Ils étaient plus

 20   de 100 dans certains cas. En tant que policier expérimenté, je pensais

 21   qu'il fallait nous entretenir avec ces personnes pour éviter que le sang ne

 22   soit versé, parce que j'étais responsable des policiers sous mon

 23   commandement. Il s'agissait d'une période très difficile, vous savez. Et

 24   ils ont, par exemple, pris les ponts dans la zone de Podrinje, ils ont

 25   utilisé ces policiers, comme façade disons, pour dissimuler leurs activités

 26   de contrebande, c'était très, très difficile de se débarrasser de ces gens-

 27   là et de les faire sortir de nos zones.

 28   Q.  En fait, le rapport dit que vous aidiez les unités de l'armée et de la

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  1   police. Vous nous avez dit auparavant qu'ils étaient considérés comme

  2   pouvant aider la police, est-ce que vous pensez toujours qu'ils pouvaient

  3   aider la police à assumer ses responsabilités ?

  4   R.  Je vais encore une fois illustrer mon propos pour que vous compreniez

  5   bien. Par exemple, on a parlé de différents groupes, une liste de plusieurs

  6   personnes qui se trouvaient à Sarajevo, à Grbavica, et Lukavica, et avant.

  7   C'était au mois d'avril, nous pensions qu'une attaque allait se produire

  8   d'après les renseignements que nous avions obtenus. Il y avait un chef -

  9   j'ai oublié son nom - ils avaient tous des surnoms, d'ailleurs. Mais en

 10   fait je lui ai dit : "Vous avez de l'expérience. Essayons de travailler

 11   ensemble sur ce sujet, essayons de séparer la partie de Sarajevo en

 12   question de Lukavica," et le matin ils m'ont appelé sur mon Motorola, ils

 13   m'ont dit qu'une attaque s'était produite, qu'un policier avait été tué.

 14   J'y suis allé et j'ai vu qu'un policier avait effectivement reçu un éclat

 15   d'obus, il avait reçu un éclat d'une mine qui avait éclaté, et la police

 16   voulait m'attaquer. Ils m'ont dit : "Vous devriez être honteux. Vous m'avez

 17   emmené ici, ils ne se trouvaient pas sur la ligne de front. Ils sont allés

 18   dans une maison où ils se sont livrés à un jeu, ils passaient du temps, ils

 19   ne sont pas du tout venus combattre."

 20   Q.  Vous m'avez dit que ce problème a été discuté à plusieurs réunions

 21   collégiales, est-ce que Mico Stanisic était présent lorsque ces problèmes

 22   ont été débattus à un moment ou à un autre ?

 23   R.  Bien sûr, toute initiative est venue du ministre. Il voulait créer un

 24   MUP professionnel. Il était face à une situation chaotique. Je me demande

 25   comment nous avons pu survivre tout simplement. Il n'arrêtait pas

 26   d'insister pour que la loi soit respectée, mais vous savez comment ça se

 27   passait au début 1992. Moi, j'étais un tout petit morceau du puzzle, mais

 28   il y avait la cellule de Crise, il y avait les autorités civiles, il y

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  1   avait les autorités militaires, et on ne savait pas qui faisait quoi. Dans

  2   ce type de situation, il était très difficile de faire respecter la loi.

  3   C'était un processus long et difficile.

  4   Q.  Ces paramilitaires, et les crimes qu'ils commettaient, est-ce que

  5   c'était à l'encontre de toutes les nationalités, qu'il s'agissait de

  6   populations serbes ou non-serbes, ou est-ce que ces crimes étaient limités

  7   aux populations non-serbes ?

  8   R.  Désolé, je n'ai pas entendu le début de votre question.

  9   Q.  Ces paramilitaires, vous nous avez dit que c'étaient des criminels,

 10   est-ce que les crimes qu'ils commettaient étaient commis contre toutes les

 11   nationalités ou simplement contre les nationalités non-serbes ?

 12   R.  Je suis sûr qu'ils ont commis des crimes contre toutes les

 13   nationalités. J'aimerais vous donner un autre exemple. Lorsque j'étais à

 14   Skelani -- lorsque j'étais à Skelani, la personne chez qui j'ai passé la

 15   nuit m'a dit que je ne devrais pas sortir la nuit parce que je risquais

 16   d'être tué par quelqu'un. Il y avait un groupe de paramilitaires qui était

 17   actif dans cette zone.

 18   Un homme est sorti pour restaurer l'ordre. C'était un politique, il

 19   était très naïf. Il a essayé de déplacer ce "check-point" renégat au pont

 20   de Skelani.

 21   Ce qu'il faut savoir c'est que celui qui essayait d'empêcher cela se

 22   retrouvait passé à tabac et tué, voilà.

 23   Q.  Très bien. Merci beaucoup. Nous allons regarder encore deux ou trois

 24   autres choses dans ce rapport.

 25   Mme KORNER : [interprétation] C'est la page suivante de la version en

 26   anglais, je crois que c'est toujours la même page en B/C/S. Non, désolée,

 27   c'est la page suivante également dans la version B/C/S.

 28   Q.  Le premier paragraphe en B/C/S, et le deuxième paragraphe en anglais :

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  1   "Le chef et commandant du CSB Pale m'a informé qu'environ 20 hommes d'Arkan

  2   résidaient dans la zone… à l'hôtel 'Panorama', et qu'ils allaient discuter

  3   avec eux pour leur demander de quitter la zone de Pale, où ils étaient

  4   convaincus qu'il ne devrait pas y avoir de problèmes."

  5   Est-ce que vous saviez que les hommes d'Arkan résidaient à l'hôtel Panorama

  6   ?

  7   R.  Pas à cette époque-là. Mais je sais, et c'est quelque chose qui est

  8   tout à fait caractéristique de cette unité de paramilitaires, qu'ils

  9   étaient bien propres sur eux, très disciplinés. Certains d'entre eux se

 10   sont peut-être présentés comme des hommes d'Arkan parce qu'Arkan était un

 11   nom qui inspirait le respect à cette époque-là. Je ne sais pas s'ils

 12   étaient ou non des hommes d'Arkan, ceux qui résidaient à l'hôtel Panorama,

 13   mais je sais que dans d'autres zones il y avait des unités qui se

 14   présentaient comme des hommes d'Arkan. Ils avaient tous des faux noms. Ils

 15   agissaient sous couvert, une fausse identité.

 16   Q.  Dernière question sur ce rapport, et c'est la page 4 de la version en

 17   anglais, ce qui correspond dans la version B/C/S à la page suivante

 18   également, là aussi il y est question de Vlasenica.

 19   A Vlasenica :

 20   "Il y avait 16 policiers active et 17 [comme interprété] officiers de

 21   police de réserve. Il s'agit d'une unité spéciale avec 25 membres et il

 22   était convenu qu'ils seraient placés sous le commandement de l'armée de la

 23   République serbe."

 24   Il s'agit d'une unité spéciale de la police, n'est-ce pas, c'est de cette

 25   unité dont parlait l'inspecteur ?

 26   R.  C'est un petit peu comme la situation dont nous avons parlé hier. Par

 27   exemple, l'unité spéciale Ilijas. Mais ce qu'on dit ici à propos de la zone

 28   de Vlasenica c'est qu'il y a des tentatives permanentes de restaurer

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  1   l'ordre public, parce qu'on apporte des forces de réserve pour compléter

  2   les effectifs, on ne savait pas exactement combien de policiers et de

  3   policiers de réserve devaient constituer le personnel en pourcentage de la

  4   population. Mais pendant la guerre, il faut savoir que les effectifs ont

  5   augmenté. Les gens venaient faire des rapports aux postes de police, il

  6   fallait bien pouvoir restaurer l'ordre public. Il fallait respecter les

  7   réglementations. Je ne sais pas ce qu'étaient les normes exactement, je ne

  8   sais pas combien de policiers il fallait qu'il y ait d'officiers de police

  9   par millier d'habitants, par exemple, mais nous essayions d'agir en vertu

 10   des réglementations en vigueur.

 11   Q.  Je suis désolée, M. Borovcanin, mais ma question était très simple,

 12   est-ce que nous parlons d'une unité spéciale de la police, parce qu'on le

 13   dit ici, "unité spéciale" ?

 14   R.  Oui, je l'ai dit, c'est oui.

 15   Q.  Oui, mais on dit ensuite dans ce rapport :

 16   "Enfin, en tenant compte de la spécificité de la zone, j'ai suggéré qu'un

 17   groupe d'intervention soit formé au sein du poste de police ou du service

 18   de la sécurité publique."

 19   Alors est-ce qu'un groupe d'intervention dans les faits ne correspond pas à

 20   une unité spéciale de la police, n'est-ce pas la même chose ?

 21   R.  Ce n'était pas très clair. Vous savez, il fallait que la personne ait

 22   une formation spéciale pour pouvoir répondre à tous types de situations,

 23   qu'il puisse escalader des rochers, faire de la plongée, et cetera. Pour

 24   faire partie d'une force spéciale de la police, il fallait avoir donc des

 25   attributions particulières, mais il y avait parfois des combats au jour le

 26   jour, nous avions des situations très volatiles. Toutes sortes d'unités

 27   voyaient le jour à ce moment-là. Certaines unités s'appelaient des gardes.

 28   D'autres paramilitaires, et cetera. Au mois de mai et au mois d'avril,

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  1   c'était une situation de véritable chaos. Nous ne savions pas qui mettait

  2   en place quel type d'unité, quelle était la qualité des hommes qui

  3   formaient ces unités, s'il s'agissait de personnes qui étaient qualifiées

  4   pour faire partie du MUP. Voilà à quoi ressemblait la situation à cette

  5   époque. Ces unités existaient, ça ne fait aucun doute, mais nous avons

  6   essayé de mettre un peu d'ordre dans tout cela.

  7   Q.  Fort bien. D'accord, donc ce rapport est daté du mois d'août, mais

  8   cette unité spéciale, qui allait être placée sous le commandement de

  9   l'armée de la République serbe, est-ce que c'est exact, d'après ce

 10   document, qu'on avait besoin d'une approbation spéciale ?

 11   R.  Mais que pensez-vous par là ? Ce ne sont que les policiers qui étaient

 12   réguliers qui étaient des policiers qui étaient compétents. Ce n'est peut-

 13   être pas très bien compris.

 14   Q.  Non, fort bien. Excusez-moi, je vais reformuler ma question. En fait,

 15   j'avais oublié cette signification spéciale.

 16   Parlons maintenant de cette unité, cette unité spéciale n'avait pas été

 17   créée d'après l'autorité du ministre ou autre, n'est-ce pas, c'est la

 18   raison pour laquelle ceci a été envoyé à l'armée de la République serbe ?

 19   R.  Oui, c'est exact.

 20   Q.  Merci. C'est exactement ce que je voulais vous demander concernant ce

 21   document.

 22   Mme KORNER : [interprétation] Prenons maintenant la pièce 2398. Je suis

 23   désolée, ce n'est pas en fait 2398.

 24   Q.  En fait, le dernier rapport dit que c'est vous qui alliez rédiger le

 25   rapport sur Bratunac et Skelani, et si nous prenons la dernière page dans

 26   les deux langues, nous pouvons voir très bien que c'est effectivement votre

 27   rapport.

 28   R.  C'est exact.

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  1   Q.  J'aimerais maintenant revenir à la première page des deux versions,

  2   s'il vous plaît. Il s'agit d'une inspection qui était menée du 1er au 3

  3   août. Au paragraphe qui commence par : "Les officiers de police étaient

  4   principalement déployés sur la ligne de front…" Permettez-moi de trouver le

  5   passage. Non, ce n'est pas ce paragraphe-là.

  6   "Un très grand nombre de policiers sont déployés à nettoyer le

  7   terrain des extrémistes musulmans."

  8   Que voulez-vous dire par "extrémistes musulmans" ?

  9   R.  A l'époque, les activités de combat se déroulaient très fréquemment sur

 10   ce territoire de la municipalité de Bratunac, et les policiers étaient

 11   forcés à participer de façon active à la protection des citoyens dans les

 12   villages afin qu'il n'y ait pas de crimes, puisqu'ils avaient de très

 13   mauvaises expériences jusqu'alors et qu'il y avait un très grand nombre de

 14   crimes qui avaient été commis jusque-là, et on parle ici de la police de

 15   réserve de Kravica. Il y a un très grand nombre de villages et de hameaux

 16   où les crimes s'étaient déroulés pendant toute la guerre. Il y avait des

 17   groupes de terroristes qui se faisaient incursions. Donc la police avait

 18   pour obligation de défendre les citoyens, de protéger leurs vies.

 19   Q.  Mais Monsieur, excusez-moi, je voulais simplement savoir une chose :

 20   Qu'entendez-vous par "extrémistes musulmans" ? Est-ce que vous pensez à

 21   l'armée ? Est-ce que vous pensez de forces paramilitaires ? Est-ce que vous

 22   pensez aux citoyens musulmans réguliers ? A qui faites-vous allusion,

 23   effectivement ?

 24   R.  Ça dépend, parce que vous savez si, par exemple, un groupe de personnes

 25   arrive, incendie une maison, brûle des corps, nous avions peur de ces

 26   extrémistes. C'étaient des criminels. Ils avaient tué un très grand nombre

 27   de citoyens. Cette enquête dure encore, et je crois qu'un jour la vérité

 28   fera jour.

Page 6690

  1   Q.  En parlant d'"extrémistes musulmans", vous parlez de meurtriers, de

  2   criminels de confession musulmane ?

  3   R.  Je ne sais pas quelles sont toutes les personnes qui faisaient partie

  4   de ce groupe et, avant la guerre, quels étaient les profils de ces

  5   personnes. Je ne peux rien affirmer.

  6   Q.  Mais ce rapport semble dire qu'il y a un très grand nombre de groupes

  7   de ce type, puisque vous dites "un très grand nombre de policiers sont

  8   déployés à nettoyer le terrain des extrémistes musulmans" ? Vous ne parlez

  9   pas d'un incident isolé, spécifique ici, n'est-ce pas ?

 10   R.  Le poste de police comptait 20 policiers d'active et 20 policiers

 11   réservistes, et c'était une région rurale. Les maisons étaient un peu

 12   éparpillées ici et là. Il y avait un village, des hameaux. Il faut

 13   comprendre tout ceci dans le contexte que je viens de vous expliquer.

 14   Q.  Très bien. Pour ce qui est du reste de ce rapport, il porte

 15   principalement sur le problème des formations paramilitaires qui se

 16   trouvaient dans les municipalités, ou, si vous voulez, dans ces deux postes

 17   de police ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Fort bien.

 20   Mme KORNER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. C'est tout ce

 21   que je voulais demander au témoin.

 22   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] J'aimerais poser une question

 23   supplémentaire concernant ce rapport, Monsieur. Je voulais savoir si les

 24   policiers auxquels vous faites référence dans le paragraphe qui vous a été

 25   lu par Mme Korner, j'aimerais savoir si ces policiers étaient placés sous

 26   le commandement du chef de police des SJB, des postes de sécurité publique,

 27   ou est-ce que ces policiers étaient subordonnés ou resubordonnés à l'armée

 28   ? Je ne sais pas si vous me suivez ? Vous dites dans le rapport que :

Page 6691

  1   "Dernièrement, un très grand nombre de policiers ont été déployés à

  2   nettoyer le terrain d'extrémistes musulmans."

  3   Mme Korner a approfondi cette question, à savoir ce que vous

  4   entendiez par "extrémistes musulmans", mais j'aimerais savoir si ces

  5   policiers, au cours de ces opérations de nettoyage, avaient été

  6   resubordonnés à l'armée, ou ces policiers étaient-ils placés sous le

  7   commandant de la police ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois qu'en partie ils devaient opérer de

  9   façon conjointe avec l'armée. De temps en temps, ils opéraient ou

 10   fonctionnaient de façon indépendante. Je vais vous expliquer pourquoi.

 11   Voilà, c'est très spécifique. Par exemple, s'il y a une attaque spécifique

 12   qui se déroule, on n'a pas vraiment le temps d'informer les personnes en

 13   question, et les choses auraient pu s'aggraver. Donc, on n'avait pas le

 14   temps d'informer les autorités, de demander une approbation, et cetera. Ce

 15   qui arrivait c'est que les policiers locaux disaient : "Voilà, la ligne a

 16   été percée ici. Envoie-moi du renfort." A cause des besoins, on ne pouvait

 17   pas toujours suivre le protocole pour obtenir l'approbation. D'après moi,

 18   je vous décris la réalité sur le terrain à l'époque. C'est ainsi que les

 19   choses se déroulaient.

 20   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je comprends. Merci. Je comprends

 21   très bien que la situation devait être particulièrement difficile pour

 22   toutes les parties, bien sûr. Vous penserez peut-être que je vous pose une

 23   question qui est un peu trop juridique, mais j'aimerais vous demander de me

 24   préciser si les policiers, au cours de ces opérations de nettoyage, étaient

 25   placés sous le commandement de l'officier de l'armée qui était présent dans

 26   la région, par exemple, et qui régissait les activités de la VRS, les

 27   activités de ces régions, ou est-ce que les policiers étaient placés et

 28   agissaient selon le commandement des chefs des SJB locaux ?

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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis tout à fait certain, puisque le

  2   commandement militaire était une brigade. En fait, ils étaient sur la ligne

  3   constamment, puisque les activités militaires, les activités de combat se

  4   déroulaient de façon continue. Je suis tout à fait certain que si la police

  5   venait sur place à la suite de leur appel, ils étaient placés sous le

  6   commandement. On n'avait pas le temps. Les policiers ne pouvaient pas

  7   savoir à quoi ressemblait la situation sur le terrain avant qu'ils ne se

  8   rapportent ou qu'ils ne demandent au commandement militaire compétent pour

  9   savoir où peuvent-ils être déployés. Donc, c'est une action conjointe avec

 10   l'armée de la Republika Srpska, effectivement.

 11   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Oui, je comprends c'est la façon de

 12   procéder, c'est ainsi que les choses auraient dû être faites, mais comme

 13   nous le savons, ce n'est pas toujours possible dans les circonstances de

 14   suivre ce protocole. Mais j'aimerais savoir si les unités de la police

 15   pouvaient être déployées dans des opérations de nettoyage d'après --

 16   pouvaient-ils être déployés par leur propre commandement. Ils rendaient

 17   peut-être compte à l'officier de l'armée locale qu'ils avaient peut-être

 18   l'intention de nettoyer la zone, mais au cours de ces opérations de

 19   nettoyage, est-ce qu'ils agissaient conformément au commandement des chefs

 20   du SJB local, les représentants du MUP ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils étaient toujours en opération conjointe

 22   avec l'armée. Je ne crois pas qu'une personne puisse s'auto-imposer de

 23   jouer au Rambo et, excusez-moi, de m'exprimer ainsi, mais ils étaient liés

 24   avec l'armée. Ces derniers avaient la logistique, ils avaient les liens.

 25   C'était une section. Ces derniers devaient absolument rendre compte à

 26   l'armée. Qu'est-ce qu'ils auraient bien pu faire tout seul, en si petit

 27   nombre, à moins d'avoir un incident survenu inopinément, et que ces

 28   derniers n'avaient pas le temps de demander au commandement et ils allaient

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  1   réagir sur le terrain immédiatement. C'est absolument impossible qu'ils

  2   aient pu agir de leur propre chef.

  3   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci beaucoup.

  4   Mme KORNER : [interprétation]

  5   Q.  Pour donner suite à une des questions posées par le Juge Harhoff.

  6   S'agissant de la coopération de l'armée, c'est bien différent, n'est-ce

  7   pas, c'est différent de la resubordination que vous avez décrite et qui

  8   vient à la suite d'un ordre, par exemple ?

  9   R.  Pardon ? Je n'ai pas très bien compris votre question. Qu'est-ce que

 10   vous voulez dire par c'est différent ? Pourriez-vous peut-être expliciter

 11   votre question. Je n'ai pas très bien compris.

 12   Q.  Fort bien. Lorsque vous parlez de la coopération, et j'aimerais que

 13   l'on examine le document suivant, ce n'est pas la même chose. Lorsque vous

 14   parlez de coopération, il faut faire une différence entre coopération

 15   lorsque l'armée prend le contrôle d'une unité à la demande de la police,

 16   par exemple, et un ordre est donné, et ensuite les policiers font partie de

 17   l'armée serbe, à ce moment-là. Ce dont parle votre rapport, c'est que la

 18   police coopère en aidant, comme vous le dites, en aidant à nettoyer le

 19   terrain des extrémistes musulmans. Je crois qu'on pourrait employé le terme

 20   "mopping up" en anglais qui est "ratissage," n'est-ce pas ?

 21   R.  J'ai compris votre question. Lorsque vous parlez de "collaboration", ce

 22   terme est beaucoup plus large que le terme "coopération conjointe".

 23   Pourquoi ? Parce que lorsqu'on parle de coopération, c'est un échange

 24   d'information de façon quotidienne lorsque nous nous rencontrons lors de

 25   réunions. Tout ceci s'appelle coopération, alors que opération conjointe

 26   c'est quelque chose de bien différent. Ça veut dire qu'une unité policière

 27   est engagée et elle fait partie du commandement militaire compétent sur le

 28   terrain et c'est cela qu'on appelle une coopération. Maintenant, le terme

Page 6694

  1   "nettoyage" est peut-être maladroit. Je n'aurais peut-être pas dû écrire ce

  2   terme-là. C'est moi qui ai rédigé ce terme. Je l'ai peut-être mal choisi,

  3   effectivement, mais d'une certaine façon c'est aussi une collaboration

  4   conjointe, si vous voulez, parce que vous savez ce terme a vu le jour

  5   pendant la guerre, c'est-à-dire que si une partie du territoire devait être

  6   prise, on parle du territoire pour ne pas créer de trou, pour ne pas créer

  7   un schéma ou un dessin de léopard. C'est la doctrine de toutes les armées

  8   du monde. On avance sur le terrain et on le ratisse. Mais bien sûr que la

  9   ligne de démarcation existe aussi, mais elle bouge constamment.

 10   Q.  Mais si l'armée, par exemple, engage ou mène une action quelque part

 11   sur votre territoire par exemple, et que la police arrive, et lorsque je

 12   parle de "ratissage" du terrain, je l'emploie dans un sens tout à fait

 13   régulier, dans le sens de procéder à l'arrestation de certaines personnes,

 14   établissant le périmètre de sécurité, établissant la sécurité dans la

 15   région, ceci veut toujours dire que la police agit selon sa propre chaîne

 16   de commandement plutôt que d'être placée sous le commandement de l'armée,

 17   n'est-ce pas ?

 18   R.  Non, non, ce n'est pas comme ça du tout. Vous mentionnez des

 19   arrestations. Ça dépend. Qu'est-ce que vous entendez par là ? On ne peut

 20   pas arrêter personne lorsqu'on procède à des opérations de combat, par

 21   exemple. Si on constitue des prisonniers, c'est un groupe de prisonniers si

 22   on avance sur un territoire et que -- votre question n'a pas de logique,

 23   vous savez. Lorsque vous parlez d'arrestation, ça n'a rien à voir avec la

 24   réalité.

 25   Effectivement, je suis désolé d'avoir peut-être employé le terme de

 26   "nettoyage" parce que c'est peut-être un terme maladroit, mais il arrive

 27   des fois que la pratique exige que d'après les événements sur le terrain,

 28   nous n'avions pas toujours le temps d'établir la communication avec le

Page 6695

  1   commandement. Mais lorsqu'on établit les liens, lorsqu'on établit les

  2   contacts, il est effectivement le cas que l'on échange des informations

  3   puisque les gens ne savaient pas ce qui se passe. On ne savait pas à

  4   l'époque quel est le territoire qui est tombé, quel territoire n'est pas

  5   tombé, combien de personnes ont péri, et cetera, et cetera. C'est une image

  6   réelle ce que je vous raconte de la situation. Il aurait fallu être sur

  7   place pour bien comprendre ce qui se passait. En fait, il m'est arrivé de

  8   voir des scènes plutôt horribles et désagréables.

  9   Q.  Oui, je comprends, mais tout ce que j'essaie d'établir c'est que, comme

 10   vous disiez dans votre rapport, si les policiers mènent une opération de

 11   nettoyage en nettoyant le territoire des extrémistes musulmans, vous nous

 12   décrivez un incident, par exemple, cela ressemble à un crime régulier quand

 13   des personnes font irruption dans un poste de police en tuant 11 personnes,

 14   en les arrosant d'essence et en mettant le feu à tout cela. Cet événement,

 15   par exemple, n'a rien à voir avec des opérations menées par l'armée, n'est-

 16   ce pas ?

 17   R.  Vous ne m'avez peut-être pas bien compris. Lorsque j'ai mentionné ce

 18   cas, je parlais d'un autre contexte. Nous avions 11 policiers qui avaient

 19   péri dans une embuscade. On les avait arrosés ou aspergés d'essence et on

 20   les a incendiés. Je voulais simplement vous donner cet exemple pour vous

 21   montrer contre qui nous devions nous battre. Il est effectivement vrai

 22   qu'un soldat normal n'aurait jamais fait cela. Il s'agit d'une personne

 23   malade. Cela est insensé. Vous savez, ces personnes, ces corps incendiés,

 24   je les ai recueillis moi-même. Nous pouvions les identifier seulement

 25   d'après leur emprunte dentaire, et cetera. Donc pendant trois jours je n'ai

 26   pas pu manger. J'étais particulièrement troublé. Je vous parle simplement

 27   d'un exemple d'acte inhumain que j'essaie d'oublier depuis.

 28   M. KRGOVIC : [interprétation] Correction pour le compte rendu d'audience.

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  1   Il a dit : "Ces personnes-là, ces personnes-là sont des extrémistes." C'est

  2   ce qui n'est pas consigné au compte rendu d'audience. Donc : "Ces

  3   personnes, ces assaillants, sont ces personnes," c'est ce qu'il a dit et

  4   c'est ce qui manque au compte rendu d'audience.

  5   Mme KORNER : [interprétation]

  6   Q.  D'accord. Dernière tentative de clarifier ce point. Lorsque vous avez

  7   écrit dans votre rapport les mots suivants, je cite -- mais attendez.

  8   Voilà.

  9   "… un très grand nombre de policiers sont engagés à nettoyer le terrain des

 10   extrémistes musulmans."

 11   Dites-nous ce qu'ils faisaient.

 12   R.  Je crois que nous en avons déjà parlé. Lorsqu'on parle de

 13   ratissage du terrain ou du nettoyage de terrain, ça veut dire qu'il fallait

 14   assurer la sécurité du territoire afin de ne pas permettre à ce type de

 15   groupe de faire incursion.

 16   Je vais essayer de vous dépeindre l'image de façon militaire. Par

 17   exemple, à un endroit il y a les activités militaires de combat. Ailleurs,

 18   il y a un groupuscule qui n'a pas eu le temps de se retirer, donc dans ce

 19   sens-là, si vous pouvez me comprendre, nous pouvons peut-être essayer de

 20   comprendre ce que veut dire ce nettoyage. Ça veut dire que les activités de

 21   combat ont encore lieu et on ne sait pas qui attaquera qui. Si le policer

 22   arrive sur la ligne par la suite, il doit savoir si son dos est protégé

 23   pour ne pas qu'il y ait une attaque effectuée par l'arrière. Donc, c'est

 24   dans ce sens-là que je pensais au nettoyage du terrain. Il y avait des

 25   groupes, des escarmouches entre ces groupes. D'un point de vue militaire,

 26   c'est cela que je voulais dire.

 27   Q.  Je suis vraiment désolée, Monsieur, mais vous ne parlez pas du tout de

 28   la police comme étant resubordonnée à l'armée. Vous parlez de policiers qui

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  1   agissent en tant que policiers. C'est ce que dit le rapport. Parce que dans

  2   la ligne suivante, vous faites une distinction entre l'engagement de la

  3   police sur la ligne de front et leur nettoyage du terrain. Donc il y a en

  4   fait une différence entre les deux termes, n'est-ce pas ?

  5   R.  Non, c'est peut-être une omission de ma part, je me suis peut-être mal

  6   exprimé. Vous savez, on ne peut pas toujours être concentré, surtout à

  7   l'époque, pour tout mettre cela très bien par écrit. Je vois que vous

  8   examinez le tout d'un point de vue juridique, mais vous devez essayer de me

  9   comprendre que dans les circonstances, l'aspect pratique y était. Donc

 10   c'est peut-être cela qui vous embête.

 11   Q.  Non, je ne regarde pas ce document d'un point de vue juridique.

 12   J'aimerais simplement savoir, cet incident que vous avez décrit s'agissant

 13   de ces policiers qui avaient été embusqués et incendiés, pourriez-vous nous

 14   décrire cet incident, s'il vous plaît, du meilleur de votre souvenir ?

 15   R.  Ce n'est pas le genre d'événement que l'on peut oublier ni le temps ne

 16   peut les effacer. A l'époque, les policiers devaient être déployés à un

 17   endroit --

 18   Q.  Non. Je veux simplement savoir quelle est la date à laquelle l'incident

 19   est arrivé, le mois et l'année, s'il vous plaît, et l'endroit où cet

 20   incident a eu lieu.

 21   R.  L'incident a eu lieu sur le territoire de la municipalité de Skelani.

 22   Donc à Podrinje. J'ai un peu oublié le nom de l'endroit. C'est Kragivode,

 23   voilà, je viens de me rappeler. Kragivode, c'est un carrefour de villages

 24   qui mène vers la forêt. Il y avait des policiers, on les a vraiment pris en

 25   embuscade. Ils étaient coincés des deux côtés. Personne n'a pu tirer de

 26   coup de feu. Par la suite, ils ont été aspergés d'essence et ils ont été

 27   incendiés. Donc c'est sur la municipalité de Skelani --

 28   Q.  Oui, vous nous l'avez dit. Vous nous l'avez dit. Je veux simplement

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  1   savoir la date, s'il vous plaît.

  2   R.  C'était en avril 1993. Mais je n'ai pas la date précise. Au mois

  3   d'avril.

  4   Q.  C'était en 1993.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Si je puis, Madame Korner.

  6   Mme KORNER : [interprétation] Oui, certainement, Monsieur le Juge.

  7   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Voilà, s'agissant du nettoyage du

  8   terrain d'extrémistes musulmans, vous nous parliez de la région où cela se

  9   passait, vous dites que c'était fait pour protéger les villageois.

 10   Pourriez-vous préciser ce point, s'il vous plaît, pourriez-vous approfondir

 11   ce que vous avez dit ? De quels villageois parlez-vous ? Est-ce que

 12   c'étaient des hameaux serbes, s'agissait-il d'hameaux musulmans, ou bien

 13   est-ce qu'en fait il n'y avait pas vraiment -- de quoi en est-il ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] C'étaient des hameaux et des villages où

 15   principalement une population serbe vivait. Je ne sais pas, c'était peut-

 16   être mixte également en partie. Mais lorsque la guerre a éclaté, toute

 17   personne sensée, je dois le dire, pour leur propre sécurité peut-être

 18   quittaient les parties à risque. Même s'il y avait des Musulmans, ils

 19   s'étaient retirés à temps, je présume cela, je ne l'affirme pas. Je ne sais

 20   même pas si c'étaient des villages qui étaient ethniquement purement

 21   Serbes. Mais tout ce que je peux vous dire avec certitude c'est que les

 22   policiers -- est-ce que vous m'entendez, allô, allô ? Oui. Alors, que si

 23   les policiers savaient que quelqu'un était menacé dans un village ou autre,

 24   s'ils ont appris cela de par le commandement ou autrement, ils essayaient

 25   très rapidement de protéger les citoyens pour que les crimes ne se passent

 26   pas comme il y avait des crimes sur le territoire, car des crimes s'étaient

 27   produits sur ce territoire, et tout ceci est documenté, il y a des

 28   documents à l'appui de cela. Cela donc ce n'est pas contesté.

Page 6699

  1   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Lorsque vous avez dit que c'est tout

  2   à fait normal dans toutes les guerres lorsqu'on prend possession d'un

  3   territoire et que l'on doit s'emparer de tout, lorsque vous dites qu'il

  4   fallait "nettoyer le terrain des extrémistes musulmans," est-ce que cela

  5   voulait dire éliminer tous les Musulmans du territoire que l'on prend ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois pas les choses comme ça, ce n'est

  7   pas ce que j'ai décrit non plus. Lorsque je parle d'un "nettoyage", je

  8   parle d'un nettoyage au cours d'une activité militaire. Donc il y a un

  9   groupuscule de personnes qui se trouvait de l'autre côté, et il pouvait y

 10   avoir encore des activités de combat actif, des échanges de tirs. Donc

 11   nettoyer le terrain, cela voulait dire protéger les arrières. C'était un

 12   conflit purement militaire.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie. Merci beaucoup.

 14   Mme KORNER : [interprétation] Une dernière question.

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] C'est l'heure de la pause, de toute

 16   façon. Nous reprendrons nos travaux --

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [aucune interprétation]

 18   Mme KORNER : [interprétation] Je demandais le versement au dossier de cette

 19   pièce.

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bien, la pièce est versée au dossier.

 21   Quelle en sera la cote.

 22   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la cote P993.

 23   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Donc nous reprendrons nos travaux dans

 24   20 minutes.

 25   --- L'audience est suspendue à 10 heures 29.

 26   [Le témoin quitte la barre]

 27   --- L'audience est reprise à 10 heures 55.

 28   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Continuons.

Page 6700

  1   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, je viens de recevoir

  2   des mauvaises nouvelles de Mme la Greffière d'audience par rapport au temps

  3   qui m'a été accordé, j'ai seulement cinq minutes qui me restent parce qu'on

  4   m'a accordé quatre heures.

  5   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, Madame Korner.

  6   Mme KORNER : [interprétation] Merci beaucoup.

  7   M. PANTELIC : [interprétation] Entre-temps, Monsieur le Président, si la

  8   Défense recevra la même mauvaise nouvelle que Mme Korner, nous serions donc

  9   reconnaissants si la Chambre considère notre demande de la même façon.

 10   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous allons le faire au moment propice

 11   pour le faire.

 12   M. PANTELIC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 13   [Le témoin vient à la barre]

 14   Mme KORNER : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur Borovcanin, j'ai pensé qu'on en avait fini avec le

 16   document, mais pendant la pause je me suis rendue compte que j'aimerais

 17   vous poser d'autres questions concernant ce document. D'abord, qu'est-ce

 18   que vous entendez par le terme "extrémistes musulmans" pour ce qui est de

 19   l'incident que vous avez décrit qui est survenu en 1993, pourtant ce

 20   rapport est du mois d'août 1992. Donc de quels incidents avez-vous parlé

 21   qui se sont passés jusqu'au mois d'août 1992 ?

 22   R.  Il s'agit des crimes de guerre contre la population civile, il y avait

 23   eu des cadavres massacrés. Je ne sais pas qui a pu faire cela, ce crime

 24   atroce. Cela ne pouvait être que des extrémistes, pas des gens normaux.

 25   J'ai pensé à ces incidents de 1992, et j'ai cité un exemple de 1993.

 26   Q.  Mais pouvez-vous vous rappeler un incident particulier que vous avez

 27   mentionné dans le rapport concernant les extrémistes musulmans en 1992 ?

 28   Mme KORNER : [interprétation] J'aimerais dire également que je ne vois rien

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  1   sur mon écran. Je ne sais pas si on peut appeler un technicien.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était il y a longtemps. Pour vous dire un

  3   exemple concret, un exemple concernant un incident isolé, je suis désolé,

  4   je ne peux pas m'en souvenir aujourd'hui. Mais je parle des incidents qui

  5   se sont passés, et je parle en général de ces incidents et je parle des

  6   "extrémistes", donc j'ai utilisé ce terme par rapport à ces incidents.

  7   Mme KORNER : [interprétation]

  8   Q.  Vous nous avez dit ensuite que vous êtes parti, vous en personne, sur

  9   les lieux du crime pour mener une enquête sur les lieux. Mais vous avez dit

 10   avant que cela ne faisait pas partie de vos tâches quotidiennes, que

 11   c'étaient les tâches de la police judiciaire. Pourquoi en 1993 vous êtes-

 12   vous rendu sur les lieux du crime ?

 13   R.  En 1993, je me trouvais sur le terrain. Moi, j'étais sur le terrain en

 14   tant que supérieur pendant une vingtaine de jours, et pendant mon séjour

 15   sur le terrain, cet incident a eu lieu, à savoir cette embuscade a été

 16   tendue que j'ai déjà mentionnée. Je menais une enquête avec le représentant

 17   de la police judiciaire, Bosico Stoja [phon], qui malheureusement s'est

 18   fait tuer dans une autre embuscade au même endroit. Nous devions donc

 19   informer leurs familles de cet incident parce qu'il y avait des rumeurs qui

 20   circulaient selon lesquelles ces personnes ont été torturées, et cetera.

 21   Nous avons fait une vidéo des lieux du crime, il y a des documents qui

 22   corroborent cela aussi.

 23   Q.  Pour ce qui est de la police judiciaire, en fait, où ce crime a été

 24   commis, cette zone a été sécurisée par la police en uniforme, n'est-ce pas

 25   ?

 26   R.  Pour ce qui est de cet incident de la commission du crime, le crime a

 27   été commis en profondeur du territoire.

 28   Q.  Je ne parle pas de cet incident. Je parle de la procédure en principe.

Page 6702

  1   Lorsqu'un crime est commis et lorsqu'une enquête est menée sur place, est-

  2   ce que ce sont les policiers en uniforme qui assurent la sécurité des lieux

  3   du crime ?

  4   R.  Bien sûr. La police judiciaire s'occupe des éléments techniques, ils

  5   photographient les lieux du crime, ramassent toutes les pièces à

  6   conviction, et la police assure la sécurité des lieux du crime au sens

  7   général. Parce que cela ne s'est pas passé dans une pièce, cela s'est passé

  8   sur le territoire de deux ou trois ou plusieurs villages, et c'est pour

  9   cela que la police assurait la sécurité de cet endroit pendant que

 10   l'enquête a été menée sur place.

 11   Q.  La police en uniforme relevait de votre juridiction, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Finalement pour ce qui est de cet aspect particulier des incidents : Le

 14   rapport que vous avez rédigé, ou plutôt vos inspecteurs, est-ce que ce

 15   rapport a été envoyé au chef du CSB, M. Cvijetic ?

 16   R.  Cela est sous-entendu. Parce qu'à chaque fois nous devions en informer

 17   nos supérieurs au centre, au MUP. Surtout s'il s'agissait des choses

 18   urgentes, on procédait d'après des instructions concernant l'envoi des

 19   informations au centre, et dans les dispositions de ces instructions, tout

 20   a été expliqué en détail.

 21   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse. Mais je

 22   vais faire une pause en attendant que mon écran ne soit réparé.

 23   Q.  Mais est-ce que vos rapports ont été insérés dans des rapports mensuels

 24   que le CSB devait envoyer au ministre ?

 25   R.  Oui. Je viens de mentionner des instructions selon lesquelles on

 26   travaillait, il s'agissait des instructions, et il a fallu envoyer des

 27   informations concernant des meurtres de façon urgente, mensuellement, tous

 28   les trois mois et tous les six mois, et de temps en temps aussi, lorsqu'on

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  1   procédait à des analyses de la situation. Tout cela se trouve dans les

  2   instructions, tout cela est expliqué en détail dans les instructions. Et,

  3   bien sûr, qu'on envoyait des informations régulièrement.

  4   Q.  Oui. Merci. C'étaient toutes les questions que j'ai voulu vous poser

  5   concernant ce sujet. Maintenant j'aimerais qu'on regarde brièvement le

  6   document qui porte le numéro -- juste un instant, s'il vous plaît. Il faut

  7   que je retrouve le numéro du document. C'est 318, le document 318 sur la

  8   liste 65 ter.

  9   Il s'agit de la réponse du SJB de Vlasenica datée du 6 août, il s'agit de

 10   la demande des informations. Nous avons déjà vu cela avant. Je ne sais pas

 11   de quel numéro il s'agissait, mais c'est le document qui a été transféré

 12   par le chef du CSB à la date du 25 juillet, et nous avons déjà vu cela, je

 13   pense que c'est le document dont vous connaissez le contenu, et vous

 14   connaissez Mane Djuric, qui était chef du SJB ?

 15   R.  Oui, je le connais.

 16   Q.  Très bien.

 17   Mme KORNER : [interprétation] Est-ce que nous pourrions regarder le bas de

 18   la première page dans la version en anglais, et il s'agit du deuxième

 19   paragraphe dans la version en B/C/S.

 20   Q.  Où il est dit, je cite :

 21   "Sur le territoire de ce poste, il n'y avait pas d'activités de combat des

 22   unités paramilitaires alors qu'il y avait plusieurs infractions pénales

 23   commises par les membres des 'Bérets rouges,' à savoir il y avait des

 24   transits illicites ou non autorisés des véhicules volés par cette région."

 25   Mme KORNER : [interprétation] Maintenant nous avons besoin de la deuxième

 26   page en anglais. En anglais, c'est également à la deuxième page. En tout

 27   cas, c'est ce qui figure à cette page.

 28   J'aimerais qu'on revienne à la première page de la version en B/C/S

Page 6704

  1   parce que le témoin a besoin de cette page.

  2   Q.  Dans la lumière de tout ce qu'on a pu voir dans vos rapports et dans

  3   les rapports de vos inspecteurs, lorsque vous avez vu ce rapport

  4   particulier en 1992, n'étiez-vous pas surpris de voir que le seul crime qui

  5   a été enregistré et commis par un groupe paramilitaire était le vol ou le

  6   transit non autorisé de véhicules volés ?

  7   R.  Bien sûr que non, ce n'était pas la seule infraction pénale

  8   enregistrée, mais si vous regardez dans le document où il est écrit :

  9   "La coopération entre le MUP et l'armée," et on a fait référence à la

 10   dépêche du 27 juillet 1992.

 11   C'est-à-dire qu'on a demandé des informations plus concrètes qui ne

 12   concernent que la coopération entre le MUP et l'armée. C'est dans ce

 13   document qu'ils ont mentionné, comme cela figure d'ailleurs dans le

 14   document, ils ont mentionné des infractions pénales de la part des membres

 15   des 'Bérets rouges', et cetera, le vol de véhicules, et cetera, mais ils se

 16   sont concentrés sur l'engagement de la police et de sa coopération avec

 17   l'armée.

 18   Bien sûr qu'il y avait d'autres types d'infractions pénales commises,

 19   mais il y avait des rapports là-dessus plus tard et vous avez accès à ces

 20   rapports d'ailleurs.

 21   Q.  Très bien. Je vous remercie.

 22   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais qu'on

 23   octroie une cote à cette pièce et que cette pièce soit versée au dossier.

 24   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Cela sera fait.

 25   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce à conviction sous la

 26   cote P994, Monsieur le Président.

 27   Mme KORNER : [interprétation] Excusez-moi, j'ai besoin de vérifier le

 28   numéro du document suivant.

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  1   Q.  Oui, je l'ai retrouvé. Est-ce que vous pourriez maintenant regarder le

  2   document qui porte le numéro 394 sur la liste 65 ter. C'est la réponse du

  3   poste de police de Pale pour ce qui est du rapport qu'on a déjà vu

  4   aujourd'hui, c'est-à-dire la demande d'obtenir des informations concernant

  5   des unités paramilitaires, cela a été envoyé à votre centre.

  6   "Nous vous informons, par rapport à votre document : 

  7   "a) qu'il n'y avait pas d'unités paramilitaires sur le territoire de

  8   ce poste de sécurité publique, il n'y en a pas même aujourd'hui."

  9   Il s'agit donc du 7 août. Pour ce qui est du 3 août, dans ce rapport

 10   il est dit que les hommes d'Arkan se trouvent à l'hôtel Panorama. Pouvez-

 11   vous nous expliquer comment le poste de police de Pale a pu envoyer une

 12   telle réponse vu la phrase suivante ?

 13   R.  Ce n'est pas logique. C'était peut-être une faute du chef du

 14   poste de police. Je maintiens toujours qu'il n'y en avait pas à Pale. A

 15   Pale, il y avait beaucoup de gens qui venaient et qui partaient, qui

 16   passaient par Pale. Je suis surpris de voir que le chef du poste de

 17   sécurité publique n'a pas mentionné cela dans son rapport. Ou bien il est

 18   possible qu'au mois d'août il n'y en avait plus. Il a peut-être omis de

 19   faire apparaître les informations plus précises dans ce rapport.

 20   Q.  Bien, cela se passe quatre jours après le rapport rédigé par vos

 21   inspecteurs, et dans ce rapport on nie la présence des formations

 22   paramilitaires à Pale, si vous regardez sous (a). Parce que sous (a) il est

 23   dit, je cite :

 24   "Il n'y avait pas de formations paramilitaires par le passé… et il

 25   n'y en a pas aujourd'hui non plus."

 26   R.  C'est ce qui figure dans ce document. Oui, et sur cela je suis d'accord

 27   avec vous. Mais voilà mon commentaire, ici dans ce document le chef a omis

 28   probablement de dire qu'il n'y avait pas de formations paramilitaires par

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  1   le passé. D'ailleurs, on peut vérifier cela en se penchant sur d'autres

  2   documents et en convoquant d'autres témoins pour témoigner ici. Je ne veux

  3   pas me livrer dans des conjectures, je ne sais pas vraiment pourquoi il n'a

  4   pas écrit cela dans ce rapport. Donc j'émets des réserves par rapport à ce

  5   rapport.

  6   Q.  Il ne s'agit pas d'une omission, n'est-ce pas ? Il s'agit d'un mensonge

  7   tout court. Avez-vous mentionné cela à votre chef ou à M. Stanisic lors de

  8   l'une des réunions du collège ?

  9   R.  Pour ce qui est de ce cas je ne l'ai pas mentionné, mais on a parlé de

 10   tout cela en général, c'était un problème. Je suis surpris, pour être

 11   franc, pour ce qui est de ces constatations dans ce document.

 12   Mais on peut réfléchir d'une autre façon également. Pourquoi aurait-il dit

 13   qu'il n'y en avait pas si ces hommes gênaient les autres ? Cela n'est pas

 14   logique, cela n'est pas compatible. Je sais que le chef était un homme

 15   d'opération, et je ne crois pas qu'il aurait permis que qui que ce soit se

 16   trouve sur son territoire pour piller, pour commettre d'autres infractions

 17   pénales, et cetera. Je ne peux vous donner que ce commentaire.

 18   Q.  Bien sûr, Pale était le siège du gouvernement, n'est-ce pas ? M.

 19   Karadzic et les autres s'y trouvaient.

 20   R.  Oui. A Pale se trouvait le siège du gouvernement à l'hôtel Panorama

 21   pendant une période de temps, ensuite il y avait des cabanes préfabriquées

 22   où se trouvaient divers ministères. C'était la raison de plus pour se

 23   débarrasser de ces personnes. C'est pour cela que je suis surpris en lisant

 24   dans ce rapport qu'il n'y avait pas de formations paramilitaires.

 25   Q.  Bien.

 26   Mme KORNER : [interprétation] Maintenant regardez ce qui figure au point

 27   (d), dans la version en anglais cela se trouve à la deuxième page.

 28   Seulement dans la version en anglais, et non pas dans la version en B/C/S.

Page 6707

  1   Q.  Je cite :

  2   "Nous n'avons pas eu de prisonniers capturés par l'armée, mais nous avons

  3   eu des prisonniers capturés et gardés par la police. A présent, nous

  4   n'avons pas de prisonniers, et il n'y en avait pas non plus pendant une

  5   période de temps assez longue."

  6   Voilà ma question par rapport à cela. Les prisonniers qui ont été capturés

  7   par la police, et non pas par l'armée.

  8   Par rapport à cela, hier je vous ai posé la question concernant la maison

  9   de la culture, et vous avez dit que vous avez entendu dire que dans la

 10   maison de la culture il y avait des prisonniers, des gens qui étaient

 11   détenus là-bas. Est-ce que vous êtes surpris par ce qui figure au point (d)

 12   ?

 13   R.  Je réitère que j'ai entendu dire que les gens s'y trouvaient pendant

 14   cette période de temps dans la maison de la culture. Dans la deuxième

 15   constatation où il dit -- juste un instant. Il faut que je sois précis dans

 16   mes citations.

 17   "Nous n'avions pas de prisonniers capturés par l'armée, mais nous avions

 18   des prisonniers capturés, emmenés et gardés par la police."

 19   Il m'est difficile de donner des commentaires par rapport à cela et par

 20   rapport à ce qu'il a voulu dire par là, mais je peux supposer que les

 21   Musulmans des villages aux alentours venaient de la zone de combat et tout

 22   simplement ils demandaient la protection de la polie, et pendant une

 23   certaine période de temps la police les protégeait. Même si je n'étais pas

 24   présent à l'époque. Après quoi, la police les transportait jusqu'à la ligne

 25   de démarcation. C'est comme ça que j'ai compris votre question, et c'est

 26   pour cela que je vous donne cette réponse.

 27   Q.  Je m'excuse. Selon vous, le mot "prisonniers" veut dire réfugiés qui

 28   demandent la protection ? C'est comme ça que vous comprenez le mot

Page 6708

  1   "prisonnier", c'est ce que vous avez dit à la Chambre ?

  2   R.  Ecoutez-moi, le mot prisonnier au sens militaire. Je ne sais pas à

  3   quelles personnes le chef qui a écrit ce rapport a pensé quand il a écrit

  4   "prisonniers", mais les personnes qui sont sous la protection de la police

  5   ou gardées par la police sont privées de leur liberté d'une façon, mais

  6   imaginez la situation où ces personnes sont relâchées et rencontrent un

  7   groupe paramilitaire non contrôlé et que les crimes sont commis sur ces

  8   gens, cela aurait été la honte de la police. Donc le terme prisonnier, je

  9   le comprends comme cela. Il y avait peut-être des prisonniers de guerre à

 10   ce moment-là, mais je n'en sais rien.

 11   Q.  Bien, je ne sais pas. Je ne veux pas qu'on développe davantage ce sujet

 12   par rapport à cette expression, Monsieur Borovcanin. Je ne veux plus vous

 13   poser de questions concernant ce document.

 14   Mme KORNER : [interprétation] J'aimerais que ce document soit versé au

 15   dossier et qu'une cote lui soit accordé.

 16   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je suppose qu'il y a une raison

 17   technique pour laquelle on ne devrait pas verser ce document par le biais

 18   de ce témoin, mais en tout cas, cela sera versé au dossier.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] En tant que pièce ayant la cote 995.

 20   Mme KORNER : [interprétation] C'est le chef de la police qui a signé le

 21   document et non pas le témoin.

 22   Q.  Maintenant, regardez le document 1573, s'il vous plaît.

 23   Mme KORNER : [interprétation] Est-ce qu'on peut faire défiler le document

 24   vers le bas. Non, non. C'est bien comme cela.

 25   Q.  Il s'agit du rapport du commandement du Corps de Sarajevo Romanija, et

 26   je suppose que vous l'avez déjà vu auparavant. J'aimerais vous poser des

 27   questions concernant le point 4, "Morale." Par rapport aux trois dernières

 28   phrases de ce paragraphe où il est dit, je cite :

Page 6709

  1   "Les formations paramilitaires qui ne sont toujours pas désarmées causent

  2   des problèmes, elles se comportent de façon plus violente et elles sont

  3   arrogantes. Le fait de désarmer ces formations ne sera pas possible sans

  4   des conflits armés avec eux, en particulier parce qu'elles sont soutenues

  5   par des organes des autorités locales et de la police."

  6   Etiez-vous au courant du fait, vu les rapports de vos inspecteurs pour ce

  7   qui est de cette région, étiez-vous au courant du fait que la police

  8   soutenait et d'ailleurs créait des formations paramilitaires ?

  9   R.  Ce qui est écrit ici dans ce rapport, je cite deux phrases :

 10   "Parce que certains organes et certaines autorités locales et ainsi que la

 11   police les soutiennent, c'est une raison de plus qu'il faut s'en occuper."

 12   Donc la police ne les soutenait pas du tout, absolument pas. J'en

 13   suis sûr parce que nous ne les avons jamais autorisés à agir dans ce sens-

 14   là, et je ne sais pas comment les organes militaires ont pu écrire cela.

 15   Pour ce qui est des autorités locales, je ne peux pas vous donner de

 16   commentaires de certains parce que je ne sais pas si les autorités locales

 17   les soutenaient et si les formations paramilitaires agissaient sous leur

 18   égide. Mais dire que la police les soutenait, ce n'est pas vrai parce

 19   qu'ils nous ont causé beaucoup de problèmes.

 20    Q.  Oui, mais vous voyez, avant nous avons parcouru un rapport concernant

 21   -- et maintenant j'ai oublié de quel rapport et de quel SJB il s'agissait,

 22   mais il est dit dans ce rapport qu'une unité de la police spéciale qui n'a

 23   pas été formée de façon officielle a été rattachée à l'armée. Ne

 24   s'agissait-il pas des unités paramilitaires ? Parce que ces unités ne

 25   représentaient pas les unités de la police ni les unités de l'armée.

 26   R.  Il ne s'agissait pas de l'armée paramilitaire. Il s'agissait des

 27   citoyens de Bosnie-Herzégovine. Pour ce qui est de

 28   membres d'unités paramilitaires, ils n'étaient pas citoyens. Ils étaient

Page 6710

  1   les citoyens des pays étrangers. A l'époque, il s'agissait donc des

  2   citoyens de la République fédérale de Yougoslavie.

  3   Q.  Donc vous dites que les paramilitaires n'étaient les citoyens de la

  4   Bosnie-Herzégovine ?

  5   R.  Oui, bien sûr, je ne dis pas qu'il n'y avait pas des unités

  6   paramilitaires constituées des criminels qui portaient des uniformes et qui

  7   n'étaient pas contrôlés, ce n'est pas l'armée. Mais je parle des groupes

  8   qui étaient apparus à plusieurs endroits, 95 % des membres de ces unités

  9   venaient du territoire de la Yougoslavie, de la République fédérale de

 10   Yougoslavie ou de la Serbie.

 11   Vous avez mentionné Vlasenica et les unités de la police spéciale, là

 12   il s'agissait des gens locaux, des membres des effectifs de réserve. Mais

 13   on a déjà parlé de cela.

 14   Q.  Est-ce qu'on peut regarder le bas de la page, bas du document, où on

 15   voit la date du 18 août.

 16   Mme KORNER : [interprétation] J'aimerais qu'on fasse défiler la page

 17   vers le bas pour qu'on voit cette date.

 18   Evidemment je ne peux pas demander le versement au dossier de ce

 19   document, j'aimerais par contre qu'on accorde une cote provisoire aux fins

 20   d'identification à ce document, après quoi nous allons demander --

 21   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 22   Mme KORNER : [interprétation] Ce document était déjà versé au dossier. Je

 23   m'excuse. Permettez-moi de vérifier la même chose pour ce qui est du

 24   document suivant parce qu'il semble que ce document aussi a été versé au

 25   dossier.

 26   Mais je veux qu'on revienne sur le document qui est déjà versé au

 27   dossier. Il s'agit d'un rapport qui porte la cote P632.

 28   Q.  Il s'agit d'une autre inspection qui a été effectuée le 10 août. Il

Page 6711

  1   s'agit de l'inspection effectuée au CSB et également au SJB, au poste de

  2   sécurité publique, à Ilidza et à Vogosca. C'est ce qui figure au troisième

  3   paragraphe, et vous avez participé à cette inspection.

  4   Le document est signé par M. Rade Radovic, chef chargé des activités de la

  5   police, qui était à la tête de ce département. Le connaissiez-vous ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Bien. Est-ce qu'on peut parler d'un aspect de ce document. A Ilidza, on

  8   parle de la discussion portant sur les unités paramilitaires, c'est en bas

  9   de la première page en anglais.

 10   Mme KORNER : [interprétation] Et maintenant j'aimerais qu'on affiche la

 11   deuxième page en anglais et en B/C/S.

 12   Q.  Dans les deux versions au deuxième paragraphe, il est dit, je cite :

 13   "Le problème des unités spéciales à Ilidza sera résolu en adoptant le

 14   document portant sur la hiérarchie, l'organigramme dont le projet existe

 15   déjà, et cela sera donc harmonisé avec le CSB."

 16   De quel problème s'agissait-il à Ilidza ?

 17   R.  Le problème était similaire au problème à Vlasenica. Ilidza était

 18   spécifique parce que Ilidza était encerclé de tous les côtés, presque de

 19   tous les côtés, et c'est à Ilidza qu'on a dû former ces unités spéciales

 20   pendant des activités de combat intense auprès du poste de police. Puisque

 21   lors de nos réunions on a décidé de rétablir l'ordre pour ce qui est des

 22   unités spéciales, puisque au sein du ministère il n'y avait qu'un

 23   détachement de la police spéciale constituée des membres qui s'occupaient

 24   des mêmes activités au MUP conjoint avant, c'est pour cela qu'on a voulu

 25   que la situation soit claire, que ces unités relèvent d'un seul

 26   commandement. Mais c'est une autre histoire. Posez-moi des questions, s'il

 27   vous plaît, concernant des choses plus concrètes, plus spécifiques, et je

 28   vais essayer de vous donner des réponses.

Page 6712

  1   Q.  J'ai une question concrète pour vous, Monsieur Borovcanin, et c'est la

  2   question suivante : Est-ce que ces unités de la police spéciale étaient les

  3   unités non contrôlées, et est-ce que ces unités ont commis des crimes ?

  4   R.  Ces unités étaient contrôlées par le poste de sécurité publique local,

  5   en tout cas s'il s'agit des effectifs de réserve de la police qui ont été

  6   rattachés au poste de police. Mais pour vous rappeler, autrefois dans des

  7   plans, pour ce qui est de la Défense générale et populaire, au cas où une

  8   autre guerre aurait éclatée au poste de sécurité publique, il a été prévu,

  9   par exemple à Rakovica, à Blazuj, c'est sur le territoire d'Ilidza, il a

 10   été prévu de former ces unités constituées des membres des effectifs de

 11   réserve de la police. Et ces membres ont été rattachés au poste de sécurité

 12   publique de police selon leurs affectations au sein de ces postes de

 13   police. Et c'est comme cela qu'il y avait des professionnels, des policiers

 14   d'active et des autres plus jeunes qui ont formé l'unité de la police

 15   spéciale. Ils ont agi tout au début dans les premier mois de combat à

 16   Ilidza, où il y avait des combats quotidiens à Ilidza. Je vais vous

 17   rappeler qu'à l'époque on ne disposait pas de communication téléphonique,

 18   et nous ne pouvions pas prévenir tout cela ou s'occuper de l'ordre général

 19   sur ce territoire. C'était donc la situation générale qui prévalait à

 20   l'époque sur ce territoire.

 21   Q.  Nous allons revenir à la communication. Mais nous parlons bien d'août

 22   1992. Vous avez justement, vous-même, vous vous êtes occupé de cet

 23   entretien, vous avez eu une communication en août 1992, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui, certainement. Je sais que vous parlez du mois d'août, mais

 25   j'essayais simplement d'expliquer comment il est advenu que ces unités

 26   soient établies. Ensuite, c'est plus tard dans 20 ou 25 SJB, que nous avons

 27   dû aller là-bas inspecter le poste, c'était un processus en continu.

 28   Q.  Mais vous n'avez pas répondu à la question que je vous ai posée au

Page 6713

  1   début. Est-ce que vous étiez au courant que ces dites unités spéciales

  2   commettaient des crimes, et c'est ce qui était entendu par le mot

  3   "problème" ?

  4   R.  Non, je n'en avais jamais entendu parler.

  5   Q.  Et qui était le chef de la police à Ilidza en août 1992 ?

  6   R.  Je n'en suis pas sûr. Je sais que c'était Tomislav Kovac au début, mais

  7   en août, est-ce que c'était Budisa Petko, je n'en suis pas sûr. J'ai

  8   oublié. Je sais que Tomislav Kovac ensuite a occupé d'autres postes au MUP.

  9   Q.  Il est devenu ensuite ministre de l'Intérieur, n'est-ce pas ?

 10   R.  Mais ça c'est plus tard, ça s'est fait progressivement. Je crois qu'au

 11   début il était là en qualité d'assistant.

 12   Q.  Autre chose. Toujours sur le rapport.

 13   Mme KORNER : [interprétation] Je vous invite à aller maintenant à la page 3

 14   de la version en anglais qui correspond à la page 2, c'est toujours la page

 15   2 dans la version en B/C/S.

 16   Q.  Il s'agit d'un rapport rédigé le 10 août, ensuite il y avait le rapport

 17   du poste de police de Pale, qui lui, datait du 7 août. Nous avons discuté

 18   de ce qui avait été dit, et dans ce rapport, trois jours plus tard :

 19   "Il a été écrit que lors de l'inspection du poste de sécurité

 20   publique de Pale, un groupe d'hommes d'Arkan était toujours présent, ils

 21   résidaient à l'hôtel Panorama. Il est question d'un problème, et on disait

 22   qu'en quelques jours, ce problème devait être résolu sans difficulté."

 23   Donc, il semblerait que M. Koroman, pour une raison ou pour une

 24   autre, mentait dans son rapport qui datait du 7 août.

 25   R.  Est-ce une question de votre part ?

 26   Q.  Oui.

 27   R.  Je ne peux pas dire qu'il mentait nécessairement. Peut-être a-t-il omis

 28   de signaler qu'ils avaient été arrêtés. Je ne veux pas me lancer dans de

Page 6714

  1   vaines spéculations.

  2   Q.  Etant donné que vous avez évoqué le problème de la communication,

  3   pouvons-nous maintenant y venir. Je vous invite à regarder le document 1859

  4   de la liste 65 ter.

  5   Il s'agit du rapport trimestriel du CSB envoyé au ministre, et qui couvre

  6   la période de juillet à septembre 1992.

  7   R.  C'est exact.

  8   Mme KORNER : [interprétation] Je vais vous demander de vous reporter à la

  9   version anglaise, à la page 5, qui correspond à la page 4 de la version

 10   B/C/S. C'est page 4 et page 5. En fait, on dit page 4 en haut, mais c'est

 11   la page 5, en B/C/S, désolé. Même si c'est bien 4 en haut de la page, il

 12   s'agit bien de la page 5 dans la version B/C/S.

 13   Q.  Alors, je ne veux pas vous en donner lecture, mais on voit, au deuxième

 14   paragraphe, dans la version anglaise, on voit qu'il est fait mention de la

 15   communication, on voit qu'il y a divers moyens d'établir la communication

 16   avec des ondes courtes, téléphone, téléfax, tous ces moyens de

 17   communication existent dans tous les services de la sécurité publique.

 18   Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que c'est une description qui

 19   est précise, même si je ne vais pas en donner une lecture exhaustive ?

 20   R.  Je crois, nous avions de nombreuses difficultés, surtout au début,

 21   jusqu'à ce que les choses s'organisent un petit peu, et les gens qui

 22   étaient directement impliqués dans ce travail connaissaient mieux la

 23   situation. Mais je sais qu'au début, nous avons rencontré quelques

 24   difficultés.

 25   Q.  Très bien. Donc, il n'y a eu aucun problème pour ce qui est de la

 26   présentation de ces rapports trimestriels, aucun problème de communication

 27   de ces rapports trimestriels, n'est-ce pas ?

 28   R.  Si, il y a eu des difficultés. Ça ne s'est pas toujours fait sans

Page 6715

  1   heurts. Il y a eu beaucoup de problèmes de communication. D'après mes

  2   souvenirs, mes tentatives de communication avec les gens étaient parfois

  3   difficiles, parfois il y avait des ruptures de communication, parfois

  4   c'était le fax qui ne fonctionnait pas, mais nous avons essayé de nous

  5   débrouiller quand même.

  6   Q.  Très bien. Alors, personne ne dit qu'il n'y a pas eu, de temps en

  7   temps, des problèmes ou des pannes, mais il n'y a jamais eu de moments où

  8   vous n'avez jamais été en mesure de communiquer du tout avec les différents

  9   services de la sécurité publique qui opérait dans votre zone de

 10   responsabilité, n'est-ce pas ?

 11   R.  Vous l'avez dit, vous-même. Notre intention était de bien communiquer

 12   et de bien faire rapport. Parfois, nous utilisions même des coursiers

 13   spéciaux. Donc, aucun problème sur ce point, nous avions l'intention de

 14   bien informer et de bien communiquer, et c'est ce que nous avons fait. Je

 15   ne vois pas le problème.

 16   Q.  Merci beaucoup. C'est tout ce que j'avais à vous demander à propos de

 17   la communication. J'aimerais maintenant que nous passions en revue quelques

 18   documents encore, ensuite de quoi, nous en avons terminé.

 19   Mme KORNER : [interprétation] J'essaie de réduire, autant que faire se

 20   peut, mon interrogatoire.

 21   Q.  J'aimerais vous demander d'examiner brièvement le document -- ou

 22   plutôt, c'est un document qui a déjà été versé au dossier, semble-t-il,

 23   désolé.

 24   Mme KORNER : [interprétation] Donc, Monsieur le Président, Messieurs les

 25   Juges, je vois que ces documents existent déjà sous forme de pièces à

 26   conviction.

 27   Q.  Alors, j'aimerais que vous examiniez le document 2882. Il porte la date

 28   du 24 août 1992, il émane du CSB, il fait référence à un document de la

Page 6716

  1   même date provenant du ministère de l'Intérieur, avec la demande

  2   d'information suivante, c'est une information qui doit répondre aux besoins

  3   du ministère de la Santé et des Affaires sociales.

  4   M. KRGOVIC : [interprétation] Il n'y a pas de traduction.

  5   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Désolé ?

  6   Mme KORNER : [interprétation] Il n'y avait pas d'interprétation.

  7   M. KRGOVIC : [interprétation] Pas d'interprétation.

  8   Mme KORNER : [interprétation]

  9   Q.  Est-ce que vous me comprenez maintenant, Monsieur Borovcanin ? Est-ce

 10   que vous avez l'interprétation B/C/S ?

 11   R.  Oui. Oui, je vous ai entendu, en fait, aucun problème.

 12   Q.  Très bien. Alors, c'est un document qui demande le nom des camps, des

 13   centres de rassemblement des prisonniers, et cetera, qui a émis telle et

 14   telle instruction, et cetera.

 15   Vous êtes bien au courant de ce document en date du 24 août 1992, et qui

 16   était signé par M. Cvijetic, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui. Et en fait, ce document ne fait que paraphraser le document reçu

 18   du MUP auquel M. Cvijetic fait justement référence dans son document,

 19   document d'août 1992. Indépendamment de la juridiction, parce qu'il n'y a

 20   pas eu de demande originale qui soit venue de l'institut de la sécurité

 21   sociale de la Republika Srpska, le ministère nous demande ces informations

 22   parce qu'il les considère comme importantes.

 23   Q.  Etes-vous au courant de l'émoi, sur le plan international, qu'ont

 24   suscité ces centres de rassemblement, qu'on appelait centres de

 25   rassemblement, particulièrement ceux de Prijedor ?

 26   R.  Vous savez, lorsque ces images ont été diffusées à la télévision, bien

 27   entendu, tout le monde a été en mesure de les voir, et les institutions qui

 28   étaient chargées de l'organisation de ces camps de rassemblement ont dû

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  1   faire de leur mieux pour protéger ces personnes et les mettre à l'abri des

  2   mauvais traitements. Bien entendu, c'était dans la zone de compétence de la

  3   Republika Srpska, tous ces camps se trouvaient dans leur zone de

  4   compétence. Et en fait, ce que nous faisions, c'est simplement rassembler

  5   des données, parce que les postes de police couvraient l'ensemble des

  6   territoires, et donc il était en mesure d'obtenir des informations sur

  7   l'ensemble du territoire qui était contrôlé à l'époque par l'armée. C'est

  8   ainsi que ces informations ont été rassemblées et ont été compilées. Voilà

  9   comment je comprends cette demande de la part du ministère et les autres

 10   courriers qui ont suivi.

 11   Q.  Lorsque vous avez vu les images à la télévision, vous-même, comment y

 12   avez-vous réagi ?

 13   R.  C'était extrêmement difficile, atroce de voir ces images. Je ne pense

 14   pas qu'une personne normalement constituée puisse approuver ce qui se

 15   passait dans cet endroit.

 16   Q.  Est-ce que vous connaissez Simo Drljaca ?

 17   R.  Peut-être superficiellement seulement avant la guerre. J'essaie de

 18   réfléchir, parce que j'avais fait des inspections de terrains avant la

 19   guerre. Chaque poste recevait une visite au moins une fois par an, il faut

 20   multiplier ensuite par 100, parce qu'il y avait une centaine de poste, et

 21   je crois que je l'avais rencontré à Prijedor avant la guerre effectivement.

 22   Mais je ne peux pas vous dire exactement quand je l'ai rencontré. Mais je

 23   ne l'ai pas rencontré pendant la guerre.

 24   Q.  Oui, merci.

 25   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 26   je demande le versement de la pièce au dossier.

 27   M. LE JUGE HALL : [aucune interprétation]

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] C'est donc la pièce P996, Monsieur le

Page 6718

  1   Président, Messieurs les Juges.

  2   Mme KORNER : [interprétation]

  3   Q.  Je vais maintenant vous demander de vous pencher sur le document qui

  4   est le document 319.

  5   Il s'agit, semble-t-il, d'un compte rendu de visite à Vlasenica une fois

  6   encore, signé par Sasa Blagojevic.

  7   Mme KORNER : [interprétation] Vous voyez sa signature à la deuxième page

  8   dans la version B/C/S, qui correspond à la troisième page en anglais.

  9   Q.  Connaissez-vous cet homme ?

 10   R.  Brièvement et superficiellement. Il était inspecteur au département de

 11   la police judiciaire. Je crois que c'est au cours de 1992 qu'il a tout

 12   simplement disparu. Il est parti en Serbie, et depuis lors, je n'ai pas

 13   entendu parler de lui.

 14   Q.  S'agissait-il d'une sorte d'inspection qui a donné lieu à ce compte

 15   rendu ?

 16   Mme KORNER : [interprétation] Je propose que nous en revenions à la

 17   première page dans la version anglaise, et c'est également la première page

 18   dans la version B/C/S.

 19   Q.  Donc est-ce qu'on peut dire qu'il s'agit d'une sorte de visite

 20   d'inspection ayant donné lieu à ce compte rendu ou à ce rapport ?

 21   R.  Oui. Un rapport d'inspection a été rédigé, rapport très bref, mais je

 22   peux en conclure que ce Blagojevic était un inspecteur venu du département

 23   de la police judiciaire. Je peux tirer cette conclusion. En tout cas,

 24   c'était un rapport très bref.

 25   Q.  Très bien. Je vais vous poser une question à propos d'un autre aspect

 26   de ce rapport.

 27   Mme KORNER : [interprétation] C'est à la page 2 en anglais, et c'est

 28   toujours la première page de la version B/C/S -- non, désolée. C'est la

Page 6719

  1   deuxième page en anglais et aussi la deuxième page en version B/C/S

  2   finalement.

  3   Q.  En bas de la page en anglais, on dit :

  4   "Ils essaient d'approfondir les informations existant à propos des Serbes

  5   qui ont vendu des armes aux Musulmans dans la zone de Vlasenica."

  6   Est-ce que c'est une difficulté que vous avez rencontrée auparavant, c'est-

  7   à-dire des Serbes vendant des armes aux Musulmans ?

  8   R.  Je ne sais pas. Maintenant que j'en prends connaissance, je trouve que

  9   c'est un petit peu difficile à croire. Ces incidents ont dû se produire à

 10   l'époque, mais je ne peux rien affirmer dans un sens ou dans un autre. Les

 11   gens sont parfois prêts à vendre leur âme pour de l'argent. Tout est

 12   possible.

 13   Q.  Merci.

 14   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 15   est-ce que nous pouvons donner une cote à cette pièce et la verser au

 16   dossier.

 17   M. LE JUGE HALL : [aucune interprétation]

 18   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P997, Monsieur le

 19   Président, Messieurs les Juges.

 20   Mme KORNER : [interprétation]

 21   Q.  Est-ce que vous pouvez maintenant regarder le document 373, je vous

 22   prie.

 23   Alors, nous avons vu le document qui avait été envoyé par le CSB pour les

 24   SJB en ce qui concerne les prisons, les centres de rassemblement des

 25   prisonniers, et cetera, qui existaient dans ces municipalités. Ici, nous

 26   avons un document qui émane de Mico Stanisic, même s'il est signé en son

 27   nom plus exactement, je crois, n'est-ce pas ? Je vérifie.

 28   R.  C'est quelqu'un d'autre qui a signé ce document.

Page 6720

  1   Q.  Oui. Document qui a été adressé au CSB :

  2   "Nous avons été informés du document par le président de la République

  3   serbe qu'une délégation de la Sécurité de la coopération européenne vient

  4   dimanche et aimerait visiter les prisons de Pale, Bijeljina, Trebinje, et

  5   cetera."

  6   Et on nous dit ici que :

  7   "La délégation arrive à Lukavica…"

  8   Et c'est là que vous étiez basé, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui, effectivement, nous étions basés à Lukavica.

 10   Q.  Et ensuite, on parle de l'organisation de la police, de l'escorte, de

 11   la sécurité pour cette délégation dans ce document.

 12   Alors, est-ce que vous étiez au courant de cette visite par la délégation

 13   de l'OSCE ?

 14   R.  Je ne m'en souviens pas. Il faut dire que j'étais très souvent absent

 15   du centre, parce qu'un nombre important de postes de police devaient être

 16   inspectés. Cela a pu survenir alors que j'étais sur le terrain, mais je

 17   peux pas en être certain ou affirmer quoi que ce soit. Mais on me demandait

 18   de sécuriser les routes, parce qu'il y avait les sections qui étaient un

 19   petit peu vulnérables avec des tireurs embusqués, et il fallait pouvoir

 20   assurer la sécurité de ces personnes qui arrivaient en délégation. Mais la

 21   vraie réponse à votre question, c'est que je ne me souviens pas.

 22   Q.  Mais que vous ayez ou non assuré la sécurité, en raison de votre poste

 23   et de la visite qui s'annonçait, est-ce que vous étiez ou non sur les lieux

 24   ?

 25   R.  En mon absence, les inspecteurs au poste de police étaient entraînés

 26   pour mettre en place une sorte de miniplan pour accompagner la délégation

 27   parce qu'il y avait une route, celle dont j'ai parlée, et une autre route

 28   par Trebevic, une sorte de déviation. Je ne sais pas laquelle ils ont

Page 6721

  1   empruntée, mais je suis sûr que l'un des inspecteurs avait certainement

  2   prévu un plan de sécurité.

  3   Q.  La question que je vous pose, ce n'est pas si vous avez fait le plan ou

  4   l'un des inspecteurs a fait ce plan, mais si M. Cvijetic vous a fait savoir

  5   que cette demande était arrivée de la part de M. Stanisic.

  6   R.  Je crois que oui, parce qu'après mon retour de sur le terrain, en

  7   général, on s'essayait, on prenait le café, on se briefait les uns les

  8   autres. Et c'étaient des briefings qui avaient lieu régulièrement. C'est

  9   tout simplement que je ne me souviens pas de cette visite en particulier.

 10   Après un certain temps, vos souvenirs s'estompent.

 11   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 12   ce document, en fait, était un document MFI, mais est-ce que je peux

 13   demander maintenant à ce qu'il soit pleinement versé au dossier. C'est le

 14   document P164.

 15   [La Chambre de première instance se concerte]

 16   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Comment est-ce que cette déclaration du

 17   témoin va se prononcer sur qualité du document ?

 18   Mme KORNER : [interprétation] Parce que, Monsieur le Président, il a dit

 19   que même s'il ne se souvient pas s'il avait lui ou non personnellement

 20   donné l'instruction, il a dit que ce serait certainement l'un de ses

 21   subordonnés qui aurait organisé ce plan de sécurité à cause de la présence

 22   de tireurs embusqués, et cetera. Mais il n'y a pas d'argument disant que

 23   cette visite a eu bel et bien lieu.

 24   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Vous vous souvenez de ma réserve à

 25   propos d'un document antérieur, mais je vois la logique de votre demande.

 26   Et j'imagine qu'il n'y aucun autre témoin qui puisse le faire, donc

 27   j'accepte le versement de cette pièce au dossier et son enregistrement.

 28   Mme KORNER : [interprétation] Merci beaucoup.

Page 6722

  1   Q.  Et avant que nous passions au prochain document --

  2   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  3   Mme KORNER : [interprétation]

  4   Q.  Vous et M. Cvijetic, vous preniez le café et discutiez de ce qui se

  5   passait dans la zone ? Est-ce que vous le faisiez régulièrement, quelle

  6   était la fréquence de ces conversations ?

  7   R.  Je viens de dire il y a quelques instants que parfois je partais

  8   pendant un mois si je devais aller inspecter plusieurs postes de police. Je

  9   m'absentais pendant des jours, pendant des nuits. Je revenais, et j'avais

 10   énormément de courrier et de documents sur mon bureau à passer en revue, et

 11   nous nous rencontrions lorsqu'il y en avait besoin. Il y avait même des

 12   moments où j'étais présent, mais lui ne l'était pas. Il faut savoir qu'il y

 13   avait beaucoup de circulation, mais nous avons essayé de maintenir, autant

 14   que faire se peut, une communication normale. Nous nous entretenions aussi

 15   souvent que possible.

 16   Q.  Merci. J'aimerais maintenant vous poser une question. Je vous demande

 17   de vous pencher sur le document 1931. Encore une fois, il s'agit de quelque

 18   chose --

 19   C'est un rapport en date du 8 septembre 1992 à destination du CSB, document

 20   qui émane de Bratunac et qui apparemment répond à une ordonnance de M.

 21   Cvijetic et de vous-même. Est-ce que vous vous souvenez pourquoi vous avez

 22   demandé ce rapport en particulier ?

 23   R.  Ça tombait dans le cadre de responsabilité des inspecteurs et de ce

 24   département que d'aller se rendre et d'inspecter les postes de police de

 25   temps en temps. Je ne me souviens pas de ce moment en particulier, mais

 26   c'était une activité régulière qui tombait dans le cadre des

 27   responsabilités des inspecteurs. Et on doit parfaire la même chose au poste

 28   de police de Bratunac aux mêmes fins.

Page 6723

  1   Q.  Très bien. Juste sur deux ou trois aspects de ce rapport. A la première

  2   page, au premier [comme interprété] paragraphe, il a été dit :

  3   "En ce qui concerne les activités de combat, on peut en conclure qu'il y a

  4   eu de grands succès d'enregistrés étant donné que la population musulmane

  5   était en majorité sur le territoire considéré de Bratunac."

  6   La municipalité de Bratunac n'était pas à majorité serbe; est-ce bien

  7   exact ?

  8   R.  Pour bien vous expliquer les choses, chaque poste de police avait des

  9   dossiers qui étaient tenus par des chefs de patrouille; si c'est dans une

 10   zone urbaine, c'est ainsi qu'on les appelait. Et dans ces dossiers, tous

 11   les villages figuraient, et on savait exactement quel est le pourcentage

 12   sur un territoire, combien il y a de Musulmans, combien de Serbes, combien

 13   de Croates, combien d'autres nationalités, ceci sans aucun doute. Et de

 14   toute façon, je peux croire qu'à Bratunac, la population musulmane était

 15   majoritaire, d'après ce que je me souviens de toute façon. Mais je ne me

 16   peux pas vous parler du pourcentage.

 17   Q.  D'accord. Merci.

 18   Mme KORNER : [interprétation] Pourrait-on, je vous prie, se pencher sur les

 19   paragraphes 8 et 10 du document. Et en anglais c'est la troisième page --

 20   page 4 en anglais et page 3 en B/C/S.

 21   Q.  Votre inspecteur conclut que :

 22   "Les postes de police ont donné tous les renseignements sur les

 23   documents au CSB."

 24   Au paragraphe 10, on peut lire :

 25   "Pour ce qui est des documents portant sur des crimes de guerre contre les

 26   Serbes par les extrémistes musulmans, il y a 46 causes."

 27   Maintenant j'aimerais savoir, s'agissant des allégations de crimes de

 28   guerre commis contre les non-Serbes, est-ce que c'est bien ce que vous nous

Page 6724

  1   dites ici, est-ce qu'il y a eu des enquêtes menées à Bratunac ?

  2   R.  Je peux seulement affirmer que c'est ainsi, car je ne dispose pas

  3   d'autres renseignements. Ici, effectivement, il est vrai que l'on parle de

  4   46 cas, et je dis que dans la municipalité de Bratunac il y avait un très

  5   grand nombre de cas. Donc cette période porte sur une période déterminée.

  6   Je ne sais pas maintenant à savoir si au cours de cette période il y a eu

  7   des crimes commis contre la population non-serbe, je ne le sais pas. Mais

  8   connaissant les gens, je crois que tout aurait certainement été traité,

  9   suivi, enquêté. Je ne peux rien vous dire de plus.

 10   Mme KORNER : [interprétation] Très bien. Merci. J'aimerais que cette pièce

 11   soit versée au dossier et qu'on lui attribue une cote.

 12   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Fort bien.

 13   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cette pièce portera la cote P998.

 14   Mme KORNER : [interprétation] Je crois que j'arrive à la fin de mon temps

 15   supplémentaire. Permettez-moi de trouver le document. En fait, permettez-

 16   moi de vérifier -- un instant, s'il vous plaît. Juste une question,

 17   Monsieur le Président.

 18   J'aimerais savoir si on pourrait afficher la pièce 1026 [comme interprété],

 19   s'il vous plaît. Monsieur le Président, c'est un document qui ne figure pas

 20   sur la liste 65 ter que nous vous avons remis. Donc, je n'ai absolument

 21   aucune objection pour que le document soit enregistré aux fins

 22   d'identification seulement.

 23   Q.  Le 9 août. Pour revenir un peu dans le temps, de nouveau il s'agit

 24   d'une lettre envoyée du CSB aux postes de sécurité publique, faisant

 25   référence à un mémorandum du ministère de l'Intérieur, disant qu'un rapport

 26   devrait être rédigé sur la façon de laquelle les autorités serbes traitent

 27   les prisonniers de guerre.

 28   Mme KORNER : [interprétation] Si l'on passe à la page 2 en anglais, en

Page 6725

  1   fait, excusez-moi.

  2   Q.  "Tous les officiers supérieurs du CSB ont reçu l'ordre de libérer les

  3   personnes de catégorie civile immédiatement, et ceci comprend implicitement

  4   toutes les personnes, indépendamment de leur âge, qui ne sont pas membres

  5   de formations ennemies, pour pouvoir permettre un mouvement libre."

  6   Maintenant, j'aimerais savoir si vous saviez que M. Cvijetic avait envoyé

  7   cet ordre ?

  8   R.  Si vous m'aviez posé cette question sans me montrer ce document, je ne

  9   sais pas si je me serais souvenu de cela. Mais je vois qu'ici on a réagi

 10   promptement lorsque la dépêche est arrivée du MUP. Et je sais que le chef

 11   du centre a pris toutes les mesures nécessaires pour répondre à cette

 12   requête.

 13   Q.  Mais ici, on voit :

 14   "…ont reçu pour ordre de relâcher les personnes de catégorie civile

 15   immédiatement, ce qui implique toutes les personnes, indépendamment de

 16   l'âge, ne faisant pas partie de formations ennemies, pour leur permettre la

 17   liberté de se déplacer de façon libre."

 18   Maintenant, j'aimerais savoir, vous avez dit à plusieurs reprises que les

 19   personnes que vous avez décrites comme étant des prisonniers avaient été

 20   emmenées au centre culturel de Pale, au Dom Kulture de Pale, et là, il y

 21   avait des personnes qui venaient des villages avoisinants. Est-ce que ceci

 22   faisait référence à ces personnes-là ?

 23   R.  Oui, ce sont des personnes qui étaient déplacées et qui s'étaient

 24   recueillies. C'était une municipalité multiethnique avant la guerre. Il y

 25   avait des Bosniens, des Serbes, quelques Croates également, et je crois

 26   qu'on parle justement de ces personnes-là dans ce document. C'est ces

 27   personnes-là qu'il a fallu escorter jusqu'à la ligne de séparation, d'après

 28   leurs propres désirs. La plupart d'entre eux souhaitaient partir à

Page 6726

  1   Sarajevo.

  2   Q.  Mais ici, on ne voit pas que les personnes doivent être escortées

  3   jusqu'à la ligne de démarcation. On peut lire en anglais qu'il faut leur

  4   permettre de se déplacer librement, n'est-ce pas ? C'est ce qu'on voit en

  5   anglais.

  6   R.  Oui, c'est ce qui est écrit, mais cela, en tant que le fait qu'il

  7   fallait les escorter. Personne n'a pu laisser les gens partir comme ça,

  8   sans escorte. Il a fallu également assurer des autocars, et ainsi de suite.

  9   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais que ce

 10   document soit enregistré seulement aux fins d'identification pour

 11   l'instant, et par la suite nous allons faire une demande que cette pièce

 12   soit versée au dossier.

 13   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien.

 14   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cette pièce portera la cote P999, et

 15   sera enregistrée aux fins d'identification.

 16   Mme KORNER : [interprétation] Merci.

 17   Q.  En fait, une dernière question pour vous, Monsieur Borovcanin : En

 18   1993, si je ne m'abuse, vous avez été nommé pour recevoir une décoration ?

 19   Mme KORNER : [interprétation] C'est quelque chose qui figure à la pièce

 20   P732, s'il vous plaît.

 21   Q.  Il n'y a pas de date ici, mais il y a ici une référence au "journal

 22   officiel", numéro 4 de 1993. Mico Stanisic est décrit comme étant l'ancien

 23   ministre de la Republika Srpska.

 24   Mme KORNER : [interprétation] Pour ce qui est de l'anglais, d'abord,

 25   passons à la page 234 [comme interprété], et en B/C/S, il s'agit de la page

 26   3. Voilà.

 27   Q.  C'est une recommandation de Milos Obilic vous concernant ?

 28   Mme KORNER : [interprétation] Il nous faudrait passer en B/C/S à la page

Page 6727

  1   suivante. C'est la page 5, et en anglais c'est la page suivante. Désolée,

  2   en fait, en anglais il faut passer à la page suivante. C'est le numéro 87.

  3   Q.  Monsieur Borovcanin, est-ce que c'est bien votre nom qui figure au

  4   numéro 87 ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce que vous avez été décoré ?

  7   R.  Vous allez peut-être sourire. Effectivement, j'ai été nommé. Je suis

  8   peut-être l'un des rares qui a fait un commentaire, à savoir que nous nous

  9   sommes hâtés quelque peu à donner ces décorations. Historiquement parlant,

 10   il y a eu des guerres que les Serbes ont eues, la Première Guerre mondiale,

 11   la Deuxième Guerre mondiale et ainsi de suite, et j'ai trouvé que c'était

 12   trop tôt pour recevoir des décorations. Donc, j'ai refusé, initialement,

 13   cet ordre, et par la suite, on m'a appelé plus tard. Je me suis présenté de

 14   nouveau. Je n'ai pas voulu être apolitique, pour dire ainsi, et je n'ai

 15   reçu qu'une feuille. Mais il n'y avait pas de médaille ou de décoration; on

 16   l'avait perdue. Donc, je ne l'ai jamais reçue.

 17   Q.  Je suis vraiment désolé, Monsieur Borovcanin. Je n'ai plus d'autres

 18   questions.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Korner, à propos du document

 21   précédent, ce document n'est pas sur votre liste 65.

 22   Mme KORNER : [interprétation] Oui, parce que vous verrez 10 000 quelque

 23   chose --

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais normalement, tout est indiqué en

 25   rouge, alors que je vois que sur les deux derniers documents c'est en noir.

 26   En fait, c'est très utile quand c'est en rouge.

 27   Mme KORNER : [interprétation] Ce qui est arrivé c'est qu'il y avait un très

 28   grand nombre de documents qui étaient indiqués en rouge, donc j'ai dit à

Page 6728

  1   Mme Jasmina Bosnjakovic de simplement changer de couleur et d'enlever le

  2   rouge, en bref. Donc, je suis vraiment pleinement responsable de tout ceci.

  3   Monsieur le Président, vous avez tout à fait raison, ce document ne figure

  4   pas sur notre liste 65 ter. Tous les documents qui portent un numéro qui

  5   suit 10 000 ne se trouveront pas sur la liste 65 ter non plus.

  6   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  7   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous allons prendre une pause

  8   maintenant, et nous reprendrons nos travaux dans 20 minutes.

  9   [Le témoin quitte la barre]

 10   --- L'audience est suspendue à 12 heures 15.

 11   --- L'audience est reprise à 12 heures 37.

 12   [Le témoin vient à la barre]

 13   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, Monsieur Cvijetic, vous pouvez

 14   commencer votre contre-interrogatoire.

 15   M. CVIJETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 16   Contre-interrogatoire par M. Cvijetic : 

 17   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Borovcanin. Je m'appelle Slobodan

 18   Cvijetic. Je suis membre de l'équipe de la Défense de M. Mico Stanisic.

 19   Avant de passer au vif du sujet, je dois écarter certains soupçons que l'on

 20   a évoqués hier s'agissant de notre réunion qui a eu lieu dimanche dernier.

 21   Et donc pour préciser le tout, avant votre arrivée à La Haye, dites-

 22   nous si l'on s'est jamais rencontrés et si je suis entré en contact avec

 23   vous pour vous parler de votre témoignage à La Haye avant aujourd'hui ?

 24   R.  Non.

 25   Q.  Je ne vous ai jamais non plus parlé au téléphone, n'est-ce pas ?

 26   R.  C'est exact.

 27   Q.  Dites-moi, lorsqu'une personne de l'équipe de la Défense -- je veux

 28   vous dire que c'est une quatrième équipe de Défense. M. Stanisic n'a pas eu

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  1   la chance d'avoir la même équipe depuis le début, donc nous sommes la

  2   quatrième équipe de Défense. Quand quelqu'un vous a donc appelé de l'équipe

  3   de Défense précédente pour vous demander si vous vouliez venir témoigner,

  4   vous leur avez répondu que vous ne saviez pas puisque vous deviez encore

  5   réfléchir sur le sujet, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Alors j'aimerais savoir si à ce moment-là vous saviez que vous alliez

  8   être témoin devant ce Tribunal ?

  9   R.  A l'époque, non.

 10   Q.  Merci. J'aimerais vous poser une autre question liée à tout ceci. J'ai

 11   justement examiné le transcript, j'ai écouté la cassette qui a été

 12   enregistrée à la suite de votre entretien avec le Procureur, et à la fin de

 13   cet enregistrement, à la question qui vous a été posée à savoir si vous

 14   vouliez venir témoigner ici, vous leur avec dit : "Si ce n'est pas

 15   nécessaire, je ne viendrai pas témoigner au Tribunal." Est-ce que c'est

 16   exact ?

 17   R.  Oui, c'est tout à fait exact.

 18   Q.  Alors j'aimerais savoir pourquoi et comment il est arrivé que vous

 19   changiez d'avis. Comment se fait-il que vous êtes ici ?

 20   R.  A l'époque, je ne connaissais pas la loi tout à fait bien, les

 21   règlements du Tribunal. Je ne connais pas les règlements même aujourd'hui.

 22   Mais à la suite d'une conversation téléphonique menée avec l'un des

 23   Procureurs, je ne me souviens pas très bien de ce nom, donc il y a quelques

 24   mois, ils m'ont demandé si je souhaitais venir en tant que témoin de

 25   l'Accusation. Je lui ai répondu que je serais heureux de ne pas venir au

 26   Tribunal. Je ne voulais ni être le témoin de la Défense ni le témoin du

 27   Procureur. Mais il m'a dit : Vous savez, nous avons les moyens nécessaires,

 28   nous pouvons également vous "subpoena" pour que vous soyez contraint à

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  1   venir. Et donc, lorsqu'il m'a dit cela, je lui ai dit : D'accord, très

  2   bien, alors je vais me présenter.

  3   Ils m'ont demandé si je souhaitais témoigner en tant que témoin

  4   protégé, et j'ai dit que non. J'ai dit que ça ne m'intéressait pas et que

  5   je voulais voir les personnes devant moi et que je voulais voir également

  6   les Juges de la Chambre, l'Accusation, et ainsi de suite, et que

  7   j'essaierais de répondre au meilleur de ma connaissance et de la façon la

  8   plus claire que possible.

  9   Q.  Très bien, merci. Alors, très brièvement, je vais parler de notre

 10   rencontre dimanche dernier. Mon collègue Me Krgovic et moi-même, nous nous

 11   sommes entretenus avec vous, et je sais exactement l'heure. Nous nous

 12   sommes entretenus de 9 heures à 11 heures du matin dimanche dernier, et

 13   cette conversation s'est déroulée en la présence d'une dame chargée de la

 14   protection des témoins et des victimes. Elle a dit qu'elle allait attendre

 15   la fin de notre entretien parce qu'elle devait vous ramener à votre hôtel,

 16   n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui. Ce n'est pas les mêmes personnes tous les jours. Mais

 18   effectivement, je ne me souviens pas de son nom, mais il y avait une

 19   personne, une représentante de la Section chargée des Victimes et des

 20   Témoins.

 21   Q.  Je sais qu'elle s'est présentée à nous. Je ne me souviens pas de son

 22   nom, mais ce n'est pas grave non plus.

 23   Par la suite, nous nous étions mis d'accord pour nous revoir à la fin de

 24   l'entretien que vous auriez avec l'Accusation. Je ne vous ai pas donné

 25   d'heure précise, et comme j'avais un très grand nombre de documents, je

 26   vous ai demandé si vous seriez d'accord pour que l'on poursuive la

 27   discussion que l'on avait entamée, mais seulement après la fin de votre

 28   entretien avec l'Accusation. Est-ce que c'était exact ?

Page 6731

  1   R.  Oui. Vous aviez dit peut-être vers 17 heures et vous aviez dit peut-

  2   être que l'entretien finira plus tôt, donc nous pouvions nous voir peut-

  3   être à 17 heures. Mais je dois dire que cela a duré un peu plus longtemps

  4   et nous nous sommes vus un peu plus tôt. Et je dois également ajouter que

  5   j'étais étonné que nous pouvions nous rencontrer, que l'Accusation, la

  6   Défense pouvaient se rencontrer. J'ai compris qu'il s'agissait d'un

  7   processus qui était particulièrement transparent, et c'est dans ce

  8   contexte-là que nous nous sommes entretenus.

  9   Q.  Très bien, merci. Cette deuxième rencontre qui était la nôtre avait

 10   également été établie en la présence d'une autre personne, et tout ceci

 11   dans le lobby de votre hôtel, n'est-ce pas ?

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Cvijetic, je ne suis réellement

 15   pas sûr pourquoi l'on passe autant de temps sur tout ceci. L'observation de

 16   Mme Korner, et je ne parle pas de plainte non plus pour ce qui est de ce

 17   témoin, si je me souviens bien, la nature de son objection était simplement

 18   de dire que le témoin n'avait qu'un temps limité entre son arrivée à La

 19   Haye et le début de son témoignage. Le temps qu'il avait n'était pas très

 20   long et donc cette plainte, si vous voulez - je vais maintenant employer le

 21   terme de plainte - a plutôt été formulée pour dire que c'était dommage

 22   qu'on n'avait pas plus de temps avec le témoin.

 23   Vous avez entendu les observations faites par l'Accusation et la

 24   Défense, et je crois que c'est Me Pantelic qui a également formulé des

 25   commentaires, mais la Chambre n'est absolument pas prête à donner

 26   d'observations plus définitives, mais je ne vois réellement pas pourquoi

 27   vous pensez qu'il est utile de passer un temps si long avec ce témoin pour

 28   clarifier ce point.

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  1   Mme KORNER : [interprétation] Moi aussi, je me demandais pourquoi

  2   M. Cvijetic nous fait cette introduction aussi longue. Ce n'était vraiment

  3   pas clair dans mon esprit. Je n'avais pas très bien saisi pourquoi il

  4   sentait le besoin de préciser tout ceci.

  5   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Aimeriez-vous commencer maintenant votre

  6   contre-interrogatoire, Monsieur Cvijetic ?

  7   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Monsieur

  9   Borovcanin, il semblerait qu'en réponse à une des questions posées par le

 10   Procureur, vous auriez donné par inadvertance le nom d'un membre du

 11   personnel, et c'est quelque chose qu'il faut éviter, donc j'ai pris les

 12   mesures nécessaires pour que le nom de la personne qui vous a escorté soit

 13   expurgé du compte rendu d'audience.

 14   M. CVIJETIC : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, ces

 15   questions étaient posées simplement pour que je puisse poser une dernière

 16   question sur le sujet. C'est justement quelque chose que vous aviez

 17   mentionné, à savoir que le témoin était particulièrement occupé avant de

 18   venir témoigner. Hier notamment, Mme Korner nous a dit qu'elle détenait des

 19   informations selon lesquelles le témoin, après sa conversation avec moi,

 20   était stressé et fatigué. Donc il me faut absolument lui poser la question.

 21   Q.  Monsieur Borovcanin, le fait qu'on se soit entretenus, est-ce que c'est

 22   cela qui a causé ce stress chez vous ? Est-ce que c'est moi qui ai causé ce

 23   stress ? Est-ce que vous vous sentiez mal à l'aise pour vous entretenir

 24   avec moi ?

 25   Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, c'était un effet

 26   combiné des deux entretiens. Me Cvijetic et moi-même avons parlé au témoin.

 27   Je ne crois pas que Me Cvijetic devrait se soucier de ce qu'a dit le

 28   témoin, dans le sens où nous comprenons très bien qu'il ait été stressé par

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  1   la journée, par les deux entretiens, par nous et par son entretien à lui,

  2   donc il ne doit pas du tout se préoccuper de ce commentaire.

  3   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, alors voilà justement, on a laissé

  4   partir le témoin un peu plus tôt hier. Je n'ai pas l'impression qu'il ait

  5   eu des problèmes physiques à la suite de la fin de l'audience qui s'est

  6   terminée un peu plus tôt hier.

  7   Monsieur Cvijetic, ne vous préoccupez de rien. Vous pouvez commencer votre

  8   contre-interrogatoire.

  9   M. CVIJETIC : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président. Voilà, je

 10   vais faire plus attention à l'avenir et je vais peut-être mieux coordonner

 11   le tout avec le bureau du Procureur pour ce qui est des victimes et des

 12   témoins et de leur section.

 13   Q.  Monsieur Borovcanin, hier au cours de l'interrogatoire principal, Mme

 14   Korner a fait une petite digression et, à la lumière du fait qu'elle ait

 15   mentionné qu'il est possible que j'aie eu des liens avec M. Cvijetic, qui

 16   était ingénieur mécanique, alors c'est mon frère, il est encore en vie.

 17   J'ai un frère qui s'appelle Zoran Cvijetic. C'est tout à fait un hasard.

 18   Donc mon frère Zoran Cvijetic n'a rien à voir avec le Zoran Cvijetic du

 19   document. J'ai un frère qui s'appelle effectivement Zoran Cvijetic et il

 20   est ingénieur, et il est encore en vie.

 21   Maintenant, Monsieur Borovcanin, je vais vous poser les mêmes questions que

 22   vous a posées Mme Korner hier.

 23   Vous avez dit que lorsque vous êtes parti de Sarajevo, vos voisins et

 24   les policiers vous ont demandé : Mais que se passe-t-il ? Et vous leur avez

 25   répondu que vous n'avez pas réussi à voir la forêt parce que vous avez vu

 26   un arbre. Qu'est-ce que vous vouliez dire par là ?

 27   R.  Je n'avais pas suffisamment d'information. Je ne savais pas ce qui

 28   allait arriver. Donc à la demande posée par mes voisins, qui me regardaient

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  1   de façon suspicieuse, ils pensaient que je faisais quelque chose à la

  2   cachette, et j'étais tellement étonné par les événements qui s'étaient

  3   déroulés que j'ai vu que le moment était venu pour moi de quitter Sarajevo,

  4   et j'ai cité ces quelques exemples. Il y avait des coups de feu que l'on

  5   tirait sur le cadre de la fenêtre. Nous avions tous les deux compris, ma

  6   femme et moi, qu'il nous fallait partir, et nous sommes allés vivre à la

  7   campagne avec les enfants. Nous sommes quittés la ville.

  8   Q.  Très bien. Je vais vous demander quelque chose d'un peu plus précis.

  9   Est-ce que vous aviez remarqué que les formations paramilitaires musulmanes

 10   et la population musulmane s'étaient armées ? Est-ce que vous avez été

 11   témoin oculaire de tout ceci ?

 12   R.  Je l'ai dit déjà au cours de mon entretien. Dans ma déclaration, j'ai

 13   dit que là où j'habitais il y avait une crèche pour enfants. Soit le 6 ou

 14   le 7 avril, je ne suis pas tout à fait certain, une Golf de couleur noire

 15   était arrivée. Je voyais qu'on ouvrait le coffre arrière et qu'on prenait

 16   des fusils automatiques et on a remis ces fusils automatiques à un homme

 17   qui est entré dans cette crèche. 

 18   Prazina Jusuf est un criminel que je connaissais avant la guerre. Il avait

 19   un dossier assez lourd, un casier judiciaire assez épais au poste de

 20   police. J'ai tout à fait bien compris que les choses n'allaient pas bien se

 21   dérouler. J'ai travaillé un peu au MUP et j'étais inquiet pour ma sécurité

 22   et celle de ma famille. J'étais officier du MUP et j'avais certaines

 23   responsabilités.

 24   Q.  Quand est-ce que vous avez remarqué les membres de la Ligue patriotique

 25   --

 26   R.  [aucune interprétation]

 27   Q.  Juste pour être tout à fait clair, ce sont des membres d'une formation

 28   paramilitaire, n'est-ce pas ?

Page 6735

  1   R.  A l'époque nous ne connaissions pas ce type d'insigne. Nous avions des

  2   différents uniformes.

  3   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Messieurs, il vous faut ménager de

  4   pauses entre vos questions et vos réponses. Il faut être bien vigilants et

  5   permettre aux interprètes de rattraper vos propos. Ménagez des pauses, s'il

  6   vous plaît, entre vos questions et vos réponses.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. Merci.

  8   M. CVIJETIC : [interprétation] Très bien.

  9   Q.  Est-ce que vous auriez appris plus tard de vos collègues du service de

 10   sécurité que trois membres de la Ligue patriotique avaient reçu des cartes

 11   d'identification du SJB de Bosnie-Herzégovine ?

 12   R.  Probablement. Je ne sais pas, mais on leur a probablement délivré des

 13   cartes d'identité pour avoir une crédibilité, et que ces derniers

 14   travaillaient dans le cadre du service en question.

 15   Q.  Donc c'étaient des criminels qui avaient suffisamment de crédibilité

 16   pour avoir une carte d'identité ?

 17   R.  Oui. Comme je vous dis, il s'agissait d'un démantèlement du système

 18   pour ce qui est du ministère de l'Intérieur, de la ville à l'intérieur

 19   même, et chez nous, et lorsque je dis "chez nous," je parle de l'endroit où

 20   il y avait des forces serbes, et que les uns et les autres, et mes

 21   collègues du MUP fédéral peuvent vous le confirmer, étaient marginalisés,

 22   en périphérie. On ne demandait rien à personne, mais la ville s'était

 23   trouvée entre les mains de criminels.

 24   Q.  Lorsque vous avez mentionné la marginalisation, est-ce que vous aviez

 25   également remarqué une marginalisation des cadres serbes ?

 26   R.  Oui, bien sûr que non. Je ne comprends toujours pas pourquoi j'avais

 27   été dégradé après un certain temps. On m'avait placé pour travailler en

 28   tant que portier de nuit. J'avais une énorme expérience dans la police, et

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  1   au lieu d'être promu, j'ai été rétrogradé.

  2   Q.  M. --

  3   L'INTERPRÈTE : Inaudible.

  4   M. CVIJETIC : [interprétation]

  5   R.  -- était le candidat de l'adjoint du secrétaire de l'Etat pour le SUP

  6   fédéral, et je crois que lui aussi, à l'époque, il avait obtenu une

  7   fonction très inintéressante. Il était, lui aussi, rétrogradé.

  8   R.  M. Novic travaillait avec moi pendant plusieurs années au SUP fédéral.

  9   Il était adjoint. A l'époque, on appelait son titre secrétaire du SUP.

 10   Aujourd'hui, on appelle cela adjoint du ministre. Il était le chef du

 11   service criminel. J'avais entendu dire qu'il avait été rétrogradé pour

 12   devenir inspecteur dans un petit poste de police. C'est au moins deux

 13   grades de moins, donc c'est deux grades qui étaient inférieurs au sien.

 14   Q.  Pendant que vous étiez à Sarajevo, est-ce qu'il y a eu la prise

 15   violente de certains postes de police par les unités paramilitaires, et

 16   lors de cette prise, un policier a été tué ?

 17   R.  Oui. C'était juste avant l'éclatement de la guerre. Je connais cet

 18   incident. C'était au poste de police de Novo Sarajevo. Un de nos collègues,

 19   feu Petrovic Petar, a été tué au service au poste de police, en tant que

 20   chef de l'équipe de permanence. C'était un événement qui nous a fait peur,

 21   nous les Serbes qui travaillions là-bas. C'était également un message clair

 22   pour nous que les temps durs viendront pour nous.

 23   Q.  Pour ce qui est du meurtre d'un membre des invités des noces dans le

 24   portique de l'église orthodoxe, est-ce que pour vous cela représentait le

 25   message similaire, à savoir que vous deviez partir ?

 26   R.  Un tel événement qui s'est produit devant l'église orthodoxe, peut-être

 27   la plus ancienne à Sarajevo, le meurtre d'un homme innocent, était

 28   également non seulement un avertissement, mais également, d'après moi -- je

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  1   ne sais pas comment vous expliquez. C'était une sorte de menace à

  2   l'encontre des Serbes. A Sarajevo, on était tous très inquiets. Tous les

  3   Serbes avaient des raisons pour être inquiets.

  4   Q.  Nous venons d'énumérer des raisons principales pour lesquelles vous

  5   avez décidé de quitter Sarajevo. Vous serez d'accord avec moi pour dire

  6   qu'à ce moment-là vous n'avez pas pensé aller former le MUP serbe. Je pense

  7   que vous avez dit que vous ne saviez pas à ce moment-là que le MUP serbe

  8   avait déjà été créé. Ai-je raison pour dire cela ?

  9   R.  Lorsque j'ai parlé avec M. Bakir Alispahic à la réunion où je n'étais

 10   même pas assis, j'étais debout, et quand je lui ai dit que je ne viendrais

 11   plus au travail pour ne pas être la cible des tirs, il m'a demandé : Où

 12   vas-tu partir ? J'ai dit : Je suis cosmopolite. Je ne veux pas participer à

 13   la guerre. J'ai dit cela pour les raisons de sécurité, parce que lorsque je

 14   suis revenu à Mojmilo, j'ai emprunté un autre itinéraire, par la rue

 15   Drinska [phon], pour arriver à Mojmilo, parce que j'ai eu peur de ne pas

 16   être arrêté à un point de contrôle paramilitaire. Avec des criminels, j'ai

 17   eu peur pour ma sécurité, et après être arrivé à mon appartement, j'ai

 18   commencé à persuader mon épouse qu'on quitte la ville.

 19   Q.  On va finir avec ce sujet. Ce qu'on a appelé ici la sortie de Sarajevo,

 20   pourrait-on appeler cela la fuite de Sarajevo pour sauver la vie ?

 21   R.  Des centaines ou des milliers de témoins pourront vous dire cela. J'ai

 22   oublié mes papiers en partant et d'autres choses également, des bijoux, par

 23   exemple, qui représentent une valeur émotionnelle pour moi, des bagues, et

 24   cetera. Je n'ai rien pris de tout cela, parce que j'ai pensé qu'on

 25   reviendrait dans une semaine ou une dizaine de jours. Une fois sortis de la

 26   ville, nous avons compris que la guerre allait durer. Mais heureusement,

 27   certains de mes bons voisins m'ont remis les papiers. Lorsqu'en 2000 je

 28   suis revenu à Sarajevo pour récupérer mon appartement, ces voisins m'ont

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  1   remis tout cela.

  2   Q.  Bien.

  3   M. CVIJETIC : [interprétation] J'aimerais que M. l'Huissier donne ce

  4   classeur contenant des documents à M. Borovcanin.

  5   Q.  Monsieur Borovcanin, je vais commencer par la réunion qui a eu lieu à

  6   Belgrade le 11 juillet 1992. C'est la pièce P160. Dans votre classeur, il

  7   s'agit du document qui se trouve au numéro 6 -- ou après l'intercalaire

  8   numéro 6.

  9   R.  D'accord.

 10   M. CVIJETIC : [interprétation] Je vais demander que la page 17 soit

 11   affichée; la page 19 dans la version en anglais.

 12   Q.  Monsieur Borovcanin, vous étiez présent à cette réunion ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Vous serez d'accord avec moi pour dire qu'il s'agissait de la première

 15   vraie réunion des officiers supérieurs du MUP qui a eu lieu depuis le début

 16   de la guerre jusqu'à ce moment-là ?

 17   R.  Oui, c'est vrai.

 18   Q.  Vous serez d'accord avec moi pour dire que le lieu où la réunion s'est

 19   tenue, qui était à Belgrade, était le meilleur lieu choisi pour cette

 20   réunion. Parce que, du point de vue géographique, vous pouviez vous rendre

 21   à Belgrade de la Krajina, de Trebinje à peu près en même laps de temps.

 22   R.  Quand on m'a informé que la réunion allait se tenir à Belgrade, je me

 23   suis posé la question pourquoi à Belgrade. A la réunion, on m'a expliqué

 24   que tout le monde pouvait venir de Banja Luka, de Trebinje aussi, mais

 25   comme Trebinje se trouve au sud de la Bosnie-Herzégovine, pour les gens de

 26   Trebinje, peut-être que Belgrade était la ville la plus éloignée de

 27   Trebinje.

 28   Q.  C'était l'occasion pour le ministre de l'Intérieur de voir, peut-être

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  1   pour la première fois, certains de ses employés, pour les appeler ainsi,

  2   mais également l'occasion d'entendre, pour la première fois de vive voix de

  3   ces gens, quels étaient les problèmes auxquels étaient confrontés les

  4   centres et les postes de sécurité publique, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui. Non seulement le ministre a eu l'occasion de rencontrer ces

  6   employés pour la première fois, mais aussi moi-même et beaucoup d'entre mes

  7   collègues, nous nous sommes rencontrés pour la première fois et nous avons

  8   appris certaines choses dont nous n'étions pas au courant avant.

  9   Q.  C'était l'occasion également pour le ministre, après qu'il a reçu les

 10   informations de base concernant ces problèmes, qu'il commence à prendre des

 11   mesures adéquates pour réagir à ces informations, en essayant de faire

 12   fonctionner le MUP, conformément à la législation qui était en vigueur à

 13   l'époque.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Vous serez d'accord avec moi aussi qu'à ce moment-là ce n'était pas une

 16   chose facile à faire, et que la création du MUP était un processus qui ne

 17   pouvait pas s'achever en cinq mois.

 18   R.  Oui, bien sûr que c'était comme cela, et dans mon entretien précédent,

 19   j'ai mentionné cela à plusieurs reprises, il s'agissait d'un processus

 20   pénible.

 21   Q.  Même dans les conditions en temps de paix, cela aurait été très

 22   difficile. Quand on parle de l'année 1992, début de la guerre --

 23   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent que des pauses soient ménagées

 24   entre les questions et les réponses et de ralentir votre début, s'il vous

 25   plaît. 

 26   M. CVIJETIC : [interprétation] Je pense que le témoin devrait répéter sa

 27   dernière réponse, n'est-ce pas, la dernière réponse. Merci.

 28   Q.  On a parlé des processus ici; 1992, n'était pas une année habituelle,

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  1   normale du point de vue de la situation ?

  2   R.  Non, pas du tout. L'état de guerre n'est pas un état normal pour une

  3   société.

  4   Q.  Bien. Maintenant, pour ce qui est des discussions des participants à la

  5   réunion, je vais essayer de voir quels étaient les domaines à propos

  6   desquels nous pourrions discuter en présentant des documents, pour qu'on

  7   puisse voir comment M. Stanisic a réagi à certaines de ces informations

  8   présentées lors de la réunion.

  9   Mme le Procureur vous a déjà montré le document concernant la discussion de

 10   M. Zupljanin. Maintenant, je vais vous présenter la discussion de M.

 11   Planojevic.

 12   M. CVIJETIC : [interprétation] Tatjana me corrige pour ce qui est du numéro

 13   de la page. Dans mon document, il s'agit de la page 17, et en B/C/S c'est

 14   la page 20. Dans votre classeur, c'est la page 17. Donc la page 20 dans le

 15   système du prétoire électronique, dans la version en B/C/S. Dans la version

 16   anglaise, c'est la page 19.

 17   Q.  Il s'agit de la discussion menée par M. Planojevic avant Cedo Klajic

 18   [phon]. Les pages affichées sont de bonnes pages. Avez-vous retrouvé cela ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  M. Planojevic dit ici, je cite :

 21   "Il faut fournir des documents pour ce qui est des crimes de guerre. C'est

 22   la priorité. Il faut remettre des photos des rapports d'experts, de

 23   médecins légistes, d'autres documents, et cetera, concernant les enquêtes.

 24   Il faut également établir les listes de criminels de guerre pour pouvoir

 25   les échanger selon les centres dont ils dépendent."

 26   En fait, il ne s'agit pas d'échange des criminels de guerre, mais plutôt de

 27   listes de ces criminels de guerre.

 28   R.  Oui. Oui, c'est comme ça que j'ai compris cela, cette formulation.

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  1   Q.  A propos du même sujet, on voit la discussion d'une autre personne. Je

  2   l'ai choisi parce qu'il travaillait dans la même région que vous. C'est M.

  3   Simo Tusevljak.

  4   M. CVIJETIC : [interprétation] Tatjana va m'aider pour ce qui est du numéro

  5   de la page. Dans la version en anglais, c'est la page numéro 20, et dans la

  6   version en B/C/S cela se trouve à la page numéro 21. Il s'agit du

  7   paragraphe numéro 3, qui commence par les mots "pour le moment." C'est le

  8   troisième paragraphe dans le document, le paragraphe qui est court et qui

  9   commence par les mots "pour le moment."

 10   Nous allons lire ce paragraphe.

 11   Q.  L'avez-vous retrouvé ?

 12   R.  Oui. 

 13   Q.  M. Tusevljak dit dans ce paragraphe, je cite :

 14   "Pour le moment, il faut fournir les documents concernant les crimes de

 15   guerre et il faut fournir des plaintes au pénal. Il y a des crimes de

 16   guerre commis par les Serbes, et il faut fournir des documents concernant

 17   ces crimes de guerre."

 18   N'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Plus tard, nous allons montrer des documents pour corroborer cette

 21   discussion, pour étayer les propos qui y figurent. Mais j'aimerais qu'on

 22   tire un point au clair. C'est une sorte de dilemme. Vous, les policiers, au

 23   moment où vous découvrez qu'un crime a été commis et que vous retrouvez la

 24   victime d'un meurtre, vous ne pouvez pas savoir quel était le mobile de ce

 25   meurtre à ce moment-là ?

 26   R.  Bien sûr que non. C'est un processus. Il faut mener l'enquête sur les

 27   lieux, il faut savoir si cela a été un meurtre passionnel, et cetera. Il y

 28   a plusieurs mobiles. Au début, sur les lieux, on ne peut pas savoir quel

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  1   était le mobile du meurtre avant de prendre toutes les mesures nécessaires

  2   quand on mène l'enquête sur les lieux.

  3   Q.  Tout simplement, très souvent, vous constatez qu'il s'agissait du

  4   meurtre pour lequel la peine de mort est prévue, et c'est le procureur qui

  5   décide quel est la qualification de l'infraction pénale après l'enquête et

  6   après avoir constaté quel était le mobile du meurtre ?

  7   R.  Oui, la plainte au pénal est transmise au parquet, après quoi le

  8   parquet s'occupe de cela. C'est la procédure à suivre habituellement.

  9   Q.  Si dans l'un des rapports nous constatons que sur le territoire couvert

 10   par un poste de police il y avait dix meurtres commis, il peut y avoir deux

 11   ou trois meurtres qui sont crimes de guerre, mais c'est lors du procès

 12   qu'il faut constater cela.

 13   R.  Oui, bien sûr. Personne n'est qualifié et compétent de donner des

 14   qualifications a priori avant que les faits ne soient établis.

 15   Q.  Pour ce qui est de la pratique, vous serez d'accord avec moi pour dire

 16   que la plupart des cas de meurtres énumérés dans les rapports,

 17   indépendamment de la victime, hors des activités de combat, étaient pour la

 18   plupart d'entre eux les infractions pénales du droit commun, des meurtres

 19   pour s'approprier de certains biens.

 20   M. PANTELIC : [interprétation] Je pense qu'il faut apporter une correction

 21   à la page 73, la première ligne. Il faut que la réponse soit consignée, et

 22   non pas la question au compte rendu. Et la ligne suivante avant le mot

 23   "maintenant", il faut que figure le mot question pour que tout cela soit

 24   clair.

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

 26   M. CVIJETIC : [interprétation]

 27   Q.  Je recommence. Je vous demandais quel était le pourcentage de crimes

 28   individuels et de mobiles, indépendamment de l'identité des victimes, quel

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  1   est ce pourcentage. Est-ce que dans ce cas la plupart des crimes tombent

  2   dans la catégorie des crimes communs ?

  3   R.  Oui, la plupart, oui. Des motivations telles que l'appât du gain, et

  4   cetera.

  5   Q.  Lorsqu'il y a suspicion de crime de guerre, cette suspicion existe

  6   lorsqu'il y a un nombre important de victimes, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui, si nous parlons de civils.

  8   Q.  Très bien. J'y reviendrai lorsque j'arriverai aux documents, mais

  9   restons sur cette réunion pour l'instant.

 10   A part cette question qui a été soulevée par M. Zupljanin et qui a été

 11   reprise par M. Planojevic et M. Tusevljak, de nombreuses autres difficultés

 12   ont été soulevées et on a dit qu'il fallait traiter ces problèmes pendant

 13   la période qui suivait. La plupart des intervenants ont également mentionné

 14   le déploiement des forces de police dans les opérations de combat. Il était

 15   souligné que cela était considéré comme un problème, à cause des effectifs

 16   réduits, la police ne pouvait pas faire son travail de police habituelle.

 17   R.  Oui, ou ils étaient en mesure de s'acquitter de leurs obligations, mais

 18   avec énormément de difficulté.

 19   Q.  Ils ont également souligné les problèmes qu'ils avaient rencontrés avec

 20   les unités paramilitaires ?

 21   R.  Oui. C'était l'un des problèmes les plus importants qui ont été

 22   discutés lors de cette réunion.

 23   Q.  Et je n'en mentionnerai qu'un, alors qu'il y en a eu plusieurs : le

 24   personnel de l'organisation et les problèmes financiers étaient également

 25   débattus, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Vous serez d'accord avec moi pour dire que si le ministère de

 28   l'Intérieur devait s'atteler sérieusement à ces problèmes, il devait tout

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  1   d'abord compléter la création du ministère, l'équiper suffisamment bien et

  2   l'organier de telle façon qu'il puisse prendre ses problèmes à bras le

  3   corps ? 

  4   R.  Oui. C'est un processus très ardu, comme je l'ai si bien dit. Et nous

  5   commencions à zéro pour ce qui est du centre de Sarajevo, parce qu'en fait,

  6   nous étions tout simplement locataires dans les anciens bureaux

  7   d'Energoinvest. Vous pouvez imaginer un très grand centre et devoir

  8   commencer à zéro le travail que cela représente ? Un travail très ardu.

  9   Q.  Et le ministre, lui, rencontrait les mêmes problèmes, parce que son

 10   siège était à Vraca, ensuite il est allé à Pale, ensuite il est allé à

 11   l'hôtel Bistrica sur le mont Jahorina, et le deuxième semestre de l'année à

 12   Bijeljina.

 13   Est-ce que l'information que j'ai reçue d'autres témoins est correcte, à

 14   savoir que le MUP a commencé à bien fonctionner dans toutes ses divisions

 15   une fois qu'il y a eu déplacement du siège à Bijeljina; est-ce bien exact ?

 16   R.  Oui, effectivement. Le siège se trouvait maintenant en un même endroit,

 17   et nous savions où envoyer les dépêches, les rapports et où devait se

 18   situer l'échange d'information.

 19   Q.  Très bien. Vous serez donc d'accord avec moi pour dire que le ministre

 20   devait s'assurer que les mécanismes internes étaient bien en place pour

 21   qu'il soit en mesure de faire mettre en œuvre tous ses ordres et toutes ses

 22   décisions. Il devait créer une organisation interne et une discipline

 23   interne qui lui permettent d'asseoir son autorité dans sa prise de

 24   décision; est-ce bien exact ?

 25   R.  Le ministère ne fonctionnerait pas si une telle approche n'était pas

 26   adoptée. Il fallait qu'il y ait une dotation en personnel, un respect des

 27   réglementations, respect de ses ordres, tout cela était nécessaire pour que

 28   l'institution devienne une institution digne de ce nom.

Page 6745

  1   Q.  Mais vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'il avait hérité d'un

  2   ministère où certains avaient été nommés par les autorités locales et, plus

  3   tard, comme on l'a appris, certaines personnes qui avaient été

  4   délinquantes, qui avaient été en rupture par rapport à la loi, il a

  5   rencontré des difficultés à cause de cela, il a fallu qu'il nettoie un

  6   petit peu son ministère.

  7   R.  Oui. C'est également exact. Plus d'une fois au tout début, aux mois de

  8   mai et juin, je rencontrais parfois des personnes que je n'avais jamais

  9   vues auparavant. J'avais l'impression que je connaissais tout le personnel

 10   qui occupait les postes d'autorité au ministère, parce qu'après tout, j'y

 11   avais passé quand même pas mal de temps. Et tout à coup, je croisais une

 12   nouvelle personne. Il régnait un véritable chaos. Le fleuve Drina était à

 13   proximité, et c'est quelque chose que les criminels trouvaient très

 14   commode, parce que c'était facile pour eux de traverser le pont pour aller

 15   en Serbie. Donc ils avaient là une occasion en or de s'enrichir rapidement.

 16   Q.  A quelle municipalité faisiez-vous référence ? Elle ne se trouve pas au

 17   compte rendu d'audience. Est-ce que c'était à Zvornik que vous faisiez

 18   référence ?

 19   R.  Oui. J'ai mentionné Zvornik comme étant l'exemple le plus frappant de

 20   cette situation.

 21   Q.  Et vous serez d'accord avec moi pour dire que pour régler ce problème

 22   énorme, M. Stanisic devait se doter d'un soutien, à la fois politique et

 23   tout autre type de soutien de la part de la Republika Srpska pour réussir.

 24   Il ne pouvait pas faire cavalier seul et réussir; est-ce bien exact ?

 25   R.  Bien sûr, vous avez raison. J'aimerais savoir quel individu peut régler

 26   le problème tout seul sans soutien, quel qu'il soit. Mais très souvent, il

 27   n'obtenait pas de soutien de la part des autorités locales, parce qu'il

 28   s'agissait d'une sorte d'Etat dans l'Etat, d'une certaine façon. Les

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  1   structures locales étaient consultées à propos de tout et de rien, alors

  2   que le MUP était marginalisé dans ces zones. Ils avaient sans doute leurs

  3   raisons pour agir de cette façon.

  4   Q.  Très bien. Je vais vous poser une question générale en ce qui concerne

  5   chaque zone, ensuite nous ferons référence à des documents pour que nous

  6   voyions si, oui ou non, les documents confirment ce que nous disons.

  7   Alors, vous étiez policier de terrain. En tant que tel, vous avez reçu vos

  8   ordres du chef du CSB, vous avez assisté à des réunions du collège en cette

  9   qualité, et j'imagine que vous avez également eu l'occasion de voir des

 10   ordres émanant de M. Stanisic, donc j'aimerais vous poser la question

 11   suivante : lors des tentatives de retirer la police des opérations de

 12   combat pour que la police fasse son travail de police, est-ce que vous avez

 13   remarqué qu'il y avait une persistance dans les efforts du ministère

 14   d'atteindre cet objectif ? Je veux parler ici de ce qui était fait en

 15   termes pratiques, pas en termes généraux, mais ce qui a été fait sur le

 16   plan d'actions pratiques.

 17   R.  Bien sûr que j'ai été en mesure de remarquer, tout cela grâce à des

 18   dépêches administratives et également grâce à mes observations sur le

 19   terrain. Des efforts étaient déployés pour créer un MUP professionnel dès

 20   que possible avec des policiers qui étaient expérimentés et professionnels.

 21   Mais c'était un processus de longue haleine, un processus très ardu, qui

 22   impliquait énormément de difficultés, notamment avec les autorités locales.

 23   Mais nous pourrions en parler par la suite. Mais en tout cas, je sais que

 24   ça a été très difficile dans de nombreux endroits.

 25   Q.  Très bien. Passons maintenant à un autre domaine, c'est-à-dire la lutte

 26   contre les formations paramilitaires.

 27   Est-ce que vous avez pu observer qu'il y avait une continuité, disons, une

 28   persistance de la part du MUP et de la part de Mico Stanisic, le ministre,

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  1   dans les efforts faits pour éradiquer ces formations paramilitaires ?

  2   R.  Certainement, absolument. Je l'ai déjà dit dans des entretiens que j'ai

  3   eus deux ou trois fois, lorsque j'ai été interrogé. C'était une tâche

  4   permanente, en terminologie policière.

  5   Q.  Très bien. Dans les tentatives de nettoyage de la police, on essaie de

  6   se débarrasser des personnes qui avaient des dossiers judiciaires, c'est-à-

  7   dire des gens qui avaient commis des crimes alors qu'ils exerçaient leurs

  8   fonctions. Est-ce que vous avez observé dans ce domaine que M. Stanisic

  9   faisait des efforts pour nettoyer ces forces de police de ces hommes-là ?

 10   R.  Oui, absolument. Il y a eu plus d'une dépêche qui en atteste. J'espère

 11   que l'accusé me comprendra bien lorsque je dirai que c'était assez pénible,

 12   parce que des dépêches arrivaient, et deux ou trois jours, il y avait une

 13   nouvelle dépêche qui arrivait et qui répétait les mêmes choses que la

 14   première. Il essayait vraiment de créer un MUP professionnel dans ce chaos

 15   de la guerre.

 16   Q.  Merci. Passons maintenant au problème des crimes de guerre. Est-ce que

 17   vous avez reçu des instructions et des documents émanant du ministère sur

 18   le terrain sur la façon dont il fallait documenter les crimes de guerre, et

 19   est-ce qu'il y a eu une discrimination en fonction de la nature de la

 20   victime ?

 21   R.  Nous avons effectivement reçu des instructions. Bien entendu, mes

 22   collègues du département de la prévention de la criminalité sauront vous

 23   renseigner davantage sur le sujet, parce qu'après tout, c'est eux qui ont

 24   dû remplir un certain nombre de formulaires, donc ils connaissent la

 25   situation. Mais bien entendu, il n'y avait pas de discrimination, parce que

 26   chaque être humain doit être traité exactement de la même façon et doit se

 27   voir doté des mêmes mesures de protection. Il n'y avait aucun dilemme,

 28   aucun doute sur ce point.

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  1   Q.  J'aimerais vous poser la question suivante, puisque vous étiez sur les

  2   lieux : est-ce que vous avez connaissance d'un seul crime dont vous auriez

  3   entendu parler qui n'a pas fait l'objet de documentation et qui n'a pas été

  4   traité, que l'auteur ait été connu ou non connu ?

  5   R.  Je n'ai pas connaissance d'un crime comme celui-ci. Je ne sais pas s'il

  6   serait possible pour quiconque d'ignorer un crime grave sans avoir procédé

  7   à sa documentation et sans l'avoir traité du tout.

  8   Q.  Très bien. Et nous en arrivons maintenant au problème des camps, des

  9   centres de rassemblement, des centres de rassemblement des prisonniers, et

 10   cetera.

 11   Le ministère de l'Intérieur n'avait qu'une compétence en matière de centres

 12   où les personnes sont privées de liberté. Il s'agit là de centres où les

 13   personnes sont gardées en détention provisoire et ne peuvent y rester que

 14   pendant une période de trois jours.

 15   Vous êtes d'accord pour dire que tous les autres centres analogues on

 16   similaires n'étaient pas placés sous la compétence de la police; est-ce

 17   bien exact ?

 18   R.  C'est bien exact. Mais permettez-moi de préciser. Vous avez parlé

 19   d'unités de détention. Mais chaque poste de police avait de une à deux ou

 20   trois cellules, dépendamment du territoire sur lequel il se trouvait, du

 21   nombre de personnes, et cetera, et c'est là que les personnes étaient

 22   gardées conformément à la loi jusqu'à un maximum de trois jours. Et par la

 23   suite, la personne pouvait être soit transférée à l'hôpital si la personne

 24   était arrivée blessée, et cetera. Donc c'était une procédure que l'on

 25   suivait. Maintenant, lorsque vous parlez de camps, de centres de

 26   rassemblement, et ainsi de suite, il est vrai que ces centres étaient sous

 27   la compétence de la Republika Srpska.

 28   Q.  Très bien. D'accord. Des fois, ce sont les organes municipaux qui

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  1   procédaient à la création de ces centres de rassemblement, mais nous allons

  2   voir tout ça dans les documents que je vais vous montrer.

  3   Et donc je voulais également aborder un autre sujet avec vous. Il s'agit

  4   d'organisation des cadres et de financement. J'aimerais savoir si vous

  5   aviez remarqué une continuité dans le travail de M. Stanisic et qu'il

  6   s'efforçait à résoudre ces problèmes-là ?

  7   R.  Oui, bien sûr. Nous avions énormément de problèmes avec les policiers,

  8   avec les cadres, et il était bien difficile de travailler dans ces temps de

  9   guerre, en commençant par les centres de sécurité publique et en allant

 10   jusqu'aux CSB, et ainsi de suite. Nous voulions choisir des gens formés

 11   pour occuper des postes de cadres pour éviter que certaines personnes qui

 12   n'étaient pas suffisamment bien formées et qui n'arrivaient pas à

 13   distinguer les problèmes.

 14   Q.  Monsieur Borovcanin, si je ne m'abuse, M. Zupljanin avait évoqué une

 15   question et plus tard, on a également abordé la question du financement de

 16   l'organe de l'intérieur. Au début, les choses n'étaient pas gérées de façon

 17   adéquate, n'est-ce pas ?

 18   R.  Je sais qu'il n'y avait pas une unité dans la façon de procéder. Je

 19   pense qu'au poste de police d'Ilijas, il y avait certaines personnes qui

 20   agissaient seules, et il est arrivé qu'une personne, je ne me souviens plus

 21   exactement de son nom, je crois qu'il était membre du conseil exécutif, et

 22   il a dit : C'est moi qui donne l'argent, et je veux donc donner des ordres,

 23   puisque je finance la police, c'est moi qui me procure l'uniforme pour eux,

 24   les moyens techniques, c'est moi qui les habille. Donc, ce dernier voulait

 25   commander. Donc, c'était un énorme problème au départ, alors que M.

 26   Stanisic souhaitait que ce problème soit résolu et que le financement des

 27   MUP se fasse depuis un centre et qu'il y ait une unité. Donc, c'était lui

 28   qui s'est toujours efforcé de créer un MUP professionnel.

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  1   Q.  Très bien. Donc, vous avez justement répondu à une de mes questions que

  2   j'allais vous poser s'agissant des autorités locales des cellules de Crise,

  3   des autorités locales, des provinces autonomes serbes, des municipalités et

  4   de leur influence sur le travail de la police.

  5   Est-ce que vous aviez remarqué qu'ils avaient des problèmes ?

  6   R.  Bien sûr. Vous pouvez justement imaginer au tout début, en 1992. Ils

  7   avaient créé des points de contrôle sur les axes de communication. Il y

  8   avait des personnes appartenant à la cellule de Crise, des membres de

  9   groupes paramilitaires. Ces personnes ne savaient pas qui était leur chef.

 10   Donc, il fallait résoudre la question de la compétence.

 11   Nous étions en marge. Nous ne comprenions absolument pas que les

 12   choses se passaient. Alors moi, j'avais dit à plusieurs reprises lors de

 13   réunions : Mettons-nous d'accord, faisons des instructions pour savoir qui

 14   peut être sur un point de contrôle s'agissant de faire passer les biens

 15   volés, et cetera. Et donc, il fallait vraiment faire attention pour qu'on

 16   sache qui est sous la compétence de qui. Et encore une fois, pour répéter,

 17   le MUP n'était pas vraiment important. Personne ne nous demandait quoi que

 18   ce soit, et nous avions vraiment essayé ou tenté de devenir une

 19   organisation professionnelle ou de réorganiser le tout afin que tout le

 20   monde se comporte de façon professionnelle.

 21   Q.  Très bien. J'aimerais maintenant que vous me parliez des problèmes de

 22   communication, de l'accès physique à certaines régions de la Republika

 23   Srpska, quels étaient les problèmes relatifs à l'information à cause d'un

 24   manque de communication, et ainsi de suite. Donc, sur le terrain, est-ce

 25   que vous aviez des problèmes à cause de ce type de manque de communication

 26   ?

 27   R.  Bien sûr que j'avais des problèmes, et comment. Je vais vous donner un

 28   exemple, vous allez sans doute le comprendre. Il existait un poste de

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  1   police à Nedzarici. C'était un poste de police de réserve qui était

  2   rattaché au poste de sécurité d'Ilidza. Vous pouvez vous imaginer arriver

  3   dans ce poste de police, je n'y ai été qu'une fois et pendant la nuit, donc

  4   j'étais arrivé en plein milieu de la nuit afin de pouvoir passer par les

  5   points de contrôle. Et donc, vous vous rendez à la pièce où se trouve le

  6   commandant local et il y a quatre ou cinq murs qui avaient été détruits

  7   pour pouvoir accéder, pour pouvoir faire un couloir afin d'arriver dans la

  8   pièce où se trouvait le directeur. C'était en plein milieu de la guerre,

  9   donc c'était très difficile, et il y avait plusieurs endroits de ce type :

 10   Ilijas, Ilidza. Il y avait une sorte de paravent sur la route pour se

 11   protéger des tirs de tireurs embusqués, et chaque fois qu'on passait par

 12   là, on se demandait si on allait sortir vivants. Donc, il n'y avait pas de

 13   communications électroniques, les téléphones ne fonctionnaient pas. Vous

 14   pouvez vous imaginer à quel point nous avions des problèmes en 1992 pour

 15   nous rendre physiquement à certains endroits.

 16   Q.  Si je ne m'abuse, nous arrivons à la fin de notre séance d'aujourd'hui,

 17   et je vais vous poser donc des questions concrètes. Avez-vous remarqué si

 18   M. Stanisic avait un appui absolu des autres organes du pouvoir politique,

 19   et ainsi de suite ?

 20   R.  Je ne peux vous donner qu'une opinion personnelle. Vous pouvez vous

 21   imaginer des personnes qui ont essayé de s'approprier très facilement des

 22   biens, qui voulaient se faire de l'argent rapidement. Donc, c'était une

 23   situation dans laquelle le crime était répandu, et donc, ces criminels

 24   n'étaient pas très heureux de voir qu'on essayait d'organiser un MUP qui

 25   fonctionne. Et il y avait des gens qui pillaient les biens d'autrui,

 26   surtout s'ils étaient appuyés par le parti politique et que le parti

 27   politique leur donnait leur aval pour ce type de comportement. C'était un

 28   problème.

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  1   Q.  En 1994, où étiez-vous et quel poste occupiez-vous ?

  2   R.  En 1994, je suis tombé malade sur le terrain et pendant six à sept

  3   mois, j'étais en convalescence. Et à l'époque, on m'a nommé au poste

  4   d'inspecteur au MUP. Donc, je n'étais plus le commandant du MUP mais

  5   j'étais devenu inspecteur du MUP, et je crois que j'ai passé une partie de

  6   1995 là.

  7   Q.  En fait, je voulais savoir la chose suivante : est-ce que vous vous

  8   rappelez si en 1994 M. Stanisic était retourné pour occuper le poste de

  9   ministre de l'Intérieur, qu'il est resté peu de temps à ce poste et que par

 10   la suite il a lui-même démissionné ?

 11   R.  Oui, c'est exact. Je me souviens bien de cela.

 12   M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé avec

 13   cette phase que j'appelle une phase en guise d'introduction. Donc, j'ai

 14   terminé avec mon introduction, voilà. Je vais maintenant procéder à montrer

 15   des documents au témoin. Donc, pour moi, c'est tout à fait un nouveau sujet

 16   que je vais aborder. Alors, si vous voulez, je peux commencer maintenant ou

 17   si vous le souhaitez, nous pouvons commencer toute cette série de questions

 18   demain.

 19   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien, je suis d'accord avec vous.

 20   Donc, il ne nous resterait que deux minutes, de toute façon, avant la fin

 21   de la séance d'aujourd'hui, et je propose de continuer demain. Monsieur

 22   Borovcanin, comme je vous ai dit hier, je vous demanderais de ne pas vous

 23   entretenir avec qui que ce soit du témoignage que vous avez donné

 24   aujourd'hui.

 25   Et nous allons reprendre nos travaux demain matin, dans cette même salle

 26   d'audience, à 9 heures.

 27   --- L'audience est levée à 13 heures 43 et reprendra le mercredi 24 février

 28   2010, à 9 heures 00.