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1 Le mercredi 6 octobre 2010
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 09.
5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Bonjour à
6 toutes les personnes dans le prétoire.
7 Ceci est l'affaire IT-08-91-T, le Procureur contre Mico Stanisic et Stojan
8 Zupljanin.
9 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
10 [La Chambre de première instance se concerte]
11 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.
12 Bonjour à toutes les personnes présentes.
13 Avant d'entendre les présentations, je relève qu'aujourd'hui Mme Korner est
14 aussi présente, et je vais saisir pour l'occasion qui nous est offerte pour
15 exprimer à Mme Korner les condoléances de la Chambre suite au décès récent
16 de son père.
17 Pouvons-nous avoir les présentations.
18 Mme KORNER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Joanna Korner,
19 Thomas Hannis, Thomas [comme interprété] Di Fazio et Crispian Smith pour
20 l'Accusation.
21 Je souhaite remercier vivement les Juges de la Chambre pour l'expression de
22 leurs condoléances.
23 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
24 bonjour. Pour la Défense de M. Stanisic, Me Cvijetic, Tatjana Savic et
25 Deirdre Montgomery.
26 M. KRGOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Dragan
27 Krgovic et Aleksandar Aleksic pour la Défense Zupljanin.
28 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.
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1 On nous a signalé qu'il existait une certaine préoccupation, pour ainsi
2 dire, de la part de la Défense concernant un des témoins qui sera appelé à
3 déposer.
4 Alors, Mme Korner est debout.
5 Mme KORNER : [interprétation] Oui, je me suis levée parce qu'un échange
6 d'e-mail a eu lieu dont j'espère qu'il a été transmis aux Juges de la
7 Chambre. Ma compréhension de la chose est qu'il s'agit, en fait, d'une
8 requête à laquelle l'Accusation s'oppose.
9 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Pouvez-vous entendre cette requête ? A
10 moins qu'il n'y ait eu un changement de position.
11 M. CVIJETIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, nous n'avons pas
12 changé d'avis.
13 La requête que nous avons est très claire et brève. Parce que récemment,
14 non seulement concernant le témoin suivant que nous attendons que
15 concernant un certain nombre de témoins précédents, nous nous sommes vu
16 communiquer un volume important de documents juste avant la comparution du
17 témoin, documents qui se sont avérés pertinents pour les préparatifs de la
18 Défense aux fins du contre-interrogatoire. Et ceci s'est reproduit, nous
19 avons reçu des documents qui correspondent à plus de 200 pages de compte
20 rendu concernant ce témoin. Par conséquent, il était impossible d'étudier
21 l'ensemble de ces documents et de se préparer correctement pour le contre-
22 interrogatoire.
23 En raison des motifs que j'ai évoqués hier et du rythme auquel nous
24 avançons, je pense que c'est tout simplement la goutte d'eau qui fait
25 déborder la vase en quelque sorte et qui justifie notre requête consistant
26 à demander que la déposition de ce témoin soit reportée à une date
27 ultérieure afin que nous puissions nous préparer comme il se doit. Je vous
28 remercie.
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1 M. KRGOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, concernant la Défense de
2 M. Zupljanin, le témoin dont il s'agit intéresse avant tout la Défense
3 Stanisic. Nous n'avons pas, pour notre part, eu l'occasion d'examiner ces
4 documents non plus, donc nous souscrivons à la requête de mon éminent
5 confrère. Et à ce jour, nous ignorons toujours le contenu de cette
6 documentation que nous n'avons pas eu l'occasion d'étudier. Mais j'ai
7 compris qu'il s'agissait d'une documentation très volumineuse.
8 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous connaissons la position du
9 Procureur concernant cet échange d'e-mail dont nous avons été avisés. Mais
10 pourrions-nous avoir, pour le compte rendu d'audience, une formulation de
11 la position du Procureur à ce sujet, s'il vous plaît, Madame Korner ?
12 Mme KORNER : [interprétation] Absolument.
13 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, la Défense, pendant mon
14 absence, a déposé une requête demandant communication en application de
15 l'article 66(B) de tout entretien que nous aurions pu avoir - quand je dis
16 "nous," je parle du bureau du Procureur - que nous aurions pu avoir donc
17 pendant l'année avec des membres du MUP de la Republika Srpska afin de
18 pouvoir examiner si ces entretiens présentaient une certaine pertinence ou
19 non. Alors pendant les recherches correspondantes, il est apparu qu'en
20 dépit du fait que les deux entretiens communiqués par nous hier n'aient pas
21 été des entretiens conduits avec des membres du MUP de la Republika Srpska,
22 il s'agissait, en fait, d'entretiens avec des personnes interrogées par le
23 bureau du Procureur il y a quelques années et le témoin qui s'apprête à
24 déposer a témoigné devant un tribunal d'Etat de la Bosnie-Herzégovine à
25 charge contre ces deux individus qui ont été condamnés, il s'agit de Ratko
26 Lalovic connu également sous le sobriquet de Soniboj
27 Skelaljic [phon], qui était gardien au centre de détention à la prison de
28 Kula, et qui ne sont pas mentionnés à l'acte d'accusation.
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1 Ce témoin a eu cette position particulière par rapport à ces deux
2 hommes, et ce que j'ai dit dans un e-mail, au titre de notre désir de
3 coopération qui va bien au-delà de l'application stricte du Règlement,
4 c'est que nous avons dévoilé ces deux entretiens par précaution
5 supplémentaire.
6 Donc dans un des entretiens, l'homme en question est référencé 13
7 fois, et 14 fois dans l'autre, donc dans les 279 pages de cet entretien, et
8 je fournirai les références correspondantes à la Défense. Donc cette
9 préoccupation est déjà apparue avec un témoin précédent, il s'agit de la
10 page 77 de l'entretien avec Soniboj, à la date du 15 novembre, le témoin
11 - dont je ne mentionnerai pas le nom, je crois qu'il bénéficie -- dont je
12 ne donnerai pas le nom, je crois qu'il ne bénéficie de mesures de
13 protection - et il dit, il m'a apporté la décision.
14 Enfin, ce que nous disons, c'est qu'il n'y a absolument aucune raison
15 de reporter la déposition de ce témoin. Je ne comprends pas pourquoi la
16 Défense s'efforce à présent de retarder la déposition de tous les témoins
17 qui présentent une certaine importance. Ewan Brown a déjà été déplacé pour
18 ce qui est de sa déposition pour le mois de janvier, et nous persistons à
19 affirmer que c'est sans raison valable. Je crois que nous avons un, deux,
20 trois -- cinq avocats qui travaillent dans l'équipe de la Défense Stanisic,
21 et je crois qu'il y en a quatre dans l'équipe de la Défense Zupljanin, et
22 ils ne seraient pas en mesure de vérifier les références correspondantes
23 pour voir ce qui, dans cette documentation, peut avoir une incidence sur le
24 contre-interrogatoire du témoin.
25 C'est en tout cas la position du bureau du Procureur qui est tout à
26 fait prêt à poursuivre.
27 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Madame Korner.
28 [La Chambre de première instance se concerte]
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1 M. LE JUGE HALL : [interprétation] La Défense souhaite-t-elle répondre à ce
2 que Mme Korner vient de dire ?
3 M. CVIJETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, brièvement, s'il
4 vous plaît.
5 La Défense ne peut pas utiliser des références déterminées par le bureau du
6 Procureur. La Défense a le droit de préparer son contre-interrogatoire en
7 conformité avec sa stratégie et sa tactique propres, et de décider elle-
8 même des fragments de documents sur lesquels elle s'appuiera. Par
9 conséquent, nous devons avoir la possibilité d'étudier l'ensemble de la
10 documentation avant de décider nous-mêmes ce qui constitue une référence à
11 avancer pendant le contre-interrogatoire.
12 Et par rapport à ce que Mme Korner vient de dire, je souhaite dire que les
13 arguments sur lesquels elle s'appuie ne sont pas valables et ne peuvent pas
14 nous aider à préparer le contre-interrogatoire du témoin suivant.
15 Puisque Mme Korner a pratiquement répondu d'avance à un autre doute que
16 j'avais et dont je souhaitais vous faire part, je vais maintenant en
17 parler. En fait, ma requête n'en est que plus fondée encore. Je pensais
18 proposer que l'Accusation n'interroge pas ce témoin concernant les
19 événements survenus dans l'établissement pénitentiaire de Kula, puisque ces
20 événements ne sont pas couverts par l'acte d'accusation. Cependant, Mme
21 Korner a indiqué que cela était inévitable qu'elle serait inévitablement
22 conduite à se pencher sur ces événements, d'autant plus que les individus
23 mentionnés dans ces entretiens occupaient des postes haut placés dans cet
24 établissement pénitentiaire. L'un était gardien; l'autre, son subordonné
25 direct.
26 Donc je souhaitais proposer que si l'Accusation pouvait garantir de
27 ne pas s'aventurer sur ce terrain, bien, nous pourrions peut-être arriver à
28 une solution et nous pourrions peut-être renoncer à l'objection qui est la
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1 nôtre.
2 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bien entendu, les Juges de la Chambre
3 n'ont pas de commentaire à proposer concernant la seconde moitié de la
4 réponse de Me Cvijetic. Il appartient à la partie citant à comparaître le
5 témoin de décider des éléments de preuve qu'elle présentera.
6 Concernant la première partie de la réplique de Me Cvijetic, nous convenons
7 avec lui qu'il n'appartient pas en l'espèce à l'Accusation de décider de ce
8 qui, du point de vue de la Défense et de la présentation de sa cause,
9 pourrait être pertinent ou non. Cependant, nous n'estimons pas que les
10 documents auxquels la Défense s'est référée présenteraient une telle
11 pertinence ex facie qu'il serait nécessaire de reporter la citation à
12 comparaître de ce témoin. Nous considérons, en effet, que cela fait partie
13 de la fonction même de conseil de la Défense que de procéder à un certain
14 nombre d'ajustements à mesure que le procès avance et de procéder à une
15 division des tâches également entre les différents membres des équipes de
16 la Défense.
17 Comme je l'ai déjà dit, nous ne voyons pas de raison valable de retarder la
18 déposition de ce témoin, et c'est au conseil qu'il appartient de décider
19 comment l'interrogatoire sera conduit.
20 Je vous remercie.
21 Mme KORNER : [interprétation] Monsieur le Président, merci beaucoup. Je
22 vais maintenant laisser la parole à MM. Di Fazio et Hannis.
23 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien.
24 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Avant que le témoin n'entre dans le
25 prétoire, je souhaiterais corriger une information que j'ai donnée hier de
26 façon erronée. J'ai indiqué que nous aurions déjà versé le rapport d'expert
27 de M. Bos [comme interprété], mais cela n'a pas été le cas, parce que nous
28 avions, en fait, décidé de ne pas verser ce rapport d'expert tant que sa
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1 déposition ne serait pas terminée.
2 Donc je souhaitais simplement apporter cette petite correction tout en
3 m'excusant pour cette erreur. A ceci près, vous pouvez poursuivre.
4 Mme KORNER : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge. Je souhaitais
5 simplement signaler que les choses étaient tout à fait claires pour nous
6 concernant ce rapport d'expert. J'en ai parlé avec M. Di Fazio.
7 [Le témoin vient à la barre]
8 LE TÉMOIN : EWA TABEAU [Reprise]
9 [Le témoin répond par l'interprète]
10 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci. Puis-je poursuivre, Messieurs les
11 Juges ?
12 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui.
13 Je rappelle simplement au témoin -- Madame Tabeau, je vous rappelle que
14 vous êtes toujours liée par la déclaration solennelle que vous avez
15 prononcée.
16 Monsieur Di Fazio, à vous.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.
18 Interrogatoire principal par M. Di Fazio :
19 Q. [interprétation] Madame Tabeau, je voudrais simplement revenir
20 rapidement sur votre qualité de témoin expert.
21 Hier les Juges de la Chambre vous ont posé quelques questions concernant
22 les dépositions que vous avez fournies, et je voudrais brièvement présenter
23 un document qui nous permettra de voir les informations les plus à jour à
24 ce sujet.
25 Enfin, votre qualité d'expert est pleinement abordée dans le rapport
26 Milosevic, je crois, je ne vais pas entrer dans les détails.
27 Je crois que vous avez un doctorat en démographie ?
28 R. Oui.
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1 Q. Et dans l'annexe D du rapport Milosevic, nous avons tous les détails
2 correspondant à votre parcours professionnel, n'est-ce pas ?
3 R. Oui.
4 Q. Certains des éléments de votre parcours de votre activité en tant
5 qu'expert comportent les éléments suivants. Ça fait maintenant déjà dix ans
6 que vous travaillez pour la section de démographie du bureau du Procureur,
7 n'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Et avant cela vous avez travaillé pendant à l'institut
10 interdisciplinaire de démographie de La Haye, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Et à l'époque du rapport Milosevic, vous aviez déjà été l'auteur
13 d'environ 90 articles de recherche ainsi que de ce rapport d'expert. Est-ce
14 que ce chiffre a changé ?
15 R. Oui, bien sûr. Maintenant il atteint environ 150 articles de recherche,
16 articles généraux, ouvrages et rapports d'expert. Dix années se sont
17 écoulées et j'ai eu l'occasion de présenter une quarantaine de rapports
18 d'expert entre-temps.
19 Q. Merci.
20 M. DI FAZIO : [interprétation] Pouvons-nous présenter au témoin le document
21 10396 de la liste 65 ter, s'il vous plaît.
22 Q. Avons-nous là, Madame le Témoin, une liste des rapports que vous avez
23 préparée en qualité d'expert dans les différentes affaires où vous avez
24 déposé ?
25 R. Oui. Il s'agit ici d'une sélection des rapports que j'ai préparés.
26 Q. Merci.
27 M. DI FAZIO : [interprétation] Pouvons-nous avoir la page suivante, s'il
28 vous plaît.
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1 Q. Il s'agit de la suite de la liste en question, n'est-ce
2 pas ?
3 R. Oui. Cette liste n'est pas à jour, parce qu'elle ne mentionne pas les
4 tous derniers rapports que j'ai eu à préparer, par exemple, dans l'affaire
5 Karadzic, ainsi que dans d'autres affaires.
6 Q. Combien manquent ?
7 R. Une dizaine, je crois.
8 Q. Merci.
9 M. DI FAZIO : [interprétation] Et dernière page à l'écran, s'il vous plaît.
10 Q. Ceci constitue-t-il une liste mise à jour de vos travaux et des
11 dépositions que vous avez fournies ?
12 R. Oui. Ceci est une liste répertoriant toutes les dépositions que j'ai
13 faites dans les différentes affaires; Perisic, Lukic, Prlic, et cetera.
14 Q. Merci.
15 M. DI FAZIO : [interprétation] Je souhaite demander le versement au dossier
16 de ce document.
17 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le document est admis.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P1622. Il s'agit de
19 combler l'intervalle qui nous est restée hier, Monsieur le Président.
20 M. DI FAZIO : [interprétation]
21 Q. Très bien. Revenons maintenant aux rapports.
22 Hier nous avons indiqué qu'il sera question de trois rapports principaux au
23 cours de votre déposition, et à les examiner il est clair que vous vous
24 êtes servie des outils statistiques pour les élaborer. Alors, les séries de
25 données statistiques dont vous vous êtes servie, sont-elles les suivantes ?
26 Vous vous êtes servie du recensement effectué en 1991 en Bosnie; vous vous
27 êtes servie des registres d'électeurs qui ont été préparés en 1997 et 1998
28 en Bosnie, en vue des élections générales; et finalement, vous vous êtes
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1 servie de 12 bases de données différentes répertoriant les personnes
2 décédées et les victimes de guerre. Ces bases de données, vous les avez
3 obtenues de la part de différentes institutions et organes de Bosnie.
4 S'agit-il là des trois séries de données différentes dont vous vous êtes
5 servie ?
6 R. Oui, c'est le carnet. Et je préfère désigner ces données par le terme
7 de sources statistiques, et non pas tout simplement de statistiques tout
8 court. Alors, ce sont là les sources dont je me suis servie pour élaborer
9 les conclusions statistiques présentées dans mes rapports, et je souhaite
10 signaler que toutes ces sources présentent des données qui concernent des
11 individus. Donc il s'agit de fichiers individuels qui ont rapport à des
12 personnes particulières. Il ne s'agit pas de statistiques agglomérées ou
13 agrégées.
14 Parfois, nous nous servons de sources statistiques qui ont été
15 préparées par d'autres institutions, mais de façon générale nous nous
16 servons de sources statistiques qui traitent des fichiers individuels, et
17 les sources que vous avez indiquées ne sont pas les seules dont nous nous
18 sommes servis, mais elles sont les plus importantes.
19 Q. Très bien. Concentrons-nous sur le recensement pour commencer.
20 Dans votre rapport préparé pour l'affaire Milosevic, vous avez fourni un
21 grand nombre de détails quant à la manière dont le recensement a été
22 effectué. A la page 5, vous dites quelles étaient les pratiques
23 statistiques, et vous indiquez que ce recensement de la population
24 représentait la source d'information la plus importante et la plus complète
25 pour juger de la population d'un pays.
26 Est-ce que vous vous en tenez à cette déclaration ?
27 R. Oui, tout à fait. Il existe d'autres systèmes également, notamment dans
28 des pays développés, dans des pays occidentaux, où il n'y a pas de
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1 recensement organisé. Mais là, nous parlons de pays qui ont suffisamment de
2 moyens pour tenir des registres de la population composés de fichiers
3 individuels. Dans une telle situation, les données sont recueillies de
4 façon systématique, et elles sont tenues dans un registre centralisé à
5 partir duquel on peut élaborer différentes conclusions statistiques.
6 Dans les pays qui ressemblent à celui de l'ex-Yougoslavie, il n'y a pas de
7 ce registre central de la population, et c'est pourquoi le recensement de
8 la population représente la source la plus importante et la plus complète
9 d'information qui concerne la population. Les recensements sont effectués
10 une fois par dix ans, et le dernier recensement avant la fin de la guerre a
11 été entamé en 1991, au mois de mars.
12 Q. [aucune interprétation]
13 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je suis désolé de vous interrompre, mais
14 à la page 10, ligne 6 du compte rendu d'audience, j'ai entendu le témoin
15 dire qu'il s'agissait des "statistiques agrégées," et non "aggravées" comme
16 cela est consigné au compte rendu d'audience.
17 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci.
18 Q. Alors --
19 R. Oui.
20 Q. Veuillez nous préciser ce que représentent les statistiques agrégées.
21 R. [aucune interprétation]
22 Q. [aucune interprétation]
23 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit des données statistiques qui
25 concernent des groupes de données. Par exemple, le nombre total de la
26 population dans un pays est une donnée statistique agrégée. Ce nombre est
27 dérivé du décompte de fichiers individuels qui représentent les différents
28 individus qui composent une population.
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1 Q. Merci de cette explication. Dans votre rapport, dans l'affaire
2 Milosevic, vous expliquez en détail l'organisation et les techniques
3 appliquées dans le recensement. Je pense que vous abordez également la
4 question des différentes dispositions légales qui étaient en vigueur et qui
5 régissaient la manière dont le recensement devait se dérouler, vous
6 expliquez quels organes en Bosnie se sont vu confier la tâche d'effectuer
7 le recensement, quelles méthodes de formation ont été utilisées pour former
8 les recenseurs et les encadreurs. Alors, tout ceci est présenté dans
9 l'annexe B3 du rapport Milosevic ?
10 R. Oui, tout à fait. Ces informations, je les ai reçues de la part d'une
11 personne qui a participé au recensement effectué en Bosnie en 1991. Il
12 s'agit d'une personne qui a participé pendant de longues années à la
13 préparation, et à l'élaboration méthodologique du recensement. Elle était
14 membre des commissions fédérale et républicaine chargées du recensement.
15 Q. Très bien. Dans le rapport Milosevic, vous parlez également des
16 questions qui touchent à l'évaluation de la qualité, et vous expliquez
17 quelles mesures du contrôle de la qualité avaient été mises en œuvre en
18 Bosnie lorsque le recensement a été effectué. Alors, il existe un aspect
19 que j'aimerais préciser au profit des Juges de la Chambre. Il s'agit du
20 recensement des faits qui a été effectué en Bosnie.
21 Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre ce que c'était que ce
22 recensement des faits et de quelle façon il influençait la qualité des
23 sources statistiques ?
24 R. Les recensements des faits sont généralement effectués quelques années
25 avant un recensement effectif. En Bosnie, ce recensement des faits a été
26 organisé en 1988. C'est un recensement qui s'appuie sur des questionnaires
27 de recensement effectifs distribués par les recenseurs à un petit nombre de
28 zones concernées par le recensement général. D'après mes souvenirs, il
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1 s'agit de huit municipalités qui ont servi d'échantillon arbitraire et qui
2 devait permettre d'effectuer ce recensement d'essai. Alors l'objectif de ce
3 recensement d'essai est de vérifier la qualité du questionnaire de
4 recensement et également de suivre l'activité de recenseur, d'encadreur,
5 leurs pratiques, les différentes questions liées à l'organisation. Et en
6 s'appuyant sur les résultats du recensement des faits, on procède
7 éventuellement à des modifications des procédures prévues pour le
8 recensement effectif.
9 Voilà, c'est là l'objectif principal de cette action.
10 Q. Merci.
11 R. Et elle a bien été mise sur pied en Bosnie.
12 Q. Merci. Veuillez expliquer aux Juges de la Chambre comment s'est déroulé
13 le processus de recensement à partir du moment où le recenseur s'est rendu
14 à la maison de quelqu'un, s'est adressé à la personne, a recueilli tous les
15 éléments d'information pertinente, les a consignés dans le formulaire,
16 jusqu'au moment où ces données sont arrivées à l'unité démographique du
17 bureau du Procureur.
18 R. Bien, il s'agit là d'une longue chaîne d'activités qui ont permis de
19 mener à bien le processus de recensement. En tout cas, les recenseurs se
20 rendaient dans toutes les maisons individuelles qui se trouvaient dans leur
21 zone de responsabilité. Par une zone de recensement, on sous-entend une
22 petite zone géographique, et le territoire entier du pays est composé de
23 telles petites zones. Alors chaque recenseur a la tâche de couvrir un
24 certain nombre de zones de ce type. Il effectue des entretiens, et il est
25 responsable de couvrir tous les foyers qui existent sur le territoire qui
26 relève de ses responsabilités.
27 Une fois terminé l'entretien, la personne qui l'a effectué doit vérifier
28 les questionnaires, vérifier s'ils sont complétés comme il le faut,
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1 vérifier l'exactitude des réponses, et une fois cette vérification
2 terminée, le recenseur remet la documentation à l'encadreur principal,
3 l'instructeur principal, qui revérifie encore une fois si les données sont
4 complètes.
5 Alors une fois la documentation acceptée, il arrivait que le recenseur
6 doive reprendre un certain nombre d'entretiens pour améliorer la qualité de
7 la documentation fournie. Mais à un moment donné, les instructeurs ou les
8 encadreurs municipaux acceptaient la documentation remise par les
9 recenseurs, et une commission municipale revérifiait encore une fois si
10 toute la documentation était complète au niveau de la municipalité toute
11 entière.
12 Puis la documentation était remise à la commission centrale chargée du
13 recensement qui était responsable pour le territoire total de la République
14 de Bosnie-Herzégovine. Encore une fois, on vérifiait si les questionnaires
15 étaient bien complétés, notamment sur le plan géographique, puis on
16 procédait à un décompte manuel des éléments d'information répertoriés dans
17 les questionnaires. Et dès 1991, on a publié un certain nombre de données
18 préliminaires. Ceci a été fait deux mois après la fin du recensement. On
19 appelait ça des données statistiques préliminaires et cela voulait dire que
20 les autorités statistiques centrales se réservaient le droit de revoir
21 encore une fois toute la documentation une fois qu'elle avait été saisie
22 dans le système électronique, revérifiée et traitée.
23 Les autorités de Bosnie-Herzégovine ont décidé de procéder au
24 téléchargement de la documentation par le biais de traitement électronique,
25 donc les questionnaires n'étaient pas recopiés par des employés, mais ils
26 ont tout simplement été scannés. Une fois ce processus terminé, tous les
27 questionnaires ont encore une fois été examinés pour vérifier si tout s'est
28 bien passé sur le plan technique et s'il était possible de les lire sous
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1 leur forme électronique.
2 Une fois terminé ce scanning optique - je pense que cela s'est produit au
3 début de 1992 - une base de données électronique a été mise sur pied, et en
4 se servant de cette base il était possible aux organes compétents de
5 procéder à un certain nombre de vérifications. On appelait ce type de
6 vérification contrôle de la logique, de la cohérence des données. On
7 établissait des liens entre les différentes variables, et chaque fois qu'il
8 était nécessaire d'apporter les corrections, on le faisait. Par exemple, on
9 vérifiait si un enfant de 10 ans était marié ou non, parce qu'évidemment il
10 est impossible qu'un enfant de cet âge soit marié. Donc c'était le type
11 d'information qu'on comparait mutuellement pour établir une cohérence.
12 Cela, en revanche, ne vaut pas pour l'aspect agricole du recensement. Le
13 recensement comprenait trois parties différentes. Il concernait la
14 population d'une part, le nombre de foyers d'autre part, et le nombre de
15 fermes ou de propriétés, c'était le troisième volet. Alors les
16 vérifications ont été faites au niveau de la population, mais pas au niveau
17 du domaine agricole et au niveau du nombre de foyers.
18 A ce moment-là, le travail a été suspendu à cause de la guerre. Les organes
19 compétents n'ont jamais terminé leurs vérifications pour les deux autres
20 volets du recensement, mais ils ont publié un certain nombre de données
21 concernant la population. Ces données ont été divulguées dans la base de
22 données de 1995 et fournies au Bureau de statistiques croate.
23 Q. Je vous serais reconnaissant de bien vouloir ralentir un petit peu.
24 R. Je vous présente mes excuses.
25 Q. Et pourriez-vous présenter d'une façon plus succincte la manière dont
26 les données statistiques ont été recueillies et la manière dont vous les
27 avez traitées une fois que vous les avez reçues au sein de l'Unité
28 démographique ?
Page 15417
1 R. Bien, nous avons reçu les données en 1991; j'essaie de vous expliquer
2 ce qui s'était passé avec ces données entre-temps. Les organes compétents
3 avaient effectué des travaux d'une manière assez satisfaisante et il existe
4 un certain nombre de conclusions officielles basées sur le recensement de
5 1991.
6 Evidemment, un grand nombre de traitements a dû être fait pour arriver à
7 ces résultats. Un certain nombre de données statistiques ont été divulguées
8 au public, et c'est à ce moment-là que nous avons demandé de recevoir des
9 copies de fichiers individuels issus du recensement. Nous avons reçu une
10 version électronique de toutes les données et nous les avons compilées dans
11 nos propres bases de données.
12 Q. Donc toutes les séries de vérifications ont été faites pour s'assurer
13 que la documentation avait été recueillie d'une manière appropriée. Puis on
14 a fait d'autres vérifications en Bosnie pour vérifier si ces données
15 étaient cohérentes et logiques du point de vue interne. Puis elles ont été
16 mises sous forme électronique, elles ont été numérisées, et finalement
17 reçues par l'unité démographique du bureau du Procureur.
18 Etait-ce là le déroulement chronologique des événements ?
19 R. Oui, tout à fait.
20 Q. Merci. Concentrons-nous maintenant sur le moment où la documentation
21 est arrivée ici au sein de l'unité démographique du bureau du Procureur.
22 Vous dites que vous avez dû faire face à toute une série de problèmes, y
23 compris des problèmes relatifs au numéro d'identification personnel en
24 B/C/S Maticni Broj.
25 Un autre problème concernait les fautes d'orthographe qu'on retrouvait dans
26 les données. Veuillez dire aux Juges de la Chambre quelle est l'importance
27 de ces fautes d'orthographe et comment le bureau du Procureur s'est pris
28 pour résoudre le problème.
Page 15418
1 R. Les fautes d'orthographe, les coquilles, si vous le voulez, ont été
2 pour nous un immense problème. Je signale qu'il n'est pas habituel que les
3 organes chargés de statistiques fournissent des données à des personnes
4 tierces. Ils l'ont fait pour nous à notre demande, et il était compris que
5 toutes les informations personnelles étaient d'importance essentielle dans
6 les travaux que nous avions à effectuer.
7 Donc de façon générale, les organes chargés des statistiques ne s'occupent
8 pas des noms propres. Ils ne vérifient pas leur exactitude. Ils ne sont pas
9 obligés de traiter les noms propres, parce que ceci fait partie des
10 informations confidentielles. C'est un élément qui est éliminé des données
11 statistiques lorsqu'ils sont divulgués au public. Donc c'est la raison pour
12 laquelle nous avons dû nous occuper de ce problème ici, et c'est bien ce
13 que nous avons fait. Nous avons appliqué plusieurs procédures différentes
14 pour apporter des corrections à ces fautes d'orthographe, à ces coquilles -
15 et elles étaient très nombreuses - suite au scanning optique qui avait été
16 fait, puisque même les meilleurs programmes informatiques sont susceptibles
17 de donner lieu à ce type d'erreurs.
18 Pour commencer, nous avons développé un programme logiciel qui recherchait
19 automatiquement toutes les erreurs au niveau des caractères et des
20 combinaisons de lettres qui n'existent pas en serbo-croate, en B/C/S. Donc
21 nous avons identifié quelles étaient les combinaisons de lettres
22 impossibles, c'est un sujet qui avait été étudié en profondeur par les
23 spécialistes de la langue, puis ces spécialistes ont avancé des
24 propositions quant à la manière dont on pouvait corriger ces erreurs. Une
25 fois ce travail fait, nous avons corrigé les noms propres dans un premier
26 temps. Dans un deuxième temps, nous avons fait des tableaux où les noms
27 corrigés figuraient. Donc il s'agissait à la fois des prénoms et des noms
28 qui ont été réétudiés par les spécialistes de la langue chargés d'apporter
Page 15419
1 des corrections chaque fois que cela était nécessaire, et en faisant ce
2 travail, ils s'appuyaient sur les traditions prévalant en Bosnie-
3 Herzégovine. Une fois les noms corrigés, ils ont été de nouveau saisis dans
4 les bases de données.
5 Finalement, nous nous sommes dit qu'il fallait perfectionner le travail que
6 nous avions déjà effectué. Alors nous avons appliqué ce que nous appelons
7 la méthode du foyer. Nous avons vérifié la manière dont les noms personnels
8 se distribuaient par foyer, et nous avons établi une comparaison entre les
9 différentes façons d'orthographier le nom des personnes issues d'un même
10 foyer. Et chaque fois que nous nous apercevions, nous apportions des
11 corrections nécessaires.
12 Q. Bien. D'accord.
13 R. Mais nous avons également gardé les noms originels de pair avec les
14 noms corrigés, de manière à ce qu'il ait été possible d'établir une
15 comparaison des deux à n'importe quel moment.
16 Q. Merci de cette explication. Alors, c'est la manière dont vous avez
17 procédé pour corriger les fautes d'orthographe et pour corriger les noms
18 propres.
19 Veuillez expliquer aux Juges de la Chambre pourquoi il était
20 tellement important de procéder à ces corrections ?
21 R. L'idée principale de mon unité c'était de retrouver des individus dans
22 ces bases de données, à commencer par les informations issues du
23 recensement de 1991. Donc pour nous, le recensement représentait un point
24 de départ. Et à partir de là, il s'agissait de retrouver les individus
25 répertoriés dans le recensement et de les retrouver également dans d'autres
26 sources de données. Si vous voulez, c'est un peu un travail d'instruction
27 ou d'enquête. Nous voulions savoir ce qui était arrivé à ces individus.
28 Nous voulions savoir qui est mort, qui a survécu. Si quelqu'un est mort, de
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1 quelle façon cette personne a trouvé la mort.
2 Et si nous retrouvions une seule et même personne dans un grand nombre de
3 sources, il s'agissait de les comparer. Par exemple, dans une source, cette
4 personne pouvait être recensée comme morte, et dans une autre source, elle
5 était portée disparue, ou alors elle pouvait surmonter dans une troisième
6 source qui répertoriait les survivants à la guerre. Donc c'est pourquoi il
7 était essentiel, quand on essayait de retrouver des individus, de se servir
8 des éléments d'information tels que le nom, le prénom, la date de
9 naissance, qui apparaissent dans les différentes sources d'information.
10 De façon générale, dans les sociétés occidentales, dans des pays
11 développés, ceci n'aurait pas été nécessaire, puisque chaque personne
12 possède un numéro d'identification personnelle, un numéro de sécurité
13 sociale. Et c'est pourquoi il est possible de retrouver chaque personne,
14 parce que ce même numéro est répertorié dans un grand nombre de registres.
15 Mais ce n'est pas la même chose pour les numéros d'identification
16 personnelle qui ont été utilisés en ex-Yougoslavie. Même si ces numéros
17 avaient commencé à être utilisés au début des années 1980, ils n'ont été
18 utilisés par la suite que dans le recensement de 1998 [comme interprété] et
19 dans quelques autres sources. Mais par exemple, les numéros
20 d'identification personnelle utilisés dans le registre de personnes portées
21 disparues sont erronés, ou ne figurent pas du tout dans ce type de
22 registres.
23 Donc une autre façon de procéder c'était de poursuivre des recherches
24 basées sur des noms propres. Il s'agissait donc de procéder au "couplage"
25 de noms propres dans les différentes sources d'information.
26 Q. C'est pourquoi il était nécessaire de savoir quelle était
27 l'orthographe correcte du nom propre ?
28 R. Le couplage concerne les individus. Il s'agissait de retrouver la
Page 15421
1 même personne dans de différentes sources données en se servant des données
2 suivantes : nom, prénom, date de naissance, et cetera. C'était là notre
3 méthode.
4 Q. Merci beaucoup.
5 Bien entendu, le recensement fournissait beaucoup d'informations concernant
6 un individu donné, y compris son lieu de résidence. Une autre information
7 fournie était l'appartenance ethnique; on pouvait donc savoir si on avait
8 affaire à un Musulman, un Croate ou autre.
9 Tout d'abord - donnez-nous une réponse aussi brève que possible, s'il vous
10 plaît - le recensement permettait-il à la personne interrogée de choisir
11 entre un assez grand nombre de réponses possibles lorsqu'on lui posait une
12 question, la question de son appartenance ethnique, je veux dire ?
13 R. C'était une question ouverte dans le questionnaire, donc chacun pouvait
14 répondre selon son sentiment quant à son appartenance ethnique. Le résultat
15 final a été que nous avons vu apparaître 98 catégories différentes
16 correspondant, et pour trois d'entre elles, aux groupes ethniques
17 principaux vivant en Bosnie-Herzégovine, à savoir les Musulmans, les Serbes
18 et les Croates, alors que les catégories restantes correspondaient soit à
19 des catégories mixtes, donc Serbo-croates, par exemple, ou bien à un
20 certain nombre d'individus qui se considéraient comme étant Yougoslaves. Et
21 il y avait également d'autres nationalités : des Hongrois, des Polonais,
22 des Allemands, des Français même se sont identifiés comme tels.
23 C'était une question ouverte, comme je l'ai dit.
24 Q. Je vous remercie. Donc dans l'ensemble des rapports que vous avez
25 rédigés, la notion de l'appartenance ethnique d'une personne donnée
26 reposait sur ce que cette personne avait pu déclarer dans le cadre du
27 recensement, n'est-ce pas ?
28 R. Oui.
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1 Q. Cette question de l'appartenance ethnique, est-ce que lorsque vous
2 l'abordiez dans chacun des trois rapports qui nous intéressent, vous le
3 faisiez toujours en vous basant sur les renseignements du recensement
4 uniquement, ou bien avez-vous utilisé d'autres sources ou d'autres
5 statistiques ?
6 R. Bien, c'était une préoccupation majeure que cette question
7 d'appartenance ethnique, parce que d'un point de vue analytique, ce n'était
8 peut-être pas prépondérant, mais nous souhaitions savoir comment la
9 population avait évolué du point de vue de l'appartenance ethnique et
10 quelle était la structure ethnique que l'on pouvait retrouver parmi les
11 victimes. Il s'agissait de questions majeures pour nous.
12 Bien entendu, cette question d'appartenance ethnique ne devrait pas
13 être abordée en se fondant sur plusieurs sources, parce que la perception
14 de l'appartenance ethnique a tendance à changer. La situation économique,
15 sociale et même politique peut avoir une influence considérable sur la
16 perception des gens quant à leur appartenance ethnique. Donc il convient
17 d'éliminer tout biais analytique par rapport à cette question de
18 l'appartenance ethnique. Dans tous les rapports que nous avons rédigés,
19 nous en avons utilisé qu'une seule et même définition de l'appartenance
20 ethnique, qui était celle découlant du recensement de 1991.
21 De plus, nous avons évidemment décidé de ne pas travailler avec 98
22 catégories, telles qu'elles pouvaient ressortir du recensement parce que
23 c'était beaucoup trop. Nous avons donc décidé de regrouper les
24 appartenances ethniques autres que celles des trois groupes principaux.
25 Nous avons donc mis à part les Musulmans, les Croates et les Serbes comme
26 les représentants des groupes ethniques principaux, du point de vue de
27 l'objectif qui était le nôtre. Quant aux catégories restantes, quelles
28 qu'elles soient, qu'il s'agisse de Yougoslaves ou d'autres appartenances
Page 15423
1 nationales, ont été regroupées sous une seule et même catégorie, celle des
2 autres.
3 Donc il en résultait quatre groupes ethniques majoritaires dans notre
4 analyse. Et grâce au fait que les sources d'information associées, qu'il
5 s'agisse des registres de personnes portées disparues, des registres de
6 survivants, des registres des personnes décédées pendant la guerre, ont pu
7 être recoupées avec les données du recensement et présentées dans le cadre
8 de notre analyse au regard des données relatives à l'appartenance ethnique
9 de 1991.
10 Comme je l'ai dit, il s'agit d'une question assez complexe, puisqu'il
11 convient de transférer certains éléments d'information du recensement de
12 1991 en procédant au recoupement, et grâce à ce recoupement, le champ
13 d'information concernant l'appartenance ethnique est inclus dans les
14 sources d'information associées.
15 Q. Merci. Mais dans des termes très simples, aussi simples que possible,
16 si l'appartenance ethnique d'une personne donnée pouvait varier selon la
17 source examinée, cela n'apparaissait pas dans votre analyse, parce que --
18 en fait, le fait que quelqu'un se soit prononcé comme étant Serbe ou
19 Musulman apparaissait peut-être dans le recensement de 1991. Et c'est la
20 seule source d'information que vous avez utilisée, n'est-ce pas ?
21 R. Oui, vous avez compris. C'est bien ce que j'ai dit. Nous n'avons jamais
22 utilisé d'autres sources d'information concernant l'appartenance ethnique
23 de la population que le recensement de 1991.
24 Q. Très bien. Je voudrais maintenant passer brièvement aux listes
25 électorales de l'OSCE. Je ne veux pas m'aventurer en détail sur la façon
26 dont vous avez traité ces informations, mais je voudrais simplement que
27 vous expliquiez très brièvement aux Juges de la Chambre ce dont il s'agit.
28 Apparemment il s'agit des listes électorales en Bosnie.
Page 15424
1 Mais quand ces personnes se sont-elles inscrites ?
2 R. Les listes électorales de 1997 ont été dressées par l'OSCE en vue des
3 élections municipales de 1997, conjointement avec les autorités locales. Et
4 également en vue des élections de 1998 pour lesquelles les listes
5 électorales ont été constituées principalement sur la base des listes
6 électorales de 199; cependant, il s'agissait, en 1998, d'élections
7 législatives, alors qu'en 1997, il s'agissait d'élections municipales.
8 L'enregistrement sur les listes électorales, si je me rappelle bien, a eu
9 lieu entre mai et juin de 1997. Et pour l'élection de 1998, c'était un an
10 plus tard. Donc les listes électorales représentent une source
11 d'information considérable répertoriant tous les votants en droit de voter
12 aux élections de 1997 et 1998. La notion d'être "en droit de voter"
13 correspond, bien entendu, d'une part, à l'âge. Il faut être majeur, avoir
14 18 ans au moins, afin de pouvoir voter. Mais un autre critère important
15 était présent : afin de pouvoir voter à ces scrutins particuliers, donc les
16 premières élections démocratiques qui ont pris place à cette époque-là, il
17 était nécessaire d'avoir été enregistré comme citoyen de Bosnie-Herzégovine
18 lors du recensement de 1991.
19 Q. Merci. Et cette expression que vous utilisez, le fait d'être
20 "éligible," d'être "en droit" de voter -- c'est bien cette expression-là
21 que vous utilisez, être "éligible," n'est-ce pas, et non pas "lisible,"
22 comme on a pu le voir au compte rendu d'audience.
23 R. En effet.
24 Q. Et avez-vous comparé les listes de 1997 et 1998 avant de voir s'il y
25 avait un certain recouvrement ?
26 R. Il y avait un large recouvrement. En fait, la liste de 1998 ne
27 comprenait qu'environ 150 000 nouveaux votants, et tous les autres votants
28 avaient déjà été enregistrés avant l'élection de 1997.
Page 15425
1 Q. Donc pour l'essentiel les données issues de cette source d'information
2 statistique correspondaient aux listes électorales de 1997, aux votants qui
3 étaient enregistrés ?
4 R. Oui. En fait, nous avons fusionné les deux listes électorales. Nous
5 avons procédé de la façon suivante : nous avons d'abord pris les votants
6 qui s'étaient enregistrés pour la première fois dans les listes électorales
7 de 1997, c'était le noyau de la base de données que nous avons constituée;
8 ensuite, nous avons ajouté les nouveaux enregistrements de 1998. Donc pour
9 l'essentiel, il s'agissait des votants inscrits en 1997. Pas exclusivement,
10 mais majoritairement. Il s'agissait de ces votants-là, puisque la plupart
11 des électeurs enregistrés dans ces listes électorales l'avaient déjà été en
12 1997.
13 Q. Je vais reformuler ma question.
14 Dans le cadre du rapport Milosevic et du rapport supplémentaire que vous
15 avez préparé pour l'espèce, vous avez comparé le recensement de 1991 d'une
16 part, et les listes électorales d'autre part, afin de voir s'il n'y avait
17 pas eu de mouvement de population du point de vue des différents groupes
18 ethniques. Le fait qu'il y ait eu un large recouvrement signifie que dans
19 l'intervalle de temps entre 1991 et 1997, 1998, qu'en fait, vous avez eu
20 deux instantanés de la situation. En 1991 d'une part, et entre 1997 et 1998
21 d'autre part.
22 Vous comprenez ce que je vous demande ?
23 R. Oui. En fait, dans le rapport Milosevic et pour le rapport
24 supplémentaire que j'ai préparé pour la présente affaire, j'ai eu à
25 examiner la situation en 1991, telle qu'elle ressort du recensement, et
26 celle en 1997, telle qu'elle ressort des listes électorales fusionnées de
27 1997 et 1998.
28 Q. Merci. Je voudrais maintenant que nous passions aux conclusions
Page 15426
1 principales qui ont été les vôtres dans le rapport supplémentaire pour
2 l'affaire Stanisic et Zupljanin.
3 M. DI FAZIO : [interprétation] Pouvons-nous avoir le document 10397 de la
4 liste 65 ter à l'écran, s'il vous plaît.
5 Pouvons-nous voir les chiffres qui apparaissent en haut du tableau numéro
6 1, s'il vous plaît.
7 Q. Je voudrais que vous nous expliquiez -- ou plutôt, je vais reprendre.
8 Nous avons ici le résumé des conclusions principales que vous avez préparé,
9 conclusions auxquelles vous êtes parvenue dans le cadre du rapport
10 supplémentaire préparé pour l'affaire Stanisic et Zupljanin, n'est-ce pas ?
11 R. Oui.
12 Q. Très bien. Donc nous avons le tableau numéro 1 sous les yeux.
13 Alors la première colonne de ce tableau nous donne les chiffres
14 correspondant à la zone couverte par l'acte d'accusation en l'espèce et
15 correspondant au recensement de 1991, n'est-ce pas ?
16 R. Oui, en effet, dans la première colonne, nous avons des chiffres qui
17 sont issus des données du recensement et qui concernent la zone couverte
18 par l'acte d'accusation en l'espèce. Je veux dire qu'il s'agit des 18
19 municipalités concernées. Et il convient de noter qu'il s'agit ici du
20 chiffre total de la population par groupes ethniques, mais nous n'avons ici
21 que les individus qui étaient en droit de voter dans le cadre des élections
22 de 1997 et 1998. Il s'agit non pas d'un échantillon, mais d'un sous-
23 ensemble de la population enregistré dans le recensement, sous-ensemble
24 correspondant aux individus nés après 1980. Nous avons donc pris ce sous-
25 ensemble comme point de départ afin d'être en mesure de procéder à un
26 recoupement avec les listes électorales de 1997 et 1998, et en nous fondant
27 sur le regroupement auquel nous avons procédé, nous avons ensuite procédé à
28 des comparaisons en termes d'appartenance ethnique et de lieu de résidence,
Page 15427
1 comparaison de leur situation entre 1991 et 1997, 1998.
2 Q. Donc ces 817 898 personnes que nous voyons ici sont, d'une part,
3 mentionnées dans le recensement de 1998 [comme interprété], et d'autre
4 part, enregistrées sur les listes électorales de 1997 et 1998, n'est-ce pas
5 ?
6 R. Oui.
7 Q. Et toutes ces personnes sont également pertinentes par rapport à la
8 zone couverte par l'acte d'accusation en l'espèce, n'est-ce pas ?
9 R. Oui.
10 Q. Nous avons ensuite là une colonne qui s'intitule nombre minimum. De
11 quoi s'agit-il ?
12 R. Il s'agit du nombre minimum de déplacés internes et de réfugiés. C'est
13 repris dans l'intitulé du tableau. Nous avons obtenu ces chiffres en nous
14 fondant sur les sources dont nous disposions et la méthodologie que nous
15 avons retenue.
16 Q. Et ces totaux, ces nombres minimums, sont des nombres minimums
17 d'individus, n'est-ce pas ?
18 R. Oui. Il s'agit des nombres minimums d'individus que nous avons réussi à
19 identifier et pour lesquels nous avons réussi à déterminer qu'ils avaient
20 changé de lieu de résidence entre 1991 et 1997 et 1998, donc entre 1991, au
21 début de la guerre, et 1997, 1998.
22 Q. Donc en l'espèce, nous avons au moins 40 095 [comme interprété] Serbes
23 qui étaient des personnes déplacées, n'est-ce
24 pas ?
25 R. Oui. C'est le terme que nous avons utilisé dans nos rapports pour
26 qualifier ces individus. Peut-être convient-il de préciser que le terme de
27 "personnes déplacées," d'un point de vue statistiques, a la signification
28 suivante : cela revient à dire que la personne considérée a un lieu de
Page 15428
1 résidence différent en 1997/1998 par rapport à son lieu de résidence en
2 1991.
3 Q. Très bien. Et pour les Musulmans, nous avons 119 410 [comme interprété]
4 personnes, n'est-ce pas ?
5 R. Oui, c'est 119 000 personnes à peu près et c'est le chiffre le plus
6 important, tous groupes ethniques confondus.
7 Q. Nous pouvons voir quels sont les chiffres correspondants par groupes
8 ethniques, pour les Croates, pour les Musulmans, pour les Serbes. Nous
9 voyons, comme vous l'avez dit, que le chiffre le plus important concerne
10 les Musulmans.
11 Ensuite, la colonne suivante s'intitule total estimé. Alors, s'agit-
12 il d'une extrapolation à laquelle la section de démographie du bureau du
13 Procureur serait parvenue ?
14 R. Oui, il s'agit d'une extrapolation à partir des chiffres
15 minimaux, extrapolation à laquelle on procède en se basant sur les données
16 personnelles de toutes les personnes enregistrées comme déplacées internes
17 ou réfugiés. Donc cela résulte de notre procédure statistique
18 d'extrapolation.
19 Q. Mais c'est en votre qualité de démographe que vous avez procédé à
20 cette expertise et déterminé que ces chiffres estimés devraient être
21 supérieurs aux chiffres minimaux.
22 R. Oui, parce que manifestement, pour différentes raisons, les chiffres
23 minimaux nous donnent une vue incomplète de la situation, parce que toutes
24 les personnes en droit de voter n'ont pas été enregistrées sur les
25 élections ni n'ont participé aux scrutins. Il y a d'autres raisons
26 évidemment, parce que le taux de couplage auquel nous sommes parvenus était
27 inférieur à 100 % -- peut-être était-il approximativement de 80 %, ce qui
28 signifie que les listes électorales n'ont pu être couplées qu'à 80 % avec
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1 les données du recensement. Il y a eu, par exemple, 20 % des votants qui
2 n'ont pas pu être couplés pour lesquels nous n'avons pas pu retrouver
3 d'information dans les données du recensement, c'est-à-dire nous n'avons
4 pas pu retrouver leur lieu de résidence, par exemple, tel qu'il était
5 enregistré en 1991. Nous avons là certaines des principales raisons pour
6 lesquelles les données que nous avons obtenues étaient incomplètes.
7 Afin de compenser le caractère incomplet de ces résultats, il est
8 nécessaire d'utiliser des techniques d'estimation statistique qui
9 permettent de parvenir à des chiffres plus complets. Il s'agit d'une
10 technique tout à fait habituelle en statistiques et qui consiste à procéder
11 à une extrapolation proportionnelle sur la base d'un échantillon de
12 déplacés internes parmi la population des personnes enregistrées sur les
13 listes électorales en l'étendant à l'ensemble de la population du
14 recensement de 1991. Il s'agit d'une procédure assez simple, et le résultat
15 qui en découle est un nombre de déplacés internes qui reflètent de façon
16 plus complète la population concernée des déplacés internes et des
17 réfugiés.
18 Dans le tableau numéro 1, nous avons, par exemple, un nombre minimum
19 de quelque 41 000 pour le groupe des Serbes, et lorsque l'on passe à la
20 colonne des déplacés internes et réfugiés estimés, ce chiffre passe à 70
21 000. Nous avons une situation similaire dans les autres groupes ethniques;
22 par exemple, pour les Musulmans, nous avons d'une part un nombre minimal de
23 119 000 personnes approximativement, alors que le nombre estimé grimpe,
24 quant à lui, à quelque 212 000 personnes.
25 Donc les chiffres estimés sont fournis également avec un intervalle de
26 confiance qui est fourni dans le même tableau, dans les deux colonnes
27 suivantes.
28 Q. Juste un instant. Avant que nous passions à l'intervalle de confiance,
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1 en bref, est-ce que vous seriez d'accord pour dire que les chiffres
2 minimaux concernent des chiffres réels qui découlaient de la comparaison à
3 laquelle vous avez procédé entre les données du recensement de 1991 et les
4 listes électorales de 1997/1998, et qu'ensuite vous avez procédé à une
5 extrapolation à partir de ces premiers chiffres pour parvenir aux chiffres
6 estimés, n'est-ce pas ?
7 R. Oui, dans les grandes lignes, je dirais que c'est cela. Le chiffre
8 minimum résulte d'un décompte empirique auquel nous avons procédé. Nous
9 avons compté un certain nombre d'enregistrements que nous avons réussi à
10 identifier, alors que les chiffres estimés proviennent d'un décompte dans
11 le cadre d'une procédure d'échantillonnage statistique, suite à laquelle on
12 procède à une extrapolation à la population dans son ensemble.
13 En statistiques, il s'agit d'une façon de procéder tout à fait usuelle que
14 de collecter des échantillons et de calculer un certain nombre de données
15 statistiques pour ces échantillons pour ensuite extrapoler ces données à
16 l'ensemble de la population. C'est ce que nous avons fait. Et le résultat
17 c'est ce nombre qui apparaît dans la troisième colonne, modéré par un
18 intervalle de confiance, qui correspond à une incertitude relative par
19 rapport au chiffre estimé auquel nous sommes parvenus.
20 Q. Merci. Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s'agit lorsque vous parlez
21 d'intervalle de confiance ?
22 R. Comme j'ai déjà dit, les intervalles de confiance ont pour but en
23 statistiques d'exprimer l'incertitude inhérente aux estimations
24 ponctuelles. Une estimation ponctuelle n'est qu'un chiffre ponctuel. En
25 fait, nous parvenons à ces estimations en nous fondant sur un échantillon
26 donné, mais si davantage d'échantillons avaient pu être collectés, par
27 exemple, dix, 100 ou 1 000 échantillons, nous aurions obtenu à chaque fois
28 des résultats et des chiffres estimés différents. Nous aurions obtenu toute
Page 15432
1 une distribution de résultats correspondants, mais notre échantillon, celui
2 que nous avons utilisé, tomberait en tout état de cause avec un degré de
3 certitude raisonnable à l'intérieur d'un certain intervalle. Donc avec une
4 certitude de 95 %, les 5 % restants correspondant à la marge d'erreur,
5 notre estimation tombe dans l'intervalle qui correspondrait aux résultats
6 issus d'une analyse se basant sur un grand nombre d'échantillons.
7 Q. Donc entre les chiffres correspondants ?
8 R. Oui. Il est important de souligner que nous avons ici une marge
9 d'erreur faible, c'est le cas des statistiques que nous avons ici. Etant
10 donné la taille de notre échantillon, à savoir l'échantillon résultant des
11 listes électorales, il convient de souligner qu'il s'agit d'un échantillon
12 d'une taille considérable. Souvent les statisticiens travaillent avec des
13 échantillons de 2 000 ou 3 000 personnes. Nous parlons ici de 2,7 millions
14 d'individus qui ont été enregistrés sur les listes électorales. Il s'agit
15 d'un échantillon considérable par rapport aux 3,2 millions de personnes en
16 droit de voter. Nous avons donc travaillé avec un échantillon considérable.
17 Et il n'est absolument pas surprenant que la marge d'erreur soit
18 particulièrement faible.
19 Q. Merci. Je pense que cela est suffisant comme explication.
20 Je voudrais que nous passions au tableau numéro 2, avec une représentation
21 visuelle des chiffres qui figurent dans la table du haut.
22 R. Dans le tableau du haut figurent les chiffres pour les personnes
23 déplacées et les réfugiés. Ça, c'est le premier tableau. Mais dans le
24 deuxième tableau, il est question d'autre chose, de la structure ethnique
25 de la population telle qu'elle existait en 1991, et puis nous avons les
26 modifications survenues en 1997.
27 Q. Oui, excusez-moi. Je vous demande pardon, c'est moi qui me suis trompé.
28 Alors, ici nous voyons que cela se rapporte à la région couverte par l'acte
Page 15433
1 d'accusation dans l'affaire Stanisic/Zupljanin; c'est ce qui est représenté
2 dans ce tableau. Et il est clair que la population serbe a augmenté de
3 façon significative alors que le nombre de Musulmans a été réduit.
4 R. Oui. De façon générale, cela est vrai. Mais j'aimerais souligner une
5 observation. La population de 1997 ne représente qu'un échantillon, donc il
6 ne faut pas comprendre ces chiffres au sens absolu. Ceci ne représente pas
7 véritablement la population en 1997. Il ne s'agit ici que des chiffres
8 minimaux. Mais si vous regardez les pourcentages, parce que la composition
9 ethnique est exprimée en pourcentages dans la deuxième partie du tableau,
10 il est possible de comparer les pourcentages en 1991 et en 1997. C'est ce
11 que je vous suggère faire plutôt que de comparer les chiffres absolus.
12 Alors, laissez de côté la population qui était censée compter 818 000
13 personnes en 1991, alors qu'en 1997 il est question de 376 000 personnes,
14 plus ou moins. Il s'agit d'une grande baisse du nombre absolu. Donc laissez
15 ça de côté, parce que cela ne vous fournira qu'une image erronée.
16 Il faut se pencher plutôt - parce qu'il ne s'agit là que d'un échantillon -
17 il faut se pencher plutôt sur les pourcentages. Si vous regardez les
18 pourcentages, il est possible de procéder à une comparaison directe entre
19 ces deux années, 1991 et 1997. Alors, regardons la population musulmane
20 pour l'année 1991. Nous voyons qu'ils constituaient 35,2 % de la population
21 en 1991, dans la région couverte par l'acte d'accusation dans l'affaire
22 Stanisic/Zupljanin; toutefois, en 1997, il ne restait plus que 18,4 % de
23 Musulmans dans la zone concernée.
24 Q. Et vice versa, pour les Serbes --
25 R. [aucune interprétation]
26 Q. -- en 1991, ils étaient 44,7 %. En 1997, ils étaient 72,1 %.
27 R. Oui. Et c'est pourquoi il est possible de procéder à un recoupage
28 direct des différents pourcentages. Nous voyons que la population serbe a
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1 augmenté de façon significative, alors que la population non-serbe a connu
2 une baisse très importante. Cela vaut pour les Musulmans, mais aussi pour
3 les Croates et les représentants d'autres groupes ethniques, tandis que la
4 population serbe a connu une augmentation dans la zone concernée en 1997
5 par rapport à l'année 1991.
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, permettez-moi de
7 poser une question.
8 Madame Tabeau, je souhaite préciser un point. Les chiffres qui
9 figurent dans la première partie du tableau 2, les ai-je bien
10 Compris; nous avons d'abord le nombre total d'habitants pour l'année 1991 ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui --
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais nous n'avons pas le nombre total
13 d'habitants pour l'année 1997 ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait. Nous n'avons pour l'année 1997
15 que le nombre d'électeurs qui figurent sur la liste électorale.
16 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Très bien.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Donc il ne s'agit que d'un échantillon.
18 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Donc nous ignorons si les chiffres
19 concernent - puisque nous n'avons pas les chiffres pour la population
20 totale en 1991 et 1997 - alors nous ne savons pas ce qui est arrivé à ces
21 personnes qui ne figurent dans l'échantillon des bureaux de vote et nous
22 ignorons quelle était leur composition ethnique ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, je ne suis pas d'accord avec cette
24 constatation. En se basant sur l'échantillon fourni par les listes
25 électorales, nous savons ce qui est arrivé à la population toute entière.
26 Nous ne sommes pas capables de citer leur nombre à un chiffre absolu, parce
27 que nous ne savons pas quel était exactement le nombre d'habitants à un
28 chiffre absolu pour les années 1997 et 1998. Et nous ne le savons pas même
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1 aujourd'hui.
2 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Non, je suis d'accord avec vous.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
4 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous ne connaissez pas le nombre
5 total d'habitants --
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] -- et vous êtes obligée de vous
8 débrouiller avec l'échantillon dont vous disposez.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.
10 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Mais est-ce que vous ne vous êtes pas
11 dit que cet échantillon, sur le plan de sa composition ethnique, pouvait
12 subir les conséquences du fait qu'un certain nombre de personnes a bien
13 voulu se faire inscrire sur la liste électorale et que d'autres ne l'ont
14 pas voulu ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Le taux de participation au scrutin de 1997
16 était extrêmement élevé. Il dépassait le chiffre de 80 % --
17 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Supérieur à 80 % de quoi ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je parle du taux de participation au
19 scrutin. D'après les données de l'OSCE. Donc cela veut dire qu'un très
20 grand nombre de personnes se sont fait inscrire sur les listes électorales.
21 Donc cet échantillon est hautement représentatif de la population tout
22 entière, du point de vue statistique -- oui ?
23 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Mais 80 % de qui ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] 80 % de personnes inscrites sur la liste
25 électorale ont participé au scrutin.
26 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bien.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Donc ceci représente un échantillon hautement
28 représentatif. Lorsque nous nous servons de l'expression échantillon pour
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1 désigner la liste électorale, il s'agit tout simplement de ne pas porter
2 préjudice aux personnes qui ne figurent pas sur ces listes. Mais sur le
3 plan statistique, ces personnes sont insignifiantes, puisque pour 80 %
4 d'habitants nous avons les informations très concrètes. Nous savons à quel
5 endroit ils se sont inscrits sur la liste, nous savons où se trouvait leur
6 domicile, quel était leur lieu de résidence.
7 Quant à l'année 1991, nous avons le recensement de la population tout
8 entière. Et pour les années 1997 et 1998, nous avons un échantillon très
9 important et représentatif de la population dans sa totalité.
10 En fait, il serait très difficile de dire quoi que ce soit sur les
11 électeurs qui ne se sont fait inscrire sur la liste électorale, parce qu'il
12 n'y a pas de traces les concernant, à part ce qui figure dans le
13 recensement. Nous avons ces informations, ces renseignements recueillis à
14 partir du recensement, mais nous ne savons pas de quelle façon les
15 personnes qui y figurent se sont déplacées. Est-ce qu'elles font partie des
16 personnes déplacées à l'intérieur du pays ou non, en 1997/1998. Donc de ce
17 point de vue-là, il n'y a rien à faire au sujet de ces personnes-là.
18 Mais je pense que notre estimation de la composition ethnique est
19 très bonne et qu'elle n'est pas entachée d'un biais du point de vue
20 statistique.
21 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
22 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je pense que le moment est venu de faire
23 une pause.
24 Nous reprendrons nos travaux dans 20 minutes.
25 [Le témoin quitte la barre]
26 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
27 --- L'audience est reprise à 10 heures 57.
28 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Avant de reprendre nos travaux avec le
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1 témoin, il reste un point à élucider depuis hier.
2 L'Accusation a demandé, ou a annoncé qu'elle demandera des séances
3 supplémentaires demain afin d'en terminer avec la déposition d'un des
4 témoins prévus pour cette semaine, nous avons indiqué que nous allions
5 demander à la Défense quelle serait leur réaction.
6 Pour commencer, pour ce qui est de la fin de la semaine, l'Accusation
7 maintient-elle sa position qu'il est nécessaire d'organiser des séances
8 supplémentaires ? Je vous rappelle qu'il n'est possible d'organiser qu'une
9 seule séance supplémentaire, demain dans l'après-midi.
10 M. HANNIS : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
11 Juges, nous pensons qu'il serait indispensable d'organiser cette séance
12 complémentaire pour en finir avec la déposition du témoin suivant, d'autant
13 plus que nous avons deux autres témoins qui sont prévus pour la semaine.
14 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Pardonnez-moi. Aujourd'hui nous
15 sommes mercredi. Un témoin vient tout juste de commencer sa déposition.
16 Vous dites qu'il y a un autre témoin, puis deux autres témoins à suivre, et
17 tout cela au cours de cette semaine ?
18 M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, il s'agit du ST-
19 163.
20 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Mais nous n'allons pas entendre les
21 Témoins 227 et 251.
22 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
23 M. HANNIS : [interprétation] Ce qui nous préoccupe avant tout c'est d'en
24 terminer avec la déposition du Témoin ST-163 cette semaine. Pour ce qui est
25 des deux autres témoins qui avaient été prévus pour cette semaine, il
26 s'agit des témoins relatifs aux faits incriminés qui doivent parler des
27 faits déjà jugés, donc leur interrogatoire devrait être relativement court.
28 Et si nous avons du temps vendredi pour entendre l'un ou les deux, nous
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1 espérons pouvoir le faire. Sinon, ils peuvent être reportés à la semaine
2 prochaine.
3 Mais ce qui nous intéresse avant tout c'est d'avoir cette séance
4 extraordinaire supplémentaire pour pouvoir entendre le Témoin ST-163.
5 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Et qu'en est-il de la Défense, y avez-
6 vous pensé au cours de la nuit ?
7 M. CVIJETIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'allons pas
8 poser de difficultés au sujet de cette séance supplémentaire.
9 M. LE JUGE HALL : [aucune interprétation]
10 M. KRGOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, cette séance
11 supplémentaire ne nous pose pas de problème. Mais lorsque j'ai discuté avec
12 le témoin, je me suis rendu compte que le Témoin 163 devait repartir
13 vendredi dans la matinée. Il s'agit de prendre part à une fête familiale
14 qui est prévue pour samedi.
15 Alors cette séance unique supplémentaire de plus, je ne pense pas qu'elle
16 nous sera très utile s'il est indispensable d'en terminer avec sa
17 déposition demain.
18 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Le fait est que nous ne pouvons
19 organiser qu'une seule séance supplémentaire. Donc si cela ne pose de
20 problème à personne, nous allons nous organiser en conséquence.
21 [Le témoin vient à la barre]
22 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
23 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci. Nous siégerons de
24 14 heures 30 jusqu'à 16 heures.
25 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur Di Fazio, je souhaite poser
26 une autre question liée au sujet à Mme le Témoin.
27 Madame Tabeau, les 80 % que nous avons évoqués tout à l'heure, 80 % des
28 électeurs qui figurent sur les listes électorales. De quelle façon êtes-
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1 vous arrivée à ce pourcentage de 80 % ?
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit d'une estimation avancée par l'OSCE
3 qui suivait les élections, avait ses représentants dans tous les bureaux de
4 vote où les électeurs étaient inscrits sur les listes d'élection, et je
5 pense que les représentants de l'OSCE étaient également en contact avec les
6 représentants des autorités locales.
7 Comme je l'ai déjà expliqué, il n'y avait pas de registre compilant la
8 population générale à l'époque.
9 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Donc il s'agit d'un chiffre estimé,
10 il n'existait pas de registre d'électeurs ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a pas de registre, le seul registre
12 existant est le recensement de la population. Et on savait qu'il fallait
13 satisfaire un certain nombre de conditions, à savoir il fallait être
14 majeur, avoir 18 ans pour participer aux élections.
15 Mais ma théorie sera la suivante : les autorités locales avaient des
16 éléments d'information indispensables concernant la population locale qui
17 vivait dans des municipalités données. Sur la base du recensement, d'une
18 part, et sur la base des registres compilant la population en droit de
19 voter, et quand on pense également aux données qui concernent la population
20 locale, à la base de toutes les données l'OSCE a pu avancer un tel chiffre
21 estimé. Je ne sais pas quelles techniques ils ont appliquées pour y
22 arriver, je ne sais pas quelle méthode ils ont retenue, mais j'imagine
23 qu'il s'agit d'une estimation fiable puisque c'est une estimation de
24 l'OSCE. Je vous ai déjà dit qu'il s'agissait du chiffre de 80 %, c'est le
25 chiffre qui figure dans un rapport de l'OSCE, et dans un autre j'ai vu le
26 taux de participation de 89 %. Donc il s'agissait plutôt de proposer des
27 chiffres minimum et de ne pas surestimer le nombre de participants.
28 Il s'agit de tout au moins 80 % de participants. Et par ailleurs, à en
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1 juger par le volume du registre, il faut dire que
2 2,6 millions de voteurs ont été enregistrés pour l'année 1997.
3 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Donc il s'agit tout au moins de
5 80 % qui ont été inscrits dans les listes électorales.
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
7 M. DI FAZIO : [interprétation]
8 Q. Dans une partie de votre rapport qui concerne directement l'affaire
9 Stanisic/Zupljanin, vous évoquez des statistiques agrégées qui sont basées
10 sur la documentation obtenue de la part des autorités de la Republika
11 Srpska. Vous en fournissez un aperçu dans l'annexe 5. Ai-je raison de
12 l'affirmer ?
13 R. Oui, tout à fait.
14 Q. J'aimerais vous présenter un document, ou plutôt deux. Pourriez-vous
15 nous dire si ce sont là les documents dont vous vous êtes servie et que
16 vous avez obtenus de la part des autorités compétentes de la Republika
17 Srpska.
18 M. DI FAZIO : [interprétation] Peut-on afficher la pièce P425, s'il vous
19 plaît. Merci.
20 Q. Est-ce là le document dont vous vous êtes servie ?
21 M. DI FAZIO : [interprétation] Passons peut-être à la page 1 dans les deux
22 versions linguistiques.
23 Q. Vous venez d'examiner la première et la deuxième page du document,
24 pourriez-vous me dire si c'est bien le document dont vous vous êtes servi
25 pour tenir compte des chiffres fournis par la Republika Srpska ?
26 R. Oui, ceci fait partie de la documentation fournie, c'est une enquête de
27 1993.
28 Q. Merci. Revenons à la page 1, le document, nous le voyons, est du 9
Page 15441
1 [comme interprété] mai 1993. C'est un document élaboré par le service de
2 Sécurité nationale de Banja Luka.
3 Alors si nous nous concentrons sur la municipalité de Prijedor, nous voyons
4 que 42 000 Musulmans ont quitté le territoire de la municipalité, et 2 000
5 Croates. Alors vous vous êtes servie de ces données statistiques et
6 d'autres sources de données relatives à d'autres municipalités pour
7 préparer cette partie de votre rapport.
8 R. Oui. Il était important d'envisager les données dans le contexte et
9 cette documentation couvre la période qui va de 1991 à 1997, donc ces
10 données qui concernent l'année 1993 permettent en partie de combler
11 l'intervalle.
12 Q. Merci.
13 M. DI FAZIO : [interprétation] Peut-on maintenant afficher la pièce P426,
14 s'il vous plaît. Je crois que ce document a été enregistré aux fins
15 d'identification.
16 Q. Veuillez vous pencher, pour commencer, sur la page 1.
17 M. DI FAZIO : [interprétation] Puis j'aimerais que nous passions à la page
18 6 en version anglaise. Pour ce qui est de la version B/C/S, il devrait
19 s'agir…
20 Il devrait s'agir de la page 6. Merci.
21 Q. Ce document qui vient d'être affiché à l'écran. C'est la pièce P426,
22 enregistrée aux fins d'identification. Est-ce bien là le deuxième document
23 dont vous vous êtes servie ?
24 R. Oui, tout à fait.
25 Q. Je signale qu'il s'agit d'un document de février 1995. Encore une fois,
26 c'est un document élaboré par le centre de la Sécurité nationale de Banja
27 Luka. Examinons la situation à Prijedor en 1991. Nous voyons qu'environ 47
28 000 Serbes y résidaient, 49 000 environ de Musulmans, environ 6 000
Page 15442
1 Croates.
2 Et en 1995, 61 000 Serbes, 3 600 Musulmans et le nombre de Croates est
3 également revu à la baisse.
4 J'imagine que ce sont là les chiffres dont vous vous êtes servie pour
5 préparer cette partie de votre rapport.
6 R. Oui, tout à fait.
7 Q. Bien.
8 M. DI FAZIO : [interprétation] J'aimerais demander aux Juges de la Chambre
9 d'admettre au dossier la pièce P426 à part entière comme un document qui
10 accompagne le rapport de Mme le Témoin. La pièce a déjà été admise au
11 dossier, mais elle était enregistrée aux fins d'identification seulement.
12 Maintenant, j'aimerais qu'elle soit admise à part entière.
13 [La Chambre de première instance se concerte]
14 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
15 M. DI FAZIO : [interprétation] Je tiens à remercier mon commis à l'affaire.
16 Je pense que les commentaires des Juges de la Chambre à la page du compte
17 rendu d'audience T4071 étaient les suivants :
18 "Nous enregistrerons le document aux fins d'identification tant que nous
19 n'aurons pas entendu la déposition de l'expert en démographie."
20 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien. Le document est admis au
21 dossier à part entière.
22 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
23 Q. Lorsque vous avez préparé la partie du rapport qui s'appuie sur ces
24 deux documents, je pense qu'il a été admis non pas par vous, mais de façon
25 générale, que les chiffres qui se rapportent à Sanski Most ne devaient pas
26 figurer dans votre analyse. Ai-je raison de l'affirmer ?
27 R. Oui. Je crois que quelqu'un qui a sans doute tapé ou dactylographié les
28 données a omis deux chiffres concernant Sanski Most.
Page 15443
1 Q. Très bien. Et vous avez préparé de nouvelles pages, numéro 23, 24 et
2 65, qui sont identiques à celles de votre rapport, mais qui comprennent
3 maintenant les chiffres exacts pour Sanski Most, pour Banja Luka, Donji
4 Vakuf, et cetera.
5 R. En effet.
6 Q. Merci.
7 M. DI FAZIO : [interprétation] Messieurs les Juges, dans ce cas-là
8 l'Accusation souhaiterait demander le versement du document 10399.1 de la
9 liste 65 ter au titre des pages corrigées correspondantes à ces pages dont
10 je viens de donner le numéro dans le rapport.
11 Ce qui signifie qu'à présent nous pouvons revenir au document 10397
12 de la liste 65 ter, s'il vous plaît.
13 Pouvons-nous avoir ce document affiché à l'écran, s'il vous plaît.
14 Merci. Je voudrais que nous passions à la page 2. Je vous remercie.
15 Q. Madame Tabeau, nous avons ici l'analyse à laquelle vous avez procédé à
16 partir des données extraites des documents P426 et P425, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Je voudrais que nous avancions assez rapidement sur ce tableau. Tout
19 d'abord, la première colonne, chiffre de 1991, est-ce que vous voyez cette
20 colonne ? Je voudrais que vous nous disiez où vous avez obtenu ces
21 chiffres. Dans certains documents ?
22 R. Mais je voudrais commencer par la colonne des municipalités, parce
23 qu'il n'y en a que sept qui sont mentionnées.
24 Q. Oui, absolument. J'aurais dû le citer. Ces chiffres ne concernent pas
25 l'ensemble de la zone couverte par l'acte d'accusation, n'est-ce pas ?
26 R. Oui. Ces sept municipalités présentent un certain recouvrement avec les
27 -- en fait, il n'y avait que sept municipalités qui pouvaient faire l'objet
28 d'une comparaison. Ces sept municipalités qui sont également listées dans
Page 15444
1 l'acte d'accusation en l'espèce. Donc ces sept municipalités étaient la
2 seule intersection entre les sources de la Republika Srpska et celles que
3 nous avons obtenues.
4 Quant à la première colonne : l'année 1991, il s'agit là de chiffres
5 correspondant au panel A des Musulmans qui vivaient dans ces sept
6 municipalités conformément au recensement de 1991.
7 Q. Et dans les autres colonnes, nous trouvons des chiffres qui ont été
8 obtenus auprès des organes du gouvernement, n'est-ce pas ?
9 R. La colonne de 1993, ceux qui ont déménagé…
10 Q. Oui, ceux qui ont déménagé.
11 R. Oui. Dans la dernière colonne nous avons des chiffres qui correspondent
12 à une comparaison par rapport aux résultats que nous avons obtenus pour ces
13 municipalités.
14 Q. Très bien.
15 M. DI FAZIO : [interprétation] Pourrions-nous passer à la page 3, s'il vous
16 plaît.
17 Q. Nous avons ici des histogrammes qui représentent graphiquement les
18 chiffres que nous avons vus précédemment.
19 R. Oui, en effet. Les chiffres correspondant aux années 1991 à 1995 sont
20 représentés dans ces histogrammes. La première série correspond aux
21 Musulmans, la deuxième aux Croates, la troisième aux Serbes. Mais il faut
22 noter que les chiffres de 1993 ne sont pas représentés dans ces
23 histogrammes et ne figurent que dans les tableaux de la page précédente.
24 Or, il s'agit des chiffres importants, en réalité.
25 Q. Oui, je vous remercie pour cette précision.
26 R. Parce que --
27 Q. Donc nous avons ici deux instantanés correspondant aux années 1991 et
28 1995, qui se fondent sur les données dont vous avez disposé, n'est-ce pas ?
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1 R. Oui.
2 Q. Alors, si nous passons à la représentation graphique qui correspond aux
3 Musulmans, donc entre 1991 et 1995, nous voyons que leur nombre a
4 considérablement diminué dans toutes ces municipalités, n'est-ce pas ?
5 R. Oui, tout à fait. Il s'agit d'une diminution radicale du nombre de
6 Musulmans dans toutes ces sept municipalités, conformément aux sources de
7 la Republika Srpska telles qu'elles se présentaient en 1995.
8 Q. Très bien. Pouvons-nous faire défiler la page vers le bas pour voir
9 l'histogramme relatif à la répartition des Serbes dans ces municipalités ?
10 On voit une augmentation de la population plus marquée dans certaines
11 municipalités que d'autres, n'est-ce pas ?
12 R. Oui. C'est le tableau inverse de ce que nous avions juste à l'instant,
13 puisque nous observons une augmentation de la population serbe dans chacune
14 de ces sept municipalités entre 1991 et 1995.
15 Q. Et on peut observer la même chose concernant les Croates, n'est-ce pas,
16 dans l'histogramme du milieu, à une exception près, qui est celle de la
17 municipalité de Kljuc, où apparemment, pour une raison ou une autre, on
18 observe une augmentation du nombre de Croates entre 1991 et 1995. Mais à
19 cette exception près de la municipalité de Kljuc, on observe également dans
20 le cas des Croates une diminution importante de la population musulmane. On
21 a vu une diminution très importante de la population musulmane, alors qu'à
22 l'inverse, pour les Serbes, on a vu une augmentation significative de la
23 population dans ces mêmes sept municipalités, encore une fois en se fondant
24 sur les données dont vous avez disposé, n'est-ce pas ?
25 R. Oui.
26 Q. Merci.
27 M. DI FAZIO : [interprétation] Excusez-moi, mais nous devons revenir en
28 arrière d'une page.
Page 15447
1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Excusez-moi. Juste avant, je voudrais
2 poser une question au témoin.
3 Madame Tabeau, les chiffres qui apparaissent dans la colonne de gauche, le
4 long de l'axe verticale, s'agit-il de pourcentages de la population ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Il s'agit du pourcentage des Musulmans
6 par rapport à la population totale.
7 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
8 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci.
9 Nous pouvons maintenant revenir en arrière d'une page.
10 Q. Voyons les chiffres qui concernent les Musulmans.
11 Voyons encore une fois la municipalité de Prijedor. Donc 42 [comme
12 interprété] personnes ont déménagé en 1993, selon les sources dont nous
13 disposons, en 1993 -- ou plutôt, plus précisément, en l'état des
14 informations disponibles en mai 1993 ?
15 R. En effet. Les 42 000 personnes citées comme ayant déménagé en 1993, en
16 fait, ont déménagé entre 1991 et mai 1993, de Prijedor, selon les
17 informations fournies par la Republika Srpska.
18 Q. Oui, allez-y.
19 R. Je souhaitais simplement faire un commentaire, la population musulmane
20 à Prijedor représentait environ 44 %, plus précisément 43,9 % du total.
21 Nous voyons, en revanche, qu'après le déménagement de 42 000 personnes
22 jusqu'en mai 1993, et au-delà, si nous avançons en 1995, nous voyons que le
23 nombre de personnes encore présentes à Prijedor, en février 1995, se monte
24 à 3 600 --
25 Q. [aucune interprétation]
26 R. -- qui ne représente que 5,4 % de la population de Prijedor, en 1995.
27 Q. Oui.
28 R. Alors --
Page 15448
1 Q. Donc selon ces mêmes sources de la Republika Srpska, la situation ne
2 s'est pas améliorée pour les Musulmans du point de vue de leur lieu de
3 résidence, à Prijedor, en tout cas. Parce qu'en 1993, il y avait encore
4 environ 7 000 Musulmans sur place, ensuite ce chiffre a diminué pour
5 atteindre 3 600, en 1995, n'est-ce pas ?
6 R. 7 000 ? Où se trouvent les 7 000 ?
7 Q. Oui, j'ai fait la soustraction entre 49 000 et 42 000 --
8 R. Oui, tout à fait, c'est exact.
9 Q. Donc les zones surlignées en bleu, les chiffres surlignés en bleu
10 représentent les chiffres relatifs à Sanski Most qui avait été omise, et
11 que vous avez réintroduite récemment, n'est-ce pas ?
12 R. Oui, en effet.
13 Q. Très bien.
14 R. Oui.
15 Q. Bon.
16 R. Et si nous passons à la dernière ligne du tableau, on voit que pour
17 1993, on donne le chiffre de 93 470 pour les Musulmans, qui correspond à
18 peu près à 58 % de la population initiale de la municipalité, ce qui
19 représente environ 55 % de la population des Musulmans enregistrés au
20 recensement de 1991. Donc ce nombre de personnes qui a déménagé est
21 absolument considérable. Et en 1995, les 23 807 personnes encore présentes
22 ne représentent plus que 15 % de la population initialement enregistrée
23 comme musulmane, en 1991. Ce qui signifie que 85 % de cette population, au
24 mois de février 1995 ne vit plus dans la municipalité.
25 Et ceci corrobore très précisément les conclusions de notre rapport et les
26 conclusions auxquelles ils sont parvenus quant à la composition ethnique de
27 cette population.
28 Q. Est-ce que vous trouvez ici une confirmation de la conclusion à
Page 15449
1 laquelle vous êtes parvenue en examinant ces deux instantanés de la
2 population telle qu'elle se présentait en 1991 et 1997; c'est ce que vous
3 nous dites, n'est-ce pas ? En revanche, ici, nous trouvons la même tendance
4 et le même type de situation dans un intervalle de temps beaucoup plus
5 réduit, entre 1991 et 1995 [comme interprété]. Ai-je raison de dire cela ?
6 R. Oui.
7 Q. Et à la fin de cette page -- ou plutôt, au bas de la page, concernant
8 les Serbes, que voyons-nous ?
9 R. Oui. Dans les deux dernières lignes, nous voyons qu'il y avait environ
10 255 000 Serbes en 1995 [comme interprété]. Et en mai 1993, seul un millier
11 environ sont enregistrés comme ayant déménagé. Et en février 1995, nous
12 voyons un chiffre de pratiquement 300 000 personnes qui est supérieur donc
13 à l'effectif de la population initiale tel qu'enregistré en 1991, supérieur
14 d'environ 16 %, 16,5 %.
15 Q. Gardons peut-être devant nous la page 2 du résumé que nous avons déjà
16 abordé. Je souhaiterais que vous la gardiez devant vous.
17 M. DI FAZIO : [interprétation] Pouvons-nous maintenant afficher le document
18 3382 de la liste 65 ter.
19 Q. Je souhaiterais que nous examinions ceci très rapidement, et je vais
20 essayer, s'il n'y a pas d'objection, d'avancer plus rapidement dans mes
21 questions.
22 Vous n'avez pas utilisé ce document, lorsque vous avez rédigé cette partie
23 de votre rapport, n'est-ce pas ?
24 R. En effet.
25 Q. Encore une fois, nous pouvons voir de quoi il s'agit. Ici, ceci émane
26 du centre de la Sûreté d'Etat de Banja Luka, c'est un document de la
27 Republika Srpska.
28 Et à la différence des autres documents, des deux autres documents,
Page 15450
1 celui-ci nous donne une vue correspondant au mois de juin 1994. Alors il y
2 a un rapport avec les dates de mai 1993 et de 1995. Mais ici, nous avons
3 les chiffres pour Kotor Varos, à la date de juin 1994. Et on nous donne le
4 nombre de Serbes, de Croates et de Musulmans qui vivent à Kotor Varos.
5 Est-ce que ces chiffres correspondent, dans l'ensemble à ceux que
6 vous avez sous les yeux par ailleurs ?
7 R. Oui, dans l'ensemble, bien qu'il y ait de légères différences entre la
8 population telles qu'il en est fait état dans ce document et la population
9 telle qu'enregistrée avant que la guerre n'éclate.
10 Mais dans l'ensemble, nous avons une situation qui est similaire. Les
11 données dont il est fait état dans ce document de juin 1994 corroborent de
12 façon tout à fait convaincante les données que j'ai encore sous les yeux,
13 dans le tableau numéro 3 [comme interprété], que nous venons juste
14 d'examiner. Donc le tableau qui se dessine pour 1995 est dans ses grandes
15 lignes très semblable à celui de juin 1994.
16 Q. Très bien. Donc les chiffres que vous avez extraits des documents P426
17 et P425 sont tout à fait en cohérence avec les chiffres que vous avez ici,
18 sous les yeux, dans ce document de 3382 de la liste 65 ter, n'est-ce pas ?
19 R. Oui.
20 Q. [aucune interprétation]
21 M. DI FAZIO : [interprétation] Dans ce cas-là, je voudrais demander le
22 versement de ce document.
23 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Soit.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P1625, Monsieur le
25 Président.
26 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci. Très bien.
27 Q. Nous avons terminé avec ces sujets des déplacés internes, et nous
28 passons aux victimes de la guerre.
Page 15451
1 Vous avez donc rédigé ce rapport spécifiquement pour l'affaire Stanisic et
2 Zupljanin, et en prenant en compte l'acte d'accusation, n'est-ce pas ?
3 R. Oui.
4 Q. J'ai déjà dit plus tôt que dans le cadre de votre déposition, il y a 12
5 bases de données que vous avez utilisées pour rédiger votre rapport, n'est-
6 ce pas ?
7 R. Oui. Elles sont énumérées dans le rapport.
8 Q. En pages 5 et 6, je crois ?
9 R. Oui, en pages 5 et 6, dans la version anglaise du rapport.
10 Q. Très bien. Nous allons y venir. Est-ce que vous vous êtes appuyée à
11 nouveau sur le recensement pour vérifier les données personnelles des
12 individus enregistrés dans ces bases de données sur lesquelles vous vous
13 êtes appuyée pour rédiger ce rapport ?
14 R. Oui, bien entendu. Mais ces 12 bases de données que vous venez
15 d'évoquer représentent, en fait, 12 sources importantes d'information
16 concernant les personnes portées disparues ou décédées pendant la guerre.
17 Donc ce sont les sources correspondantes aux victimes de guerre. Par leur
18 ampleur, elles dépassent le cadre de la zone couverte par l'acte
19 d'accusation en l'espèce. Elles couvrent, en fait, le territoire de la
20 Bosnie-Herzégovine dans son intégralité, et du point de vue temporel,
21 l'ensemble de la période de la guerre.
22 Ceci étant dit, pour ce rapport particulier qui a été rédigé pour
23 l'espèce, je n'ai utilisé qu'une partie du contenu de ces bases de données,
24 la partie qui est pertinente par rapport à l'espace et à la période de
25 temps couverte par l'acte d'accusation. Et j'ai également utilisé, entre
26 autres, le recensement de 1991.
27 Q. Comment avez-vous utilisé le recensement de 1991 et à quoi vous a-t-il
28 servi par rapport aux données figurant dans ces 12 bases de données ?
Page 15452
1 R. Encore une fois, c'était à des fins d'indexation. Nous avons indexé les
2 fichiers de victimes, ou plutôt, nous leur avons adjoint les champs de
3 données personnelles figurant dans le recensement de 1991. De cette façon,
4 nous avons ajouté toute une série de données personnelles qui nous ont
5 permis de confirmer qu'il ne s'agissait pas de personnes fictives, mais qui
6 vivaient bien juste avant que la guerre n'éclate en Bosnie-Herzégovine.
7 Q. Et qu'en était-il de l'appartenance ethnique ? Les informations que
8 vous avez obtenues dans ces 12 bases de données vous ont-elles permis
9 d'obtenir des éléments supplémentaires concernant cette question
10 d'appartenance ethnique, ou avez-vous dû vous référer encore une fois au
11 recensement ?
12 R. L'appartenance ethnique n'est pas un critère retenu dans les fichiers
13 de victimes, donc encore une fois c'est au recensement de 1991 qu'il faut
14 se référer.
15 Q. Je note en passant que j'ai aussi mentionné que votre rapport cadre
16 dans le temps. Il couvre, certes, la période couverte par l'acte
17 d'accusation, donc entre le mois d'avril et le mois de décembre 1992 ?
18 C'était sur cette période-là que s'est concentré votre rapport d'expert,
19 donc la période couverte par l'acte d'accusation et aussi le territoire
20 pertinent à l'acte d'accusation ?
21 R. C'est exact.
22 Q. A partir des informations que vous avez obtenues de ces 12 bases de
23 données, je pense que vous avez réussi à établir une liste des personnes
24 tuées pendant la période que vous avez étudiée ?
25 R. Oui, effectivement, c'est la liste des personnes tuées et portées
26 disparues.
27 Q. Mais comment avez-vous fait en sorte d'établir que les gens qui,
28 d'après ces bases de données, figuraient en tant que personnes tuées
Page 15453
1 étaient, en réalité, tués; par exemple, est-ce que vous avez utilisé le
2 fait qu'ils ne se seraient pas présentés aux élections en 1997 ?
3 R. Je vous ai dit que j'ai utilisé les 12 sources concernant les victimes.
4 Mais aussi, je me suis basée sur le recensement de la population et
5 d'autres sources. Par exemple, j'ai utilisé les listes électorales pour
6 éliminer tout doublon.
7 Par exemple, même les personnes figurant comme des personnes décédées
8 sur des listes peuvent ensuite être retrouvées sur des listes des
9 électeurs. Donc ce que j'essaie de dire c'est que vous ne pouvez pas tirer
10 des conclusions directes vous basant uniquement ces bases de données.
11 Par exemple, à Srebrenica, nous avons identifié à peu près 25 [comme
12 interprété] victimes de Srebrenica dans la liste électorale. Ensuite, nous
13 les avons étudiées et nous avons étudié la façon dont cette liste a été
14 élaborée en 1997 à 1998, et avec d'autres sources d'information sur les
15 survivants. Et donc nous avons eu ces 24 personnes, et il n'y en a que
16 quelques-uns qui figuraient dans les trois sources. En même temps, ces
17 personnes se trouvaient dans les listes des personnes portées disparues de
18 Srebrenica. Pour certaines d'entre elles, nous avions déjà des analyses ADN
19 suite aux exhumations et les analyses.
20 Et donc nous avons étudié tout cela. Nous avons fait une distinction entre
21 les personnes figurant dans les trois rapports, des personnes dont on a pu
22 établir l'identification ADN. Parce qu'à partir du moment où vous aviez
23 cette identification ADN, la mort était certaine. C'est une preuve de mort.
24 Donc ce que j'essaie de dire, c'est que là nous avons une question
25 très complexe. Vous avez des exemples des familles qui ont signalé les
26 personnes décédées comme les personnes portées disparues pour obtenir plus
27 d'aide.
28 Et vous savez, c'est une approche pratique --
Page 15454
1 M. DI FAZIO : [aucune interprétation]
2 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est des choses qui arrivent dans les pays
3 touchés par la guerre.
4 Donc nous avons fait tout ce que nous avons pu pour comparer toutes
5 les informations et sources d'information différentes. Nous avons utilisé
6 cette méthode depuis bien longtemps. Nous appelons cela une méthodologie
7 prouvant la mort. Brièvement, cette méthode consiste en ce qui suit : à
8 partir du moment où nous avons la liste des victimes - qui peut venir des
9 documents qui font partie de l'acte d'accusation - nous vérifions tout
10 d'abord ces listes. On vérifie de quelle façon ces victimes ont été
11 répertoriées dans nos 12 sources d'information sur les victimes de la
12 guerre; ensuite, on fait les liens avec le recensement de la population de
13 1991; ensuite, on regarde les listes électorales et on tire les conclusions
14 sur la base de toutes les sources.
15 Ça, c'est ce que l'on fait d'habitude pour essayer de recueillir le
16 plus d'information possible sur chaque victime.
17 Q. Pourriez-vous dire aux Juges si vous avez trouvé un nombre
18 significatif de personnes que vous avez pu isoler des 12 bases de données
19 et qui figuraient donc en tant que personnes tuées pendant la période
20 couverte par l'acte d'accusation et sur le territoire couvert par l'acte
21 d'accusation, pour lesquelles il s'est avéré que par la suite elles se sont
22 présentées dans les bureaux de vote ?
23 R. Bien, je ne pense pas que ce chiffre était important, mais c'est
24 vrai que je ne me suis pas penchée là-dessus particulièrement. Je dirais
25 que pour Srebrenica, l'échelle était 24 potentiels et 12 acceptés sur un
26 total de 8 000 victimes. Donc voilà l'échelle dont on parle.
27 Mais ce sont vraiment des chiffres marginaux qui n'ont pas vraiment
28 d'impact significatif sur les conclusions que nous avons tirées.
Page 15455
1 Q. Bien. Merci. Donc les victimes de guerre -- dans votre rapport
2 sur les "Victimes de guerre," vous parlez des raisons pour lesquelles vous
3 avez utilisé ces 12 bases de données.
4 Donc pour quelles raisons les avez-vous utilisées exactement ?
5 R. Ces 12 bases de données, comme vous dites, sont au cœur de notre
6 méthodologie. Nous n'avons pas utilisé n'importe quelle source de victimes
7 de guerre. Nous avons considéré que ces 12 bases de données étaient les
8 meilleures sources en Bosnie-Herzégovine sur les victimes de guerre. Parmi
9 ces informations, nous avons aussi les identifications ADN des personnes
10 portées disparues; nous avons aussi les informations fournies par les
11 militaires des soldats tombés au combat et autre personnel militaire; et
12 nous avons aussi des sources venues des différentes sources officielles,
13 aussi bien en Bosnie-Herzégovine qu'en Republika Srpska. Et toutes ces
14 sources, nous les avons reçues à la demande de notre unité au niveau du
15 bureau du Procureur.
16 Donc il s'agit de nombreuses sources, mais il y en a qui ne sont pas
17 complètes.
18 Vous avez des sources dont nous pouvions disposer, mais que nous
19 n'avons pas utilisées. Par exemple, il s'agit de sources qui viennent du
20 côté bosniaque, serbe, mais aussi croate. Mais souvent, on ne les a pas
21 utilisées, car on considérait que la qualité du recueil d'informations dans
22 les sources que nous avons rejetées était bien moindre que la qualité des
23 informations recueillies dans les sources que nous avons acceptées.
24 Ensuite, se pose la question de fiabilité. Les sources que nous avons
25 utilisées ont un bon niveau de fiabilité, d'après nos critères.
26 Q. Merci.
27 Et une dernière question au sujet de ces bases de données. Vous avez
28 mentionné 12 bases de données. Est-ce que vous avez procédé à la
Page 15456
1 vérification pour éviter des doublons ? Autrement dit, pour éliminer tout
2 doublon figurant dans la base de données, est-ce que vous les avez
3 vérifiées entre elles ?
4 R. Oui. On le fait toujours. Et à chaque fois que l'on combine différentes
5 sources, quand on les compare, on essaye à chaque fois de vérifier s'il
6 existe des doublons. Et à chaque fois que l'on trouve des doublons, on les
7 élimine, et ce qui reste ce sont des bases de données purifiées.
8 Q. Et cette source que vous avez gardée, c'est ce que vous appelez "base
9 de données intégrée" ?
10 R. Oui. Nous avons la base de données de mortalité intégrée, comme on l'a
11 appelée, et qui concerne toute la Bosnie-Herzégovine. Donc nous nous sommes
12 occupés de toute la Bosnie-Herzégovine pour pouvoir en tirer des
13 statistiques pour toute affaire, pour tout incident qui nous intéresse. Et
14 donc là, vous avez une base de données sur la mortalité en Bosnie-
15 Herzégovine, et c'est sur cette base de données que nous nous sommes basés
16 pour établir la liste des victimes dans l'affaire Stanisic/Zupljanin,
17 concernant les municipalités concernées par l'acte d'accusation pour la
18 période entre avril et décembre 1992.
19 Q. Merci.
20 M. DI FAZIO : [interprétation] Et maintenant, je vais vous demander
21 d'examiner la page 8 du rapport des "Victimes de la guerre" - document 65
22 ter 10400 - je vais les montrer sur l'écran.
23 Q. Je vais vous demander d'examiner tout particulièrement un tableau qui y
24 figure.
25 M. DI FAZIO : [aucune interprétation]
26 Q. Je voudrais que l'on procède rapidement, si c'est possible.
27 Le premier tableau. Les chiffres que l'on voit ici, ce sont les
28 chiffres que vous avez obtenus de ces 12 bases de données. Est-ce qu'il
Page 15457
1 s'agit là de chiffres concernant toute la Bosnie, pas seulement les
2 localités couvertes par l'acte d'accusation ?
3 R. Oui, en effet.
4 Q. Donc ici, on voit qu'il n'y avait que huit bases de données alors que
5 jusqu'à maintenant on a parlé des 12.
6 R. Les 12 bases de données ont été regroupées pour un problème dont on va
7 parler par la suite. Et nous avons constitué huit groupes sur la base de
8 ces 12 sources. On a combiné ces informations pour en arriver à huit
9 groupes. Donc ils correspondent tous au même type d'information, même type
10 de sources, et c'est pour cela que l'on a établi un seul groupe.
11 Q. Quelle est la taille de ces sources ?
12 R. Bien, ici, nous avons un total de 181 000 cas, et il s'agit de la
13 totalité des fichiers que nous avons analysés.
14 Q. Ensuite, la colonne suivante, où on parle des chevauchements. On dit
15 qu'ici le chevauchement est exclu ?
16 R. Oui, effectivement, c'est ce que cela veut dire. Il n'y a pas de
17 chevauchement. Donc ce qui reste dans cette base de données, c'est une base
18 unique correspondant à un chiffre de presque 90 000 cas étudiés pour toute
19 la période de la guerre.
20 Q. Très bien. Donc là, vous avez "exclu tous les chevauchements;"
21 autrement dit, vous avez éliminé les doublons pour arriver à un chiffre
22 final ?
23 R. Exact.
24 Q. Donc là, on en arrive à un chiffre de 89 881 morts en Bosnie pour la
25 période entre 1992 et 1995 ?
26 R. Oui, à nouveau il s'agit d'un chiffre minimal qu'on utilise d'habitude
27 dans nos analyses.
28 Q. Donc 89 881 soldats et civils tués ?
Page 15458
1 R. Tués, morts ou portés disparus. Exact.
2 Q. Il s'agit des soldats et des civils ?
3 R. Oui.
4 Q. Ensuite, la colonne suivante. Là, vous avez établi les accords par
5 rapport aux informations de 1991, du recensement de la population ?
6 R. Oui. Là, vous avez le pourcentage des informations qui ont été
7 confirmées quand on a fait la comparaison avec le recensement de la
8 population. On en arrive à un pourcentage de 89,5 %, le taux de couplage.
9 Donc 89,5 %, c'est très élevé.
10 Q. Merci --
11 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Un instant.
12 M. DI FAZIO : [interprétation] Oui.
13 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame Tabeau, est-ce que cela veut
14 dire que moins que 10 % des personnes dont les noms figurent dans ces bases
15 de données ne figuraient pas dans le recensement de la population de 1991
16 et qu'ils venaient d'ailleurs ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, pas du tout.
18 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] non. D'accord.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela veut dire qu'il n'était pas possible
20 d'établir le couplage pour 10 %. On ne pouvait pas les trouver car --
21 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Bon, d'accord.
22 LE TÉMOIN : [interprétation] -- il y avait des problèmes au niveau de
23 rapport et du recueil d'informations --
24 M. DI FAZIO : [aucune interprétation]
25 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
27 M. DI FAZIO : [interprétation] Je vous remercie. C'est tout ce que j'ai
28 voulu savoir.
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1 M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Di Fazio, puis-je vous
2 rappeler qu'il vous reste encore cinq minutes, donc vous devriez essayer de
3 terminer votre interrogatoire.
4 M. DI FAZIO : [interprétation] Je trouve que finalement je suis allé plus
5 vite que prévu. Je vous demanderais dix ou 15 minutes supplémentaires. Je
6 vais vous dire ce que j'ai à l'esprit. Je voudrais parler des conclusions
7 de ce rapport, et je pense que c'est finalement le sujet le plus important
8 qu'il reste à couvrir. Mais il y a encore deux ou trois petits points que
9 j'ai voulu aborder : la question du partage de chiffres, la façon dont les
10 chiffres ont été répartis entre les décès liés à la guerre et les décès
11 survenus dans la population civile.
12 [La Chambre de première instance se concerte]
13 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Vous pouvez utiliser le temps qu'il nous
14 reste avant la pause, à savoir 16 minutes. Seize minutes.
15 M. DI FAZIO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
16 Je vais demander à présent qu'on montre la pièce 65 ter 10400.2.
17 Peut-on afficher le document à l'écran, s'il vous plaît.
18 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
19 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Di Fazio, on vient de nous
20 apprendre que cette cote ne figure pas dans le système.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Ah.
22 M. DI FAZIO : [interprétation] 10400.2.
23 Patientez un instant, s'il vous plaît. Non, en fait, il s'agit du
24 document .02. Pouvez-vous retrouver le document -- oui, c'est celui que
25 vous venez d'afficher.
26 Q. Madame le Témoin, c'est le document qui réunit vos conclusions
27 principales. Le document concerne donc vos conclusions principales
28 auxquelles vous êtes arrivée quant au nombre total de personnes tuées dans
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1 la région couverte par l'acte d'accusation et pendant la période qui va du
2 mois d'avril jusqu'au mois de décembre 1992. Ai-je raison de l'affirmer ?
3 R. Oui, tout à fait.
4 Q. Le chiffre minimum qui figure en haut de la page, 12 047 [comme
5 interprété] personnes, concerne la période et la région pertinente, et ce
6 chiffre est basé sur des dossiers individuels ?
7 R. Oui. Il est basé sur des fichiers individuels qui figurent dans nos
8 différentes sources de données. Pour chacune de ces personnes, nous pouvons
9 donner des données personnelles, ainsi que la date de leur disparition ou
10 de leur décès et la région où ils ont été portées disparues ou retrouvées
11 mortes.
12 Q. Nous voyons également le chiffre total estimé. Nous voyons qu'il est
13 composé d'un chiffre estimé minimal. Vous en avez déjà parlé. Par ailleurs,
14 nous avons également ce qu'on pourrait désigner par les termes de personnes
15 exclues et d'un sous-compte estimé.
16 Pourriez-vous nous expliquer la signification de ces termes techniques.
17 R. Oui. Pour commencer, nous avons des chiffres minimaux. Ils sont appelés
18 minimaux parce que nos sources sont incomplètes. Donc il existe une partie
19 de données qui manque, et nous ne savons pas quelle est la partie
20 manquante. Mais cette partie peut être estimée en se servant des outils
21 statistiques. Et c'est cette partie-là de notre rapport que nous désignons
22 par le terme de sous-compte estimé, donc cela désigne tout ce qui n'a pas
23 été pris en compte.
24 Toutefois, lorsque nous procédons à l'extrapolation de dossiers, suivant la
25 procédure que j'ai déjà expliquée, nous nous servons de deux catégories
26 différentes : celle de la zone et celle de l'intervalle pertinent. Il
27 existe un certain nombre de fichiers qui ne sont pas complets dans les
28 bases de données. Nous savons que ces fichiers se rapportent aux personnes
Page 15462
1 décédées ou portées disparues en 1992, mais nous ne savons pas exactement
2 en quel mois de cette année. Donc de tels fichiers devaient être exclus de
3 nos chiffres minimaux, parce que nous savions que ces fichiers concernaient
4 la période pertinente, mais nous ne savions pas quelle municipalité ils
5 concernaient. C'est la raison pour laquelle nous avons dû laisser de côté,
6 exclure, ces dossiers.
7 Par conséquent, le chiffre minimal est minimal de deux points de vue
8 différents. D'abord, parce que nos dossiers ne comprennent pas toute la
9 documentation pertinente; et deuxièmement, parce que nos sources sont
10 incomplètes.
11 Pour ce qui est du premier élément, nous avons ici notre estimation
12 statistique des dossiers qui ne pouvaient pas être pris en compte parce
13 qu'il y avait un certain nombre de données qui manquaient. Quant au
14 deuxième élément, c'est le sous-compte estimé. Il se rapporte aux
15 informations qui ne sont pas traitées de façon complète dans les sources.
16 La méthodologie utilisée pour arriver à ces deux chiffres est
17 précisée dans l'annexe à notre rapport. Ces annexes comprennent tous les
18 détails indispensables, mais il faut dire que ces sous-comptes estimés se
19 rapportent à environ 5 000 cas isolés qui ne font pas partie de nos
20 chiffres minimaux.
21 Donc le nombre total estimé n'est pas de 12 047 personnes, mais de 17
22 060 personnes tuées ou portées disparues.
23 Q. Merci de cette explication.
24 Alors, lorsque vous partez de la répartition des victimes entre les
25 victimes militaires et victimes civiles, est-ce qu'il s'agit là des
26 chiffres totaux estimés ou des chiffres minimaux ?
27 R. Il s'agit de chiffres minimaux. Nous avons un chiffre approximatif de
28 12 000 personnes sur lesquelles il existe les documents nécessaires. Et
Page 15463
1 quant à leur répartition en victimes militaires et victimes civiles, cela
2 fait partie de notre méthodologie, qui est bien décrite dans le rapport.
3 Q. Merci. Finalement, vous proposez une répartition de civils en fonction
4 du critère ethnique. Alors, le nombre de civils que nous avons ici est de
5 12 047. Donc lorsqu'on soustrait les militaires, on voit que 84 % des
6 personnes énumérées sont d'appartenance ethnique musulmane. Ai-je raison de
7 l'affirmer et comment êtes-vous arrivée à ce chiffre ?
8 R. Oui. Environ 85 % de toutes les victimes civiles appartenaient au
9 groupe ethnique musulman. Environ 8 % étaient serbes, 3 % croates et 3,8 %
10 appartenaient à d'autres groupes ethniques. Il s'agissait là aussi de
11 victimes civiles. Alors, les victimes civiles répertoriées dans le tableau
12 3, à la fin de la même page, c'est là qu'on les retrouve -- donc la
13 première colonne, le tableau 3, nous voyons le chiffre absolu de victimes
14 civiles et militaires. Le nombre de civils est 7 499. C'est le chiffre
15 minimal de victimes civiles. Et environ 85 % de ces personnes appartenaient
16 au groupe ethnique musulman.
17 Q. Merci.
18 R. C'est de quoi il est question dans ces tableaux.
19 Q. Merci. Alors, examinons brièvement le tableau numéro 4.
20 Je ne sais pas comment vous appelez ce type particulier de
21 représentation graphique.
22 R. [aucune interprétation]
23 Q. Donc le chiffre minimal est bien 12 047, non pas 17 060 [comme
24 interprété] ?
25 R. Oui, tout à fait.
26 Q. Examinons le tableau qui vient d'être affiché.
27 Parmi tous les Musulmans qui ont trouvé la mort - et je parle d'individus
28 répertoriés, personne par personne - donc il ne s'agit pas d'un chiffre
Page 15464
1 agrégé ou extrapolé, on parle du chiffre minimal, donc de tous ces
2 Musulmans qui ont été tués entre les mois d'avril et de décembre 1992 et
3 qui habitaient dans la zone couverte par l'acte d'accusation dans l'affaire
4 Stanisic/Zupljanin, 65 % des victimes étaient des civils ?
5 R. Précisément, deux tiers des victimes, 66,7 % des victimes étaient des
6 civils, et un tiers, d'après nos sources, étaient des militaires.
7 Q. Et un autre point dans ce tableau qu'il est important de souligner est
8 le nombre de Croates et de représentants d'"autres" groupes ethniques. On
9 voit également que le nombre de civils tués est supérieur au nombre de
10 militaires, mais c'est l'opposé qui vaut pour les Serbes.
11 R. Pour ce qui est des victimes serbes, la relation doit être prise à
12 l'envers. 34 % des victimes étaient des civils, et 66 % des victimes
13 étaient des soldats. Pour ce qui est des non-Serbes, deux tiers des
14 victimes étaient des civils; un tiers des victimes étaient des militaires;
15 et pour les Serbes, c'est l'inverse qui vaut, de façon générale.
16 Q. Merci.
17 M. DI FAZIO : [interprétation] Peut-on passer à la page suivante, s'il vous
18 plaît. Ce qu'il me faut, c'est la page 2.
19 Q. Veuillez vous pencher sur le tableau numéro 5, s'il vous plaît. Il
20 concerne l'année 1992, puis nous avons également le tableau suivant qui
21 concerne les années 1993, 1994 et 1995.
22 R. Oui, tout à fait.
23 Q. Ceci concerne-t-il la région couverte par l'acte d'accusation en
24 l'espèce ?
25 R. Oui. Ce sont des données statistiques qui ne concernent exclusivement
26 que les municipalités couvertes par l'acte d'accusation.
27 Q. Très bien. Donc il s'agit de la région couverte par l'acte
28 d'accusation, mais non pas de la période couverte par l'acte d'accusation,
Page 15465
1 parce que les années ultérieures sont également couvertes ?
2 R. Oui, tout à fait.
3 Q. Et vous avez obtenu ces chiffres de la part des études effectuées en
4 Bosnie-Herzégovine ?
5 R. Tout à fait.
6 Q. Donc pour ce qui est des Musulmans dans la région pertinente, en 1992,
7 on voit que la majorité a été tuée au cours de cette année ?
8 R. Oui.
9 Q. Quant aux victimes de 1993 et 1994, on voit que c'était, pour
10 m'exprimer ainsi, une année plutôt paisible pour ce qui est du nombre de
11 personnes décédées. Puis nous voyons encore, en 1995, le nombre de victimes
12 remonté ?
13 R. Oui.
14 Q. Et ici, nous avons les soldats et les civils.
15 R. Tout à fait.
16 Q. Tout compris ?
17 R. Oui, tout à fait.
18 Q. Peut-on se pencher sur le tableau numéro 7, s'il vous plaît.
19 Ce tableau se concentre sur les différents mois de l'année 1992 et
20 j'imagine que vous avez obtenu la date de décès dans les bases de données
21 que vous avez consultées ?
22 R. Oui, absolument.
23 Q. Examinons les diagrammes qui représentent les Musulmans. On peut
24 déduire qu'en 1992, et là, je me concentre sur le premier histogramme, dans
25 le cadre du tableau numéro 7 qu'il ne concerne que des civils; ai-je raison
26 de l'affirmer ?
27 R. Oui, tout à fait.
28 Q. En 1992, les civils qui couvraient dans la zone recouverte par l'acte
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1 d'accusation dans l'affaire Stanisic/Zupljanin ont vécu leurs pires mois,
2 entre le mois de mai et le mois de juillet. Parce que c'est pendant cette
3 période-là que la majorité a été tuée ?
4 R. C'est exact.
5 Q. Et on voit les chiffres qui concernent les militaires en bas de la
6 page. La dernière question que je souhaite vous poser est la suivante. Je
7 regarde le nombre de victimes civiles, tableau 7, et je vois les chiffres
8 suivants : il y a 2 500 civils et 1 600 militaires.
9 R. Oui, tout à fait. Cela signifie que le nombre de civils tués était
10 supérieur à celui du nombre de soldats au cours de ces trois mois. Mais il
11 existe aussi un autre point à soulever. C'est que les matrices qu'on peut
12 distinguées ne sont pas les mêmes au niveau des civils et au niveau des
13 soldats. Pour ce qui est des soldats, c'est le mois de juin qui a été le
14 plus fatal, mais la même chose ne va pas pour les civils. Donc pour
15 m'exprimer simplement, ce n'est pas simplement le nombre total de victimes
16 qui compte, ce n'est pas seulement que le nombre de victimes civiles était
17 supérieur à celui des victimes militaires, mais la distribution de leurs
18 décès n'est pas la même.
19 Q. Au cours de ces trois mois, depuis le mois de mai jusqu'au mois de
20 juillet, le nombre de civils tués était inférieur au nombre de soldats.
21 Ceux-ci avaient trouvé la mort notamment au mois de juin; ai-je raison de
22 l'affirmer ?
23 R. Oui, tout à fait.
24 Q. Merci.
25 [Le conseil de l'Accusation se concerte]
26 M. DI FAZIO : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
27 mon interrogatoire principal vient de toucher à sa fin.
28 Il ne reste qu'un seul point à aborder. Je sais que vous avez
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1 préalablement indiqué que vous souhaitiez prendre une décision quant aux
2 parties du rapport préparé pour l'affaire Milosevic qui devait être admis
3 au dossier dans l'affaire présente.
4 Permettez-moi de vous dire ceci : pour mieux comprendre la totalité
5 du témoignage, d'après l'Accusation, vous devriez admettre au dossier les
6 parties suivantes : Section 1, objectif et limites du rapport Milosevic;
7 Annexe B, aperçu des sources utilisées; Annexe C, aperçu des méthodes
8 d'analyse appliquées; et bien évidemment, Annexe D, compétences
9 professionnelles des auteurs.
10 Ce sont les seules parties du rapport Milosevic qui vous sont
11 vraiment indispensables pour comprendre la partie du rapport qui concerne
12 les personnes déplacées. Et une fois que vous statuerez sur la question, je
13 vous serais reconnaissant également d'admettre au dossier toutes les
14 corrections apportées et tous les résumés.
15 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.
16 Nous allons faire une pause et nous reprenons nos travaux dans 20 minutes.
17 [Le témoin quitte la barre]
18 --- L'audience est suspendue à 12 heures 06.
19 --- L'audience est reprise à 12 heures 37.
20 [La Chambre de première instance se concerte]
21 [Le témoin vient à la barre]
22 M. DI FAZIO : [interprétation] Messieurs les Juges, avant de poursuivre la
23 déposition du témoin, avec votre permission, il y a un document que je n'ai
24 pas présenté au témoin mais dont j'estime qu'il est nécessaire. Il
25 s'agissait d'un ajout au rapport sur les victimes de guerre qui apportait
26 des corrections à certains des chiffres figurant dans les tableaux. Cela a
27 été ajouté avant la vacation judiciaire d'été. Mais de mon point de vue, il
28 n'était pas nécessaire de le présenter. Il porte le numéro 10400.01 dans la
Page 15468
1 liste 65 ter. S'il n'y a pas d'objection de la part de la Défense, je
2 demanderais à MM. les Juges de bien vouloir se pencher sur la question du
3 versement de ce supplément lorsque MM. les Juges examineront le cas des
4 rapports du témoin expert.
5 Comme je l'ai dit, il s'agit d'un supplément dans lequel un certain nombre
6 de corrections sont incluses par rapport au rapport sur "Les victimes de la
7 guerre."
8 Numéro 10400.01.
9 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, Monsieur Aleksic.
10 M. ALEKSIC : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.
11 Contre-interrogatoire par M. Aleksic :
12 Q. [interprétation] Bonjour, Madame le Témoin.
13 Je suis Me Aleksic et je représente la Défense de M. Zupljanin.
14 Afin de ne pas revenir sur les questions qui ont déjà été abordées par le
15 Procureur et pour résumer. Concernant les sources, les sources de données
16 statistiques que vous avez utilisées, vous disposiez d'une part du
17 recensement de la population datant de 1991, et compte tenu du manque de
18 données concernant les années s'entendant au-delà et jusqu'en 1997, vous
19 avez recouru d'autre part aux listes électorales de 1997 afin de procéder à
20 un couplage entre ces deux grandes catégories de données, donc le
21 recensement de 1991 d'un côté, et les listes électorales de 1997 de
22 l'autre, n'est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. Est-ce que vous pourriez me dire, en votre qualité de professionnelle,
25 si les listes électorales sont utilisées où que ce soit ailleurs au monde
26 en tant que documents sur lesquels on baserait des recherches scientifiques
27 et des rapports ?
28 R. Oui. Les listes électorales ont été utilisées au Cambodge afin
Page 15469
1 d'estimer le nombre de victimes du régime des Khmer rouges dans la deuxième
2 moitié des années 1970. Elles ont été utilisées par Patrick Heuveline, un
3 scientifique américain.
4 Q. A ce sujet, puis-je vous demander si ce même rapport est utilisé devant
5 les chambres spéciales au sein des tribunaux cambodgiens ?
6 R. A vrai dire, cela pourrait bien être le cas. Le résultat de ces travaux
7 a été publié dans le journal "Démographie," qui est le journal le plus en
8 pointe dans le domaine au monde. C'est un journal qui est publié aux Etats-
9 Unis. Et l'étude de Patrick Heuveline était une partie d'une étude de plus
10 grande envergure à laquelle je me suis livrée concernant les victimes du
11 régime des Khmer rouges au Cambodge. Ces résultats étaient parmi les plus
12 fiables, par comparaison aux résultats obtenus par de nombreux autres
13 auteurs.
14 Donc c'est tout à fait possible, oui.
15 Q. Vous nous avez indiqué avoir déposé dans de nombreuses affaires et
16 avoir rédigé de nombreux rapports pour ce Tribunal dans votre domaine de
17 compétence, donc en démographie; est-ce exact ?
18 R. Oui.
19 Q. Entre autres, vous avez déposé dans l'affaire Simic et consorts ?
20 R. C'est exact.
21 Q. Je voudrais simplement vous rappeler une partie du compte rendu
22 d'audience dans l'affaire Samac à la date du 10 juillet 2002, page du
23 compte rendu 10 784, vers la fin de la page, ainsi que la page 10 785. En
24 page 10 784, c'est le même Procureur, M. Di Fazio, qui vous demande de vous
25 exprimer quant à la fiabilité des sources que vous avez utilisées pour
26 rédiger votre rapport.
27 Et à la page suivante, 10 785, vous répondez en expliquant qu'il s'agit du
28 recensement de la population de 1995, et vous dites quelle est la fiabilité
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1 de cette source. Ensuite, en lignes 20 à 25, vous dites, je cite en anglais
2 :
3 "La deuxième source, à savoir les listes électorales, n'est pas une source
4 que nous pouvons considérer comme étant officielle, en tout cas ce n'est
5 pas une source qui peut être utilisée pour produire et publier des
6 statistiques officielles. Il n'y a aucun pays où les organes en charge
7 d'élaborer des statistiques aient utilisé ce type de sources afin
8 d'élaborer des résultats statistiques."
9 J'ai dit "dans aucun pays."
10 Vous rappelez-vous avoir déclaré ceci dans l'affaire Simic ?
11 R. Il est possible que je l'aie dit, mais vous escamotez le contexte,
12 Maître. Les listes électorales ne sont, en effet, pas utilisées pour
13 produire en temps normal des analyses statistiques. Les organes et les
14 institutions chargés de produire ces dernières utilisent d'autres sources
15 qui sont des sources disponibles en temps normal.
16 Cependant, en temps de guerre, les sources normales d'informations
17 statistiques n'existent pas ou bien sont insuffisantes ou incomplètes. Donc
18 de même, je pourrais dire qu'en temps normal, en temps de paix, les listes
19 de personnes disparues ou de victimes de la guerre ou de personnes dont les
20 corps ont été exhumés ne sont pas utilisées pour produire des statistiques.
21 En temps normal, notamment dans les pays développés, et la Yougoslavie ce
22 n'était pas parmi les plus développés, mais appartenait quand même au monde
23 développé.
24 Donc en temps de paix, nous n'aurions pas utilisé ce type de fichiers ou de
25 données pour élaborer des statistiques. En revanche, lorsqu'on s'intéresse
26 aux conséquences démographiques de la guerre, il est parfois nécessaire
27 d'utiliser des sources qui sont un peu moins conventionnelles, comme les
28 listes électorales.
Page 15471
1 Q. Très bien. Dans votre rapport, ou plutôt, pendant l'interrogatoire
2 principal, vous avez dit que votre rapport en l'espèce est relié au rapport
3 Milosevic, que vous avez rédigé, et que les mêmes méthodes ont été
4 utilisées ainsi que les mêmes sources dans les deux cas, n'est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Alors, dans le rapport que vous avez préparé dans l'affaire Milosevic,
7 page 7 de la version serbe de ce dernier, paragraphe numéro 2, et page 6 de
8 la version anglaise, avant-dernier paragraphe, vous dites :
9 "Il faut garder à l'esprit que des listes électorales ne peuvent pas être
10 utilisées afin de produire une évaluation de l'effectif de la population
11 dans son ensemble en 1997 et 1998, parce que ce dernier était certainement
12 plus important que les 2,7 millions de votants enregistrés dans les listes
13 électorales. Cependant, ces listes électorales peuvent être utilisées pour
14 élaborer des statistiques relatives à la composition ethnique de la
15 population et aux déplacés internes et réfugiés pendant la période de 1997
16 et 1998."
17 Est-ce que vous vous en souvenez ?
18 R. Oui, il me semble, mais j'ai déjà abordé ceci aujourd'hui, comme vous
19 vous en souviendrez, plus tôt dans la journée dans l'interrogatoire
20 principal. Je ne peux que répéter ce que j'ai déjà dit aujourd'hui, à
21 savoir que nous ne pouvons pas prendre tel quel la liste des votants
22 enregistrés comme représentant l'ensemble de la population vivant dans le
23 pays concerné au moment des élections. Cependant, ces listes électorales
24 représentent malgré tout un échantillon fiable de la population dans son
25 ensemble.
26 Q. Mais aujourd'hui, vous avez indiqué avoir extrait des chiffres minimaux
27 de ces liste électorales, si j'ai bien compris, n'est-ce pas ?
28 R. Oui.
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1 Q. Alors, peut-être que vous ne serez pas d'accord avec moi, mais si l'on
2 a affaire à des chiffres minima pour les années 1997 et 1998, est-ce que
3 vous avez procédé à une comparaison entre, d'une part, ces chiffres minima
4 pour 1997 et 1998, et d'autre part, le total maximal issu du recensement de
5 1991 ?
6 R. Oui.
7 Q. Et cela ne vous a pas posé problème ?
8 R. Je ne suis pas sûre de bien vous comprendre.
9 Quand vous dites comparer, est-ce que vous parlez d'une analyse ou d'une
10 comparaison au sens strict ? Bien entendu, je suis arrivée à un certain
11 nombre de chiffres qui concernent également la population et qui se basent
12 sur les listes électorales. Ces chiffres figurent dans le rapport et en
13 annexe. Il s'agit du nombre de votants, du nombre de votants enregistrés
14 dans les listes électorales, par groupe ethnique, par municipalité, et en
15 regard de ces chiffres, j'ai fait figurer les chiffres correspondant à
16 l'année 1991. Comme je l'ai signalé aujourd'hui, les chiffres absolus pour
17 1997 ne correspondent pas à l'effectif total de la population, donc il n'y
18 a pas de comparaison possible avec la population de 1991. Et je le redis.
19 Q. Je vous comprends. Mais veuillez nous comprendre, nous aussi. La
20 plupart des personnes présentes dans ce prétoire ne sont pas forcément
21 familières de toutes vos statistiques, de vos méthodes mathématiques et
22 autres, si bien que j'essaye de traduire ceci dans une langue plus commune
23 afin de pouvoir comprendre.
24 Comme vous l'avez dit déjà un certain nombre de fois, dans les listes
25 électorales de 1997 ne figure aucune information relative à l'appartenance
26 ethnique des votants. Vous avez dit avoir repris ce champ d'information
27 particulier du recensement de 1991 en appliquant une méthode de comparaison
28 ?
Page 15473
1 R. Oui.
2 Q. D'un point de vue scientifique, peut-on considérer dans ce cas-là qu'on
3 a affaire à une source indépendante, parce que vous avez une première
4 source d'information sur laquelle vous collez les données en provenance
5 d'une autre source d'information ? Est-ce que dans ce cas-là il est
6 toujours possible de parler d'une source indépendante ?
7 R. Je crois que la question de l'indépendance d'une source est tout à fait
8 dénuée de pertinence ici, parce qu'il s'agit ici de deux sources liées qui
9 concernent la même population. A ceci près que la population des votants
10 est un sous-ensemble de la population recensée en 1991. Il n'y a aucun
11 problème à procéder à un couplage entre les données de ces deux sources
12 d'information en prenant un certain nombre de données personnelles de la
13 source A afin de les intégrer dans les données de la source B à des fins
14 statistiques. Cela ne pose absolument aucun problème ni du point de vue
15 statistique ni du point de vue de la question de l'indépendance de telle ou
16 telle source, qui est ici complètement hors de propos.
17 Q. Très bien. Concernant l'estimation du nombre d'habitants, de la
18 population, est-ce que vous conviendrez avec moi que d'une part vous avez
19 la population de 1991, née avant 1980, et donc il s'agit de la population
20 susceptible d'avoir atteint l'âge de 18 ans en 1997, 1998, n'est-ce pas ?
21 R. Je ne suis pas sûre d'avoir entendu la question à laquelle je dois
22 répondre.
23 Q. Très bien. Je vais reformuler ma question.
24 Est-ce que ces personnes nées avant 1980 et incluses dans cette population
25 ont -- enfin, est-ce qu'il est possible de dire qu'en 1991, on a enregistré
26 toutes les personnes qui étaient déjà majeures à ce moment-là, mais
27 également les mineurs qui avaient peut-être 12, 13, 14 ans et qui étaient
28 susceptibles de devenir des votants en
Page 15474
1 1997 ? Est-ce qu'eux aussi ont été enregistrés ?
2 R. C'est ce que nous avons fait. Nous avons extrait un sous-ensemble de la
3 population recensée, sous-ensemble constitué par les personnes qui, à
4 l'avenir, à partir de 1997 étaient susceptibles d'être en droit de voter.
5 C'est un sous-ensemble de la population totale, et ceci est tout à fait
6 exact. Si toutefois c'était votre question.
7 Q. Très bien.
8 Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire quelle est la population
9 qui, en 1991, avait effectivement 18 ans ou plus, à la différence de la
10 population mineure qui ne serait en droit de voter que plus tard ?
11 R. Je ne peux pas le dire de tête. Mais ceci n'est pas pertinent, parce
12 que la méthode que nous avons employée dans notre étude est une méthode
13 transversale. Ceci signifie que nous suivons à travers le temps le même
14 individu. Donc l'âge de cet individu est enregistré dans le recensement de
15 1991, mais cet âge n'est pertinent que dans la mesure où il nous permet de
16 déterminer si en 1997 cette personne était susceptible d'être en droit de
17 voter ou non.
18 Ce n'est pas comme si on avait en 1991 une vue de la population âgée
19 de 18 ans ou plus, ensuite en 1997, une autre vue similaire. Nous avons
20 adopté une approche transversale en suivant le même individu à travers le
21 temps. Par conséquent, la structure de la population des personnes en âge
22 de voter en 1991 n'a aucune importance ni pertinence particulières.
23 Si vous le souhaitez, je peux vous le fournir, en revanche.
24 Q. Pour faire suite à votre question, est-ce que vous avez considéré
25 toutes les personnes qui, en 1991, étaient âgées de 75 ans ou plus comme
26 des votants potentiels en 1997 ?
27 R. Je crois qu'il n'y a pas de limite d'âge pour être en droit de
28 voter. Mais je suppose que, oui, effectivement, il est possible de
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1 s'attendre à ce que des personnes âgées, en raison, entre autres, de leur
2 état de santé, se montrent moins motivées pour remplir leur obligation
3 d'électeurs. Mais en principe, il n'y a pas de limite supérieure d'âge pour
4 être en droit de voter.
5 Q. J'en conviens. Question suivante : est-ce que vous avez disposé d'une
6 base de données portant sur le phénomène de la mortalité selon la base de
7 laquelle vous auriez pu déduire, ou en tout cas exclure du recensement de
8 1991 toutes les personnes qui ont décédé de causes naturelles en 1992,
9 1993, 1994 et qui, de ce fait même, n'étaient plus en mesure de voter en
10 1997 ?
11 R. Bien, je disposais d'un certain nombre d'informations concernant les
12 morts naturelles pendant la guerre. Mais pas en 1996 et 1997. Alors, je
13 dispose de fichiers des victimes de la guerre pour l'ensemble du pays. Cela
14 représente environ 90 000 personnes, 90 000 décès. Donc il est évident que
15 ces personnes ne votent pas, n'est-ce pas ? Et manifestement, toutes les
16 personnes qui, en vertu du recensement de 1991, sont susceptibles de voter
17 en 1997 ne seront pas effectivement des votants, une fois l'année 1997
18 arrivée, mais on enfonce ici des portes ouvertes.
19 Q. Je crois que vous avez dit pendant l'interrogatoire principal, qu'en
20 2004 vous avez reçu à un moment une base de données concernant la
21 mortalité. Alors, si vous aviez disposé de ces informations, si vous les
22 aviez incluses, est-ce que vous auriez été en mesure de restreindre la
23 population, telle que déterminée à partir du recensement de 1991, en
24 utilisant la même méthode de comparaison que celle que vous avez appliquée
25 pour déterminer cette question d'appartenance ethnique des votants, si vous
26 ne m'avez peut-être pas compris.
27 En tout cas, si j'ai bien compris votre travail, vous avez considéré
28 qu'un votant enregistré sur les listes électorales en 1997, vous pouviez le
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1 retrouver dans le recensement de 1991, pour ensuite récupérer dans ces
2 mêmes données du recensement, l'information concernant son appartenance
3 ethnique, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. Est-ce que vous n'étiez pas en mesure d'appliquer le même principe pour
6 partir de la liste de tous les décès de mort naturelle et pour les exclure
7 ensuite de la liste des votants potentiels, en 1997 ?
8 R. Si ces personnes sont décédées, elles ne sont pas dans les listes
9 électorales, précisément parce qu'elles sont décédées. Donc ce n'est pas
10 pertinent.
11 Mais je ne crois pas que ces décès aient une incidence sur notre
12 évaluation de la structure ethnique de la population, que ce soit en 1991
13 ou en 1998. Cela ne donne lieu à aucun biais, qu'il s'agisse des morts
14 naturelles ou pour causes non naturelles, ou des personnes portées
15 disparues, cela n'a aucune incidence.
16 Q. Donc le recensement de la population de 1991 contient les personnes qui
17 viennent d'avoir 18 ans, des personnes qui, en 1997, vont avoir 18 ans,
18 ainsi qu'un certain nombre de personnes qui sont mortes entre le mois
19 d'avril 1992 et les élections qui vont avoir lieu en 1997. Est-ce que vous
20 êtes d'accord avec moi ?
21 R. Le recensement de la population inclut toutes les personnes qui
22 vivaient en Bosnie, au moment du recensement. Certaines de ces personnes,
23 entre-temps, sont décédées soit suite à la guerre, soit de mort naturelle.
24 C'est un fait, c'est tout ce que je peux vous dire.
25 Q. Je pense que vous m'avez déjà dit que pour élaborer ce rapport, vous
26 vous êtes servie de certains rapports de la Republika Srpska. Ceci étant
27 dit, ils ne concernaient pas les années 1993 et 1995. Mais est-ce que vous
28 avez eu recours aux statistiques officielles de la Republika Srpska, son
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1 institut des statistiques, concernant la population totale en 1996 et en
2 1997 ?
3 R. Non, je ne disposais pas des statistiques concernant la population
4 venue de la Republika Srpska pour les années 1996 et 1997. Si eux, s'ils
5 disposaient des statistiques, ils ont dû les faire suite aux évaluations,
6 aux projections, pour ainsi dire, et pas sur la base des comptes objectifs
7 du recensement de la population.
8 Q. Je suis totalement d'accord avec vous, mais je vais partager cette
9 information avec vous. Les statistiques officielles de la Republika Srpska
10 indiquent qu'à Banja Luka il y avait une population totale de 218 519
11 personnes. Ensuite, on peut lire le chiffre de 86 456, mais qui correspond
12 aux voteurs, les personnes inscrites sur la liste électorale, qui ont 18
13 ans et plus.
14 Dans votre rapport, vous avez dit que toutes les personnes qui sont parties
15 travailler à l'étranger avant la guerre, et qui, en 1997, sont revenues
16 pour voter, qu'elles ont été considérées comme des réfugiés. Est-ce que
17 vous êtes d'accord avec moi là-dessus ?
18 R. Oui.
19 Q. Dans votre rapport dans l'affaire Milosevic, où vous exposez la
20 méthodologie de votre travail, vous dites à la page 6, en anglais et en
21 B/C/S, vous dites que : "s'il n'y avait pas eu la guerre en Bosnie-
22 Herzégovine, l'émigration d'avant le recensement serait peut-être revenue.
23 Mais ils se sont inscrits sur les listes électorales pour 1997. Cependant,
24 comme ils habitaient toujours à l'étranger, nous considérons qu'il faut
25 considérer toutes ces personnes comme des réfugiés.
26 R. Oui, j'ai dit exactement cela.
27 Q. Mais sur la base de quels faits vous tirez ces
28 conclusions ? Autrement dit, est-ce qu'on peut classer dans une catégorie
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1 statistique les désirs de quelqu'un, les conjectures quant à ce que
2 quelqu'un aurait fait ou ferait ? Car là, il s'agit d'un élément
3 exclusivement subjectif, puisque tout à l'heure vous avez parlé
4 d'objectivité justement.
5 R. C'est vrai, je n'ai pas étudié les intentions, les souhaits de revenir,
6 et cetera.
7 Cependant, je me suis penchée sur cette question du point de vue
8 statistique. Dans le rapport dans l'affaire Milosevic, vous avez une annexe
9 distincte où l'on discute exclusivement de la population qui vit à
10 l'étranger, et l'impact qu'a l'effet que cette population réside à
11 l'étranger au moment du recensement de la population sur nos statistiques
12 sur les réfugiés et les personnes déplacées à l'interne.
13 Mais c'est quelque chose qui se trouve dans l'annexe de ces rapports,
14 et je pense que c'est extrêmement pertinent par rapport à la question que
15 vous venez de poser.
16 Donc il y avait à peu près 420 000 personnes qui étaient enregistrées
17 dans ces listes électorales comme des personnes résidant à l'étranger.
18 Donc la question qui se pose est de savoir quelle est la portion de
19 ce groupe qui a quitté le pays après le recensement de la population, et
20 quelle portion a quitté le pays avant le recensement ?
21 Nous nous sommes penchés là-dessus, et nous avons identifié seulement
22 28 000 personnes qui ont quitté le pays avant le recensement de 1991. C'est
23 un tout petit chiffre qui représente un petit pourcentage, et dans notre
24 annexe, nous ne trouvons pas que ceci a une incidence importante sur nos
25 statistiques sur les réfugiés, les personnes déplacées, et la composition
26 ethnique.
27 Vous avez deux concepts. Vous avez la population de fait et la
28 population de jure. La population de fait, c'est la population qui,
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1 effectivement, vit dans le territoire d'un pays, au moment du recensement.
2 La population de jure, c'est la population qui inclut la population qui y
3 vit de fait, ainsi que les individus qui résident à l'étranger de façon
4 temporaire, autrement dit qui ne se trouvent pas physiquement dans le pays
5 au moment du recensement.
6 Dans la Bosnie-Herzégovine et toute l'ex-Yougoslavie, c'était un pays
7 qui était connu pour avoir une grande population émigrée, et le phénomène a
8 commencé dans les années 1970, et je pense qu'il s'est poursuivi jusqu'au
9 début de la guerre dans les années 1990.
10 Donc nous avons fait une comparaison entre la composition des
11 municipalités de Bosnie-Herzégovine en tenant compte de la population de
12 fait et de jure, autrement dit en incluant et en excluant les gens résidant
13 à l'étranger. Le résultat de cet exercice indique qu'uniquement dans deux
14 municipalités la composition ethnique aurait été différente, différente si
15 nous avions basé nos statistiques sur la population de fait au lieu de les
16 baser sur la population de jure. Donc deux municipalités sur un total de
17 109 municipalités. Et dans ces deux municipalités, il y aurait peut-être eu
18 une incidence.
19 Je pense que le pourcentage d'erreur présumé c'est à peu près 5 %, et
20 c'est un pourcentage accepté généralement dans les statistiques, la marge
21 d'erreur qui est moindre ou égale à 5 %. Et cela se trouve dans l'annexe B.
22 Q. Non, non, non.
23 R. Et c'est là que vous pouvez trouver une réponse détaillée à la question
24 que vous avez posée, et je peux vous dire que l'incidence n'est absolument
25 pas significative.
26 Et il faut quand même mentionner que le chiffre total de ces voteurs
27 qui résident à l'étranger, qu'au moins 100 000 d'entre eux voyageaient
28 entre leur lieu de résidence permanente en Bosnie-Herzégovine et l'endroit
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1 où ils travaillaient, en Croatie ou en Serbie, en rentrant chez eux tous
2 les week-ends. Donc là on parle d'une population de jure alors qu'il s'agit
3 de gens qui, de fait, habitent dans leur pays. Ceci peut vous expliquer le
4 problème en partie, parce que moi, je ne peux pas être d'accord avec vous
5 pour dire que cette population qui résidait de façon temporaire à
6 l'étranger pose problème ou a une incidence importante sur nos
7 statistiques.
8 Q. Mais vous venez de dire justement que l'ex-Yougoslavie était connue
9 pour sa population émigrée et que les gens partaient. La population
10 yougoslave, entre les années 1960 et les années 1990, partait travailler à
11 l'étranger. Et il faut absolument exclure cette portion là de la population
12 générale, parce qu'ils ne partaient pas pour des raisons de guerre; c'est
13 évident. Peut-être que c'est quelque chose qui n'a pas d'importance pour
14 votre rapport, mais quand même…
15 R. Est-ce que vous me permettez un commentaire ? Pour illustrer l'échelle
16 de l'importance de cette migration liée à la guerre, je vais vous citer un
17 chiffre. En Bosnie-Herzégovine, vous aviez plus de 2 millions de personnes
18 qui ont été déplacées, et l'UNHCR a évalué ce chiffre à 2,2 millions.
19 Si vous tenez compte de la population totale en Bosnie en 1991, qui
20 comptait à peu près 4,4 millions de personnes, et là vous en arrivez à un
21 pourcentage de 50 % de gens qui sont déplacés à l'intérieur de la Bosnie ou
22 qui sont partis à l'étranger. On ne peut absolument pas dire qu'il s'agit
23 là des gens qui sont partis à l'étranger pour travailler, pour se réunir
24 avec leur famille, et cetera. On ne peut absolument pas dire cela. En
25 tenant compte du chiffre absolu, du chiffre total de la population avant la
26 guerre.
27 Q. Je suis totalement d'accord avec vous. On va parler d'autre chose.
28 Dans votre rapport, à la page 6 en serbe et page 7 en anglais, vous
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1 dites : "Pour faire le lien entre ces deux bases de données individuelles
2 et séparées," et là, on fait référence au recensement de 1991 et à la liste
3 électorale, "nous avons procédé à un couplage complexe. Au cours de ce
4 processus de couplage, un grand nombre de personnes qui étaient inscrites
5 sur les listes électorales, à peu près 80 %, a été retrouvé dans le
6 recensement de la population de 1991."
7 Est-ce exact ?
8 R. Oui.
9 Q. Bien, voyons voir le tableau 1M, à la page 30 en anglais.
10 M. DI FAZIO : [interprétation] Quel est le rapport que nous sommes en train
11 d'étudier ?
12 M. ALEKSIC : [interprétation] Le rapport en l'espèce.
13 M. DI FAZIO : [interprétation] Le rapport Milosevic ou l'autre ? Ah,
14 excusez-moi, en l'espèce donc. Très bien. Excusez-moi.
15 M. ALEKSIC : [interprétation] 65 ter 10399, page 30.
16 Q. Vous dites qu'au total, en 1991, tout groupe ethnique confondu, nous
17 arrivons à un chiffre de 817 898 personnes, et vous avez couplé ces groupes
18 avec un groupe qui comptait 376 050 personnes correspondant au recensement
19 de 1997, ce qui correspond à 45,9 %.
20 Pouvez-vous m'expliquer cela ?
21 R. Oui. Ce chiffre 376 000, ce n'est pas le chiffre des personnes couplées
22 inscrites sur la liste électorale que l'on peut comparer directement au
23 chiffre de 817 898. Car dans le tableau numéro 1, quand on parle de groupes
24 de Musulmans ou un autre groupe, nous avons tenu compte des populations à
25 partir de 1991 et à partir de 1997. Donc c'est un aperçu. La population qui
26 habitait dans cette municipalité en 1991 et en 1997.
27 Mais à réfléchir, si vous prenez la population de 1991 et si vous
28 observez la façon dont ces personnes ont été déplacées ou se sont déplacées
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1 pendant la guerre et après la guerre, pourquoi voulez-vous vous attendre à
2 les retrouver exactement dans la même municipalité, vu les informations qui
3 figurent dans ce tableau ?
4 Donc ici, nous avons un tableau réparti selon les municipalités des
5 différentes régions, les municipalités étudiées. Les personnes, par
6 exemple, de Prijedor, qui habitaient Prijedor, et comptaient 94 000
7 personnes, dont 40 000 Musulmans, c'est quelque chose que l'on peut lire à
8 la page 30. Donc 94 000 au total et 40 000 Musulmans à Prijedor. Prijedor,
9 c'est une des municipalités où il y a eu des mouvements extrêmes de la
10 population. On en a parlé ce matin. Il y a eu d'énormes groupes de
11 Musulmans qui ont quitté cette municipalité -- et dans quelques autres
12 municipalités qui, bien sûr, se trouvaient sur le territoire de la
13 fédération, et pas en Republika Srpska, selon la définition que nous avons
14 donnée au territoire. Donc les 40 000 personnes qui vivaient à Prijedor en
15 1991, évidemment, ce ne sont pas les mêmes personnes que vous allez
16 retrouver en 1997. Pourquoi ? Parce que les Musulmans sont partis, les
17 Serbes sont arrivés. Donc les statistiques de 1997, bien, on ne peut pas
18 faire un lien direct avec la population du recensement de 1991. Aussi, on
19 trouve la situation telle qu'elle est en 1997, effectivement. On peut faire
20 ces comptes en nous basant sur les listes électorales.
21 Mais quand on compare cela au tableau numéro 2, où on parle des
22 personnes déplacées, alors là on peut faire les comparaisons et on peut
23 faire le lien, parce que là nous avons la municipalité d'origine ainsi que
24 le mouvement de la même population vers toutes sortes de municipalités.
25 Et c'est comme cela qu'on peut établir le lien.
26 Q. Mais c'est justement la question que je voulais vous poser. Dans tous
27 les tableaux, numéro 2, le 2M par exemple. La première colonne, où vous
28 parlez de "La population totale identifiée en 1991," vous avancez le
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1 chiffre d'à peu près 600 000 personnes, alors que dans un autre tableau,
2 vous parlez de 300 et quelque 1 000. Pourquoi on voit une telle différence
3 ? C'est parce qu'il vous importe peu de savoir dans quelle municipalité de
4 Bosnie-Herzégovine ils ont été retrouvés ?
5 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Pourriez-vous nous montrer le tableau
6 numéro 2 sur l'écran.
7 M. DI FAZIO : [interprétation] Il y a une question qui fait suite à la
8 question posée. On demande au témoin de faire la comparaison, donc là nous
9 avons un élément de la comparaison, mais avec quoi faut-il le comparer.
10 Quels sont les autres tableaux auxquels on fait référence ?
11 M. ALEKSIC : [interprétation] Les tableaux de la réponse précédente. Le
12 témoin a parlé de ces tableaux numérotés par le chiffre 1, ces différents
13 tableaux sous 1. Donc tous les tableaux énumérés sous 1, par exemple, le
14 tableau 1M, on peut lire l'échantillon de la population de 1997, toutes
15 nationalités confondues, on en arrive à 376 050 personnes, alors que dans
16 ce tableau-ci, le tableau numéro 2, ce chiffre correspond à
17 439 601 personnes.
18 Pourriez-vous donc nous expliquer cette différence.
19 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Nous examinons le tableau 2. Veuillez
20 indiquer la page où figure ce tableau.
21 M. ALEKSIC : [interprétation] C'est la page 28.
22 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.
23 M. ALEKSIC : [interprétation] Je vous demande pardon.
24 M. DI FAZIO : [interprétation] Le tableau commence à la page 37, donc
25 s'agit-il de la page 38 ou 37 en version anglaise ?
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Le tableau numéro 2, semblerait-il,
27 vient d'être affiché à l'écran.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Puis-je commencer ma réponse ?
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1 M. ALEKSIC : [interprétation] Oui, je vous en prie.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour commencer, je souhaite préciser un point
3 : les tableaux qui figurent à l'annexe A, qu'il s'agisse de l'annexe A1,
4 A2, A3, ne peuvent pas être utilisés pour préciser le taux de couplage.
5 Deuxième point, je souhaite préciser qu'il existe deux types de chiffres
6 relatifs à la population qui figurent dans ce tableau. Dans la première
7 catégorie figure la population que j'appelle la population "in," donc la
8 population d'origine, et ce que j'appelle la population "from," donc la
9 population qui vient d'ailleurs. Alors, qu'est-ce qu'il faut entendre par
10 ces deux termes ? Il est toujours important de tenir compte du déplacement.
11 De la municipalité ou de la région d'origine, et il faut tenir compte
12 également de la municipalité d'arrivée. Donc il s'agit d'un processus à
13 deux dimensions dont j'ai tenu compte. Et cela peut être vu dans l'annexe
14 A.
15 Donc l'annexe A a été élaborée du point de vue des municipalités d'origine.
16 Là, on énumère les municipalités exactement dans le même ordre dans lequel
17 elles figurent dans l'acte d'accusation. Ce sont les municipalités d'où les
18 recensés tirent leur origine.
19 Donc nous avons les chiffres du recensement pour l'année 1992 [comme
20 interprété] qui montrent quelle population habitait dans quelles
21 municipalités en 1991.
22 Passons maintenant à l'échantillon de la population de 1997. Là se voit
23 répertoriée la population relevée dans les mêmes municipalités, donc ces
24 municipalités d'origine, mais pour l'année 1997. Donc nous avons deux
25 images instantanées. Il est très important de comprendre que la population
26 de 1997 comprend plusieurs éléments différents. D'une partie, nous avons la
27 population qui n'a jamais bougé, qui est restée sur place, qui est restée
28 dans la même municipalité, mais il y a aussi également une population
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1 nouvellement arrivée, qui ne sera pas inscrite dans la liste électorale
2 dans ces municipalités-là, parce qu'elle est partie de leur municipalité
3 d'origine. Par ailleurs, il ne s'agit ici que d'un simple échantillon de la
4 population qu'on peut déduire à partir des listes électorales. Donc les
5 personnes qui ne se sont pas fait inscrire sur la liste électorale ne sont
6 pas représentées. Et c'est ce que je répète constamment : on ne peut pas
7 estimer le nombre total d'habitants en 1997 à partir des listes
8 électorales.
9 Par ailleurs, pour l'année 1991, nous avons une certaine composition
10 ethnique, mais quand nous regardons l'année 1997, ceci n'existe pas. Alors,
11 la façon dont nous avons procédé, nous avons compilé toutes les données
12 personnelles pour chaque individu en fonction des différentes municipalités
13 couvertes par l'acte d'accusation.
14 Mais si vous regardez le tableau 2, le nombre total d'habitants ne sera pas
15 le même. Les chiffres ne seront jamais les mêmes.
16 Q. Je vous demande pardon. Permettez-moi de vous poser la question
17 suivante : si je vous ai bien comprise, quand il est question du tableau
18 numéro 1, nous avons 376 050 personnes qui y figurent, et ce sont des
19 personnes identifiées dans les 18 municipalités où ces personnes se sont
20 fait inscrire sur la liste d'électeurs en 1997; mais pour ce qui est des
21 439 601 personnes, un autre chiffre que nous avons évoqué, il s'agit de
22 toutes les personnes identifiées qui habitaient dans les 18 municipalités
23 d'après le recensement, quelle que soit la municipalité de Bosnie-
24 Herzégovine où vous avez pu les retrouver en 1997, en tant qu'électeurs
25 figurant sur la liste d'élections ?
26 Ai-je raison de l'affirmer ?
27 R. Pour l'année 1997, nous avons les habitants qui se sont fait inscrire
28 sur les listes électorales en 1997 dans les municipalités données.
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1 Donc prenons l'exemple de la municipalité de Prijedor. Vous y avez
2 397 Musulmans. C'est un échantillon de la population musulmane enregistrée
3 dans la ville de Prijedor en vue de voter lors du scrutin de 1997. Donc ça,
4 c'est le sens de cet instantané-là. Quel que soit leur lieu d'origine,
5 c'est le nombre de Musulmans qui se sont fait inscrire sur la liste
6 électorale en 1997 dans la ville de Prijedor. Ils sont au nombre total de
7 397 personnes.
8 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Peut-on afficher la page
9 suivante à l'écran, s'il vous plaît, celle qui représente la municipalité
10 de Prijedor ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le tableau à la page 38.
12 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Madame le Témoin, pourriez-vous nous
13 expliquer ce chiffre ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Le tableau 2 est légèrement plus
15 compliqué. Ici, nous représentons les municipalités d'origine. Donc nous
16 avons toutes les personnes qui habitaient à Prijedor au moment du
17 recensement, puis pour l'année 1977 [comme interprété], nous avons
18 identifié 49 019 Musulmans, quelle que soit la municipalité. Donc 49 019
19 personnes.
20 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Donc vous parlez là de personnes qui
21 habitent toujours dans la ville de Prijedor ou qui habitent ailleurs sur le
22 territoire de Bosnie-Herzégovine --
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] -- mais ils sont tous originaires de
25 Prijedor, ils habitaient tous à Prijedor en 1991 ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, tout à fait.
27 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] O.K. Merci.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] -- c'est exact. Donc ils se trouvent, en 1997,
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1 à Prijedor, ailleurs en Bosnie-Herzégovine, ou en dehors du pays, s'il
2 s'agit de réfugiés.
3 Donc ceci montre le caractère transversal de ces données
4 statistiques. C'est le nombre total de personnes qui se trouvaient dans la
5 municipalité de Prijedor en 1991.
6 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] J'aimerais que vous nous expliquiez
7 également les autres chiffres.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Le chiffre qui figure dans la première colonne
9 c'est le nombre total d'habitants. Non, je vous présente mes excuses. Ça,
10 c'est le nombre total d'habitants. C'est dans la deuxième colonne que l'on
11 retrouve le nombre de Musulmans. Donc la première colonne c'est le nombre
12 total d'habitants pour la municipalité de Prijedor, quelle que soit leur
13 appartenance ethnique. Mais dans la deuxième colonne c'est la population
14 musulmane identifiée en 1997.
15 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous demande pardon. Donc à la
16 colonne -- --
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
18 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] -- la première colonne répertorie le
19 nombre total d'habitants, quelle que soit leur appartenance ethnique ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
21 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Et c'est quoi ce chiffre de 21 964 ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est le nombre de personnes déplacées et des
23 réfugié, parmi le nombre total d'habitants.
24 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] O.K.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Et la colonne suivante --
26 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] -- est-ce que nous avons le
27 pourcentage des réfugiés ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.
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1 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] D'accord. Merci.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Quelle que soit leur appartenance ethnique.
3 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Oui.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, les trois colonnes suivantes ce sont
5 les mêmes chiffres sauf qu'ils ne concernent que les Musulmans, c'est-à-
6 dire un seul groupe ethnique. Donc nous avons 19 658 Musulmans de Prijedor
7 en 1991, et parmi eux, 19 290 font partie des personnes déplacées et des
8 réfugiés, ce qui fait 98,1 %.
9 M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce qui explique la structure de vote en
11 1997.
12 Donc nous avons deux types de chiffres relatifs à la population
13 différents, et il est impossible de procéder à leur comparaison. Vous ne
14 pouvez pas dire que les chiffres ne sont pas cohérents. Le fait est qu'ils
15 ne sont pas comparables. Le tableau 1 montre quelle est la composition
16 ethnique en 1991 et en 1997. Le tableau 2 vise un objectif tout autre. Il
17 est censé nous montrer combien de personnes ont été déplacées en 1997 et
18 1998. Donc c'est personnes-là, en 1997/1998, n'habitent toujours pas dans
19 leur lieu de résidence, dans leur lieu d'origine.
20 Donc il s'agit de deux tableaux tout à fait différents.
21 M. ALEKSIC : [interprétation]
22 Q. J'ai saisi parfaitement le sens de vos propos, mais penchons-nous
23 maintenant sur le tableau 1S. C'est à la page 37 en version serbe, et page
24 36 en version anglaise.
25 Première ligne, colonne numéro 5, je lis échantillon de la population
26 en 1997, et il est indiqué que la population serbe compte 271 209
27 personnes.
28 Avez-vous retrouvé ce chiffre ?
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1 R. Je pense que vous parlez de la zone toute entière. Donc 271 209
2 personnes. Ceci vaut pour la zone tout entière couverte par l'acte
3 d'accusation, n'est-ce pas.
4 Q. Tableau 20, qui figure à la page 39 -- je vous demande pardon, je me
5 suis trompé. Page 45 plutôt. Pour ce qui est de la version anglaise -- ah,
6 la voilà.
7 Ici, nous avons encore une fois les chiffres qui concernent la zone toute
8 entière couverte par l'acte d'accusation. Colonne numéro 4, je lis
9 population serbe identifiée en 1997, puis je lis le chiffre de 216 009.
10 R. Mais là encore, vous procédez à une comparaison de choses qui ne sont
11 pas comparables. Il s'agit de deux types de renseignements différents. Ce
12 chiffre, 216 009, c'est le nombre dérivé à partir de la municipalité
13 d'origine. Mais en 1997, ces personnes pouvaient être retrouvées n'importe
14 où sur le territoire de la Bosnie ou ailleurs. Quant au nombre de 216 000,
15 il concerne la population serbe dans sa totalité dans la zone concernée.
16 Donc ce sont deux chiffres différents. Il ne faut pas les comparer.
17 Je suis désolée, mais la migration c'est un processus complexe. La
18 population commence à se déplacer depuis son lieu d'origine, puis se rend
19 dans différents endroits et arrive à son point de destination à un moment
20 donné et y reste. Donc c'est un processus qui a plusieurs facettes, et
21 c'est ce qui peut être déduit à partir de nos données statistiques.
22 Q. Mais je veux bien croire qu'il s'agit d'un processus qui dispose de
23 plusieurs facettes, mais veuillez comprendre que notre point d'intérêt
24 consiste en autres choses, et c'est pourquoi nous avons besoin de vos
25 explications.
26 Alors, remonte au tableau numéro 1S, qui figure à la page 37 en
27 version serbe et page 36 en version anglaise. Ce qui m'intéresse ce sont
28 les pourcentages qui y figurent.
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1 D'après vous, en 1991, la population serbe montait à 44,7 % de la
2 population majeure. En 1997, ce pourcentage était de 72,1.
3 Veuillez nous fournir une explication. D'après moi, le pourcentage de
4 Serbes a été revu à la hausse pour 27,4 %, et non pas plus de 60 %. Si on
5 parle de la proportion de la population serbe. Vous trouvez peut-être mes
6 observations ridicules, mais je vous assure que j'ai fait de mon mieux pour
7 me soustraire aux cours de mathématique il y très longtemps. Alors,
8 veuillez nous fournir une explication.
9 R. Vous avez raison au niveau des pourcentages, mais ceci n'explique pas
10 la modification générale dans les chiffres.
11 Donc le pourcentage de 61,3 % est ce qu'on appelle "différence
12 relative." Donc la différence absolue entre 44,7 % et 72,1 %, vous la
13 prenez et vous la divisez par le pourcentage initial de 44,7, et c'est
14 alors qu'une modification dans les pourcentages peut être relevée.
15 Je pense qu'un autre expert de la Défense avait déjà soulevé cette question
16 qu'il avait trouvée quelque peu difficile à comprendre, mais il faut être
17 très attentif. Donc il ne s'agit pas ici d'exprimer la hausse ou la baisse
18 en pourcentage absolu, parce que cela ne montre pas quelle était la nature
19 des modifications effectuées. Donc je suis désolée de vous décevoir, mais
20 du point de vue statistique, les comptes, les décomptes que j'ai faits,
21 sont tout à fait exacts.
22 Q. Je suis très heureux d'avoir une autre profession dont je m'occupe. Je
23 ne fais que plaisanter, bien évidemment.
24 Permettez-moi de vous poser quelques autres questions. J'aurais quelques
25 observations à faire quant aux déplacés internes que vous évoquez dans
26 votre rapport. Vous en avez par ailleurs également parlé lors de votre
27 interrogatoire principal.
28 Revenons au rapport Milosevic, donc le rapport de base. A la page 8,
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1 paragraphe 3 de la version serbe, qui correspond à la page 7, dernier
2 paragraphe, en version anglaise, vous dites :
3 "Il faut tenir compte du fait que la définition de déplacés internes
4 et de réfugiés dont vous vous servez est de nature statistique, et non pas
5 juridique."
6 Vous l'avez répété aujourd'hui lors de votre déposition. Alors,
7 pourriez-vous m'apprendre en quoi consiste cette définition statistique de
8 personnes déplacées ou de réfugiés ?
9 R. Comme je l'ai indiqué déjà aujourd'hui, nous avons comparé les lieux de
10 résidence en 1991 et au moment où le scrutin a été organisé. Nous nous
11 sommes appuyés pour ce faire sur des listes électorales qui existaient au
12 niveau de municipalités.
13 Alors, il existe une définition juridique de personnes déplacées internes
14 ou de réfugiés. Ceci implique que la personne avait ressenti une certaine
15 terreur, parce qu'elle avait fait objet de persécution en raison de son
16 appartenance ethnique, de sa confession, de la langue, de sa nationalité,
17 et cetera. Ces définitions juridiques sont utilisées par les organisations
18 telles que le HCR ou les différents gouvernements lorsqu'il s'agit de
19 compiler des listes de personnes déplacées et de réfugiés. Pour figurer
20 dans de telles listes, une personne doit dire que c'est en raison de la
21 terreur ressentie qu'elle a dû s'enfuir. Une fois une personne enregistrée
22 dans les listes, elle a le droit de bénéficier d'une certaine forme d'aide
23 financière. Par exemple, on assure des hébergements appropriés. On fournit
24 une aide matérielle, et cetera.
25 Evidemment, nous ne pouvions pas nous servir de ce type de définition,
26 parce que ce n'est pas quelque chose qui est relevé dans les données que
27 nous avions à notre disposition. Je pense par ailleurs que même le HCR
28 n'avait pas des données complètes à cet effet, et la même chose vaut pour
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1 le gouvernement de Bosnie-Herzégovine. Nous nous sommes servis d'une
2 définition statistique, à savoir, nous avons comparé le lieu de résidence
3 en 1991 et en 1997. Donc, c'était la municipalité de résidence qui comptait
4 dans les deux cas de figure. Si elle avait changé entre 1991 et 1997, nous
5 avons supposé, nous avons présumé, qu'il s'agissait d'une personne
6 déplacée. Si le lieu de résidence initial avait changé, mais que la
7 personne se trouvait en dehors de Bosnie, alors nous avons conclu qu'il
8 s'agissait d'un réfugié.
9 Par ailleurs, la définition juridique du terme "réfugié" veut elle aussi
10 qu'il s'agisse d'une personne qui a quitté son pays d'origine pour se
11 rendre dans un autre pays.
12 Mais je souligne quand même que nous ne nous sommes pas servis de la
13 définition juridique, mais de la définition purement statistique.
14 M. ALEKSIC : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
15 il ne nous reste que quelques minutes. Etant donné que je souhaite aborder
16 un autre sujet et que je souhaite revoir les questions que j'ai prévues,
17 parce que je pense que je ferais bien de réduire le nombre, je vous propose
18 de poursuivre nos travaux demain et de lever la séance pour aujourd'hui.
19 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous levons la séance et reprenons nos
20 travaux demain à 9 heures.
21 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
22 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, d'accord. On me rappelle que nous
23 avons une séance ou un volet d'audience supplémentaire demain après-midi
24 qui se tiendra de 14 heures 30 à
25 16 heures dans ce même prétoire.
26 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
27 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Aleksic, de combien de temps
28 estimez-vous avoir encore besoin pour en finir demain
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1 matin ?
2 M. ALEKSIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pourrais dire qu'il
3 s'agirait grosso modo d'une heure, mais je n'en suis pas sûr. Peut-être
4 aurais-je besoin de moins de temps.
5 M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien. Je vous remercie.
6 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le jeudi
7 7 octobre 2010, à 9 heures 00.
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