Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 6 décembre 2010

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 19.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour à tous dans le prétoire.

  6   Il s'agit de l'affaire IT-08-91-T, l'Accusation contre Mico Stanisic et

  7   Stojan Zupljanin.

  8   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien. Merci à tous.

  9   Pourrions-nous avoir les présentations.

 10   M. RINDI : [interprétation] Francesco Rindi, Joanna Korner et Crispian

 11   Smith pour l'Accusation.

 12   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Qu'en est-il de la Défense.

 13   M. ZECEVIC : [interprétation] Bonjour. Slobodan Zecevic, Slobodan Cvijetic

 14   et Jessica Lacey pour la Défense de Stanisic.

 15   M. ALEKSIC : [interprétation] Bonjour à tous. Aleksandar Aleksic pour M.

 16   Zupljanin.

 17   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien.

 18   Madame Korner, qu'avez-vous à dire ?

 19   Mme KORNER : [interprétation] J'ai quelques points à soulever avant

 20   l'entrée du témoin.

 21   Tout d'abord, M. Olmsted m'a demandé de faire une demande à propos de la

 22   liasse correspondant au Témoin ST-223 afin qu'elle soit versée au dossier

 23   car il a oublié de le faire la semaine dernière.

 24   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Certes, il a oublié de le faire, quelle

 25   négligence. Nous allons donc le verser au dossier.

 26   Mme KORNER : [interprétation] Merci.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela recevra la cote P01744.

 28   Mme KORNER : [interprétation] Je vous remercie.

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  1   Ensuite, jeudi, Me Zecevic, à brûle-pourpoint, sans me prévenir, a soulevé

  2   trois points, deux ou trois, trois il me semble. Le premier, je pense que

  3   je n'ai absolument rien à en dire parce que je n'ai pas très bien compris

  4   quelle était la demande de Me Zecevic par rapport à ces documents qui

  5   portent sur un témoin qui a déjà témoigné.

  6   Deuxième point, c'était quelque chose qui avait à avoir la communication.

  7   D'après lui, les autres équipes auraient reçu les documents qui sont

  8   essentiels en l'espèce, qui portent sur une personne appelée Pecanac, si je

  9   ne m'abuse.

 10   M. Hannis était assez surpris par cette information, mais moi,

 11   j'étais au courant, je tiens à le dire. Sachez que cette communication

 12   porte sur Srebrenica, et ça a été communiqué dans les affaires Perisic et

 13   Karadzic. Mais l'essentiel des documents, la plupart datent de 1995, mais

 14   il y en a aussi de 1994 et de 1993.

 15   Donc Me Zecevic semble dire que certains des documents sont

 16   pertinents en l'espèce. Mais je ne sais pas comment il l'a su. Tout

 17   d'abord, la communication est censée être assez secrète au sein des équipes

 18   qui reçoivent les documents. Je ne comprends pas comment il a eu vent de

 19   cette communication, mais puisqu'il le dit, il serait utile qu'il nous dise

 20   exactement quels sont les documents qui, selon lui, sont pertinents en

 21   l'espèce et les motifs pour lesquels il considère qu'ils sont pertinents.

 22   Ça nous permettrait de ne pas avoir à compulser tous les documents pour

 23   savoir exactement desquels Me Zecevic peut bien parler.

 24   Nous pouvons le faire nous-mêmes, certes, mais si Me Zecevic voulait

 25   nous les donner, ça serait mieux.

 26   Troisièmement, toujours et encore les exhumations. Donc je tiens à dire que

 27   je ne considère pas que la façon de faire soit correcte.

 28   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Ecoutez, j'aimerais peut-être vous

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  1   interrompre tout d'abord pour avoir la réponse de me Zecevic.

  2   Mme KORNER : [aucune interprétation]

  3   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Zecevic.

  4   M. ZECEVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je tiens d'abord à dire

  5   pour le compte rendu que j'ai averti M. Hannis de mon intention de faire

  6   cette demande. J'en ai informé le greffe ainsi que le greffier.

  7   Sachez que nous avons envoyé un courriel demandant que l'on nous

  8   communique les documents Pecanac, donc nos amis du bureau du Procureur sont

  9   parfaitement au courant de ce que je demande.

 10   Donc, Messieurs les Juges, sachez que je n'ai jamais vu les documents

 11   communiqués à propos de ce Pecanac. L'on m'a donné la liste d'une des

 12   équipes de la Défense -- bon, je n'avais pas les documents énumérés en

 13   détail, mais il y avait écrit, par exemple, document de l'ABiH, Sarajevo,

 14   1992. Et c'est ainsi que j'ai cru comprendre que certains de ces documents

 15   seraient très certainement pertinents pour nous en l'espèce. Donc

 16   j'attends. Je suis encore en attente. J'ai officiellement demandé au bureau

 17   du Procureur de nous donner ces documents, de nous communiquer ces

 18   documents en application de l'article du Règlement concerné, mais c'est ce

 19   que j'attends. Je n'ai pas fait grand-chose de plus.

 20   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

 21   Mme KORNER : [interprétation] Oui, il attend. Il attend, parce qu'à l'heure

 22   actuelle nous ne savons pas encore quels sont les documents qui, à son

 23   avis, seraient pertinents en l'espèce. Nous compulsons. Alors, je n'ai pas

 24   vraiment compris ce qu'a dit M. Zecevic. Il dit qu'il n'a pas vu la

 25   communication en tant que telle, mais il a vu un document de la Défense qui

 26   montre quelles sont les autres pièces communiquées. Or, une communication

 27   c'est normalement extrêmement confidentiel et cela porte uniquement sur une

 28   affaire, et pas sur toutes les affaires.

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  1   Revenons-en aux exhumations.

  2   M. Zecevic s'acharne toujours sur le même sujet. Donc il a essayé de

  3   revenir sur les arguments juridiques qu'il avait présentés. S'il a averti

  4   M. Hannis, il l'a peut-être fait, mais dans un volet extrêmement court.

  5   Nous en avons déjà parlé d'ailleurs, et je ne vais pas m'acharner là-

  6   dessus, mais sachez que lorsqu'il cite quoi que ce soit, il le cite de

  7   façon extrêmement exclusive. Il cite uniquement les documents hors

  8   contexte, et donc ça ne représente absolument pas sa position. C'est

  9   beaucoup trop vague.

 10   Donc je tiens à dire la chose suivante : que M. Zecevic se mette

 11   d'accord avec la base de données ou non, cela ne nous regarde pas. De toute

 12   façon, c'est à vous -- tout ceci porte sur M. Zecevic, donc c'est à vous de

 13   rendre une décision à propos de notre demande qui est d'ajouter cette base

 14   de données à notre liste. Alors, Me Zecevic peut ensuite argumenter à

 15   propos du poids à y donner, mais ce sera à vous de voir de toute façon.

 16   Si vous décidez de prendre en compte les arguments de Me Zecevic et

 17   si vous considérez que c'est à nous dans cette affaire, affaire de

 18   leadership, que c'est donc à nous de prouver que chaque entrée dans la base

 19   de données est correcte, nous le ferons. Nous nous y engageons. Mais si

 20   c'est ce que l'on va demander de nous, dans ce cas-là, il nous faudra

 21   appeler au moins quatre ou cinq témoins supplémentaires. Et, bien sûr, cela

 22   se fera en janvier, puisque la plupart de ces témoins sont à l'étranger,

 23   donc ils ne peuvent pas venir du jour au lendemain.

 24   Nous aimerions donc avoir une décision le plus rapidement possible à ce

 25   propos pour savoir où nous en sommes.

 26   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien. Nous savons parfaitement que

 27   c'est un sujet prioritaire. Cela dit, je ne peux pas vous promettre de

 28   rendre notre décision avant les vacances judiciaires d'hiver, mais je

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  1   n'exclus pas la possibilité que cela se fasse.

  2   Je vous remercie.

  3   Le témoin suivant de l'Accusation est-il prêt ?

  4   M. RINDI : [interprétation] Tout à fait. Et il ne bénéficie d'aucune

  5   mesure de protection.

  6   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  7   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bonjour, Monsieur. Pourriez-vous, s'il

  8   vous plaît, lire la déclaration solennelle qui est sur le carton que vous

  9   passe l'huissier.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 11   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 12   LE TÉMOIN : OSMAN SELAK [Assermenté]

 13   [Le témoin répond par l'interprète]

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Veuillez vous asseoir.

 15   Vu la façon dont vous avez répondu jusqu'à présent à ce que je vous ai

 16   demandé, il semble que vous m'entendez dans une langue que vous comprenez.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 18   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bien, bien. Bonjour et bienvenu à ce

 19   Tribunal. Je tiens tout d'abord à vous dire que la déclaration solennelle

 20   que vous venez de faire vous expose à une sanction pénale si vous décidiez

 21   de faire un faux témoignage, car sachez que dans notre Règlement ceci est

 22   prévu.

 23   Vous avez été cité au titre d'une procédure rapide qui est permise par les

 24   articles de notre Règlement de procédure et de preuve, et donc, fort

 25   heureusement, vous devriez en avoir terminé avec votre déposition dès la

 26   fin de la première séance de cette audience de l'après-midi. Mais j'ai une

 27   question à poser à la Défense.

 28   Savez-vous de combien de temps vous aurez besoin pour votre contre-

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  1   interrogatoire ?

  2   Maître Zecevic.

  3   M. ZECEVIC : [interprétation] Nous n'aurons pas besoin de plus d'une heure.

  4   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien. Monsieur Aleksic.

  5   M. ALEKSIC : [interprétation] Entre 30 à 40 minutes. Tout dépendra, bien

  6   sûr, des questions posées par mon éminent confrère, Me Zecevic.

  7   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Très bien.

  8   Donc, au vu de cet échange, vous savez maintenant combien de temps durera

  9   votre contre-interrogatoire. L'Accusation, qui vous a cité à comparaître, a

 10   déclaré qu'elle en aurait pour à peu près 45 minutes pour vous interroger

 11   dans le cadre de leur interrogatoire principal. D'habitude dans ce Tribunal

 12   nous siégeons en séances d'une heure et demie entrecoupées par des pauses.

 13   Tout d'abord, des pauses qui sont nécessaires pour pouvoir changer les

 14   bandes sur lesquelles les débats sont enregistrés. Et c'est pour permettre

 15   aussi à tous les participants en ce Tribunal de se reposer un peu. Les

 16   pauses sont de 20 minutes. Sachez que si, à un moment ou à un autre, vous

 17   avez besoin d'une pause, vous n'avez qu'à nous faire signe et nous ferons

 18   une pause.

 19   Pourriez-vous nous donner votre nom, s'il vous plaît.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'appelle Osman Selak.

 21   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Quelle est votre date de naissance

 22   et quelle est votre appartenance ethnique ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis né le 20 mai 1935. Et je suis bosnien,

 24   donc un Musulman de Bosnie.

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Quel est votre métier ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis officier de carrière, colonel, mais je

 27   suis à la retraite.

 28   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie.

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  1   Monsieur Rindi, c'est à vous.

  2   Interrogatoire principal par M. Rindi : 

  3   M. RINDI : [interprétation] Je vais commencer par lire un résumé très court

  4   de la déposition de ce témoin.

  5   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui.

  6   M. RINDI : [interprétation] Osman Selak, un Musulman de Bosnie, était

  7   soldat de métier dans la JNA de 1955 au 10 juillet 1992. En 1992, il était

  8   colonel et était chargé de la logistique pour la zone de commandement de

  9   Banja Luka. Le 27 mai 1992, le colonel Selak a participé à une réunion au

 10   poste de commandement avancé de Stara Gradiska, en Croatie. A cette réunion

 11   se trouvaient le colonel Vaso Tepsic, le colonel Dragan Marcetic et le

 12   général Momir Talic. Le colonel Marcetic a rendu compte du fait suivant :

 13   800 personnes avaient trouvé la mort à Kozarac ce jour-là et d'autres

 14   avaient été prisonniers. Lorsqu'il a entendu cela, le général Talic a

 15   regardé le colonel Selak, qui était le seul Musulman de Bosnie présent, et

 16   s'est tourné vers Marcetic pour dire : Vous voulez dire que 80 personnes

 17   [comme interprété] ont été tuées. C'est l'information que vous deviez

 18   envoyer à l'état-major principal. Le colonel Selak, par la suite, a appris

 19   qu'il n'y avait pas eu beaucoup de résistance armée à Kozarac et que le

 20   but, en fait, de l'attaque était de nettoyer la zone de tous ces non-

 21   Serbes.

 22   Q.  [interprétation] Monsieur le Colonel Selak, avez-vous été cité dans

 23   l'affaire Tadic les 4 et 5 juin 1996 ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Avez-vous témoigné dans l'affaire Brdjanin les 15, 16, 17, 20, 21, 23

 26   et 24 juin 2003 ?

 27   R. Oui.

 28   Q.  Avez-vous aussi témoigné dans l'affaire Milosevic les 12 et 13 juin

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  1   2003 ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Et avez-vous aussi témoigné dans l'affaire Krajisnik le 24 mai 2005 ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Colonel Selak, avez-vous pu relire votre déposition dans l'affaire

  6   Brdjanin ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Avez-vous étudié les passages de ce témoignage portant sur, tout

  9   d'abord, votre éducation et sur l'attaque sur Kozarac à la fin mai 1992 ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Si on vous posait les mêmes questions sur ce sujet aujourd'hui, y

 12   répondriez-vous de la même façon ?

 13   R.  Oui, je ne changerais rien. Je répondrais exactement comme j'ai répondu

 14   précédemment.

 15   Q.  Vous avez témoigné pour dire que vous aviez servi dans les rangs de la

 16   JNA de 1955 à 1992. Vous avez dit que vous avez passé votre poste à un

 17   autre officier le 10 juillet 1992. Avez-vous décidé de quitter l'armée de

 18   façon volontaire, de votre propre chef ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous avez décidé de quitter

 21   l'armée à ce moment-là ?

 22   R.  Ecoutez, je faisais partie de la JNA, qui, officiellement, était

 23   opérationnelle jusqu'au 18 mai 1992. A ce moment-là, la VRS a été créée en

 24   Bosnie-Herzégovine. Or, je ne voulais pas être versé dans les rangs de

 25   cette armée-là.

 26   Le 19 mai 1992, j'ai envoyé une demande de mise à la retraite, je

 27   l'ai envoyée à Belgrade. La décision de ma mise à la retraite a été prise

 28   par l'état-major principal à Belgrade.

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  1   Donc je suis resté à mon poste jusqu'au 10 juillet 1992, c'est-à-dire

  2   jusqu'à ce que la procédure administrative soit totalement terminée, et

  3   ensuite j'ai donc quitté mon poste.

  4   Q.  Colonel Selak --

  5   M. ZECEVIC : [interprétation] Désolé. Page 10, ligne 7, je crois que le

  6   témoin a dit qu'il avait quitté son poste, or en anglais, cela n'est pas

  7   consigné.

  8   M. RINDI : [interprétation]

  9   Q.  Vous nous dites que vous êtes d'appartenance ethnique bosnienne, donc

 10   un Musulman de Bosnie. Avez-vous rencontré des problèmes au sein de la VRS

 11   du fait de votre appartenance ethnique ?

 12   R.  Oui, il y avait des problèmes. Malheureusement aussi pour le général

 13   Adzic, qui était chef de l'état-major principal. A l'une des réunions il

 14   m'a appelé Turc, alors que je ne suis pas Turc. Le général Uzelac et le

 15   commandant du corps -- du Corps de Banja Luka, ainsi que moi avions reçu la

 16   mission de traiter la mission en Krajina, et il a dit : Uzelac, tu

 17   t'occuperas des Serbes, et Selak, il s'occupera des Turcs. C'est ainsi

 18   qu'il m'a traité en m'associant à cette communauté, alors que je ne suis

 19   absolument pas Turc. Il y a eu d'autres problèmes par la suite en ce qui

 20   concerne mon poste un peu plus tard. En fait, sachez que, de toute façon,

 21   la situation était difficile.

 22   Q.  Vous dites que vous avez rencontré des problèmes au sein de la VRS du

 23   fait de votre appartenance ethnique. Mais ces problèmes ont-ils eu une

 24   influence quelconque sur la décision que vous avez prise de quitter l'armée

 25   ?

 26   R.  Mais oui. En février 1992, un groupe pour la coopération avec les

 27   Nations Unies a été formé pour le territoire de Bosnie-Herzégovine, de

 28   Croatie et de Serbie, et j'ai été nommé chef de ce groupe à Banja Luka.

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  1   Mais le commandement du corps a envoyé les documents à l'état-major

  2   principal déclarant que ce n'est pas à moi d'avoir ce poste du fait de mes

  3   opinions politiques, et j'ai été remplacé le 18 mars, même pas un mois

  4   après avoir été nommé. Le Tribunal dispose de ce document d'ailleurs, et je

  5   l'ai déjà montré dans l'affaire Milosevic. Je ne l'ai pas avec moi. Il est

  6   dans ma chambre d'hôtel. Mais si vous voulez, je peux vous le montrer. Mais

  7   le Tribunal dispose de ce document aussi.

  8   Q.  Monsieur Selak, dans l'affaire Brdjanin, vous avez décrit cette réunion

  9   à laquelle vous avez participé le 27 mai 1992, où l'on a abordé l'attaque

 10   de Kozarac. Vous avez dit qu'avant cette réunion vous n'étiez pas du tout

 11   au courant de cette attaque.

 12   R.  En effet, je n'avais pas été mis au courant, alors que je commandais la

 13   base logistique, qui approvisionnait toutes les unités dans la région de la

 14   Krajina de Bosnie, dans la zone du 1er et du 2e Corps. Or, j'étais

 15   complètement en dehors de là-bas. Je ne savais pas ce qui se passait à

 16   Kozarac et à Prijedor, alors que le général Talic, quelques jours

 17   précédemment, avait annoncé qu'il s'attendait à des problèmes à Zozarac et

 18   à Prijedor. Un peu plus tard, lorsque j'ai réfléchi, je me suis rendu

 19   compte que tout ceci n'était que les étapes préparatoires qui allaient

 20   aboutir au génocide que nous connaissons tous.

 21   Q.  Qui vous a donné les détails sur l'attaque de Kozarac ?

 22   R.  Le colonel Vaso Tepic et moi-même avons participé à un briefing avec le

 23   général Talic, qui était le commandant du corps et dont le poste de

 24   commandement avancé était à Stara Gradiska, en Croatie. Avant la guerre, il

 25   s'agissait d'une prison.

 26   Le colonel Dragan Marcetic était aussi là, et qui était officier de garde

 27   au commandement du corps ce jour-là. Il nous a briefés sur ce qui s'était

 28   passé ce jour-là dans la zone de responsabilité du corps. Voilà ce qu'il a

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  1   dit : Général, aujourd'hui, à Kozarac, 800 personnes ont été tuées et 1 200

  2   ont été arrêtées.

  3   Mais à ce moment-là, alors qu'il prononçait ces paroles, le général Talic

  4   s'est tourné vers moi, parce que j'étais le seul Musulman dans la salle, et

  5   spontanément, il a réagi, il s'est rendu compte qu'il avait fait une erreur

  6   en se tournant vers moi. Ensuite, il a tourné son regard vers Marcetic et

  7   les autres et il a dit : Je pense que vous voulez dire que 80 personnes ont

  8   été tuées; c'est ça qu'il va falloir faire remonter à l'état-major

  9   principal. Ce document est aussi ici au Tribunal. Et j'en ai une copie

 10   d'ailleurs.

 11   Sachez malheureusement qu'il y a eu beaucoup plus de morts que cela. Même

 12   aujourd'hui on n'a pas encore retrouvé tous les corps de toutes ces

 13   personnes qui venaient de Kozarac et de Prijedor. On recherche encore un

 14   certain nombre de dépouilles.

 15   Q.  Colonel Selak, vous nous avez dit que vous avez appris qu'un plus grand

 16   nombre de personnes ont été tuées à Kozarac par rapport à ce qui avait été

 17   dit dans le cadre de la réunion. Alors, quand est-ce que vous avez appris

 18   exactement ce qui s'était véritablement passé à Kozarac et comment l'avez-

 19   vous appris ?

 20   R.  Malheureusement, après le 27 mai, on a commencé à assister à un

 21   transfert en masse, transfert forcé des Croates et des Musulmans de ces

 22   régions de Prijedor et de Kozarac, et ce, à bord de wagons par voie ferrée.

 23   C'était également à bord de camions que la population était transférée. On

 24   a exigé des gens qu'ils remettent de l'argent et qu'ils abandonnent leurs

 25   biens immobiliers pour pouvoir être transférés de Kozarac et de Prijedor.

 26   On a exigé d'eux qu'ils signent une déclaration de renonciation à leurs

 27   biens --

 28   M. KRGOVIC : [interprétation] Je m'oppose à ceci, Messieurs les Juges. Quel

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  1   est l'intérêt de cette réponse ? Ce n'est pas une réponse à la question

  2   posée.

  3   M. RINDI : [interprétation]

  4   Q.  Colonel, je voudrais vous poser la question suivante : vous venez de

  5   nous dire ce que vous avez appris quant aux événements survenus après

  6   l'attaque lancée contre Kozarac. Mais de qui avez-vous appris tous ces

  7   détails ?

  8   R.  Aussi bien pendant la guerre qu'après la guerre, j'ai appris ceci de

  9   personnes qui avaient survécu et qui ont survécu précédemment parce qu'ils

 10   ont payé pour pouvoir être transférés. Ils ont survécu, mais ils avaient

 11   perdu de nombreux membres de leurs familles, et c'est alors qu'ils m'ont

 12   raconté cela.

 13   Malheureusement, Messieurs les Juges, on dispose de déclarations et de

 14   documents concernant un autobus où 194 personnes avaient été transférées en

 15   direction de Travnik --

 16   Q.  Colonel Selak, je voudrais juste vous interrompre quelques instants.

 17   Vous nous avez dit avoir parlé à des survivants de cette attaque, leur

 18   avoir parlé personnellement, et avoir appris auprès d'eux ces détails. Mais

 19   avez-vous eu l'occasion de parler avec un ou plusieurs de vos collègues des

 20   forces armées concernant les détails de cette attaque ? Je me réfère à la

 21   période s'étendant après la réunion du 27 mai 1992.

 22   R.  Oui. J'ai discuté avec mes collègues. Il s'agissait du colonel Tepsic,

 23   du colonel Mesud Hasotic et il y avait encore quelqu'un d'autre. Je

 24   n'arrive pas à me rappeler son nom. J'ai contacté celui qui, à l'époque,

 25   était commandant, le commandant Zeljaja, qui ensuite était devenu

 26   lieutenant-colonel, parce qu'il était responsable directement de tout cela.

 27   Et il n'a pas voulu me répondre. Il a simplement haussé les épaules. Il

 28   était officier commandant de la 343e Brigade de Prijedor à l'époque. Il

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  1   était directement en charge du commandement. Il était un participant

  2   direct.

  3   Q.  En dehors des conversations que vous avez eues avec les survivants et

  4   avec vos collègues de l'armée concernant ces événements de Kozarac, est-ce

  5   que vous vous rappelez avoir parlé de cette attaque avec qui que ce soit

  6   d'autre ?

  7   R.  J'ai parlé avec Muharem Krzic de Banja Luka, et aussi avec feu l'imam

  8   Halilovic de Banja Luka, qui avait une connaissance exacte de la situation

  9   des événements, qu'il m'a communiquée, parce qu'en fait, il était en

 10   relation avec les survivants de Prijedor et de Kozarac. Il communiquait de

 11   façon assez étroite avec eux.

 12   Il y avait aussi M. Adil Medic, qui vivait à Banja Luka et qui était

 13   originaire de Sanski Most. Il savait ce qui s'était passé là-bas aussi.

 14   M. RINDI : [interprétation] Je voudrais que l'on affiche à l'écran le

 15   document numéro 3644 de la liste 65 ter, s'il vous plaît.

 16   Q.  Colonel, je voudrais que vous preniez connaissance du document qui est

 17   affiché en face de vous. Lisez-le et dites-moi lorsque vous aurez terminé.

 18   R.  J'ai fini.

 19   Q.  Avez-vous jamais vu ce document au préalable, avant de le consulter

 20   maintenant dans le prétoire ?

 21   R.  C'est la première fois que je vois ce document, Messieurs les Juges. En

 22   tout cas, parmi la masse de documents que j'ai eu l'occasion de consulter,

 23   je ne me rappelle pas ce document précis.

 24   En tout cas, le contenu de ce document n'est pas exact. Les informations et

 25   les chiffres qu'il fournit, notamment concernant les civils tués, ne sont

 26   pas exacts. Notamment au point numéro 3, l'effectif des Bérets verts n'est

 27   pas de 1 500 à 2 000 hommes. Ceci est inexact. Je parle de Kozarac.

 28   Q.  Colonel, vous venez de nous dire que ce document est erroné quant à

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  1   l'effectif qui est ici cité, effectif des Bérets verts participant aux

  2   combats à Kozarac.

  3   Mais à votre connaissance, combien d'hommes des Bérets verts avaient-

  4   ils participé aux combats à Kozarac ?

  5   R.  Messieurs les Juges, la notion de Bérets verts est synonyme d'ABiH, en

  6   fait. La région entourant Kozarac, qui se trouve dans la municipalité de

  7   Prijedor, hébergeait la 343e Brigade motorisée de la JNA, disposant de plus

  8   de 2 500 hommes.

  9   Il y avait une autre brigade, la Brigade de Kozara, et en plus de

 10   cela, il y avait également des unités de volontaires. Et si l'on prend en

 11   compte les armes détenues par les citoyens avant la guerre, il faut dire

 12   que la police avait des listes très précises des armes que possédaient les

 13   civils; le type d'armes, la quantité d'armes, même s'il s'agissait de

 14   simples fusils de chasse. Mais de la frontière croate jusqu'à Gradiska, en

 15   passant par Banja Luka, il y avait des unités de la JNA qui étaient

 16   déployées. Par conséquent, aucune communication qui aurait permis

 17   d'approvisionner ces personnes en armes n'était possible.

 18   L'approvisionnement en armes était impossible.

 19   Je parle en qualité de militaire de métier. On peut vérifier très

 20   facilement ce que je viens de dire, parce que toutes les voies étaient

 21   bloquées. L'armée qui se retirait de Croatie et de Slovénie distribuait en

 22   masse des armes aux Serbes, si bien que des individus se procuraient des

 23   armes auprès des Serbes. La JNA a distribué plus de 50 000 armes, et le SDS

 24   a été impliqué. A ce sujet, un document existe. Les armes, les gens se les

 25   procuraient sur le marché noir. Il y avait peut-être 50 à 70 personnes qui

 26   étaient impliquées dans cela, parce qu'il y avait une obligation légale de

 27   ramener les armes à la police, et ceux qui n'obtempéraient pas étaient

 28   harcelés.

Page 18114

  1   L'objectif était de nettoyer complètement Kozarac des Bosniens. Même

  2   chose pour Prijedor et Sanski Most. La cellule de Crise de Sanski Most a

  3   exigé que tous les Croates et Musulmans quittent la région. Donc ce

  4   document est une manipulation.

  5   Q.  Colonel, reportez-vous au paragraphe numéro 4, point numéro 2 du même

  6   document. Il est indiqué que 80 à 100 Bérets verts ont été tués et

  7   qu'environ 1 500 ont été capturés. Est-ce que, d'après vous, il s'agit là

  8   de chiffres à peu près exacts quant au nombre de tués à Kozarac ?

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Monsieur Rindi --

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi.

 11   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui. Compte tenu de la réponse

 12   précédente du témoin à l'égard de ce document, où souhaitez-vous en venir

 13   avec cette question ?

 14   M. RINDI : [interprétation] Monsieur le Président, j'essaie d'établir

 15   quelles connaissances le témoin avait de l'attaque de Kozarac.

 16   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, mais vous pouvez lui poser la

 17   question directement, sans vous référer au document.

 18   M. RINDI : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] S'il vous plaît, puis-je répondre à votre

 20   question concernant les tués ?

 21   Lors de cette réunion chez le général Talic, le colonel Marcetic a déclaré

 22   officiellement que 800 hommes avaient été tués ce jour-là. Donc ceci a

 23   abouti à la rédaction de ce rapport, qui ne parle que de 80 morts environ.

 24   Et c'est donc un mensonge.

 25   J'ai ici dans cette sacoche mon carnet de notes original dans lequel

 26   j'ai consigné exactement le rapport fait par le colonel Marcetic chez le

 27   général Talic lors de cette réunion. Ici, ce que nous lisons, c'est quelque

 28   chose de complètement différent, à savoir que 80 à 100 hommes auraient été

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  1   tués. Malheureusement, c'est faux.

  2   M. RINDI : [interprétation]

  3   Q.  Merci. Colonel, avez-vous ensuite appris quelles étaient les

  4   forces armées qui s'étaient lancées dans cette attaque contre Kozarac ?

  5   R.  Oui. La 343e Brigade motorisée y a participé. La 6e Brigade de Kozarac

  6   participait également, tout comme les unités de volontaires constituées par

  7   le SDS, ainsi que la police de Prijedor.

  8   Q.  Savez-vous quelles étaient les armes utilisées par l'armée dans cette

  9   attaque ? Savez-vous si des pièces d'artillerie lourde ont été employées

 10   pendant cette attaque ?

 11   R.  Oui. Des pièces d'artillerie terrestre, des véhicules de transport

 12   blindés, des chars, des mortiers, et, bien entendu, toute la gamme des

 13   armes d'infanterie, du simple fusil automatique au fusil mitrailleur, ont

 14   été utilisés. Outre les soldats de l'armée, la population locale serbe

 15   ainsi que la police locale ont également participé.

 16   Q.  Colonel Selak, vous avez évoqué les unités de l'armée ayant participé à

 17   cette attaque. Mais à votre connaissance, y avait-il aussi au sein de ces

 18   unités des officiers n'appartenant pas au groupe ethnique serbe, je parle

 19   des unités qui ont participé à l'attaque ?

 20   R.  Je n'ai pas entendu dire qu'il y ait eu un seul cas au sein de cette

 21   343e Brigade de Kozarac, un seul cas d'officier qui n'ait pas été Serbe.

 22   Pour ce qui est des unités de volontaires, qui étaient des unités

 23   paramilitaires, il n'y en avait certainement pas.

 24   Je ne sais pas s'il y avait le moindre officier ou sous-officier qui

 25   n'ait pas été un Serbe. A ma connaissance. Mais je ne crois pas qu'il y ait

 26   pu y en avoir, parce que s'il y avait eu des officiers non-Serbes, ils

 27   auraient essayé d'empêcher ce génocide auquel ils prenaient part. 

 28   Q.  A votre connaissance, pour quelle raison les unités qui ont participé à

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  1   l'attaque ne comptaient-elles aucun officier n'appartenant pas au groupe

  2   ethnique serbe ?

  3   R.  Il y avait un ordre de l'état-major de la VRS au terme duquel tous les

  4   officiers croates et musulmans devaient être écartés des unités. J'ai moi-

  5   même était menacé dans les journaux et dans les médias. On m'indiquait que

  6   je devais quitter l'armée.

  7   Parce que l'armée serbe n'avait confiance ni en les Croates ni en les

  8   Musulmans, il n'aurait pas été logique qu'il y ait eu des Croates et des

  9   Musulmans dans leurs rangs. Je maintiens cela.

 10   Q.  Colonel Selak, savez-vous quel a été le sort de la population civile

 11   après l'attaque lancée contre Kozarac ?

 12   R.  Oui, je le sais. La cellule de Crise de Prijedor a organisé le

 13   transfert de l'ensemble de la population, et cela s'est fait de différentes

 14   façons. Malheureusement, il y a eu des meurtres, des menaces, des

 15   extorsions d'argent liquide ou de bijoux et il y a eu des pressions pour

 16   que les gens signent des déclarations dans lesquelles ils renonçaient à

 17   leurs biens. Le plus souvent, c'est à bord de wagons de chemins de fer que

 18   les personnes étaient transportées vers Banja Luka, à bord d'autobus

 19   également. A bord d'un de ces autobus, 194 personnes ont été tuées à

 20   Koricanske Stijene, et ce, par la police qui les accompagnait. Ils ont tous

 21   été tués, tous les 194 qui étaient à bord de cet autobus. Donc il y a eu

 22   différentes façons de procéder, mais ce qui a été fait, c'est de nettoyer

 23   complètement Prijedor et Kozarac. Cependant, Sanski Most et d'autres

 24   localités de la région qui tombaient sous la responsabilité de Banja Luka

 25   ont connu un sort à peu près identique.

 26   Q.  Vous nous avez dit que c'était la cellule de Crise de Prijedor qui

 27   avait organisé le transfert de la population de Kozarac. Est-ce que vous

 28   savez quand ce transfert a eu lieu ?

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  1   R.  De mai 1992 à environ octobre ou novembre de la même année. Dans ce qui

  2   était la politique officielle de la Republika Srpska, des pourcentages ont

  3   été énoncés, c'étaient les pourcentages de la population qui était

  4   autorisée à rester. Par exemple, à Banja Luka, de 50 000 Musulmans

  5   bosniens, on avait autorisé à peine 2 000 d'entre eux à rester.

  6   M. KRGOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, ce n'est pas une réponse

  7   à la question posée. Le témoin n'est pas en train de répondre à la question

  8   qui lui a été posée. C'est déjà la troisième ou la quatrième fois.

  9   M. RINDI : [interprétation]

 10   Q.  De qui avez-vous appris ce qui s'est passé à Kozarac après l'attaque ?

 11   R.  En dehors de ce qui a été évoqué à la réunion chez le général Talic,

 12   c'est le mufti de Banja Luka qui m'a informé, ainsi que Muharem Krzic et

 13   Adil Medic, eux aussi m'ont informé, ainsi que des habitants de Banja Luka

 14   qui avaient des membres de leurs familles vivant à Prijedor. C'était une

 15   municipalité voisine. J'ai entendu également un certain nombre de choses de

 16   la part de Serbes qui n'étaient pas d'accord avec cette façon de procéder,

 17   de liquider ceux qui avaient été des voisins.

 18   Q.  Savez-vous ce qui est advenu des maisons appartenant aux habitants de

 19   Kozarac après l'attaque ?

 20   R.  Oui, je le sais. Aucune maison n'est restée intacte. Il y a eu

 21   destruction, incendie volontaire et pose d'explosifs également dans ces

 22   maisons. J'étais à Kozarac en 1995, et lorsque je repense à ce que j'ai vu,

 23   j'en ai encore la chair de poule. Aucune maison n'est restée debout.

 24   Q.  Merci. Savez-vous quelles unités se sont livrées à la destruction de

 25   ces maisons que vous venez d'évoquer ?

 26   R.  C'est la population serbe locale qui s'en est chargée, ainsi qu'une

 27   partie des soldats de l'armée et des policiers également, mais avec

 28   l'approbation de la police. Parce que c'était là la réalisation de

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  1   l'objectif consistant à transférer de force l'ensemble de la population

  2   musulmane. Donc, sous le contrôle des organes du pouvoir et de la cellule

  3   de Crise, avec la participation de la 343e Brigade motorisée et de la

  4   police de Prijedor.

  5   Q.  Colonel, si vous vous fondez sur votre expérience militaire, comment

  6   décririez-vous l'attaque lancée contre Kozarac ? Est-ce que c'était une

  7   attaque à grande échelle ou une attaque plus modeste ?

  8   R.  Kozarac comptait de 4 000 à 5 000 habitants. Elle était encerclée par

  9   la 343e Brigade, qui disposait de 2 500 hommes, par une brigade de la

 10   Défense territoriale qui disposait également d'environ 2 000 hommes et par

 11   des unités paramilitaires également constituées par le SDS. Par conséquent,

 12   Kozarac était complètement encerclée. Sa population ne pouvait pas sortir à

 13   l'insu ni sans l'approbation des forces l'encerclant. Tout été verrouillé,

 14   jusqu'à la forêt environnante. Toutes les sorties étaient bloquées.

 15   Q.  Et décririez-vous ceci comme une attaque à grande échelle ?

 16   M. KRGOVIC : [interprétation] Je soulève une objection. C'est une question

 17   directrice. Ce témoin n'a jamais été à Kozarac ni n'a jamais parlé à aucune

 18   des personnes qui y avaient été présentes.

 19   M. RINDI : [interprétation] Messieurs les Juges, le témoin a indiqué avoir

 20   parlé avec des survivants de l'attaque de Kozarac. Il a également indiqué

 21   avoir parlé de cette attaque lancée contre Kozarac avec des collègues de

 22   l'armée. De plus, c'est un militaire de métier qui est tout à fait en

 23   mesure de nous proposer une estimation quant à la question de savoir si

 24   c'était une attaque à une grande échelle ou une attaque d'ampleur plus

 25   réduite.

 26   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Bien entendu, la question telle que vous

 27   la posez semble être directrice, parce que la notion d'une attaque à grande

 28   échelle est relative. Alors, je vous suggère d'être plus prudent dans la

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  1   formulation de votre question si vous essayez d'obtenir une réponse que le

  2   témoin est qualifié à donner.

  3   M. RINDI : [interprétation]

  4   Q.  Colonel, d'un point de vue militaire, comment décririez-vous l'attaque

  5   qui a été lancée contre Kozarac ?

  6   R.  Si j'avais été le commandant de la 343e Brigade, je pense que cela

  7   aurait représenté une mission assez facile pour moi, parce qu'il n'y avait

  8   pas de résistance. Il n'y avait pas de forces armées adverses qui auraient

  9   pu s'opposer à l'accomplissement de ma mission.

 10   Q.  A quel échelon de la hiérarchie militaire la décision consistant à

 11   lancer cette attaque devait-elle normalement être   prise ?

 12   R.  Au niveau du commandement du corps, en accord avec la cellule de Crise

 13   de Banja Luka et celle de Prijedor, et ceci, dans le but de mettre en œuvre

 14   cette stratégie de nettoyage ethnique. Les missions étaient donc confiées à

 15   l'armée, mais aussi aux autorités civiles de la région.

 16   Q.  Vous nous avez dit que les maisons des habitants de Kozarac avaient été

 17   détruites. Etes-vous au courant du type d'armes qui avait été utilisé pour

 18   détruire ces maisons ?

 19   R.  Non, je ne sais pas. Mais il n'était même pas nécessaire d'utiliser des

 20   armes. Il suffisait de mettre le feu à ces habitations. Il y avait des

 21   pillages, des destructions. Et le pillage c'est la première chose qui s'est

 22   passée d'ailleurs. On a commencé par piller l'intérieur des maisons, et

 23   puis ensuite elles ont été détruites, mises à feu. Donc il n'était pas du

 24   tout nécessaire d'utiliser la moindre arme, ni pièce d'artillerie.

 25   C'était la police et la population locale qui s'en chargeait, avec la

 26   coopération des unités paramilitaires et de l'armée.

 27   Q.  Merci.

 28   M. RINDI : [interprétation] Ceci met un terme à mon interrogatoire

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  1   principal, Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

  3   Maître Aleksic.

  4   M. ALEKSIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   Contre-interrogatoire par M. Aleksic : 

  6   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

  7   R.  Bonjour.

  8   Q.  Vous avez redit aujourd'hui avoir déposé devant ce Tribunal dans quatre

  9   affaires, l'affaire Brdjanin, l'affaire Krajisnik, l'affaire Tadic et

 10   l'affaire Milosevic.

 11   R.  Oui.

 12   Q.  En plus de cela, vous avez fourni à l'Accusation un certain nombre de

 13   déclarations. Je pense quelles sont au nombre de cinq. Et la première de

 14   ces déclarations, vous l'avez donnée dans le cadre d'un entretien qui

 15   s'étalait entre le 23 et le 25 septembre, puis qui s'est prolongé le 30

 16   septembre 1995 et qui a repris également du 29 au 31 janvier 1996. A cette

 17   occasion, il vous a été donné lecture de cette déclaration dans une langue

 18   que vous comprenez et vous l'avez signée.

 19   Est-ce que vous vous en souvenez ?

 20   R.  Oui, je sais effectivement que j'ai donné des déclarations dans cette

 21   période.

 22   Q.  Après cette première déclaration, vous avez fourni une déclaration du

 23  10 au 23 janvier et le 13 juillet de l'an 2000. Ensuite, le 1er mars de l'an

 24   2001, le 22 août de l'an 2001, et enfin le 22 juillet 2004.

 25   A chaque fois, la procédure a été la même, à savoir, à la fin de

 26   votre déclaration, un interprète vous traduisait cela dans votre langue,

 27   vous signiez et puis vous confirmiez que la déclaration comportait tout ce

 28   que vous aviez dit au mieux de vos souvenirs, n'est-ce pas ?

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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Dans l'affaire Brdjanin, et Krajisnik également, me semble-t-il,

  3   pendant vos entretiens préparatoires préalables à votre témoignage, vous

  4   avez eu l'occasion de compléter ces déclarations et d'apporter des

  5   corrections lorsqu'il y a eu des coquilles ou d'autres petites erreurs.

  6   R.  Il y a eu des entretiens, mais est-ce que j'ai apporté des

  7   modifications à ces déclarations, ça, je ne peux pas le dire après tout ce

  8   temps qui s'est passé. Mais ces déclarations sont signées, ma signature est

  9   bien là, donc voilà.

 10   Q.  S'agissant de la réunion qui s'est tenue au poste de commandement

 11   avancé, ce jour-là vous vous êtes rendu à Gradiska de Banja Luka, en

 12   compagnie du colonel Tepsic, et c'était pour vous rendre à un briefing que

 13   vous y êtes allés, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Et je suppose que vous êtes revenus le même jour ou le lendemain, que

 16   vous êtes revenus à Banja Luka ?

 17   R.  Le même jour, oui.

 18   Q.  D'après vous, en plus du colonel Tepsic, vous auriez eu l'occasion

 19   d'évoquer ces événements également avec le colonel  Hasotic ?

 20   R.  Oui, il était l'assistant chargé du moral dans le Corps d'armée de

 21   Banja Luka. Il s'appelait Mesud Hasotic.

 22   Q.  Et M. Hasotic, j'en conclus, était au siège du corps, au commandement ?

 23   R.  Oui, oui, oui. Il était l'assistant du chef, il avait la charge du

 24   moral -- l'assistant du commandant, excusez-moi.

 25   Q.  Nous avons vu un rapport de combat que le corps a adressé à l'état-

 26   major principal, et d'après ce que vous nous avez dit, vous n'aviez pas eu

 27   l'occasion de le voir précédemment. Vous nous avez dit également ce que

 28   vous en pensiez. Mais vous aviez la charge de la base arrière en votre

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  1   qualité de commandant de celle-ci, vous ne rédigiez pas des rapports à

  2   l'attention de l'état-major principal.

  3   R.  Non, j'étais directement placé sous le commandement de l'état-major

  4   principal. Donc le commandement envoyait ses rapports, et moi, j'envoyais

  5   les miens.

  6   Q.  Autrement dit, vous ne rédigiez pas personnellement les ordres ou

  7   autres documents relatifs aux combats au nom du corps d'armée.

  8   R.  Non, non.

  9   Q.  Aujourd'hui, vous avez également dit -- en fait, pourriez-vous me dire

 10   pour commencer si vous savez si les colonels Tepsic et Marcetic sont

 11   toujours en vie; en savez-vous quelque chose ?

 12   R.  Hélas, le colonel Tepsic est mort dans un accident de voiture pendant

 13   la guerre. Et le colonel Marcetic, pour autant que je sache, il est en vie.

 14   Mais cela fait plus de dix ans que je n'ai pas de contact avec lui, et je

 15   ne sais pas non plus où il réside aujourd'hui, s'il est toujours en vie

 16   comme je le pense.

 17   Q.  Vous avez également dit aujourd'hui que vous avez parlé avec M. Krzic

 18   et avec le mufti Halilovic de ces événements.

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Et ces deux hommes, ils ont résidé à Banja Luka pendant la période qui

 21   nous intéresse ?

 22   R.  Oui. Excusez-moi, Krzic, il se déplaçait beaucoup, mais il vivait à

 23   Banja Luka.

 24   Q.  Et M. Krzic, il était à la tête d'un des comités du SDA à Banja Luka ?

 25   R.  Il en a été membre, mais je ne sais pas exactement quelles sont les

 26   fonctions qu'il a exercées. Il était membre du parti, mais à quel niveau

 27   exactement de la hiérarchie, ça, je ne sais pas.

 28   Q.  Pour résumer, ni vous-même, ni les colonels Tepsic, Hasotic, Marcetic,

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  1   ni M. Krzic, ni le mufti Halilovic, pendant cette période-là, donc aucun de

  2   ces hommes avec qui vous avez eu l'occasion de parler ne s'est trouvé à

  3   Kozarac le jour en question, je ne parle que de ces hommes dont je viens de

  4   citer les noms ?

  5   R.  Ecoutez, le colonel Marcetic, il faut l'exclure de ce groupe. Il

  6   travaillait au commandement du corps, c'était un officier d'active. Je ne

  7   suis pas certain qu'il ne s'y soit pas rendu, parce qu'il avait la charge

  8   de planifier les opérations.

  9   Q.  Et cette réunion du 27 mai au poste de commandement avancé, ce

 10   briefing, le long de votre filière, est-ce que vous avez dû en rendre

 11   compte ? Est-ce que vous avez informé un supérieur hiérarchique de cela ?

 12   R.  Non, officiellement, je ne l'ai pas fait, car j'étais subordonné à

 13   l'état-major principal de la VRS. Eux, ils recevaient les rapports du corps

 14   d'armée. Donc il n'y avait pas lieu que j'informe qui que ce soit parmi mes

 15   supérieurs en empruntant cette voie hiérarchique, donc je ne l'ai pas fait,

 16   je ne l'ai pas fait officiellement je veux dire.

 17   M. ALEKSIC : [interprétation] Très brièvement, est-ce qu'on peut avoir la

 18   pièce 09135 sur la liste 65 ter. C'est le premier intercalaire de la

 19   Défense Zupljanin.

 20   Q.  Mon Colonel, j'ai un exemplaire que je peux vous remettre. C'est la

 21   première déclaration que vous avez donnée, et je vais vous interroger sur

 22   un seul paragraphe. Page 9 en anglais, et ce sera la fin de la page 10 en

 23   B/C/S, et également cela déborde sur la page 11.

 24   M. ALEKSIC : [aucune interprétation]

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous m'avez dit page 10.

 26   M. ALEKSIC : [interprétation]

 27   Q.  Oui. C'est vers la fin de la page 10, début de la page 11. Pour ceux

 28   qui suivent en anglais, ce sera la page 9, je le précise pour les Juges et

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  1   les autres participants.

  2   Donc là, vous nous dites comme suit, entre autres :

  3   "Ainsi, il se peut que la 343e Brigade ait réalisé tous les plans et

  4   se soit contentée de les soumettre pour aval au commandant du corps

  5   d'armées. Dans ce cas-là, le général Talic devait se contenter d'appeler le

  6   général Arsic pour lui communiquer le fait que le plan a été approuvé." Et

  7   puis vous dites : "Dans le cadre de l'attaque lancée sur Kozarac, a pris

  8   part la 343e Brigade."

  9   Et puis vous précisez que son effectif se montait à 3 000, voire 3

 10   500 militaires, deux unités de la Défense territoriale au préalable

 11   mobilisées et rattachées à la 343e Brigade, ainsi que quelques unités

 12   paramilitaires. S'agissant des munitions qu'avaient à leur disposition les

 13   unités, le corps d'armée comportait trois dotations en munitions, trois

 14   dotations de combat. Puis vous précisez de quoi il s'agit plus en détail.

 15   Est-ce que vous vous souvenez d'avoir déclaré cela à la fin de

 16   l'année 1995 et au début de l'année 1996 ? Vous avez signé cela avant le

 17   premier procès où vous êtes venu déposer. Je pense que c'était le procès de

 18   M. Tadic.

 19   R.  Oui. Mais je ne vois pas ce qui vous pose problème. La 343e

 20   Brigade était une brigade motorisée et c'était l'une des brigades les plus

 21   puissantes faisant partie du Corps de Krajina. Et puis l'unité de la

 22   Défense territoriale de Kozara qui a été mobilisée, elle y a pris part

 23   également, puis il y avait les unités paramilitaires, unités de volontaires

 24   mises sur pied par le SDS en recrutant dans la population du cru. Je ne

 25   vois pas ce qui pourrait poser problème ici.

 26   Q.  Donc vous maintenez cette déclaration que vous avez donnée à

 27   l'époque, à savoir en 1995-1996 ?

 28   R.  Oui. Si je puis juste ajouter une chose, Messieurs les Juges.

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  1   C'est-à-dire que l'ordre pour l'attaque est venu du commandement du

  2   corps, et la brigade a exécuté l'ordre qui lui a été donné, et puis

  3   d'autres unités qui y ont pris part. Donc toutes les unités en plus de la

  4   brigade qui y ont participé.

  5   Car le commandant de la brigade n'avait pas le droit d'attaquer où

  6   que ce soit si le commandant du corps d'armée n'en avait pas été informé au

  7   préalable.

  8   Q.  Vous avez une très grande expérience militaire, donc vous devez savoir

  9   comment les choses se passent normalement, mais vous n'avez pas vu,

 10   s'agissant de cet événement très concrètement, quelle a été l'idée de cette

 11   attaque, pour ainsi dire, et vous n'avez pas non plus vu sa réalisation ?

 12   R.  Non, je n'ai pas vu. Mais le commandant de la brigade aurait été

 13   sanctionné s'il avait agit contrairement aux intentions ou volontés du

 14   commandant du corps. Donc tout a dû être planifié, prévu. L'objectif devait

 15   être clair, à savoir nettoyer ethniquement Kozarac et Prijedor de la

 16   population croate et bosnienne.

 17   Q.  J'aimerais savoir si vous savez que quelques jours avant ces événements

 18   de Kozarac, il y a eu un incident, on a attaqué une colonne militaire ?

 19   D'abord, à Hambarine, il y a eu un incident qui s'est produit, et puis deux

 20   jours plus tard, à Jakupovici, on a attaqué une colonne de la JNA. Est-ce

 21   que vous êtes au courant de cela ?

 22   R.  Oui, je suis au courant de cela. Je sais qu'un soldat s'est fait tuer

 23   là. Mais vous savez, les incidents se produisent. Au poste de contrôle, il

 24   y a pu avoir des incidents également. Il y avait des barrages qui ont été

 25   dressés. Il y avait pas mal de révolte dans la population car les gens ne

 26   pouvaient pas se déplacer, et là, il y a eu un incident. Mais cela ne

 27   justifie pas le fait d'abattre plusieurs milliers de personnes qui

 28   appartiennent à un certain groupe ethnique.

Page 18127

  1   Q.  Je vous remercie, Monsieur le Témoin.

  2   M. ALEKSIC : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges. Je

  3   n'ai plus de questions pour ce témoin.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] J'aurais une question. Page 27, ligne

  5   18, le témoin a répondu :

  6   "Le commandant du corps aurait été tenu responsable s'il avait fait quoi

  7   que ce soit sans l'approbation ou sans informer le commandant du corps."

  8   Alors, là, de toute façon, il y a eu une erreur.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Le commandant de la brigade, je veux dire.

 10   S'il avait fait quoi que ce soit sans en informer le commandant du corps.

 11   C'est peut-être un lapsus. Donc le commandant Arsic, qui était le

 12   commandant de la 343e Brigade, c'est de lui que j'ai parlé.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Je vous remercie.

 14   M. ZECEVIC : [interprétation] Est-ce que je peux prendre la parole ?

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, je vous en prie.

 16   Contre-interrogatoire par M. Zecevic : 

 17   Q.  [interprétation] Monsieur, avant votre départ à la retraite, vous aviez

 18   passé 40 ans dans les rangs de la JNA, n'est-ce pas ?

 19   R.  Non. J'ai commencé à travailler en 1958, après avoir eu mon diplôme à

 20   Zagreb, et c'est en 1992 que j'ai demandé de partir à la retraite. Donc mes

 21   années d'ancienneté se montent à 37.

 22   M. ZECEVIC : [interprétation] Est-ce que l'on peut afficher le document

 23   1D04471, s'il vous plaît. C'est à l'intercalaire 5.

 24   M. RINDI : [interprétation] Une autre correction. Ligne 28 du compte rendu

 25   d'audience -- excusez-moi, page 28, ligne 24 : "J'ai présenté ma demande de

 26   départ à la retraite en 1952." Je pense que c'est une erreur.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je voulais dire le 19 mai 1992. 1992.

 28   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci.

Page 18128

  1   M. ZECEVIC : [interprétation] 1D044771, s'il vous plaît. Il s'agit de

  2   l'intercalaire 5 dans le jeu de documents de la Défense.

  3   Q.  Monsieur, nous voyons là le document qui atteste de votre départ à la

  4   retraite. Il porte la date du 7 octobre 1992.

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Est-ce que c'est bien le document dont nous avons parlé qui vous

  7   concerne ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Le document se lit comme suit vers la fin, il est dit que vous avez été

 10   un officier d'active jusqu'au 30 septembre 1992.

 11   Et plus loin, que d'après les renseignements concernant l'individu en

 12   question dans les archives militaires, le dénommé aurait passé 40 années,

 13   huit mois et trois jours dans les rangs de la JNA.

 14   R.  Messieurs les Juges --

 15   Q.  Lorsque je vous ai demandé si c'était bien après avoir passé 40 années

 16   dans l'armée que vous êtes parti à la retraite, en fait, je pensais à toute

 17   la bonification à laquelle vous avez eu droit en tant qu'officier d'active.

 18   Vous y aviez droit, n'est-ce   pas ?

 19   R.  Oui, tout à fait. Justement, il ne s'agit pas de 40 années calendaires.

 20   Q.  Pour chaque année d'ancienneté, pour les 12 mois passés dans l'armée en

 21   tant qu'officier d'active, on vous comptait quelques journées ou quelques

 22   mois de plus, n'est-ce pas ?

 23   R.  Non, non. Monsieur le Président, dans l'armée populaire yougoslave, les

 24   officiers et les sous-officiers qui occupaient des postes de commandement,

 25   eux, ils avaient droit à cette bonification jusqu'à trois mois. Puis dans

 26   les commandements et les officiers qui travaillaient également dans les

 27   établissements éducatifs de la JNA et qui commandaient au niveau des

 28   brigades et des corps d'armée, eux, ils n'avaient pas droit à cette

Page 18129

  1   bonification. Moi, j'ai travaillé à l'académie militaire de Banja Luka

  2   pendant plus de 15 ans, et ça, ça ne m'a pas été majoré. Les officiers et

  3   les sous-officiers qui commandaient, eux, ils ont eu droit à cette

  4   majoration. Moi, je n'y pas eu le droit.

  5   Q.  Oui, très bien. Mais pendant une partie de votre carrière on vous a

  6   bonifié les années d'ancienneté, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui, c'est vrai.

  8   M. ZECEVIC : [interprétation] Je demande que ce document soit versé au

  9   dossier.

 10   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Mais il me semble que le témoin vient

 11   d'expliquer qu'il ne faisait pas partie de cette catégorie.

 12   M. ZECEVIC : [interprétation] Mais ma première question a été de savoir

 13   s'il reconnaissait bien qu'il s'agissait là de la décision du départ à la

 14   retraite le concernant --

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, tout à fait.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce 1D0400.

 17   M. ZECEVIC : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur, pendant votre carrière, comme vous venez de nous le dire,

 19   vous avez occupé des postes différents dans les rangs de la JNA, n'est-ce

 20   pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Dites-moi, en 1990 et en 1991, quels sont les postes que vous avez

 23   occupés ?

 24   R.  J'étais le commandant de la base logistique de Banja Luka, de la 993e

 25   Base logistique de Banja Luka.

 26   Q.  Donc c'est le poste que vous avez occupé jusqu'à votre départ à la

 27   retraite en 1992 ?

 28   R.  Oui. Sauf le mois que j'ai passé à la tête du groupe chargé de la

Page 18130

  1   coopération avec les forces onusiennes, mais là, j'ai été remplacé parce

  2   que je n'étais pas sur la droite ligne politiquement.

  3   Q.  Monsieur, en 1991, pendant le conflit qui a éclaté sur le territoire de

  4   la République de Croatie, votre base logistique, la base que vous

  5   commandiez à ce moment-là, elle y a joué un certain rôle, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui. On fournissait le soutien logistique au 5e Corps de la Krajina, à

  7   la 10e Division de Partisans, à toutes les unités de la Krajina bosniaque

  8   et en partie les territoires au-delà de la frontière, au-delà de la rivière

  9   Sava, donc là où il y a eu des opérations en Croatie.

 10   M. ZECEVIC : [interprétation] Je veux vous montrer un document, 1D04-4814,

 11   l'intercalaire 16, s'il vous plaît.

 12   Q.  Monsieur, nous avons ici une proposition qui s'adresse au secrétariat

 13   fédéral chargé de la Défense nationale et qui se lit comme suit : Vu les

 14   mérites extraordinaires, vu ses qualités, ses capacités, son courage au

 15   niveau de la direction du commandement de l'unité lors de la conduite des

 16   missions dans une situation de guerre, nous proposons que les officiers

 17   d'active comme suit - et vous, vous figurez au point 2 - reçoivent des

 18   décorations.  Vous, c'est une décoration spécifique qui vous a été accordée

 19   ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Donc c'est bien vous-même que concerne cette proposition ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Si j'ai bien compris, vos supérieurs, à ce moment-là, se félicitent de

 24   votre manière de mener à bien vos missions, de votre travail. Ils

 25   considèrent même que c'est de manière tout à fait exceptionnelle que vous

 26   travailliez à ce moment-là ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Alors, ce document porte la date du 3 décembre 1991.

Page 18131

  1   R.  Oui. Mais cette proposition n'a pas été adoptée.

  2   Q.  Mais c'est le général Nikola Uzelac, votre commandant, qui propose cela

  3   ?

  4   R.  Je n'étais pas subordonné au commandement du corps. J'étais subordonné

  5   au commandement de l'armée. Je sais qu'il a formulé cette proposition et je

  6   sais qu'elle n'a pas été adoptée. Est-ce vu l'évolution de la situation, le

  7   changement, je ne sais pas. Je n'étais plus là par la suite.

  8   M. ZECEVIC : [interprétation] Je demande le versement de ce document.

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] A quelle fin, Maître  Zecevic ? On

 10   propose qu'il soit décoré, et cette décoration ne lui a pas été accordée.

 11   Nous avons sa propre réponse au compte rendu d'audience. Est-ce que nous

 12   avons véritablement besoin de ce  document ?

 13   M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous entends, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous allons faire une pause. Je pense

 15   que le moment s'y prête bien.

 16   M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, merci beaucoup.

 17   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Nous reprendrons dans 20 minutes.

 18   [Le témoin quitte la barre]

 19   --- L'audience est suspendue à 15 heures 43.

 20   --- L'audience est reprise à 16 heures 08.

 21   M. RINDI : [interprétation] Je tiens à dire, pour le compte rendu

 22   d'audience, que M. Gramsci Di Fazio vient de rejoindre les rangs du bureau

 23   du Procureur dans ce prétoire.

 24   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Rindi.

 25   [Le témoin vient à la barre]

 26   M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous remercie.

 27   Q.  Monsieur le Témoin, vous étiez commandant de la base logistique, donc

 28   j'imagine que vous êtes au courant de cet ordre pris par la présidence de

Page 18132

  1   la RSFY datant de la fin des années 1990 et portant sur l'évacuation des

  2   équipements et des armes qui se trouvaient dans les entrepôts de la TO.

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Cet ordre a été adopté par la présidence de la RSFY, et étant donné que

  5   chaque TO de chaque république était subordonnée à la présidence de la

  6   république dont elle dépendait, les présidences de ces républiques avaient

  7   adopté une décision similaire qui s'appliquait au territoire de ladite

  8   république; c'est bien cela ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Cette décision portant sur le retrait des armes et des équipements des

 11   entrepôts de la TO a été appliquée sur la totalité du territoire de

 12   l'ancienne République fédérative de Yougoslavie, n'est-ce pas ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Très bien.

 15   M. ZECEVIC : [interprétation] Montrons donc au témoin la pièce 1D04-4791,

 16   s'il vous plaît. Il s'agit d'une pièce que vous trouverez à l'intercalaire

 17   11.

 18   Q.  En attendant l'affichage du document, j'aimerais vous demander,

 19   Monsieur le Témoin, si vous savez si cette décision était appliquée sur le

 20   territoire de la République socialiste de Serbie ?

 21   R.  Oui. Je n'avais pas le document, mais je sais que cette décision a été

 22   appliquée. Je n'ai pas de documents pour corroborer cet état de faits, mais

 23   je pense vraiment que cela a été mis en application. Quant à savoir si elle

 24   a été mise en application totalement, ça, je n'en suis pas sûr.

 25   Q.  Il s'agit donc de la réponse du ministre de la Défense à une question

 26   posée par l'un des députés de l'assemblée nationale de la République serbe,

 27   donc 26 février 1991, question portant sur le retrait des armes et des

 28   équipements. Et le ministre de la Défense nationale de l'époque en

Page 18133

  1   République de Serbie, le vice-amiral Miodrag Jokic, a rédigé cette réponse

  2   faite par le ministère de la Défense, et il est écrit : La décision de

  3   retrait des armes et des équipements des entrepôts de la Défense

  4   territoriale n'a été adoptée que pour des raisons de sécurité

  5   exclusivement.

  6   R.  Je ne vois pas le document.

  7   Q.  C'est à la page 3, mais j'imagine que vous n'avez pas encore vu ce

  8   document avant de venir ici ?

  9   R.  Non.

 10   Q.  C'est pour cela que je vous en donne lecture. J'aimerais savoir si

 11   cette décision de la présidence a bel et bien été prise pour des raisons de

 12   sécurité.

 13   R.  Non.

 14   Q.  Mais lorsque je parle de "décision" prise, je parle de la décision

 15   prise visant à retirer les armes et les munitions des entrepôts de la TO et

 16   de toute autre installation dépendant de la TO, donc de la Défense

 17   populaire généralisée.

 18   La décision de retraite est expliquée par des problèmes de sécurité,

 19   n'est-ce pas ?

 20   R.  Non. Puis-je m'expliquer ?

 21   Q.  Oui, mais rapidement.

 22   R.  C'était pour retirer les armes de Bosnie-Herzégovine, de Croatie et de

 23   Slovénie, parce que la situation en Yougoslavie était telle qu'on

 24   s'attendait à un démantèlement, à un effondrement total du pays. C'est pour

 25   cela que les TO se sont vu retirer leurs armes, pour que les Républiques de

 26   Slovénie, de Croatie et de Bosnie-Herzégovine ne puissent pas se défendre

 27   si elles le devaient. On ne peut pas dire que ces armes ont été retirées

 28   des entrepôts de la TO pour des raisons de sécurité. C'est faux.

Page 18134

  1   Q.  Oui, mais ici, il est écrit que la même chose a été faite en Serbie, en

  2   République socialiste de Serbie.

  3   R.  Oui, mais les armes ont été retirées des entrepôts et remises dans les

  4   bases logistiques de la JNA. La JNA, ensuite, n'a distribué ces armes

  5   qu'aux Serbes lorsque la Yougoslavie a commencé à s'effondrer. C'est ça la

  6   raison d'ailleurs de cette décision, c'était pour empêcher les trois autres

  7   nations d'avoir accès à des armes.

  8   Q.  Veuillez, s'il vous plaît, répondre à mes questions et ne pas faire de

  9   discours.

 10   Vous aurez tout loisir de faire des commentaires plus tard. Je vous

 11   demandais si c'était en vigueur sur tous les territoires de la RSFY. Vous

 12   avez dit oui. Je vous ai montré un document qui montre que ceci a aussi été

 13   le cas en République socialiste de Serbie, et ensuite vous avez dit que ces

 14   armes avaient été transférées aux bases logistiques de la JNA depuis

 15   l'entrepôt de la TO.

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Il y aurait eu transfert d'armes sur tout le territoire de l'ex-

 18   Yougoslavie, depuis les entrepôts de la TO jusqu'aux bases logistiques de

 19   la JNA, et ceci s'est fait partout où cet ordre devrait être exécuté,

 20   n'est-ce pas ?

 21   R.  Non.

 22   Q.  Bien. Ecoutez ma question : des armes et des équipements militaires qui

 23   ont été retirés des entrepôts de la TO ont-ils été réintégrés dans les

 24   entrepôts et les bases de la JNA de l'époque ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Merci.

 27   M. ZECEVIC : [interprétation] Pourrions-nous montrer au témoin la pièce

 28   1D04-4798. A l'intercalaire 12.

Page 18135

  1   Q.  Voici ce que je vous affirme, Monsieur le Témoin : sur le territoire de

  2   Bosnie-Herzégovine, la décision de retirer les armes et les équipements

  3   militaires des entrepôts de la TO pour les réintégrer aux entrepôts de la

  4   JNA venait d'une décision de la présidence de la République socialiste de

  5   Bosnie-Herzégovine.

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et d'ailleurs c'est confirmé par le document que nous avons à l'écran;

  8   il s'agit d'un ordre signé par le général Milos Bajcetic ?

  9   R.  Oui, j'ai le document.

 10   Q.  C'est bien ce document-ci ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  La présidence de la RSFY, qui a pris cette décision au niveau de la

 13   fédération et ensuite au niveau de la Bosnie-Herzégovine -- c'est la

 14   présidence de la République socialiste de Bosnie-Herzégovine qui a rédigé

 15   ce même ordre que l'on a sous les yeux maintenant.

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Mais cette personne, que commandait-elle ? La TO ?

 18   R.  Oui, la TO de Bosnie-Herzégovine. Il s'agissait d'un général, le

 19   général Bajcetic.

 20   M. ZECEVIC : [interprétation] Je demande le versement de ce document.

 21   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Etant donné que ce témoin semble

 22   contester tout ce que vous lui proposez, il semble donc aussi contester le

 23   contenu. Cela dit, la pertinence de cet élément de preuve, au vu du

 24   contexte, est évidente.

 25   Quelle est votre position, Maître Zecevic ?

 26   M. ZECEVIC : [interprétation] Moi, je ne considère pas que le témoin remet

 27   en question la teneur même du document. Il confirme la teneur du document

 28   et il dit qu'il a d'ailleurs eu en main cet ordre, qui a été signé par le

Page 18136

  1   commandant de la TO à l'époque de la République socialiste de Bosnie-

  2   Herzégovine.

  3   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, j'ai fait un lapsus lorsque j'ai

  4   dit qu'il avait contesté la teneur. Mais il conteste quand même vos

  5   propositions.

  6   Le document recevra une cote et sera versé au dossier.

  7   M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous remercie.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il recevra la cote 1D00401.

  9   M. ZECEVIC : [interprétation]

 10   Q.  Dans votre zone de responsabilité d'une unité militaire, le commandant

 11   de cette unité doit délivrer des permis aux personnes qui ne sont pas

 12   membres de cette unité afin qu'elles puissent se déplacer, n'est-ce pas ?

 13   R.  Je ne comprends pas votre question.

 14   Q.  Dans la zone de responsabilité d'une unité militaire, le commandant de

 15   cette unité doit, entre autres choses, délivrer des permis aux individus

 16   afin que ces personnes puissent se déplacer.

 17   R.  Non.

 18   Q.  Très bien.

 19   M. ZECEVIC : [interprétation] Je vais vous montrer un autre document, le

 20   1D04-4801, que vous trouverez à l'intercalaire 13.

 21   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Avant de poursuivre, je tiens à

 22   dire qu'à la page 37, ligne 10, les propos qui sont attribués à Me Zecevic

 23   dans le compte rendu en anglais -- à propos de ce qu'il aurait dit

 24   lorsqu'il a demandé le versement au dossier de la pièce précédente sont, en

 25   fait, des commentaires qui devraient m'être attribués.

 26   [hors micro] Maître Zecevic, poursuivez.

 27   M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous remercie.

 28   Q.  J'ai un document sous la main en date du 26 juin 1992. Il s'agit

Page 18137

  1   d'un permis. On voit que c'est un permis qui a été signé par le général

  2   Momir Talic; permis délivré à une délégation afin que cette délégation

  3   puisse emprunter l'itinéraire Prijedor-Doboj-Prnjavor-Banja Luka; c'est

  4   bien cela ? C'est une délégation comprenant neuf personnes, et c'est un

  5   document qui vous avait été montré dans l'affaire Brdjanin ?

  6   R.  Oui. Puis-je répondre ?

  7   Q.  Oui, je vous en prie.

  8   R.  Il s'agit d'une délégation officielle. Mais les individus -- enfin, en

  9   ce qui concerne un commandant de corps, il n'a pas besoin d'avoir ce type

 10   de permis. Dans une zone d'opérations de combat où il y a des activités des

 11   militaires en cours, il faut que ce type de permis soit délivré, mais

 12   seulement dans les zones où il y a des combats, pas ailleurs, et le but

 13   est, bien sûr, d'épargner les vies humaines.

 14   Q.  Je vous remercie. J'ai fait une erreur. J'aurais dû être plus

 15   précis et parler de zones où il y avait des combats en cours. J'ai

 16   uniquement parlé de zones qui étaient sous la responsabilité d'une unité

 17   militaire. Je n'ai pas été assez précis. Je m'en excuse.

 18   Maintenant, vous avez parlé de l'adjoint du commandant en charge du

 19   moral des troupes et des activités de propagande, le colonel Hasotic, qui

 20   travaillait au sein du commandement du 5e Corps. Vous nous avez parlé,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui. 

 23   Q.  Je vais vous montrer un document en date du 21 avril 1992, signé

 24   par le colonel Hasotic. La pièce 1D04-4765. Vous trouverez cette pièce à

 25   l'intercalaire 4.

 26   M. ZECEVIC : [interprétation] Nous sommes prêts à montrer la page 2

 27   au témoin afin qu'il puisse voir la signature sur ce document.

 28   Q.  Voyez-vous la signature, adjoint du commandant chargé du moral et de la

Page 18138

  1   propagande, colonel Hasotic. Reconnaissez-vous sa signature ?

  2   R.  Je ne reconnais pas sa signature, mais je comprends de quoi il

  3   retourne.

  4   Q.  Il s'agit d'une lettre qui a été écrite le 21 avril 1992 - revenons à

  5   la page 1 - lettre dont le but est d'informer le commandement de la 2e

  6   Région opérationnelle à propos de la situation en Bosnie-Herzégovine. A la

  7   page 2, on parle de certains incidents. Vous nous avez dit que vous avez

  8   déjà vu ce document.

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Vous souvenez-vous qu'il y est fait mention d'une attaque des Bérets

 11   rouges et des forces spéciales du MUP, attaque de l'usine Pretis à Vogosca

 12   pendant la nuit -- ensuite, il y a eu aussi une attaque sur une usine

 13   militaire qui se trouvait à Igman le même jour. Vous vous en souvenez ?

 14   R.  Oui. Est-ce que je peux répondre ?

 15   Q.  J'ai d'abord à vous poser une question avant que vous ne répondiez. Le

 16   colonel Mesud Hasotic est un Musulman de Bosnie, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  En réponse à une question posée par un de mes éminents confrères, vous

 19   nous avez parlé de votre position en tant que membre de la VRS d'une

 20   appartenance ethnique différente. Vous nous avez parlé de la position qui

 21   était la vôtre jusqu'à ce que vous preniez votre retraite. Vous vous en

 22   souvenez avoir parlé de cela avec mon éminent confrère ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  A la page 3, point 5, dans ce document signé par M. Hasotic, j'aimerais

 25   attirer votre attention sur une chose. Dans ce paragraphe 5, on parle de la

 26   situation des militaires d'active musulmans et croates employés par la JNA

 27   lorsqu'ils se sont retrouvés en Bosnie-Herzégovine.

 28   R.  Oui.

Page 18139

  1   Q.  Il est bien écrit ici qu'ils sont traités exactement comme les

  2   Serbes, que leur statut n'a pas été modifié. Et ce M. Hasotic déclare aussi

  3   que ceux qui sont restés nous rendent très heureux et que c'est ainsi

  4   qu'ils doivent être traités dans tous les commandements et unités

  5   subordonnés.

  6   R.  Oui, je vois bien ce qui est écrit. Pourrions-nous passer à la page 1.

  7   Q.  Oui.

  8   M. ZECEVIC : [interprétation] Pourrions-nous revenir à la page 1 pour le

  9   témoin.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un document qui transmet des

 11   informations du commandement de la 2e Région militaire. Ça n'a pas été

 12   rédigé par le colonel Hasotic. Il relaie de l'information, et rien de plus.

 13   Il a tout recopié. On l'a obligé à le faire. Ce n'est absolument pas un

 14   document qui exprime son point de vue.

 15   M. ZECEVIC : [interprétation]

 16   Q.  Oui. Vous étiez subordonné directement au commandement de la région

 17   militaire.

 18   R.  Oui, de la 2e Région militaire de Sarajevo.

 19   Q.  Mais vous n'étiez pas subordonné au 5e Corps ?

 20   R.  Non.

 21   Q.  Donc votre commandement supérieur immédiat était le commandement de la

 22   2e Région militaire. Et vous dites que ce qu'écrit l'adjoint du commandant

 23   du corps, M. Hasotic, dans sa dépêche n'est pas la vérité; c'est ce que

 24   vous dites ?

 25   R.  Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. Je n'ai pas du tout dit qu'il ne

 26   disait pas la vérité. J'ai juste dit qu'il ne s'agissait pas d'un document

 27   -- qu'il n'exprimait pas ses propres opinions. Il a juste transféré des

 28   informations qui lui avaient été données par ses supérieurs. Il le dit

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  1   d'ailleurs : Nous vous transmettons par la présente les informations du

  2   commandement de la 2e Région militaire. C'est la première phrase, vous

  3   n'avez qu'à la lire.

  4   Q.  La hiérarchie c'est essentiel dans les forces armées, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui. C'est essentiel, en effet.

  6   Q.  Donc le commandement de la 2e Région, qui était votre commandement

  7   supérieur hiérarchique immédiat, tout comme le commandement du 5e Corps

  8   d'ailleurs, a déclaré ce qui suit : C'est le colonel Hasotic qui a transmis

  9   ces informations aux unités subordonnées du 5e Corps.

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Et vous essayez maintenant de nous dire que ce que votre commandement

 12   supérieur de la région militaire a déclaré dans ce document n'est pas vrai.

 13   R.  Je ne dis pas que ce n'est pas vrai. Je dis qu'il y a des parties qui

 14   ne sont pas vraies, parce qu'à l'époque, la JNA était totalement opposée à

 15   la République de Bosnie-Herzégovine. La JNA, elle oeuvrait pour la Grande-

 16   Serbie, et donc n'était du côté que d'une seule nation. Ce n'était plus une

 17   armée yougoslave. C'était une armée qui était devenue serbe.

 18   Q.  Je vous ai posé des questions bien précises à propos du point 5. Nous

 19   l'avons lu ensemble. Vous êtes en train de dire que le commandement de la

 20   région militaire déclare quelque chose qui n'est pas vrai dans ce message

 21   qui est transmis aux unités subordonnées ?

 22   R.  Oui, oui. Moi, je vous déclare que tout ce qui est écrit là n'est pas

 23   vrai.

 24   Q.  Vous avez une longue expérience au sein de la JNA. N'est-il pas vrai

 25   qu'il est essentiel de rendre compte de façon précise ?

 26   R.  Oui, c'est une obligation essentielle, et on peut être sanctionné si on

 27   ne rend pas compte de façon précise des événements. On encourt des

 28   sanctions disciplinaires.

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  1   Q.  Au début de l'audience de ce jour, vous vous êtes entretenu avec le

  2   Procureur à propos de vos fonctions en tant que commandant de la base

  3   logistique. Vous vous en souvenez ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Si j'ai bien compris, en tant que commandant, vous étiez tenu

  6   d'approvisionner et de ravitailler toutes les unités en Krajina bosniaque.

  7   Vous approvisionniez en armes, en équipement, en munitions, et cetera, et

  8   tout venait de votre base logistique ?

  9   R.  Oui, j'approvisionnais toutes les unités de la JNA.

 10   Q.  Et le 19 mai, lorsque la JNA s'est retirée --

 11   R.  Non, elle s'est retirée le 18 mai.

 12   Q.  Bon. Lorsque, le 18 mai, la JNA s'est retirée de Bosnie-Herzégovine et

 13   que la VRS a été créée, votre base logistique a perduré et a continué à

 14   ravitailler et à approvisionner en armes, en équipement et en munitions les

 15   unités de la VRS, n'est-ce pas ?

 16   R.  Je dois vous répondre, Messieurs les Juges.

 17   La JNA ne s'est pas retirée de Bosnie-Herzégovine. Elle a juste été

 18   rebaptisée. Au lieu de s'appeler JNA, elle a changé de nom et s'est appelée

 19   VRS. Toutes les unités qui se trouvaient dans cette zone ont juste été

 20   rebaptisées. Et ma base aussi a été rebaptisée. Elle est devenue la 14e

 21   Base logistique au lieu d'être, comme par le passé, la 932e Base

 22   logistique. Il n'y a pas une seule unité qui se soit retirée. En fait, ce

 23   sont des unités de Slovénie et de Croatie qui se sont retirées.

 24   Mme KORNER : [interprétation] Ecoutez, je ne vois pas du tout où nous

 25   voulons en venir. Je ne vois pas quelle est la pertinence à propos des

 26   faits jugés pour lesquels ce témoin est censé venir témoigner. Je comprends

 27   bien que ce contre-interrogatoire peut se poursuivre et peut peut-être

 28   arriver à une fin pertinente, mais pour l'instant, nous sommes à des années

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  1   lumières de Kozarac.

  2   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Zecevic.

  3   M. ZECEVIC : [interprétation] Je ne suis pas du tout d'accord avec mon

  4   éminente consoeur. Il faudrait qu'elle soit un peu patiente. Et, à la

  5   question suivante, vous verrez immédiatement le lien entre ma première

  6   question et le fait jugé à propos duquel ce témoin était cité et à propos

  7   duquel il doit parler.

  8   Ce n'est pas ma faute si des témoins ont tendance à être trop diserts

  9   lorsqu'ils répondent. Je n'ai pas voulu l'interrompre parce que je sais que

 10   les Juges de la Chambre n'aiment pas que l'on interrompe abruptement un

 11   témoin. C'est pour cela que je le laisse parler.

 12   Mme KORNER : [interprétation] Non, non, en fait, ça fait un moment que ça

 13   dure, mais il y a un document quand même qui lui a été présenté, et ce

 14   document, à mon avis, n'a pas grand-chose à voir avec le sujet pour lequel

 15   ce témoin est censé venir nous parler. Enfin, je dis ça au passage,

 16   Messieurs les Juges. C'est à vous de voir.

 17   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Madame Korner.

 18   Maître Zecevic, venez-en au fait. Vous savez que ce témoin est venu

 19   pour parler d'un fait jugé, donc venez-en au fait.

 20   M. ZECEVIC : [interprétation] Je m'y attelle.

 21   Q.  Monsieur le Témoin, pour toute opération de grande envergure ou toute

 22   offensive de grande envergure sur le territoire de la Krajina bosniaque, en

 23   tant que commandant de la base logistique chargée du ravitaillement et de

 24   l'approvisionnement, vous avez dû être mis au courant quand même ?

 25   R.  Oui, j'aurais dû être mis au courant, mais on m'a demandé d'assister à

 26   des réunions. On m'a convoqué 30 minutes avant les réunions, sans me

 27   prévenir de l'ordre du jour ou quoi que ce soit, je veux dire ma présence

 28   aux réunions avec le général Uzelac.

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  1   Q.  Oui, on vous appelait au dernier moment pour des réunions. Même si vous

  2   n'y étiez pas peut-être au dernier moment, sinon vous n'auriez jamais

  3   autorisé que des équipements ou des armes sortent de votre base logistique

  4   sans ordre écrit ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Donc, avant toute opération de grande envergure, vous aviez reçu un

  7   ordre écrit demandant l'approvisionnement de tant de munitions, tant

  8   d'équipement, et cetera, n'est-ce pas ?

  9   R.  Non, non. Puis-je m'expliquer ?

 10   Q.  Allez-y, mais soyez bref.

 11   R.  Voilà ce qui se passait : le corps d'armée avait trois dotations en

 12   munitions de combat et carburant. Il y avait trois kits de dotation

 13   différents qui étaient censés répondre à tout besoin opérationnel pour cinq

 14   à dix jours. Moi, on ne me faisait pas part des demandes individuelles.

 15   Nous ne répondions, en fait, qu'aux demandes de dotation en général.

 16   Q.  Oui. Vous avez parlé d'une réunion au cours de votre interrogatoire

 17   principal et au cours de votre contre-interrogatoire, cette réunion du 27

 18   mai 1992 avec le général Talic. Vous en avez parlé avec les deux parties

 19   que j'ai nommées, n'est-ce pas ?

 20   Pouvez-vous répondre ?

 21   R.  Oui. Mais répétez la question.

 22   Q.  Voici ma question : à deux reprises aujourd'hui, vous avez répondu à

 23   une question posée à la fois par l'Accusation et ensuite par la Défense de

 24   M. Zupljanin à propos de la réunion du 27 mai 1992, et votre réponse était

 25   que vous aviez bel et bien participé à cette réunion, n'est-ce pas ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Cette réunion était un briefing quotidien ?

 28   R.  C'était un briefing avec le commandant du corps, et j'y ai participé en

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  1   tant que commandant de la base logistique, pour être mis au courant à

  2   propos des besoins logistiques du corps, pour accélérer la transmission de

  3   l'information, pour que ça aille plus vite. C'est pour cela que l'on m'a

  4   demandé de participer à des briefings de ce type.

  5   Q.  Et des briefings de cette nature avaient eu lieu quotidiennement auprès

  6   du commandant de corps, indépendamment du fait que vous étiez convoqué ou

  7   non, n'est-ce pas ?

  8   R.  Je suppose que oui.

  9   Q.  Ces briefings quotidiens étaient faits par le colonel Marcetic, n'est-

 10   ce pas ?

 11   R.  Non. Le colonel Marcetic était à la tête de l'équipe chargée de

 12   recevoir les informations en provenance des unités subordonnées. Et le chef

 13   qui était à la tête de cette équipe changeait chaque jour. En fait,

 14   quotidiennement, il y avait une rotation de l'officier à la tête de cette

 15   équipe chargée de recevoir les informations au nom du commandement.

 16   Q.  Donc cette équipe de pilotage était partie du commandement du corps et,

 17   tous les jours, un nouvel officier était à la tête de cette équipe, n'est-

 18   ce pas ?

 19   R.  Oui. Et le titre exact était le chef de l'équipe de contrôle pour la

 20   journée en question.

 21   Q.  Et ce responsable recevait chaque jour les informations en provenance

 22   du terrain et il en informait le commandant de corps, n'est-ce pas ?

 23   R.  Non, pas du terrain. Pour être tout à fait précis, il recevait des

 24   informations des unités subordonnées.

 25   Q.  Quand je parlais "du terrain," je pensais aux unités subordonnées.

 26   R.  Oui, mais le terrain c'est une chose. Les unités, cela en est une

 27   autre. Les rapports qu'il recevait provenaient des unités.

 28   Q.  Donc toutes les informations que le colonel Marcetic vous a transmises

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  1   concernant les événements de Kozarac, c'était des informations que lui-même

  2   avait reçues du commandement de la 343e Brigade motorisée de Prijedor -

  3   enfin, c'est ce que j'imagine - n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Dans son rapport quotidien, cette 343e Brigade informe le corps d'armée

  6   de l'attaque qui a été lancée et des affrontements ayant eu lieu le 27 mai

  7   1992 dans la région de Kozarac au sens large.

  8   R.  Je suppose que oui. Bien qu'il n'ait rien dit quant à la constitution

  9   des camps de Keraterm, Trnopolje, Omarska, et cetera, qui, entre-temps,

 10   avaient été mis en place et où se trouvaient détenues plus de 5 000

 11   personnes.

 12   Q.  En substance, le colonel Marcetic faisait état auprès de vous, mais

 13   également auprès du commandement d'informations que lui-même avait reçues

 14   des unités subordonnées.

 15   R.  Non, pas à moi, mais au général Talic. Quant à moi, j'étais présent, et

 16   c'est bien que j'ai consigné dans mon carnet de travail ce qu'il disait.

 17   Mais il faisait rapport au général Talic quant aux événements de la

 18   journée, et l'une des unités concernées était également celle qui était à

 19   Kozarac. J'ai tout ceci noté dans mes carnets, ainsi que les différentes

 20   questions au sujet desquelles il rendait son rapport à ce moment-là.

 21   Q.  Cette façon que vous avez eue de consigner dans votre journal ces

 22   différents éléments nous donne une vision qui confirme à peu près ce que

 23   l'on peut lire dans le document numéro 3644 de la liste 65 ter, n'est-ce

 24   pas ?

 25   M. ZECEVIC : [interprétation] Est-ce que vous pourriez l'examiner.

 26   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 27   M. ZECEVIC : [interprétation]

 28   Q.  Un instant.

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  1   R.  Excusez-moi. Est-ce que c'est le document qui est à l'écran ?

  2   Q.  Non, il va s'afficher dans quelques instants.

  3   M. ZECEVIC : [interprétation] Merci. Voilà, c'est le bon document.

  4   Q.  Monsieur le Témoin, vous le voyez ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Vous avez dit aujourd'hui que c'est la première fois que vous le voyez,

  7   mais en fait, je suis à peu près sûr qu'il vous a déjà été présenté dans

  8   l'affaire Brdjanin et que vous l'avez commenté.

  9   R.  Je ne m'en souviens pas.

 10   Q.  Et c'est même Mme Korner qui vous a interrogé quant à ce document. Mais

 11   il n'y a là rien de controversé. Vous voyez que dans ce document, aussi

 12   bien que dans votre journal, si vous vous en souvenez, il n'y a pas de

 13   raison pour moi de le présenter maintenant, on trouve consigné de façon

 14   identique qu'il y avait 1 500 hommes faits prisonniers dans la région du

 15   village de Kozarac au sens large. Est-ce bien la même chose que ce que vous

 16   avez consignée dans votre journal ? Vous vous en souvenez, n'est-ce pas ?

 17   R.  Qu'il y avait eu 1 500 prisonniers ?

 18   Q.  Oui.

 19   R.  Non. Ici, ce qui est indiqué c'est que l'effectif des Bérets verts

 20   comprenait en tout 1 500 à 2 000 hommes.

 21   Q.  Non, Monsieur le Témoin, au point numéro 4, deuxième tiret, on trouve :

 22   Du côté des Bérets verts, 80 sont tués et environ 1 500 prisonniers.

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Et si je me souviens bien, dans votre journal, on peut lire qu'il y

 25   avait 800 morts et 1 500 blessés, n'est-ce pas ?

 26   R.  Messieurs les Juges, s'il vous plaît, voici l'original de mon carnet de

 27   travail tout à fait officiel, où j'ai consigné, à la date du 27 mai, les

 28   informations dont a fait état le colonel Marcetic. C'est consigné dans ce

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  1   carnet. Alors que ce que nous avons sous les yeux dans ce document n'est

  2   pas exact. Talic a ordonné qu'on informe l'état-major général que 80

  3   personnes avaient été tuées, et c'est le rapport qu'on a ici.

  4   Ce que je vous demande de bien vouloir examiner, c'est ce carnet de

  5   travail officiel qui est le mien et que j'ai gardé pendant plusieurs années

  6   et qui permet de démontrer de façon tout à fait argumentée que ce que nous

  7   avons sous les yeux ici est erroné. Est-ce que je peux présenter la page

  8   correspondante ?

  9   Q.  Absolument, allez-y. Il n'est pas nécessaire que vous nous montriez

 10   cette page. Parce que je ne remets pas en cause le contenu de votre

 11   journal.

 12   R.  Oui, mais c'est moi qui remets en cause le contenu du document à

 13   l'écran.

 14   M. RINDI : [interprétation] Messieurs les Juges, avec votre permission, ce

 15   document figure dans la liasse 92 ter correspondant à ce témoin.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà la bonne page.

 17   M. ZECEVIC : [interprétation] Pourrions-nous peut-être avoir la référence

 18   correspondante afin de l'afficher.

 19   M. RINDI : [interprétation] Absolument. C'est le numéro 6348 de la liste 65

 20   ter. Excusez-moi, c'est 3648, et non pas 6348.

 21   M. ZECEVIC : [interprétation] Donc numéro 3648, s'il vous plaît.

 22   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] C'est l'intercalaire 16 ?  [hors

 23   micro] Non, excusez-moi. Il n'y a pas d'intercalaire correspondant.

 24   M. RINDI : [interprétation] C'est l'intercalaire 13, Messieurs les Juges.

 25   M. ZECEVIC : [interprétation] Excusez-moi, je n'ai pas préparé ceci parce

 26   que je ne m'attendais pas à ce que le témoin remette en question le contenu

 27   de son journal. Si le Procureur peut-être peut nous fournir la référence

 28   exacte afin que nous affichions à l'écran cette page précise de son

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  1   journal.

  2   M. RINDI : [interprétation] Messieurs les Juges, le témoin ne remet pas en

  3   question le journal.

  4   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je n'ai pas compris -- j'ai cru

  5   comprendre que le témoin opposait le contenu de son journal aux

  6   informations figurant dans ce rapport dont il affirme qu'elles sont

  7   erronées.

  8   M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Président. Mais

  9   lorsque je lui ai donné lecture de ce qui figurait dans son journal, il a

 10   dit que : Non, examinons le document précis dont il s'agit. Apparemment il

 11   y a un malentendu -- enfin, je ne sais pas. Je voudrais essayer de jeter la

 12   lumière sur ceci. Je ne voudrais pas laisser le témoin dans une situation

 13   où tout ceci n'est pas clair, où on ne sait pas clairement à quoi on fait

 14   référence.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Voila, c'est ce document.

 16   M. ZECEVIC : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce que c'est la page correspondante de votre

 18   journal ?

 19   R.  Oui. C'est la page 223. Date du 27 mai dans mon journal.

 20   Q.  A cet endroit il est dit, à Kozarac, en raison d'un bloc placé sur la

 21   route, 800 morts, 1 200 prisonniers.

 22   R.  Oui. Malheureusement, il y a eu davantage de tués. Ces chiffres-ci ne

 23   sont pas exacts non plus.

 24   Q.  Donc vous voulez dire que ce chiffre de 800 morts, lui non plus, il

 25   n'est pas exact ?

 26   R.  Non, en effet. Malheureusement, le chiffre correspondant aux morts est

 27   bien plus élevé.

 28   Q.  Et vous dites que ceci s'est produit ce jour-là, le 27 mai, n'est-ce

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  1   pas ?

  2   R.  Oui. Le colonel Marcetic en a fait état au commandant de corps, parce

  3   que ce jour-là c'est lui qui était à la tête de l'équipe de pilotage.

  4   Q.  Et vous vous rappelez qu'il a dit précisément 800 morts, avant que le

  5   général Talic ne corrige cela ?

  6   R.  Mais pourquoi, Maître, aurais-je ici consigné des chiffres différents

  7   de ceux qu'il a indiqués ? C'est le général Talic qui a dit : Informe

  8   l'état-major général que 80 personnes ont été tuées. Et le document

  9   correspondant, le rapport du commandement de corps où il est indiqué 80

 10   morts, est déjà en la possession du présent Tribunal, Messieurs les Juges.

 11   Je l'ai vu dans l'affaire Brdjanin.

 12   Q.  Monsieur le Témoin, ce document que vous évoquez, à savoir le rapport

 13   du commandement du corps, veuillez vous repencher de nouveau sur le

 14   document numéro 3644 de la liste 65 ter.

 15   Monsieur le Témoin, voici ce que j'affirme : nous avons ici

 16   précisément affaire à ce document dont vous parliez. C'est le rapport du

 17   commandement du corps, et dans ce rapport, au point numéro 4, il est

 18   indiqué, au deuxième tiret : Du côté des Bérets verts, 80 à 100 morts et

 19   environ 1 500 prisonniers.

 20   Est-ce que nous avons bien là ce rapport du commandement de corps ?

 21   R.  Non, non. Le rapport du commandement du corps destiné à l'état-major

 22   général était très bref. Il se présentait comme une dépêche. Cela ne

 23   correspond pas à ce document. Par ailleurs, ce document n'est pas exact,

 24   parce que pour cette date-là, plus de 1 000 personnes avaient été tuées. Et

 25   le colonel Marcetic, parce que moi j'étais présent, a minoré le chiffre des

 26   tués, et ensuite il s'est vu ordonné d'indiquer un chiffre de 80. Alors, je

 27   peux peut-être essayer de retrouver le document correspondant. Peut-être

 28   que dans un délai de quelques jours je peux le retrouver, le préparer pour

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  1   vous l'envoyer. Et je vous affirme que ce document est déjà en la

  2   possession du présent Tribunal, parce que je l'ai vu dans l'affaire

  3   Brdjanin.

  4   Q.  Monsieur le Témoin, pour autant que nous le sachions, et compte tenu

  5   des éléments que nous avons reçus de l'Accusation, c'est précisément ce

  6   document que vous avez pu examiner et qui vous a été présenté par Mme

  7   Korner.

  8   M. ZECEVIC : [interprétation] Je voudrais encore une fois qu'on fasse

  9   défiler vers le bas la page qui est affichée afin que le témoin puisse

 10   réexaminer le cachet portant réception du document et la signature

 11   correspondante.

 12   Q.  Monsieur le Témoin, je vous affirme que nous avons sous les yeux le

 13   rapport du 5e Corps d'armée que vous avez examiné dans l'affaire Brdjanin

 14   et au sujet duquel Mme Korner vous a directement demandé, je cite sa

 15   question -- vous voyez ici qu'il a été réceptionné, ce document, au sein de

 16   l'état-major général avant à 21 heures ou 21 heures 30, à la date du 27

 17   mai, et ensuite Mme Korner vous a demandé si cela signifiait que ceci

 18   intervenait après la réunion à laquelle vous aviez été présent, et vous

 19   aviez déposé en indiquant que cette réunion s'était tenue à 7 heures du

 20   soir avec le général Talic.

 21   R.  Oui. Parce que, avec le colonel Tepsic, nous étions partis de Banja

 22   Luka pour nous rendre au poste de commandement. Mais le chiffre exact pour

 23   ce qui est du nombre de morts est consigné dans mon carnet. Ceci a été

 24   envoyé à l'état-major général afin de cacher le nombre réel des morts. Il

 25   s'agit d'une décision en toute connaissance de cause prise par la VRS.

 26   Q.  Très bien. Nous en sommes rendus à la situation suivante : vous saviez

 27   que ce rapport remis à l'état-major général de la Republika Srpska par le

 28   commandement du 5e Corps d'armée comportait de façon erronée la mention de

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  1   80 à 100 morts. Vous, vous nous affirmez que ce qui avait été dit à la

  2   réunion, c'était qu'il y avait eu 800 morts, et vous dites que c'est cette

  3   information fausse qui a été fournie à l'état-major général, parce qu'ordre

  4   en avait été donné par le général Talic au colonel Marcetic, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui. Il lui a donné l'ordre de réduire le chiffre des morts de 800 à

  6   80. Et c'est pour cela qu'il a été écrit ici 80 à 100. Alors que mon carnet

  7   officiel, on peut prouver qu'il remonte à l'époque des faits, parce que j'y

  8   ai consigné de jour en jour ce qui se produisait.

  9   Q.  Monsieur le Témoin, nous ne remettons pas en cause la véracité de ce

 10   que vous avez consigné dans votre carnet ni l'authenticité de ce dernier.

 11   Nous ne contestons que l'exactitude des informations que vous y avez

 12   consignées.

 13   R.  Non, non, non. Je maintiens ce qui figure dans mon carnet.

 14   Q.  Monsieur le Témoin, n'y a-t-il pas une grande probabilité que vous ayez

 15   entendu le colonel Marcetic dire que de 80 à 100 personnes avaient été

 16   tuées et que vous, vous ayez consigné 800, parce que 80 à 100 et 800, en

 17   B/C/S, c'est très proche.

 18   R.  Maître, je serais ravi que vous ayez raison. Malheureusement, vous avez

 19   tort. Le nombre de tués était bien plus important. Il y a davantage de

 20   documents encore qui permettent d'étayer cette affirmation. Et plus tard

 21   encore, malheureusement, un nombre encore plus important de personnes a été

 22   tué.

 23   Q.  Monsieur le Témoin, c'est du 27 mai que nous parlons maintenant. Nous

 24   n'avons pas la moindre raison d'élargir le cadre. Nous ne parlons que d'un

 25   seul fait, correspondant à la date du 27 mai. Vous nous affirmez avoir

 26   entendu Marcetic dire qu'il y avait eu 800 morts, et vous nous dites avoir

 27   consigné ceci dans votre journal.

 28   R.  Oui.

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  1   Q.  Alors, essayons de nous concentrer uniquement sur ce point, s'il vous

  2   plaît. Vous continuez à nous dire que le document que nous avons sous les

  3   yeux, qui est un rapport officiel, n'est pas exact pour ce qui concerne ce

  4   chiffre, qu'une modification y a été faite, en fait, que le nombre de tués

  5   a fait l'objet d'une falsification sur ordre du général Talic donné à

  6   Marcetic, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui. Ceci pour la raison suivante : il s'agissait de cacher le nombre

  8   de morts parce qu'autrement, quelqu'un aurait dû répondre d'un aussi grand

  9   nombre de morts, qui représentait une violation du droit international.

 10   Q.  Donc, selon vous, le général Talic souhaitait cacher le fait que 800

 11   personnes auraient été tuées le 27 mai 1992 lors de cette action à Kozarac.

 12   Il aurait souhaité ne pas révéler ceci tant au général Mladic qu'à l'état-

 13   major général.

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Et il l'aurait fait parce qu'il aurait craint les conséquences de cet

 16   acte en raison de sa propre responsabilité dans la mort d'un aussi grand

 17   nombre de personnes.

 18   R.  Oui. 

 19   Q.  Et ceci implique qu'il aurait craint également les conséquences qu'il

 20   aurait éventuellement eues à subir dans le cadre de la hiérarchie militaire

 21   de la VRS, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui. Parce qu'il avait commis un génocide à l'encontre du peuple

 23   musulman et il aurait dû en subir les conséquences. Je regrette qu'il soit

 24   décédé avant d'avoir eu à en répondre.

 25   Q.  Monsieur le Témoin, il y a quelques instants je vous ai posé la

 26   question suivante : en tant qu'officier ayant une longue expérience au sein

 27   de la JNA -- je vous ai demandé s'il y avait ou non une obligation cruciale

 28   de faire état de façon exacte et précise des informations au sein des

Page 18154

  1   rapports dans l'armée. Vous m'avez répondu par l'affirmative.

  2   R.  En effet.

  3   Q.  Et, en plus de cette obligation en application des règlements

  4   militaires, il existe également une responsabilité. Quelqu'un qui fournit à

  5   son commandement supérieur des informations inexactes doit également en

  6   répondre, n'est-ce pas?

  7   R.  Oui, mais vous savez que la fin justifie les moyens.

  8   Q.  Monsieur le Témoin, le corps d'armée et votre unité, celle de la base

  9   logistique, se trouvaient au même niveau dans la hiérarchie de la VRS,

 10   n'est-ce pas ?

 11   R.  Non. Le corps d'armée était une structure plus grande. Nous, nous

 12   étions subordonnés au commandement de l'état-major général de la VRS. Mais

 13   un corps d'armée est un corps d'armée, alors qu'une base c'est une base. Et

 14   leurs missions ne sont pas les mêmes.

 15   Q.  Je suis tout à fait d'accord. Mais en substance, aussi bien pour vous-

 16   même et votre base logistique que pour le corps d'armée, le niveau de

 17   commandement qui était hiérarchiquement juste au-dessus de vous c'était

 18   l'état-major général de la VRS, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Et vos rapports quotidiens, vous les faisiez parvenir à l'état-major

 21   général de la VRS, et non pas au corps d'armée; est-ce exact ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Et vous essayez maintenant de nous dire que M. Talic, feu le général

 24   Talic, tout en sachant que vous étiez présent, aurait eu l'intention de

 25   cacher le nombre de tués et aurait, en votre présence, ordonné à un autre

 26   officier de la VRS de falsifier un rapport destiné à l'état-major général

 27   de la VRS.

 28   R.  Je ne pourrais jamais oublier les mots qui ont été les siens. Je cite :

Page 18155

  1   "Tu veux sans doute dire que c'est 80 personnes qui ont été tuées. Informe

  2   de cela l'état-major général." Messieurs les Juges, je m'en souviens, c'est

  3   gravé dans ma mémoire. Je m'en souviendrai jusqu'à ma mort.

  4   Q.  Monsieur le Témoin. Monsieur, je vous comprends parfaitement. Chaque

  5   victime est une tragédie, quel que ce soit le nombre des victimes.

  6   Cependant, au sein des archives du 5e Corps d'armée, ou du 1er Corps de la

  7   Krajina --

  8   R.  Oui, le 1er Corps de la Krajina.

  9   Q.  -- nous trouvons au sein de ces archives un rapport quotidien daté du

 10   27 mai 1992.

 11   R.  Oui.

 12   Q.  C'est un rapport de la 343e Brigade motorisée, n'est-ce pas?

 13   R.  Je ne l'ai pas vu. Je suppose qu'il devrait y avoir un tel rapport dans

 14   les archives, mais je ne m'en souviens pas et je ne l'ai pas vu.

 15   Q.  Donc, si dans ce rapport-là de la 343e Brigade motorisée il est indiqué

 16   le chiffre de 800 morts et 1 200 prisonniers, dans ce cas, vous avez

 17   absolument raison. Mais si jamais dans ce même rapport nous ne trouvons pas

 18   ces chiffres-là, si jamais nous avons la mention de 80 à 100 morts et 1 500

 19   prisonniers, dans ce cas-là, il nous faut bien reconnaître la possibilité

 20   que l'officier Marcetic ait interverti en quelque sorte les chiffres et que

 21   vous, vous ayez consigné la chose de cette façon.

 22   R.  Non. Je suis sûr que le colonel Marcetic avait déjà sciemment réduit le

 23   chiffre à 800, parce que le nombre réel des tués était bien plus important.

 24   Je dispose d'informations indiquant que ce jour-là, un nombre bien plus

 25   important de personnes avaient été tuées et, malheureusement, les jours

 26   suivants aussi. Qui avait fourni cette information à Marcetic, je l'ignore.

 27   Je n'ai pas vu ce document. Mais lui, verbalement, en a fait état auprès du

 28   général Talic.

Page 18156

  1   Q.  Monsieur le Témoin, les informations dont vous disposiez concernant le

  2   nombre de tués provenaient principalement de deux sources. Des sources dont

  3   vous avez parlé. D'une part, de M. Muharem Krzic, qui s'était trouvé à

  4   Banja Luka, et d'autre part, de votre seconde source, qui était le mufti

  5   Halilovic. C'était là les deux personnes qui vous avaient fourni ces

  6   informations, n'est-ce pas ?

  7   R.  Non, non. A partir de 1995, après la guerre, on a commencé à faire des

  8   recherches. Au jour d'aujourd'hui, on n'a pas réussi à retrouver toutes les

  9   fosses. Par conséquent, dès la fin de la guerre jusqu'au jour

 10   d'aujourd'hui, on a procédé à des recherches, et il y a toujours des corps

 11   qui n'ont tout simplement pas été retrouvés. C'est la situation telle

 12   qu'elle se présentait après la guerre qui a été enregistrée.

 13   Q.  Monsieur le Témoin, je voudrais qu'on se concentre à nouveau sur la

 14   question que j'ai mise de l'avant et sur la raison même de votre déposition

 15   devant ce Tribunal.

 16    Voici ce que je vous affirme : au sein des archives du 1er Corps de

 17   la Krajina existe un rapport de combat quotidien de la 343e Brigade

 18   motorisée, rapport dans lequel il est fait état de nombre de tués, du

 19   nombre d'hommes faits prisonniers, du nombre de soldats de la VRS tués et

 20   blessés. Enfin, on y fait état de tous les éléments que comporte

 21   normalement un rapport de combat. Sur la base de ce rapport, le colonel

 22   Marcetic fait rapport au général Talic en votre présence. vous nous

 23   demandez maintenant de croire cette version consistant à dire que le

 24   général Talic aurait, consciemment et en votre présence, donné l'ordre que

 25   cette information soit falsifiée alors même qu'elle existait dans les

 26   archives au sein de ce rapport de combat. Vous nous demandez de croire

 27   qu'en votre présence, il aurait demandé de falsifier cette information

 28   destinée au commandement hiérarchiquement supérieur, qui était aussi bien

Page 18157

  1   son commandement supérieur à lui que le vôtre.

  2   Est-ce que c'est bien ce que vous avancez ?

  3   R.  Excusez-moi, mais j'ignore qui a fourni ces informations et si c'est

  4   par écrit ou verbalement que les informations ont été fournies au colonel

  5   Marcetic. Mais le général Talic a réagi de façon spontanée. Il n'a pas

  6   beaucoup réfléchi. Il ne s'est pas trop posé la question de savoir qui

  7   était présent à la réunion ni quelles seraient les conséquences pour ses

  8   propres unités ni pour lui-même. Il s'est rendu compte qu'il devait

  9   répondre du grand nombre de tués dont il était fait état. C'est à cela

 10   qu'il a réagi.

 11   Q.  Monsieur, si ce que vous nous dites est vrai, pourquoi vous-même, vous

 12   n'avez pas contacté directement le chef de l'état-major général, le général

 13   Mladic, pour lui fournir l'information correspondante, pour lui dire que

 14   son subordonné falsifiait volontairement des informations qui faisaient

 15   partie d'un rapport quotidien ? Vous pouviez vous adresser au général

 16   Mladic, au responsable de la sécurité de la VRS ou à n'importe quel autre

 17   officier du commandement de l'état-major général. Est-ce que cela n'aurait

 18   pas été votre devoir d'officier ?

 19   R.  J'avais déposé ma demande de mise à la retraite le 19 mai. Je n'étais

 20   plus qu'un figurant qui n'était plus là que jusqu'à sa mise en retraite au

 21   moment où ceci s'est passé. C'était l'assistant chargé du moral des troupes

 22   et le responsable de la sécurité qui auraient dû réagir face à une telle

 23   situation. Or, ils n'ont pas réagi. Ce n'était pas à moi qu'il appartenait

 24   de réagir à cette situation. D'ailleurs, puisque j'étais Bosnien, même si

 25   j'avais réagi, cela n'aurait pas eu le moindre effet, on ne m'aurait pas

 26   cru.

 27   Q.  Peut-être ne vous auraient-ils pas cru, mais si vous en aviez fait

 28   état, peut-être auraient-ils vérifié, comme vous-même, vous avez vérifié

Page 18158

  1   ultérieurement pour constater qu'effectivement, il y a eu tel et tels

  2   nombres de victimes. On aurait établi que le général Talic falsifiait des

  3   informations qu'il fournissait à l'état-major général. Vous m'accorderez

  4   qu'il s'agit là d'une faute impardonnable en temps de guerre au sein d'une

  5   hiérarchie militaire.

  6   R.  Vous suggérez qu'il n'y a pas eu autant de morts, mais malheureusement,

  7   je répète qu'il en a eu bien plus. Vous avez votre propre conscience, mais

  8   moi, je vous dis ce qui s'est passé, et voyez comment vous vous arrangez

  9   avec vous-même.

 10   Q.  C'est le 10 juillet, si mes souvenirs sont bons, qu'il y a eu passation

 11   de fonctions vous concernant.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Mais vous figuriez toujours, jusqu'au 30 septembre 1992, dans les

 14   archives comme officier d'active.

 15   R.  Oui. D'après la législation qui concerne la JNA, trois mois de congé

 16   sont accordés à un officier au moment de sa mise à la retraite, donc j'en

 17   ai bénéficié. Pendant trois mois, j'ai continué de toucher ma solde tout en

 18   étant parti à la retraite.

 19   Q.  Et vous êtes devenu commandant de l'état-major de la résistance à Banja

 20   Luka. C'est comme ça que vous avez mis à profit votre congé; c'est bien

 21   cela ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Donc, Monsieur, d'après vos déclarations - et je ne vais pas vous les

 24   citer maintenant, puisque vous ne les contestez pas - Monsieur, vous êtes

 25   toujours officier d'active de l'armée de la Republika Srpska. Or, pendant

 26   cette même période où vous avez pris ce congé annuel qui vous est garanti

 27   par la loi, après avoir remis votre poste, vous avez endossé le rôle du

 28   commandant de la résistance -- qui oppose résistance à cette même armée.

Page 18159

  1   Donc, de fait, vous êtes passé dans l'autre camp, alors que vous êtes

  2   encore officier de cette première armée, n'est-ce pas?

  3   R.  Non, non, non. La résistance de Banja Luka a été mise sur pied non pas

  4   pour réagir par la force des armes, mais en employant d'autres méthodes. En

  5   aidant en particulier les hommes à s'enfuir de Banja Luka, parce que

  6   surtout les hommes étaient exposés au risque de se faire tuer, et cetera.

  7   Nous nous étions engagés à ne pas prendre les armes, parce que justement ce

  8   qu'on faisait de l'autre côté, c'était provoquer les Musulmans à opposer

  9   une résistance armée, et c'est ce que nous voulions éviter pour que les

 10   Musulmans ne commettent pas un suicide collectif.

 11   Q.  Monsieur, vous avez donné des déclarations au bureau du Procureur du 10

 12   au 23 janvier de l'an 2000, ainsi qu'en juillet de l'an 2000, puis il y en

 13   a eu d'autres. Vous avez réitéré cela : vous dites que vous êtes devenu

 14   commandant de l'état-major de la résistance de Banja Luka, même si, d'après

 15   l'évolution de la situation dans la Krajina bosniaque, une résistance a été

 16   prévue, mais jamais une telle action n'a été lancée :

 17   "Qui plus est, j'ai donné le conseil que l'on ne procède pas au

 18   sabotage à Banja Luka. On l'a fait pour protéger la population non serbe

 19   qui n'avait rien à voir avec la résistance prévue.

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Donc, Monsieur --

 22   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Maître Zecevic, les interprètes ont du

 23   mal à suivre votre rythme. Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît,

 24   ralentir.

 25   M. ZECEVIC : [interprétation] Avec toutes mes excuses.

 26   Q. Excusez-moi.

 27   Dans votre déclaration, page 9 de votre déclaration de l'an 2000, vous

 28   dites, et c'est la dernière phrase que je vous ai lue :

Page 18160

  1   "Qui plus est, j'étais d'avis qu'aucun acte de sabotage ne soit effectué à

  2   Banja Luka. Cette décision a été acceptée afin de protéger la population

  3   non serbe qui n'avait rien à voir avec la résistance prévue."

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Monsieur, en d'autres termes, à partir du moment où vous êtes relevé de

  6   vos fonctions, vous devenez commandant de la résistance de Banja Luka, vous

  7   passez dans l'autre camp, donc au camp opposé par rapport à l'armée dans

  8   laquelle vous figurez encore comme un officier d'active. On prévoit des

  9   actes de résistance, et vous empêchez cela. Vous empêchez qu'on ne lance

 10   ces actions armées afin de protéger la population non serbe; est-ce que

 11   cela est exact ?

 12   R.  Nous avons même empêché la planification d'une résistance armée, parce

 13   qu'il y avait 101 000 personnes dans le Corps de Banja Luka à l'époque.

 14   Cela correspond à cinq corps d'armées en temps habituel.

 15   Q.  Monsieur, vous avez eu des contacts à titre privé dans le cadre

 16   desquels, à partir de 1995, vous avez souhaité que l'on explique à

 17   l'adresse de certains protagonistes en Bosnie-Herzégovine qu'en fait, vous

 18   avez fait tout votre possible, que vous pensiez que votre conscience était

 19   tranquille, que vous n'avez fait aucun mal ni au peuple musulman ni au

 20   peuple croate.

 21   R.  Ni au peuple serbe.

 22   Q.  Et qu'à tout moment vous étiez prêt à être traduit devant les tribunaux

 23   pour répondre de vos actes pendant la période où vous avez été un officier

 24   dans l'armée.

 25   R.  Devant tous les trois peuples. Pas seulement devant les deux autres,

 26   aussi devant les Serbes. Parce que le peuple n'est coupable de rien. Ce

 27   sont ceux qui les dirigent qui sont coupables.

 28   Q.  C'est ce que vous avez écrit à un membre de votre famille.

Page 18161

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Et deux peuples seulement sont mentionnés ici, pas le peuple serbe.

  3   R.  Mais j'ajoute le peuple serbe, parce que je ne suis pas coupable devant

  4   le peuple serbe non plus.

  5   Q.  Monsieur, on vous a reproché d'avoir été officier de la JNA et de la

  6   VRS, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui. Car à Sarajevo, ils n'ont pas appris que j'avais demandé de partir

  8   à la retraite. Mais, Messieurs les Juges, le général Talic m'a empêché de

  9   quitter Banja Luka à partir du moment où j'ai voulu quitter les rangs de

 10   l'armée, et je ne le lui reproche pas.

 11   Q.  Mais, Monsieur, le fait est que Muharem Krzic et d'autres ont appris de

 12   votre bouche des secrets militaires pendant que vous étiez officier dans

 13   les rangs de l'armée, n'est-ce pas ?

 14   R.  Les secrets qui concernaient la République de Bosnie-Herzégovine et

 15   l'anéantissement des peuples musulmans et croates, pour empêcher ce qui

 16   s'est produit à Kozarac, la création des camps, plus de 5 000 personnes à

 17   Manjaca, Trnopolje, Omarska, et cetera.

 18   Q.  Mais, Monsieur, ce n'est pas vous qui avez fourni ces informations.

 19   C'est quelque chose que vous avez appris par la suite par M. Krzic et le

 20   mufti Halilovic. C'est d'autres informations que vous leur avez transmises.

 21   R.  Oui, sur ce qui était prévu pour la période à venir, et justement pour

 22   protéger ces deux peuples dans cette région.

 23   Q.  Je vous remercie, Monsieur. Je n'ai pas d'autres questions.

 24   M. ZECEVIC : [interprétation] On me dit que c'est le moment de la pause.

 25   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Dans une minute le moment exact de la

 26   pause viendra. Je suppose que vous voulez commencer avec vos questions

 27   supplémentaires après la pause ?

 28   M. RINDI : [interprétation] Oui.

Page 18162

  1   [Le témoin quitte la barre]

  2   --- L'audience est suspendue à 17 heures 19.

  3   --- L'audience est reprise à 17 heures 44.

  4   M. ZECEVIC : [interprétation] -- il m'a fallu à peu près 45 minutes pour

  5   pouvoir constater à quoi correspond le document 65 ter 3644. En fait, c'est

  6   le document que le témoin a vu dans l'affaire Brdjanin. Il s'agit du

  7   rapport officiel du 1er Corps de la Krajina adressé au Grand état-major de

  8   la VRS.

  9   Donc il s'agit d'un document qui figure dans le jeu de documents 92 ter.

 10   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Maître Zecevic, je souhaite vous

 11   poser une question. Elle concerne plus ou moins ce que vous venez de dire.

 12   Vous avez soumis au témoin qu'il s'agissait d'un rapport de combat qui a

 13   été rédigé par ceux qui ont mené l'attaque sur Kozarac, et que c'est sur la

 14   base de ce rapport que le général Talic a fourni des informations au Grand

 15   état-major.

 16   M. ZECEVIC : [interprétation] Oui --

 17   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] En donnant des précisions sur les

 18   pertes et sur le nombre de prisonniers.

 19   [Le témoin vient à la barre]

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Alors, en fait, vous n'avez pas

 21   montré le document au témoin ? Mais lui avez-vous cité la cote du document

 22   ?

 23   M. ZECEVIC : [interprétation] Mais je ne l'ai pas, ce document, et je ne

 24   l'ai jamais vu non plus. Mais à en juger d'après le règlement militaire,

 25   normalement, tous les jours, toutes les unités envoient un rapport

 26   quotidien adressé à leur hiérarchie. Donc la 343e Brigade motorisée, elle

 27   est subordonnée au 1er Corps d'armée. Donc, en principe, en temps régulier,

 28   en fonction du règlement, chacune des unités est tenue d'envoyer à son

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  1   supérieur hiérarchique un rapport quotidien.

  2   Et puis au niveau du corps d'armée, il y a eu une information qui est

  3   fournie à l'état-major général, également au quotidien.

  4   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Donc vous supposez que ce rapport

  5   existe, mais vous ne savez pas ce qui y figure, s'agit-il de 800 [comme

  6   interprété] ou de 80 ou 800 victimes ?

  7   M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, effectivement, je ne le sais pas. Mais

  8   je vais essayer de trouver cela.

  9   Nouvel interrogatoire par M. Rindi : 

 10   Q.  [interprétation] Colonel Selak, vous nous avez dit que vous n'avez pas

 11   rencontré de problèmes dus à votre appartenance ethnique, c'est ce que vous

 12   nous avez dit pendant l'interrogatoire principal. Et pendant le contre-

 13   interrogatoire, vous avez dit que vous avez été convoqué à des réunions et

 14   qu'en fait, des plans étaient conçus après les réunions.

 15   En fait, vous ne saviez pas ce qu'on était en train de planifier ?

 16   R.  Le général Uzelac, en 1991, en novembre, a demandé des armements pour

 17   les unités de la Défense territoriale, qui n'étaient pas autorisées à se

 18   mobiliser. Je ne lui ai pas donné ces armes, même s'il l'a demandé en tant

 19   que commandant du 5e Corps, parce que cette brigade était à 100 % serbe. Je

 20   savais de quoi il s'agissait, et la loi n'autorisait pas cela. Je n'ai pas

 21   donné ces armes. Il y a eu un conflit entre moi et le général Uzelac. Et

 22   c'est à partir de cela que l'on me convoquait à des réunions 30 minutes

 23   après le début, pour ne pas être mis au courant de certains projets. Et le

 24   général Talic aussi était au courant.

 25   Q.  Vous venez de dire que cette brigade se composait à 100 % de Serbes.

 26   R.  Oui, la Défense territoriale.

 27   Q.  Le fait qu'on vous convoquait avec 30 minutes de retard à ces réunions,

 28   est-ce que cela avait quelque chose à voir avec votre appartenance ethnique

Page 18164

  1   ?

  2   R.  Oui.

  3   M. RINDI : [interprétation] Je demanderais que l'huissier affiche la pièce

  4   3643 de la liste 65 ter.

  5   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] En attendant que le document ne

  6   s'affiche, je voudrais préciser un point.

  7   Page 63, ligne 3 du compte rendu d'audience, il y a eu un chevauchement des

  8   voix, là où il est écrit "80 à 100," et j'ai dit "ou 800 personnes." Je

  9   vous remercie.

 10   M. RINDI : [interprétation]

 11   Q.  Colonel Selak, nous avons là un document qui porte la date du 15 mars

 12   1992 et il vient du commandement du 5e Corps. Il est signé par le général

 13   Vladimir Vukovic.

 14   Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, examiner le premier point, et

 15   prenez-en connaissance, s'il vous plaît.

 16   R.  Oui.

 17   Q.  C'est la dernière phrase qui m'intéresse dans ce premier point.

 18   Je vais vous en donner lecture :

 19   "Nous estimons qu'en ce moment cette nomination ne serait pas appropriée du

 20   point de vue de la gestion du personnel."

 21   Et je signale qu'il s'agit de la nomination au poste de coordination

 22   avec les forces des Nations Unies. Alors, est-ce que vous pourriez nous

 23   préciser ce que signifie cette phrase que je vous ai lue ? Pourquoi est-ce

 24   que cette nomination ne serait-elle pas appropriée ?

 25   R.  Le chef du groupe chargé de la coopération avec les Nations Unies

 26   - en fait, j'ai été nommé à ce poste plus tard - il était chargé de la

 27   coordination entre les forces des Nations Unies et la VRS, ou à l'époque de

 28   la JNA. Et je n'étais pas la personne qu'il fallait, parce que Radic, le

Page 18165

  1   président de la municipalité, a voulu demander plus de 2 millions de

  2   dollars pour les installations réservées aux forces des Nations Unies, et

  3   moi, j'ai proposé d'autres bâtiments. En fait, il voulait m'éliminer pour

  4   que ce soit le colonel Tepsic qui s'en charge. Hélas, un mois plus tard,

  5   j'ai été effectivement renvoyé de ce poste à cause de cela et j'ai été

  6   remis au poste du commandant de la base logistique.

  7   Q.  Vous nous avez dit que vous avez rencontré des problèmes vu votre

  8   appartenance ethnique. Est-ce que vous savez s'il y a eu d'autres officiers

  9   musulmans qui ont rencontré des problèmes à cause de leur appartenance

 10   ethnique, des problèmes dans l'armée ?

 11   R.  En 1992, un ordre a été donné, à savoir que les officiers bosniens et

 12   croates soient relevés de leurs fonctions dans les unités de la JNA, c'est-

 13   à-dire dans les unités de la VRS, justement parce qu'on doutait du fait

 14   qu'ils soient capables de s'acquitter correctement de leurs fonctions. Ils

 15   ont été dépêchés à Belgrade pour mettre fin à leur statut de membres de la

 16   JNA. La même chose concerne les soldats, mais ça, c'est une autre histoire.

 17   M. RINDI : [interprétation] Est-ce que l'on peut montrer au témoin, s'il

 18   vous plaît, la pièce 3641 sur la liste 65 ter.

 19   Q.  Colonel Selak, lisez ce document, s'il vous plaît. Ne le lisez pas à

 20   haute voix.

 21   Dites-moi quand vous aurez terminé.

 22   R.  J'en ai terminé avec la lecture.

 23   Q.  Est-ce que c'est l'ordre que vous aviez à l'esprit il y a un instant ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Merci.

 26   M. RINDI : [interprétation] Monsieur le Président, j'en ai terminé. Je vous

 27   remercie.

 28   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je souhaite demander le

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  1   versement au dossier de la série de documents 92 ter relative à ce

  2   document. Et également, je demande que l'on verse au dossier les deux

  3   derniers documents que j'ai examinés avec le témoin, à savoir 3641 et 3643

  4   sur la liste 65 ter.

  5   Et, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, si je puis juste

  6   ajouter, nous avons envoyé une notification quant aux documents constituant

  7   le jeu 92 ter, et je voudrais simplement préciser qu'un document ne devrait

  8   pas s'y trouver. A savoir, 10588 est le document qui devrait être rayé de

  9   cette liste, un document 65 ter.

 10   [La Chambre de première instance se concerte]

 11   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Donc nous allons verser au dossier ce

 12   jeu de documents avec les corrections apportées par le conseil.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, ce sera la pièce P01745. Nous allons

 14   distribuer un mémo interne avec toutes les cotes distinctes.

 15   M. RINDI : [interprétation] Est-ce que les documents 65 ter 3641 et 3643

 16   peuvent être versés au dossier.

 17   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Oui, tout à fait.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce 65 ter 03643 deviendra la pièce

 19   P01746; et la pièce 65 ter 03461 [comme interprété] deviendra la pièce

 20   P01747. Je vous remercie.

 21   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] 65 ter 03644, s'il vous plaît, est-ce

 22   qu'on peut l'afficher de nouveau.

 23   Questions de la Cour : 

 24   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, on vous a montré

 25   ce document, document où l'on retrouve à nouveau les fameux chiffres qui

 26   nous intéressaient, 80 à 100 tués et 1 500 capturés.

 27   Je ne voudrais pas que l'on parle de chiffres, mais j'aimerais plutôt

 28   vous poser des questions à propos de la qualification qu'on a faite de ces

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  1   gens qui sont soit tués, soit capturés. Ici, on parle de Bérets verts. Dans

  2   votre carnet personnel, vous parlez de "personnes." Or, des Bérets verts,

  3   pour moi, ce sont des soldats, des combattants, alors que "les gens" c'est

  4   quand même un substantif qui est moins précis.

  5   Au cours de la réunion, quel a été le terme employé à propos de ces

  6   800 tués ? S'agissait-il de combattants, de soldats, de Bérets verts ?

  7   R.  Puis-je répondre ?

  8   Voilà ce que j'ai compris et voilà ce qui avait été dit d'ailleurs :

  9   c'était des citoyens qui avaient été tués, des civils. Il n'y avait pas

 10   d'unités militaires organisées du côté de l'ennemi. Donc, voilà, on a rendu

 11   compte du fait qu'un certain nombre de personnes avaient été tuées à

 12   Kozarac et que ces personnes étaient des gens du cru, des habitants du

 13   village.

 14   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Vous semblez être d'accord avec ce

 15   document en ce qui concerne un chiffre, le nombre de personnes arrêtées ?

 16   Sur ce nombre-là, vous êtes d'accord ? 1 500 capturés, c'est ce qui est

 17   écrit sur le document.

 18   Se pourrait-il qu'il s'agisse de 1 500 Bérets verts, qu'on aurait

 19   capturé 1 500 Bérets verts ?

 20   R.  Monsieur le Juge, je vous ai dit qu'il n'y avait pas de formations

 21   armées, certainement pas de cette envergure-là, avec 1 500 à 2 000

 22   personnes. Ici, on parle d'habitants de Kozarac, et un génocide a été

 23   commis contre ces gens. Il n'y avait pas de Bérets verts. Il s'agit de

 24   désinformation qui a été délibérément intégrée à ce rapport pour falsifier

 25   un peu l'événement et pour justifier ce qui avait été fait.

 26   Malheureusement, il y en a eu bien plus de tués que le nombre que l'on

 27   trouve dans les carnets. Mais les tués c'était des gens du cru. La totalité

 28   de Kozarac a été vidée de ses habitants. Il ne restait personne. Ce n'est

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  1   qu'après la guerre que les gens sont revenus à Kozarac. Donc ce qui est

  2   écrit ici est faux.

  3   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

  4   Ensuite, lorsqu'on vous a demandé si vous aviez rendu compte de ce

  5   que vous avez entendu lors de cette réunion, vous nous avez répondu que

  6   non, vous n'aviez pas fait de compte rendu, officiel en tout cas.

  7   Mais auriez-vous fait un compte rendu officieux ?

  8   R.  Non. J'en ai juste parlé avec mes amis, avec les gens de Banja Luka. Je

  9   n'ai informé personne de façon officielle, et personne n'était, d'ailleurs,

 10   en position de faire ce genre de chose. Donc je n'en ai informé que mes

 11   amis à Banja Luka, les gens avec qui je parlais. Malheureusement, non, je

 12   n'ai pas rendu compte de cela à qui que ce soit.

 13   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] Merci.

 14   M. ZECEVIC : [interprétation] Je suis désolé d'interrompre les questions,

 15   mais j'ai besoin d'une petite clarification.

 16   A la page 65, ligne 13, vous avez dit la chose suivante au témoin :

 17   "Dans votre carnet personnel, vous parlez de 'gens,' et pour moi, les

 18   Bérets verts ce sont des soldats, alors que le terme 'gens' est beaucoup

 19   moins précis."

 20   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] En effet, c'est ce que j'ai dit.

 21   M. ZECEVIC : [interprétation] Oui, mais dans le carnet du témoin on ne

 22   parle pas de "gens."

 23   M. LE JUGE DELVOIE : [interprétation] En effet. En effet, on ne parle que

 24   de chiffres. J'en suis désolé.

 25   M. ZECEVIC : [interprétation] Je vous remercie.

 26   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] J'aimerais vous poser une question de

 27   suivi qui suit ce que vous avez répondu au Juge Delvoie.

 28   Je parle ici du nombre de combattants de l'ABiH présents à Kozarac.

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  1   Si j'ai bien compris ce que vous nous avez dit, vous venez de dire au Juge

  2   Delvoie qu'il n'y avait aucun combattant de l'ABiH à Kozarac à l'époque de

  3   l'attaque, donc le 27 mai 1992 ?

  4   C'est ce que vous avez dit, n'est-ce pas ? Il n'y avait pas de Bérets

  5   verts, il n'y avait pas de soldats de l'ABiH à Kozarac ?

  6   R.  Oui.

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] J'aimerais savoir la chose suivante :

  8   savez-vous s'il y avait une présence de formations armées aux alentours de

  9   Kozarac, formations armées qui auraient appartenues à l'ABiH ? Je ne parle

 10   pas uniquement de la ville de Kozarac ou du village de Kozarac, mais des

 11   alentours de Kozarac.

 12   Etiez-vous au courant ?

 13   R.  Monsieur le Juge, il n'y avait aucune présence militaire, aucune

 14   formation militaire en Krajina bosniaque. De Banja Luka à Prijedor, à

 15   Kozarac, et cetera, il n'y avait pas de grandes formations militaires de

 16   l'ABiH. Il y avait peut-être des groupes individuels, des gens qui

 17   s'étaient mis ensemble pour défendre leurs fermes, défendre leurs familles,

 18   et qui avaient des armes. Ça, je ne peux pas l'exclure. Mais il n'y avait

 19   pas de formations militaires.

 20   C'est une invention pure et simple, ce document, et le but est de

 21   justifier le génocide commis. Ceci a été écrit pour justifier les meurtres,

 22   justifier ce génocide et justifier le nettoyage ethnique. Rien de plus.

 23   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

 24   J'ai une deuxième question, une dernière question, et elle porte sur

 25   ce que vous nous avez dit aujourd'hui à propos de l'attaque de Kozarac.

 26   Vous avez dit que cette attaque avait été effectuée par la 343e Brigade

 27   motorisée, renforcée par certaines unités de la 6e Brigade de Kozarac et

 28   renforcée aussi par quelques volontaires du SDS, unités paramilitaires et

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  1   par la police de Prijedor.

  2   Or, dans votre première déclaration, vous n'avez pas parlé de la

  3   police. Pourriez-vous nous dire quel était le rôle joué par la police dans

  4   le cadre de cette opération ?

  5   R.  La police n'a pas participé dans l'opération en tant que telle. Mais

  6   une fois l'opération terminée, la police est rentrée pour réorganiser la

  7   vie. Ils avaient leurs propres missions. Ils n'ont pas pris part à

  8   l'opération militaire en tant que telle, en tout cas pas à ce que je sache.

  9   Les réfugiés serbes de Croatie sont arrivés pour s'installer là-bas, et la

 10   police était là pour organiser un peu les choses pour eux. Mais les

 11   militaires ne sont pas intervenus. En fait, ils étaient là pour aider les

 12   autorités, les aider pouvoir à se remettre en place dans la région, ainsi

 13   qu'avec l'aide de la cellule de Crise de la région de Prijedor -- non, je

 14   suis désolé. Il y avait aussi les camps de détenus qui ont été créés et qui

 15   ont été installés à Prijedor, ces quatre camps où il y avait plus de 5 000

 16   personnes, avec Manjaca aussi. Tout ceci a été organisé par la police, et

 17   non pas par les militaires.

 18   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien.

 19   Pouvez-vous nous dire combien de temps après l'attaque sur Kozarac la

 20   police est rentrée dans la ville; vous le savez ?

 21   R.  Non, je ne le sais pas. Ils sont entrés en ville sans doute une fois

 22   les opérations militaires terminées, une fois que les Serbes de Croatie ont

 23   commencé à arriver. Il a dû y avoir quelques jours, sans doute, entre

 24   l'opération et l'arrivée de la police, parce qu'il y a eu des destructions,

 25   du pillage, des incendies volontaires, et cetera. Donc ils sont sans doute

 26   arrivés un ou deux jours après la fin de l'opération. Mais ils ont arrêté

 27   les gens et ils les ont emmenés aux camps. Ça, c'était le travail de la

 28   police. Ce n'est pas le travail des militaires.

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  1   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Savez-vous si l'armée était encore

  2   dans Kozarac lorsque la police est entrée ?

  3   R.  La brigade ne s'est pas retirée de cette région, donc ils étaient

  4   encore là. Il y avait les problèmes à Sanski Most et ailleurs, et donc la

  5   brigade est restée dans la région parce qu'elle avait d'autres missions à

  6   exécuter, d'autres missions autre que la mission Kozarac.

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai plus de

  8   questions.

  9   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Merci, Monsieur le Colonel Selak. Merci

 10   d'être venu déposer. Votre témoignage est maintenant terminé. Vous êtes

 11   libéré de vos obligations de témoin et vous pouvez maintenant rentrer chez

 12   vous. Et nous vous souhaitons un bon retour chez vous.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie.

 14   [Le témoin se retire]

 15   M. ZECEVIC : [interprétation] Puis-je quitter le prétoire, s'il vous plaît

 16   ?

 17   M. LE JUGE HALL : [interprétation] [hors micro] Allez-y.

 18   M. ZECEVIC : [interprétation] Merci beaucoup.

 19   Mme KORNER : [interprétation] Nous aimerions aussi quitter le prétoire, M.

 20   Rindi et moi-même, et nous allons laisser M. Di Fazio, qui pourrait

 21   parfaitement gérer le reste de l'audience seul.

 22   M. DI FAZIO : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges -

 23   -

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   M. DI FAZIO : [interprétation] En attendant le prochain témoin, vous savez

 26   qu'il y a une demande de mesures de protection qui a été déposée, et la

 27   Défense y a répondue il y a quelques jours en prétoire. Je tenais à vous

 28   dire qu'au départ, dans notre demande de mesures de protection,

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  1   l'Accusation avait demandé déformation des traits du visage, déformation de

  2   la voix et pseudonyme. Hier, lorsque je me suis entretenu avec le témoin,

  3   il m'a dit que le pseudonyme et la déformation des traits du visage lui

  4   suffiraient. Il n'a pas vraiment besoin de déformation de sa voix.

  5   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Di Fazio.

  6   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  7   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Vous pouvez faire entrer le témoin.

  8   Nous avons une décision orale à rendre. Nous aimerions rendre cette

  9   décision orale avant la fin de l'audience d'aujourd'hui. En effet, cela

 10   porte sur le témoin que nous allons entendre demain, donc je vous

 11   demanderais, Maître Di Fazio, de nous laisser cinq minutes avant la fin de

 12   l'audience pour que nous ayons le temps de lire cette décision.

 13   M. DI FAZIO : [interprétation] Je m'y emploierai.

 14   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Maître Cvijetic, pouvez-vous nous

 15   dire de combien de temps vous avez besoin pour le contre-interrogatoire du

 16   Témoin 257 ?

 17   M. CVIJETIC : [interprétation] On aurait besoin de très peu de temps, à

 18   moins que le témoin ne parle d'un sujet qui soit vraiment pertinent en

 19   l'espèce. Donc je vais être prudent, je vais vous demander 30 minutes. Cela

 20   devrait largement suffire.

 21   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Et, Maître Krgovic, qu'en est-il du

 22   temps nécessaire pour votre contre-interrogatoire ?

 23   M. KRGOVIC : [interprétation] Nous n'aurons pas de questions pour ce

 24   témoin.

 25   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien.

 26   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 27   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

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  1   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Vous m'entendez par le biais de

  2   l'interprétation ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  4   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin, et

  5   bienvenu à ce Tribunal. Nous allons d'abord vous demander de lire la

  6   déclaration solennelle que vous tend l'huissier, qui est sur cette carte.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  8   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  9   LE TÉMOIN : KEMAL HUJDUR [Assermenté]

 10   [Le témoin répond par l'interprète]

 11   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 13   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Avant de commencer votre déposition,

 14   la Chambre de première instance a été avertie de votre demande de mesures

 15   de protection. Comme vous le voyez, à l'heure actuelle, nous sommes en

 16   audience publique, mais les stores de ce prétoire ont été baissés, donc

 17   personne ne peut vous voir.

 18   Il serait peut-être bon maintenant de passer à huis clos partiel.

 19   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos

 20   partiel.

 21   [Audience à huis clos partiel]

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 10   [Audience publique]

 11   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. Poursuivons.

 12   Monsieur le Témoin, pour commencer, je voudrais que vous décliniez votre

 13   identité et que vous nous donniez également votre date et lieu de

 14   naissance.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Kemal Hujdur. Je suis né en 1967, le 25 mai,

 16   dans le village de Renovica.

 17   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Merci. Quel est votre métier ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis électricien.

 19   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Pourriez-vous nous dire quel métier

 20   vous exerciez en 1992 ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] En 1992, j'étais électricien dans l'entreprise

 22   d'hôtellerie et restauration Balkan.

 23   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Où se trouvait cette entreprise ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] A Sarajevo.

 25   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien.

 26   Monsieur Hujdur, avez-vous déjà déposé devant ce Tribunal dans le

 27   passé ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Ceci est la première fois.

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  1   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Avez-vous déjà déposé devant un

  2   quelque autre tribunal, que ce soit dans votre propre pays, concernant des

  3   événements relatifs à la guerre en ex-Yougoslavie ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  5   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Pourriez-vous rapidement nous

  6   expliquer dans quelles affaires vous avez ainsi déposé.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agissait d'une affaire pour laquelle le

  8   procès s'est tenu en 1998 à Sarajevo. Etait-ce le tribunal de base, je

  9   crois que oui. C'était le procès intenté contre Miomir Tepes, et c'était M.

 10   le Juge Jaganjac, je crois, qui était dans cette affaire.

 11   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien.

 12   Alors, Monsieur le Témoin, c'est l'Accusation qui vous a cité à la

 13   barre, et l'Accusation se trouve à votre droite dans le prétoire. Vous

 14   déposez en application d'une procédure rapide en application de laquelle

 15   l'Accusation va revenir très rapidement sur votre déclaration, ce pourquoi

 16   elle bénéficiera de 45 minutes en tout.

 17   Ensuite, les conseils de la Défense, qui sont assis à votre gauche,

 18   d'une part, Me Cvijetic, qui représente l'accusé Stanisic, et d'autre part,

 19   Me Aleksic, qui représente M. Zupljanin, vous poseront des questions. Me

 20   Cvijetic a indiqué qu'il aurait besoin d'une trentaine de minutes.

 21    Le conseil de M. Zupljanin, Me Aleksic, à ce stade, a indiqué qu'il

 22   n'aurait pas de questions au contre-interrogatoire.

 23   Après le contre-interrogatoire de Me Cvijetic, c'est l'Accusation qui

 24   aura de nouveau la parole pour vous poser des questions supplémentaires.

 25   A tout moment, les Juges sont également susceptibles de s'adresser à

 26   vous pour vous poser des questions. Voilà, dans ses grandes lignes, quel

 27   sera le déroulement de votre déposition.

 28   Ce soir, notre audience sera levée à 19 heures, ce qui signifie que

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  1   nous disposons encore d'un peu moins d'une demi-heure, mais nous

  2   reprendrons nos débats demain après-midi à 14 heures 15. Nous travaillerons

  3   alors en plusieurs volets d'audience de 90 minutes séparés par des pauses

  4   qui sont nécessaires pour permettre le changement des bandes sur lesquelles

  5   les débats sont enregistrés.

  6   Par conséquent, nous aurons une pause de 30 minutes [comme

  7   interprété] à la fin du premier volet d'audience avant de passer au second

  8   au cours duquel votre déposition devrait s'achever.

  9   Alors, Monsieur Hujdur, si, à quelque moment que ce soit, vous

 10   éprouvez le besoin de faire une pause ou vous souhaitez vous adresser aux

 11   Juges de la Chambre pour poser une question, n'hésitez pas à le faire et

 12   nous verrons ce que nous pouvons faire.

 13   Pour finir, je dois vous rappeler encore un ou deux éléments. Comme vous

 14   avez pu le remarquer, tout ce que nous disons était interprété, et j'attire

 15   votre attention sur la nécessité qu'il y aura pour vous - surtout lorsque

 16   vous serez contre-interrogé par Me Cvijetic - la nécessité qu'il y aura

 17   pour vous de ménager une courte pause avant chacune de vos réponses afin de

 18   permettre aux interprètes de saisir tant les questions que les réponses.

 19   Donc je vous prie de ménager des pauses et de vous exprimer clairement afin

 20   de permettre une bonne interprétation.

 21   Pour finir, Monsieur Hujdur, je vous rappelle que, suite à la déclaration

 22   solennelle que vous avez prononcée, vous êtes contraint de dire la vérité

 23   dans ce prétoire et que vous vous exposez à des peines sévères en cas de

 24   parjure si jamais vous fournissez des informations fausses ou susceptibles

 25   d'induire les Juges de la Chambre en erreur.

 26   Est-ce que vous avez des questions ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 28   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. Commençons.

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  1   Monsieur Di Fazio, vous avez la parole.

  2   M. DI FAZIO : [interprétation] Merci, Messieurs les Juges.

  3   Interrogatoire principal par M. Di Fazio : 

  4   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, je vous ai déjà dit hier qu'il

  5   serait très souhaitable que vous donniez des réponses brèves et je vous le

  6   redis maintenant. Nous avons 45 minutes à peine, et c'est très court.

  7   M. DI FAZIO : [interprétation] Je voudrais que l'on présente au témoin le

  8   document numéro 3121 de la liste 65 ter dans un premier temps.

  9   Q.  Nous avons ici une carte assez schématique. Est-ce que vous voyez

 10   l'endroit où se trouve le village de Renovica ?

 11   R.  Oui, je le vois.

 12   Q.  Merci. Pouvez-vous dire aux Juges de la Chambre combien de temps il

 13   vous fallait pour aller de Renovica à Sarajevo lorsque vous travailliez

 14   encore à Sarajevo en 1992 ?

 15   R.  En bus, cela prenait à peu près une heure.

 16   Q.  Quel type de village était Renovica ? Je veux dire, y avait-il un

 17   groupe ethnique majoritaire ?

 18   R.  Quatre-vingt-dix pourcents de la population étaient constitués de

 19   Musulmans et il y avait environ 10 % de Serbes.

 20   Q.  Je vais vous citer les noms d'un certain nombre de villages ou de

 21   hameaux.

 22   Je voudrais que vous nous disiez si ces localités étaient proches de

 23   Renovica :

 24   Petovici, Strane, Kaljani, Prespica [phon], Turkovici, Ljunja,

 25   Priboristi [phon] ?

 26   R.  Oui, il s'agit là de hameaux qui se trouvent à la périphérie de

 27   Renovica.

 28   Q.  Merci. Encore un dernier hameau. Qu'en est-il de la localité de Vinca

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  1   ou Vince ? Je crois que nous avons également une division entre Donja Vinca

  2   et Gornja Vinca. S'agit-il là aussi de localités proches de Renovica ?

  3   R.  Ces localités existent. Donja Vinca est à une distance d'un kilomètre,

  4   alors que Gornja Vinca est à 2 kilomètres du centre de Renovica.

  5   Q.  Et cette localité de Donja Vinca, qui est à environ un kilomètre de

  6   distance, si vous étiez un habitant de cette localité de Donja Vinca donc,

  7   est-ce que vous seriez en mesure de voir Renovica ?

  8   R.  Non, on ne pouvait pas vraiment voir le village de Renovica, parce que

  9   -- enfin, je ne sais pas trop comment vous l'expliquer. Mais Renovica était

 10   comme dans le lit d'un ruisseau, en contrebas en fait. Elle n'était pas en

 11   hauteur. Je ne sais pas si c'est suffisant.

 12   Q.  Oui, je vous remercie. En 1991 et 1992, étiez-vous membre du SDA ?

 13   R.  Oui, j'étais devenu membre. La plupart d'entre nous de Renovica,

 14   puisque nous étions des Musulmans. Je pense qu'à 90 % on était devenus

 15   membres du Parti SDA de l'époque.

 16   Q.  En 1992, dans votre village, y avait-il quelqu'un qui s'appelait Alija

 17   Parzina [sic] ?

 18   R.  Alija Prazina. Oui, il vivait là.

 19   Q.  Excusez-moi, je me suis mal exprimé. Excusez-moi.

 20   Occupait-il un poste au sein du SDA ?

 21   R.  Il faut savoir que je ne me rendais pas à des réunions du parti, mais

 22   il me semble que c'était l'un des dirigeants. Je ne peux pas vous dire avec

 23   certitude. Il a dû avoir une fonction, mais je ne sais pas exactement quoi.

 24   Q.  Merci. Je voudrais que l'on parle des mois d'avril et mai 1992 à

 25   présent.

 26   Premièrement, pendant ces deux mois-là de l'année 1992, j'aimerais savoir

 27   si, près du village de Renovica, il y avait une caserne de taille

 28   importante ?

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  1   R.  Oui, depuis toujours il y a eu une caserne dans le village de Renovica.

  2   Quant à connaître sa taille, je sais que quand j'étais petit, on jouait au

  3   foot avec eux. Il y avait une trentaine de militaires de la JNA sur place.

  4   Vous venez de parler de Donja Vinca, et en direction de Donja Vinca, il y

  5   avait une vingtaine d'entrepôts d'armes, d'armements. Je ne sais pas

  6   exactement combien.

  7   Q.  Merci. Que ce soit en avril ou en mai 1992, est-ce que quelqu'un a pris

  8   ces armes pour les emporter ailleurs ?

  9   R.  Je dois dire que pendant cette période-là, à savoir du 4 avril au 22

 10   mai, je me suis trouvé sans interruption à Renovica. Je peux vous dire que

 11   tous les jours on voyait des véhicules de la JNA partir en emportant ces

 12   armes vers Sarajevo, vers Pale. Je ne sais pas exactement où.

 13   Q.  Est-ce que vous pouvez nous aider à situer à peu près la taille de

 14   cette caserne et la quantité d'armes qu'elle contenait. Vous dites que tous

 15   les jours il y a eu des camions qui sont partis. Est-ce qu'il était

 16   vraiment nécessaire d'avoir des camions arrivés tous les jours, sans arrêt,

 17   pour emporter ces armes ?

 18   R.  Ecoutez, ce que je viens de vous dire pourrait être confirmé par tous

 19   les habitants de Renovica. Je ne peux pas vous dire si c'était

 20   effectivement tous les jours. Peut-être qu'il y en a eu deux fois par jour

 21   même. Mais croyez-moi, c'était quasiment tous les jours, car je vivais sur

 22   place, et tous les habitants de Renovica pourraient vous confirmer la même

 23   chose, tous ceux qui ont vécu là-bas à ce moment-là.

 24   Q.  A un moment donné, est-ce que ces entrepôts et cette caserne se sont

 25   trouvés vides, tous ces endroits où normalement il y a eu des armes

 26   précédemment ?

 27   R.  Ecoutez, je ne pouvais pas entrer dans ces entrepôts. Je ne peux pas

 28   savoir si on a tout vidé. Mais puisqu'on a vu ces camions passer tous les

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  1   jours, la plupart ont dû être emportés de Renovica.

  2   Q.  Et un jour est-ce qu'on n'a plus vu ces camions emporter des armes de

  3   la caserne ?

  4   R.  Il y en a eu tous les jours jusqu'au 22, jusqu'à l'attaque sur

  5   Renovica. Je pense que ça ne s'est pas arrêté.

  6   Q.  Et pendant cette période, pendant que les camions emportaient les armes

  7   déposées dans la caserne, les villageois se sont-ils organisés pour

  8   organiser une défense, et vous-même, y avez-vous participé ?

  9   R.  Ecoutez - je ne sais pas comment dire - il n'y a pas vraiment eu à

 10   proprement parler de défense. Nous avions quelques armes, pas grand-chose,

 11   et, en fait, les gens gardaient leurs propres maisons. Comment dirais-je ?

 12   - on a essayé de s'organiser plus ou moins pour se défendre, mais les gens

 13   étaient méfiants. Et finalement, chacun gardait sa propre maison. Je ne

 14   sais pas si on peut considérer que c'était effectivement une défense

 15   organisée. Je ne sais pas si on peut vraiment dire cela.

 16   Q.  Très bien. Nous verrons cela de plus près un peu plus tard. Vous avez

 17   mentionné Alija Prazina. Est-ce qu'il a acheté des armes en avril 1992 ?

 18   R.  Justement, c'est ce que je crois. C'est en passant par ses filières à

 19   lui qu'il y a eu des armes qui sont arrivées, peut-être entre 15 et 20

 20   fusils, des M-48.

 21   Q.  Et alors qu'a-t-il fait de ces 15 à 20 M-48 ?

 22   R.  Je suppose qu'il les a distribués à des gens. Car dans le voisinage,

 23   j'ai vu des gens avoir ce fusil. Je suppose qu'il les a distribués. Alors,

 24   quelle a été la règle qu'il a suivie pour distribuer les armes, ça, je ne

 25   le sais pas.

 26   Q.  Est-ce qu'on n'a jamais essayé d'organiser une défense en organisant

 27   les villageois, en les réunissant ?

 28   R.  Ecoutez, à ce moment-là, la guerre était bel et bien commencée à

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  1   Sarajevo. Donc nous avons essayé -- en fait, j'étais présent à plusieurs

  2   fois, lorsque nous avons essayé de nous organiser. Mais je viens de te dire

  3   à l'instant, que ces gens-là, ils ne se faisaient pas confiance. Donc

  4   c'était difficile. Effectivement, on a essayé, mais ça n'a pas abouti à

  5   rien, on n'a rien pu faire finalement.

  6   Q.  Très bien. Mais il nous faut un peu plus de détails. Essayez de

  7   réfléchir un peu à cela et dites-nous jusqu'à quel niveau vous avez pu vous

  8   organiser, qui s'est organisé, combien de personnes sont concernées par

  9   cela.

 10   Vous nous avez déjà dit que les gens se méfiaient les uns des autres,

 11   donc ça, nous avons bien compris. Mais dites-nous jusqu'où vous avez pu

 12   avancer dans cette tentative d'organisation. Donc, est-ce qu'il y a eu une

 13   défense qui a été mise sur pied par les villageois ?

 14   R.  Il y a eu une réunion à laquelle je suis allé, moi, effectivement. Je

 15   pense que c'était un de mes amis qui a dit qu'il allait y avoir cette

 16   réunion. C'est un village, le village de Stubice. Il y a là un pré, et

 17   Rasim Misirevic, qui n'est plus parmi nous, est sorti de la caserne. En

 18   fait, c'était un militaire qui travaillait dans l'ancienne caserne de la

 19   JNA. Donc il est venu, et nous nous sommes rassemblés à Stubice. Nous

 20   étions peut-être 150 à 200. Je ne peux pas vous dire le chiffre exact. Et

 21   donc feu Rasim Misirevic était là, il était censé devenir le commandant de

 22   la défense de Renovica. Il a essayé vraiment de faire comment on fait dans

 23   l'armée, mais moi, je n'avais pas beaucoup d'expérience, donc il a essayé

 24   de nous organiser dans les sections, dans les groupes. Il a nommé des

 25   commandants, des soi-disant commandants, de sections, des chefs de

 26   détachements. Et puis comme moi j'habite exactement dans Turkovici, le chef

 27   de notre section devait devenir Mujo Muminovic. Il lui a confié des

 28   missions, des tâches, pour que l'autre puisse continuer de travailler.

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  1   Parce que Rasim, il ne pouvait pas s'occuper de tout un chacun. Donc Mujo

  2   Muminovic a, comme ça, convoqué une réunion et il a essayé de voir comment

  3   on devrait s'organiser pour monter la garde et où il fallait qu'on se

  4   poste. Mais il faut savoir que mes voisins, mes proches, ils ne faisaient

  5   confiance à personne. On n'arrivait absolument pas à se mettre d'accord.

  6   Donc ce qui se passait finalement, c'est que tout le monde se débinait, je

  7   ne peux pas aller là, je ne peux pas à tel moment, et puis finalement tout

  8   le monde se retrouvait devant sa propre maison. Je ne sais pas si cela vous

  9   suffit comme réponse.

 10   Q.  Oui, merci, Vous avez commencé à bien expliquer.

 11   Alors, sur ces 150 à 200 hommes, est-ce qu'il y a eu des patrouilles

 12   qui ont été organisées autour de Renovica et des hameaux alentours ?

 13   R.  Ecoutez, vraiment, je ne peux pas vous en parler. Je ne peux vous

 14   parler que de Turkovici, que je connais bien. J'étais sur place. Pour

 15   Petovici et les autres villages dans les hauteurs, c'est un peu plus loin,

 16   je ne sais pas comment ils se sont organisés vraiment.

 17   Q.  Merci. Est-ce que l'on a creusé des tranchées ?

 18   R.  Non, non. Pas une seule tranchée.

 19   Q.  Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre si, à Renovica ou dans les

 20   hameaux alentours que nous avons cités cet après-midi, il y a eu comme suit

 21   : des positions de mortiers, des mitrailleuses lourdes, des positions de

 22   tireurs embusqués, ou aviez-vous des véhicules lourds, des véhicules

 23   militaires, un système de communication par radio ? Est-ce qu'il y a eu

 24   quoi que ce soit des choses que je viens d'énumérer ?

 25   R.  Rien de tout cela, et je n'ai vu et je n'ai pas non plus entendu parler

 26   qu'il y en ait eu.

 27   Q.  Vous avez mentionné des armes. Vous nous avez dit que Prazina a réussi

 28   à se procurer des M-48. Alors, mis à part cela, mis à part ces 15 ou 20

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  1   fusils, me semble-t-il vous avez dit, ces 150 à 200 hommes, est-ce qu'ils

  2   ont été équipés d'autres armes ?

  3   R.  A Renovica, pendant cette période-là, si mes souvenirs sont bons, mis à

  4   part ces fusils-là et les fusils de chasse, je ne peux pas vous dire

  5   combien il y en a eu exactement. Il y a eu des fusils de chasse, 10 à 15

  6   peut-être, et c'est vraiment tout ce que j'ai vu ou entendu. Rien de plus.

  7   Ces fusils de chasse, c'était des gens qui allaient à la chasse, donc

  8   qui avaient un permis pour cela. Puis pour le reste, je ne sais pas, je ne

  9   pense pas.

 10   Q.  D'accord. Et puis ma dernière question avant de s'interrompre pour ce

 11   soir.

 12   Pendant cette période-là qui a précédé la matinée du 22 mai 1992,

 13   vous-même ou l'un quelconque de ces 150 à 200 hommes, avez-vous jamais pris

 14   part à une activité de combat vous opposant à quelle que force que ce soit

 15   ?

 16   R.  Non.

 17   Q.  Je vous remercie.

 18   M. DI FAZIO : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 19   je pense que le moment s'y prête bien.

 20   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Di Fazio.

 21   Monsieur le Témoin, vous pouvez disposer, mais en fait, vous n'êtes pas

 22   complètement libre. Il va falloir que vous reveniez dans ce prétoire demain

 23   à 14 heures 15. Passez une soirée agréable, et nous espérons vous revoir

 24   ici demain.

 25   [La Chambre de première instance se concerte]

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 27   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Excusez-moi. Monsieur, Monsieur, s'il

 28   vous plaît.

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  1   Excusez-moi, j'ai oublié de vous dire qu'à partir du moment où vous avez

  2   prononcé votre déclaration solennelle en tant que témoin, vous n'avez plus

  3   le droit de prendre contact avec les parties au procès, et si vous avez des

  4   contacts avec vos proches ou avec d'autres personnes, dans le cadre de ces

  5   échanges, vous n'avez pas le droit d'aborder le contenu de votre déposition

  6   ici.

  7   Avez-vous compris ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, d'accord.

  9   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Très bien. Merci. On se reverra donc

 10   demain.

 11   [Le témoin quitte la barre]

 12   M. LE JUGE HARHOFF : [interprétation] Je vous remercie.

 13   Il ne nous reste plus qu'une très brève ordonnance à rendre avant de

 14   lever l'audience pour aujourd'hui. Il est question de la requête déposée

 15   par l'Accusation en date du 2 décembre dernier portant sur trois documents

 16   et deux vidéos qui devraient être ajoutés à la liste de documents qui

 17   seront utilisés lors de la déposition du général Milovanovic demain.

 18   Compte tenu de la nature urgente de la requête, je dois dire que la Chambre

 19   a demandé que la Défense réponde au plus tard le 3 décembre, mais aucune

 20   réponse n'a été déposée par la Défense à ce jour.

 21   Le 3 décembre, l'Accusation a déposé un corrigendum à la requête en

 22   précisant que la pièce 3592.1 sur la liste 65 ter aurait dû se référer à un

 23   carnet qui couvre la période allant du 27 janvier 1995 au 5 septembre 1995.

 24   La Chambre estime que l'Accusation n'a pas agi avec la diligence requise en

 25   déposant cette requête. L'Accusation constate que ces documents faisaient

 26   partie de sa requête du 5 novembre demandant le versement du témoignage du

 27   général Milovanovic en application de l'article 92 bis. L'Accusation

 28   n'explique pas pourquoi elle a décidé de déposer sa requête un mois plus

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  1   tard quasiment, juste quelques jours avant de citer le témoin. Cette

  2   attitude, en l'absence de toute justification, ne répond pas aux critères

  3   de diligence requis.

  4   Toutefois, la Chambre estime néanmoins que les documents dont il s'agit

  5   sont pertinents, prima facie, par rapport à la déposition attendue du

  6   général Milovanovic. Ces documents aideront la Chambre à apprécier

  7   l'authenticité des carnets. Qui plus est, la Chambre estime qu'il n'y aura

  8   pas de préjudice qui pèserait sur la Défense si ces documents étaient

  9   ajoutés à la liste des pièces à conviction, puisque la Défense est au

 10   courant de l'existence de ces documents au moins depuis le 5 novembre.

 11   Pour les raisons précitées, la Chambre estime qu'il est de l'intérêt de la

 12   justice d'ajouter ces documents à la liste des pièces à conviction de

 13   l'Accusation. Par conséquent, il est fait droit à la requête précitée telle

 14   que modifiée.

 15   M. LE JUGE HALL : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Juge

 16   Harhoff.

 17   Nous allons lever l'audience jusqu'à 14 heures 15 demain.

 18   --- L'audience est levée à 19 heures 00 et reprendra le mardi 7 décembre

 19   2010, à 14 heures 15.

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