La Chambre d’appel a prononcé aujourd’hui son arrêt dans l’affaire Le Procureur c/ Jadranko Prlić et consorts, qui est la plus volumineuse et toute dernière affaire jugée par le Tribunal.
La Chambre d’appel a confirmé presque toutes les déclarations de culpabilité prononcées par la Chambre de première instance contre Jadranko Prlić, Bruno Stojić, Slobodan Praljak, Milivoj Petković, Valentin Ćorić et Berislav Pušić pour des événements qui s’étaient déroulés entre 1992 et 1994 dans huit municipalités et cinq centres de détention du territoire de Bosnie‑Herzégovine. Elle a également maintenu les peines de prison prononcées en première instance, à savoir 25 ans pour Jadranko Prlić, 20 ans pour Bruno Stojić, Slobodan Praljak et Milivoj Petković, 16 ans pour Valentin Ćorić et 10 ans pour Berislav Pušić.
Ont été confirmées les déclarations de culpabilité prononcées contre Jadranko Prlić, Bruno Stojić, Slobodan Praljak, Milivoj Petković, Valentin Ćorić et Berislav Pušić pour crimes contre l’humanité, violations des lois ou coutumes de la guerre, et infractions graves aux Conventions de Genève, à savoir plus précisément : meurtre, assassinat et homicide intentionnel, persécutions pour des raisons politiques, raciales et religieuses, expulsion, transfert illégal de civils, emprisonnement, détention illégale de civils, travail illégal, actes inhumains, traitements inhumains, destruction de biens non justifiée par des nécessités militaires et exécutée sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire, destruction ou endommagement délibéré d’édifices consacrés à la religion ou à l’enseignement, attaque illégale contre des civils, et le fait de répandre illégalement la terreur parmi la population civile. Ont en outre été confirmées les déclarations de culpabilité prononcées contre Jadranko Prlić, Bruno Stojić, Milivoj Petković et Valentin Ćorić Prlić pour les crimes suivants : viol, traitements inhumains (violences sexuelles), appropriation de biens non justifiée par des nécessités militaires et exécutée sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire, et pillage de biens publics ou privés, pour avoir participé à une entreprise criminelle commune de troisième catégorie. Ont également été confirmées les déclarations de culpabilité prononcées contre Slobodan Praljak pour appropriation de biens non justifiée par des nécessités militaires et exécutée sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire, et pillage de biens publics ou privés, pour avoir participé à une entreprise criminelle commune de troisième catégorie. Ont de plus été confirmées les déclarations de culpabilité prononcées contre Valentin Ćorić pour de nombreux crimes au titre de sa responsabilité de supérieur hiérarchique.
La Chambre d’appel a par ailleurs confirmé les conclusions de la Chambre de première instance selon lesquelles, à partir de la mi‑janvier 1993, les accusés avaient participé à une entreprise criminelle commune, exception faite de Berislav Pušić qui en était devenu membre en avril 1993. Elle a également confirmé les conclusions de la Chambre de première instance selon lesquelles cette entreprise criminelle commune avait pour objectif de créer en Bosnie‑Herzégovine une entité croate qui faciliterait la réunification du peuple croate, par le nettoyage ethnique de la population musulmane.
La Chambre d’appel a accueilli certains des moyens d’appel soulevés par Bruno Stojić, Slobodan Praljak, Milivoj Petković, Valentin Ćorić et l’Accusation, et rejeté dans leur intégralité ceux soulevés par Jadranko Prlić et Berislav Pušić. Elle a par conséquent infirmé un nombre limité de conclusions qui fondaient certaines déclarations de culpabilité prononcées contre les six accusés.
Les six accusés et l’Accusation avaient fait appel du Jugement rendu par la Chambre de première instance III le 29 mai 2013. Le dépôt des mémoires en appel, qui comptent ensemble plus de 12 000 pages, s’est achevé le 29 mai 2015. L’audience d’appel s’est tenue entre le 20 et le 28 mars 2017.
La Chambre d’appel était composée des Juges Carmel Agius (Président), Liu Daqun, Fausto Pocar, Theodor Meron et Bakone Justice Moloto. Le Juge Liu a joint à l’arrêt une déclaration, une opinion partiellement dissidente et des opinions dissidentes, et le Juge Pocar, des opinions dissidentes.
Depuis sa création, le Tribunal a mis en accusation 161 personnes pour des violations graves du droit international humanitaire perpétrées sur le territoire de l’ex‑Yougoslavie entre 1991 et 2001. Ce dernier arrêt marque la fin de toutes les procédures engagées contre ces 161 personnes, et l’achèvement des travaux du Tribunal.
Après 24 ans d’existence, le Tribunal fermera officiellement ses portes le 31 décembre 2017.