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Jugement dans l'affaire

Communiqué de presse
CHAMBRES
(Destiné exclusivement à l'usage des médias. Document non officiel)
 

La Haye, 29 novembre 2002
CC/S.I.P./713-f


Jugement dans l'affaire "Le Procureur c/ Mitar Vasiljevic"
L'accusé condamné à 20 ans d'emprisonment

 

Veuillez trouver ci-dessous un résumé du Jugement, rendu ce jour par la Chambre de première instance II, composée des Juges Hunt (Président), Janu, et Taya. Ce résumé a été lu à l’audience par le Juge Président.

La Chambre de première instance II se réunit aujourd’hui afin de rendre son jugement à l’issue du procès de Mitar Vasiljevic. Pour les besoins de cette audience, il convient de brièvement résumer les questions soulevées durant le procès et les conclusions de la Chambre à cet égard. Je me dois de rappeler qu’il ne s’agit ici que d’un résumé, lequel ne fait pas partie du jugement qui doit être rendu. Seul le texte du jugement, qui sera communiqué aux parties et au public à l’issue de cette audience, doit être considéré comme l’expression des conclusions de la Chambre et de leurs motifs.

Le procès découle des événements survenus en 1992 à Visegrad, une municipalité située sur la rive de la Drina, dans le sud-ouest de la Bosnie-Herzégovine, non loin de la frontière séparant celle-ci de la République de Serbie. Avant que n’éclate le conflit armé, la majorité des habitants de la municipalité était d’origine musulmane, la minorité serbe ne représentant qu’un tiers environ de la population. Les tensions ethniques ont éclaté au grand jour après que les élections tenues en novembre 1990 ont produit un conseil municipal qui reflétait exactement la composition ethnique de la municipalité.

Les membres des communautés serbe et musulmane ont commencé à s’armer, et les actes de violence ont débuté au début de 1992. Les agressions visant la population civile non serbe se sont manifestées de différentes manières, commençant par la prise de contrôle de la ville par les Serbes, accompagnée d’une campagne systématique et à grande échelle de meurtres, de viols et de mauvais traitements de la population non serbe de la municipalité, en particulier des Musulmans, laquelle a conduit à l’une des plus vastes et impitoyables opérations de nettoyage ethnique de tout le conflit qui a touché la Bosnie. Des centaines d’hommes, femmes, enfants et personnes âgées, musulmans pour la plupart, ont été tués. Un des groupes paramilitaires les plus violents opérant dans la région était mené par Milan Lukic, un ancien habitant de Visegrad. Ce groupe paramilitaire est entré dans Visegrad et y a commis de nombreux crimes très graves avec la complicité, ou tout au moins l’assentiment, des autorités serbes qui avaient pris le contrôle du secteur.

Le procès porte en particulier sur deux événements survenus à Visegrad dans le courant du mois de juin 1992.

Le premier a eu lieu le 7 juin. Milan Lukic, accompagné de plusieurs individus, a emmené 7 hommes musulmans de Bosnie sur la rive de la Drina où ils les ont forcés à se mettre en rang, face à la rivière. Malgré les supplications des Musulmans, les priant de les épargner, ils ont été abattus d’une balle dans le dos. Lorsqu’il est apparu que certains d’entre eux étaient encore en vie, les hommes qui surnageaient ont été abattus à bout portant. Cinq des Musulmans ont été tués, tandis que deux ont échappé à leur sort en feignant d’être mort et en restant dans la rivière.

Le deuxième événement a eu lieu le 14 juin 1992. Un groupe d’environ 70 Musulmans de Bosnie, composé de femmes, d’enfants et de personnes âgées ont été emmenés dans une maison de la rue Pionirska, dans le quartier appelé Mahala de la municipalité de Visegrad. Un produit inflammable avait été répandu dans les pièces où ces Musulmans ont été enfermés. Une fois le groupe à l’intérieur de la maison, on y a mis le feu au moyen d’un engin incendiaire. La plupart des membres du groupe ont trouvé la mort dans l’incendie, tandis que d’autres ont pu s’échapper soit avant soit durant l’incendie.

L’accusé, Mitar Vasiljevic, a été accusé d’un certain nombre de crimes à raison de chacun des deux événements, puisqu’il aurait, agissant de concert avec Milan Lukic et d’autres personnes, commis des meurtres, (un crime contre l’humanité et une violation des lois ou coutumes de la guerre), des actes inhumains (un crime contre l’humanité), des atteintes à la vie et à l’intégrité corporelle (une violation des lois ou coutumes de la guerre). S’agissant de l’incendie de la rue Pionirska, Mitar Vasiljevic est également accusé, de concert avec Milan Lukic ainsi que d’autres personnes, d’extermination (un crime contre l’humanité).

Enfin, s’agissant des deux événements, pris ensemble, Mitar Vasiljevic est accusé de persécution pour des raisons politiques, raciales et religieuses (un crime contre l’humanité), en participant au meurtre de Musulmans de Bosnie et d’autres civils non serbes, et au harcèlement, à la terrorisation, aux mauvais traitements psychologiques dont ont été victimes ces civils, ainsi qu’au vol et à la destruction des biens leur appartenant.

Mitar Vasiljevic faisait partie de la minorité serbe de Visegrad. Il a travaillé comme serveur dans différents établissements de la localité. L’Accusation fait valoir qu’il faisait également partie du groupe de paramilitaires serbes mené par Milan Lukic, ou qu’il y était lié, ce qui selon l’Accusation, démontre qu’il partageait l’intention d’homicide qui caractérisait ce groupe paramilitaire. Les deux hommes partageaient d’étroits liens familiaux. Un certain nombre de témoins ont déclaré qu’ils avaient vu l’accusé Milan Lukic ainsi que d’autres personnes commettre des crimes graves. Dans pratiquement chacun des cas, un seul témoin a pu témoigner de la participation de l’accusé dans les agissements du groupe paramilitaire, et les éléments de preuve fournis par ce témoin concernant l’identification de l’accusé laissaient à désirer.

La Chambre de première instance a conclu que le seul lien pouvant être établi entre l’accusé et le groupe mené par Milan Lukic, indépendamment des deux événements susmentionnés, concerne sa participation à la fouille d’une maison appartenant à une famille musulmane dans le village de Musici et le fait qu’il était tout disposé à fournir à ce groupe des informations permettant de localiser les Musulmans de la région. La Chambre est convaincue qu’il a effectivement communiqué à ce groupe des informations en ayant pleinement conscience qu’elles seraient utilisées par ce groupe pour persécuter la population musulmane.

S’agissant du premier événement, l’accusé a reconnu qu’il était présent lors des exécutions qui ont eu lieu sur la rive de la Drina. Il a affirmé que sa présence sur les lieux était fortuite, qu’il n’avait compris que ces hommes allaient être abattus qu’au moment où ils s’approchaient du cours d’eau et qu’il avait alors tenté de persuader Milan Lukic de les épargner. La Chambre de première instance est cependant convaincue que l’accusé n’a pas tenté de persuader Milan Lukic d’épargner la vie de ces hommes, qu’il a accompagné Milan Lukic et son groupe de son plein gré pour conduire ces sept Musulmans jusqu’à la rive de la Drina, et qu’il a pris part avec ce groupe à l’entreprise criminelle commune consistant à tuer ces sept hommes jusqu’au dernier. Comme seuls cinq d’entre eux ont été tués, il a été reconnu pénalement responsable du meurtre de ces cinq hommes en tant que crime contre l’humanité et violation des lois ou coutumes de la guerre. S’agissant des deux hommes qui ont réchappé à cette exécution, la Chambre conclut que cette tentative de meurtre constitue une grave atteinte à la dignité humaine, et qu’elle a causé chez ces hommes un dommage moral considérable. L’accusé a par conséquent été déclaré individuellement pénalement responsable d’avoir commis des actes inhumains en tant que crimes contre l’humanité.

La Chambre de première instance n’est pas convaincue que le chef d’atteinte à la vie et à l’intégrité corporelle en tant que violation des lois ou coutumes de la guerre constitue une infraction en droit coutumier et qu’elle peut à ce titre engager la responsabilité pénale de l’accusé ; c’est pourquoi ce chef d’accusation n’a pas été retenu contre lui.

S’agissant du second événement, l’accusé a reconnu qu’il se trouvait dans la rue Pionirska durant l’après-midi du 14 juin 1992, mais a nié avoir pris part d’une quelconque manière aux faits qui s’y sont déroulés. L’Accusation fait valoir qu’il a participé au pillage de biens appartenant à des Musulmans tard dans l’après-midi, mais la Chambre de première instance n’est pas convaincue que les éléments de preuve fournis concernant son identification permettent de conclure que l’accusé était effectivement présent sur les lieux à ce moment.

La Chambre de première instance est convaincue que ce n’est pas avant 21 h 30 que des Musulmans ont été contraints d’entrer dans la maison qui a été incendiée ce jour-là. L’accusé accepte avoir parlé un peu plus tôt à un groupe de personnes à cet endroit, mais il affirme qu’ensuite (bien avant que l’on ait forcé les Musulmans à pénétrer dans cette maison), il traversait la ville à cheval, montant à cru, lorsque la bête a glissé, qu’il est tombé et qu’il a été écrasé par sa monture, se cassant une jambe. Il a d’abord été emmené à la clinique de Visegrad et ensuite à l’hôpital de Uzice, un trajet qui aurait dû durer au moins une heure. En d’autres termes, l’accusé fournit un alibi. De nombreux éléments de preuve ont été présentés concernant cet alibi.

Il faut bien comprendre que lorsque des éléments de preuve font apparaître que l’accusé a un alibi, ce n’est pas à celui-ci qu’il incombe de le prouver. Le fait que l’accusé ait un alibi signifie qu’il nie s’être trouvé, comme l’Accusation le prétend, sur les lieux du crime au moment où celui-ci a été commis. Si elle entend prouver au delà de tout doute raisonnable que l’accusé se trouvait effectivement dans la rue Pionirska lorsque les Musulmans ont été contraints à entrer dans la maison qui a ensuite été incendiée, elle doit écarter toute possibilité raisonnable que l’accusé se trouvait à l’hôpital d’Uzice ou en route pour celui-ci à 21 h 30, puisque ce n’est qu’à partir de cette heure que des Musulmans ont été contraints d’entrer dans cette maison.

La Chambre de première instance rejette une bonne part des éléments de preuve qui ont été présentés par l’accusé en vue d’étayer son alibi. Certains des éléments de preuve revêtent toutefois une importance décisive, à savoir le registre des admissions de l’hôpital d’Uzice et le dossier d’un dénommé Mitar Vasijevic ayant été admis dans cet hôpital le 14 juin 1992 à 21 h 35. L’Accusation a procédé à plusieurs reprises à des expertises approfondies de ces documents, menées par des spécialistes en police scientifique, et elle a reconnu que rien n’indique qu’ils auraient été falsifiés. Il revenait par conséquent à l’Accusation d’écarter toute possibilité que l’accusé soit bien la personne ayant été admise à l’hôpital d’Uzice sous le nom de Mitar Vasiljevic à la date et à l’heure indiquées dans les registres de l’hôpital.

Le Dr Moljević était médecin au service orthopédique de l’hôpital d’U‘ice et membre de l’équipe de filtrage au centre d’admission de cet hôpital au moment des faits. Comme il connaissait bien l’accusé, qui était un ami proche, il a été informé de son arrivée imminente. Il se souvient bien de ce qui s’est passé ce jour-là, même s’il a fait appel au registre des admissions (dont l’authenticité n’a pu être contestée par l’Accusation) pour indiquer la date et l’heure précise de l’admission de l’accusé. La Chambre de première instance admet la déclaration du Dr Moljević selon laquelle l’accusé se trouvait ŕ l’hôpital d’U‘ice dès 21 h 35 le jour de l’incendie comme corroborant le registre des admissions. L’Accusation n’a donc pas établi au-delà de tout doute raisonnable que l’accusé se trouvait dans la rue Pionirska lorsqu’on a fait entrer de force les Musulmans dans la maison avant de l’incendier.

Il s’ensuit que les activités de l’accusé au moment où il déclare qu’il se trouvait dans la rue Pionirska plus tôt dans l’après-midi sont d’une très grande importance. L’Accusation a affirmé que l’accusé s’était efforcé de persuader les Musulmans dans la rue Pionirska de rester groupés de sorte qu’il puisse informer Milan Lukić de l’endroit oů ils se trouvaient, permettant ainsi à celui-ci de commettre les crimes effectivement perpétrés par la suite (y compris le pillage). La Chambre de première instance est convaincue que l’accusé s’est employé à assurer que les Musulmans restaient groupés car il savait qu’il allait leur arriver malheur. Cela fait de lui le participant à une entreprise criminelle commune visant à commettre un crime dont il savait qu’il allait être perpétré, ou suffit à tout le moins à engager sa responsabilité pénale individuelle pour avoir aidé et encouragé ce crime. Cependant, l’Accusation n’est pas parvenue à établir au-delà de tout doute raisonnable que l’accusé savait exactement quel était le sort terrible qui attendait le groupe de Musulmans dans la rue Pionirska.

Dans ces circonstances, l’Accusation n’a établi aucun des trois crimes distincts retenus contre l’accusé en ce qui concerne les événements de la rue Pionirska — assassinat/meurtre (un crime contre l’humanité et une violation des lois ou coutumes de la guerre) et actes inhumains (un crime contre l’humanité). La Chambre de première instance a donc acquitté l’accusé de ces chefs. Le chef d’atteintes portées à la vie et à l’intégrité corporelle n’a pas été retenu, pour la même raison qu’il ne l’avait pas été à propos de l’événement de la Drina. Le chef d’accusation supplémentaire concernant les événements de la rue Pionirska, à savoir l’extermination, n’a pas non plus été plus été retenu, l’Accusation n’étant pas parvenue à établir au-delà de tout doute raisonnable que l’accusé se trouvait dans la rue Pionirska au moment du crime ni qu’il savait que ces personnes devaient être tuées.

Reste le chef de persécutions pour des raisons politiques, raciales ou religieuses (un crime contre l’humanité), qui doit être examiné à la lumière de tous les actes pertinents de l’accusé pris dans leur contexte et en tenant compte de leur effet cumulatif. Il a déjà été conclu que ces actes étaient en fait les seuls qui engageaient la responsabilité pénale individuelle de l’accusé pour assassinat/meurtre (un crime contre l’humanité et une violation des lois ou coutumes de la guerre) et actes inhumains (un crime contre l’humanité) s’agissant des événements de la Drina. La Chambre de première instance est convaincue que les cinq hommes musulmans ont été tués, que les deux autres hommes musulmans ont été victimes d’actes inhumains, en raison uniquement de leur origine ethnique, et qu’ils avaient été séparés des autres pour des raisons religieuses ou politiques. Les actes commis étaient donc discriminatoires tant dans les faits que dans les raisons qui les ont motivés. La Chambre de première instance a conclu que la responsabilité individuelle de l’accusé était dès lors engagée pour le crime de persécutions (un crime contre l’humanité) s’agissant du meurtre de cinq hommes et des actes inhumains commis contre les deux survivants.

Se pose alors la question du cumul des déclarations de culpabilité. Il est possible de déclarer un accusé coupable à la fois de meurtre, en tant que violation des lois ou coutumes de la guerre (sanctionné par l’article 5 du Statut du Tribunal), et d’assassinat, en tant que crime contre l’humanité (sanctionné par l’article 3), bien que les deux déclarations de culpabilité découlent de la même série de faits. La question qui se pose réellement en l’espèce s’agissant du cumul des déclarations de culpabilité concerne les trois crimes contre l’humanité pour lesquels la responsabilité individuelle de l’accusé a été retenue par la Chambre. Le crime de persécutions incorporant les éléments tant de l’assassinat (un crime contre l’humanité) que des actes inhumains et étant plus spécifique que ces chefs, la déclaration de culpabilité doit être prononcée pour persécutions plutôt que pour assassinat (un crime contre l’humanité) et actes inhumains.

Par conséquent, l’accusé a été reconnu coupable de persécutions, un crime contre l’humanité (chef 3) — sa responsabilité individuelle est engagée pour le meurtre des cinq hommes (un crime contre l’humanité) et les actes inhumains commis contre les deux survivants — et de meurtre, une violation des lois ou coutumes de la guerre, s’agissant des cinq hommes (chef 5). Il a été acquitté des chefs 1, 4, 6, 7, 10, 11, 12 et 13.

Au moment de déterminer la peine qu’il convient d’infliger à l’accusé pour ces deux déclarations de culpabilité, il est important de souligner que l’accusé doit être puni pour l’ensemble de son comportement criminel et sa culpabilité globale, et de tenir compte de tout préjudice qu’il est susceptible de subir du fait du cumul des déclarations de culpabilité à raison du même comportement criminel. Il ne doit pas être puni soit pour le nombre de crimes engageant sa responsabilité pénale individuelle soit pour le nombre de déclarations de culpabilité prononcées à raison de son comportement.

Le principal problème soulevé quant à la détermination de la peine est l’allégation de l’accusé selon laquelle, au moment des événements de la Drina, ses facultés mentales étaient réduites. De nombreuses expertises psychiatriques ont été produites par les deux parties concernant cette question, mais la Chambre de première instance n’est pas convaincue que l’allégation de l’accusé a été établie. Elle a cependant tenu compte, à titre de circonstance atténuante pour la détermination de la peine, de l’esprit général de coopération dont a utilement fait preuve le conseil principal de l’accusé, qui s’est judicieusement efforcé d’assister la Chambre de première instance sans compromettre d’aucune manière ses obligations envers l’accusé, comportement qu’il y a lieu de porter au crédit de l’accusé lui-même. La Chambre de première instance a également tenu compte, à titre de circonstance atténuante, de la situation personnelle de l’accusé, en particulier du fait qu’il est marié et père de deux enfants.

La Chambre de première instance reconnaît que l’accusé n’était pas commandant, qu’il a commis des crimes dans une zone géographique très limitée, et que rien ne prouve que par ses actes, il a encouragé d’autres individus (autres que ceux reconnus coupables des événements de la Drina) ou causé un préjudice à d’autres personnes dans le cadre plus large du conflit. La Chambre de première instance a tenu compte du fait que l’accusé était un subalterne. Si elle ne reconnaît pas que l’accusé a joué un quelconque rôle particulièrement important dans le cadre plus large de ce conflit, elle note que la position d’un accusé dans la hiérarchie n’est pas déterminante pour ce qui est de la peine prononcée. Le fait que l’accusé n’occupait pas un poste de haut rang dans le cadre du conflit global en ex-Yougoslavie ne saurait altérer la gravité des infractions dont il a été reconnu coupable ou les circonstances dans lesquelles il les a commises. Les crimes qu’il a commis sont particulièrement graves pour ce qui est des intérêts protégés qu’il a violés — la vie et l’intégrité physique et mentale des victimes, les conséquences pour ces dernières (le décès de cinq d’entre elles et les grandes souffrances infligées aux deux autres), et de la raison qui a motivé ces actes (qui n’est autre que la haine pure et simple nourrie contre un groupe ethnique).

En matière de détermination de la peine, il convient de tenir compte de l’intention discriminatoire qui a animé l’auteur des crimes. Pareille intention est un élément constitutif du crime de persécutions et, en tant que tel, elle est pertinente pour ce qui est de la gravité du crime. Elle peut aussi constituer une circonstance aggravante du meurtre en tant que violation des lois ou coutumes de la guerre. C’est une circonstance aggravante de ce crime en l’espèce. Durant le conflit en Bosnie, l’origine ethnique a été invoquée de différentes manières, pour acquérir une certaine importance politique, garder le pouvoir, justifier des actes criminels, ou pour obtenir l’absolution pour tout acte commis au nom de l’appartenance ethnique. On ne peut s’attendre à aucune absolution de ce genre de la part du Tribunal. La Chambre de première instance considère que les crimes commis pour des raisons ethniques sont particulièrement répréhensibles. Elle considère également, à titre de circonstances aggravantes, le fait que les supplications des hommes, priant l’accusé de les épargner, ont été totalement ignorées, la nature de l’exécution, commise de sang-froid, et, dans une mesure peut-être moindre, le fait que l’accusé connaissait bien l’une des victimes.

Mitar Vasiljević, la Chambre de premičre instance vous condamne à une peine d’emprisonnement de 20 ans. Sera déduite de cette peine la période de deux ans, dix mois et quatre jours que vous avez passée en détention provisoire, ainsi que la période que vous passerez en détention en attendant que le Président du Tribunal décide de l’État dans lequel vous purgerez votre peine. Vous resterez en détention jusqu’à ce que pareille décision soit rendue.

Le texte intégral du jugement (en anglais) est disponible auprès des Services d’Information Publique. Il a également été publié sur le site Internet du Tribunal. La version française est en cours de préparation et sera rendue publique dès que possible.


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