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L’arrêt rendu dans l’affaire concernant Duško Tadić

Communiqué de presse
(Destiné exclusivement à l'usage des médias. Document non officiel)
 

La Haye, le 15 juillet 1999
TH/P.I.S/419f


L’arrêt rendu dans l’affaire concernant Duško Tadić

 
L’appel contre le jugement interjeté par Duško Tadić est rejeté et il est reconnu coupable de
neuf autres chefs d’accusation; la décision relative à la sentence sera rendue ultérieurement
.


Aujourd’hui, jeudi 15 juillet 1999, la Chambre d’appel composée des Juges Mohamed Shahabuddeen (Président), Antonio Cassese, Wang Tieya, Rafael Nieto-Navia et Florence Ndepele Mwachande Mumba, a rendu son arrêt relatif à l’appel interjeté par l’accusé Duško Tadić et à l’appel incident interjeté par l’Accusation. Les parties avaient fait appel du jugement rendu le 7 mai 1997 par la Chambre de première instance II.

La Chambre a rejeté tous les moyens d’appel interjetés par Duško Tadić. Toutefois, en acceptant l’appel incident du Bureau du Procureur, la Chambre d’appel a infirmé le verdict de la Chambre de première instance et a déclaré Duško Tadić coupable des chefs 8, 9, 12, 15, 21, 29 et 32 de l’acte d'accusation qui le mettaient en cause pour infractions graves aux Conventions de Genève (article 2 du Statut du Tribunal), à savoir homicide intentionnel, torture ou actes inhumains et le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de porter des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé. La Chambre d’appel a également annulé la déclaration de culpabilité prononcée par la Chambre de première instance s’agissant du chef d’accusation 30, une violation des lois ou coutumes de la guerre (article 3 du Statut), à savoir meurtre, et s’agissant du chef 31, un crime contre l’humanité (article 5 du Statut), à savoir assassinat.

La Chambre d’appel a décidé d’entendre, le 30 août 1999 à 14 heures 30, les arguments oraux des partis relatifs à la fixation de la peine pour les chefs d'accusation supplémentaires dont elle a reconnu Duško Tadić coupable. Ce n’est qu’après avoir rendu sa décision sur cette question que la Chambre d’appel se prononcera sur l’appel interjeté par l’accusé contre le jugement portant condamnation rendu le 14 juillet 1997.

Contexte de la procédure

Il était allégué dans l’acte d'accusation que Duško Tadić avait participé à l’attaque, à l’internement, aux meurtres et aux mauvais traitements infligés aux Musulmans et aux Croates de Bosnie dans la municipalité de Prijedor, en Bosnie-Herzégovine, en 1992. Duško Tadić a été poursuivi sur le fondement de sa responsabilité pénale individuelle (article 7(1) du Statut), pour un total de 31 chefs d’accusation, dont :

  1. Crimes contre l’humanité, à savoir, persécution pour des raisons politiques, raciales et/ou religieuses, assassinat et actes inhumains ;
  2. Infractions graves aux Conventions de Genève, à savoir traitement inhumain, homicide intentionnel, torture ou traitement inhumain, fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de porter des atteintes graves à l’intégrité physique ou mentale ; et
  3. Violations des lois ou coutumes de la guerre, ayant pris la forme de traitement cruel et de meurtre.

 

Duško Tadić a été arrêté le 12 février 1994 à Munich, en Allemagne. Il a plaidé non coupable de tous les chefs d’accusation retenus contre lui lors de sa comparution initiale devant le Tribunal, qui s’est tenue le 26 avril 1995. Le procès s’est ouvert le 7 mai 1996 devant la Chambre de première instance II, composée des Juges Gabrielle Kirk McDonald (Présidente), Ninian Stephen et Lal Chand Vohrah. Le 7 mai 1997, la Chambre de première instance a reconnu Duško Tadić coupable de neuf chefs d’accusation, et l’a déclaré partiellement coupable de deux chefs :

  1. Crimes contre l’humanité, ayant pris la forme de persécution pour des raisons politiques, raciales et/ou religieuses, assassinat et actes inhumains ; et
  2. Violations des lois ou coutumes de la guerre, ayant pris la forme de traitement cruel.

Le 14 juillet 1997, la Chambre de première instance a imposé des peines allant jusqu’à 20 ans d’emprisonnement. La Chambre a ordonné la confusion des peines. La Défense et l’Accusation ont fait appel du jugement rendu le 7 mai 1997. Duško Tadić a également fait appel du jugement portant condamnation. Les procédures liées aux requêtes de l'appelant aux fins d'obtenir l'autorisation de présenter des éléments de preuve supplémentaires ont duré un certain temps, au cours duquel les parties ont chacune demandé, à plusieurs reprises, que leur soit accordé plus de temps. Les arguments oraux des parties sur les trois appels interjetés ont été entendus par la Chambre d'appel entre le 19 et le 21 avril 1999.

Les conclusions de la Chambre d’appel

L’appel interjeté par l’accusé

La Chambre d’appel s’est prononcée sur deux moyens d’appel soulevés par la Défense. L'autorisation de modifier l'acte d'appel de Duško Tadić afin d'y inclure un deuxième motif d'appel relatif à la conduite de son ancien conseil n'a pas été accordée par la Chambre d'appel et n'est pas traitée dans cet arrêt. Les conclusions de la Chambre d’appel sont les suivantes :

  1. La Chambre d’appel rejette l’affirmation de l’appelant selon laquelle son droit à un procès équitable n'a pas été respecté parce qu’il n’y a pas eu d'égalité des armes entre l'Accusation et la Défense étant donné les circonstances dans lesquelles s'est déroulé le procès ; et       
  2. La Chambre de première instance n'a commis aucune erreur en décidant d'être convaincue au-delà de tout doute raisonnable que l'appelant était coupable du meurtre de deux policiers musulmans.
  3.  

L’appel incident interjeté par le Procureur

S’agissant des cinq moyens d’appel interjetés par l’Accusation, les conclusions de la Chambre d’appel sont les suivantes :

  1. La Chambre d'appel estime qu'il existait un conflit armé international et qu'en conséquence le régime des infractions graves instauré par les Conventions de Genève s'applique. La Chambre d'appel conclut également que les victimes étaient des personnes protégées au titre de la quatrième Convention de Genève;
  2. La Chambre d'appel conclut que la Chambre de première instance a commis une erreur en décidant de ne pas pouvoir, sur la base des éléments de preuve qui lui ont été soumis, se convaincre au-delà de tout doute raisonnable que l'accusé avait joué un quelconque rôle dans le meurtre des cinq hommes originaires du village de Jaskići. De l'avis de la Chambre d'appel, la Chambre de première instance a également commis une erreur sur le point de la doctrine de l'objectif partagé;
  3. Un acte exécuté pour des motifs purement personnels peut constituer un crime contre l'humanité;
  4. L'intention discriminatoire n'est pas indispensable pour tous les crimes contre l'humanité, mais uniquement pour ceux qui ont un rapport avec la persécution; et
  5. Une chambre de première instance est en droit d'ordonner, selon les circonstances qui caractérisent l'affaire qui lui est présentée, la divulgation d'une déclaration d'un témoin de la Défense après l'interrogatoire principal de ce témoin.

 

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