Communiqué de presse |
CHAMBRES
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La Haye, 30 mars 2004
RS/S.I.P./834f
Jugement rendu dans l'affaire le procureur c/ Miroslav Deronjic :
L'accusé condamné à 10 ans d'emprisonnement
Veuillez trouver ci-dessous le résumé du jugement rendu par la Chambre de 1ère instance II composée des juges Wolfgang Schomburg (Président), Florence Mumba et Carmel Agius, tel que lu à l’audience de ce jour par le Juge Président :
RÉSUMÉ DU JUGEMENT
1. Nous allons à présent donner lecture du résumé du jugement rendu par la Chambre de première instance. Le texte de ce résumé sera disponible en anglais, en français et en B/C/S, à l’issue de l’audience. Seul fait autorité le texte du jugement dans lequel sont exposées les constatations et les conclusions de la Chambre de première instance, ainsi que ses motifs.
2. L’accusé, Miroslav Deronjic, est né le 6 juin 1954 dans la municipalité de Bratunac.
3. Miroslav Deronjic a été mis en accusation le 3 juillet 2002. La Chambre de première instance tient à souligner qu’elle n’est appelée à se prononcer que sur la responsabilité pénale de Miroslav Deronjic dans les persécutions commises le 9 mai 1992 dans le village de Glogova.
4. La présente Chambre de première instance doit mettre en balance d’une part, l’extrême gravité des crimes et d’autre part, le fait que l’accusé, notamment en reconnaissant qu’il est personnellement responsable de ces crimes commis en un seul jour, contribue à l’établissement de la vérité.
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5. Le 6 juillet 2002, Miroslav Deronjic a été arręté à Bratunac et transféré au Quartier pénitentiaire des Nations Unies le 8 juillet 2002. Lors de sa comparution initiale le 10 juillet 2002, Miroslav Deronjic a plaidé non coupable des six chefs retenus à son encontre dans l’acte d’accusation initial, lequel a ensuite été modifié à deux reprises. Dans la dernière version de l’acte d’accusation, datant du mois de septembre 2003, seul le chef de persécutions tombant sous le coup de l’article 5 h) du Statut, a été retenu. C’est sur cette base que l’accusé est jugé.
6. L’accusé a plaidé coupable de ce chef qui est repris dans l’accord sur le plaidoyer présenté conjointement par les parties, auquel est joint un exposé des faits distinct.
7. La Chambre de première instance a d’office ordonné la présentation d’un rapport d’expert sur le comportement social de l’accusé, lequel a été établi par Mme Ana Najman, de Belgrade. La Chambre a également admis le rapport d’expert sur l’application des peines présenté par M. Ulrich Sieber, directeur de l’Institut Max Planck de Droit pénal étranger et international de Fribourg, en Allemagne, dans l’affaire Dragan Nikolic.
8. Des audiences consacrées à la peine ont eu lieu les 27 et 28 janvier 2004, ainsi que le 5 mars 2004. L’accusé a témoigné le 27 janvier 2004.
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9. La Chambre de première instance va à présent s’attacher à la carrière professionnelle de Miroslav Deronjic, puis aux faits de l’espčce.
10. De septembre 1990 à la fin d’avril 1992, Miroslav Deronjic était Président du conseil municipal SDS (Parti démocratique serbe de Bosnie-Herzégovine) de Bratunac. Il a également présidé les trois cellules de crise qui se sont succédé dans la municipalité de Bratunac d’octobre 1991 à juin 1992. Dès sa création à la fin d’avril 1992, la cellule de crise de Bratunac a assumé les pouvoirs du conseil exécutif de la municipalité et des organes de l’assemblée municipale. Elle a été rebaptisée « commission de guerre » sur décision de la Présidence de la République serbe de Bosnie-Herzégovine en juin 1992. Miroslav Deronjic siégeait alors en son sein. Durant l’été 1993, il est devenu membre du Comité central du SDS. Le 11 juillet 1995, Miroslav Deronjic a été nommé commissaire des affaires civiles pour la municipalité de Srebrenica. En 1996, il est devenu Vice-Président du SDS, sous la présidence de Radovan Karadzic, poste qu’il a occupé jusqu’ŕ sa démission en 1997.
11. La municipalité de Bratunac, située dans l’est de la République de Bosnie-Herzégovine, était d’une importance stratégique majeure pour les Serbes de Bosnie car elle reliait cette région à l’État serbe voisin.
12. Selon les résultats du recensement de 1991, la municipalité de Bratunac comptait 33 619 habitants, dont les deux-tiers environ étaient des Musulmans de Bosnie et un tiers environ des Serbes de Bosnie.
13. Avant le 9 mai 1992, le village de Glogova, situé dans cette municipalité, était principalement peuplé de Musulmans de Bosnie. En 1991, il comptait 1 913 habitants dont 1 901 Musulmans.
14. D’avril à décembre 1991, les dirigeants serbes de Bosnie ont tenu une série de réunions préparatoires au cours desquelles a germé l’idée d’une « Grande Serbie » débarrassée de tous les autres groupes ethniques. Ce projet a finalement abouti lors d’une réunion convoquée le 19 décembre 1991, et présidée par Radovan Karadzic. Celui-ci a alors annoncé qu’un État serait créé, la République serbe de Bosnie-Herzégovine. Les présidents des conseils municipaux, dont Miroslav Deronjic, se sont vu remettre des instructions écrites « strictement confidentielles ». Ces instructions s’adressaient aux municipalités dans lesquelles les Serbes de Bosnie étaient en majorité (variante A) ou en minorité (variante B). La municipalité de Bratunac était de type B.
15. Au printemps 1992, un conflit armé a éclaté entre les Serbes et les non-Serbes en République de Bosnie-Herzégovine. Des forces armées ont lancé des attaques systématiques et généralisées contre la population musulmane de Bosnie dans cette région.
16. En avril/mai 1992, l’accusé savait que pour réaliser l’objectif commun mentionné précédemment, il avait aussi été prévu de recourir à la force et il en avait déjà été fait usage dans des municipalités voisines. À Glogova, l’accusé a agi en conséquence.
17. « L’usage de la force » impliquait notamment l’expulsion par la force des habitants musulmans de leurs maisons et l’utilisation d’armes contre des Musulmans de Bosnie, dont beaucoup ont été tués au cours de ces opérations.
18. Des forces serbes de Bosnie ont pris le contrôle de la municipalité de Bratunac le 17 avril 1992. Entre la fin d’avril et le début de mai 1992, Miroslav Deronjic, exerçant en sa qualité de Président de la cellule de crise de Bratunac un contrôle de facto et de jure sur la TO et un contrôle de facto sur les forces de police de Bratunac, a autorisé celles-ci à désarmer la population musulmane de Glogova. À partir de ce moment, Glogova était non seulement un village peuplé de civils non armés, mais aussi un village non défendu.
19. Le 27 avril 1992 ou vers cette date, Milutin Milosevic, chef du SUP serbe, s’exprimant au nom de Miroslav Deronjic, a déclaré aux habitants de Glogova que leur village ne serait pas attaqué puisqu’ils avaient remis leurs armes.
20. Lors d’une réunion de la cellule de crise tenue le 8 mai 1992, Miroslav Deronjic a annoncé que l’attaque contre Glogova serait lancée le lendemain. Il a expliqué l’importance stratégique de la prise de Glogova et a indiqué que le projet de création d’un territoire ethniquement serbe ne pourrait être mis en śuvre dans la municipalité de Bratunac avant la prise de Glogova et le transfert de toute sa population musulmane dans des territoires non serbes. Il a précisé que s’ils n’opposaient aucune résistance, tous les habitants musulmans de Glogova devraient être amenés au centre du village puis conduits en autocar ou en camion hors de la municipalité de Bratunac, à Kladanj. Miroslav Deronjic a ajouté que si tout se passait bien à Glogova, l’opération visant à chasser à jamais les Musulmans de Bosnie se poursuivrait les jours suivants dans la ville de Bratunac et, notamment, dans les communautés locales de Voljavica et Suha.
21. Lors de cette réunion de la cellule de crise, Miroslav Deronjic, en sa qualité de Président, a donné l’ordre d’attaquer Glogova, village non défendu peuplé de civils non armés, de le réduire en cendres et d’expulser par la force les Musulmans de Bosnie qui y habitaient, tout en sachant et en acceptant que cette attaque ferait très vraisemblablement des morts parmi eux.
22. La Chambre de première instance connaît le nom de 64 Musulmans de Bosnie du village de Glogova qui ont été exécutés par des membres des forces assaillantes le 9 mai 1992. Le nom de ces victimes figure dans la XIIe partie du jugement.
23. L’attaque de Glogova était une opération conjointe, coordonnée et surpervisée par Miroslav Deronjic. Les assaillants étaient des membres de la JNA, de la TO de Bratunac, des forces de police de Bratunac, ainsi que d’autres groupes paramilitaires.
24. Les assaillants ont chassé par la force les civils musulmans de Bosnie de leurs maisons et les ont transférés hors du village de Glogova. Plus précisément, les femmes et les enfants qui ont survécu à l’attaque ont été embarqués dans des autocars et expulsés de la municipalité de Bratunac, vers des territoires contrôlés par les Musulmans. Rien dans l’acte d’accusation ou l’exposé des faits ne précise ce qu’il est advenu de ces victimes, que ce soit pendant l’attaque, ou durant leur transport et après celui-ci.
25. En plaidant coupable, l’accusé a reconnu qu’il était présent lors de l’attaque de Glogova, lorsque les assaillants ont systématiquement incendié les maisons, les bâtiments, les champs et les meules de foin appartenant aux Musulmans de Bosnie ; ils se sont ainsi livrés sur une grande échelle à une destruction arbitraire des habitations, des locaux commerciaux et des biens mobiliers appartenant aux Musulmans du village de Glogova. Il a admis que la destruction de la mosquée était également une conséquence prévisible de ces actes.
26. Par suite de l’attaque ordonnée par Miroslav Deronjic, une partie importante de Glogova a été entièrement rasée et il n’est plus resté aucun Musulman dans le village.
27. La Chambre de première instance tient à souligner qu’elle n’est pas appelée à se prononcer sur la poursuite de l’opération dans toute la municipalité de Bratunac en exécution du même plan. Le 10 mai 1992, cette opération s’est poursuivie dans la ville même de Bratunac et, notamment, dans les communautés locales de Voljavica et de Suha. Du 8 au 12 mai 1992, aux dires de l’accusé, 100 à 200 personnes au total ont été tuées dans la municipalité de Bratunac.
28. Le 10 ou le 11 mai 1992, Miroslav Deronjic a été invité ŕ se rendre à Pale pour faire un rapport sur les événements survenus à Glogova et/ou dans la municipalité de Bratunac. Assistaient à la réunion de Pale Radovan Karadzic, Velibor Ostojic et Ratko Mladic, ainsi qu’une cinquantaine d’autres personnes, dont les présidents des cellules de crise d’autres municipalités. Des cartes donnant la composition ethnique des différentes parties de la Bosnie-Herzégovine ŕ l’aide de différentes couleurs étaient suspendues au mur derrière eux. Les régions serbes étaient représentées en bleu. Après avoir fait son rapport et montré sa municipalité sur la carte, Miroslav Deronjic a été applaudi et Velibor Ostojic a dit : « Nous pouvons maintenant colorier Bratunac [sic] en bleu. »
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29. La Chambre de première instance va à présent examiner la gravité de l’infraction et les circonstances aggravantes.
30. La Chambre est d’accord avec le Procureur pour estimer que « le crime pour lequel Miroslav Deronjic doit être condamné est justement le type de crime à propos duquel le Conseil de sécurité s’est déclaré gravement alarmé dans la résolution 808. Les événements survenus à Glogova le 9 mai 1992 constituent un exemple classique de nettoyage ethnique et c’est précisément à cause d’eux que le Conseil de sécurité a créé ce tribunal. L’attaque de Glogova n’était pas un acte isolé ou fortuit, mais un événement majeur qui s’inscrivait dans le cadre d’un plan plus vaste dont l’objectif était de diviser la Bosnie-Herzégovine et de créer des territoires ethniquement serbes. » La Chambre rejoint également le Procureur lorsqu’il dit que les persécutions, dont l’accusé a plaidé coupable, constituent un crime « très grave de par sa nature ».
31. Afin de fixer la peine, la Chambre de première instance apprécie la gravité du crime et les circonstances aggravantes en prenant en compte :
- le nombre élevé de victimes,
- le fait que Miroslav Deronjic a abusé des pouvoirs que lui conféraient ses fonctions de dirigeant politique de la municipalité de Bratunac,
- le fait qu’il a donné l’autorisation de désarmer les habitants de Glogova,
- le rôle qu’il a joué en ordonnant l’attaque de Glogova et pendant celle-ci avec l’intention de procéder à un nettoyage ethnique,
- la vulnérabilité et l’impuissance toutes particulières des victimes prises au piège de l’attaque.
32. La Chambre de première instance tient compte en particulier des effets à long terme de l’attaque sur les victimes de Glogova et sur leurs proches. Parmi les anciens habitants de Glogova, nombreux sont ceux qui souffrent aujourd’hui encore des effets persistants des horreurs dont ils ont été témoins lors de l’attaque de leur village, et déclarent entre autres, comme l’Accusation l’a révélé à la Chambre de première instance :
La situation empire de jour en jour.
[...]
Parfois c’est si pénible que l’on en vient à regretter d’avoir survécu.
[...]
J’aimerais tant pouvoir dormir la nuit. Je souffre de partout et je dois garder les fenêtres ouvertes, sinon j’ai l’impression d’étouffer. Lorsque j’arrive à m’endormir, je suis souvent réveillée par des cauchemars où des Tchetniks nous poursuivent. Tout récemment encore, je me suis réveillée en hurlant après l’un de ces cauchemars et je n’ai pas pu expliquer à mes enfants ce dont j’avais rêvé.
[...]
Certaines nuits, le souvenir des événements passés me hante et j’ai le sommeil agité. Je me réveille, persuadé que la guerre se poursuit et je cours me mettre à l’abri. Parfois je m’enfuis de la maison. C’est pour cette raison que je dors toujours au rez-de-chaussée.
[...]
Mon fils cadet, aujourd’hui âgé de 23 ans environ, souffre aussi ; il a des problèmes de santé. J’avais réussi à le cacher dans mes vêtements le jour où Glogova a été attaqué cependant que les hommes étaient tués. Ces événements ont eu un effet dévastateur sur lui. Il ne peut plus dormir et ses jambes s’engourdissent. J’ai peur qu’il ne perde la raison. Il fait souvent des cauchemars et à son réveil, il se rue à la fenêtre pour respirer un peu d’air frais. Parfois, il n’ose pas retourner se coucher seul.
[...]
Je suis retournée à Glogova une dizaine de fois et chaque fois que je quitte ce village, j’ai l’impression d’être morte.
[...] Je ne peux oublier que ma fille qui n’avait que 13 ans a été emmenée par des soldats [...]
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Pour conclure, si l’on tient compte uniquement de la gravité du crime et de toutes les circonstances aggravantes retenues, la Chambre de première instance conclut à l’unanimité qu’une peine extrêmement lourde s’impose. Toutefois, il existe des circonstances atténuantes que la Chambre de première instance va à présent exposer.
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33. L’Accusation fait valoir à juste titre que « les circonstances atténuantes touchent à la peine mais ne diminuent en rien la gravité du crime ».
34. La Chambre de première instance s’attache principalement
au plaidoyer de culpabilité de l’accusé
au sérieux et à l’étendue de la coopération qu’il a fournie,
mais tient également compte de l’ensemble des circonstances atténuantes énumérées par les parties, à savoir les remords exprimés, la moralité et la conduite de l’accusé ainsi que sa contribution aux efforts faits pour empêcher toute tentative de réécrire l’histoire.
35. La Chambre de première instance reconnaît l’importance du plaidoyer de culpabilité de Miroslav Deronjic en ce qu’il constitue une acceptation de sa responsabilité pénale individuelle.
36. À ce propos, la Chambre de première instance ne peut qu’approuver la Défense lorsqu’elle fait valoir l’importance de la reconnaissance de la culpabilité et lorsqu’elle ajoute qu’il « faut avant tout prouver qu’un crime a été commis, et donc lever le voile sur la politique menée par l’un ou l’autre des trois camps qui a abouti à ce crime. En ce sens, la peine est une notion toute relative car [...] aucune peine ne saurait réparer pleinement le préjudice subi par les victimes ».
37. La Chambre de première instance estime qu’en plaidant coupable et en acceptant de témoigner dans d’autres procès, Miroslav Deronjic aide le Tribunal dans sa quête de la vérité. De même, il a évité aux victimes et aux témoins de déposer à propos d’événements traumatisants et douloureux, et de rouvrir ainsi de vieilles blessures.
38. La Chambre de première instance accueille l’argument de l’Accusation selon lequel l’accusé a coopéré largement avec elle en lui communiquant des informations précieuses et concordantes, en témoignant dans d’autres affaires portées devant le Tribunal, en fournissant des documents originaux, en révélant à l’Accusation de nouveaux crimes et en lui signalant des auteurs qu’elle ne connaissait pas.
39. La Chambre de première instance prend en considération le fait que l’accusé a témoigné dans d’autres affaires portées devant le Tribunal, à savoir en tant que témoin de la Chambre dans le cadre de l’audience consacrée à la peine dans l’affaire Momir Nikolic, du procès en appel Krstic et du procès Blagojevic et consorts, et en tant que témoin à charge dans le cadre des procès Milosevic et Krajisnik. Il n’appartient pas à la présente Chambre de porter un jugement sur la déposition faite par l’accusé dans d’autres procès tenus devant le Tribunal. Toutefois, elle doit rappeler que l’accusé a, de son propre aveu, fait des déclarations partiellement mensongères lorsqu’il était interrogé par l’Accusation.
40. La Chambre de première instance, tenant compte de l’ensemble de ces circonstances atténuantes, et accordant en particulier une grande importance au plaidoyer de culpabilité de l’accusé et à la large coopération fournie à l’Accusation, est convaincue qu’une réduction importante de la peine s’impose.
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41. Dans le cadre de l’accord sur le plaidoyer, l’Accusation a requis une peine d’emprisonnement de dix ans. La Défense a, quant à elle, recommandé une peine d’emprisonnement de six ans au plus.
DISPOSITIF
POUR LES RAISONS SUSMENTIONNÉES, la Chambre de première instance, après avoir examiné tous les éléments de preuve ainsi que les arguments des parties,
APRÈS AVOIR ENTENDU votre plaidoyer de culpabilité, et
APRÈS VOUS AVOIR RECONNU COUPABLE des crimes qui sous-tendent le chef de Persécutions dans le Deuxième acte d’accusation modifié,
VOUS CONDAMNE, Miroslav Deronjic, À UNE PEINE UNIQUE pour Persécutions, un crime contre l’humanité,
incluant :
l’attaque du village de Glogova
le meurtre de civils musulmans de Bosnie de Glogova
le déplacement forcé de civils musulmans de Bosnie de Glogova hors de la municipalité de Bratunac
la destruction d’un édifice religieux (la mosquée de Glogova), et
la destruction de biens de caractère civil appartenant à des Musulmans de Glogova
VOUS CONDAMNE, Miroslav Deronjic, à sa majorité, le Juge Schomburg étant en désaccord, à dix années d’emprisonnement et
DIT qu’en application de l’article 101 C) du Règlement, vous avez droit à ce que la période passée en détention préventive, calculée à compter de la date de votre arrestation le 6 juillet 2002, ainsi que toute période supplémentaire que vous passerez en détention dans l’attente d’une décision en appel, soient décomptées de la durée de la peine.
En vertu de l’article 103 C) du Règlement, vous resterez sous la garde du Tribunal jusqu’à ce que soient arrêtées les dispositions nécessaires à votre transfert vers l’État dans lequel vous purgerez votre peine.
RÉSUMÉ DE L’OPINION DISSIDENTE DU JUGE SCHOMBURG
1. En qualité de Président de la Chambre de première instance, j’ai signé le présent jugement. Toutefois, pour des raisons fondamentales, je regrette de ne pouvoir approuver la peine infligée.
2. La peine infligée n’est pas à la mesure des crimes qu’elle sanctionne et elle ne se place pas dans le bon registre. L’accusé mérite une peine d’emprisonnement d’au moins vingt ans.
3. Deux raisons principales me conduisent à conclure que la peine infligée par la majorité et requise par l’Accusation n’est pas conforme à la mission et à l’esprit de ce Tribunal.
4. Premièrement, la série d’actes d’accusation présentés, y compris le Deuxième acte d’accusation modifié, présente de manière arbitraire des faits sortis de leur contexte, celui d’un plan criminel plus large et, pour une raison obscure, limités à un seul jour et au seul village de Glogova.
5. Deuxièmement, même fondés sur cet exposé des faits fragmentaire, les crimes atroces, planifiés de longue date et commis par un haut responsable appellent davantage qu’une peine d’emprisonnement de dix ans qui pourrait se ramener, en cas de libération anticipée, à six ans et huit mois de détention effective.
6. Puisque les victimes et leurs familles n’ont pas eu l’occasion d’intervenir en personne devant la Chambre de première instance, je tiens à donner la parole à l’une d’elles, en guise de conclusion :
« J’ai vu Miroslav Deronjic plaider coupable à la télévision. Les Musulmans de Bosnie à qui j’ai parlé au sein de la communauté ont été soulagés lorsqu’il a reconnu sa culpabilité. C’est un élément positif qui pourra apaiser les souffrances dans la communauté à condition que la sanction soit adéquate. Une sanction modérée ne servirait à rien : Deronjic n’est pas digne de compassion car il n’en a montré aucune, ni pour les gens de Glogova ni pour les autres Musulmans de Bratunac et de Srebrenica. »
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Le texte intégral du jugement est disponible sur demande aux Services d’Information Publique ainsi que sur le site Internet du Tribunal.
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Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie
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