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L'accord entre l'Italie et l'ONU sur l'exécution des peines du Tribunal : un compromis équilibré entre le droit international et le droit interne

Communiqué de presse TRIBUNAL

(Destiné exclusivement à l'usage des médias. Document non officiel)

La Haye, 6 février 1997
CC/PIO/155-F

 

L'accord entre l'Italie et l'ONU sur l'exécution des peines du Tribunal :
un compromis équilibré entre le droit international et le droit interne

Le Statut du Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie prévoit que les peines d'emprisonnement prononcées par les Juges seront subies "dans un Etat désigné par le Tribunal sur la liste des Etats qui ont fait savoir au Conseil de Sécurité qu'ils étaient disposés à recevoir des condamnés" (Article 27).

Pour être en mesure d'appliquer cet Article, le Tribunal, au nom des Nations-Unies, a déployé des efforts soutenus afin de dresser une liste d'Etats disposés à emprisonner les condamnés (voir en annexe) et a élaboré un Accord-cadre sur l'exécution des peines.

Fixant les principales conditions qui doivent régir l'exécution des peines, cet Accord-cadre sera adapté au cas par cas au cours des négociations préalables à sa signature par chacun des Etats concernés.

L'Italie est le premier pays à signer un tel Accord. D'autres Etats envisagent de le faire prochainement.
UN EQUILIBRE ENTRE LA PRIMAUTE DU TRIBUNAL INTERNATIONAL ET LES CONTRAINTES DU DROIT NATIONAL

Inspiré par la nécessité de trouver un compromis viable entre le droit international et la législation de l'Etat disposé à recevoir des condamnés, l'Accord-cadre établit un équilibre entre le principe de la primauté du Tribunal et les contraintes issues du droit interne de l'Etat concerné.

Ainsi, alors que l'Accord avec l'Italie réaffirme clairement la primauté du Tribunal, il reconnaît aux autorités italiennes une certaine flexibilité dans son application, sous réserve de l'assentiment du Tribunal.
La primauté du Tribunal est clairement affirmée

La primauté du Tribunal, implicite au fil des 13 articles de l'Accord-cadre, est explicitement affirmée dans l'article 3.

L'article 3(1) stipule que les autorités compétentes de l'Etat signataire sont tenues par la durée de la peine prononcée par le Tribunal. L'Etat du lieu d'éxécution de la peine n'a aucune latitude pour altérer la durée de celle-ci.

De plus, l'Etat signataire qui envisagerait de modifier les conditions d'emprisonnement d'une personne incarcérée sur son territoire au nom du Tribunal devra au préalable demander, et obtenir, l'accord du Président du Tribunal.
L'obligation des Etats de respecter leur droit interne est reconnue mais soumise à la supervision du Tribunal

L'article 3(2) prévoit que les conditions d'emprisonnement sont régies par la législation applicable de l'Etat d'accueil du condamné, sous réserve de la supervision par le Tribunal.

L'article 3(3) réserve à l'Italie une certaine marge de manoeuvre en stipulant que le ministre italien de la Justice informera le Président du Tribunal au cas où un condamné pourrait bénéficier des dispositions du droit interne relatives à des mesures non carcérales ou à un travail à l'extérieur de la prison. De même l'article 8(1) prévoit la possibilité pour une personne incarcérée de bénéficier de la grâce ou de la commutation de peine selon la loi italienne.

Néanmoins, à chaque fois qu'un Etat signataire de l'Accord-cadre voudrait modifier les conditions d'emprisonnement d'un condamné, le Président du Tribunal devra pouvoir exercer une supervision préalable, en consultation avec les Juges.

Ainsi, les articles 3(4) et 8(2) prévoient-ils que si le Président et les Juges décident qu'un condamné ne doit pas bénéficier des mesures envisagées aux articles 3(3) et 8(1), le condamné sera rendu à la juridiction du Tribunal.
La latitude d'un Etat signataire de l'Accord-cadre à déterminer les conditions de détention est restreinte par le Préambule ainsi que par plusieurs articles de l'Accord-cadre.

Le Préambule stipule que les conditions de détention dans les Etats acceptant des personnes condamnées par le Tribunal doivent être conformes aux standards internationaux énoncés dans l'Ensemble des Règles Minima pour le Traitement des Prisonniers (adopté par le Conseil Economique et Social de l'ONU), dans l'Ensemble de Principes pour la Protection de toutes les Personnes soumises à une Forme quelconque de Détention ou d'Emprisonnement (adopté par l'Assemblée Générale de l'ONU) , ainsi que dans les Principes Fondamentaux pour le Traitement des Détenus (adoptés par l'Assemblée Générale).

L'article 6 de l'Accord-cadre ajoute une garantie supplémentaire en prévoyant que le Comité International de la Croix-Rouge pourra inspecter les lieux de détention des condamnés du Tribunal. Le Rapport du CICR sera transmis au ministre de la Justice de l'Etat concerné ainsi qu'au Président du Tribunal. Celui-ci pourra demander au ministre de la Justice de l'Etat concerné de l'informer du suivi des éventuelles modifications suggérées par le CICR.

L'APPLICATION DE L'ACCORD EN PRATIQUE

L'Accord ne s'applique pas automatiquement mais au cas par cas, à la suite de consultations entre les Parties concernant un condamné déterminé.
En vertu des procédures suivies par le Tribunal, le lieu d'exécution d'une peine prononcée par le Tribunal est choisi par le Greffier après consultation du Président du Tribunal et du Président de la Chambre. En conséquence, aux termes de l'Article 2 de l'Accord, si le Greffier estime qu'une peine devrait être subie en Italie, il demandera aux autorités italiennes d'accepter la personne condamnée. Au cas où l'Italie déciderait de se conformer à une telle demande dans une affaire déterminée, le Greffier prendra les dispositions nécessaires pour le transfert de la personne condamnée du Tribunal au centre de détention de l'Etat d'exécution. Aux termes de l'Article 103(B) du RPP, un tel transfert doit être effectué aussitôt que possible après expiration du délai d'appel.
Aux termes de l'Article 7(1) de l'Accord, le ministre de la Justice de l'Etat désigné devra aviser le Greffier au cas où un condamné viendrait à mourrir ou à s'échapper. Il devra aussi prendre contact avec lui deux mois avant l'achèvement de la peine. L'Article 7(2) prévoit que le Président du Tribunal et le ministre de la Justice se consulteront sur toutes les questions relatives à l'exécution de la peine.
Achèvement de l'exécution de la peine

L'Article 9 traite de la fin de l'exécution de la peine. Le Tribunal et l'Etat d'exécution peuvent à tout moment décider de mettre fin à l'exécution de toute sentence, cas dans lequel le condamné serait retransféré au Tribunal ou vers un autre Etat.

Aux termes de l'Article 10, les Etats qui ne seraient pas en mesure, pour des raisons juridiques ou pratiques, de poursuivre l'exécution de la peine, doivent en informer le Greffier qui prendra les mesures nécessaires.

Les frais de transfert des personnes condamnées vers ou en provenance de l'Etat désigné sont supportés par le Tribunal, en vertu de l'Article 11. Toutefois, tous les autres frais relatifs à l'exécution de la peine seront supportés par l'Etat exécutant.

L'Article 12 prévoit que l'Accord entrera en vigueur après notification par le gouvernement italien aux Nations Unies de l'accomplissement de toutes ses procédures internes pertinentes.

Enfin, l'Article 13 prévoit que chacune des Parties peut mettre fin à l'Accord avec un préavis de deux mois.
Jusqu'à sa parution sur notre site, le texte intégral de l'Accord est disponible sur demande au Service de presse et d'information.

ANNEXE

I. ETATS DISPOSES A RECEVOIR DES CONDAMNES

Les pays suivants ont expréssement indiqué leur volonté d'exécuter les peines prononcées par le Tribunal: Allemagne; Bosnie-Herzégovine; Croatie; Danemark; Finlande; Iran; Italie; Norvège; Pakistan; Pays-Bas et Suède.

Quatre autres pays, bien que n'ayant pas expréssement indiqué au Tribunal leur volonté d'exécuter les peines, ont également intégré à leur législation des dispositions leur permettant d'exécuter en principe les peines prononcées par le Tribunal: l'Autriche, la Belgique, l'Espagne et la Suisse.
II. DISPOSITIONS DU STATUT ET DU REGLEMENT RELATIVES A L'EXECUTION DES PEINES

(i) Dispositions du Statut


Article 27 (Exécution des peines)

La peine d'emprisonnement est subie dans un Etat désigné par le Tribunal sur la liste des Etats qui ont fait savoir au Conseil de Sécurité qu'ils étaient disposés à recevoir des condamnés. La réclusion est soumise aux règles nationales de l'Etat concerné, sous le contrôle du Tribunal International.
Article 28 (Grâce et commutation de peine)

Si le condamné peut bénéficier d'une grâce ou d'une commutation de peine en vertu des lois de l'Etat dans lequel il est emprisonné, cet Etat en avise le Tribunal. Le Président du Tribunal, en consultation avec les juges, tranche selon les intérêts de la justice et les principes généraux du droit.
(ii) Dispostions du Règlement

Article 103 (Lieu d'emprisonnement)

(A) La peine de prison est exécutée dans un Etat choisi par le Tribunal sur une liste d'Etats ayant indiqué leur volonté d'accueillir des personnes condamnées pour l'exécution de leur peine.
(B) Le transfert du condamné vers cet Etat est effectué aussitôt que possible après expiration du délai d'appel.


 

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