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Rapport sur la stratégie d’achèvement des travaux : allocution de Serge Brammertz Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie devant le Conseil de sécurité de l’ONU

BUREAU DU PROCUREUR
COMMUNIQUÉ DE PRESSE
(Destiné exclusivement à l’usage des médias. Document non officiel.)
La Haye, le 10 décembre 2014
LP/OTP/PR1615f

Rapport sur la stratégie d’achèvement des travaux : allocution de Serge Brammertz Procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie devant le Conseil de sécurité de l’ONU

Serge Brammertz, Procureur du TPIY, a présenté aujourd’hui devant le Conseil de sécurité de l’ONU le 22e rapport de son bureau sur les progrès réalisés dans l’accomplissement de son mandat. Il a fait le point sur l’état d’avancement des procès en première instance et en appel, la coopération entre le Bureau du Procureur et les pays de l’ex‑Yougoslavie et les poursuites pour crimes de guerre menées par les autorités nationales. Il a parlé de l’affaire Šešelj en particulier et des réactions provoquées par les déclarations négatives faites par l’accusé, ainsi que de la nécessité de rendre le jugement au plus vite. Il a également noté la nécessité d’intensifier la recherche des personnes disparues dans la région. Constatant que la relation de confiance entre le Tribunal et ses défenseurs était actuellement mise à rude épreuve, il a souligné l’importance de se livrer à une réflexion. Serge Brammertz a conclu en rappelant que le Bureau du Procureur s’employait à terminer ses travaux conformément à la stratégie d’achèvement.

Pour commencer, Serge Brammertz a abordé la fin du procès de Radovan Karadžić, procès au cours duquel le Bureau du Procureur et la Défence ont appelé plus de 550 témoins à la barre et présenté plus de 10 000 pièces à conviction, soit au total 165 000 pages de compte rendu d’audience et d’éléments de preuve documentaires. Il a exprimé la gratitude du Bureau du Procureur envers toutes les victimes et tous les témoins qui, en participant au procès, ont contribué à rendre justice.« Sans leur courage, ce procès, comme tous les autres, n’aurait pas été possible », a-t-il déclaré. Le Procureur a également précisé qu’il restait deux procès en première instance (le procès Mladić et le procès Hadžić), que, dans ces procès, la présentation des moyens à décharge était en cours et que cinq affaires étaient en appel.

Serge Brammertz a indiqué que les retards survenus dans les affaires Hadžić et Šešelj découlaient d’événements échappant au contrôle du Bureau du Procureur. Concernant le dernier retard accusé dans l’affaire Šešelj, il a déclaré : « Le Bureau du Procureur comprend et partage la frustration de tous ceux qui déplorent que le jugement n’ait pas encore été rendu, alors que le dernier témoin dans cette affaire a été entendu en juillet 2010 et que les débats ont pris fin en mars 2012. »

Serge Brammertz a également évoqué les événements qui ont fait suite à la récente décision de la Chambre de première instance d’ordonner la mise en liberté provisoire de Vojislav Šešelj. Il a indiqué que le mépris affiché par ce dernier pour les ordonnances du Tribunal et les insultes qu’il proférait à l’encontre des communautés des victimes avaient poussé le Bureau du Procureur à demander à la Chambre de première instance de mettre fin à sa libération provisoire. Face à la forte réaction provoquée par la libération de Vojislav Šešelj, Serge Brammertz a dit : « Cela devrait nous encourager à redoubler d’efforts pour établir la responsabilité des auteurs de violations graves du droit international humanitaire et lutter résolument contre toute forme de révisionnisme. »

Serge Brammertz a ensuite abordé la coopération du Tribunal et des pays de l’ex-Yougoslavie, faisant observer qu’elle demeurait satisfaisante.

À propos des poursuites pour crimes de guerre menées dans les pays de l’ex‑Yougoslavie, le Procureur a souligné qu’il restait encore des progrès à faire. Il a observé que les accords de coopération nationaux n’avaient pas encore été entièrement mis en œuvre et que les efforts importants qui avaient été consentis pour renforcer les capacités des institutions judiciaires nationales n’avaient pas encore eu les résultats escomptés. Le Procureur a toutefois salué l’opération d’arrestations transfrontalières récemment menée conjointement par les procureurs de Serbie et de Bosnie-Herzégovine : « Cette belle réalisation montre tout ce qu’une coopération efficace peut apporter de plus », a-t-il dit.

À propos des poursuites pour crimes de guerre menées plus particulièrement en Bosnie-Herzégovine et des affaires de catégorie II transférées par le Bureau du Procureur, Serge Brammertz a signalé que cinq de ces affaires n’avaient toujours pas été menées à bien. Il s’est également fait l’écho des préoccupations formulées par le comité de surveillance de la Stratégie nationale pour les crimes de guerre et par les autorités judiciaires nationales au sujet de la tournure que prenait le travail du parquet. « Il reste beaucoup d’obstacles à surmonter, mais une gestion et une direction efficaces du parquet peuvent permettre de corriger le tir et de tirer parti des réalisations passées », a conclu le Procureur.

Serge Brammertz a en outre évoqué les nombreuses rencontres qu’il a eues récemment avec des victimes, soulignant qu’il restait d’autres questions importantes dignes d’attention. Il a observé que la question des réparations à accorder aux victimes du conflit n’avait pas été pleinement et équitablement réglée. Reconnaissant que de nombreuses familles de la région ne savent toujours pas ce qu’il est advenu de leurs proches, le Procureur a souligné que « [l]es efforts entrepris pour retrouver les personnes disparues [devaient] être maintenus et intensifiés ».

Rappelant qu’à la même époque l’année passée, il avait constaté que la relation de confiance entre le Tribunal et le public était mise à rude épreuve, Serge Brammertz a dit : « Malheureusement, parmi les victimes et les défenseurs du Tribunal, nombreux sont ceux qui pensent que la situation ne s’est pas améliorée. » Il a fait observer que le Tribunal devait se livrer à une réflexion critique, ajoutant ceci : « Comme les juridictions nationales du monde entier, les tribunaux internationaux ne devraient pas être tiraillés entre l’indépendance judiciaire et la gestion efficace des affaires. »

Le Procureur a toutefois dit que l’héritage du Tribunal ne devait pas se mesurer à l’aune des seules dernières années, rappelant que de nombreuses réalisations importantes avaient été accomplies dans l’établissement de la responsabilité des auteurs de crimes commis pendant les conflits en ex‑Yougoslavie. Il a ajouté : « Dans quelques années à peine, le Tribunal achèvera ses travaux et fermera ses portes. Ce n’est qu’à ce moment-là que son héritage pourra être pleinement apprécié. » Serge Brammertz a conclu en rappelant que son bureau restait déterminé à terminer ses travaux aussi efficacement et rapidement que possible.