Serge Brammertz, Procureur du TPIY, a présenté aujourd’hui devant le Conseil de sécurité de l’ONU le 24e rapport de son bureau sur la stratégie d’achèvement des travaux, couvrant la période allant du 16 mai au 15 novembre 2015.
Le Procureur a commencé son allocution en faisant le point sur les quatre derniers procès en première instance et les trois dernières affaires en appel portées devant le TPIY. Le Bureau du Procureur attend le prononcé du jugement dans deux affaires en première instance : Karadžić et Šešelj. Dans l’affaire Mladić, le Bureau du Procureur s’efforce de répondre aux éléments de preuve présentés par la Défense dans le temps minimum nécessaire pour remplir ses obligations. Dans l’affaire Hadžić, il a continué d’étudier toutes les solutions raisonnables permettant d’achever le procès. Le Procureur a informé le Conseil de sécurité de l’ONU que le prononcé de l’arrêt dans l’affaire Stanišić et Simatović et l’audience d’appel dans l’affaire Stanišić et Župljanin se tiendraient la semaine prochaine. Enfin, le Bureau du Procureur attend de connaître la date de l’audience d’appel dans l’affaire Prlić et consorts.
S’agissant des affaires de catégorie 2 transférées au parquet de Bosnie-Herzégovine, le Procureur a rappelé qu’il avait reçu les assurances que, d’ici à la fin de l’année 2015, des décisions en matière de poursuites seraient prises dans toutes les affaires restantes, et a déclaré ce qui suit : « Je suis heureux de vous annoncer que cette promesse a, dans une large mesure, été honorée. »
Plus généralement, s’agissant des poursuites dans les affaires de crimes de guerre, le Procureur s’est exprimé en ces termes : « [L]es poursuites dans les affaires de crimes de guerre menées au plan national continuent de progresser, bien que les résultats soient inégaux et précaires. » Pour ce qui concerne la Bosnie-Herzégovine, les objectifs fixés dans le cadre de la stratégie nationale sur les crimes de guerre sont loin d’être atteints et le Procureur a encouragé le parquet à concentrer ses efforts sur les affaires les plus complexes et hautement prioritaires. Si des résultats importants ont été obtenus en Serbie, le Procureur a insisté sur le fait que « le processus d’établissement des responsabilités en Serbie est à la croisée des chemins ». À ce propos, il a fait remarquer que « le fait que la semaine dernière, des ministres de premier plan ont accueilli chaleureusement et escorté un condamné pour crimes de guerre, le général Vladimir Lazarević, à son retour en Serbie après sa libération lance un très mauvais signal ». Pour ce qui concerne la Croatie, le Procureur a souligné que, avec le transfert d’une affaire de catégorie 2 des autorités de Bosnie Herzégovine aux autorités croates, « [l]es instances judiciaires croates ont désormais une excellente occasion de montrer clairement que le processus d’établissement des responsabilités continue en toute indépendance et impartialité ». Résumant l’état des poursuites dans les affaires de crimes de guerre, le Procureur a fait observer qu’« il est clair que, dans l’ensemble de l’ex-Yougoslavie, l’on peut et doit parvenir à mieux établir les responsabilités ».
Le Procureur a en outre particulièrement insisté sur les défis à relever dans la recherche des personnes disparues, de toutes les parties au conflit. Il a précisé que, pour faire avancer ce processus « les personnes qui connaissent l’emplacement des fosses communes ou d’autres lieux d’ensevelissement des corps doivent être encouragées à se manifester ». Cependant, le Procureur a également signalé que, « dans de nombreuses parties de la société, les criminels de guerre sont encore considérés comme des héros et les personnes qui donnent des informations sur les personnes disparues risquent d’être qualifiées de traîtres et de souffrir d’éventuelles représailles ». Le Procureur a exhorté tous les États de la région « à lancer d’importantes campagnes de sensibilisation du public afin d’encourager les témoins, y compris les auteurs de crimes et leur entourage, à fournir des informations permettant de retrouver les personnes disparues ».
Le Procureur a informé le Conseil de sécurité que son bureau avait récemment achevé une étude détaillée des travaux qu’il avait menés ces deux dernières décennies sur les poursuites dans les affaires relatives à des violences sexuelles perpétrées lors de conflits, étude dont les résultats seront publiés l’année prochaine, au mois d’avril. Cette publication a été conçue comme un manuel pratique pour aider à poursuivre cette catégorie de crimes à l’avenir.
Le Procureur a conclu en soulignant l’importance du prononcé du jugement dans l’affaire Karadžić dans les mois à venir. Il a fait remarquer que, « [c]onformément au mandat confié par le Conseil de sécurité, mon bureau a engagé de nombreuses poursuites contre des dirigeants militaires et civils de toutes les parties au conflit. Mais les procès Karadžić et Mladić incarnent peut-être le mieux la raison d’être de ce Tribunal ainsi que les nombreux défis que nous avons dû relever pour mener à bien notre mandat. Pour cette raison, le fait que ces procès ont été menés à bien apportera la preuve incontestable de l’engagement du Conseil de sécurité, de l’ONU et de ses États Membres en faveur de la paix, la sécurité et la justice internationales ».