Zdravko Tolimir, ancien commandant adjoint chargé du renseignement et de la sécurité au sein de l’état-major principal de l’Armée serbe de Bosnie (VRS), a été condamné aujourd’hui à la réclusion à perpétuité pour génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis en 1995 après la chute des enclaves de Srebrenica et de Žepa en Bosnie-Herzégovine.
Zdravko Tolimir a été déclaré coupable, à la majorité des juges de la Chambre de première instance II, le Juge Nyambe étant en désaccord, de génocide, d’entente en vue de commettre le génocide, de meurtre constitutif d’une violation des lois ou coutumes de la guerre ainsi que d’extermination, de persécutions, d’actes inhumains ayant pris la forme d’un transfert forcé, et d’assassinat constitutifs de crimes contre l’humanité. Il a cependant été acquitté du chef d’expulsion, un crime contre l’humanité. La majorité des juges de la Chambre ne l’a pas déclaré coupable d’assassinat, un crime contre l’humanité, sur la base des principes relatifs au cumul des déclarations de culpabilité.
Ces crimes étaient reprochés à Zdravko Tolimir en tant que membre de deux entreprises criminelles communes visant, pour l’une, à exécuter les hommes musulmans de Bosnie valides de l’enclave de Srebrenica, entre environ le 11 juillet et le 1er novembre 1995, et, pour l’autre, à transférer de force et à expulser les populations musulmanes de Srebrenica et de Žepa, de mars à août 1995. La Chambre de première instance, le Juge Nyambe étant en désaccord, a jugé établi que Zdravko Tolimir avait participé à ces deux entreprises criminelles communes et l’a déclaré coupable des crimes commis pour en réaliser les objectifs, à l’exception du crime d’expulsion. L’Accusé a également été déclaré coupable, le Juge Nyambe étant en désaccord, des crimes prévisibles commis en conséquence de ces entreprises criminelles communes : les meurtres opportunistes de petits groupes d’hommes à Srebrenica, les meurtres ciblés de trois dirigeants musulmans de Žepa et d’autres persécutions.
La Chambre a conclu que les meurtres des hommes valides de l’enclave de Srebrenica avaient été commis dans l’intention discriminatoire requise pour que soient constituées des persécutions. Elle a conclu également que « les actes incriminés ont causé à ces hommes des souffrances telles qu'ils constituent des atteintes graves à leur intégrité physique et mentale et des actes de génocide ». En outre, la majorité des juges a conclu que l’expulsion des civils musulmans de Žepa, la destruction de leurs maisons et mosquées et le meurtre de trois de leurs principaux dirigeants locaux avaient été commis pour que la population musulmane de Bosnie de cette enclave ne soit pas en mesure de se reconstituer. La majorité a conclu également que, « par les souffrances qu’ils ont causées aux femmes, enfants et personnes âgées transférés hors de l’enclave de Srebrenica, les actes incriminés constituent des atteintes graves à leur intégrité physique et mentale à un point tel qu’ils qualifient également le génocide ». Selon la majorité, « l’effet conjugué des opérations de transfert forcé et de meurtre a été dévastateur pour la survie physique de la population musulmane de Bosnie-Herzégovine orientale ». La majorité s’est dite « convaincue que ces opérations avaient pour but de détruire cette population ».
La majorité des juges a conclu que l’Accusé connaissait et partageait l’intention génocidaire qui animait les autres membres des deux entreprises criminelles communes, notamment au sein de ses organes de sécurité et de renseignement, lesquels avaient apporté une forte contribution en vue de la réalisation de ces entreprises.
La Chambre, à la majorité des juges, le Juge Nyambe étant en désaccord, est parvenue à un certain nombre de constatations. Elle a estimé établi que, déjà en 1992, il existait aux plus hauts niveaux de la Republika Srpska une politique visant à chasser la population musulmane de Bosnie hors de la Bosnie-Herzégovine orientale. Cette politique a été réaffirmée dans la directive n° 7, prise en mars 1995 par le Président de la Republika Srpska, Radovan Karadžić, qui l’a rédigée avec l’aide de plusieurs directions de l’état-major principal de la VRS, notamment celle du renseignement et de la sécurité que dirigeait Zdravko Tolimir. Après la chute de Srebrenica le 11 juillet 1995 et la fuite de nombreux civils vers la base de l’ONU à Potočari, des membres des organes de sécurité placés sous l’autorité de Zdravko Tolimir ont discuté le 12 juillet d’un plan visant à tuer les hommes séparés de la foule à la base de l’ONU. La majorité, le Juge Nyambe étant en désaccord, a constaté que, en exécution de ce plan, au moins 1000 hommes et garçons avaient été détenus dans des conditions abominables et que certains d’entre eux avaient été physiquement maltraités avant d’être transportés en autocars à Bratunac. Ils y ont été rejoints, les 12 et 13 juillet, par des milliers d’autres hommes musulmans de Bosnie qui se trouvaient dans la colonne se dirigeant de Srebrenica à Tuzla et avaient été capturés par les forces serbes de Bosnie ou s’étaient rendus à elles.
La majorité, le Juge Nyambe étant en désaccord, a conclu que, à partir du 13 juillet et jusqu’en août 1995, au moins 4 970 hommes musulmans de l’enclave de Srebrenica avaient été exécutés. La Chambre, à la majorités des juges, a souligné qu’il ne s’agissait là que d’une évaluation prudente d’un nombre minimum de victimes. Elle a conclu, le Juge Nyambe étant en désaccord, que le nombre total des hommes musulmans de Bosnie de Srebrenica ayant été exécutés était d’au moins 6 000.
« La souffrance de ces hommes dans les moments qui ont précédé leur mort a dû être insoutenable. À de nombreuses reprises, ceux qui attendaient d’être exécutés ont vu ceux qui les précédaient se faire abattre. Les rares survivants qui ont pu témoigner devant la Chambre ont fait des récits poignants de ce qu’ils avaient dû endurer », a déclaré la Chambre. Elle a souligné « l’ampleur considérable, l’extrême intensité et l’effet dévastateur » des crimes. La majorité, le juge Nyambe étant en désaccord, a également pris en compte « les souffrances extrêmes des quelque 30 000 à 35 000 femmes et enfants transférés de force hors des enclaves et leur incapacité depuis lors à mener une existence normale et constructive ».
L’acte d’accusation initialement établi contre Zdravko Tolimir a été confirmé le 10 février 2005 et rendu public le 25 février 2005. L’Accusé a été arrêté le 31 mai 2007 et placé sous la garde du Tribunal le 1er juin 2007. Le procès s’est ouvert le 26 février 2010.
La présente affaire est l’une des douze au Tribunal qui concernent un large éventail de crimes commis par les forces serbes de Bosnie contre les Musulmans de Bosnie, en juillet 1995 pendant et après la chute des zones alors protégées par l’ONU à Srebrenica et à Žepa. Six de ces affaires sont closes.
Depuis sa création, le Tribunal a mis en accusation 161 personnes pour des violations graves du droit humanitaire perpétrées sur le territoire de l’ex-Yougoslavie entre 1991 et 2001. Les procédures à l’encontre de 130 d’entres sont closes.
Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie
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