La Chambre d’appel a confirmé aujourd’hui les déclarations de culpabilité prononcées contre Mićo Stanišić, ancien Ministre de l’intérieur de la Republika Srpska, et Stojan Župljanin, ancien Chef du centre régional des services de sécurité de Banja Luka (Bosnie‑Herzégovine). La Chambre d’appel a confirmé que Mićo Stanišić et Stojan Župljanin étaient pénalement responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité commis en Bosnie‑Herzégovine en 1992, respectivement dans 20 et 8 municipalités. Les juges ont confirmé les peines de 22 ans d’emprisonnement imposées aux deux accusés.
La Chambre d’appel a rejeté tous les moyens d’appel soulevés par Mićo Stanišić et Stojan Župljanin. Elle a confirmé les déclarations de culpabilité prononcées contre eux pour avoir commis, en raison de leur participation à une entreprise criminelle commune, des persécutions constitutives d’un crime contre l’humanité et des meurtres et des tortures constitutifs de violations des lois ou coutumes de la guerre. La Chambre d’appel a également confirmé les déclarations de culpabilité prononcées contre Stojan Župljanin pour extermination du fait de sa participation à une entreprise criminelle commune, et pour avoir ordonné des persécutions ayant pris la forme du pillage de biens, constitutives de crimes contre l’humanité.
Mićo Stanišić et Stojan Župljanin ont tous deux fait valoir, dans leurs moyens d’appel, que la participation du Juge Frederik Harhoff au procès avait porté atteinte à leur droit d’être jugés en toute équité. La Chambre d’appel a rejeté leurs arguments et conclu que la récusation du Juge Harhoff dans l’affaire Šešelj n’entachait pas nécessairement son rôle dans d’autres affaires. Les juges ont en outre conclu que les Appelants « n’[avaient] pas démontré qu’un observateur raisonnable et dûment informé [aurait pu] conclure à un quelconque parti pris du Juge Harhoff en l’espèce ».
Mićo Stanišić a en outre fait grief à la Chambre de première instance de ne pas avoir motivé sa décision sur la question de savoir comment ses actes et son comportement avaient contribué à la réalisation de l’entreprise criminelle commune et si sa contribution à cette entreprise criminelle commune avait été importante ou non. Reconnaissant le défaut de motivation sur ces points, la Chambre d’appel a apprécié elle-même les éléments pertinents. La Chambre d’appel a conclu que les constatations de la Chambre de première instance — à l’exception de celles qu’elle a jugées erronées — ainsi que les éléments de preuve pertinents sur lesquels la Chambre de première instance s’est fondée permettaient de conclure au-delà de tout doute raisonnable que Mićo Stanišić avait contribué de manière importante à l’entreprise criminelle commune.
La Chambre d’appel a également confirmé la conclusion de la Chambre de première instance selon laquelle Stojan Župljanin avait contribué de manière importante à l’entreprise criminelle commune.
Sur la question de savoir si Mićo Stanišić et Stojan Župljanin étaient animés de l’intention requise pour voir leur responsabilité engagée pour participation à une entreprise criminelle commune, la Chambre d’appel a conclu que la Chambre de première instance avait commis certaines erreurs de fait à l’égard des deux Appelants. Toutefois, sur la base des autres éléments, la Chambre d’appel a conclu que ces erreurs étaient sans effet sur la conclusion de la Chambre de première instance selon laquelle Mićo Stanišić et Stojan Župljanin étaient animés de l’intention requise.
Stojan Župljanin a également attaqué la déclaration de culpabilité prononcée contre lui pour extermination constitutive de crime contre l’humanité. S’agissant des faits au cours desquels 20 personnes détenues sont mortes durant leur transfert au camp de détention de Manjača, la Chambre d’appel a conclu que la Chambre de première instance n’avait pas motivé sa décision en ne tirant pas la conclusion nécessaire sur l’intention qui animait les auteurs principaux. Cependant, après avoir apprécié les constatations de la Chambre de première instance et les éléments de preuve pertinents, la Chambre d’appel a conclu que l’erreur commise par la Chambre de première instance n’invalidait pas le Jugement.
La Chambre d’appel a accueilli le deuxième moyen d’appel de l’Accusation, qui faisait valoir que la Chambre de première instance avait commis une erreur de droit en ne prononçant pas de déclarations de culpabilité pour assassinat, torture, expulsion et autres actes inhumains (transfert forcé) constitutifs de crimes contre l’humanité en sus des déclarations de culpabilité prononcées pour persécutions constitutives de crime contre l’humanité. Ce faisant, la Chambre d’appel a renvoyé à la jurisprudence bien établie selon laquelle il est possible de prononcer cumulativement des déclarations de culpabilité pour persécutions et pour d’autres crimes contre l’humanité à raison du même comportement. La Chambre d’appel a toutefois décidé de ne pas prononcer de nouvelles déclarations de culpabilité.
Mićo Stanišić et Stojan Župljanin ont été mis en accusation par le Tribunal respectivement en 2005 et 1999. En septembre 2008, la Chambre chargée de la mise en état a fait droit à une demande de jonction des deux affaires. Le procès, ouvert le 14 septembre 2009, s’est achevé le 1er juin 2012. Le Jugement a été rendu le 27 mars 2013 et l’Accusation et la Défense ont déposé leurs actes d’appel le 13 mai 2013. Le procès en appel a eu lieu le 16 décembre 2015.
La Chambre d’appel était composée des Juges Carmel Agius, Président, Liu Daqun, Christoph Flügge, Fausto Pocar et Koffi Kumelio A. Afanđe. Les Juges Liu et Afanđe ont joint une opinion individuelle.
Depuis sa création, le Tribunal a mis en accusation 161 personnes pour des violations graves du droit humanitaire commises sur le territoire de l’ex‑Yougoslavie depuis 1991. Les procédures à l’encontre de 153 d’entre elles sont closes. Des procédures sont en cours concernant huit personnes.